Religion et société au temps des Lumières: l'exemple des religieuses de la Congrégation de Notre-Dame à Paris( Télécharger le fichier original )par Caroline Cornu Université Paris Nanterre - Master 2 Sciences humaines et sociales, mention Histoire, parcours Histoire des civilisations méditerranéennes, européennes et moyen-orientale 2018 |
ConclusionCette étude menée à partir des archives du couvent de la Congrégation de Notre-Dame à Paris avait pour ambition d'écrire une histoire de ce couvent au XVIIIe siècle. L'analyse s'est tout d'abord intéressée à la place du couvent de la Congrégation de Notre-Dame dans la société parisienne à travers le recrutement des religieuses, grâce notamment aux contrats de professions. Le recrutement de ce monastère semble posséder de nombreuses caractéristiques communes à d'autres établissements religieux. En revanche, à l'inverse de nombreux couvents, la Congrégation de Notre-Dame à Paris parvient à stabiliser globalement son effectif durant le XVIIIe siècle grâce à la vitalité de son recrutement et malgré un taux d'échec important au noviciat. L'effectif ne fléchit qu'à partir du milieu années 1780. Cela constitue une originalité à une époque de déclin global pour les établissements religieux, notamment à partir du milieu du siècle, et cela contribue donc à nuancer la description du recrutement des couvents de femmes au XVIIIe siècle. Cette stabilité témoigne de l'attractivité de ce monastère pour les familles et les femmes de la bourgeoisie, y compris de l'élite bourgeoise comme les échevins et l'élite fortunée pouvant se permettre des dots élevées qui continuent à y placer leurs filles durant toute la période : il ne semble pas y avoir de déclassement du recrutement afin d'assurer la survie de la communauté. La rareté des témoignages ne permet pas de reconstituer facilement l'histoire interne du couvent au XVIIIe siècle. Cependant, des documents d'archive tels que les registres des élections en rendent possible une approche. Ils témoignent d'une vie démocratique où la naissance et la fortune semblent avoir une moindre importance par rapport à l'expérience.et la formation de la religieuse avant d'accéder aux plus hautes charges au sein du couvent ainsi et où l'expérience des anciennes supérieures profite à cette formation. Ces registres permettent également de suivre l'impact des conflits du siècles dans la clôture et notamment celui du jansénisme au travers des votes obtenus par une des religieuses connue pour son attachement à cette cause. Cela permet de situer ce monastère parmi les couvents peu touchés par la crise janséniste mais cela met quand même en évidence l'influence modérée de ce mouvement au moment de l'Appel et des refus de sacrements. Si cette religieuse janséniste a faillit se voir privée des derniers sacrements et de sépulture en terre bénite, cette procédure n'a pas aboutie et le couvent, ne semble pas avoir connu d'exils. Cela démontre aussi une porosité de la clôture aux idées de leur temps. Avant 1789, les documents permettent essentiellement d'écrire une histoire collective de la Congrégation de Notre-Dame. L'écriture d'histoires individuelles des religieuses du couvent est freinée par le manque de témoignages et la difficulté à reconstituer les origines familiales de ces femmes. En revanche, la période révolutionnaire semble mettre l'accent sur les choix individuels de ces femmes. Tout d'abord, il est question du choix de chacune d'entre elles de rester ou plus rarement de quitter le cloître. A partir de 1792 et la fermeture des couvents, les religieuses sortent de leur monastère et les sources permettant de suivre certains parcours mais de nombreuses professes disparaissent des archives. Certaines choisissent de rester ensemble malgré l'interdiction des rassemblements de religieuses et paradoxalement, cette fois l'histoire collective de ces femmes permet de suivre leurs parcours individuels puisque le Tribunal révolutionnaire donne même la parole à trois d'entre elles ce qui constitue le seul véritable témoignage de ces femmes. La persistance de vocations avant la Révolution et de la vie en communauté après 1792 témoignent de la persistance de l'attractivité de la vie conventuelle pour ces femmes et leurs familles. Cela peut contribuer à nuancer l'idée de déchristianisation progressive ou de détachement de la religion de la société au siècle des Lumières. D'autre part, si cette étude ne permet pas d'identifier le couvent de la Congrégation de Notre-Dame comme un couvent plutôt janséniste, elle ne permet pas non plus de l'identifier de façon certaine comme lié au milieu anticlérical, au milieu conformiste ou au milieu dévot. Le mariage de l'ancienne pensionnaire Henriette Cannet avec Pierre-François Muyart de Vouglans273(*), membre du Conseil supérieur sous Maupeou et celui de son amie Manon Phlipon avec Jean-Marie Roland de la Platière, inspecteur des manufactures, pourraient cependant orienter vers le milieu antiparlementaire. * 273 A.N., MC/ET/XLVI/491, 22 novembre 1783, mariage, Pierre-François Muyart, chevalier seigneur de Vouglans et Chauciat et Marie-Henriette Cannet. |
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