Essai critique de la nature juridique. Justice-paix-travail en droit positif congolais.par Michel Ntumba mpoyi Université de Lubumbashi - Licence en Droit public 2019 |
§2. LA PAIXNous allons examiner la naissance de la paix (A), et l'évolution de la paix (B). A. Naissance de la paixGeorges Scelle a qualifié la période qui s'étendait des Conférences de la Haye de 1899 et de 1907 à la fin de la première guerre mondiale de période proprement « révolutionnaire ». C'est que s'accomplissent à ce moment les premiers essais de la constitutionnalisation de la société internationale. A cette époque, les gouvernants prennent acte de l'échec de la politique de l'équilibre. Il semble impossible de fonder une paix durable sur des structures et des rapports de puissance en pleine mutation. Les Conférences de la Haye sont, d'une certaine manière, le constat d'un échec, car elles traduisent l'existence d'une véritable paix armée, qui finira par aboutir au conflit généralisé. L'honneur de celui-ci, l'idéalisme des dirigeants en tête desquels WOODROW Wilson aboutit à l'essai de la Société des Nations. On voit à quel point la figure du contrat social est encore présente chez ces dirigeants encore tout empreints de la philosophie du XVIIIe siècle : pour eux, en effet, l'état de la nature dans lequel se trouvent les Etats est la véritable cause des guerres. Il paraît dès lors évident que la paix et la sécurité c'est-à-dire une paix stable, permanente et perpétuelle passe par une constitutionnalisation de la société internationale, avec la création d'un pouvoir centralisé de contrainte : ce stato-morphisme découle naturellement de la vision de l'Etat comme personne juridique. 43(*) La S.D.N. reste toutefois une institution profondément contradictoire. L'idéalisme Wilsonien trouvait rapidement ses limites dès lors qu'étaient en cause les intérêts du monde occidental et en particulier des Etats-Unis : ainsi, Wilson s'opposa personnellement à l'insertion d'une clause, proposée par le Japon, mentionnant la nécessité d'assurer une certaine égalité de traitement entre nationaux de tous les pays. Il s'agissait, en réalité, pour le leader de l'époque des nations non-blanche, de revendiquer la proclamation de l'égalité des races, principe qui, pour la plupart des dirigeants blancs de l'époque était non seulement scientifiquement erroné, mais également politiquement explosif, deux raisons suffisantes pour en refuser l'insertion dans le texte du Pacte. Dans ce contexte, l'idée même de droits de l'Homme apparaissait dangereuse et fut laissée de côté. La S.D.N. laissait donc subsister l'ambiguïté foncière du droit international des « nations civilisées », prétendant à l'universalité, mais cantonnant en réalité son champ d'application aux Etats européens et justifiant par ailleurs l'asservissement des autres peuples.44(*) * 43 DE FROUVILLE.O, une conception démocratique du droit international, Open Edition, revue européenne des sciences sociales, Librairie Droz, Paris, 2001, pp.134-135. * 44 Ibidem. |
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