2019-2020
|
UNIVERSITE KOFI ANNAN DE GUINEE
|
MASTER DROIT DES AFFAIRES CONCENTRATION : DROIT DE
L'ENTREPRISE
THEME : L'APPLICATION DES REGLES RELATIVES A LA SANTE ET A LA
SECURITE AU TRAVAIL
Préparé et présenté par
BERETE SEKOU AMADOU
Sous la direction de
Dr KOUROUMA MOUSSA FANTA
2019-2020
|
UNIVERSITE KOFI ANNAN DE GUINEE
|
MASTER DROIT DES AFFAIRES CONCENTRATION : DROIT DE
L'ENTREPRISE
THEME : L'APPLICATION DES REGLES RELATIVES A LA SANTE ET A LA
SECURITE AU TRAVAIL
Préparé et présenté par
BERETE SEKOU AMADOU
Sous la direction de
Dr KOUROUMA MOUSSA FANTA
AVERTISSEMENT
L'université Kofi Annan de Guinée
n'entend donner ni approbation ni improbation aux idées émises
dans le présent mémoire. Ces idées doivent être
considérées comme propres à son auteur.
REMERCIEMENT
Au bon DIEU, merci de m'avoir donné la santé et
le nécessaire pour réaliser ce travail.
A mon Directeur de mémoire, Dr Kourouma Moussa Fanta,
ma profonde gratitude pour sa disponibilité, son encadrement, ses
conseils et son orientation pour la réalisation de ce mémoire ;
Merci du fond du coeur.
Au corps professoral, autre personnel de l'université,
à mes camarades de classe, certes vos contributions n'ont pas
été les mêmes pour l'acquisition de ce diplôme, mais
je vous dis merci à tous, grâce à vous, j'ai pu donner le
meilleur de moi-même pour obtenir ce diplôme.
Aux entités qui m'ont accueilli dans leur enceinte,
précisément le Service National de la Médecine du Travail,
l'Inspection Générale du Travail, la Guinéenne de
l'Industrie etc... merci pour votre riche contribution pour la
réalisation de ce travail.
A toute ma famille, mes ami(e)s en général et
très particulièrement à mon très cher papa Yaya
Bérété et à ma très chère maman
Kadiatou Keita, je pense que le mot merci est anodin quand il s'agit de vous
remercier ; et j'ai donc pas les mots.
DEDICACE
Je dédie ce mémoire à ma tendre
grand-mère paternelle Hadja Fanta Keita qui a tiré sa
révérence le 30 SEPTEMBRE 2011, elle n'est pas que ma
grand-mère, en elle, je trouvais une partie de ma mère et de mon
père car elle a effectivement joué leur rôle durant de
longues années pendant que mes deux parents vivaient à
l'étranger. Je prie pour le repos éternel de son âme et que
la terre de la Guinée lui soit légère.
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE : LE CADRE LEGAL DE L'APPLICATION DES REGLES DE
SANTE ET DE SECURITE
AU TRAVAIL 3
Chapitre 1 : Les obligations en matière de santé
et de sécurité au travail 4
Chapitre 2 : Le rôle de la médecine du travail en
matière de santé et de sécurité au travail 32
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE INSTITUTIONNEL DE L'APPLICATION DES
REGLES DE SANTE ET DE
SECURITE AU TRAVAIL 19
Chapitre 1 : Le rôle de l'inspection du travail en
matière de santé et de sécurité au travail 20
Chapitre 2 : Le rôle de la médecine du travail en
matière de santé et de sécurité au travail 32
CONCLUSION 39
LISTE DES ABBREVIATIONS UTILISEES
· B.I.T .Bureau International du Travail
· O.IT ..Organisation Internationale du Travail
· C.H.S.C.T .Comité d'Hygiène de
Sécurité et des Conditions de Travail
· S.A.G Société Aurifère de
Guinée
· G.I .Guinéenne de l'Industrie
· BONAGUI Boisson Non Alcoolisée de Guinée
· R.C.C.M Registre du Commerce et du Crédit
Mobilier
· C.N.S.S .. Caisse Nationale de Sécurité
Sociale
· AGUIPE Agence Guinéenne pour la Promotion de
l'Emploi
· ONFPP Office Nationale de Formation et de
Perfectionnement
Professionnel
1
INTRODUCTION GENERALE
Selon un rapport publié par le Bureau International du
Travail (B.I.T) de l'Organisation Internationale du Travail (O.I.T),
deux-millions deux-cent mille (2,2 millions) salariés à travers
le monde sont victimes d'un accident du travail ou d'une maladie
professionnelle dans le cadre de leur travail, entraînant leur mort soit
un ratio de cinq mille (5000) salariés par jour.
En Afrique, la santé et la sécurité des
salariés sont fortement menacées, ils sont dangereusement
exposés, ils sont 3 à 5 fois plus assurés d'être
victimes d'un accident de travail que les travailleurs des pays
industrialisés ; Cela est dû d'abord, au fait que dans les pays
industrialisés, les moyens de production vont de connivence avec leur
moyen économique et technique, ensuite, les technologies
dépassées et les industries jugées à haut risque
sont délocalisées en Afrique et parfois, les travailleurs dans
les industries de chez nous ne sont pas au même niveau de formation que
ceux des pays développés en ce qui concerne les pratiques
industrielles. Il est à rappeler que la Guinée n'est pas
épargnée par les réalités citées ci-haut et
va un peu plus loin, car certains cas d'accidents de travail et de maladies
professionnelles ne sont jusque maintenant pas déclarées dans
certaines entités.
Avant de définir l'expression `' Santé et
Sécurité au Travail», il conviendrait de définir
séparément la santé et la sécurité au
travail.
C'est l'article 3 de la convention n°155 sur la
santé et la sécurité des travailleurs de 1981 qui
définit la santé au travail, il stipule que : « Le terme
`'Santé'Ç en relation avec le travail, ne vise pas seulement
l'absence de maladie ou d'infirmité ; il inclut aussi les
éléments physiques et mentaux affectant la santé
directement liés à la sécurité et à
l'hygiène de travail ». En ce qui concerne la
sécurité au travail, elle est définie par la doctrine
comme « une démarche pluridisciplinaire qui vise à
réduire de façon drastique ou de supprimer les risques
d'accidents susceptibles de se produire lors de l'exercice d'une
activité professionnelle ».
Selon la série d'évaluation sur la santé
et la sécurité au travail OHSAS 18001, l'expression
`'santé et sécurité au travail» est «
l'ensemble des méthodes techniques visant à supprimer ou à
limiter les effets nuisibles des activités professionnelles sur la
santé physique et mentale des parties intéressées à
savoir les employés, le personnel détaché par un
fournisseur, les visiteurs et toute autre personne présente dans
l'enceinte de l'organisme) et sur son environnement » ; Quant au
droit de la santé et de la sécurité au travail, il a fait
l'objet de définition par le Professeur Philippe MALINGREY , selon lui :
« le droit de la santé et de la sécurité au
travail peut être défini comme l'ensemble des règles
juridiques visant à prévenir
2
les accidents et les problèmes de santé
causés par, reliés à ou survenant durant l'exercice d'un
emploi ».
Pour mieux comprendre et traiter la thématique sur
l'application des règles relatives à la santé et à
la sécurité dans les entreprises guinéennes, il convient
de se poser une série de question : quelle est la valeur exacte de
l'obligation de l'employeur en matière de santé et de
sécurité au travail et quelles peuvent être
l'étendue de leur responsabilité ? S'agissant du salarié,
l'étendue de ses obligations de sécurité est-elle
égale à celle des employeurs ? Qu'en est-il de la
responsabilité du salarié ? Quels sont les différents
organes qui interviennent en matière de santé et de
sécurité au travailet leurs rôles respectifs pour une
meilleure applicabilité de la législation du travail ?
Dans la réalisation de ce mémoire, en plus de
consulter les ouvrages écrit sur le droit du travail, nous nous sommes
rendus dans plusieurs entités dont les entreprises pour des
enquêtes et entretiens avec le personnel, l'inspection
générale du travail et le service national de la médecine
du travail pour toucher du doigt la réalité.
Ce présent travail s'articule sur l'employeur, le
salarié et les institutions chargées de veiller à la bonne
application de la législation du travail, à l'exclusion des
autres acteurs de l'entreprise.
Ainsi, cette étude nous permettra de comprendre en
premier lieu, l'aspect juridique de la santé et de la
sécurité au travail tout en démontrant l'étendue
des obligations de l'employeur et du salarié et les limites de leurs
responsabilités, en second lieu, elle nous permettra de comprendre les
différents rôles et la nature des interventions des acteurs
institutionnelles en matière de santé et de
sécurité au travail.
Pour une analyse détaillée de cette
thématique, nous traiterons le sujet sous deux angles : d'une part, le
cadre légal de l'application des règles de santé et de
sécurité au travail(Première Partie) et
d'autre part, le cadre institutionnel de l'application des règles de
santé et de sécurité au travail (Deuxième
Partie).
PREMIERE PARTIE : LE CADRE LEGAL DE L'APPLICATION DES
REGLES DE SANTE ET
DE SECURITE AU TRAVAIL
De par le passé et jusqu'à nos jours, les
différentes industries ont fait et continuent à faire des
merveilles dans nos sociétés.Cependant, force est de
reconnaître que ces merveilles ont été faites au prix de la
vie de milliers de personnes qui sontliées à ces industries par
un contrat de travail1. Certains de ces salariés ont
péri dans des carrières, mines, départs de feu dans les
installations,tandis qued'autres ont contracté des maladies
entraînant chez eux des incapacités de travail.
Les ressources humaines, reconnues comme les plus importantes
de toutes les autres ressources,ont fait,depuis un certain temps,l'objet de
plusieurs protections par l'organe régulateur international du droit du
travail qu'est l'organisation internationale du travail (OIT) et par plusieurs
textes au niveau interne.2
Le but recherché est d'avoir un monde de travail qui ne
fait pas de victime, ce qui semble quasiment impossible.C'est pourquoi il est
impératif d'assurer,dans la mesure du possible, la santé et la
sécurité des employés.
Il sera ainsi question d'analyser, dans le cadre de cette
partie de notre étude,les obligations de l'employeur et du
salarié(Chapitre 1), ainsi que de leurs
responsabilitésrespectivesen matière de santé et de
sécurité au travail (Chapitre 2).
3
1 Wikipédia,
catastrophe de Courrières qui a fait 1099 victimes.
2La constitution de Mars 2020
en ses articles 5, 8, et 21et le code du travail de 2014.
4
Chapitre 1 :Les obligations en matière de
santé et de sécurité au travail
Pour maîtriser les dangers en milieu de travail, la
culture de la santé et la sécurité doit être la
préoccupation majeure de tous les acteurs sociaux-professionnels. Pour
cela, ils doivent prendre les mesures adaptées et les mettre en
application telles qu'édictées par le législateur.
Il conviendraitainsi d'analyser en premier lieu les
obligations de l'employeur (Section 1)et,ensecond lieu,les
droits et obligations de sécurité du salarié
(Section 2).
Section 1 :Les obligations de l'employeur
En matière de santé et desécurité
au travail, plusieurs obligations pèsent sur l'employeur. Elles sont
diverses et très bien encadrées par le code du travail. Leur
inobservation entraîne généralement soit
l'incapacité momentanée du salarié,soit celle
définitive; dans le pire des cas,le non-respect des obligations chez
l'employeurpeut causer la mort du salarié.
Les obligations générales de l'employeur en
matière d'hygiène et de sécurité seront
examinées (Paragraphe 1), avant d'aborder son
obligationd'information et de formation à la sécurité
dusalarié(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les obligations générales de
l'employeur en matière d'hygiène et de sécurité
Tout d'abord, il est à noter que,contrairement à
l'ancien code du travail, celui en vigueur (code du travail de 2017)a
opéré un certain nombre de changementsauxobligations
pesant sur l'employeur, pour une meilleure protection des salariés en
matière de santé et de sécurité ; les obligations
de l'employeur se sont ainsidensifiées.
Aux termes de l'article 231-2 du code du travail
guinéen « Pour protéger la vie et la santé des
salariés, l'employeur est tenu de prendre toute les mesures utiles qui
sont adaptées aux conditions d'exploitation de l'entreprise. Il doit
notamment aménager les installations et régler la marche du
travail de manière à préserver le mieux possible les
salariés des accidents et des maladies.
Tous les établissements ou entreprises utilisant
régulièrement au moins 25 salariés doivent mettre en place
un comité de sécurité et santé. Ce comité a
pour mission d'étudier, d'élaborer et de veiller à la mise
en oeuvre des mesures de prévention et protection dans les domaines de
la sécurité et santé au travail.
5
Les chefs d'établissements, directeurs,
gérants ou préposés qui font exécuter des travaux
présentant des dangers particuliers pour la santé des
salariés sont tenus d'en mentionner la nature exacte dans une
déclaration qu'ils adressent à l'inspecteur du travail et au
médecin du travail. Ils sont responsables de l'application aux
salariés des mesures de protection prévues à cet effet
».
La lecture de cet article ne permet pas de cerner
concrètement ce que l'employeur doit faire. On se rend compte tout de
même après lecture du premier alinéa que le
législateur exige à l'employeur decréer les conditions
idéales d'exploitation de l'entreprise de manière à
préserver le mieux possible les salariés des accidents et des
maladies.Pour mieux comprendre la portée de ce texte, on peut se
référer à la jurisprudence française qui admet que
l'employeur est tenu à une obligation de sécurité de
résultat ; pour cela, il doit prendre toutes les mesures indispensables
dans le but d'assurer la sécurité et de préserver la
santé physique et mentale de ses salariés. L'obligation de
sécurité de résultat est définiecomme le fait pour
« l'employeur de prévenir, de former, d'informer et de mettre
en place une organisation et des moyens adaptés. Le résultat dont
il est question dans la notion d'obligation de résultat n'est pas
l'absence d'atteinte à la santé physique et mentale, mais
l'ensemble des mesures prises effectivement par l'employeur dont la
rationalité, la pertinence et l'adéquation pourront être
analysées et appréciées par le juge
»3.
C'est au milieu d'une « salve de 30 arrêt »,
dans 7 décisions du 28 février 2002que la chambre sociale de la
Cour de cassation française rendit l'attendu de principe suivant:
« en vertu du contrat de travail le liant à son salarié,
l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de résultat ,
notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées
par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés
par l'entreprise ; le manquement à cette obligation a le
caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L 452-1 du code
de la sécurité sociale française , lorsque l'employeur
avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était
exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures
nécessaires pour l'en préserver »4. Cette
série d'arrêts nous édifie dans la compréhension de
l'article 231 du code de travail cité ci-haut puisqu'elle clarifie les
obligations de l'employeur vis-à-vis des salariés en montrant le
fondement de l'obligation de sécurité de résultat,
à savoir la protection effective de la santé et de la
sécurité des travailleurs. La conséquence réelle de
la qualification d'obligation de résultat est que la
responsabilité de l'employeur est engagée de
3P.-Y VERKINDT, « Santé
au travail, l'ère de la maturité » Jurisprudence sociale
Lamy, n° 239, 1er sept. 2008
4 Cass. Chambre sociale, 28 février
2002, n° 00-11793
6
plein droit du seul fait du défaut d'exécution
de son obligation de sécurité de sorte que la charge de la preuve
reposant sur le salarié se trouve allégée ; il incombe
à l'employeur de prouver qu'il a pris toutes les mesures possibles
à l'effectivité de l'obligation de résultat.
Concernant toujours l'article 231-2 et suivant du code du
travail guinéen, il yest mentionné que tous les
établissements ou entreprises utilisant régulièrement 25
salariés doivent mettre en place un comité de
sécurité et santé. En raison de l'importance de ce
comité, le code du travail guinéenaurait dûparler de sa
composition, mais il reste muet sur la question,et il est à signaler que
la majeure partie des entreprises guinéennes n'a pas encore
institué ce comité exception faite des grandes entreprises
minières5, quelques industries de vente de matériaux
de construction et agro-alimentaires6 ; toutechose qui peut
expliquer en partie le défaut d'application des obligations de
l'employeur. En France, c'est L.4613-1 du code du travail explique la
composition du comité d'hygiène, de sécurité et des
conditions de travail (CHSCT) appelé comité de
sécurité en Guinéeen ces termes :« Le
comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de
travail comprend l'employeur et une délégation du personnel dont
les membres sont désignés, pour une durée qui prend fin
avec celle du mandat des membres élus du comité d'entreprise les
ayant désignés par un collège constitué par les
membres élus du comité d'entreprise et ses
délégués du personnel.
L'employeur transmet à l'inspecteur du travail le
procès-verbal de la réunion de ce collège »
De manière générale, on peut retenir que
les réalités dans les entreprises en Guinéeconcernant les
obligations de l'employeur sont loin d'être fidèles à la
législation guinéenne, en ce sens que nombreuses sont les
entreprises qui ne disposent pas de service sanitaire (de médecine du
travail) ;elles ne font pasfaireaux salariés la traditionnelle visite
médicale après chaque année civile,de même
qu'à la reprise des postes après une durée plus ou moins
longue et aussi à l'embauche, lesfuturs salariés ne font pas de
visite médicale comme indiqué dans le code du travail7
et comme ça se fait en France .
S'agissantdu contrôle de conformité des machines,
le code du travail dispose que« Les établissements et locaux
visés à l'article 211-2 du présent code doivent être
aménagés de manière à garantir la
sécurité des travailleurs.Les machines, mécanismes,
appareils de transmission, outils et engins mécaniques ou manuels,
doivent être installés et tenus dans les meilleures conditions
possibles de sécurité.Les moteurs et parties mouvantes des
machines
5S.A.G
6 G.I & BONAGUI
7 Art. 232.1,C. trav.
guinéen
7
doivent être isolés par des cloisons ou
barrières de protection.L'employeur ou son représentant doit
organiser le contrôle permanent de l'état des machines afin
d'assurer la protection des salariés ... ».8En
réalité, dans plusieurs entreprises, ce contrôle de
conformité n'estpas réalisé ou il est fait de façon
très partielle d'où le nombre élevé de cas
d'accidents de travail dû aux engins et aux installations des
entreprises9.
D'après nos constats réalisés pendant nos
visites dans les entreprises, de toutes les obligations de l'employeur, celles
qui sont les plus respectées sont les articles 231-11 et 231-12 du code
du travail guinéen qui stipulent successivement que«Les
établissements visés à l'article 2112 du présent
code doivent être tenus dans un état de propreté permanent
et présenter des conditions d'hygiène et de salubrité
nécessaire à la santé du personnel» et
« Les employeurs doivent mettre à la disposition du personnel,
en quantité suffisante, de l'eau potable. Sur avis du médecin du
travail, ils doivent mettre à la disposition des travailleurs d'autres
boissons appropriées non alcoolisées ». Les locaux des
établissements que nous avons visités10
étaientpropres ; les employeurs ont embauché des salariés
uniquement pour faire ce travailde sorte que l'environnement semblait
permettreaux employés de se donner à fond dans leur travail
quotidien. Il faudrait signaler aussi quela quasi-totalité de ces
entreprises donnent de l'eau minérale à leurs employés et
que ce sont généralement les grandes entreprises minières
et celles spécialisées dans la fabrication de boissons non
alcoolisées qui offrent, comme le suggère le code du
travail,d'autres boissons non alcoolisées en de l'eau.
En plus des obligations générales de l'employeur
en matière de santé et de sécurité au travail, il
existe aussi, à la charge de l'employeur, l'obligationd'information et
de formation à la sécurité à l'attention de ses
employés(Paragraphe 2).
Paragraphe 2: L'obligation d'information et de formation
à la sécurité de l'employeur
L'alinéa 3 de l'article 231-2 du code pénal
stipule « ... Les chefs d'établissements, directeurs,
gérants ou préposés qui font exécuter des travaux
présentant des dangers particuliers pour la santé des
salariés sont tenus d'en mentionner la nature exacte dans une
déclaration qu'ils adressent à l'inspecteur du travail et au
médecin du travail. Ils sont responsables de l'application aux
salariés des mesures de protection prévues à cet effet
» ; Après la lecture de cette disposition, on se rend compte que le
législateur met à la charge de l'employeur
8Art. 231-13, C. trav.
guinéen
912 cas d'accidents de
travail dans la section de Kissôssô de la GI et une vingtaine dans
la section de Kagbelen 10 G I &
BONAGUI
8
l'obligation d'information, celui-ci doit, dans une
déclaration qu'elle adressera à l'inspection du travail et
à la médecine du travail, décrire la nature exacte de ces
travaux et ces conséquences sur l'organisme humain. Contrairement
à la législation guinéenne, la législation
française est plus explicite sur les moyens d'information des
salariés. En effet, dans les entreprises qui emploient plus de vingt
salariés, les instructions doivent être mentionnées dans le
règlement intérieur11.Elles doivent
êtredélivrées en français ou par un traducteur au
cas où certains employés ne parlent pas français etelles
doivent êtreexprimées de façon que tous les salariés
les comprennent.
Parlant de l'obligation de formation à la
sécurité, l'employeur doit organiser des séminaires de
formation au bénéfice des salariés pour éviter le
plus possible les cas d'accidents de travail, c'est ce que nous dit le code du
travail en son article 231-6 « Tout chef d'établissement est
tenu d'organiser une formation pratique appropriée en matière de
sécurité, d'hygiène et de santé au travail au
bénéfice des travailleurs qu'il embauche, de ceux qui changent de
poste de travail ou de technique, et de ceux qui reprennent leur
activité après un arrêt de travail d'une durée de
plus de six mois. Cette formation doit être actualisée au profit
de l'ensemble du personnel en cas de changement de la législation ou de
la réglementation ». La formation doit avoir un
caractère pratique et très appropriée, elle doit
être centrée, entre autres,sur les conditions dans lesquelles le
travail est tenu, la démarche à suivre en cas d'accident de
travail et les conditions de circulation dans les établissements.
La responsabilité civile et pénale de
l'employeur peut être retenue par le juge en cas d'accident de travail
survenu du fait de l'inobservation de ces obligations.C'est ainsi que dans une
affaire12 oùun salarié, ripeur d'ordures
ménagères, a été heurté par une benne
à ordures au visage et à la tête,la Cour de cassation a
retenu la faute inexcusable de l'employeur, après avoir
caractérisé un lien de causalité entre le défaut de
formation pratique et appropriée et l'accident survenu, car
l'employé avait été affecté à un poste de
travail pour lequel il ne disposait d'aucune expérience et n'avait pas
bénéficié d'une formation appropriée et suffisante.
Les obligations en matière de la santé et de la
sécurité au travail sont à la fois à la charge de
l'employeur et des salariés.
Section 2 : Les droits et obligations de
sécurité du salarié
Le législateur accorde au salarié certains
droits pour sa santé et sa sécurité au travail
(Paragraphe 1) et le soumet à une obligation
générale de sécurité (Paragraphe
2).
11 L 1321-1 et L 4122-1 du c. trav. français
12Civ. 2ème,4 févr. 2010, n° 08-10.520.
9
Paragraphe 1 : Les droits du salarié en santé
et sécurité au travail
L'article 231-8 du code de travail guinéen stipule:
« Les inspecteurs du travail sont autorisés, sans mise en
demeure, à dresser immédiatement procès-verbal lorsque les
faits qu'ils constatent présentent un danger grave et imminent pour
l'intégrité physique des travailleurs.Dans ces cas, l'inspecteur
du travail peut ordonner des mesures immédiatement exécutoires
pour faire cesser le danger grave et imminent.L'employeur peut exercer un
recours contre la décision de l'inspecteur du travail devant la
juridiction chargée du travail qui doit statuer dans les trois jours de
sa saisine... » ; Cetexte ne reconnaît pas explicitement de
droit spécial au salarié quand bien même qu'il le
protège en octroyant le pouvoir d'arrêt de travail à
l'inspecteur du travail s'il constate des dangers graves et imminents pouvant
nuire au salarié. Le législateur français quant à
lui reconnaît au salarié un droit d'alerte et un droit de retrait.
Le droit d'alerte peut-être défini comme un droit reconnu au
salarié et à ses représentants d'informer ou d'alerter
leurs employeurs s'ils jugent une situation dangereuse pour leur propre
santé mais aussipour celle des autres salariés, et le droit de
retrait est une faculté permettant au salarié qui aurait
déclenché un droit d'alerte à se retirer de son poste de
travail et ce jusqu'à ce que le danger soit
écarté.Plusieurs dispositions du code de travail français
légitiment le droit de retrait : Il en est ainsi de l'article L 4131-1
:« Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute
situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle
présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé
ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les
systèmes de protection. Il peut se retirer d'une telle situation.
L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de
retrait de reprendre son activité dans une situation de travail
où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une
défectuosité du système de protection » et de
l'article L 4131-3 : « Aucune situation, aucune retenue de salaire ne
peut être prise à l'encontre d'un travailleur ou d'un groupe de
travailleurs qui se sont retirés d'une situation de travail où
persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une
défectuosité du système de protection ».
Soulignons que pour qu'un salarié active son droit de
retrait, il a l'obligation d'alerter son employeur, dans le cas contraire s'il
s'avère un lien de causalité entre son retrait et une mise en
danger d'un de ses collègues, sa responsabilité est d'office
engagée.
Si le droit de retrait est justifié, « Aucune
sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à
l'encontre d'un travailleur »13, et si le retrait est
injustifié, les effets sont plus ou
13Art. L 4131-3 c. trav. français.
10
moins graves. Le salarié s'expose tout d'abord à
une retenue de son salaire par l'employeur. C'est suivant cette logique que la
chambre criminelle de la Cour de cassation française retient
que« Lorsque les conditions du droit de retrait individuel ne sont pas
réunies, le salarié s'expose à une retenue sur salaire,
peu important qu'il reste à la disposition de l'employeur, que d'autre
part, l'employeur n'est pas tenu de saisir préalablement le juge sur
l'appréciation du bien-fondé de l'exercice du droit de retrait
par le salarié »14.
En matière de santé et de sécurité
au travail, le salarié n'a pas que les droits, il aune obligation
générale de sécurité (Paragraphe 2).
Paragraphe 2 : L'obligation générale de
sécurité du salarié
Pour éviter que sa responsabilité civile et (ou)
pénale ne soit engagée, le salarié est tenu obligé
de respecter les instructions qui lui sont données par son employeur en
matière de santé et sécurité au travail. Les
obligations du salarié en matière de respect des consignes de
sécurité sont édictées par l'article 231-3 du code
du travail guinéen, il dispose que « les salariés
doivent utiliser correctement les dispositifs de salubrité et de
sécurité et s'abstenir de les enlever, même avec
l'autorisation de l'employeur. Ils ne peuvent les modifier qu'avec
l'autorisation de l'employeur et à condition que cette modification
n'ait pas pour effet de les rendre inopérants
».Conformément à cette disposition, les travailleurs
doivent prendre soins autant de leur santé que de celle des autres
à travers leurs agissements. Sa responsabilité serait donc
engagée en cas de manquement à cette disposition qui provoquerait
un dommage à autrui.
En outre l'alinéa 3 de l'article 231-14 stipule
que« L'employeur a l'obligation de mettre à la disposition du
travailleur un équipement de protection personnel lorsque les mesures
collectives de prévention techniques sont insuffisantes. Tous les moyens
de protection doivent être fournis par l'employeur gratuitement ».
L'investissement dans les moyens de protection estainsiuniquement à
la charge de l'employeur qui veille strictement au respect strict de ses
consignes.
L'obligation de sécurité pèse sur toutes
les personnes qui travaillent sous les ordres d'un employeur, ils peuvent
être stagiaire, apprenti, cadre, non cadre...
A la lecture de l'article L 4122-1, on se rend compte que
l'obligation générale de sécurité du salarié
est l'opposé de celle de l'employeur, la première est une
obligation de moyen et la
14 Cass. Crim. 25 novembre 2008 n° 07-87650
11
dernière est une obligation de résultat.
L'obligation qui pèse sur le salarié est appréciée
selon ses moyens et sa formation.
Le salarié doit agir conformément auxinjonctions
de l'employeursous peine de s'exposer sa responsabilité. C'est ce
qu'illustre cet arrêt : « En n'utilisant pas le
matériel de sécurité mis à sa disposition et ce,
malgré les consignes générales données par
l'employeur en matière d'hygiène et de sécurité, le
salarié méconnaît délibérément ses
obligations. Pour les juges, l'absence de consignes particulières
d'utilisation des nacelles autoélévatrices ne dispense en aucun
cas l'intéressé de respecter les règles
élémentaires de sécurité alors qu'il se trouvait
à 10 mètres du sol »15.
Pour un environnement socio-professionnel avec moins
d'accidents, le législateur a mis à l'apanage des acteurs de
l'entreprise des obligations et en cas d'inobservation de ces obligations, les
responsabilités sont situées.
Chapitre 2 : Les responsabilités de l'employeur
et du salarié en matière de santé et
sécurité au travail
D'un côté, la loi met à la charge de
l'employeur une obligation générale de sécurité
visant la protection des salariés. Cette obligation patronale de
sécurité est mentionnée dans l'alinéa 1er de
l'article 231-2 du code du travail guinéen que« Pour
protéger la vie et la santé des salariés, l'employeur est
tenu de prendre toutes les mesures utiles qui sont adoptées aux
conditions d'exploitation de l'entreprise. Il doit notamment aménager
des installations et régler la marche du travail de manière
à préserver le mieux possible les salariés des accidents
et des maladies... ».
La responsabilité de l'employeur (Section 1) est
engagée en cas de violation de ces obligations. De l'autre, le
législateur reconnaît également au salarié une
obligation générale de sécurité. Il doit s'occuper
de sa propre santé et celle des personnes qu'ils rencontrent dans le
cadre de son activité professionnelle à savoir ses
collègues, les clients, les usagers...Le travailleur doit agir
conformément à sa formation, dans le cadre des injonctions du
patron et selon ses possibilités, ce qui indique que la
responsabilité du salarié peut être engagée (Section
2).
15CA Douai, 27 février 2004, numéro
?.
12
Section 1 :La responsabilité de l'employeuren
matière desanté et de sécurité au travail
Avec l'évolution de la législation en
santé et en sécurité au travail en ce sens que
l'obligation de sécurité au travail est devenue l'obligation
générale de sécurité, il est exigé à
l'employeur de répondre de tous les accidents et maladies survenus dans
son établissement ou liés à l'activité
professionnelle. Le code pénal, le code civil et le code du travail ont
prévu plusieurs règles dont l'inobservation entraîne la
responsabilité civile (Paragraphe 1) et la responsabilité
pénale (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La responsabilité civile de
l'employeur en santé et sécurité au travail
L'article 1098 du code civil guinéen dispose que
:« En vertu de ce qui précède, tout fait quelconque de
l'homme, délits ou quasi-délits, qui cause à autrui un
dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer » et le premier alinéa de l'article 1099 va
plus loin en disposant qu'« On n'est responsable non seulement du
dommage causé par son propre fait, sa négligence ou son
imprudence, mais aussi de celui causé par le fait des personnes dont on
doit répondre ». A la lecture de ces articles, on se rend
compte que la responsabilité civile de l'employeur est engagée
dès lors que les personnes qu'il emploie commettent un dommage à
autrui ou lorsque le dommage est causé à autrui de son propre
fait.La notion de faute inexcusable est éclaircie par une jurisprudence
française dite Amiante : « En vertu du
contrat de travail, l'employeur est tenu envers le salarié d'une
obligation de sécurité de résultat. Le manquement à
cette obligation prend le caractère d'une faute inexcusable dès
lors que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel
était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures
de prévention ou de protection nécessaire pour l'en
préserver »16.L'obligation de
sécurité étant une obligation de résultat pour
l'employeur, il doit mettre tout en oeuvre pour la protection effective de la
santé et la sécurité des travailleurs. La jurisprudence va
plus loin en disant que l'absence de dommage ne suffit pour que l'employeur
atteigne son obligation de résultat, il s'expose à des sanctions
si ses actes posés ou ses omissions exposent le salarié à
un risque. La preuve de la faute inexcusable doit être fournie par le
salarié, ce dernier doit prouver le manquement de l'employeur à
une de ses obligations. De façon exceptionnelle, elle peut-être
présumée selon l'article L 4131-4du code de travail
français qui dispose que « Le bénéfice de la
faute inexcusable de l'employeur prévue à l'article L 452-1 du
code de la sécurité sociale est de droit pour le ou les
travailleurs qui seraient victimes d'un accident du travail ou d'une maladie
professionnelle alors qu'eux-
16 Cass. Soc. 28 février 2002, n°
99-17.201 P
13
mêmes ou un représentant du personnel au
comité social et économique avaient signalé à
l'employeur le risque qui s'est matérialisé » et
l'article L 4154-3« La faute inexcusable de l'employeur prévue
à l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale est
présumée établie pour les salariés titulaires d'un
contrat de travail à durée déterminée, les
salariés temporaires et les stagiaires en entreprises victimes d'un
accident de travail ou d'une maladie professionnelle alors qu'affectés
à des postes de travail présentant des risques particuliers pour
leur santé ou leur sécurité ils n'auraient pas
bénéficié de la formation à la
sécurité renforcée prévue par l'article L 4154-2
». Pour que le qualificatif faute inexcusable soit retenu, il faut la
réunion de six critères : le caractère volontaire de
l'acte ou de l'omission, la gravité exceptionnelle de la faute, la
conscience du danger, l'absence de toute cause justificative, l'absence
d'intention de provoquer le dommage.
Bien que pas prévu dans la législation
guinéenne, le harcèlement moral peut-être un fondement
d'exonération de la responsabilité de l'employeur si celui-ci
prouve que dès la connaissance des faits constitutifs
d'harcèlement moral, il a agi immédiatement et de façon
réactive ; Il doit prouver aussi qu'il a mis en place toutes les mesures
nécessaires pour éviter la survenance des faits constitutifs de
harcèlement moral. Un arrêt de la cour de cassation opère
une évolution dans la jurisprudence : « Vu les articles L.
1152-1, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ; Attendu que l'employeur ne
méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre
les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et
protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment
en matière de harcèlement moral, l'employeur qui justifie avoir
pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L.
4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l'existence de
faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les
mesures immédiates propres à le faire cesser ...
»17. Cet attendu de principe vient en en contresensdu fameux
arrêt AIR France18.
En raison de la gravité de l'infraction commise par
l'employeur, sa responsabilité pénale peut-être
engagée.
Paragraphe 2 : La responsabilité pénale de
l'employeur en matière de santé et sécurité au
travail
Tout auteur, co-auteur et complice d'une infraction sera
recherchée qu'il ne soit personne physique ou morale conformément
aux dispositions du code pénal. Ici, le terme employeur désigne
à la fois la personne physique et la personne morale. En santé et
sécurité au travail, la
17 Cass,com. ou soc. 1er juin 2016, n°
1068
18 Cass. Soc. 25 nov. 2015, n°14-24444
14
responsabilité pénale de l'employeur est
engagée lorsque ses actions ou ses omissions vont à l'encontre
des valeurs sociales donc condamnées par les législations.
Pour qu'un acte soit qualifié d'infraction
pénale, il doit tout d'abord avoir une base législative
(prévu et condamné par la loi), il doit être
exécuté ou en début d'exécution (la
matérialité de l'acte), et l'agent pénal doit avoir
conscience de son acte (l'intentionnalité de l'acte). Il est à
signaler que certaines infractions en santé et en sécurité
au travail sont dépourvues de toutes intentions délictuelles
conformément à l'article 15 du code pénal guinéen
«Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le
commettre.
Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y'a
délit en cas de mise en danger délibérée de la
personne d'autrui.Il y'a également délit, lorsque la loi le
prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de
manquement à une obligation de prudence ou de sécurité
prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que
l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas
échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses
compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans
le cas prévu par l'alinéa qui précède, les
personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui
ont créé ou contribué à créer la situation
qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures
permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est
établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement
délibérée une obligation particulière de prudence
ou de sécurité prévue par la loiou le règlement,
soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui
à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne
pouvaient ignorer ... ».Cela signifie, quelque part, que le
salarié victime d'un accident de travail qui lui causerait une
interruption définitive de travail du fait que son employeur ne lui ait
pas offert des équipements de protection pourra faire condamner son
salarié.
L'article 293 du même code est plus explicite, il
stipule : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque
immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une
mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement
délibérée d'une obligation particulière de prudence
ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement
est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 1 an et d'une amende de 500.000
à 5.000.000 de francs guinéens ou de l'une de ces deux peines
seulement » ; A la lecture de ces articles combinés, on
comprend que les infractions qui y sont incriminées concerne l'homicide
involontaire, la mise en danger d'autrui et quand on ajoute les articles 298 et
299 successivement du code pénalque« Quiconque pouvant
empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou
15
pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre
l'intégrité corporelle de la personne s'abstient volontairement
de le faire, est puni d'un emprisonnement de 1 à 5 ans et d'une amende
de 1.000.0000 à 5.000.000 de francs guinéens. Est puni des
mêmes peines quiconque s'abstient volontairement de porter à une
personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les
tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en
provoquant un secours » et « Quiconque s'abstient
volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque
pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à
créer un danger pour la sécurité des personnes, est puni
d'un emprisonnement de 2 ans et d'une amende de 10.000.000 de francs
guinéens ».La non-assistance de personne en
dangerpeut-être retenue.
Quant aux articles 84 et 85 successivement du code
pénal, ils sont applicables uniquement aux employeurs (personnes
morales) responsables des infractions sanctionnées par des peines
criminelles et correctionnelles. Ils stipulent : « Lorsque la loi le
prévoit à l'encontre d'une personne morale, un crime ou un
délit peut être sanctionné d'une ou de plusieurs des peines
suivantes :
1) L'amende ;
2) La dissolution ;
3) L'interdiction à titre définitif ou pour une
durée de 5 ans au plus d'exercer directement ou indirectement une ou
plusieurs activités professionnelles ou sociales ;
4) Le placement pour une durée de 5 ans ou plus sous
surveillance judiciaire ;
5) La fermeture définitive ou pour une durée de
5 ans, des établissements ou de l'un ou de plusieurs des
établissements de l'entreprise ayantservi à commettre les faits
incriminés ;
6) L'exclusion des marchés publics à titre
définitif pour une durée de 5 ans au plus ;
7) La confiscation de la chose qui a servi ou était
destiné à commettre l'infraction ou la chose qui en est le
produit ;
8) L'affichage de la décision prononcée ou la
diffusion de celle-ci soit par la presse ou par tout autre moyen de
communication au public ou par voie électronique.
Toutefois, les peines définies aux points 2, 4 et 5 ne
sont pas applicables aux personnes morales de droit public dont la
responsabilité pénale est susceptible d'être engagée
etc... » Et « Le taux maximum de l'amende applicable aux personnes
morales est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes
physiques par la loi qui réprime l'infraction. Lorsqu'il s'agit d'un
crime pour lequel aucune peine d'amande est prévue à l'encontre
des personnes
16
physiques, l'amende encourue par les personnes morales ne peut
excéder 1.000.000.000 de francs guinéens ».
Dans la plupart des cas en santé et
sécurité au travail, c'est la responsabilité de
l'employeur qui est engagée mais il est à signaler que dans
certains cas, la responsabilité du salarié est aussi
engagée.
Section 2 : La responsabilité du salarié
en santé et sécurité au travail
La diligence, la prudence ... sont les obligations qui
pèsent sur le salarié dans sa mission d'obligation de
sécurité. En entreprise, le salarié a une obligation
d'obéissance à son employeur, une obligation de prendre soin des
engins et équipements de travail et une obligation d'alerte s'il
constate l'imminence d'un danger pouvant lui causer un dommage ou à un
de ses collègues. L'inobservation de cette obligation de
sécurité par le salarié expose le salarié à
l'engagement de sa responsabilité civile (Paragraphe 1) et de sa
responsabilité pénale (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La responsabilité civile du
salarié en santé et sécurité au travail
Quand le salarié failli aux règles
d'hygiènes et de sécurité au travail, il peut voir sa
responsabilité civile engagée sur le fondement de l'article 1098
du code civil guinéen qui stipule à cet effet qu':« En
vertu de ce qui précède, tout fait quelconque de l'homme,
délits ou quasi-délits, qui cause à autrui un dommage,
oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer ».
Cependant, la responsabilité du salarié peut
être déterminée en suivant deux angles : Le salarié
agissant de son propre gré donc n'ayant pas reçu de
délégation de pouvoirs et celui qui a reçu une
délégation de pouvoirs.
Le salarié n'ayant pas de délégation de
pouvoirs doit agir en fonction de ses moyens et de sa formation tout en
préservant sa santé et sasécurité et celle des
autres salariés. L'inobservation de son obligation de
sécurité l'expose à des sanctions. A titre d'exemple, un
salarié qui refuse de porter des équipements de
sécurité (même si c'est sa propre personne qu'il expose) et
un salarié technicien qui par ses agissements expose ses
collègues à un danger se verront sanctionner par leur employeur.
La nature de la sanction est disciplinaire et elle peut aller jusqu'au
licenciement pour faute grave.
17
L'employeur tenant compte du fardeau que le législateur
lui a fait porter en lui imposant une obligation de sécurité de
résultat, il veille à son tour au respect scrupuleux de
l'obligation de sécurité du salarié ; Le salarié
défaillant peut-être licencié19.
Toutefois, il est de plein droit du salarié de
contester un licenciement ou une mesure disciplinaire engagée à
son égard pour non-respect, de l'obligation de sécurité ;
c'est dans cette logique qu'une Cour d'appel
française20qualifie le licenciement de la psychologue
d'abusif pour avoir porté atteinte à l'image de la
pouponnière dans laquelle elle était affecté en
dénonçant à une association d'adoption les conditions dans
lesquelles les enfants étaient traité dépourvu de cause
réelle et sérieuse. La cour de cassation quant à elle a
rejeté purement et simplement le pourvoi en affirmant que les manoeuvres
qui ont été dévoilées par la psychologue
étaient inhumaines, elles portaient atteintes à la santé
physique et mentales des enfants.
Le salarié titulaire d'une délégation de
pouvoirs (si la délégation de pouvoir est effective et ne souffre
d'aucune ambigüité) est responsable civilement de ses actes
posés, c'est ce que l'arrêt Cousin21réaffirme :
«Le préposé condamné pénalement pour avoir
intentionnellement commis, fût-ce sur l'ordre du commettant, une
infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa
responsabilité civile à l'égard de celui-ci
».
L'imprudence et l'inattention exagérée du
salarié peut entraîner sa responsabilité pénale.
Paragraphe 2 : La responsabilité pénale du
salarié en matière de santé et de sécurité
au travail
Conformément au code pénal guinéen, la
responsabilité pénale du salarié défaillant
peut-être engagé pour des faits d'homicide involontaire (atteinte
involontaire à la vie d'autrui) et d'atteinte involontaire à
l'intégrité physique d'une personne etc... . Les articles 216,
250 et 253 énoncent successivement en ces termes : « Le fait de
causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions
prévues à l'article 15, par maladresse, imprudence, inattention,
négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de
sécurité imposée par la loi ou le règlement, la
mort d'autrui constitue un homicide involontaire puni de 1 à 5 ans
d'emprisonnement et de 1.000.000 à 10.000.000 de francs guinéens
d'amende. En cas de violation manifestement délibérée
d'une obligation particulière de prudence ou de
sécurité,
19Comme le témoignent ces quelques
décisions de justice (Soc. 5 mars 2008, Mme P c/ Etablissements Tissot,
pourvoi n°06-42.435 ; Cass. ch. Soc. 31 janv. 2012 n° 10-21472
....
20CA, où, 18 décembre 2OO2
21Cass. Ass. Plén. le 14 déc. 2001
n° 00-82.066
imposée par la loi ou le règlement, les
peines encourues sont portées à 5 ans d'emprisonnement et
à 10.000.000 de francs guinéens d'amende », « Le fait
de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions
prévues à l'article 15 par maladresse, imprudence, inattention,
négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de
sécurité imposée par la loi ou le règlement, une
incapacité totale de travail pendant plus de 3 mois est puni de 2 ans
d'emprisonnement et de 500.000 à 5.000.000 de francs guinéens
d'amende. En cas de violation manifestement délibérée
d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité
imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont
portées à 3 ans d'emprisonnement et à 10.000.000 de francs
guinéens d'amende » , « Le fait de causer à autrui, par
la violation manifestement délibérée d'une obligation
particulière de prudence ou de sécurité imposée par
la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail d'une
durée inférieure ou égale à 3 mois, est puni d'un
emprisonnement de 6 mois à 1 an et d'une amende de 500.000 à
2.000.000 de francs guinéens ».
A la lecture de ces dispositions, on constate que les
sanctionsqu'elles ont prévues (peine de prison et amende) varient en
fonction de la gravité des agissements du salarié.On peut
résumer cela par cette phrase : « Autant le salarié agit
avec moins de maladresse et d'imprudence autant sa sanction est moins lourde
»22et il est à signaler que la faute commise par le
salarié est appréciée en fonction de sa formationet de ses
aptitudes. C'est pourquoi l'employeur, pour s'exonérer de certaines
responsabilités, doit assurer la formation de ses salariés en
hygiène, santé et en sécurité.
18
22 S.A BERETE
19
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE INSTITUTIONNEL DE
L'APPLICATION DES REGLES DE SANTE ET DE SECURITE AU TRAVAIL
Pour une meilleure application de la législation du
travail, il était nécessaire de mettre en place des institutions
qui seront chargées de collaborer avec les acteurs internes des
entreprises. Ces institutions ont été prévues par le plus
haut organe chargé du travail qu'est l'organisation internationale du
travail (OIT) et elles sont également prévues dans l'ordre
interne des législations notamment dans le code du travail et dans
différents décrets.
Ces institutions mises en place ont un fondement légal
(prévues par le code du travail et les conventions de l'organisation
internationale du travail) et ont pour but de participer à l'application
de la politique nationale du travail mise en place par le gouvernement et
conformément aux législations en vigueurs. Elles sont entre autre
l'inspection du travail et la médecine du travail. Ces deux institutions
sont d'une importance incommensurable en matière de santé et de
sécurité au travail de ce fait, nous analyserons de façon
détaillée tout d'abord le
rôle de l'inspection du travail (Chapitre 1) puis celui
de la médecine du travail (Chapitre 2).
20
Chapitre 1 : Le rôle de l'inspection du travail
en matière de santé et de sécurité au travail
Selon l'article 513.1 du code du travail «
L'inspection du travail est un corps spécialisé de fonctionnaires
composé d'inspecteurs de travail, de médecins-inspecteurs, de
contrôleurs du travail et contrôleurs adjoints du travail. Le
service est placé sous l'autorité d'un Inspecteur
Général de Travail assisté d'un Inspecteur
Général Adjoint nommés par décret sur proposition
du Ministre en charge du travail » ; L'organisation Internationale du
Travail protège l'inspecteur du travail dans l'accomplissement de ses
missions, elle a prévu un armada d'articles dans la convention n°81
sur l'inspection du travail en 1947 et cette convention est rentrée en
vigueur en Guinée que le 26 Mars 1959. L'article 6 de cette convention
stipule que : « Le personnel de l'inspection sera composé de
fonctionnaires publics dont le statut et les conditions de service leur
assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent
indépendants de tout changement de gouvernement et de toute influence
extérieure indue ». De façon générale,
l'inspecteur du travail est chargé principalement de trois taches qui
sont les suivantes :
? Le conseil ;
? La conciliation ; ? Et le contrôle ;
Le code du travail en son article 513.7 nous dit que les
inspecteurs du travail ont aussi une mission d'information, il doit
éclairer les salariés ainsi que les employeurs de ses conseils.
Mais en matière de santé et sécurité au travail,
les taches classiques de l'inspecteur du travail se matérialisent par
les mises en demeure(Section 1) et les mesures
palliatives(Section 2).
Section 1 : Les mises en demeure
En fonction de la gravité des faits que constate
l'inspecteur du travail, il a l'option de choisir entre la mise en demeure et
d'autre sanction plus conséquente. S'il juge que la mise en demeure est
l'arme la mieux adaptée pour faire cesser un risque alors il l'annonce
à l'employeur. Elle est prévue par l'article 231.7 du code du
travail qui énonce : « En ce qui concerne l'application des
arrêtés ministériels visés à l'article 231.4
du présent titre, les inspecteurs du travail doivent mettre les chefs
d'établissements en demeure de se conformer aux dites prescriptions
avant de dresser le procès-verbal.
21
La mise en demeure datée et signée indique
les infractions constatée et fixe un délai à l'expiration
duquel ces infractions doivent avoir disparu. Ce délai ne peut en aucun
cas être inférieur à quatre jours ».
La mise en demeure est annoncée après que
l'inspecteur ait effectué un contrôle administratif
(Paragraphe 1) ou un contrôle technique
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le contrôle administratif
C'est un contrôle qui est en rapport avec
différents éléments en entreprise, il peut s'agir de la
forme de l'entreprise, de sa nationalité, de l'effectif engagé
etc... . L'inspecteur du travail est chargé de veiller à la bonne
application des dispositions du code du travail en santé et
sécurité au travail, des différents règlements pris
à cet effet et en cas d'inobservation à ces règles,
prendre des mesures nécessaires pour palier à cela ; C'est ce que
nous dit l'article 513.11 du code du travail en ces termes : « Les
inspecteurs de travail ont le pouvoir de constater les infractions à la
législations et à la réglementation du travail. A cette
fin, ils peuvent dresser des procès-verbaux qui font foi jusqu'à
preuve de contraire.
Les inspecteurs de travail peuvent ; s'ils l'estiment
opportun, donner des conseils ou adresser des avertissements avant de dresser
le procès-verbal ».
L'inspecteur du travail pendant son passage dans les
entreprises demande à l'employeur la forme juridique de l'entreprise,
constate si elle est immatriculée au registre du commerce et du
crédit mobilier (RCCM), si elle a un numéro d'immatriculation
employeur à la caisse nationale de sécurité sociale (CNSS)
et a l'agence guinéenne pour la promotion de l'emploi (AGUIPE), si elle
a un numéro d'enregistrement à l'office nationale de formation et
de perfectionnement professionnel (ONFPP), demande l'activité principale
et l'activité secondaire de l'entreprise etc... . Pour une meilleure
compréhension de la fonction administrative de l'inspecteur du travail,
il est nécessaire de reprendre l'article 513.9 du code du travail :
« Au cours de ces visites d'entreprises ou d'établissements,
les inspecteurs de travail peuvent :
a) Requérir la production de tous documents ou
registres dont la tenue est prescrite par les lois ou la réglementation
du travail ;
b) Interroger soit seul, soit en présence de
témoins, le personnel de l'entreprise, l'employeur et les
délégués syndicaux sur l'application des dispositions
qu'ils doivent surveiller ... ». L'OIT dans l'article 12 de la
convention n°81 sur l'inspection du travail va plus loin en
énonçant :
22
« Les inspecteurs du travail munis de pièces
justificatives de leurs fonctions seront autorisés .
·
(a) à pénétrer librement sans
avertissement préalable à toute heure du jour et de la nuit dans
tout établissement assujetti au contrôle de l'inspection
,
·
(b) à pénétrer de jour dans tous les
locaux qu'ils peuvent avoir un motif raisonnable de supposer être
assujettis au contrôle de l'inspection ,
·
(c) à procéder à tous examens,
contrôles ou enquêtes jugés nécessaires pour
s'assurer que les dispositions légales sont effectivement
observées et notamment .
·
(i) à interroger ,
· soit seuls, soit en
présence de témoins, l'employeur ou le
personnel de
l'entreprise sur toutes les matières relatives à l'application
des dispositions légales ,
·
(ii) à demander communication de tous livres,
registres et documents dont la
tenue est prescrite par la législation
relative aux conditions de travail, en vue d'en vérifier la
conformité avec les dispositions légales et de les copier ou d'en
établir les extraits ,
·
(iii) à exiger l'affichage des avis dont
l'apposition est prévue par les dispositions légales ...
».
Ces règlementations internationales et nationales
régissant le contrôle administratif confèrent de grands
pouvoirs et tous les moyens nécessaires aux inspecteurs du travail pour
qu'ils mènent à bien leur mission. Mais on a appris avec
stupéfaction que les inspecteurs sont contraints à des
restrictions dans l'exercice de leur fonction ; Certains chefs d'entreprises
jouissent de leur influence parce que n'étant pas en règles
vis-à-vis de la législation en vigueur pour faire déroger
leur entreprise au contrôle normal et les inspecteurs malgré leur
stabilité, indépendance à l'égard de tout
changement de gouvernement et d'influence extérieure reçoivent
des injonctions venant de leur département de tutelle afin de se plier
face aux manigances de ces chefs d'entreprise .
En outre, pour toujours permettre aux inspecteurs d'effectuer
leur mission de manière efficace, le législateur dans l'article
513-5 du code du travail stipule : « Les services de l'inspection du
travail doivent disposer en permanence des ressources humaines,
financières et matérielles nécessaires à l'exercice
de leur mandat. Le Ministère chargé du Travail assure aux agents
de l'inspection du travail le remboursement de tous frais de déplacement
et de toutes dépenses accessoires à l'exercice de leurs fonctions
» mais en réalité les dépenses engagées
par les agents de l'inspection du travail dans le cadre de leur mandat sont
assurées
23
par eux-mêmes, que ce soit les frais de
déplacement et mêmes les consommables qu'ils utilisent ... .
Pour mieux motiver sa décision de mise en demeure, les
agents de l'inspection du travail effectuent en plus de du contrôle
administratif un contrôle technique.
Paragraphe 2 : Le contrôle technique
Le contrôle technique est d'une importance capitale en
matière de santé et de sécurité au travail, s'il
est bien réalisé, il contribue énormément à
la prévention des risques et diminue de manière
considérable les cas d'accidents de travail et maladies
professionnelles. Ce contrôle s'effectue sur les matériels de
l'entreprise à savoir sur les engins roulants, les équipements de
toute sorte, les installations et surtout les échantillons de
matières utilisées par l'entité. D'abord ce moyen de
contrôle efficace est prévu par le quatrième point,
alinéa 3 de l'article 12 de la convention sur l'inspection du travail de
l'0IT : « Les inspecteurs du travail munis de pièces
justificatives de leurs fonctions seront autorisés .
·
? à prélever et à emporter aux fins
d'analyse des échantillons des matières et substances
utilisées ou manipulées, pourvu que l'employeur ou son
représentant soit averti que des matières ou substances ont
été prélevées et emportées à cette
fin ... » , il est ensuite prévu dans l'alinéa 3 de
l'article 513.9 du code du travail en raison de sa grande importance :
« Au cours de ces visites d'entreprises ou d'établissements,
les inspecteurs de travail peuvent .
·
? Prélever et emporter aux fins d'analyse, en
présence du chef d'entreprise ou du chef d'établissement ou de
son suppléant, des échantillons des matières et substances
utilisées ou manipulées ».
Le pouvoir accordé à l'inspecteur du travail
dans sa mission est tellement large qu'il peut provoquer des mesures
destinées à écarter le danger s'il a un motif raisonnable
de les considérer comme une menace à la santé et la
sécurité des travailleurs, c'est ce que nous laisse voir
l'article 513-10 du code du travail en ces termes : « Les inspecteurs
du travail peuvent provoquer les mesures destinées à
éliminer les défectuosités constatées dans une
installation, un aménagement, des méthodes de travail qu'ils
considèrent comme un menace à la santé ou à la
sécurité des travailleurs ».
Tout de même, l'inspecteur du travail pendant sa mission
et même après est tenu au secret professionnel, il ne doit pour
aucune raison divulguer les techniques et moyens utilisés par les
entreprises dans le cadre de leurs productions et commercialisations ; Ils
doivent également
24
préserver l'identité des personnes qui leurs
informent sur les conditions de vie atroces que vivent les salariés,
c'est ce que révèle l'article 513-12 du code du travail :
« Les inspecteurs et contrôleurs du travail sont astreints au secret
professionnel. Ils prêtent le serment de ne pas révéler,
même après avoir quitté le service, les secrets de
fabrication ou de commerce et les procédés d'exploitation dont
ils ont pris connaissance dans l'exercice de leur fonction.
A ce titre, ils sont également astreints à
la confidentialité concernant la source des plaintes leur signalant un
défaut dans l'installation ou une infraction aux dispositions
légales ainsi que concernant le lien éventuel entre une plainte
et la visite d'inspection ». Tout inspecteur qui viole ses
dispositions s'expose à une sanction disciplinaire et une poursuite de
la part de la justice.
In fine, il est aussi à noter que les inspecteurs et
contrôleurs du travail pour mieux exercer leur rôle sont interdits
d'être liés par les établissements sous leur
autorité (article 15, alinéa 1 de la convention sur l'inspection
du travail de l'OIT). Cette disposition est également reprise par le
code du travail en son article 513-13 : « Les inspecteurs et les
contrôleurs du travail n'ont pas le droit d'avoir un intérêt
direct quelconque, dans les entreprises placées sous leur contrôle
».
Ci-dessous, une fiche de contrôle administrative
et technique de l'inspection du travail
25
26
27
28
Cette fiche de contrôle à la fois technique et
administrative établit en se référant à la
convention internationale sur l'inspection du travail de l'OIT et le code du
travail est un outil efficace pour diminuer de façon drastique les cas
d'accidents de travail et prévenir les maladies professionnelles. Elle
prend en compte la quasi-totalité des domaines d'intervention de
l'entreprise, touche également l'essentielle des matières
premières utilisées dans l'entreprise pour ses activités
et un peu plus loin elle permet d'enquêter sur la
régularité de l'entreprise à l'égard des
entités avec lesquelles elle coopère en vue d'une meilleure
application de la législation du travail.
Cependant, dans la pratique, malgré le caractère
très complet de la fiche de contrôle, la réalité sur
le terrain explique le travail bâclé des agents de l'inspection du
travail. A Conakry, l'effectif bien que pas suffisant est de loin la
région qui possède le plus grand nombre d'agents de l'inspection
du travail, dans les autres villes du pays les agents sont répartis en
fonction de l'industrialisation des zones et une chose reste claire, l'effectif
des agents de l'inspection du travail est insignifiant face au nombre
d'entreprises implanté sur le sol
29
guinéen. Un inspecteur du travail nous a
déclaré avec amertume que ce fait est en partie causé par
la faible fréquence de recrutements et quelques-uns du peu d'inspecteurs
et de contrôleurs qui sont recrutés se livrent à des
manoeuvres frauduleuses pour changer de département en raison de la
précarité matérielle qui s'y trouve à l'Inspection
Générale du Travail et de l'inexistence d'un meilleur plan de
carrière.
L'inspecteur du travail en plus de son pouvoir de mise en
demeure, la loi lui confère un autre pouvoir plus poignant qu'il peut
prendre s'il le juge nécessaire, c'est le pouvoir d'arrêt de
travaux ou d'activités.
Section 2 : Les mesures palliatives
Les inspecteurs et les contrôleurs du travail, au cours
de leur visite dans les entreprises, s'ils constatent un
événement dangereux, peuventprendre des mesures directement
exécutoires. Ces mesures se matérialisent très
généralement par les mesures d'arrêts de travaux
(paragraphe 1) et le retrait immédiat des travailleurs mineurs et la
prononcée des amendes administratives contre l'employeur (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : Les mesures d'arrêts de travaux
L'article 13 de la convention n°81 sur l'inspection du
travail de 1947 édicte que :
« 1. Les inspecteurs du travail seront
autorisés à provoquer des mesures destinées à
éliminer les défectuosités constatées dans une
installation, un aménagement ou des méthodes de travail qu'ils
peuvent avoir un motif raisonnable de considérer comme une menace
à la santé ou à la sécurité des
travailleurs.
2. Afin d'être à même de provoquer ces
mesures, les inspecteurs auront le droit, sous réserve de tout recours
judiciaire ou administratif que pourrait prévoir la législation
nationale d'ordonner ou de faire ordonner :
(a) Que soient apportés aux installations, dans un
délai fixé, les modifications qui sont nécessaires pour
assurer l'application stricte des dispositions légales concernant la
santé et la sécurité des travailleurs ;
(b) Que des mesures immédiatement
exécutoires soient prises dans les cas de danger imminent pour la
santé et la sécurité des travailleurs.
3. Si la procédure fixée au paragraphe 2
n'est pas compatible avec la procédure administrative et judiciaire du
pays membre, les inspecteurs auront le droit de saisir
l'autorité
30
compétente pour qu'elle formule des injonctions ou
fasse prendre des mesures immédiatement exécutoires
».
Au niveau national, le législateur conforte les
inspecteurs et les contrôleurs du travail dans leur mission en se
référant au texte de la convention de l'OIT sur l'inspection du
travail cité ci-haut ; C'est le code du travail en son article 231.8 qui
édicte que : « Les inspecteurs du travail sont
autorisés, sans mise en demeure, à dresser immédiatement
procès-verbal lorsque les faits qu'ils constatent présentent un
danger grave et imminent pour l'intégrité physique des
travailleurs.
Dans ces cas, l'inspecteur du travail peut ordonner des
mesures immédiatement exécutoires pour faire cesser le danger
grave et imminent.
L'employeur peut exercer un recours contre la
décision de l'Inspecteur du Travail devant la juridiction chargée
du travail qui doit statuer dans les trois jours de sa saisine ...»
.
A la lecture de ces textes cumulés, on comprend
aisément que les agents de l'inspection du travail ont un pouvoir qui
leur permet d'arrêter une activité donnée dans une
entreprise ou sur un chantier, mais en réalité ils sont
confrontés à des pressions extérieures lorsqu'ils
décident de prendre de telles mesures ; Ce fût le cas d'un
inspecteur du travail (préférant resté dans l'anonymat)
qui nous a confié que lors de la rénovation du `'Pont 08
Novembre», il avait remarqué la présence d'une grue qu'il
avait déjà immobilisé car celui-ci avait été
la cause d'un grave accident de travail sur un autre chantier et sur le coup il
a demandé l'arrêt des travaux. Malheureusement, il a reçu
des appels des cadres du Ministère du Travail et du Ministère des
Travaux Publics lui donnant injonction tout en lui menaçant de laisser
l'engin continuer le travail.
Il est aussi à signaler que le législateur dans
ces textes cités ci-haut protège les employeurs d'un
éventuel abus de pouvoir de l'Inspecteur et Contrôleur du Travail
en l'accordant un droit de recours contre la décision prise par
l'Inspecteur du Travail devant la juridiction chargée du travail et il
est impératif que la juridiction saisie statue dans les 3 jours de sa
saisine . Au-delà du pouvoir d'arrêt de travaux
ou d'activités, les inspecteurs et
contrôleurs du travail
peuvent également ordonner le retrait des jeunes travailleurs
etprononcer des amendes administratives contre l'employeur.
31
Paragraphe 2:Le retrait immédiat des travailleurs
mineurs et les amendes administratives prises à l'encontre des
employeurs
Si les inspecteurs et les contrôleurs du travail
remarquent la présence d'un danger imminent pour les jeunes
travailleurs, il a le pouvoir de procéder à leur retrait
immédiat. Les mineurs font l'objet d'une protection très stricte
en raison de leurs vulnérabilités. Dans le code du travail
guinéen, l'article 231.20 stipule à cet effet que : « Les
chefs d'entreprises ou d'établissements doivent veiller au maintien des
moeurs et à l'observation de la décence publique, tout simplement
lorsqu'ils emploient des apprentis ou des travailleurs âgés de
moins de dix-huit ans ». Cette disposition est moins explicite, on peut
tout de même déduire qu'elle permet aux agents de l'Inspection du
Travail à prendre des mesures protectrices en faveur des mineurs parce
que, la décence publique, les moeurs ne peuvent admettre le mauvais
traitement et le travail avec un risque imminent de ces derniers. La
législation française est plus explicite en la matière ;
L'article L 4733-2 et l'article L 4733-3 édicte successivement que :
« Tout jeune travailleur de moins de dix-huit ans affecté à
un ou plusieurs travaux interdits prévus à l'article L 4153-8 est
retiré immédiatement de cette affectation lorsque l'agent de
contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L
81121 le constate » et que « Lorsque l'agent de contrôle de
l'inspection du travail mentionné à l'article L 8112-1 constate
que, par l'affectation à un ou plusieurs travaux
réglementés prévus à l'article L 4153-9 , un jeune
travailleur âgé de moins de dix-huit ans est placé dans une
situation l'exposant à un danger grave et imminent pour sa vie ou sa
santé, il procède à son retrait immédiat ».
Ces textes français nous permettent de comprendre aisément la
portée de la protection faite par le législateur en faveur des
salariés mineurs.
En ce qui concerne les amendes administratives prises pour
sanctionner les employeurs réfractaires, il est tout d'abord
nécessaire de signaler que le code du travail guinéen ne
prévoit aucune disposition en la matière, c'est donc la
législation française qui les prévoient. Elles sont prises
à l'encontre des employeurs qui violent la législation sur le
temps de repos des salariés, sur leur temps de travail et sur leur
salaire de base (SMIC)etc... .Le montant de ces amendes varie en fonction de la
gravité des manquements de l'employeur, du nombre de salarié
exposé aux risques et elles double si l'acte constitutif de mise en
danger est fait pour une deuxième fois. Le plafond de l'amende est de
2000 euros et cette somme est prononcée sans tenir compte des facteurs
cités ci-haut.
32
Chapitre 2 : Le rôle de la médecine du
travail en matière de santé et de sécurité au
travail
Selon l'article 232.2 du code du travail guinéen :
« la médecine du travail est assurée par un
personnel médical et paramédical titulaire
d'une décision d'agrément délivrée par le Ministre
chargé de la Santé et dont le rôle principalement
préventif consiste à éviter toute altération de la
santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant
les conditions d'hygiène au travail, les risques de contagion et
l'état de santé des travailleurs.
Chaque fois que cela est possible le médecin du
travail doit être un spécialiste ». Il est à
rappeler que même les entreprises qui emploient moins de 20
salariés sont contraintes d'installer des boites de secours et
éventuellement les services de santé au travail interentreprises.
Les services de médecine du travail s'ils sont bien institués et
disposent de tout leur pouvoir peuvent éviter assez de
dégâts. Pour mieux ressortir l'importance de la médecine du
travail en matière de santé et de sécurité au
travail, notre analyse se penchera sur la fonction exclusivement
préventive de la médecine du travail (Section 1) et sur le
fonctionnement de cette institution (Section 2).
Section 1 : La fonction exclusivement préventive
de la médecine du travail
Les services de médecine au travail sont institués
dans le but de prévenir les risques
auxquels les salariés sont exposés afin que
l'employeur propose un cadre de travail avec moins de dangers possible ; Pour
cela, le service de ma médecine du travail coopère avec
l'Inspection du Travail et l'employeur. Veiller sur la santé des
salariés (Paragraphe 1) et conseiller l'employeur (Paragraphe 2) sont la
matérialisation de la fonction exclusivement préventive de la
médecine du travail dans les entreprises.
Paragraphe 1 :Le service de la médecine du travail,
institution chargée de veiller sur la santé des
salariés
Que le service de la médecine du travail soit situé
dans les installations de l'entreprise ou à
proximité de celle-ci, il a pour mission principale de
veiller sur la santé physique et mentale
33
des travailleurs. Ces actes sont décrit par l'article 5
de la convention n° 161 sur les services de santé au travail, qui
stipule que : « Sans préjudice de la responsabilité de
chaque employeur à l'égard de la santé et de la
sécurité des travailleurs qu'il emploie, et en tenant compte de
la nécessite pour les travailleurs de participer en matière de
santé et de sécurité au travail, les services de
santé au travail doivent assurer celles des fonctions suivantes qui
seront adéquates et appropriées aux risques de l'entreprise pour
la santé au travail :
· Identifier et évaluer les risques d'atteinte
à la santé sur les lieux de travail ;
· Surveiller les facteurs du milieu de travail et
les pratiques de travail susceptibles d'affecter la santé des
travailleurs, y compris les installations sanitaires, les cantines et logement,
lorsque ces facilités sont fournies par l'employeur ;
· Participer à l'élaboration des
programmes d'amélioration des pratiques de travail ainsi qu'aux essais
et à l'évaluation des nouveaux équipements quant aux
aspects de santé ;
· Surveiller la santé des travailleurs en
relation avec le travail ;
· Promouvoir l'adaptation du travail aux
travailleurs ;
· Contribuer aux mesures de réadaptation
professionnelle ;
· Collaborer à la diffusion de l'information,
à la formation et à l'éducation dans les domaines de la
santé et de l'hygiène au travail, ainsi que de l'ergonomie
;
· Organiser les premiers secours d'urgence ;
· Participer à l'analyse des accidents de
travail et des maladies professionnelles ».
Après lecture du chapitre sur la médecine du
travail dans le code du travail guinéen, on comprend suffisamment que
certaines dispositions ressortent les différents actes que doivent poser
les services de la médecine du travail afin de veiller sur la
santé et la sécurité des salariés. C'est le cas de
l'article 232.1 qui édicte que : « ... La médecine du
travail est un service organisé sur les lieux du travail où
à proximité de ceux-ci destiné à :
a) Assurer la protection des travailleurs contre toute
atteinte à la santé pouvant résulter de leur travail ou
des conditions dans lesquelles celui-ci s'effectue ;
b) Contribuer à l'adaptation des postes, des
techniques et des rythmes de travail à la physiologie humaine ;
c)
34
Contribuer à l'établissement et au maintien
du plus haut degré possible de bien-être physique et mentale des
travailleurs ;
d) Contribuer à l'éducation sanitaire des
travailleurs pour un comportement conforme aux normes et aux consignes
d'hygiène du travail ...etc. »
Les textes cités ci-haut résument la voie
à suivre pour les services de la médecine du travail pour mener
à bien leur mission de veille à la santé et à la
sécurité des travailleurs, mais en réalité, dans la
plupart des entreprises guinéennes, exception faite de la CBG, de la SAG
...etc., il n'y existe pas de service de la médecine du travail
accrédité par le service national de la médecine du
travail, on y trouve que des infirmeries ou des hôpitaux situés
à l'intérieur ou à proximité de ces entreprises et
leur personnel soignant sont généralement des médecins
généralistes donc dans la plupart des cas ils ne peuvent mettre
en place des mesures préventives. Donc la tâche revient toujours
au Service National de la Médecine du Travail,de jouer son rôle de
prévention des risques en fonction des entreprises et en fonction des
activités qu'elles mènent. Compte tenu du nombre grandissant des
entreprises en Guinée et de l'effectif très minimes des
médecins du travail, le Service National de la Médecine du
Travail ne peut couvrir toutes les entreprises d'où le non-respect de la
législation à notre sens. En plus de ces faits, le Service
National de la Médecine du Travail est plus sollicité quand il
s'agit de faire passer des visites médicales aux salariés retenus
pour l'embauche et la traditionnelle visite médicale que doivent suivre
les salariés après chaque année civile. En ce qui concerne
l'adaptation des rythmes, des postes et des techniques de travail à la
physiologie humaine,un médecin du travail (avec plusieurs années
de service) m'a confié qu'il n'a jamais intervenu en ce sens et cela
illustre le défaut d'application de la législation.
En plus de veiller sur la santé et la
sécurité des travailleurs, les services de la médecine du
travail conseillent les employeurs sur les questions se rattachant à
l'hygiène, la santé et la sécurité au travail.
Paragraphe 2 : Le service de la médecine du travail,
institution chargée de conseiller l'employeur
A l'instar de la mission de veiller sur la santé et la
sécurité des travailleurs, celle de conseiller l'employeur est
aussi prévue par la convention n° 161 sur les services de
santé au travailde 1985en son article 5 qui stipule que : «
Sans préjudice de la responsabilité de chaque
35
employeur à l'égard de la santé et de
la sécurité des travailleurs qu'il emploie, et en tenant compte
de la nécessite pour les travailleurs de participer en matière de
santé et de sécurité au travail, les services de
santé au travail doivent assurer celles des fonctions suivantes qui
seront adéquates et appropriées aux risques de l'entreprise pour
la santé au travail :
? Donner des conseils sur la planification et
l'organisation du travail, y compris la conception des lieux de travail, sur le
choix, l'entretien et l'état des machines et des équipements
ainsi que sur les substances utilisées dans le travail ;
? Donner des conseils dans les domaines de la
santé, de la sécurité et de l'hygiène au travail,
de l'ergonomie ainsi qu'en matière d'équipements de protection
individuelle et collective ... etc. »
Elle est aussi prévue par l'article 232.7 du code de
travail guinéen qui stipule que : « Le médecin du
travail est habilité à proposer à l'employeur des mesures
individuelles telles que formation en matière de sécurité,
d'hygiène, de mutation ou de transformation de poste de travail,
justifiées par des conditions relatives notamment à l'âge,
à la résistance physique ou à l'état de
santé des travailleurs qui pour adapter le contenu des postes de travail
à l'état de santé du travailleur.
Le chef d'entreprise est tenu de prendre en
considération ces propositions et, en cas de refus, de faire
connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné
suite.
En cas de difficulté ou de désaccord, la
décision est prise par l'Inspecteur du travail après avis du
médecin inspecteur du travail ».
Le législateur, pour protéger les
salariés reconnaîtun pouvoir de conseiller aux services de
médecine du travail, ils imprègnent de ses conseils les
employeurs sur diverses questions en matière de santé et de
sécurité au travail et l'employeur est obligé de tenir
compte des recommandations faites par le médecin du travail. En cas de
discorde entre les deux parties suite aux propositions faites par les services
de médecines du travail, l'Inspecteur du Travail est compétent de
connaître le sujet faisant l'objet de discorde et prend une
décision après consultation du médecin inspecteur du
travail. En réalité, l'Inspection Générale du
Travail ne dispose pas de médecins inspecteurs du travail contrairement
à ce que prévoit le code du travail guinéen et cette
situation provoque un disfonctionnement dans la mission des services de
médecin du travail.
36
Pire, nombreux sont les employeurs guinéens qui n'ont
pas compris la notion de médecine du travail, ils ignorent le rôle
essentiellement préventif des services de médecine du travail.
Dans les faits, ils signent une convention de soins avec des structures
hospitalières, et en cas d'accidents de travail et de maladies
professionnelles, ils orientent les salariés victimes vers ces
structures hospitalières qui leurs prennent en charge. Ces employeurs au
lieu d'évoluer dans la logique préventive, évoluent dans
une logique curative. Un médecin du travail du Service National de la
Médecine du Travail nous a révélé que la mise en
place des procédures d'accréditations des unités de soins
constitués dans les entreprises est en cours afin que celles-ci puissent
évoluer dans la logique de la médecine préventive.
Nous pouvons déduire que les textes cités
ci-haut donnent une fonction essentiellement préventive aux services de
la médecine du travail tout en ayant des conditions de
fonctionnement.
Section 2 : Le fonctionnement des services de la
médecine du travail
Les services de lamédecine du travail pour fonctionner
normalement en évitant autant que possible l'altération de la
santé physique et mentale des travailleurs doivent travailler de
façon uniforme en ayant les mêmes moyens pour arriver aux
résultats recherchés d'où la nécessité d'une
politique de santé au travail (Paragraphe 1)et les médecins du
travail dans l'exercice de leur fonction dispose d'une indépendance
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La politique de santé au travail
L'organisation internationale du travail (OIT) dans sa
convention n° 161 de 1981 sur les services de santé au travail est
muette sur certaines questions concernant la médecine du travail, elle
donne le pouvoir aux Etats de définir ces points conformément
à leur réalité nationale. C'est dans ce cadre que
l'article 9 de cette convention stipule que :
« 1.Conformément à la
législation et à la pratique nationale, les services de
santé au travail devraient être multidisciplinaire. La composition
du personnel doit être déterminée en fonction de la nature
des tâches à exécuter.
2. Les services de santé au travail doivent
remplir leurs fonctions en collaboration avec les autres services de
l'entreprise.
3. Des mesures doivent être prises,
conformément à la législation et à la pratique
nationale, pour assurer une coopération et une coordination
adéquate entre les services de santé au
37
travail et, dans la mesure où cela est
approprié, avec les autres services concernés par l'octroi des
prestations de santé ».
Sur le plan national, c'est l'alinéa 2 de l'article
232.8 qui confère au Service National de la Médecine du Travail
(S.N.M.T) le pouvoir de mettre en place une politique de santé au
travail ; Il stipule que : « Le service national de la Médecine du
Travail, chargé entre autres de la mise en oeuvre de la politique de
santé au travail, assure la coordination et le contrôle technique
des services de médecine du travail. Il a le pouvoir d'ordonner des
injonctions aux employeurs, aux services médicaux et à leur
personnel pour le respect des dispositions relatives au présent chapitre
».
Une fois que la politique de santé au travail est
définie par le S.N.M.T, les services de médecine du travail
doivent agir conformément à cette politique. Malheureusement,
dans le cas de la Guinée, rares sont les entreprises qui suivent la
logique du code du travail dans l'institution des services de médecine
du travail, comme on l'a dit ci-haut, certaines ont institué que les
infirmeries ou hôpitaux tandis que d'autres ont
préféré la piste de convention avec des structures
hospitalières. Toutes les deux tendances sont en contradictions avec la
législation en vigueur, ce qui fait que malgré l'existence d'une
politique de santé au travail, son application reste à
désirer.
La politique de santé au travail, si elle est bien
suivie par les services de santé au travail, permet aux médecins
du travail de rester cadrer au cours de leurs différentes interventions
dans l'exercice de leur fonction en dépit de leur
indépendance.
Paragraphe 2 : L'indépendance des médecins du
travail
L'indépendance du médecin du travail au cours de
l'exercice de ses fonctions est consacrée par la convention n° 161
de 1985 sur les services de santé au travail de l'OIT, elle
édicte que : « Le personnel qui fournit des services en
matière de santé au travail doit jouir d'une indépendance
professionnelle complète à l'égard de l'employeur, des
travailleurs et de leurs représentants, lorsqu'il en existe, en relation
avec les fonctions stipulées à l'article 5 ». Dans le
code du travail guinéen, l'indépendance du personnel du service
de la médecine du travail n'est pas évoquée ; C'est
seulement le code de la déontologie médicale sur le plan national
qui consacre leur indépendance en son article 5, il stipule que :
« Le médecin ne peut aliéner son indépendance
professionnelle sous quelque forme que ce soit ».
38
La notion d'indépendance du personnel des services de
médecine du travail est plus explicite dans le code de la santé
publique française, c'est l'article R4127-95 qui le prévoit en
ces termes : « Le fait pour un médecin d'être lié
dans son exercice professionnel par un contrat ou un statut à une
administration, une collectivité ou tout autre organisme public ou
privé n'enlève rien à ses devoirs professionnels et en
particulier à ses obligations concernant le secret professionnel et
l'indépendance de ses décisions.
En aucune circonstance le médecin ne peut accepter
de limitation à son indépendance dans son exercice médical
de la part de l'entreprise ou de l'organisme qui l'emploie. Il doit toujours
agir, en priorité, dans l'intérêt de la santé
publique et dans l'intérêt des personnes et de leur
sécurité au sein des entreprises ou des collectivité
où il exerce ». Cettedisposition du code de
la santé publique française ressort aisément
l'indépendance du médecin vis-à-vis de son employeur. Elle
exhorte les médecins à agir de manière indépendante
et dans deux intérêts, celle de la santé publique et dans
l'intérêt de la santé des salariés et de leur
sécurité en entreprise.
Donc même si pas prévu par le code du travail
guinéen, retenons que les médecins du travail disposent d'une
indépendance de décision à l'égard de son employeur
dans un premier temps, ce qui fait que celui-ci ne peut rien l'imposer dans
l'exercice de ses fonctions, ils disposent de cette indépendance
à l'égard des salariés aussi ; Cette indépendance
est selon nous une véritable arme pour ses récipiendaires, car
elle leur permet de mener leurs activités sans pression aucune.
39
CONCLUSION
Dans un souci de protection de la main d'oeuvre ou des
salariés de façon générale dans les entreprises et
pour éviter que l'histoire se répète, car nombreux sont
les salariés, qui ont péri dans des conditions inhumaines,
honteuses, tragiques dans les différentes installations des entreprises,
à travers le monde en général et en Guinée en
particulier, il était nécessaire de mettre en place une
législation à laquelle tous les acteurs de l'entreprise
(employeur, salariés, le comité d'hygiène, les
délégués syndicaux ...) seront soumis.
Un constat général démontre que la
plupart des maladies professionnelles et accidents de travail entraînant
une incapacité temporaire, définitive voir même la mort des
salariés sont imputables aux employeurs et les causes qui sont souvent
retenues sont entre autres la négligence ou leur mauvaise foi parce
qu'ils sont tellement dans une logique de maximisation de profits qu'ils sont
peinés de prévoir une ligne dans leur budget destinée
à l'acquisition des bons équipements de protection et le
l'élimination des risques apparents dans l'entreprise. C'est en ce sens,
que le législateur a mis à la charge des employeurs, une
obligation de sécurité de résultat vis-à-vis de
leurs employés, ils sont ténus de protéger effectivement
la santé et la sécurité des travailleurs en s'appliquant
d'avantage à leur formation sur les questions sanitaires et
sécuritaires, en mettant en place des secours qui pourront intervenir en
cas d'accidents de travail, globalement en passant par des mesures techniques,
humaines et organisationnelles. A défaut de respecter son obligation de
sécurité de résultat, la responsabilité civile ou
pénale de l'employeur pourrait-être engagée l'employeur.
Il est à signaler que, certains accidents dans
l'entreprise sont du fait des salariés, c'est pourquoi le
législateur met à leur compte, une obligation
générale de sécurité afin qu'ils obéissent
aux consignes de sécurité qui leurs sont dictés par leurs
employeur. En cas de non-respect des instructions de sécurité par
le salarié, la sanction peut-être disciplinaire et elle peut
causer son licenciement ; Si ce non-respect cause un dommage à autrui,
sa responsabilité civile ou pénale peut-être
engagée.
Pour mieux protéger les salariés en appliquant
la législation en vigueur, des institutions ont été mises
en place ; C'est le cas de l'Inspection du Travail et de la Médecine du
travail. Ces institutions d'abord prévues par l'OIT et le code du
travail guinéen collaborent tout en respectant chacune son domaine de
compétence. L'Inspection du Travail, exerce un contrôle
40
administratif et technique sur l'employeur dans le but de
savoir si ce dernier agi en conformité avec les dispositions du code du
travail et des textes internationaux prévus en la matière. Quant
à la médecine du travail, elle a une mission essentiellement
préventive, sa mission se matérialise par la veille sur la
santé physique et mentale des salariés et sur les conseils qu'ils
donnent aux employeurs sur certaines questions, elle assure une intervention
coordonnée des services de la médecine du travail dans les
entreprises et dans l'exercice de ses fonctions elle bénéficie
d'une indépendance.
41
BIBLIOGRAPHIE
· Code du travail guinéen de 2014
· Code du travail français en vigueur
· Interview réalisé avec un inspecteur du
travail
· Interview réalisé avec un médecin du
travail
· Interview réalisé avec les membres du
comité d'hygiène de quelques entités
· Convention n° 161 sur les services de santé
au travail de 1985
· Convention n° 81 sur l'Inspection du Travail de
1947
· Le GRAND LIVRE DU DROIT DU TRAVAIL EN PRATIQUE,
28ème édition, de Michel Miné et Daniel
Marchand, EYROLLES
· Le Droit du Travail Nouveau de François DUQUESNE,
6ème édition, Gualino
· Droit Social, Manuel et applications,
8ème édition, sous la direction d'Alain Burlaud,
Marie-Paule Schneider, Maryse Ravat
42
ANNEXES
43
44
45
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE : LE CADRE LEGAL DE L'APPLICATION DES REGLES DE
SANTE ET DE
SECURITE AU TRAVAIL 3
Chapitre 1 : Les obligations en matière de santé et
de sécurité au travail 4
Section 1 : Les obligations de l'employeur 4
Paragraphe 1 : Les obligations générales de
l'employeur en matière d'hygiène et de
sécurité 4
46
Paragraphe 2 : L'obligation d'information et de formation
à la sécurité de l'employeur 7
Section 2 : Les droits et obligations de sécurité
du salarié 8
Paragraphe 1 : Les droits du salarié en santé et
sécurité au travail 9
Paragraphe 2 : L'obligation générale de
sécurité du salarié 10
Chapitre 2 : Les responsabilités de l'employeur et du
salarié en matière de santé et sécurité
au travail 11
Section 1 : La responsabilité de l'employeur en
matière de santé et de sécurité au travail
12
Paragraphe 1 : La responsabilité civile de l'employeur
en santé et sécurité au travail 12
Paragraphe 2 : La responsabilité pénale de
l'employeur en matière de santé et sécurité
au travail 13
Section 2 : La responsabilité du salarié en
santé et sécurité au travail 16
Paragraphe 1 : La responsabilité civile du
salarié en santé et sécurité au travail 16
Paragraphe 2 : La responsabilité pénale du
salarié en matière de santé et de
sécurité
au travail 17
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE INSTITUTIONNEL DE L'APPLICATION DES
REGLES DE SANTE ET
DE SECURITE AU TRAVAIL 19
Chapitre 1 : Le rôle de l'inspection du travail en
matière de santé et de sécurité au travail 20
Section 1 : Les mises en demeure 20
Paragraphe 1 : Le contrôle administratif 21
Paragraphe 2 : Le contrôle technique 23
Section 2 : Les mesures palliatives 29
Paragraphe 1 : Les mesures d'arrêts de travaux 29
Paragraphe 2 : Le retrait immédiat des travailleurs
mineurs et les amendes
administratives prises à l'encontre des employeurs 31
Chapitre 2 : Le rôle de la médecine du travail en
matière de santé et de sécurité au travail
32
47
Section 1 : La fonction exclusivement préventive de la
médecine du travail 32
Paragraphe 1 : Le service de la médecine du travail,
institution chargée de veiller sur la
santé des salariés 32
Paragraphe 2 : Le service de la médecine du travail,
institution chargée de conseiller
l'employeur 34
Section 2 : Le fonctionnement des services de la médecine
du travail 36
Paragraphe 1 : La politique de santé au travail 36
Paragraphe 2 : L'indépendance des médecins du
travail 37
CONCLUSION 39
BIBLIOGRAPHIE 41
ANNEXES 42