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La coopération entre le Japon et le Burkina Faso depuis la conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique (TICAD) : 1993-2018.par Eric ZONGO Université Joseph Ki-Zerbo/Burkina Faso - Master en économie, population et relations internationales. 2019 |
III.2. Le programme de stagesDans le cadre du renforcement des capacités des cadres burkinabè, des stagiaires des différents ministères prennent part chaque année à des formations organisées au Japon ou dans le cadre de la coopération sud-sud dans des pays tiers. Des experts japonais sont également envoyés dans le cadre de l'exécution des projets de développement332(*). Selon le rapport 2018 de l'ambassade du Japon au Burkina Faso, 1323 stagiaires burkinabè ont été envoyés au Japon pour la formation entre 1978 (date du lancement du programme) et 2018. Egalement, 460 experts japonais ont été envoyés au Burkina Faso333(*). En 2013, lors de la TICAD V, le Japon a mis en place l'African Business Education Initiative for Youth (Initiative de l'éducation dans le secteur des affaires en faveur des jeunes africains) dite Initiative ABE. L'objectif est de donner la possibilité à quelque 1000 jeunes africains de suivre un cursus de maîtrise débouchant sur des stages en entreprise au Japon. L'initiative vise à contribuer à la formation des ressources humaines nécessaires au développement du secteur industriel et du monde des affaires en Afrique. Outre l'expérience professionnelle qu'elle permet aux stagiaires d'acquérir, l'Initiative ABE favorise la diffusion des technologies334(*). Ce partenariat publique-privé témoigne de l'ouverture et de la détermination du Japon à équiper la main-d'oeuvre africaine de demain. Le programme vise à partager le professionnalisme japonais au travail avec des stagiaires africains. Entre 2014 et 2018, 15 stagiaires burkinabè ont bénéficié de cette initiative335(*). Même si leur nombre est relativement faible, le Japon accorde également des bourses d'études aux étudiants du Burkina Faso. Entre 2010 et 2018, 24 boursiers ont bénéficié d'une bourse d'étude japonaise336(*). Malgré les bonnes relations entre le Japon et le Burkina Faso, il existe quelques imperfections à l'état actuel de la coopération entre les deux pays. III.3. Les imperfections dans la coopération entre le Japon et le Burkina Faso.Dans le domaine de l'éducation, à la TICAD II de 1998, le Japon s'est engagé à assurer l'éducation primaire dans tous les pays africains jusqu'à 2015. De 1995 à 2015, le Burkina Faso a bénéficié de cinq phases du Projet de construction et d'équipement de salles de classes dans les écoles primaires. Cependant, deux grandes régions ayant des priorités beaucoup plus élevées que les autres n'ont pas bénéficié de ces phases. Il s'agit de la région de l'Est et du Sahel. Il faudrait donc travailler à ce que cette coopération puisse prendre en compte ces deux régions hautement prioritaires à l'avenir. Dans le secteur de l'agriculture, le Japon met l'accent sur l'aide alimentaire KR I composée de vivres. Au Burkina Faso, il y a un manque de compétence technique, de capacité et sans doute de volonté alors que le pays regorge d'énormes potentialités dans le secteur agricole. L'agriculture burkinabè a donc besoin qu'on lui apporte de la technicité afin de permettre une augmentation de la production agricole. La coopération japonaise doit donc mettre l'accent sur les projets de coopération de technique, la formation des acteurs du secteur agricole et le programme KR II. On peut également souligner la faiblesse des relations économiques entre les deux pays. Du côté du Japon, en dehors de CFAO Motors racheté en 2012 et de l'entreprise SYSMEX implantée en 2015, aucune autre entreprise japonaise n'est présente au Burkina Faso. De plus, l'absence d'un Bureau du JETRO au Burkina Faso fait que le commerce et l'investissement entre les deux pays n'est pas totalement encouragée. Du côté du Burkina Faso, le Japon manifeste un intérêt pour le Burkina Faso en tant que pays fournisseur de matière première. Les sociétés japonaises s'intéressent notamment aux gisements de manganèse. Jusqu'à présent, aucune entreprise japonaise n'a encore obtenu le droit d'exploitation d'un gisement minier au Burkina Faso. Ce qui est grave encore, le peu de produit que le Burkina Faso exporte en direction du Japon n'est pas souvent conforme aux règles de production qui leur permet de s'insérer totalement dans le marché international en général et celui du Japon en particulier. Le sésame burkinabè est souvent victime de déclassement à cause des pesticides utilisés. Le produit souffre donc de la mauvaise qualité. Les autorités burkinabè doivent donc sensibiliser les producteurs à l'utilisation de produits de traitements homologués. Enfin, les problèmes sécuritaires que connait le Sahel a également un impact sur la coopération entre le Japon et le Burkina Faso. Depuis la prise d'otages de la raffinerie d'In Amenas, en Algérie, en janvier 2013, qui a coûté la vie à dix employés japonais, il y a une obsession de Tokyo pour les questions du terrorisme et de la protection de ses ressortissants en Afrique. C'est pourquoi l'Ambassade du Japon au Burkina Faso demande toujours à ses ressortissants de s'éloigner des zones à risques. Actuellement, plusieurs travaux d'exécution soutenus par le gouvernement japonais n'avancent pas normalement à cause des questions sécuritaires. C'est le cas du Projet CSPS, de la construction de l'ENEP de Kaya, etc. En 2013, la phase V du projet de construction des écoles primaires a eu du mal à prendre fin à cause de la crise malienne de 2012. En conclusion, de sa coopération avec les pays asiatiques, celle avec le Japon est l'une des plus dynamiques. L'investissement du Japon au Burkina Faso est fort considérable et le Japon respecte l'appropriation par le Burkina Faso de son processus du développement en soutenant ses programmes de développement. Dans la mise en oeuvre de ces projets de développement, le Japon tient toujours compte du principe d'auto-assistance. Le champ d'intervention de cette coopération couvre non seulement les domaines des besoins humains fondamentaux des populations, les infrastructures socio-économiques et le développement des ressources humaines. Les secteurs jugés prioritaires sont l'éducation de base, l'agriculture et récemment l'intégration régionale a été insérée. D'autres secteurs prioritaires mais qui sont hors programmes sont également pris en compte. Il s'agit des secteurs de la santé, de l'eau et de l'environnement. La coopération s'étend également à la paix et à la stabilité qui sont des conditions préalables au développement socio-économique. Comme le souligne l'Ambassadeur FUTAISHI Masato en 2017 « ce mécanisme de coopération permet de réaliser une coopération globale et équilibrée en vue de construire une société pacifique et prospère qui assure à tous une vie digne »337(*). Il est bien vrai que la coopération japonaise au Burkina Faso s'appuie en grande partie sur les conclusions de la TICAD, malgré tout, aucun projet de coopération triangulaire impliquant une collaboration entre le Japon et un autre pays donateur participant à la TICAD n'a pas encore été mis en oeuvre au Burkina Faso338(*). Il ne fait aucun doute que des engagements bien structurés entre le Japon, le Burkina Faso et d'autres pays donateurs sous les auspices de la TICAD auront le potentiel d'offrir des avantages tangibles pour la croissance et le développement du Burkina Faso. * 332 JICA, sd, op.cit., www.jica.go.jp/burkinafaso/french/office/index.html. * 333 MOFA 2019, op.cit,www. mofa.go.jp/files/000470872.pdf. * 334 TICAD VI, 2018, op.cit., page 11. * 335 MOFA, 2019, op.cit, www. mofa.go.jp/files/000470872.pdf. * 336Idem. * 337 FUTAISHI Masato, 2017, op.cit,www.sidwaya.bf<m.14910-cooperation-japon-burkina faso/ * 338. Par exemple la France et le Japon coordonnent des projets de développement dans les secteurs des infrastructures et de l'eau en Côte d'Ivoire et au Kenya. Il en est de même de la collaboration entre le Japon et le Brésil au Mozambique dans le secteur agricole. |
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