1.3.2 Intervention ergonomique prospective
L'ergonomie prospective correspond à une
modalité d'intervention ergonomique d'anticipation des besoins pour des
produits, des services, des systèmes techniques et des organisations
compatibles avec les caractéristiques humaines et sociales. Les
connaissances et méthodes deplusieurs disciplines sont mises à
profit pour innover parune centration sur les facteurs humains.
L'interventionprospectrice est donc spéculative, imprécise et
inventive.
Elle vise à faire de la prospective sur de nouveaux
besoins, de nouveaux usages, de nouveaux comportementsou de nouvelles formes
d'organisations des activités enconsidérant que l'humain doit y
occuper la place centrale.
Par voie de conséquence, la centration
surl'évolution de l'activité humaine place l'ergonome en
situationde pilote qui initie le projet, en définit le contenuet en
assure la direction, en faisant intervenir d'autres acteursavec lesquels il va
travailler en collaboration. Lescoûts de l'ergonomie de prospection sont
nécessairementévalués en termes de rapport
coûts/bénéfices et le butcommercial est explicite,
même si ce n'est pas le seul.
L'ergonomie prospective se donne donc pour
objectifd'étudier, en relation avec d'autres disciplines, les
causestechniques, sociales, culturelles, économiques qui
oriententl'évolution des situations d'activités humaines
pourdéfinir, concevoir et réaliser des innovations utiles
àl'humain et dont il peut tirer des bénéfices en termes
deconfort, de bien-être et de développement personnel.Laurig
semble être le premier auteur à avoir parléd'ergonomie
prospective en faisant l'opposition entre«l'ergonomie de correction»
qui vise à apporter des correctionssur la base d'études
scientifiques, et l'ergonomieprospective qui apporte une vision sur le concept
et ledesign du futur. L'examen des différences entrel'ergonomie «a
posteriori» et «a priori» a également été
fait pour distinguer correction et prospection.
Demême, la comparaison entre l'analyse
rétrospective etl'analyse prospective permit la distinction entre
lacentration sur les activités passées (arbre des causes,analyse
cognitive de la tâche, études ethnographiques...)et la centration
sur les activités futures (créativité, valeur,étude
des enjeux). L'ergonomie est donc vue comme unescience pouvant déboucher
sur des visions pour l'aveniret, corrélativement, la prospective devrait
faire partie dela mission de l'ergonomie (Brangier, E. & Bastien, J.-M.-C.
2006).
Pour étayer notre réflexion, le tableau
synthétise les caractéristiques des trois modalités
d'intervention de l'ergonomie que nous avons évoquée
ci-dessus :
Tableau 2 : Principale caractéristiques des trois
modalités de l'intervention de l'ergonomie
Source : Robert, J.-M. & Brangier, E. (2009).
1.3.3.1 Evaluation des
interventions ergonomiques
Une intervention ergonomique se termine toujours par une
évaluation ou en d'autres mots, une étude de validité.
Cette évaluation peut se faire suivant la même procédure
que celle utilisée dans le diagnostic ergonomique afin d'évaluer
la portée de l'amélioration. Il faut maintenant s'interroger sur
la nature de cette évaluation et sur les critères habituellement
adoptés. Que l'ergonome appartient à l'entreprise ou qu'il soit
extérieur, il y a toujours la nécessité de prouver
l'efficacité de son intervention. A la limite, il faudra parvenir
chiffrer le gain apporté par l'intervention.
Ainsi, il est nécessaire pour l'ergonome de trouver un
langage qui offre des solutions et non des techniques. L'ergonome doit adopter
l'attitude de l'ingénieur qui cherche à réaliser et non
seulement à comprendre. C'est pourquoi, il faut adopter une attitude
orientée vers les critères d'efficacité. Il y a face
à ces critères, deux attitudes possibles :
v D'une part, l'attitude négative :
Elle consiste à assigner à l'ergonomie un
rôle défensif. Sous cet angle l'ergonomie serait exclusivement
chargée de réduire la peine des travailleurs, de protéger
les travailleurs contre la fatigue qu'engendrent les excès de travail,
d'éviter les accidents et peut être d'augmenter le confort des
travailleurs. Elle refuse à considérer l'ergonomie comme une
contribution à la production.
v D'autre part, l'attitude positive
Elle consiste en une option technique où
l'efficacité doit se situer au niveau du système total. De l'avis
de nombreux spécialistes, cette attitude est plus prometteuse et plus
ouverte au progrès futur.
Les critères de performance doivent s'exprimer en
termes des coûts car le but de l'entreprise est essentiellement
économique. Ainsi, on peut même dire que le but premier de
l'ergonomie doit être la réduction des coûts de production.
En conclusion, pour évaluer une intervention
ergonomique, il faut rechercher la juste mesure, c'est-à-dire un
compromis entre le but final de l'entreprise qui est économique et les
préoccupations d'ordre humanitaire qui, en dernière analyse, sont
aussi économique.
|