Section I : Les organes supranationaux de
protection
Parlant des organes supranationaux, ils jouent un rôle
complémentaire dans la protection de ces personnes vulnérables en
l'honneur desquels s'invitent certains organes régionaux (paragraphe I)
et les organes internationaux (paragraphe II).
166 Rapport Global de Suivi de la mise en oeuvre des actions
de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants au Niger, p. 28.
167 Ibid., p. 42.
168 Odile Ndoumbé FAYE et (dir), Pour
une élimination et une prévention de toutes les formes de
violence à l'égard des femmes et des filles en Afrique de
l'Ouest, étude menée dans dix pays, p. 52.
169 A titre illustratif, la CONIDE a vulgarisé puis
diffusé les recommandations que le Niger a reçues du
Comité Africain des Experts sur les droits et le bien-être de
l'enfant avec l'appui de Save the Children. La même année la
CONAFE, soutenue par le fonds d'appui des sociétés civiles du sud
de l'ambassade de France au Niger, concevait des livrets pédagogiques
illustrés sur les droits des enfants qu'elle distribuait dans la
région de Tillaberi ainsi qu'à des structures scolaires de
Niamey.
170 Voir Rapport Global de Suivi, op, cit., p.
28.
34
Paragraphe I : Les organes régionaux
Les personnes en situation de vulnérabilité
bénéficient d'une protection de la part de certains organes
régionaux, il s'agit notamment des organes juridictionnels (A) mais
aussi des organes quasi-juridictionnels (B).
A- Les organes juridictionnels
La nécessité d'une protection s'exprime quand la
restriction des droits fondamentaux d'un groupe particulièrement
vulnérable est en jeu. Dans cette démarche on peut relever une
ambition manifeste des organes juridictionnels d'assurer cette protection ; au
rang desquels, la Cour de la Communauté Economique des États de
l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)171 s'illustre. Elle est
créée pour fonctionner de façon indépendante des
États membres et des instructions de la communauté et ses
arrêts ont force obligatoire à l'égard des États
membres, des institutions de la communauté, des personnes physiques et
morales des États parties172.
La Cour de justice de la CEDEAO, entant que principal organe
judiciaire de la communauté ouest-africaine, se compose de sept juges
nommés à partir d'une liste présentée par les
États parties173. La Cour vise à promouvoir la
coopération et l'intégration dans la perspective d'une union
économique en Afrique de l'Ouest. Mais le respect, la promotion et la
protection des droits de l'Homme sont posés comme principe fondamental
de l'Organisation. Elle est compétente pour juger les
171 La Cour de justice de la CEDEAO a été
instituée par l'article 15 du traité révisé de
1993.
172 Sakinatou BELLO, La traite des
enfants en Afrique : L'application des conventions internationales aux
droits de l'enfant en République du Bénin, Paris,
L'Harmattan, 2015, p.305.
173 Le Benin, le Burkina, le Cap-Vert, la Cote d'Ivoire, la
Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée Bissau, le Liberia, le
Mali, le Niger, le Nigeria, le Sénégal, la Serra Leone et le
Togo.
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violations des droits de l'Homme commises dans tout
État membre174. Désormais toute personne
victime175, de violation des droits de l'Homme peut saisir la
Cour176. Enfaite la Cour de Justice de la CEDEAO n'est pas le seul
organe juridictionnel de protection au niveau africain. Les personnes
vulnérables peuvent bénéficier de la protection d'un autre
organe juridictionnel d'où la Cour Africaine de Justice des Droits de
l'Homme et des Peuples (CAJDHP).
« La naissance de la Cour africaine de justice des
droits de l'homme est un évènement aussi important que
l'entrée en vigueur de la Cour pénale internationale. C'est une
vraie lueur d'espoir pour le continent africain et tous ceux qui luttent contre
l'impunité des violations des droits de l'homme
»177. Les droits de l'Homme, le développement,
concepts indépendants et complémentaires revêtent une
importance capitale dans la quête de la prospérité de toute
civilisation. Dans cette optique, l'Union Africaine, héritière de
l'Organisation de l'Unité Africaine a entrepris la mise en place d'un
système judiciaire continental solide visant à promouvoir la
justice et les droits de l'Homme en Afrique178.
A cet effet, le 10 juin 1998 à Addis-Abeba en Ethiopie
a été adopté le protocole relatif à la Charte
africaine des droits de l'homme et des peuples portant création d'une
Cour africaine des droits de l'homme et des peuples179. Deux
années plus
174 Quant aux contentieux des droits de l'homme, il
échoit à la Cour conformément aux dispositions de
l'article 9 §. 4 du Protocole A/SP.1/01/05 du 19 janvier 2005 en ces
termes : « La Cour est compétente pour connaitre des cas de
violation des droits de l'Homme dans tout Etat membre ». Cette
compétence est étendue puisque selon l'article 10.d : «
Toute personne victime de violation des droits de l'homme ; la demande
soumise à cet effet :
i) ne sera pas anonyme ;
ii) ne sera pas portée devant de la Cour de
Justice de la Communauté lorsqu'elle a déjà
été portée devant une autre Cour International
compétente ».
175 Voir notamment l'arrêt Dame Hadjidjatou Mani Koraou c.
République de Niger, Cour de Justice de la CEDEAO, Arrêt
ECW/CCJ/JUD/06, 27 octobre 2008.
176 Au début, seuls les États pouvaient
accéder au prétoire de la Cour de Justice de la CEDEAO, mais
depuis l'adoption du protocole A/SP.1/01/05 signé le 19 janvier 2005
à Accra et portant amendement du protocole AP/17/91 relatif à la
Cour de Justice, la saisine est ouverte aux particuliers communautaires.
177 Kéba SIDIKI, président
d'honneur de la FIDH. Cf. « Guide pratique La Cour africain des droits de
l'homme et des peuples vers la Cour africaine de justice et des droits de
l'homme », in Fédération Internationale des Ligues
des droits de l'Homme(FIDH), avril 2010 p.165.
178 Fatsah OUGUERGOUZ, « La Cour
africaine des droits de l'homme et des peuples-Gros plan sur le premier organe
judiciaire africain à vocation continentale », Annuaire
français de droit international, volume 52, 2006, pp. 214-216.
179 Addulqawi YUSUF et Fatsah
OUGUERGOUZ, L'Union Africaine : cadre juridique et institutionnel,
Paris, édition Pédone, 2013, p. 119.
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tard, le premier juillet 2008 à Charm EL Cheick en
Égypte, la Cour africaine des droits de l'Homme et des Peuples et la
Cour de justice de l'Union africaine ont été fusionnées en
une unique Cour instituée et dénommée Cour africaine de
justice et des droits de l'homme180. Il est indéniable que
l'initiative africaine demeure sans précèdent, en ce sens que la
Cour cumulera à elle seule la compétence de plusieurs
juridictions181. Il faut apprendre à lier le protocole au
protocole pour comprendre la gestation d'une juridiction continentale Africaine
des droits de l'Homme. Une telle juridiction, telle qu'elle existe aujourd'hui
et telle qu'elle se présentera demain, est le fruit de plusieurs
protocoles182.
Le protocole de 2008 régit le fonctionnement et
l'organisation de la Cour africaine de justice et des droits de l'Homme et des
Peuples. Il confie à la section chargée de toutes les affaires
concernant les droits de l'Homme, une compétence consultative et
contentieuse183. La fonction consultative permettra à la Cour
africaine à l'instar de la Cour africaine des droits de l'Homme et des
Peuples de donner des avis sur toute question juridique184, non
soulevée devant la commission africaine et le comité africain
d'expert sur le bien-être et les droits de l'enfant africain. La section
des droits de l'Homme sera saisie de toute affaire concernant les droits de
l'Homme et des
180 Face à la modification du contexte international
relatif au besoin pressant, constant et indispensable de protection efficace
des droits humains et de la lutte contre les crimes internationaux, les Chefs
d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine ont estimé
nécessaire d'inclure en ce qui concerne les attributions de la Cour, un
volet répressif étroitement lié au Droit international
avec comme dénomination la Cour africain de justice des droits de
l'homme et des peuples.
181 En bref, la compétence de la Cour est très
étendue : Cette dernière possède la compétence
combinée de quatre organes judiciaires différends. Elle est
compétente en matière de droit de l'Homme, comme la Cour
européenne des droits de l'homme (Strasbourg), elle a compétence
à connaitre d'affaires en matière constitutionnelle de l'Union
africaine, comme la Cour de justice de l'Union européenne(Luxembourg),
elle peut connaitre de toute question de droit international, à l'instar
de la Cour International de justice(La Haye), dans le cadre de l'organisation
des nations unies, elle a aussi les compétences d'un tribunal pouvant
connaitre des recours du personnel, comme le tribunal du contentieux
administratif qui relève du système judiciaire interne de l'ONU.
Cf. Addulqawi YUSUF et Fatsah OUGERGOUZ,
L'Union Africaine : cadre juridique et institutionnel,
op.cit., p.122.
182 Abdoulaye SOMA, « Le jeu des
protocoles dans le processus juridique de construction d'une cour africaine de
protection des droits de l'homme », Revue CAMES/SJP,
n°002/2015, p.1.
183 Saidou NOUROU TALL, Droit des
organisations internationales africaines, Paris, L'Harmattan, 2015,
p.387.
184 A la demande de la conférence, du parlement, du
conseil, exécutif, du conseil de paix et de sécurité, du
conseil économique, social et culturel, des institutions
financières ou de tout autre organe de l'union autorité par la
conférence.
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peuples185. La section des affaires
générales de la Cour est chargée de connaitre de toutes
les affaires et tous les différends ayant pour objet :
L'interprétation et l'application de l'acte constitutif de l'UA,
l'interprétation, l'application ou la validation des autres
traités de l'union et de tous les instruments juridiques
dérivés adoptés dans le cadre de l'union africaine ou
l'OUA186, toute question de droit international187.
L'adoption du protocole de Malabo en 2014 semble être
une étape allant dans la bonne direction, les principes et les valeurs
sur lesquels s'appuie le Protocole, sont louables188. De ce fait, la
CAJDHP participe à la protection des personnes confrontées
à une vulnérabilité. Cependant les organes
quasi-juridictionnels ne sont pas en marge de cette protection des personnes
vulnérables.
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