1.2.2.2 Les typologies d'un actif spécifique
Williamson (1985, 1992) expose qu'un actif spécifique peut
prendre plusieurs formes :
· Spécificité de site :
ce type repose sur la question de la localisation et l'aménagement de
tout actif physique, dans le cadre d'une complémentarité des
activités de procédé de l'entreprise.
· Spécificité des actifs physiques
: la question de la caractéristique d'un actif physique en
termes de spécificité rend sa réutilisation impossible.
Cette situation entraine certains coûts supplémentaires
supportés par la firme liés à la sortie de cet actif.
· Spécificité de l'actif humain
: l'investissement dans un actif humain est représenté
dans le contrat d'emploi avec un individu. La spécificité de cet
actif est représentée dans l'ensemble d'expérience, de
compétence et de savoir-faire mis en oeuvre au sein de l'entreprise.
· Spécificité des actifs
dédiés : ce type de spécificité est
représenté dans la situation où l'entreprise essaie de
répondre à une demande particulière d'un client.
· Spécificité liée à
la réputation de l'entreprise : la question de
réputation de l'entreprise est expliquée par la symétrie
d'information circulée en fonction de ses biens et services.
· Spécificité temporelle
: celle-ci correspond à la planification temporelle dans la
prise de décision et la gestion de production.
1.2.2.3 La structure de financement d'un actif
spécifique
Les firmes ont besoin d'une structure financière
optimale qui minimise les coûts engendrés par l'utilisation d'un
actif spécifique. Williamson (1988) affirme que la
spécificité
~ 28 ~
des actifs est un facteur influençant la politique de
financement des entreprises. Dans ce sens, Marion (1995) affirme que la dette
et les fonds propres sont des structures de gestion des transactions
engendrées par la nature de l'investissement entre l'entreprise, ses
prêteurs et ses actionnaires. En revanche, face aux comportements de
leurs acteurs (la rationalité limitée et l'opportunisme), les
entreprises adoptent un mode de financement optimal pour financer un
investissement donné, ce choix est présenté dans leur
volonté à gérer les coûts de transaction induits par
la spécificité des éléments d'actifs. De
même, Vilasuso et Minkler (2001) attestent que la
spécificité des actifs affecte la structure financière des
firmes. Vincente-Lorente (2001) confirme cette explication et expose que la
politique de financement des entreprises est déterminée par les
caractéristiques de l'actif à financer. Ainsi, en présence
de risque et de la spécificité des actifs, il est essentiel
d'avoir une combinaison optimale de financement dette-capitaux propres qui
minimise les coûts de gouvernance (Choate, 1997).
En conclusion, Williamson (1988) a stipulé que la
structure de financement optimale d'un actif spécifique est liée
au contrat de financement de cet investissement. En effet, plus l'actif
utilisé ou à financer est facilement réutilisable, plus il
est facile à l'entreprise de faire appel à l'endettement. Car en
cas de faillite, ces actifs ont la capacité de fournir aux
créanciers des fonds liquides avec des coûts de négociation
faibles au sein du marché et donc offrir à l'entreprise des fonds
à des moindres coûts. Dans ce cadre, Titam et Wessels (1988)
attestent que la garantie offerte par les actifs à financer incite les
créanciers à offrir aux entreprises des fonds à des
moindres coûts.
Inversement à cette explication, Mocnik (2000) expose
que les prêteurs exigent un taux de financement élevé pour
garantir l'encaissement de leurs fonds en cas de faillite. Ce raisonnement est
justifié par la nature de ces actifs et par la capacité
limitée de ces prêteurs à contrôler les
investissements et les activités du gestionnaire. Le graphique (1.1)
représente la combinaison optimale de financement d'un actif
spécifique en fonction du degré de sa spécificité
et son coût de financement :
Graphique (1.1) : Coût de financement et
spécificité des actifs
Coûts
Dette
![](Spcificit-des-actifs-et-structure-financire1.png)
K*
Degré de spécificité
Capitaux propres
~ 29 ~
Source : MARION A. « Le financement de l'actif
immatériel des nouvelles entreprises technologiques et innovantes
», financement des PME, 1995, p. 219.
La minimisation des coûts de transaction liés au
financement d'un investissement est corrélée avec sa nature et
ses caractéristiques. Plus le degré de spécificité
d'un actif est faible par rapport au degré de spécificité
K*, l'entreprise a intérêt à se financer par emprunt. De
même, en cas inverse, lorsque K* est inférieur au degré de
spécificité de cet actif, l'entreprise fait appel à ses
ressources internes. La relation existante entre la spécificité
des actifs et les théories étudiantes les décisions
financières des firmes se présente dans l'analyse explicative
ci-après :
? Spécificité des actifs et la
théorie de compromis
A un certain niveau, le choix d'une structure de financement
d'un actif spécifique ne se réduit pas seulement à un
simple arbitrage entre les avantages fiscaux de la dette et son risque de
faillite. En effet, le caractère spécifique et non
redéployé de cet investissement engendre des coûts
élevés17 lors de la rédaction du contrat. Cette
situation impose aux entreprises de choisir le financement par fonds propres et
donc la perte de l'avantage fiscal.
Balakrishnan et Fox (1993) affirment que l'emprunt baisse le
coût réel du capital après impôt et augmente la
valeur de l'entreprise au maximum, si et seulement si, elle se finance
entièrement par endettement. Cette situation pose deux problèmes,
le premier est lié à l'inexistence des entreprises totalement
financées par endettement. Et le deuxième est lié à
la déductibilité des charges financières avant
l'impôt sur les revenus des sociétés. En outre, et en
raison d'une opération de liquidation, Mocnik (1998) affirme que les
actifs spécifiques ont un
17Coûts de faillite et de liquidation
élevés.
~ 30 ~
impact négatif sur le ratio d'endettement par le biais
des coûts de faillite. Ces actifs perdent de valeur et donc leurs
retombées baissent la valeur de la firme.
Titam et Wessels (1988) attestent que l'émission d'une
dette est garantie par les actifs redéployés. Leurs valeurs
seront connues sur le marché et permettront aux entreprises
d'éviter les coûts associés à cette émission.
En effet, les entreprises s'attendent à émettre plus de dette
pour profiter de cette occasion. Les créanciers offrent à
l'entreprise un contrat favorable et donc la baisse du coût
d'endettement. Par contre, si le projet ne peut pas être garanti, les
entreprises vont recourir aux capitaux propres au lieu de la dette. Etant
donné, qu'une telle garantie ne peut pas être utilisée pour
un tel projet qui n'offre pas de garantie.
? La spécificité des actifs et les
coûts d'agence
La remise en cause du recours à l'endettement selon la
théorie d'agence est la baisse des coûts d'asymétrie
d'information entre les acteurs de la firme. Les dirigeants prennent des
décisions d'investissement et de financement en fonction de leurs
propres intérêts18. Les investisseurs optent pour des
projets plus risqués pour tirer plus de profit et les créanciers
exigent un taux d'endettement élevé pour garantir leurs fonds.
Cette divergence d'intérêts privilégie le financement d'un
actif spécifique par fonds propres au lieu de la dette et donc la perte
de l'avantage lié à la baisse des coûts d'agence.
Dans ce cadre, Balakrishnan et Fox (1993) attestent que les
actifs spécifiques offrent aux entreprises des possibilités de
croissance très importantes dans l'avenir. Mais, grâce aux
problèmes du sous-investissement, les actionnaires accepteraient
certains projets à valeur actualisée nette positive si
l'entreprise était totalement financée par endettement. Dans le
cas inverse, il serait rejeté lorsqu'elle est particulièrement
financée par endettement.
? La spécificité des actifs et
signalisation
Les prédictions théoriques de la
spécificité des actifs reposent sur le financement interne. Au
sein d'un marché financier et grâce aux problèmes
d'asymétrie d'information, le financement par endettement
représente un signal positif pour les investisseurs. Cependant, la
nature spécifique des projets impose aux firmes à se financer par
capitaux propres. En effet, l'avantage informationnel permis par
l'émission d'une dette sera perdu. Williamson (1985) a
suggéré d'intégrer l'incertitude dans l'analyse. Les
actifs spécifiques offrent aux entreprises des
18En fonction de leur rémunération, leur
réputation et leur pouvoir.
~ 31 ~
possibilités de croissances élevées.
Mocnik (1998) a soutenu que ces actifs fournissent une force concurrentielle
lorsqu'ils sont utilisés par la firme elle-même que pour une autre
fin. Titam et Wessels (1988) attestent que l'entreprise trouve des
difficultés à transférer les actifs spécifiques
vers d'autres utilisations alternatives. Ce constat augmente l'incertitude des
prêteurs et donc le coût d'endettement. En outre, ils affirment que
les petites entreprises ont une petite quantité d'actifs standards et
une réputation limitée. Cette situation néglige le recours
à l'endettement en raison de la sélection adverse et de
l'aléa moral.
? La spécificité des actifs et la
hiérarchie de financement
Le caractère spécifique d'un investissement
impose aux entreprises de se financer par fonds propres. La théorie
hiérarchique de financement accorde aux entreprises une classification
des modes de financement, en privilégiant le financement par
autofinancement en premier ressort. La dette n'engendre aucun coût de
transaction dans ce cas, mais ce sont les caractéristiques de l'actif
concerné qui posent ce problème d'hiérarchisation de
financement. Marion (1995) affirme que l'existence d'une structure du capital
optimale dans ce cas disparaît au profit d'une analyse de la
décision de financement d'un investissement.
En revanche, Balakrishnan et Fox (1993) affirment que la
capacité de la firme à financer ces actifs par endettement peut
être limitée par la nature des évolutions récentes
des coûts de transaction. Ces coûts sont liés fortement aux
caractères spécifiques de ces actifs eux-mêmes. En effet,
la spécificité des actifs affecte la structure du capital de
l'entreprise par le biais des coûts de faillite et donc la perte de
valeur due à la survenance ou à l'augmentation de la
probabilité des difficultés financières. D'ailleurs,
lorsque l'actif est acquis pour une tâche très spécifique,
l'entreprise ne fait pas appel à l'endettement. Cependant, elle se base
sur ses capitaux propres pour éviter le paiement des coûts
financiers élevés exigés par les
créanciers19. Autre, Kochhar (1997) a soutenu que la nature
des actifs spécifiques implique qu'ils soient financés par
capitaux propres, alors que lorsque l'entreprise fait une location de cet
actif, son financement doit être par emprunt.
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