Conclusion
Au terme de ce chapitre, il ressort que la mise en oeuvre de
la GIRE dans les communes étudiées a commencé comme au
niveau national, mais avec une acceptation limitée à travers un
engagement faible des groupes d'intervenants comme le confirment les
résultats. Les facteurs qui déterminent la faiblesse de la mise
en oeuvre de la GIRE sont principalement le défaut d'application des
documents adoptés. Si le Schéma Directeur d'Aménagement et
de Gestion des Eaux du bassin de l'Ouémé était
rigoureusement mis en oeuvre depuis sa validation en 2013, les valeurs obtenues
lors de la présente évaluation afficheraient un meilleur niveau
de mise en oeuvre de la GIRE. A cela, s'ajoute l'orientation politique
nationale qui concentre plus les énergies sur l'approvisionnement en eau
potable qu'à la gestion intégrée des ressources en eau.
Ainsi, l'hypothèse 4 de cette étude est vérifiée.
En effet, la plupart des politiques et lois entrant dans le cadre de cette
gestion sont basées sur la GIRE et bien qu'elles soient
approuvées par le gouvernement, elles commencent à peine à
être utilisées par les autorités pour orienter les
activités. De même, le nombre de documents (loi, stratégie,
décret, plan d'action, schéma d'aménagement) n'est pas
négligeable, mais ils souffrent d'une insuffisance de vulgarisation et
d'application. Les mécanismes de suivi de la qualité et des
prélèvements opérés annuellement pour couvrir les
besoins des différentes branches d'activités sont insuffisants
ainsi que le financement pour couvrir l'ensemble des aspects de mise en valeur
de la GIRE. Toutefois, il est à noter que c'est un processus dynamique
et qu'il faudra se mettre au pas pour être au rendez-vous des ODD en 2030
ce qui permettra de répondre aux besoins des différents usages de
la ressource en
217
eau tout en limitant les impacts négatifs de ces
activités dans le contexte des changements climatiques.
218
Discussion générale
L'objectif principal était d'analyser la gestion
actuelle des ressources en eau en vue de déterminer des actions pour une
application de la GIRE dans un contexte de changement climatique. Elle a
d'abord permis de caractériser la variabilité climatique dans le
milieu à travers des méthodes statistiques. L'analyse des
séries climatologiques sur la période 1987-2016
révèle des ruptures de stationnarité avec une reprise des
hauteurs pluviométriques à partir de la fin de l'année
2005. Cette hausse pluviométrique déjà observée par
Vissin et al. (2016) et Alamou et al. (2016) respectivement
dans la basse vallée de l'Ouémé et dans le bassin de
l'Ouémé est sans doute liée au renforcement de la mousson
intertropicale et à l'augmentation de la température.
Par ailleurs dans la basse vallée de
l'Ouémé, l'évolution à la hausse des hauteurs de
pluie est en phase avec celle de l'écoulement et de la recharge ce qui
confirme pleinement la règle qui stipule que la distribution des
débits s'ordonne suivant les mêmes lois statistiques que les
distributions des précipitations dans un bassin versant correspondant
(Dakiche, 1993). Ainsi, l'augmentation de la pluviométrie et de
l'écoulement induit une disponibilité de la ressource en eau de
surface.
Cette étude a également permis la cartographie
des potentialités en eau souterraine et révèle que le
secteur d'étude regorge d'importantes réserves en eau souterraine
sur 66 % du territoire. La marge d'erreur associée à
l'élaboration de cette carte est de 0,038 avec un niveau de confiance de
95 %, ce qui signifie que la carte de potentialité en eau reflète
les réalités du terrain. Dans cette étude, l'utilisation
de tests de sensibilité et de calcul des incertitudes pour la validation
des cartes thématiques est préconisée par
219
certains auteurs comme Mangoua (2013), Doumouya et al.
(2012) et Samake et al. (2011), en vue de palier aux
insuffisances du mode d'évaluation par les courbes de tendances
proposées par Jourda (2005).
Ainsi, la carte thématique des sites potentiels en eau
souterraine peut guider la prise de décision pour une gestion efficiente
des ressources en eau souterraine.
Par ailleurs, les enquêtes réalisées
révèlent que ces ressources en eau souterraine constituent la
première source d'approvisionnement en eau de la population pour les
usages domestiques. Les eaux de surfaces constituent quant à elles, une
source d'approvisionnement alternative. Toutefois, ces eaux de surface sont
essentiellement utilisées pour les activités agropastorales, la
pêche, la navigation et l'extraction du sable. Ces résultats
corroborent ceux de Sossou-Agbo (2013) qui identifie la navigation
fluvio-lagunaire, la pêche, l'exploitation des carrières de sable
et l'exploitation agricole comme étant les usages des ressources en eau
dans le complexe fluvio-lagunaire de la basse vallée de
l'Ouémé au Bénin. Chacun de ces usages implique des
actions de prélèvements ou dérivations de l'eau, des
actions d'extraction en matériaux et des rejets. Ce contexte de
diversité des usages impacte la qualité de la ressource en eau du
fait de plusieurs facteurs, dont la prolifération des plantes aquatiques
et la pollution diffuse. La littérature montre que le
réchauffement climatique augmente la température à la
surface des eaux des lacs réduisant ainsi la productivité et les
taux de capture (Badjeck et al., 2010) ; les fluctuations du niveau de
l'eau affectent négativement les activités de pêche (FAO,
2014); et l'intrusion saline (liée à l'élévation du
niveau de la mer) affecte les populations de poissons et réduit les taux
de capture (Chang et al., 2011). Toutes ces contraintes menacent
les
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moyens d'existence des communautés de pêcheurs et
leur capacité à fournir du poisson.
Ainsi, la gestion intégrée est donc essentielle
pour assurer un développement durable, prenant en compte la
variabilité des ressources en eau et la diversité de ses usages.
Elle s'impose aujourd'hui comme une approche dans le milieu d'étude. Le
système actuel de la gestion fait intervenir de nombreux acteurs aux
compétences diverses ainsi que plusieurs politiques et
règlementations. Cependant, l'évaluation des paramètres de
ce système montre un faible niveau de mise en oeuvre de la GIRE ainsi
que des faiblesses liées au manque de financement, l'insuffisance
d'instruments pour le suivie de la ressource, la faiblesse de
l'efficacité institutionnelle, de la coordination intersectorielle, et
de l'implication de diverses autres parties prenantes.
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