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Les droits successoraux du conjoint survivant.


par Safaa Jaffal
Haute Ecole Lucia de Brouckère - Bachelier en Droit 2019
  

Disponible en mode multipage

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Haute École Lucia de Brouckère

Catégorie économique - Droit - avenue Émile Gryzon 1, Bâtiment 4C- 1er étage - 1070 Bruxelles

Te l : 02/526.73.24. Fax : 02/526.73.27. - droit@cnldb.be - Site : www.heldb.be

JAFFAL Safaa

LES DROITS SUCCESSORIAUX
DU CONJOINT SURVIVANT

Travail de fin d'études réalisé en vue de l'obtention du diplôme de Bachelier en droit

Sous la direction de : Mme VANDENPLAS

Année académique : 2019-2020

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Remerciements

Avant de vous laisser découvrir mon travail, je tiens à remercier profondément Madame Vandenplas, promotrice de ce travail de fin d'études, pour ces précieux conseils qui m'ont été bénéfiques pour la rédaction de mon travail de fin d'études.

Je souhaite également témoigner ma reconnaissance envers mes proches qui m'ont soutenu et encouragé tout au long de ce travail de fin d'études.

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Introduction

Êtes-vous au courant que l'état n'offrait qu'une protection limitée contre les risques sociaux et ce, jusqu'au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale ? L'ancien droit successoral était différent de celui que nous connaissons en 2020. Son rôle était de maintenir les biens au sein de la famille.

De nos jours, puisque chaque situation familiale et personnelle est différente, la volonté de se sentir libre en décidant du sort de sa propre succession a pris davantage d'importance. De ce fait, les citoyens Belges ont attendu du législateur qu'il leur propose une réforme rétablissant le juste équilibre entre la liberté individuelle et la solidarité entre les générations. La Fondation Roi Baudouin a mis donc en place un projet afin d'identifier les souhaits des citoyens en matière de droit successoral. Le but de ce projet est de venir en aide au législateur afin que celui-ci opte pour une réforme qui soit ressentie comme légitime par les Belges.

Depuis l'entrée en vigueur du Code Napoléon, le législateur porte un intérêt, de plus en plus, important au conjoint survivant en lui accordant davantage de droits dans la succession du défunt.

En effet, dans les premiers textes du Code civil, les seuls droits successoraux du conjoint survivant se limitaient à la pleine propriété à condition qu'il n'y ait aucun parent en ligne directe et aucun successible jusqu'au douzième degré en ligne collatérale. Nous pouvons donc constater que les liens par le sang étaient le seul critère.

Plusieurs réformes ont donc vu le jour afin d'octroyer plus de droits au conjoint survivant. Tout d'abord, la loi du 14 mai 1981 relative aux droits successoraux du conjoint survivant éleva celui-ci au rang d'héritier légal et réservataire. Ensuite, la loi du 22 avril 2003 modifiant certaines dispositions du Code civil relatives aux droits successoraux du conjoint survivant autorisa aux (futurs) époux de renoncer, au préalable, à tout ou partie des droits qu'ils sont appelés à recueillir dans la succession de leur conjoint1.

1 F. TAINMONT, «Le droit successoral Belge», disponible sur https://www.ejcl.org/142/art142-10.pdf, s.d., consulté le 12 avril 2020.

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Deux réformes récentes et importantes ont également marqué les droits successoraux du conjoint survivant : D'une part, la loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités ; d'autre part, la loi du 22 juillet 2018 modifiant le Code civil et diverses autres dispositions en matière de droit des régimes matrimoniaux.

La loi du 31 juillet 2017 et la loi du 22 juillet 2018 sont entrées en vigueur, le 1er septembre 2018. Néanmoins, les nouvelles dispositions apportées par ces deux nouvelles lois s'appliquent aux successions ouvertes après le 1er septembre 2018.

Comme nous pouvons le constater, les droits successoraux du conjoint survivant ne cessent d'être réformés et de nouvelles dispositions sont mises en place. En effet, les règles qui s'appliquent au conjoint survivant sont des règles spécifiques qui méritent d'être analysées et comprises en profondeur. Plusieurs exceptions sont prévues pour le cas du conjoint survivant en matière de dévolution légale et successorale.

Vu la complexité de la matière, nous avons décidé de nous pencher sur le cas du conjoint survivant. Nous allons, dans le cadre de cette présente étude, analyser l'aspect civil de l'étendue des droits successoraux du conjoint survivant.

Plusieurs questions nous viennent à l'esprit :

-4 Qui est le conjoint survivant ?

-4 A quelles conditions peut-il recueillir ses droits ?

-4 Que se passe-t-il lorsqu'un époux survivant vient à la succession en étant en concours

avec des descendants du défunt ?

-4 A-t-il droit à une réserve ?

-4 Le conjoint survivant peut être privé de ses droits successoraux ?

Afin de répondre à ces questions de manière exhaustive, nous commencerons dans un premier temps par nous intéresser à la dévolution légale et par expliquer les notions qui y sont liées. En effet, au sein de ce travail de fin d'études, nous allons analyser les droits du conjoint

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survivant dans le cas de la dévolution légale. Ensuite, un chapitre sera dédié à l'ouverture de la succession, étape primordiale intervenant avant l'attribution des droits.

Nous allons dans un deuxième temps, analyser l'étendue des droits légaux et réservataires successoraux du conjoint survivant. De plus, nous porterons une attention particulière sur l'application simultanée de la réserve des descendants et des droits successoraux du conjoint survivant.

Enfin, nous examinerons la façon dont les droits successoraux du conjoint survivant peuvent être supprimés.

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Chapitre 1 : La dévolution successorale

I. Les modes translatifs de propriété pour cause de mort

La dévolution successorale peut se faire selon 3 hypothèses :

1) La dévolution légale ;

2) La succession contractuelle ;

3) La succession testamentaire.

a) La dévolution légale ou succession « ab intestat »2

La succession légale, aussi appelée « la succession ab intestat », est une succession au cours de laquelle les biens d'une personne décédée sont transmis à ses héritiers « en vertu de la loi ». Ce type de succession a lieu lorsqu'aucun testament et/ou aucune institution contractuelle n'a été conclu par le défunt dit « de cujus » avant son décès.

Les règles de dévolution légale ont été mises en place par le législateur. Ce dernier a instauré ce système en s'interrogeant sur la manière dont le défunt aurait planifié sa succession s'il avait formulé ses dernières volontés.

Dans ce cas, le Code civil va déterminer les personnes qui recueilleront les biens composant le patrimoine du de cujus ainsi que leurs parts3.

Afin de déterminer qui seront les héritiers légaux, le Code civil prévoit quelques règles :

ü La règle des ordres :

2 «ab intestat»= sans testament

3 X, «Introduction sur la dévolution successorale (1/6)», disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/introduction-sur-la-devolution-successorale#toc, 31 août 2014.

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La règle des ordres a été mise en place par la loi afin d'établir un ordre de priorité entre les héritiers, en les classant par ordres. Le principe de cette règle est que chaque ordre exclut le ou les ordres suivants. Cette dévolution a un effet cascade c'est-à-dire que les ordres d'héritiers s'éliminent successivement de telle sorte que les parents du premier ordre excluent les parents du deuxième ordre etc.

Le Code civil reprend les ordres suivants :

Première ordre4 : Les enfants et les descendants du défunt.

Deuxième ordre5 : D'une part, les collatéraux privilégiés à savoir les frères et soeurs et leurs descendants (neveux, nièces du défunt etc.). D'autre part, les ascendants privilégiés à savoir le père et la mère du défunt.

Troisième ordre6 : Les ascendants ordinaires à savoir les parents, les grands parents (en l'absence de collatéraux privilégiés).

Quatrième ordre7 : Les collatéraux ordinaires à savoir les tantes, les oncles etc.

La règle de l'ordre s'applique différemment lorsqu'il y a un conjoint survivant qui est appelé à la succession. Nous allons développer ce point dans un chapitre dédié à cette exception.

ü La règle des degrés8 (Art. 735, 737 et 738 du Code civil)

Cette règle se base sur la proximité du degré de parenté entre le successible et le défunt au sein d'un même ordre.

Un degré comprend une génération. Une distinction entre les générations en ligne directe et les générations en ligne collatérale est nécessaire afin de pouvoir calculer les degrés.

4 C. civ., art. 745, al. 1.

5 C. civ., art. 748 à 751.

6 C. civ., art. 746.

7 C. civ., art. 735.

8 C. civ., art. 735, 737 et 738.

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Les générations en ligne directe sont des générations qui descendent les unes des autres. « Ainsi le fils est, à l'égard du père décédé, au premier degré, le petit fils au second, etc. »9.

Les générations en ligne collatérale sont des générations qui ont un ascendant commun. De ce fait, pour pouvoir calculer les degrés, il faudrait remonter jusqu'à l'auteur commun10. « Ainsi, deux frères sont au deuxième degré (il faut remonter à l'auteur commun qui est le parent), l'oncle et le neveu sont au troisième degré, les cousins germains au quatrième, etc. »11.

Le législateur impose qu'on n'hérite pas au-delà du quatrième degré en ligne collatérale à moins qu'on ne soit appelé par substitution12.

La ratio legis de la présente disposition est de privilégier l'héritier présentant le degré de proximité le plus proche du défunt.

ü Exception à la règle des degrés => La règle de la substitution (Art. 739 à 746 du Code civil)

La règle de la substitution intervient lorsqu'au moment du décès, un des enfants du défunt prédécédé ou renonce à la succession et que les enfants de ce dernier (à savoir les petits-enfants du défunt) viennent recueillir la part de leur père/mère dans la succession13.

Ce mécanisme de substitution joue en faveur des descendants du défunt.

9 X, «Dévolution successorale: La règle de degré (4/6)», disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/devolution-successorale---la-regle-de-degre, 31 août 2014.

10 C. civ., art. 738.

11 X, « Dévolution successorale : La règle de degré (4/6)», disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/devolution-successorale---la-regle-de-degre, 31 août 2014.

12 C. civ., art. 745, al. 1.

13 C. civ., art. 739 à 746.

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ü Exception à la règle des ordres et des degrés => La règle de la fente (Art. 733, 752 et 753 du Code civil)

La règle de la fente intervient lorsqu'une personne décède sans descendants et sans collatéraux privilégiés, c'est-à-dire lorsqu'aucun héritier du premier et du deuxième ordre n'est appelé à la succession. La règle de la fente va donc intervenir dans le but de diviser la succession en deux parts égales, réparties entre les parents de la ligne paternelle et de la ligne maternelle14.

On applique donc cette règle dans deux cas particuliers :

1) Lorsqu'il y a des collatéraux privilégiés issus de lits différents qui interviennent à la succession.

2) Lorsque le défunt ne laisse ni descendants ni collatéraux privilégiés mais des ascendants uniquement.

Il y a un cas de la fente assez rare mais qui nécessite d'être repris : il s'agit du cas où le surplus des biens de l'enfant adopté se divise en deux parts égales entre la famille d'origine et la famille adoptive15.

Cette règle permet donc à des parents du quatrième ordre (par exemple, une cousine en ligne paternelle) d'être en concours avec des parents du troisième ordre (par exemple, la mère du défunt).

Depuis la réforme entrée en vigueur le 1er septembre 2018, la règle de la fente n'a plus lieu en présence d'un conjoint survivant lorsque nous sommes confrontés à ce genre de concours. Dès lors, les héritiers du troisième ordre auront droit à l'ensemble des droits qu'ils se partageaient, avant la réforme, entre le troisième et le quatrième ordre.

14 C. civ., art. 733, 752 et 753.

15 C. civ., art. 353-16, 3°.

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b) La succession testamentaire

Dans le cas où le défunt décède après avoir exprimé ses dernières volontés dans un testament valable, on parlera de succession testamentaire.

La transmission se fera selon ses dernières volontés exprimées par écrit, tout en tenant compte et en respectant les réserves héréditaires16.

Dans l'hypothèse où la réserve héréditaire est atteinte par les dispositions du testament, l'héritier devra demander la réduction17. Ceci explique que si l'héritier ne réclame pas la violation de sa réserve, la portée du testament ne sera pas modifiée d'office.

Il existe trois types de testaments :

Le testament authentique ou notarié18: Il s'agit d'un testament faisant l'objet d'un acte
dressé par un notaire. Le notaire est présent afin d'écouter les volontés du testateur.

Plusieurs formalités sont nécessaires afin d'opter pour ce genre de testament, notamment19:

1. L'intervention de témoins ou d'un second notaire ;

2. Une dictée du testament par le testateur ;

3. Le testament doit être dactylographié par le notaire ;

4. Une lecture complète du testament ;

5. La signature de celui-ci par le testateur, les témoins (ou le deuxième notaire), et le notaire rédacteur.

16 X, « Introduction sur la dévolution successorale (1/6) », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/introduction-sur-la-devolution-successorale#toc, 31 août 2014.

17 La « réduction » est un mécanisme qui permet de faire respecter le droit des héritiers réservataires, lorsque leur réserve est atteinte.

18 X, « Le testament authentique ou notarié », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-authentique, s.d., consulté le 21 avril 2020.

19 X, « Le testament authentique ou notarié », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-authentique, s.d., consulté le 21 avril 2020.

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-4 Le testament olographe20: Il s'agit d'un testament que le testateur écrit seul. Il doit être daté, signé et écrit en entier à la main par le testateur.

-4 Le testament authentique : « Il présente l'avantage d'être aisément exécuté dans tous les pays étrangers qui ont ratifié la convention adoptant cette forme internationale de testament »21. L'intervention d'un notaire et de deux témoins est nécessaire afin d'établir ce genre de testament.

En effet, il serait possible qu'au décès du de cujus, les biens soient transmis en vertu de la loi mais également par le biais d'un testament. Ce phénomène pourrait avoir lieu lorsque le défunt avait rédigé un testament seulement sur une partie de ses biens. Dans ce cas, le reste des biens de la succession sera dévolu ou attribué selon la loi22.

c) La succession contractuelle23

La succession est contractuelle lorsque le transfert des biens s'est réalisé par le biais d'une convention faite par le défunt. Il peut s'agir d'une donation ou d'une institution contractuelle.

Voici une mise en situation afin de mieux comprendre ces moyens de transmissions :

« Il se peut que par contrat de mariage, ou durant le mariage, le défunt ait fait, en faveur de son époux ou son épouse, une donation de « biens à venir », c'est-à-dire une institution contractuelle qui n'a d'effet qu'à son décès. Dans ce cas, les règles légales relatives aux institutions contractuelles seront d'application, en même temps que celles qui concernent les successions légales et/ou testamentaires »24.

20 X, « Le testament olographe », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-olographe, s.d., consulté le 21 avril 2020.

21 X, « Le testament international », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-international, s.d., consulté le 21 avril 2020.

22 E. DE WILDE D'ESTMAEL, Héritages et testaments, 2e éd., s.l., Vie et Droit, 1988, p.12-13.

23 X, « Introduction sur la dévolution successorale (1/6) », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/introduction-sur-la-devolution-successorale#toc, 31 août 2014

24 E. DE WILDE D'ESTMAEL, Héritages et testaments, 2e éd., s.l., Vie et Droit, 1988, p.12.

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Chapitre 2 : Ouverture de la succession

La succession d'une personne s'ouvre au moment de son décès25. La succession peut également s'ouvrir suite à une décision déclarative d'absence26 ou par une déclaration judiciaire de décès27.

Dès l'ouverture de la succession, le patrimoine du de cujus se transmet, de plein droit, aux personnes appelées soit par la loi, soit par le défunt (par testament ou institution contractuelle).

Le lieu de l'ouverture d'une succession est déterminé par le dernier domicile du défunt au moment de son décès lorsque celle-ci ne présente pas d'élément d'extranéité28. Dans le cas d'une succession internationale, la succession du défunt est déterminée, en principe, par sa résidence habituelle29.

De ce fait, ce sont les tribunaux compétents en fonction de la région où était domicilié le défunt qui seront chargés de trancher les conflits nés de la succession.

I. Capacité pour hériter

a) Généralités

Afin d'acquérir la qualité de successeur, une personne doit :

1) Exister au moment de l'ouverture de la succession30;

2) Avoir la capacité de jouissance ;

3) Ne pas être indigne ou déchue de ses droits successoraux.

25 C. civ., art. 718.

26 C. civ., art. 121, §2.

27 C. civ., art. 131 et 133.

28 C. civ., art. 110.

29 Règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du conseil du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, J.O.U.E, 27 juillet 2012, Art. 4.

30 C.civ., art. 725 et 728.

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b) L'existence (Art. 720 et 725 du Code civil)

En vertu de l'article 725 du Code civil, il faut nécessairement exister au moment de l'ouverture de la succession pour être apte à succéder. C'est-à-dire qu'il faut nécessairement avoir la personnalité juridique car seule une personne juridique peut être titulaire de droits et d'obligations.

Il faut également survivre au défunt pour être héritier ou légataire31. Il s'agit d'une condition principale.

L'article 906 du Code civil précise qu'il faut être né vivant et viable ou être conçu à condition de naître ultérieurement vivant et viable.

c) La capacité de jouissance

L'héritier doit avoir la capacité de jouissance de recueillir les biens du de cujus, c'est-à-dire qu'il doit être apte à être titulaire de droits et d'obligations.

Le mineur d'âge est incapable d'accepter seul une succession ou d'y renoncer. Son ou ses représentant(s) légal(aux) peuvent accepter ou renoncer seul(s) à la succession du mineur d'âge à condition d'avoir une autorisation du Juge de paix.

d) L'indignité et la déchéance (Art. 727, 745 septies et 1429 bis du Code civil)

En vertu de l'article 727 paragraphe 1, premièrement du Code civil, une personne est indigne de succéder lorsque celle-ci a été reconnue coupable d'avoir commis, comme auteur, coauteur ou complice, sur la personne du défunt, un fait qui a provoqué sa mort tel que visé aux articles 376, 393 à 397, 401, 404 et 409, §4 du Code pénal, de même que celle qui est reconnue coupable d'avoir tenté de commettre un tel fait.

31 C. civ., art. 720 et 725.

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En vertu de l'article 727 paragraphe 1, deuxièmement, une personne est indigne de succéder lorsque celle-ci a commis ou tenté de commettre un fait visé à l'article 727, §1, 1° C. civ. - comme auteur, coauteur ou complice - mais qui, parce qu'elle est décédée entre temps, n'a pas été condamnée pénalement pour ce fait.

Dans le cas d'un comportement indigne d'un époux envers l'autre, il peut y avoir la déchéance des avantages matrimoniaux. Cette matière est régie par la loi du 10 décembre 2012.

En vertu de l'article 1429 bis, premier paragraphe, si le conjoint survivant est considéré comme indigne, il perdra tous les avantages qui résulteraient du mode de composition, de fonctionnement, de liquidation ou de partage du patrimoine commun. Il conserve toutefois le droit à la moitié des acquêts, à moins que le contrat de mariage ne lui attribue une part inférieure, que dans ce cas il conserve.

L'article 745 septies du Code civil prévoit que le conjoint survivant peut être exclu ou déchu de ses droits successoraux s'il est déchu de l'autorité parentale à l'égard des enfants issus de son mariage avec le défunt.

La personne qui est dans l'incapacité de succéder est32:

1) Celle qui n'existe plus au moment de l'ouverture de la succession ;

2) Celle qui n'est pas née « viable » ;

3) Celle qui n'a pas encore été conçue au moment de l'ouverture de la succession ;

4) Celle qui est absente.

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32 E. DE WILDE D'ESTMAEL, Héritages et testaments, 2e éd., s.l., Vie et Droit, 1988, p.15.

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II. La décision de l'héritier légal

Une fois que la succession est ouverte et que les successibles sont appelés à succéder, ceux-ci disposent d'un choix appelé option héréditaire qui consiste soit :

1) En l'acceptation pure et simple33 : Ë partir du moment où la succession a été acceptée, elle est irrévocable. Cette acceptation peut se faire de manière expresse ou de manière tacite ;

2) En la renonciation34: La renonciation est irrévocable et doit se faire par acte authentique devant le notaire ;

3) En l'acceptation sous bénéfice d'inventaire35: Accepter la succession sous condition que l'actif soit supérieur au passif. Cette acceptation est faite également devant le notaire.

ü L'héritier légal

Tout d'abord, comment peut-on définir le terme « héritier » ?

L'héritier est une personne physique à qui est attribuée légalement un droit dans la succession du de cujus en tenant compte du lien de parenté qui les unis36.

Le légataire reçoit sa qualité de successeur par le biais d'un testament contrairement à l'héritier qui lui est désigné par la loi.

En vertu de l'article 721 et 725, l'enfant non conçu au décès, l'enfant mort-né, l'enfant né non viable et le comourant n'héritent pas.

33 C. civ., art. 774 à 783.

34 C. civ., art. 784 à 792.

35 C. civ., art. 793 à 810.

36 X, « Les obligations nées du statut des personnes », disponible sur

http://socialsante.wallonie.be/surendettement/professionnel/?q=informations-obligations-personnes-successions-notions-héritiers, s.d., consulté le 10 janvier 2020.

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Les descendants du défunt, le conjoint survivant non divorcé et non séparé de corps, les ascendants, les parents collatéraux et, dans une certaine mesure, le cohabitant légal survivant peuvent avoir les qualités d'héritier37.

Le conjoint survivant est un héritier légitime et occupe une place particulière dans la dévolution successorale. Il a droit à une part ou à toute la succession de son conjoint non pas au nom de la parenté par le sang mais au nom de la parenté par alliance, celle qui découle du mariage38.

L'état est un successeur irrégulier qui recueille la succession du défunt lorsqu'aucun héritier n'est appelé à la succession. L'état peut refuser si la succession du défunt est déficitaire39.

Chapitre 3 : Les droits successoraux du conjoint survivant

I. Qui est le conjoint survivant ?

Afin qu'un conjoint puisse hériter et qu'il puisse bénéficier du statut de conjoint survivant, il faut qu'il existe un mariage (encore valable au moment du jour du décès) entre le défunt et celui-ci.

Le conjoint survivant est l'époux de la défunte, l'épouse du défunt, etc. à condition qu'il ne soit ni divorcés ni séparés de corps au moment du décès40.

Lorsqu'un couple est divorcé, il n'existe plus aucun lien entre eux et ne sont, en conséquence, plus héritiers l'un de l'autre41.

37 C. civ., art. 731.

38 X, « Les obligations nées du statut des personnes », disponible sur

http://socialsante.wallonie.be/surendettement/professionnel/?q=informations-obligations-personnes-successions-notions-héritiers, s.d., consulté le 10 janvier 2020.

39 C. civ., art. 768.

40 X, « Qui est le conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/qui-est-le-conjoint-survivant , s.d., consulté le 10 janvier 2020 ; C. civ., art. 311 bis.

41 X, « Qui est le conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/qui-est-le-conjoint-survivant , s.d., consulté le 10 janvier 2020 ; C. civ., art. 311 bis.

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La loi réserve au conjoint survivant une « part réservataire »42.

II. Le préalable : La liquidation et le partage du régime matrimonial

L'étape qui précède l'analyse des droits successoraux du défunt est la liquidation et le partage de son régime matrimonial. En effet, suite à un événement tragique comme la mort, le mariage prend fin et par conséquent le régime matrimonial se dissout43.

Cette étape est une méthode qui permet de déterminer les parts qui reviennent au conjoint survivant, qui possède le titre d'époux, et celles qui reviennent au défunt, autrement dit à sa succession. De ce fait, la liquidation du régime matrimonial est une étape primordiale afin de soulever le contenu exact de la succession du défunt44.

Cette opération serait différente selon l'hypothèse où les époux étaient mariés sous le régime de communauté ou de séparation de biens pure et simple.

a) Marié sous le régime de la communauté de biens

Le conjoint survivant qui était marié sous le régime de la communauté de biens avec le défunt, recueille de plein droit la moitié du patrimoine commun suite à la liquidation de son régime matrimonial. Peu importe que les économies et les acquêts proviennent de l'effort du de cujus. « Lorsque des personnes mariées sous un régime prévoyant un patrimoine commun acquièrent ensemble un immeuble, celui-ci entre dans le patrimoine commun »45.

42 X, « Qui est le conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/qui-est-le-conjoint-survivant , s.d., consulté le 10 janvier 2020 ; C. civ., art. 311 bis.

43 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

44 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

45 C.C., 24 septembre 2015, n°130/2015, B.5.1.

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Cet avantage que procure ce type de régime matrimonial ne sera jamais considéré comme une libéralité46.

Il conserve bien entendu ses biens propres à savoir : les biens qu'il possédait avant le mariage et ses acquisitions reçus pendant le mariage par le biais d'un testament ou d'un héritage.

b) Marié sous le régime de la séparation de biens

Le conjoint survivant qui était marié au défunt sous le régime de la séparation de biens recueille seulement ses propres biens et sa propre part de l'indivision. En effet, «en l'absence de patrimoine commun entre les époux dans le régime de la séparation des biens, le conjoint survivant est dans l'impossibilité de recueillir la pleine propriété de la part du prémourant dans un patrimoine «commun», et ne peut par conséquent recevoir que des droits d'usufruit»47.

En vertu du régime matrimonial proprement dit, un époux n'a aucun droit sur les économies et les acquêts de l'autre époux. Suite au décès de ce dernier, ses acquêts et ses économies sont transmis systématiquement à sa succession48.

Cependant, les époux pourraient avoir décidé de placer certaines acquisitions sous le régime de l'indivision. On dit que les époux sont indivisaires de ce bien. Dans ce cas, ces acquisitions seront partagées entre le conjoint survivant et la succession de l'époux prédécédé49.

Les règles relatives au régime matrimonial légal sont, dans ce cas, d'aucune importance. C'est le droit commun de la copropriété qui s'appliquera à cette indivision :

Ainsi, «Lorsque des époux mariés sous le régime de la séparation des biens acquièrent ensemble un bien immobilier et souhaitent protéger l'indivisaire en cas de décès d'un des conjoints, il leur est loisible de prévoir, lors de l'acquisition, une clause

46 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020

47 C.C., 24 septembre 2015, n°130/2015, B.4.3.

48 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

49 E. ROIG, « Indivision-définition », disponible sur https://droit-finances.commentcamarche.com/faq/14592-indivision-definition, s.d., consulté le 21 avril 2020.

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d'accroissement en pleine propriété, qui attribuerait la pleine propriété du bien indivis au copropriétaire survivant; il leur est également loisible de prévoir, par libéralité testamentaire, de manière réciproque ou non, l'attribution en pleine propriété de la part du défunt dans l'indivision»50.

c) Marié sous le régime de la communauté universelle de biens

Sous ce type de régime, le conjoint survivant recueille seulement sa propre part dans la communauté en vertu de la liquidation de son régime matrimonial. De ce fait, la succession du défunt se composera seulement de sa part dans la communauté51.

d) L'attribution préférentielle (Art. 1389/1 du Code civil)

Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 22 juillet 2018, la matière de l'attribution préférentielle est réglementé par le nouvel article 1389/1 du Code civil. Avant le 1er septembre 2018, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de ladite loi, cette matière était régie par l'article 1446 du code civil.

Quel que soit le régime sous lequel les époux se sont mariés, lorsque celui-ci prend fin par le décès d'un des époux, le conjoint survivant peut se faire attribuer par préférence, moyennant soulte s'il y a lieu52:

- Un des immeubles servant au logement de la famille ;

- Les meubles meublants qui le garnissent ;

- Les biens, meubles et/ou immeubles, que l'époux utilise pour l'exercice de sa profession ou l'exploitation de son entreprise.

50 C.C., 24 septembre 2015, n°130/2015, B.8.

51 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

52 C. civ., art. 1389/1.

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Ceci pour autant que ses biens, meubles et/ou immeubles appartiennent au patrimoine commun ou au patrimoine qui est en indivision exclusivement entre les époux53.

L'attribution préférentielle déroge à la règle du partage en nature mais non au partage par moitié. Dans certains cas, cette opération a pour objectif de garantir au conjoint survivant la continuité de son activité professionnelle.

e) Les avantages matrimoniaux

L'analyse du contrat de mariage est une étape primordiale car celui-ci peut contenir une ou plusieurs insertions d'avantages matrimoniaux. Les avantages matrimoniaux augmentent les droits du conjoint survivant54 .

Deux définitions différentes ont été données afin de définir «l'avantage matrimonial». Tout d'abord, il est défini comme « le profit que procure à un époux un régime matrimonial ou une clause le modalisant »55 par Raucent. Ensuite, il s'agit de « tout avantage découlant du fonctionnement, de la composition ou de la liquidation-partage du régime matrimonial »56 selon Casman dans son ouvrage intitulé «Les droits de survie ou avantages matrimoniaux du régime de séparation de biens».

Dans le cadre de ce travail, le point concernant les avantages matrimoniaux ne sera pas développé.

III. Capacités requises pour succéder dans le chef du conjoint survivant

Pour pouvoir recueillir la succession de son époux(se) décédé(e), le conjoint survivant doit remplir toutes les conditions précitées au point «capacités pour hériter».

53 C. civ., art. 1389/1.

54 X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 15 janvier 2020.

55 L. RAUCENT, « Les régimes matrimoniaux, 3e éd., Louvain-La-Neuve », Cabay, 1986, n° 362, p. 298.

56 V. DEHALLEUX, « Avantages matrimoniaux et droits de succession », Liège, Larcier, s.d., p. 711.

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En plus des conditions générales, le conjoint survivant doit être marié valablement au défunt au moment du décès de celui-ci. Ceci explique qu'un conjoint ne pourra pas bénéficier des droits successoraux si son mariage a été annulé avant le décès du de cujus.

En vertu de l'article 731 du Code civil, la séparation de corps ne permet pas de bénéficier de ces droits. Cependant, en cas de divorce ou de séparation de corps par consentement mutuel, la loi impose aux époux de décider du sort de leurs droits successoraux dans l'hypothèse où un des deux époux décède durant la procédure57.

Dès lors, la volonté commune des époux déterminera les droits successoraux du conjoint survivant dans une telle hypothèse.

Néanmoins, l'époux ne bénéficie plus des droits de successions une fois que la décision prononçant le divorce acquiert force de chose jugée58.

Suite à une séparation de fait, le conjoint survivant peut être privé de ses droits successoraux moyennant certaines conditions. En vertu de l'article 915 bis, §3, les conditions sont les suivantes59:

-4 Il faut qu'au jour du décès les époux soient séparés depuis plus de 6 mois ;

-4 Il faut que par un acte judiciaire, soit en demandant soit en défendant, le testateur avant son décès ait réclamé une résidence séparée de celle de son conjoint ; -4 Il faut que les époux n'aient plus repris la vie commune depuis cet acte.

Il est important de savoir que le conjoint survivant qui se remarie ne perd pas ses droits successoraux.

57 C. jud., art. 1287, al. 3.

58 C. jud., art. 1278, al. 1.

59 C. civ., art. 915 bis, §3.

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Chapitre 4 : L'étendue des droits successoraux du conjoint survivant

Deux lois ont apporté des modifications importantes aux droits successoraux du conjoint survivant. La loi du 31 juillet 2017 et la loi du 22 juillet 2018 sont entrées en vigueur le 1er septembre 201860. Ces nouvelles lois s'appliquent aux successions ouvertes après le 1er septembre 2018.

Tout d'abord, il y a la loi du 31 juillet 2017 relative à la modification du Code civil concernant les successions et les libéralités. « Cette loi a réformé, en profondeur, le système de la réserve héréditaire, les règles de fond et de forme des pactes relatives aux pactes sur succession future, le régime du rapport des libéralités et des dettes ainsi que plusieurs dispositions en matière de partage et de conversion d'usufruit »61 et la loi du 22 juillet 2018.

Ensuite, la loi du 22 juillet 2018 apporte une modification aux droits successoraux du conjoint survivant. Cette loi a réformé le droit des régimes matrimoniaux et le droit des successions et des libéralités. Cette nouvelle loi modifie certains textes de la loi du 31 juillet 2018 et certaines dispositions anciennes du Code civil relatives aux libéralités ou aux successions62.

I. Les droits attribués au conjoint en fonction des héritiers avec lesquels il est en concours.

Dans ce chapitre, nous allons déterminer les droits successoraux du conjoint survivant, quel que soit le régime matrimonial choisi par les époux.

60 P. MOREAU, « La réforme des successions et des libéralités revue et augmentée », J.T., 2019, p. 665.

61 P. MOREAU, « La réforme des successions et des libéralités revue et augmentée », J.T., 2019, p. 665.

62 P. MOREAU, « La réforme des successions et des libéralités revue et augmentée », J.T., 2019, p. 665.

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a) Le conjoint survivant en concours avec des descendants (Art. 745 bis, §1, al.1 du Code civil).

Le premier paragraphe de l'article 745 bis, alinéa 1er du Code civil - issu de la loi du 14 mai 1981 modifiant les droits successoraux du conjoint survivant- stipule que lorsque le défunt laisse des descendants, des enfants adoptifs ou des descendants de ceux-ci, le conjoint survivant recueille l'usufruit de toute la succession63.

«L'usufruit est un droit, démembré du droit de propriété, d'utiliser et de percevoir les fruits du bien sur lequel il repose. En d'autres termes, l'usufruitier a un droit sur le produit de quelque chose dont quelqu'un d'autre est propriétaire (ce dernier est appelé le «nu- propriétaire»)»64. Il s'agit du droit de jouir de certains biens dont nous ne sommes pas propriétaires.

Le conjoint survivant a donc le droit de jouir, contrairement au nu-propriétaire, de tous les biens qui composent la succession de son époux décédé, et ce, jusqu'à son décès. Dans ce cas, les descendants auront la nue-propriété de ses biens jusqu'au décès du conjoint.

Après son décès, ils deviendront (plein) propriétaires.

ü Qu'est-ce que la nue-propriété ?

«La nue-propriété est en effet le droit de propriété lui-même, temporairement grevé du droit

de l'usufruitier sur le même bien, et, si le nu-propriétaire ne doit rien faire qui nuise à la jouissance de l'usufruitier, il ne lui est pas interdit, sous cette réserve, d'exercer les facultés inhérentes à son droit»65.

L'objectif de la division de la propriété entre les héritiers est de faire bénéficier d'une part le conjoint survivant à qui le législateur a voulu attribuer les moyens de continuer de vivre dans

63 C. civ., art. 745 bis, § 1, al. 1.

64 X, « L'usufruit- l'usage et les fruits », disponible sur https://www.notaire.be/acheter-louer-emprunter/vente-achat-generalites/usufruit, s.d., consulté le 30 janvier 2020.

65 Cass. (1er ch.), 4 novembre 2010, J.L.M.B., 2010, p. 5.

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de bonnes conditions et d'autre part, les descendants du défunt qui sont considérés comme les destinataires naturels des biens du défunt.

Nous pouvons rencontrer une certaine difficulté face à ce genre de situation, notamment :

ü Comment la succession se serait répartie si le défunt avait des enfants d'une précédente union ?

En effet, les enfants d'une précédente union restent dans tous les cas des enfants du défunt

et ont le droit de recueillir la nue-propriété des biens du défunt pour en devenir propriétaire au décès du conjoint survivant.

Par la même occasion, il est important de rappeler le devoir du conjoint survivant envers les enfants d'une précédente union.

b) Le conjoint survivant en concours avec des ascendants et des collatéraux (Art. 745 bis, §1, al.2 du Code civil)

Avant la réforme effectuée par la loi du 22 juillet 201866, l'article 745 bis, §1er, al. 2 du Code civil stipulait que le conjoint survivant qui était en concours avec des héritiers autres que des descendants avait vocation à recueillir :

=> 1 Hypothèse où les époux étaient mariés sous le régime de communauté :

- La pleine propriété de la part du prémourant dans le patrimoine commun (pour autant qu'un patrimoine commun ait existé entre le défunt et son conjoint) ;

66 Loi du 22 juillet 2018 modifiant le Code civil et diverses autres dispositions en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant la loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, M.B., 1er septembre 2018.

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- Et l'usufruit des biens propres du défunt.

=> 2° Hypothèse où les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens :

- L'usufruit des biens propres du défunt.

La loi du 22 juillet 2018 a modifié cet article de telle sorte qu'en cas de concours avec des frères, soeurs, ou descendants de ceux-ci, et/ ou avec des ascendants, le conjoint survivant a vocation à recueillir67:

=> 1° Hypothèse où les époux étaient mariés sous le régime de communauté :

- La pleine propriété de la part du prémourant dans le patrimoine commun et dans le patrimoine en indivision exclusive entre les époux ;

- Et l'usufruit des (autres) biens dépendants du patrimoine propre du défunt.

=> 2° Hypothèse où les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens :

- La pleine propriété des biens indivis entre le défunt et lui-même (pour autant qu'il s'agisse d'une indivision existante exclusivement entre les époux et n'incluant donc pas de tiers) ;

- Et l'usufruit des biens propres du défunt.

Le conjoint survivant recueille désormais la pleine propriété des biens indivis entre les époux même s'ils sont mariés sous le régime de communauté, « par exemple pour les biens que les époux auraient acquis en indivision avant le mariage ou qu'ils auraient acquis en indivision

67 C. civ., art. 745 bis, § 1, al. 2.

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durant leur mariage en (r)emploi68 de fonds propres, et qui n'auraient pas fait l'objet d'un apport en communauté »69.

+ Cas pratiques :

Nous allons à présent visualiser à l'aide d'un cas pratique comment la dévolution de la succession est dévolue avant et après la réforme apportée par la loi 22 juillet 2018 :

Madame Sabrina (Y) décède et laisse comme héritiers légaux sa mère, sa soeur et son époux survivant, Hicham, avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens pure et simple.

Le patrimoine de la défunte se compose (au jour du décès) :

1) D'un appartement acquis en indivision avec son époux d'une valeur de 200 000€ ;

2) D'un portefeuille de titres d'une valeur de 50 000€ ;

3) De deux comptes bancaires auprès de la banque Fortis présentant un solde de 400 000€.

68 L'emploi ou le remploi est un mécanisme légal qui permet d'attribuer le caractère propre à un bien meuble ou immeuble lorsque ce bien a été acquis par un époux pendant le mariage par des moyens financiers propres.

69 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.110.

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TOTAL de la nue-propriété pour la soeur de la défunte : 487 500€ en nue-propriété

Dévolution de la succession avant la réforme (ancien article 745bis, §1er, al.2, C.civ.)70:

1. Le conjoint survivant recueille l'usufruit des biens propres de Y, soit :

(Le conjoint survivant aurait recueilli la pleine propriété de la part de Y dans la communauté s'ils étaient mariés sous le régime de la communauté de biens)

l L'usufruit des biens propres de Y, en d'autres termes l'usufruit de la part de Y dans l'appartement donc 100 000€ en usufruit (et 100 000€ en pleine propriété) ;

l L'usufruit du portefeuille de titres (50 000€ en usufruit) ;

l Et l'usufruit des actifs bancaires (400 000€ en usufruit).

TOTAL de l'usufruit pour le conjoint survivant : 550 000€

TOTAL de la nue-propriété pour la mère de la défunte : 137 500€

2. La mère recueille 1/4 de la nue-propriété des biens propre de Y, soit :

l 1/4 en NP de la part de Y dans l'appartement (25 000€ en NP) ;

l 1/4 en nue-propriété du portefeuille de titres (12 500€ en NP) ;

l 1/4 en nue-propriété des actifs bancaires (100 000€ en NP).

3. La soeurs recueille 3/4 de la nue-propriété des biens propres de Y, soit :

l 3/4 en nue-propriété de la part de Y dans l'appartement (150 000€ en NP) ;

l 3/4 en nue-propriété du portefeuille de titres (37 500€ en NP) ;

l 3/4 en nue-propriété des actifs bancaires (300 000€ en NP).

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70 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.110.

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2.

4.

part dans l'immeuble indivis, soit :

l 1/4 en nue-propriété du portefeuille de titres (12 500€ en NP) ;

l 1/4 en nue-propriété des actifs bancaires (100 000€ en NP).

part dans l'immeuble indivis, soit :

l 3/4 en nue-propriété du portefeuille de titres (37 500€ en NP) ;

l 3/4 en nue-propriété des actifs bancaires (300 000€ en NP).

Dévolution de la succession après la réforme (nouvel article 745bis, §1er, al.2, C.civ.)71 1. Le conjoint survivant recueille :

l La pleine propriété de la part de Y dans l'immeuble indivis, soit 200 000€ en plein propriété ;

l L'usufruit des (autres) biens propres de Y, soit :

TOTAL de la part du conjoint survivant : 200 000€ en PP et 450 000€ en usufruit.

TOTAL de la nue-propriété pour la mère de la défunte : 112 500 € en nue-propriété

TOTAL de la nue-propriété pour la soeur de la défunte : 337 500€ en nue-propriété

-4 L'usufruit du portefeuille de titres (50 000€ en usufruit) ;

-4 L'usufruit des actifs bancaires (400 000€ en usufruit).

La mère recueille 1/4 de la nue-propriété des biens propres de Y à l'exclusion de sa

La soeur recueille 3/4 de la nue-propriété des biens propres de Y à l'exclusion de sa

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71 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.110.

J.S

Nous pouvons constater, suite à l'analyse de cet article et suite au cas pratique, que la loi du 22

juillet 2018 ne prend plus en compte le régime sous lequel les époux étaient mariés afin de

déterminer les droits successoraux du conjoint survivant. Depuis cette réforme, le conjoint

survivant recueille la pleine propriété de la part de son conjoint dans les biens indivis lorsque les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens.

Le législateur considère que les liens entre les époux sont généralement plus forts que les liens avec les héritiers du deuxième et du troisième ordre. C'est pour cette raison que cette réforme octroie au conjoint survivant, marié sous le régime de la séparation de biens, des droits complémentaires et identiques à ceux de l'époux commun en biens72.

« Ce fondement lui permet ainsi d'attribuer au conjoint survivant la pleine propriété de biens propres qui auraient été apportés par le prémourant au patrimoine commun ou à une société accessoire »73.

Si les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens et qu'ils partagent un bien en indivision avec d'autres personnes que les époux ; le conjoint survivant ne recueille que l'usufruit de la part du prémourant dans l'indivision74.

Nous pouvons être confrontés à la situation où les époux mariés en communauté ont acquis des biens avant leur mariage. Dans ce genre de situation, le conjoint survivant recueille la pleine propriété desdits biens.

c) Le conjoint survivant est en concours avec des ascendants ordinaires et des collatéraux ordinaires

Le conjoint survivant pourrait être en concours avec des ascendants ordinaires et des collatéraux ordinaires.

72 Proposition de loi modifiant le Code civil en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, exposé des motifs, Doc., Ch., 2017-2018, n°2848/001, p.23.

73 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 275.

74 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 275.

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Commenté [1]: a vérifier PG 274 fabienne

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La loi du 22 juillet 2018 apporta une modification à la règle de la fente comme susmentionné et énoncée à l'article 753 C.civ. Désormais, le nouvel article 754/1, al. 2 du code civil stipule que : « Le partage de la succession par moitié, visé à l'article 753, n'a pas lieu lorsque le défunt laisse un conjoint survivantÓ75. Ces nouveaux propos expliquent que la règle de la fente ne s'applique plus en cas de présence d'un conjoint survivant76.

La règle de la fente consistait en la division en deux parts égales de la succession : l'une, pour les parents de la ligne paternelle et l'autre, pour ceux de la ligne maternelle et la part revenant à chaque famille était dévolue de manière distincte77.

75 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.110.

76 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.110.

77 X, « Les obligations nées du statut des personnes », disponible sur

http://socialsante.wallonie.be/surendettement/professionnel/?q=informations-obligations-personnes-successions-devotion-fente, s.d., consulté le 21 avril 2020.

J.S

Supposons que Sabrina, décédée, laisse comme successible son grand-père paternel, sa tante maternelle ainsi que son conjoint, Hicham. Dans ce cas, l'article 754/1, al. 2 du Code civil dispose que le conjoint survivant recueille78:

- La pleine propriété de la part du prémourant dans les biens communs ou indivis et

l'usufruit des biens propres.

Tandis que le grand-père paternel recueille :

- La nue-propriété de la totalité des biens propres du défunt.

On constate donc que les parents du 4ème ordre sont exclus de la succession et que ceux du 3ème ordre sont appelés à recueillir la nue-propriété du patrimoine propre du défunt. Le conjoint recueille tout le reste de la succession.

+ Cas pratiques :

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d) Le conjoint survivant est en concours avec des collatéraux ordinaires (Art. 745 bis, §1er, al.2 du Code civil)

Avant la réforme effectuée par la loi du 22 juillet 2018, l'article 745 bis, §1er, al. 2 du Code civil stipulait que le conjoint survivant qui était en concours avec des héritiers autres que des descendants, en ce compris les collatéraux ordinaires du 4ème ordre (oncle, tante...) avait droit à recueillir :

- La pleine propriété de la part du prémourant dans le patrimoine commun (pour autant qu'un patrimoine commun ait existé entre le défunt et son conjoint) ;

78 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 276.

J.S

- L'usufruit des biens propres ou personnels du défunt.

Depuis la réforme apportée par la loi du 22 juillet 2018, les successibles du 4ème ordre perdent tous leurs droits dans la succession en présence d'un conjoint survivant79.

Le conjoint survivant qui est en concours avec des héritiers du 4ème ordre, c'est-à-dire des tantes, des oncles ou des descendants de ceux-ci, sont appelés à recueillir la pleine propriété de toute la succession à l'instar de l'hypothèse où le défunt ne laisse aucun successible. Cette nouvelle vocation légale n'a lieu seulement si le défunt laisse comme seule successible son conjoint et des héritiers du 4ème ordre80.

Cette nouvelle disposition est énoncée à l'article 754/1, al. 1er, du Code civil et prévoit désormais que « les collatéraux autres que les frères ou soeurs du défunt ou leurs descendants n'héritent pas lorsque le défunt laisse un conjoint survivant »81.

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79 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.111.

80 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.111.

81 C. civ., art. 754/1, al 1.

J.S

+ Cas pratiques :

Nous allons à présent mettre en application cette nouvelle vocation légale à l'aide d'un cas pratique afin de mieux visualiser celle-ci.

Madame Sabrina (Y) décède et laisse comme seuls héritiers légaux son oncle paternel et son époux survivant (CS), Hicham, avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens pure et simple.

Le patrimoine de la défunte se compose (au jour du décès) :

1) D'un appartement acquis en indivision avec son époux d'une valeur de 200 000€ ;

2) D'un portefeuille de titres d'une valeur de 50 000€ ;

3) De deux comptes bancaires auprès de la banque Fortis présentant un solde de 400 000€ ;

4) La défunte n'avait contracté aucune dette.

Dévolution de la succession avant la réforme (ancien article 745bis, §1er, al.2, C.civ.)82 :

1. Le conjoint survivant recueille :

(La pleine propriété de la part de Y dans la communauté s'ils étaient mariés sous le régime de la communauté des biens ce qui est sans objet dans ce cas pratique)

l L'usufruit des biens propres de Y, en d'autres termes l'usufruit de la part de Y dans l'appartement donc 100 000€ en usufruit (et 100 000€ en pleine propriété) ;

l L'usufruit du portefeuille de titres (50 000€ en usufruit) ;

l Et l'usufruit des actifs bancaires (400 000€ en usufruit). TOTAL de l'usufruit pour le conjoint survivant : 550 000€

2. L'oncle paternel recueille la nue-propriété des biens propres de Y :

l La NP de la part de Y dans l'appartement (100 000€ en NP) ;

l La nue-propriété du portefeuille de titres (50 000€ en NP) ;

l La nue-propriété des actifs bancaires (400 000€ en NP).

TOTAL de la nue-propriété pour l'oncle paternel de la défunte : 550 000€

82 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, pp. 111 à 112.

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Dévolution de la succession après la réforme (nouveaux articles 745bis, §1er, al.3, et 754/1, al. 1er, C.civ.)83:

l Le conjoint survivant recueille toute la succession en pleine propriété = 650 000€

L'oncle paternel ne recueille rien.

e) Le conjoint survivant n'est en concours avec aucun successible (Art. 745 bis du Code civil)

En vertu de l'article 745 bis, lorsque le défunt ne laisse aucun autre successible, son conjoint recueille la pleine propriété de toute la succession84. La nouvelle loi n'a apporté aucune modification à cette règle.

II. Les droits attribués au conjoint survivant quels que soient les héritiers avec lesquels il est en concours

a) L'usufruit des biens soumis au droit de retour légal (Art. 745 bis du Code civil)

Le « droit de retour légal » est le droit en vertu duquel un bien, acquis à titre gratuit suite à une donation ou autre, retourne à la personne à qui il appartient (ou à ses descendants).

En vertu de l'article 745 bis, §2, du Code civil, le conjoint survivant a l'usufruit des biens soumis au droit de retour légal.

En effet, ce droit est attribué au conjoint survivant quels que soient les héritiers avec lesquels il est en concours, à condition qu'il n'en soit pas privé dans l'acte de donation ou par testament.

En effet, il peut être prévu qu'il n'y a pas de retour légal possible.

83 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 112.

84 C. civ., art. 745 bis, § 1er, al. 3.

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b) Le droit au bail relatif à la résidence commune (Art. 745 bis du Code civil)

Ce droit est établi par l'article 745 bis, §3 du Code civil et n'a pas été modifié par les dispositions des lois du 31 juillet 2017 et du 22 juillet 2018.

Le conjoint survivant a droit au bail relatif à l'immeuble affecté à la résidence commune au moment de l'ouverture de la succession du défunt85.

c) L'usufruit successif (Art. 858 bis du Code civil)

La loi du 31 juillet 2017 a également apporté une modification à l'article 858 bis du Code civil concernant l'usufruit successif légal du conjoint survivant.

Avant cette réforme, le conjoint donateur qui réalisait une donation avec réserve d'usufruit, perdait cet usufruit une fois qu'il était décédé et permettait au donataire bénéficiaire de requérir la pleine propriété des biens donnés.

Cette nouvelle réforme du droit successoral privilégie le conjoint survivant et lui accorde le droit de recueillir l'usufruit des biens donnés par son conjoint si celui-ci s'en était réservé l'usufruit86. Il s'agit donc d'une nouvelle vocation légale particulière reconnue au conjoint survivant et qui s'applique, de manière exceptionnelle, aux biens qui ne font plus partie de la succession au jour du décès87.

Il a été appelé « usufruit successif » car il ne s'agit pas d'un prolongement de l'usufruit du donateur mais plutôt d'un nouveau droit d'usufruit, de type successoral, qui prend cours suite au décès du donateur88.

85 C. civ., art. 745 bis, § 3.

86 C. civ., art. 858 bis, § 3.

87 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.113.

88 A. CULOT et P. DE PAGE, « Les nouvelles règle du droit civil des successions applicable à l'usufruit «successif » du conjoint survivant - Articles 858bis et 745 quater, §1/1, du Code civil », Rec.gén.enr.not.2019/4 - (n°27.208), s.d., p.174.

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Le conjoint survivant recueille cet usufruit successif quel que soit le bénéficiaire de la donation.

ü But

Les travaux préparatoires89 précisent que le but de cet usufruit est de permettre au conjoint survivant, en sa qualité d'héritier légal, de poursuivre l'exercice de l'usufruit que le défunt (donateur) s'était réservé sur le bien donné.

ü Conditions

Des conditions sont requises afin de pouvoir bénéficier de cette vocation en usufruit90 :

1) Le conjoint survivant doit réunir les qualités requises pour hériter et venir à la succession.

2) Le conjoint survivant a droit à l'usufruit successif seulement si la donation a eu lieu après le mariage. Cette vocation n'a pas lieu si le conjoint survivant ne jouissait pas de la qualité de conjoint au moment de la donation91.

3) Le donateur doit s'être réservé l'usufruit des biens qui font l'objet de la donation jusqu'au jour de son décès. Il faut que le donateur reste titulaire du droit d'usufruit jusqu'au jour de son décès pour pouvoir faire bénéficier le conjoint survivant d'un éventuel droit d'usufruit successif.

89 Les travaux préparatoires sont l'ensemble des documents qui sont produits lors des différentes étapes de la procédure législative ou budgétaire.

90 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 269.

91 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.113.

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Le droit d'usage92 et d'habitation93 ne peuvent pas être transmis au conjoint suite au décès du donateur.

Il faut que le donateur reste titulaire du droit d'usufruit jusqu'au jour de son décès pour pouvoir faire bénéficier le conjoint d'un éventuel droit d'usufruit successif.

Les dispositions prévues aux articles 745 ter à 745 septies du Code civil relatives à la conversion de l'usufruit successoral du conjoint survivant s'appliquent à cette usufruit successif94.

L'usufruit successif est un droit successoral légal. De ce fait, le conjoint survivant ne peut pas accepter seulement l'usufruit successif ou encore accepter la succession et renoncer à son usufruit successif95. Le donateur ne peut pas empêcher à son conjoint de bénéficier de l'usufruit successif dans l'acte de donation.

ü Comment le donateur peut-il priver son conjoint de cet usufruit successif 96 ?

-4 Par la rédaction d'un testament (en respectant la réserve héréditaire de son conjoint) ; -4 En renonçant, avant son décès, à l'usufruit des biens donnés.

Les modalités particulières qui s'appliquent à l'usufruit du donateur et qui sont prévues dans l'acte de donation ne s'appliquent pas à l'usufruit successif recueilli par le conjoint survivant97.

92 Le droit d'usage est le droit pour son titulaire d'utiliser le bien, mais aussi d'en percevoir les éventuels fruits (revenus...). Ce droit peut s'exercer sur des biens mobilier et immobilier.

93 Le droit d'habitation est un droit réel, comme tel, il fait l'objet d'une publicité foncière, il est viager, personnel, insaisissable et incessible et il est conféré à une personne pour lui permettre d'y loger avec sa famille dans un immeuble bâti.

94 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.113.

95 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 269.

96 E. DASSY, « Réforme du droit successoral (2ème partie) - Usufruit successif légal », disponible sur https://www.avocatslenoir.com/news/65/66/Reforme-du-droit-successoral-2eme-partie-Usufruit-successif-legal.html, 22 janvier 2019.

97 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 269.

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Cependant, cette privation ne doit pas porter préjudice aux règles relatives à la réserve du conjoint survivant.

ü Renonciation du conjoint à l'usufruit successif

Le donateur peut priver son époux de l'usufruit successif mais l'époux peut également renoncer à cet usufruit successif.

En vertu de l'article 858 bis, §6 du Code civil, le conjoint survivant peut renoncer à l'usufruit successif. Pour se faire, il faut réaliser une déclaration de renonciation à l'usufruit avant le décès du donateur. La déclaration doit être faite tout en respectant les formalités énoncées aux articles 1100/2 à 1100/6 du Code civil98.

Le conjoint peut également renoncer à cet usufruit successif après le décès du donateur, soit ab

initio (en même temps que ses droits successoraux légaux) ou postérieurement.

v Cas pratiques

Madame Sabrina (Y) décède en laissant pour seuls héritiers légaux sa fille, Djanet, et son époux survivant, Hicham, avec lequel elle était mariée sous le régime de la séparation de biens pure et simple.

Le patrimoine de la défunte se compose (au jour du décès) :

1) D'un appartement acquis en indivision avec son époux d'une valeur de 200 000€ ;

2) D'un portefeuille de titres d'une valeur de 50 000€ ;

3) De deux comptes bancaires auprès de la banque Fortis présentant un solde de 400 000€ ;

4) (Aucune dettes).

Madame Y avait donné à un ami la nue-propriété d'un piano d'une valeur de 50 000€, en se réservant l'usufruit.

98 A. CULOT et P. DE PAGE, « Les nouvelles règle du droit civil des successions applicable à l'usufruit «successif» du conjoint survivant - Articles 858bis et 745 quater, §1/1, du Code civil », Rec.gén.enr.not.2019/4 - (n°27.208), s.d., p.175.

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Commenté [2]: l'usufruit successif c'est aussi un droit successoral légal non?

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Dévolution de la succession avant la réforme (article 745bis, §1er, al.1er, C.civ.)99:

Dévolution de la succession après la réforme (article 745bis, §1er, al.1er, et nouvel article 858 bis, §3, al .1er, C.civ.)100

- Le CS recueille l'usufruit de toute la succession (= 650 000 en usufruit) et l'usufruit du piano (=50 000€ en usufruit) => Usufruit successif.

- Le CS recueille l'usufruit de toute la succession sauf l'usufruit du piano. => Total de l'usufruit = 650 00€

- La fille recueille la nue-propriété de toute la succession. => Total de la nue-propriété = 650 000€

=> Total de l'usufruit = 700 000€

=> Total de la nue-propriété = 650 000€.

- La fille recueille la nue-propriété de la succession (=650 000 en NP) mais ne bénéficie d'aucun droit sur le piano donné au tiers.

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99 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.114.

100 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.114.

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Chapitre 5 : Les droits successoraux réservataires du conjoint

La réserve est une part de la succession qui est réservée à quelques héritiers déterminés : les héritiers réservataires. Ces derniers ne peuvent être privés de cette réserve par le biais d'actes à titre gratuit établi par le défunt101.

«Le droit réservataire est protégé par l'action en réduction, dont l'objectif est de ramener les libéralités consenties par le défunt dans les limites de la quotité disponible, afin de permettre aux héritiers réservataires de bénéficier de leur réserve (qui constitue leur part minimale dans la succession)»102.

Les héritiers réservataires sont :

1. Les descendants du défunt : la loi du 31 juillet 2017 maintient la réserve des descendants.

2. Les ascendants du défunt : la réserve des ascendants a été supprimé par la loi du 31 juillet 2017103.

3. Le conjoint survivant : la loi du 31 juillet 2017 maintient la réserve du conjoint survivant.

L'octroi d'une réserve au conjoint survivant a été longuement réfléchi par les deux instances parlementaires. Finalement, il a été réglementé que le conjoint survivant avait droit à une réserve. Les deux instances parlementaires ont justifié, en 1981, cette élévation du conjoint survivant au rang d'héritier réservataire par le fait que lorsqu'un conjoint survivant devient héritier légal, il devient systématiquement un héritier réservataire104.

101 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par la loi du 31 juillet 2017 : premier tour d'horizon », Notamus, 2017, p.57.

102 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par la loi du 31 juillet 2017 : premier tour d'horizon », Notamus, 2017, p. 57.

103 C. civ., art. 205 bis, §2.

104 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., pp. 279 à 281.

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La loi du 14 mai 1981 modifiant les droits successoraux du conjoint survivant a été adoptée et assure dès lors une part réservataire au conjoint survivant105. Cette même loi a donc fait du conjoint survivant un héritier à part entière, et un héritier réservataire.

Accorder une réserve au conjoint survivant c'est lui accorder une protection. Cette protection est liée à un besoin. En effet, il est important d'assurer la continuité du devoir de secours mutuel au décès d'un des époux106.

«Par ailleurs, il nous semble également qu'en sa qualité de conjoint, le survivant est légitimement en droit de continuer à demeurer dans le logement familial, du moins durant une certaine période, ceci tant pour des raisons matérielles qu'affectives»107.

La loi du 14 mai 1981 octroyait donc une réserve au conjoint survivant assez différente que celle accordée pour les ascendants et les descendants.

I. L'étendue de la réserve du conjoint survivant

La nouvelle loi du 31 juillet 2017 conserve le même principe que l'ancienne loi c'est-à-dire le principe d'une réserve à double composante dans le chef du conjoint survivant :

- Une réserve dits «abstraite», qui correspond à l'usufruit de la moitié des biens de la succession et plus précisément, l'usufruit de la moitié de la masse de calcul du disponible108.

- Une réserve dits «concrète» (également appelée réserve qualitative109), qui porte sur l'usufruit des biens dit «préférentiels». Les biens préférentiels sont, entre autres,

105 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., pp. 279 à 281.

106 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 280.

107 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 281.

108 C. civ., art. 915 bis, §1.

109 Y.-H. LELEU et L. RAUCENT, « Régimes matrimoniaux - La réforme de 1976 », Rép. not., Bruxelles, Larcier, 2002, n° 101, p. 266.

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l'immeuble affecté au logement principal de la famille et les meubles meublants qui l'occupent, au jour de l'ouverture de la succession110.

Cependant, le conjoint survivant a systématiquement droit à la réserve concrète de telle manière qu'il peut la faire valoir même dans l'hypothèse où celle-ci excède l'usufruit de la moitié de la masse de calcul. En effet, le calcul de la réserve du conjoint survivant ne prend pas en considération la réserve dite «concrète»111.

Ce sont deux réserves qui se combinent. Ainsi :

« -Soit la valeur des biens préférentiels excède la moitié de la masse sur laquelle se calcule la réserve de principe (c'est-à-dire la masse de calcul du disponible telle que visée à l'article 922 du Code civil) et le conjoint a droit, à titre de réserve, à l'usufruit des biens préférentiels ;

-Soit la valeur des biens préférentiels est inférieure à la moitié de la masse sur laquelle se calcule la réserve de principe, et le conjoint a droit, à titre de réserve, à l'usufruit des biens préférentiels augmenté du complément d'usufruit nécessaire pour atteindre la moitié de ladite masse en usufruit »112.

La loi du 31 juillet 2017 examine également l'aspect technique de la réserve du conjoint survivant, et en conclut que :

- « La réserve «concrète» du conjoint survivant porte sur le droit au bail relatif à l'immeuble affecté au logement principal de la famille, au jour de l'ouverture de la succession »113 lorsque le logement familial n'est pas la propriété du défunt mais consiste en un bail114.

110 C. civ., art. 915 bis, §2.

111 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p.282.

112 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 175.

113 C. civ., art. 915 bis, § 2, al.1.

114 C. civ., art. 915 bis, § 2, al.1.

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- La réserve «abstraite» du conjoint survivant comprend l'usufruit de la moitié «de la masse visée à l'article 922»115. Cette masse visée à l'article 922 du Code civil correspond à la masse successorale reconstitué afin de calculer la quotité disponible du défunt.

ü Comment se déroule le mécanisme de la masse successorale reconstitué ?

L'article 922 du Code civil prévoit sur quoi va porter la réserve abstraite du conjoint survivant. Cet article stipule que «la réduction se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur ou testateur. Après déduction des dettes, on y réunit fictivement ceux dont il a été disposé par donations entre vifs, d'après leur état et leur valeur telle que définie à l'article 858, §§ 3 à 5. On calcule sur tous ces biens quelle est, eu égard à la qualité des héritiers qu'il laisse, la quotité dont il a pu disposer»116.

En d'autres termes, la loi du 31 juillet 2017 prévoit plusieurs étapes afin d'établir la masse successorale reconstituée. Tout d'abord, il faut créer une masse avec l'ensemble des biens existant au décès du donateur ou du testateur. Ensuite, nous allons déduire les dettes. Enfin, ce mécanisme prévoit de réunir fictivement l'ensemble des donations que le défunt avait consenti avant son décès. Nous pourrons, sur base de ces biens, reconstitué la masse successorale ainsi que la quotité disponible.

ü Qu'est-ce que la quotité disponible ?

La masse successorale se divise, en quelque sorte, en deux parties. Il y a tout d'abord la partie réservée aux héritiers réservataires qui se compose de leurs réserves.

115 C. civ., art. 915 bis, §1.

116 C. civ., art. 922.

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« La « réserve » est donc la part minimale d'héritage dont ces héritiers ne peuvent être privés : cette partie est intouchable. Ensuite, le reste de l'héritage, dont le défunt peut disposer librement est appelée la « quotité disponible »117.

La masse successorale

La nouvelle loi a apporté des modifications ainsi que des précisions quant aux conditions d'exhérédation du conjoint survivant, en ce compris la suppression de sa réserve héréditaire.

II. Le conjoint survivant face aux donations consenties par le défunt avant le mariage (Art. 915 bis, §2/1 du Code civil)

117 X, « La réserve et la quotité disponible », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-donations/que-peut-on-donner/reserve-et-quotite-disponible, s.d., consulté le 3 mai 2020.

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L'article 915 bis, §2/1, nouveau, du Code civil stipule que le conjoint survivant n'a plus la possibilité de solliciter, ni de profiter de la réduction des donations consenties par le défunt à une époque où les époux n'étaient pas encore mariés118.

Cependant, ce principe n'empêche pas le fait que les donations doivent être reprises dans la masse de calcul au départ de laquelle la réserve dite «abstraite» du conjoint est calculée (disponible)119.

Ce principe s'applique en toute hypothèse, de telle sorte que120:

-4 Les héritiers avec lesquels le conjoint est en concours n'ont pas d'importance ;

-4 L'identité du ou des bénéficiaire(s) de la ou les donation(s) n'a pas d'importance ;

-4 Même si l'objet de la donation est le logement familial au jour du décès ainsi que les

meubles qui le garnissent.

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118 C. civ., art. 915 bis, § 2/1.

119 C. civ., art. 915 bis, § 2/1.

120 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 283.

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v Cas pratiques121

Supposons que Sabrina, actuellement décédée, a consenti une donation à sa meilleure amie (300.000€) avant son mariage et une donation à son frère (100.000€) après son mariage avec Hicham. Sabrina ne laisse aucun bien existant mais un époux survivant, Hicham.

Nous pouvons en déduire que la masse de calcul s'élève à 400.000€ (100.000€ + 300.000€). Sachant qu'il n'existe pas de biens préférentiels, il n'y aura donc pas de réserve «concrète» dans le chef du conjoint survivant. De ce fait, la réserve dite «abstraite» de Hicham s'élève à 200.000€ en usufruit.

La donation consentie avant le mariage a été comptabilisée dans le but de calculer le quantum de sa réserve. L'article 915 bis, §4, stipule que la réserve du conjoint doit grever par priorité la quotité disponible.

Le conjoint survivant, Hicham, ne peut pas réclamer la réduction de la donation consentie à la meilleure amie car cette donation a eu lieu avant le mariage. Par contre, la donation consentie au frère de la défunte se verra entièrement réduite. Hicham aura droit à l'usufruit de 100.000€ (avant capitalisation de l'indemnité de réduction). Cette réduction ne remplira pas totalement les droits réservataires du conjoint survivant, chiffrés à 200.000€ en usufruit.

Hypothèse :

Cependant, si la réserve de Hicham avait été calculée seulement sur base de la donation consentie au frère après le mariage, la masse de calcul se serait élevé à 100.000€. Concernant les droits réservataires du conjoint survivant, ceux-ci se seraient élevés à 50.000€ en usufruit. La donation au frère aurait été réduite à concurrence de 50 000€ en usufruit et non pas à concurrence de 100.000€.

121 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 284.

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Chapitre 6 : L'application simultanée de la réserve des descendants et des droits successoraux du conjoint survivant

Nous allons, dans l'étendue de ce chapitre, étudié les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant.

En effet, lorsque des descendants du défunt viennent à la succession légale et qu'ils sont en concours avec le conjoint survivant, une problématique se pose :

ü Comment préserver la réserve des enfants en pleine propriété ainsi que la vocation en usufruit du conjoint survivant ?

La loi du 31 juillet 2017 relatives aux successions et aux libéralités122 a tenté de répondre à cette problématique en modifiant l'article 915 bis du Code civil. De plus, cette même loi a entièrement réécrit l'article 914 du Code civil dans le but de préciser les cas et les mesure dans lesquels la réserve des descendants sera grevée de l'usufruit, ab intestat ou réservataire, du conjoint survivant123.

Deux hypothèses principales sont, ainsi, établies par le législateur124:

1) L'hypothèse selon laquelle le conjoint survivant a droit à l'usufruit de l'ensemble de la succession, conformément à sa vocation légale125.

122 Loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, M.B., 1er septembre 2017.

123 P. MOREAU et N. GOFFLOT, « Les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant », J.T., 2019, p. 690.

124 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 201.

125 C. civ., art. 914, § 1.

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2) L'hypothèse selon laquelle les droits successoraux du conjoint survivant ont été limités126. Les droits successoraux ont été limités à :

A. L'usufruit d'une fraction de la succession127 ;

B. L'usufruit de la moitié de la masse de calcul de l'article 922, en outre à sa réserve abstraite128 ;

C. L'usufruit de certains biens déterminés de la succession129.

I. L'hypothèse selon laquelle le conjoint survivant a droit à
l'usufruit de l'entièreté de la succession (Art. 914, §1er, C.civ)

L'article 914, §1er du Code civil stipule que « la portion de la succession qui est réservée aux enfants conformément à l'article 913, n'est grevée d'usufruit au profit du conjoint survivant que lorsque celui-ci a droit à l'usufruit de toute la succession, et dans la mesure déterminée à l'article 858 ter »130.

En outre, le conjoint survivant qui a vocation à recueillir l'usufruit de toute la succession recueille l'usufruit des biens existant131 au jour du décès. Il recueille également l'usufruit des biens donnés par le de cujus, dont il s'était réservé l'usufruit, conformément à l'article 858 bis132.

Cependant, la vocation en usufruit du conjoint ne grèvera pas les biens que le défunt aura légués en avance d'hoirie à des descendants, sauf dans le cas où la donation a été faite antérieurement au 1er septembre 2018133.

126 C. civ., art. 914, § 2.

127 C. civ., art. 914, § 2, 1°.

128 C. civ., art. 914, § 2, 2°.

129 C. civ., art. 914, § 2, 3°.

130 C. civ., art. 914, § 1.

131 Par biens existants on entend tous les biens, sauf ceux que le défunt à légués à d'autre personnes

132 P. MOREAU et N. GOFFLOT, « Les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant », J.T., 2019, pp. 690-691.

133 P. MOREAU et N. GOFFLOT, « Les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant », J.T., 2019, p. 692.

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Dans cette hypothèse, l'usufruit auquel le conjoint a droit grève les biens que les descendants du défunt recueillent en tant qu'héritiers légaux. De ce fait, les parts réservataires de ces derniers sont donc affectés et sont, en conséquence, restreintes à la nue-propriété de la moitié de la masse de calcul de l'article 922 du Code civil134.

+ Cas pratiques135:

Madame Sabrina, atteinte d'un cancer, décède le 19 novembre 2018. Elle laisse pour seuls héritiers légaux et réservataires son époux, Hicham (CS) et ses deux filles, Nafess (F1) et Djanet (F2).

Avant son décès, Sabrina avait réalisé plusieurs donations car elle était au courant qu'il ne lui restait pas beaucoup de temps à vivre :

1) Le 10 février 2014 : tout d'abord, elle avait consenti à sa fille Nefess (F1) une donation d'une villa estimée à 420.000€ au jour de la donation. Nefess était désormais pleine propriétaire de cet immeuble. L'acte de donation stipule deux choses importantes :

- Que cette donation est reportable en nature à l'égard de Hicham (CS) ;

- Que cette donation est reportable en valeur à l'égard de Djanet (F2).

L'immeuble est estimé à 500.000€ au jour du décès (valeur inchangée au jour du partage)

2) Le 3 mai 2015 : suite à la jalousie de sa deuxième fille, Sabrina avait consenti une donation portant sur un portefeuille de titres à Djanet (F2) estimé à 10.000€ au jour du décès (valeur inchangée au jour du partage). Sabrina s'en était réservé l'usufruit. L'acte de don précise deux choses importantes :

- Que cette donation est reportable à l'égard de Djanet (F2) ;

- Que cette donation est dispensée de rapport136 à l'égard de Hicham (CS).

134 C. civ., art. 858 ter. et art. 914, § 1.

135 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p.298.

136 Le rapport est un mécanisme qui permet de prendre en compte les donations consentis du vivant du défunt dans la succession, afin de rétablir l'égalité entre les héritiers.

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3) Le 14 juin 2018 : Sabrina avait consenti une seconde donation à sa fille Djanet (F2) portant sur des titres estimés à une valeur de 15.000€ au jour du décès (valeur inchangée au jour du partage). La défunte s'en était réservé l'usufruit. L'acte de donation précise

:

- Que cette donation est rapportable à l'égard de Nefess (F1).

L'actif net de la succession de Sabrina est d'un montant de 100.000€.

Une question essentielle se pose :

Quels sont respectivement les droits de Hicham, de Nefess et de Djanet dans la succession

de Sabrina ?

En vertu de l'article 745 bis, §1er, al 1 du Code civil, la dévolution légale s'établit comme suit

:

1) Le conjoint survivant recueille l'usufruit de toute la succession ;

2) F1 recueille la moitié de la succession en nue-propriété ;

3) F2 recueille l'autre moitié de la succession en nue-propriété.

Concernant les réserves légales :

1) Le conjoint survivant recueille l'usufruit de la moitié de la succession ;

2) F1 recueille '/4 de la succession en nue-propriété ;

3) F2 recueille '/4 de la succession en nue-propriété.

La quotité disponible s'élève à la moitié de la succession.

Analyse137:

A. Masse de calcul du disponible (MCD)

137 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 201.

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J.S

L'article 858, §3, al.1, du Code civil stipule que la valeur des biens donnés au jour de la

donation doit en principe être indexée conformément à l'indice des prix à la consommation, dans le cadre de l'établissement de la masse de calcul du disponible.

Voici la formule d'indexation :

Valeur au jour de la donation X Nouvel indice (=> indice du mois de décès)

Indice de base (=> indice du mois de la donation)

Biens existants :

1.000.000,00€

- Dettes :

- 0,00€

+ Donations :

 

1) Donation consentie en février 2014 à F1

Calcule :

420.000 X 108,48 (indice novembre 2018 - base 2013138)

100,66 (Indice février 2014 - base 2013)

Solution : 452.628,65€

2) Donation consentie en mai 2015 à F2

10.000,00€

3) Donation consentie en juin 2018 à F2

15.000,00€

 

TOTAL =

1.477.628,65€

138 Voir annexes n°2

52

J.S

Suite à ces calculs, nous en concluons que la quotité disponible s'élève à 738.814,32 € (MCD/2) et que la réserve globale de F1 et F2 s'élève également à 738.814,32€ : Chacune ayant droit à une réserve de 369.407,16 €.

Le total des libéralités préciputaires consenties par le défunt s'élève à 477.628,65 €. Étant donné que le total de ces libéralités n'excède pas la quotité disponible, il ne faudra donc pas établir le tableau des imputations des libéralités.

B. Partage139

Nous allons, à ce stade de l'exercice, calculer la masse de partage entre F1 et F2.

Biens existants :

1.000.000,00€

- Dettes :

- 0,00€

+ Réductions :

0,00€ (pas de réduction en l'espèce)

+ Rapports :

 

2014 : Rapport en valeur de F1 à l'égard de F2

[452.628,65€]

2015 : Rapport en valeur de F2 à l'égard de F1

[10.000,00€]

2018 : Rapport en valeur de F2 à l'égard de F1

[15.000,00€]

TOTAL =

1.477.628,65€

139 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 299.

53

J.S

Sous réserve des droits du CS ;

F1 a droit à : la villa (452.628,65€) et à quelques biens existants (286.185,67€ ) = 738.814,32€.

F2 a droit au : titre (25.000€) et à quelques biens existants (713.814,32€) = 738.814,32€.

Nous allons, à présent, calculer la masse de partage à l'égard du CS.

Biens existants :

1.000.000,00€

- Dettes :

- 0,00€

+ Réductions :

0,00€ (pas de réduction en l'espèce)

+ Rapports :

 

2014 : Rapport en nature de F1 à l'égard du CS

[500.000,00€]

2015 : Pas de rapport de F2 à l'égard du CS

[0,00€]

2018 : Pas de rapport de F2 à l'égard du CS car les donations effectuées à partir du 1er septembre 2018 ne sont plus susceptibles de rapport.

[0,00€]

TOTAL =

1.500.000,00€

Conformément à la dévolution légale, le conjoint survivant recueille l'usufruit de toute la succession, c'est-à-dire l'usufruit de l'immeuble donné à F1 et l'usufruit des biens existants. Et donc le conjoint survivant recueille l'usufruit de 1.500.000,00€.

54

J.S

De plus, le conjoint survivant recueille l'usufruit successif sur les titres donnés à F2 avec réserve d'usufruit en septembre 2018, d'une valeur de 15.000,00€.

Pour conclure, le conjoint survivant a droit à140:

-4 L'usufruit de l'immeuble donné en 2014 à F1 = d'une valeur de 500.000€ au jour du

décès ;

-4 L'usufruit des biens existants= 1.000.000€ ;

-4 L'usufruit successif des titres donnés à F2 = 15.000€.

F1 recueille141:

-4 La nue-propriété de la villa qui lui a été donnée en 2014 par sa maman= 500.000€ au jour du décès ;

-4 La nue-propriété de quelques biens existants= 286.185,67€

Sa réserve individuelle qui est d'un montant de 369.407,16 € est totalement grevée de l'usufruit successoral du CS, de telle sorte que F1 en est seulement la nue-propriétaire.

Nous pouvons constater, par le biais de cet exercice, que l'hypothèse envisagée par l'article 914, §1er, du Code civil est d'application : la réserve des enfants ne peut être grevée d'un usufruit au profit du conjoint survivant seulement lorsque celui-ci a droit à l'usufruit de toute la succession142.

F2 recueille143:

-4 La pleine propriété des titres qui lui ont été donnée en 2015= 10.000€ au jour du décès

;

140 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 201.

141 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 201.

142 C. civ., art. 914, §1.

143 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p.201.

J.S

-4 La pleine propriété des titres qui lui ont été donnée en 2018= 15.000€ au jour du décès ;

-4 La nue-propriété d'une partie des biens existants= 713.814,32€

Sa réserve individuelle qui est d'un montant de 369.407,16 € est totalement grevée de l'usufruit successoral du CS, de telle sorte que F2 en est seulement la nue-propriétaire.

Nous pouvons constater, par le biais de cet exercice, que l'hypothèse envisagée par l'article

914, §1er, du Code civil est d'application : la réserve des enfants ne peut être grevée d'un usufruit au profit du conjoint survivant seulement lorsque celui-ci a droit à l'usufruit de toute la succession144.

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144 C. civ., art. 914, § 1.

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J.S

II. L'hypothèse selon laquelle les droits successoraux du conjoint survivant ont été limités (Art. 914, § 2, C.civ.,)

Le législateur distingue, dans le deuxième paragraphe de l'article 914 du Code civil, trois sous-hypothèses selon lesquelles les droits du conjoint ont été limités à :

a) L'usufruit d'une fraction de la succession145 ;

b) L'usufruit de la moitié de la masse de calcul de l'article 922, en outre à sa réserve abstraite146 ;

c) L'usufruit de certains biens déterminés de la succession147.

Ë présent, nous allons développer ces sous-hypothèses.

a) Sous-hypothèse n°1 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à une fraction de la succession (Art. 914, § 2, 1°, C.civ.,)

Cette première sous-hypothèse prévoit que lorsque les droits du conjoint survivant sont limités à une fraction de la succession ( : qui ne correspond pas à sa réserve abstraite et qui est supérieur à celle-ci), cet usufruit grève, dans un premier temps, le solde de la quotité disponible (après imputation sur celle-ci des libéralités énoncées à l'article 922/1, §3 du Code civil)148. Et si ce solde ne suffit pas pour lui accorder ses droits en usufruit, cet usufruit grève la part réservataire des enfants149.

145 C. civ., art. 914, § 2, 1°.

146 C. civ., art. 914, § 2, 2°.

147 C. civ., art. 914, § 2, 3°.

148 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 300.

149 C. civ., art. 914, § 2, al.1, 1°.

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J.S

b) Sous-hypothèse n°2 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à sa réserve abstraite (Art. 914, § 2, 2°, C.civ.,)

Cette seconde sous-hypothèse stipule que si l'usufruit du conjoint survivant est limité à sa réserve abstraite, cet usufruit grève, dans un premier temps, le solde de la quotité disponible (après imputation sur celle-ci des libéralités énoncées à l'article 922/1, §3 du Code civil). Et si ce solde ne suffit pas pour lui accorder ses droits en usufruit, le conjoint survivant pourra imposer la réduction des libéralités imputé sur la quotité disponible conformément aux articles 920 et 923 du Code civil150.

« La réserve des enfants ne doit pas supporter l'usufruit dont le conjoint ne peut obtenir la réduction (soit parce qu'il y avait renoncé, soit par application de l'article 915 bis, §2/1, du Code civil) »151.

c) Sous-hypothèse n°3 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à l'usufruit de certains biens particuliers (Art. 914, § 2, 2°, C.civ.,)

Cette dernière sous-hypothèse, envisagée par le législateur, prévoit que lorsque l'usufruit du conjoint est limité à certains biens particuliers de la succession, et que ces biens, sont, par le partage, attribués aux enfants, ces derniers peuvent exiger une compensation pour la charge de cet usufruit dans la mesure où il grève leur part réservataire152.

La loi du 22 juillet 2018 expose les modalités qu'il faut prendre en compte pour cette compensation.

150 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 302 ; P. MOREAU et N. GOFFLOT, « Les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant », J.T., 2019, p. 697.

151 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 302

152 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, p. 210.

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Les bénéficiaires de legs imputable sur la quotité disponible et les enfants prennent en charge la compensation dans la mesure où ils seraient amenés à recueillir une part de la quotité disponible153.

Les personnes précitées devront supporter cette compensation proportionnellement à la valeur des biens recueillis par chacun (sauf la part réservataire des enfants) celle-ci étant égale à la valeur capitalisée de l'usufruit du conjoint, déterminée conformément à l'article 745 sexies, §3, du Code civil154.

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153 C. civ., art. 914, § 2, al. 3.

154 C. civ., art. 914, § 2, al. 4.

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Chapitre 7 : La suppression des droits successoraux du conjoint survivant

En effet, la réserve du conjoint survivant peut être supprimé dans certaines situations contrairement à la réserve des descendants.

I. Les exhérédations partielles du conjoint survivant

La loi du 31 juillet 2017 maintient les principes de privation de la réserve «abstraite» et de la réserve «concrète» moyennant certaines conditions.

a) La privation de la réserve «abstraite» (Art. 334 ter, al. 3 et 4, C.civ.,)

Tout d'abord, la privation de la réserve «abstraite» ne se fait pas de plein droit c'est-à-dire que le de cujus qui souhaite priver son conjoint de tout ou partie de ses droits successoraux, a le devoir d'exprimer ce souhait dans un testament155.

Ensuite, le conjoint survivant qui reconnaît un enfant conçu avec une autre personne que son époux, pendant le mariage, peut être privé par son époux de l'usufruit de la moitié des biens de la succession156. Cependant, dans ce cas, le défunt ne peut pas priver son conjoint survivant de sa réserve «concrète»157.

Le raisonnement est le même dans le cas où une décision judiciaire a déterminé que la filiation est adultérine.

En effet, le pacte Valkeniers permet au conjoint prédécédé de priver son époux de sa réserve abstraite lorsque celui-ci a des enfants d'une précédente relation ou des enfants adoptés avant leur mariage ou des descendants de ceux-ci. Cette privation ne peut être exécutée que si un acte

155 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p.287.

156 C. civ., art. 334 ter., al. 3 et 4.

157 C. civ., art. 334 ter., al. 3 et 4.

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notarié a été dressé que ce soit dans leur acte de mariage ou par un acte modificatif du régime matrimonial158.

b) La privation de la réserve «concrète» (Art. 915 bis, § 2, C.civ.,)

En vertu de l'article 915 bis, §2 du Code civil, le juge aura la possibilité de priver le conjoint survivant, séparé de fait, de sa réserve sur les biens préférentielles si159:

-4 «Lors du décès de son conjoint, il habitait dans la dernière résidence conjugale, sauf si l'attribution de la réserve «concrète» est contraire à l'équité»160;

-4 «Lors du décès de son conjoint, il n'y habitait pas, s'il peut démontrer :

- Qu'il a dû quitté l'immeuble contre sa volonté, c'est-à-dire en raison du comportement de son conjoint ou par l'effet de la décision d'un juge, et - Que cette attribution n'est pas contraire à l'équité»161.

II. L'exhérédation totale du conjoint survivant

a) La privation du droit d'usufruit du conjoint survivant (Art. 915 bis, § 3, C.civ.,)

En vertu de l'article 915 bis, §3 du Code civil, afin de priver le conjoint survivant de tous ces droits successoraux en ce compris la suppression de ses droits réservataire, le de cujus doit respecter les quatre conditions cumulatives suivantes162:

1. Il faut qu'au jour du décès, les époux soient séparés depuis plus de six mois ;

2. Avant le décès, le défunt ou le conjoint survivant doit avoir réclamé par le biais d'un acte judiciaire, soit en demandant soit en défendant, une résidence séparée de celle de

158 C. civ., art. 1388, al. 2.

159 C. civ., art. 915 bis, § 2.

160 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 288.

161 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 288.

162 C. AUGHUET, « La réforme du droit successoral opérée par la loi du 31 juillet 2017 : premier tour d'horizon », Notamus, 2017, p.59.

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son conjoint, ou avoir introduit une demande de divorce sur base de l'article 229 du Code civil ;

3. Il faut que l'époux, qui désire priver son ex-conjoint de sa réserve, rédige un testament ;

4. Les époux ne doivent pas avoir repris la vie commune depuis la demande de résidence séparée ou la demande en divorce.

Les règles successorales prévues dans les conventions préalables au divorce par consentement mutuel s'appliqueront lorsque le divorce par consentement mutuel n'a pas pu avoir lieu, car l'un des époux est décédé pendant la procédure de divorce163.

v Cas de jurisprudence164

Ë présent, nous allons analyser un cas de jurisprudence en lien avec l'exhérédation d'un conjoint survivant.

Cette jurisprudence a été rendue par la Cour d'appel de Liège le 14 mai 2018 (jurisprudence en annexe). Cette décision a été rendue le 14 mai 2018, mais la succession sur laquelle porte le litige date de 2013. De ce fait, les nouvelles dispositions apportées par la loi du 31 juillet 2017 n'ont pas été prises en considération pour le règlement de ce litige.

Cependant, sur base de la nouvelle loi, le juge aurait pris la même décision, car les conditions pour qu'un projet de conventions préalable au divorce par consentement mutuel produit un effet sont les mêmes avants et après la réforme : il doit être signé par les parties. De ce fait, la deuxième condition afin de déshériter son conjoint n'est pas respecter. Les conditions d'exhérédation dans le chef d'Anne G. ne sont également pas remplies lorsque nous prenons en comptes les modifications apportées par la loi du 31 juillet 2017.

163 X, « La privation du droit d'usufruit du conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/possibilite-de-diminuer-la-part-du-conjoint/la-privation-du-droit-d-usufruit-du-conjoint-survivant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

164 Cour d'appel, Liège (10D ch.), 14 mai 2018, J.L.M.B, 2018, p. 1.

J.S

+ Cas de jurisprudence165

Le litige rencontré concerne la succession de Didier C., décédé le 8 mai 2013. Le défunt était

marié

sous le régime de séparation de biens avec Anne G. Cette union date du 30 avril 1987.

Anne G. a quitté le domicile conjugal, le 21 février 2010 et son époux, Didier C. a déposé une requête en séparation provisoire devant le Juge de paix. Le 18 mai 2010, des résidences séparées aux parties ont été ordonnées par le Juge.

Suite à ces événements, la rédaction d'un projet de conventions préalables au divorce par consentement mutuel a eu lieu en 2011, mais celui-ci n'a jamais été signé par les époux.

Les intimées soutiennent le fait qu'Anne G. ne présente pas les qualités de conjoint survivant. Ils justifient ce propos sur base de l'existence du projet de conventions de divorce par consentement mutuel qui contenait une clause d'exhérédation réciproque pour conclure qu'Anne G. a été privée de sa réserve de conjoint survivant.

Cependant, «les conventions préalables au divorce par consentement mutuel n'ont jamais été signées par les époux et aucune requête n'a donc jamais été déposée en vue de leur homologation»166.

En vertu de l'article 1287 alinéa 3 et l'article 1288 bis du Code judiciaire, «la convention des époux résolus à divorcer par consentement mutuel relative à l'exercice des droits visés aux articles 745bis et 915bis du Code civil au cas où l'un d'eux viendrait à décéder avant le jugement ou arrêt prononçant le divorce de manière définitive et qui est fixé dans l'acte contenant la convention préalable, ne peut pas sortir ses effets si, au moment du décès d'un des époux, la procédure de divorce par consentement mutuel n'est pas introduite par le dépôt d'une requête»167.

Donc, ce projet de conventions préalables au divorce par consentement mutuel ne produit aucun effet, car celui-ci n'a jamais été signé et aucune requête n'a été déposée.

Pour conclure, les conditions d'exhérédation dans le chef d'Anne G. ne sont pas remplies : elle rassemble bien les critères afin d'être considérée comme conjoint survivant et peut donc recueillir ses droits notamment, sa réserve.

165 Cour d'appel, Liège (10D ch.), 14 mai 2018, J.L.M.B, 2018, p. 1.

166 Cour d'appel, Liège (10D ch.), 14 mai 2018, J.L.M.B, 2018, p. 7.

167 Cour d'appel, Liège (10D ch.), 14 mai 2018, J.L.M.B, 2018, p. 7.

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Chapitre 8 : La conversion de l'usufruit du conjoint survivant

La loi du 31 juillet 2017 apporte plusieurs nouveautés aux droits successoraux du conjoint survivant dont l'une d'entre elle concerne la conversion de l'usufruit du conjoint survivant et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées. Bien entendu, nous nous intéresserons au cas du conjoint survivant dans le cadre de ce travail.

ü Pourquoi une telle nouveauté ?

Supposons qu'un conjoint survivant vienne à la succession en concours avec des

descendants du défunt. Nous avons déjà examiné cette hypothèse et il en a découlé que dans ce genre de situation, le conjoint survivant recueille l'usufruit de toute la succession et les descendants la nue-propriété de celle-ci168.

L'objectif politique de ce démembrement mis en place par la loi du 14 mai 1981 était de concilier d'une part l'intérêt du conjoint en lui accordant des droits pour que celui-ci puisse conserver son train de vie et d'autre part, ceux des descendants du défunt qui sont considérés comme des destinataires naturels169.

Cependant, la pratique révèle que ce démembrement n'est pas quelque chose de facile à vivre, en particulier dans les familles recomposées.

Malgré cela, le législateur conclu que ce n'est pas une bonne idée de supprimer la vocation en usufruit dans le chef du conjoint afin d'arranger les choses. Ç Toutefois, il a innové en octroyant

168 C. civ., art. 745 bis, §1, al. 1.

169 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 208.

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la possibilité au conjoint et aux enfants non-communs, d'exiger - et non plus de solliciter - la conversion de l'usufruit moyennant le respect de certaines conditions »170.

ü En quoi consiste la conversion de l'usufruit ?

La conversion de l'usufruit « peut être défini comme étant une opération par laquelle

l'usufruit dont jouit le conjoint survivant sur certains biens est remplacé par un autre droit, le conjoint survivant perdant tous droits sur le bien grevé d'usufruit »171.

« L'objet de la conversion est l'usufruit successoral du conjoint survivant »172.

Suite à cette réforme apportée par la loi du 31 juillet 2017, la conversion sera automatiquement accordée si celle-ci est demandé soit par le conjoint survivant soit par les descendants issus d'une autre union, pour toutes les successions ouvertes à partir du 1er septembre 2018.

Il se peut qu'un malentendu survienne. Dans ce cas, l'article 745 quater, §1er, alinéa 1er, du Code civil s'applique. En vertu de cet article, le juge a le pouvoir d'accorder ou non la conversion, en cas de désaccord.

I. Qui peut revendiquer la conversion de l'usufruit ? (Art. 745 quater, §1er/1)

L'article 745 quater, §1er/1, du Code civil stipule que la conversion en usufruit peut être exigé173:

- Ç Soit par un descendant ou par un enfant adopté ;

170 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 209.

171 X, « L'usufruit du conjoint survivant et sa conversion », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/l-usufruit-du-conjoint-survivant-et-sa-conversion, s.d., consulté le 7 mai 2020.

172 E. GROSJEAN, La conversion et l'évaluation de l'usufruit du conjoint survivant et du cohabitant légal survivant, s.l., Larcier, s.d., p. 51.

173 C. civ., art. 745 quater, § 1/1.

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-Soit par un descendant de celui-ci, qui n'est pas simultanément un descendant ou un enfant adopté, ou un descendant de celui-ci, du conjoint survivant => On parlera donc d'enfants non-communs ;

-Soit par le conjoint survivant lorsque la nue-propriété appartient, en tout ou en partie, à des descendants et à des enfants adoptés, tels que définis à l'alinéa 1er È174.

Nous constatons que le critère pris en considération, pour répondre à cette question, est le lien de filiation entre les descendants et le conjoint survivant175.

II. Les enfants communs peuvent-ils réclamer la conversion de l'usufruit en présence d'enfants non-communs ?

Pas toujours.

C'est aux enfants non-communs de revendiquer la conversion de l'usufruit lorsque cet usufruit porte sur un immeuble176.

En effet, les travaux préparatoires ont conclu que «le droit d'initiative pour la conversion à première demande177 revient exclusivement aux enfants non-communs qui ont hérité de la nue-propriété... Si le conjoint survivant vient à la succession en concours avec des enfants non-communs et avec des enfants communs, ces derniers ne disposent pas du droit d'initiative »178.

174 C. civ., art. 745 quater, § 1/1.

175 F. TAINMONT, Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., p. 306.

176 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 209.

177 Les droits en usufruit susceptible de faire l'objet d'une conversion automatique sont ceux que le conjoint survivant a recueilli au décès de son conjoint, que ce soit légalement, par testament, par contrat de mariage ou par institution contractuelle.

178 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 209.

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III. Est-ce que la demande de la conversion de l'usufruit faite par les enfants non-commun prendra également effet à l'égard des droits des enfants communs ?

Pour le moment, aucune réponse claire n'a été donnée à cette question.

L'auteur Bérénice Delahaye estime que l'usufruit du conjoint survivant est converti à l'égard de tous les enfants, commun et non-commun179.

À défaut d'accord, l'usufruit est converti en une part indivise de la succession en pleine propriété. Cette part est déterminée sur la base des tables de conversion visées à l'article 745 sexies, §3, et de l'âge de l'usufruitier à la date de la demande180.

La solution de Delahaye porte ses fruits lorsqu'il s'agit de demander la conversion ou encore afin de faciliter les opérations de conversion d'usufruit. Par contre, elle est péjorative lorsqu'il s'agit d'une conversion à première demande, car «lorsque la conversion est demandée, tous les ayants droit - enfants communs et non-communs- sont appelés à la cause par pli judiciaire si une action est intentée»181.

Le juge va par la suite prendre une décision qui sera :

- «Soit le refus de la conversion à l'égard de tous ;

- Soit l'accord à l'égard de tous de sorte qu'on a pu soutenir en pratique, la demande de conversion présentait un caractère d'indivisibilité quant aux personnes»182.

179 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 209.

180 C. civ., art. 745 quater, § 1/1, al. 3.

181 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 210.

182 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 210.

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IV. Est-il possible d'empêcher la conversion de l'usufruit à première demande ?

Le conjoint prémourant peut empêcher la conversion de l'usufruit à première demande en rédigeant un testament dans lequel il octroie des droits en pleine propriété à chacun de ses ayants droits183.

Cependant, l'article 745 quinquies, §2, du Code civil stipule les propos suivants :

- « Les descendants [d'une précédente relation] du prémourant ne peuvent être privés par celui-ci du droit de demander la conversion.

- Le conjoint survivant ne peut être privé du droit de demander la conversion de l'usufruit des biens visés à l'article 745 quater, § 4, ou leur attribution en pleine propriété »184.

En d'autres termes, les descendants d'une autre relation peuvent être privés de leur droit d'exiger la conversion. Cependant, ils ne peuvent pas être privés de leur droit de demander la conversion185.

De ce fait, le conjoint prémourant ne pourrait empêcher son conjoint de demander la conversion de l'usufruit.

183 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 213.

184 C. civ., art. 745 quinquies, § 2

185 F. TAINMONT, « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., p. 213.

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Conclusion

Mon travail touche à sa fin, toutes les bonnes choses ont une fin.

Nous avons pu le voir dans l'étendue de ce travail à quel point la matière relative aux droits successoraux du conjoint survivant est complexe. Ce travail de fin d'étude nous a surpris et nous a permis de découvrir des principes dont nous ignorons l'existence. Nous espérons qu'il en sera de même pour vous.

Nous avons tenté de répondre le plus complètement possible aux questions que nous nous posions au départ.

Le conjoint survivant est l'époux de la défunte, l'épouse du défunt..., pour autant qu'ils ne soient pas divorcés ni séparés de corps au moment du décès. En effet, un mariage doit exister entre le conjoint et le de cujus dans le but de faire bénéficier le survivant de ses droits en tant que conjoint survivant.

Pour bénéficier de ces droits, le conjoint survivant doit dans un premier temps : -4 Exister au moment de l'ouverture de la succession ;

-4 Avoir la capacité de jouissance ;

-4 Ne pas être indigne ou déchue de ses droits successoraux.

Dans un deuxième temps, les époux doivent être marié valablement au moment du décès.

Les droits successoraux légaux du conjoint sont variables : ils dépendent des hypothèses de concours dans lesquelles il est susceptible de se trouver.

Prenons l'hypothèse où le conjoint est en concours avec des descendants du défunt. Le droit cherche à établir des dispositions qui entraînent le moins de conflits possibles pour les citoyens. La loi du 14 mai 1981 est intervenue afin de donner une solution à cette situation embarrassante. Il en découle que lorsque le défunt laisse des descendants, des enfants adoptifs ou des descendants de ceux-ci, le conjoint survivant recueille l'usufruit de toute la succession.

J.S

Plusieurs personnes ignorent que le conjoint survivant a droit à une réserve. Que cela nous plaise ou non, la loi du 14 mai 1981 a fait du conjoint survivant un héritier à part entière et un héritier réservataire. Selon nous, il s'agit d'une bonne chose. Malgré que le conjoint ne possède pas de liens sanguins, il possède tout de même des liens affectifs et une certaine dépendance avec le conjoint prédécédé.

De ce fait, nous estimons qu'il a droit à une réserve afin de lui permettre de maintenir son train de vie. De plus, le conjoint survivant est la personne qui accompagne son époux dans tous les moments de sa vie, bon comme mauvais, et mérite donc une sorte de « récompense ». Cependant, certains époux sont indignes à hériter de la succession de leurs époux. En effet, ceux-ci peuvent avoir porté préjudice au « de cujus ».

Il est possible de priver le conjoint survivant de sa réserve abstraite et concrète ainsi que de son droit d'usufruit, moyennant le respect de certaines conditions. Nous estimons que c'est une bonne chose que le législateur ait mis en place de telles dispositions afin de protéger les intérêts du conjoint prédécédé face à la mauvaise foi du conjoint survivant.

Arrivé à la fin de notre travail, une question en particulier continue à nous tourmenter : le conjoint survivant peut-il se retourner contre la décision de son époux prédécédé en ce qui concerne la privation de ses droits ?

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Bibliographie

I. La doctrine

· AUGHUET, C., « La réforme du droit successoral opérée par les lois des 31 juillet 2017 et 22 juillet 2018 - Tour d'horizon revu et augmenté », Act. dr. fam., 2018, pp. 110 à 210.

· AUGHUET, C., « La réforme du droit successoral opérée par la loi du 31 juillet 2017 : premier tour d'horizon », Notamus, 2017, pp. 57 à 59.

· CULOT, A. et DE PAGE, P., « Les nouvelles règle du droit civil des successions applicable à l'usufruit «successif» du conjoint survivant - Articles 858bis et 745 quater, §1/1, du Code civil », Rec.gén.enr.not.2019/4 - (n°27.208), s.d., pp.174 à 175.

· DE WILDE D'ESTMAEL, E., Héritages et testaments, 2e éd., s.l., Vie et Droit, 1988, pp.12 à 16.

· DEHALLEUX, V., « Avantages matrimoniaux et droits de succession », Liège, Larcier, s.d., p. 711.

· GROSJEAN, E., La conversion et l'évaluation de l'usufruit du conjoint survivant et du cohabitant légal survivant, s.l., Larcier, s.d., p. 51.

· LELEU, Y.-H. et RAUCENT, L., « Régimes matrimoniaux - La réforme de 1976 », Rép. not., Bruxelles, Larcier, 2002, n° 101, p. 266.

· MOREAU, P., « La réforme des successions et des libéralités revue et augmentée », J.T., 2019, p. 665.

· MOREAU, P., et GOFFLOT, N., « Les nouvelles règles relatives à l'articulation de la réserve des descendants avec l'usufruit du conjoint survivant », J.T., 2019, pp. 690 à 697.

· RAUCENT, L., « Les régimes matrimoniaux, 3e éd., Louvain-La-Neuve », Cabay, 1986, n° 362, p. 298.

· TAINMONT, F., Le conjoint et le cohabitant légal survivant, Bruxelles, Larcier, s.d., pp. 275 à 288.

· TAINMONT, F., « La conversion de l'usufruit du conjoint et du cohabitant légal dans le cadre des familles recomposées », J.T., s.d., pp. 208 à 213.

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II. La législation

· Règlement (UE) n° 650/2012 du Parlement européen et du conseil du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen, J.O.U.E, 27 juillet 2012, Art. 4.

· C. jud., art. 1287, al. 3, 1278, al. 1.

· C. civ., art. 110, 121, §2, 131 et 133, 205 bis, §2, 311 bis, 334 ter, 353-16, 3°, 718, 720, 725, 731, 733, 735 à 746, 745 bis, 745 quater, 748 à 753, 768, 774 à 810, 858 bis, 914, 915 bis, 1388, 1389/1.

· Loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, M.B., 1er septembre 2017.

· Loi du 22 juillet 2018 modifiant le Code civil et diverses autres dispositions en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant la loi du 31 juillet 2017 modifiant le Code civil en ce qui concerne les successions et les libéralités et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, M.B., 27 juillet 2018.

· Proposition de loi modifiant le Code civil en matière de droit des régimes matrimoniaux et modifiant diverses autres dispositions en cette matière, exposé des motifs, Doc., Ch., 2017-2018, n°2848/001, p.23.

III. La Jurisprudence

· Cass. (1er ch.), 4 novembre 2010, R.G. n°C.09.0630.F, disponible sur https://lex.be.

· C.C., 24 septembre 2015, n°130/2015.

· Liège (10D ch.), 14 mai 2018, R.G. n°2017/FA/171, disponible sur https://lex.be.

IV. Les sources internet

· DASSY, E., « Réforme du droit successoral (2ème partie) - Usufruit successif légal », disponible sur https://www.avocatslenoir.com/news/65/66/Reforme-du-droit-successoral-2eme-partie-Usufruit-successif-legal.html, 22 janvier 2019.

· TAINMONT, F., « Le droit successoral Belge », disponible sur https://www.ejcl.org/142/art142-10.pdf, s.d., consulté le 12 avril 2020.

· ROIG, E., « Indivision-définition », disponible sur https://droit-

finances.commentcamarche.com/faq/14592-indivision-definition, s.d., consulté le 21 avril 2020.

·

J.S

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X, « Comment avantager son époux ou son cohabitant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/je-planifie-ma-succession/avantager-son-epoux-ou-son-cohabitant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

· X, « Introduction sur la dévolution successorale (1/6) », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/introduction-sur-la-devolution-successorale#toc, 31 août 2014.

· X, « La privation du droit d'usufruit du conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/possibilite-de-diminuer-la-part-du-conjoint/la-privation-du-droit-d-usufruit-du-conjoint-survivant, s.d., consulté le 21 avril 2020.

· X, « Le testament olographe », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-olographe, s.d., consulté le 21 avril 2020.

· X, « Qui est le conjoint survivant », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/qui-est-le-conjoint-survivant , s.d., consulté le 10 janvier 2020.

· X, « Dévolution successorale: La règle de degré (4/6) », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/la-devolution-successorale/devolution-successorale---la-regle-de-degre, 31 août 2014.

· X, « L'usufruit du conjoint survivant et sa conversion », disponible sur https://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/successions/les-droits-successoraux-du-conjoint-survivant/l-usufruit-du-conjoint-survivant-et-sa-conversion, s.d., consulté le 7 mai 2020.

· X, « L'usufruit- l'usage et les fruits », disponible sur https://www.notaire.be/acheter-louer-emprunter/vente-achat-generalites/usufruit, s.d., consulté le 30 janvier 2020.

· X, « La réserve et la quotité disponible », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-donations/que-peut-on-donner/reserve-et-quotite-disponible, s.d., consulté le 3 mai 2020.

· X, « Le testament authentique ou notarié », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-authentique, s.d., consulté le 21 avril 2020.

· X, « Le testament international », disponible sur https://www.notaire.be/donations-successions/les-successions/le-testament-international, s.d., consulté le 21 avril 2020.

· X, « Les obligations nées du statut des personnes », disponible sur http://socialsante.wallonie.be/surendettement/professionnel/?q=informations-obligations-personnes-successions-notions-héritiers, s.d., consulté le 10 janvier 2020.

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J.S

Table des matières

Remerciements 2

Introduction 3

Chapitre 1 : La dévolution successorale 6

I. Les modes translatifs de propriété pour cause de mort 6

a) La dévolution légale ou succession « ab intestat » 6

b) La succession testamentaire 10

c) La succession contractuelle 11

Chapitre 2 : Ouverture de la succession 12

I. Capacité pour hériter 12

a) Généralités 12

b) L'existence (Art. 720 et 725 du Code civil) 13

c) La capacité de jouissance 13

d) L'indignité et la déchéance (Art. 727, 745 septies et 1429 bis du Code civil) 13

II. La décision de l'héritier légal 15

Chapitre 3 : Les droits successoraux du conjoint survivant 16

I. Qui est le conjoint survivant ? 16

II. Le préalable : La liquidation et le partage du régime matrimonial 17

a) Marié sous le régime de la communauté de biens 17

b) Marié sous le régime de la séparation de biens 18

c) Marié sous le régime de la communauté universelle de biens 19

d) L'attribution préférentielle (Art. 1389/1 du Code civil) 19

e) Les avantages matrimoniaux. 20

III. Capacités requises pour succéder dans le chef du conjoint survivant 20

Chapitre 4 : L'étendue des droits successoraux du conjoint survivant 22

I. Les droits attribués au conjoint en fonction des héritiers avec lesquels il est

en concours. 22

a) Le conjoint survivant en concours avec des descendants (Art. 745 bis, §1, al.1 du Code civil) 23

b) Le conjoint survivant en concours avec des ascendants et des collatéraux (Art. 745 bis, §1, al.2

du Code civil) 24

c) Le conjoint survivant est en concours avec des ascendants ordinaires et des collatéraux

ordinaires 29

d) Le conjoint survivant est en concours avec des collatéraux ordinaires (Art. 745 bis, §1er, al.2 du

Code civil) 31

e) Le conjoint survivant n'est en concours avec aucun successible (Art. 745 bis du Code civil) 34

II. Les droits attribués au conjoint survivant quels que soient les héritiers avec

lesquels il est en concours 34

a) L'usufruit des biens soumis au droit de retour légal (Art. 745 bis du Code civil) 34

b) Le droit au bail relatif à la résidence commune (Art. 745 bis du Code civil) 35

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c) L'usufruit successif (Art. 858 bis du Code civil) 35

Chapitre 5 : Les droits successoraux réservataires du conjoint 40

I. L'étendue de la réserve du conjoint survivant 41

II. Le conjoint survivant face aux donations consenties par le défunt avant le

mariage (Art. 915 bis, §2/1 du Code civil) 44

Chapitre 6 : L'application simultanée de la réserve des descendants et des droits

successoraux du conjoint survivant. 47

I. L'hypothèse selon laquelle le conjoint survivant a droit à l'usufruit de

l'entièreté de la succession (Art. 914, §1er, C.civ) 48

II. L'hypothèse selon laquelle les droits successoraux du conjoint survivant ont

été limités (Art. 914, § 2, C.civ.,) 56

a) Sous-hypothèse n°1 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à une fraction de la

succession (Art. 914, § 2, 1°, C.civ.,) 56

b) Sous-hypothèse n°2 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à sa réserve abstraite (Art.

914, § 2, 2°, C.civ.,) 57

c) Sous-hypothèse n°3 : Les droits du conjoint survivant ont été limités à l'usufruit de certains

biens particuliers (Art. 914, § 2, 2°, C.civ.,) 57

Chapitre 7 : La suppression des droits successoraux du conjoint survivant 59

I. Les exhérédations partielles du conjoint survivant 59

a) La privation de la réserve «abstraite» (Art. 334 ter, al. 3 et 4, C.civ.,) 59

b) La privation de la réserve «concrète» (Art. 915 bis, § 2, C.civ.,) 60

II. L'exhérédation totale du conjoint survivant 60

a) La privation du droit d'usufruit du conjoint survivant (Art. 915 bis, § 3, C.civ.,) 60

Chapitre 8 : La conversion de l'usufruit du conjoint survivant 63

I. Qui peut revendiquer la conversion de l'usufruit? (Art. 745 quater, §1er/1) 64

II. Les enfants communs peuvent-ils réclamer la conversion de l'usufruit en

présence d'enfants non-communs ? 65

III. Est-ce que la demande de la conversion de l'usufruit faite par les enfants non-commun prendra également effet à l'égard des droits des enfants communs

? 66

IV. Est-il possible d'empêcher la conversion de l'usufruit à première

demande ? 67

Conclusion 68

Bibliographie 70

I. La doctrine 70

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II. La législation 71

III. La Jurisprudence 71

IV. Les sources internet 71

Table des matières 73






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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway