CONCLUSION
La fin de nos études du second cycle à
l'université de l'Uélé (UNIUELE) au sein du
département des sciences politiques et administratives est
couronnée par ce modeste mémoire fruit de nos investigations.
Le présent mémoire intitulé
«Incidence des accords politiques dans la gestion de l'Etat cas de
FCC-CACH »retrace d'une manière
générale le processus électorale de 2018 jusqu'à
l'alternance appuyé par le jeu d'alliance avant, pendant et après
ledit processus.
Depuis son accession à la souveraineté
nationale et internationale, la République démocratique du Congo
s'est révélée comme un Etat à vocation
parlementaire. Toutes les fois que l'élan démocratique s'est
manifesté, au cours de son histoire (table ronde, conclave de Louvain,
conférence nationale souveraine, ou dialogue inter congolais) le
parlementarisme a été logiquement posé comme fondement
politique. Pourtant, le parlementarisme à la française aura
été le choix de la constitution du 18 février 2006, soit
un régime semi-présidentiel. La loi fondamentale consacre un
exécutif dualiste en ce que le Premier ministre engage la
responsabilité du Gouvernement devant la représentation
nationale, tandis que le chef de l'Etat détient le pouvoir de
dissolution.
Le parlementarisme est par nature, une variante de la
démocratie libérale qui impose que c'est finalement le parti
politique ou le groupe des partis qui obtient la majorité au terme d'une
compétition électorale, qui est censé gouverner le
pays.
Pour mener nos investigations, notre problématique
s'est appesantie autour des deux questions suivantes :
Ø L'accord entre le FCC et le CACH constitue-t-il un
dérapage constitutionnel ?
Ø Quels sont les dommages sociaux et politiques
qu'inflige la coalition FCC-CACH sur la gestion de l'Etat ?
Avant de confronter ces questions à des
vérifications, nous avons émis des hypothèses ci-dessous,
qui nous ont également aidés dans la compilation des
données.
Ø l'accord entre FCC et CACH rassure quant au bon
fonctionnement de l'appareil étatique et donne l'alerte sur le
dysfonctionnement des institutions de la République.Cependant, en lieu
et place de la cohabitation, le Front Commun pour le Congo et le Cap pour le
Changement ont plutôt opté pour une coalition de gouvernance,
option qui ne constitue pas un dérapage constitutionnel.
Ø La population n'aurait pas confiance en la coalition
FCC-CACH d'autant plus que l'asymétrie de rapport de force
constatée dès début mandat de cette union et les crises
intempestivesqui caractérisent cette alliance, laissent croire qu'il
n'en est nullement question de l'intérêt général
mais plutôt de ces deux familles politiques et ce bras de faire entre
alliés risque d'empêcher le nouveau Président d'incarner le
changement tant voulu par la population congolaise et sa la volonté de
rupture d'avec le régime précèdent.
La présente étude s'est assignée comme
objectifs :l'analyse del'impact de la coalition FCC-CACHsur la gestion et
le fonctionnement de l'appareil étatique ; l'identification des
dommages sociaux-politiques infligés à la nation congolaise par
cet accord politique et la démonstration du duel des alliés dans
les institutions étatiques.
La méthode dialectique avec ses quatre lois à
savoir : la loi de la totalité,du mouvement, du changement et la
loi des contraires ainsi que l'approche de l'histoire immédiate, nous
ont permis d'expliquer l'objet de notre étude, indispensables à
nos investigations. Nous avons utilisé la technique documentaire,
d'observation et d'interview libre.
Notre dissertation est subdivisée en quatre chapitres.
Le premier chapitre porte sur les considérations
générales, le deuxième s'articule sur l'état des
lieux et cadre légal des alliances et coalitions politiques en
République démocratique du Congo, le troisième aborde
l'analyse sur la situation post-électorale de décembre 2018 et
enfin le quatrième est axé sur l'impact de la coalition FCC-CACH
sur la gestion de l'Etat.
Au terme de cette étude, nous sommes parvenus aux
résultats que nous exposons succinctement ci-dessous :
v Les élections du 30 décembre 2018 n'ont pas
été inédites uniquement parce qu'elles donné lieu
à la première alternance pacifique au sommet de l'Etat, mais
aussi parce qu'elles ont créé une situation rare dans l'histoire
politique de la République démocratique du Congo à
savoir : la cohabitation couverte par une coalition de gouvernance commune au
regard des attitudes affichées par les prétendus
alliés.
v Pour ce qui est de la cohabitation, nous notons que la
cohabitation est une configuration politique historiquement exceptionnelle en
RDC. Il n'y a eu que deux épisodes de bipolarité du pouvoir
exécutif depuis l'indépendance avant Felix TSHISEKEDI et Joseph
KABILA. Entre Patrice Emery LUMUMBA et Joseph KASA-VUBU (1960-1961) et entre
MOBUTU et Etienne TSHISEKEDI qui fût trois fois
éphémère Premier ministre. Dans les deux cas, cela
correspondait à des crises politiques graves.
v S'agissant de la coalition FCC-CACH, fallait-il au
Président Félix TSHISEKEDI d'opter pour la cohabitation en lieu
et place de la coalition ? nous pensons que sans majorité propre au
parlement, le nouveau Président de la République n'était
pas dans une situation favorable. Car deux choix s'offraient à
lui : soit une cohabitation, source des querelles permanentes, soit une
coalition avec son prédécesseur qui détient la
majorité au parlement.Nous avons également
révélé que, dans l'un des pays le plus pauvres du monde
où le gouvernement s'est désengagé des services sociaux de
base depuis plusieurs décennies, les attentes de la population qui a
voté pour la rupture avec le régime Kabila sont à la base
des frustrations populaires. D'autant plus que la majorité des congolais
ne croit pas en la coalition FCC-CACH et encore plus rares sont ceux qui
croient à une coalition fonctionnelle dans laquelle le bien-être
de la population est une priorité. La crise de confiance entre
alliés et l'asymétrie du rapport de force peuvent jouer en
défaveur du Président TSHISEKEDI et risquent de l'empêcher
d'incarner la volonté du peuple congolais qui n'aspire qu'au changement
et à la rupture avec le régime Kabila. De ce fait, après
investigations, rares sont ceux qui parient sur l'accomplissement normal du
mandat du nouveau Président par le simple fait que, si le
Président TSHISEKEDI se bat pour la réussite du quinquennat, on
constate que les FCC s'érige en une force d'inertie dont les membres
s'organisent sérieusement pour reconquérir le pouvoir en 2023. Un
combat logique en démocratie, mais qui ne rend pas la tâche facile
au nouveau chef de l'Etat minoritaire dans les deux chambres et même s'il
n'est pas encore au point de bénéficier d'un certificat de
divorce en dépit de demandes et menaces constatées de part et
d'autre, la tension observée depuis le début de cette coalition,
fait, néanmoins dire que ce mariage dit de contre nature est
sérieusement bousculé.
v S'agissant de dommages socio-politiques qu'inflige la
coalition FCC-CACH à la nationcongolaise, nous notons que sur :
Ø Le plan socio-économique,
Plus d'une année après, les raisons d'espérer semblent
englouties par la réalité du terrain. La mécanique
économique du pays ne tourne pas aussi bien que FATSHI l'aurait
souhaité. Les indicateurs passent progressivement au rouge et les plans
annoncés transpirent la contre-vérité. Les plaintes se
multiplient et les équilibres sociaux se bouleversent.Contrairement
à Joseph KABILA qui en 2001 accédait au sommet de l'Etat dans une
RDC dont l'économie était à bout de souffle,le
Président TSHISEKEDI est entré en jeu, rassuré par une
économie presque stable et performante. Il faut dire que son
prédécesseur avait fait preuve de rigueur en mettant en place
notamment un comité stratégique de suivi des mesures
économiques les plus importantes pour le pays. Résultat
Félix TSHISEKEDI a trouvé les caisses de l'Etat avec une
réserve confortable.Malheureusement l'avantage n'a visiblement pas fait
la différence et pour causes : les antivaleurs se sont
emparées de la présidence au point que la corruption y a
trouvé un grand refuge. Les scandales se sont multiplié aussi
vite que les promesses irréalisables. Le procès dit de 100 jours
dont le directeur de cabinet a été reconnu coupable illustre
cette page controversée d'une gestion festive de finances publiques. Il
y aurait aussi un tâtonnement dans la gouvernance économique, les
nouveaux venus opèrent selon le mode essai-erreur et ont tendance
à confondre la rapidité et précipitation.
Il nous parait judicieux de rappeler que le budget annuel
extravagant de près de 11 milliards de dollars américains
proposé par le régime TSHISEKEDI n'aura eu comme seul effet que
de bouger les chiffres. La réalité a finalement imposé sa
loi et le collectif budgétaire a émergé comme une
obligation incontournable.
Ø Sur le plan sécuritaire,le
Président TSHISEKEDI lors des sa prestation de serment s'est
engagé à construire un Congo fort, tourné vers le
développement dans la paix et la sécurité. Le nouveau
Président congolais a essayé de renforcer la
sécurité, mais les populations de l'Est du pays ne se sentent
toujours pas en sécurité. L'un de ses plus grands défis
est la violence continue dans l'Est du pays, où des dizaines de groupes
armés font des ravages. Le Président a ordonné à
l'armée de déplacer une base de commandement à Beni, la
ville au coeur des attaques. Certaines troupes ont été
remplacées, apportant une nouvelle énergie dans la lutte contre
la milice. Mais de nombreux autres petits groupes armés sont toujours
actifs dans cette région, certains étant impliqués dans le
commerce illégal de minerais. Les attaques contre les civils se
poursuivent, les rebelles, parfois armés de simples machettes frappent
à tout moment et sèment la terreur et la désolation.
Curieusement, au moment même de la rédaction de
cette recherche, soit plus d'une année, les deux alliés au
pouvoir (FCC-CACH) se livrent à des querelles intempestives et autres
quolibets et cela, intervient au moment où le pays fait face à
des agressions de ses voisins notamment l'armée Zambienne qui occupe une
partie du territoire plus spécifiquement PWETO et MOBA dans le grand
Katanga, des groupes armées Sud-soudanaise et Centrafricaine dans les
provinces de l'Ituri et Haut-Uélé, en plus des groupes
armés Rwandaises, Burundaises et Ougandaises qui n'ont jamais
quitté le territoire congolais.
Ø Sur la magistrature,La guerre
judiciaire bat son plein. Felix TSHISEKEDI voit le camp de Joseph KABILA,
contester vigoureusement ses nominations à la cour constitutionnelle.
Néanmoins, si la polémique est vive, c'est surtout parce que de
telles nominations à la plus haute institution judiciaire du pays visent
des objectifs qui font craindre une tentative de contrôler
complètement le processus électoral à venir. En effet,
selon la constitution, la cour constitutionnelle est notamment arbitre des
contentieux électoraux. C'est elle qui valide tout le processus, du
calendrier à la publication des résultats définitifs, en
passant par la validation des candidatures, ainsi que leurs rejets.
Il s'observeégalement une succession
d'événements qui non seulement mettent le pays en péril,
mais également démontrent que la coalition au pouvoir ne pourra
jamais répondre aux attentes du peuple congolais. Cherchant à
avoir la main mise et le contrôle de l'appareil judiciairepour des
raisons purement politiques, les deux alliés se livrent à une
guerre sans précédent. C'est ce qui expirait les propositions de
lois organiques initiées et déposées au bureau de
l'Assemblée nationale par les honorables députés Aubin
MINAKU et Gary SAKATA en vue de modifier et compléter respectivement la
loi organique n°13/011 du 13 avril 2013 portant organisation,
fonctionnement et compétences des juridictions de l'ordre judiciaire, la
loi organique n°08/05 du 05 août portant organisation et
fonctionnement du conseil supérieur de la Magistrature ainsi que la loi
organique n°06/20 du 10 octobre 2006 portant statut des magistrats.
suivant l'article 130 alinéa 1er de la constitution
congolaise de 2006 telle que modifiée puis complétée
à ce jour par la loi de 2011, certes tout député national
a le droit d'initier des lois. Cependant, dans le cas échéant la
démarche parait inconstitutionnelle, car tendant une fois de plus
à dépouiller le pouvoir judiciaire de ses prérogatives
constitutionnelles au profit du pouvoir exécutif.
Considérant que la quasi-totalité des
prérogatives du pouvoir judiciaire à reformer par ces trois
propositions de lois sus épinglées sont régies par la
constitution elle-même (l'organigramme du conseil supérieur de la
magistrature et le pouvoir de sanctions disciplinaires sur les magistrats
prévus à l'article 152, la procédure de nomination des
magistrats par le président de la République prévue
à l'article 82 alinéa 2, et la non-ingérence des autres
pouvoirs dans la bonne administration de la justice fondée à
l'article 151), leur révision ou modification ne peut se faire par une
loi ordinaire ou organique comme le propose ces trois propositions de loi dont
question. Mais plutôt, seule l'initiative d'une loi constitutionnelle y
relative peut ce faire.
Ø Sur le plan politique, Les
négociations entre les deux parties ont durée sept mois avant
qu'un consensus ne soit trouvé pour qu'un gouvernement soit
formé. Les relations entre les deux parties au pouvoir demeurent tendues
créant ainsi un climat politique malsain et des crises à
répétions. Les politiciens rivaux échangeant des insultes
et, dans certains cas, recourant à la violence quand bien même les
deux autorités semblent déterminées à faire en
sorte que la coalition fonctionne. Depuis son arrivée au pouvoir, le
Président TSHISEKEDI a créé un climat politique qui
contraste avec les 18 années de KABILA. Des prisonniers politiques ont
été libérés et des personnalités clés
de l'opposition en exil sont revenues en RDC où ils jouent leur
rôle politique. Mais ceux qui, en RDC et à l'étranger ont
vu dans le pouvoir bicéphale mis en place à Kinshasa un moindre
mal, une formule grandissant l'apaisement politique et la stabilité du
pays, doivent déchanter. Les tensions sont de plus en plus vives entre
les partisans du Président Félix TSHISEKEDI et ceux de son
prédécesseur Joseph KABILA, qui a conservé la main mise
sur le pouvoir grâce à son écrasante majorité dans
les Assemblées. Toutefois, il ne faut pas oublier que ce rapport de
force entre le FCC et le CACH n'est pas figé et peut évoluer en
fonction des réactions de la population et des appuis internes et
extérieurs que le Président obtiendra.
De ce fait, pour décrisper les crises
récurrentes qui attaquent les institutions de la République,
mettent en péril la cohésion nationale et le bien-être du
peuple congolais, mais également pour éviter le pire, nous
pensons que la rupture de la coalition FCC-CACH parait idoine.
A la fin de notre étude, et après
vérification des questions essentielles, nous constatons que nos
hypothèses de départ ont été confirmées.
Nous n'avons pas la prétention d'avoir achevé ni
abordé tous les aspects de ce sujet. Nous invitons d'autres chercheurs
à mener des recherches ultérieures dans ce domaine pour
l'émergence de la science.
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