Avant propos
A l'occasion de la réunion préparatoire du
sommet du « Groupe des sept » qui s'est tenue à
Paris le 4 juillet 2019, les ministres des affaires étrangères de
la France, des Etats-Unis, du Royaume-Uni, du Japon, de l'Allemagne, de
l'Italie et du Canada ont plaidé pour une plus grande concentration de
l'aide au développement sur les pays « qui en ont le plus
besoin », à commencer par la région du Sahel. Alors que
la France exerce la présidence du G7, dont les membres assurent les
trois quarts de l'aide publique au développement à
l'échelle mondiale, elle a, pour la première fois, convié
les représentants des pays membres de la force « G5
Sahel » - Burkina Faso, Tchad, Mali, Mauritanie et Niger- aux
discussions multilatérales du sommet de Biarritz du 26 août.
La mise à l'agenda des problématiques du Sahel
et l'organisation d'un événement politique conjoint
représente une petite victoire diplomatique pour la France. Elles se
justifient par le choix de la présidence française de placer la
lutte contre les inégalités et la prévention des conflits
au coeur des thématiques du sommet : le Sahel est en effet en proie
à des crises politiques, sociales, humanitaires et sécuritaires
profondes et régulières qui en font un espace synonyme
aujourd'hui d'instabilité et d'insécurité. Aux
problématiques anciennes de développement, de démographie
et de pauvreté, sesont greffés des enjeux sécuritaires
majeurs qui ont accentué la vulnérabilité de l'espace
sahélien et reconfiguré sa situation géopolitique depuis
une quinzaine d'année. Le contexte d'incertitude politique, de
dégradation sécuritaire et de conflits armés
résulte de la conjonction de trois grands vecteurs d'instabilité
qui dominent le Sahel en 2019 : la prolifération du terrorisme
transnational d'Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et ses différentes
incarnations depuis 2005, les soubresauts sécuritaires engendrés
par la révolution libyenne depuis 2011, et la crise au Mali, issue de la
rébellion touarègue et du coup d'Etat du 22 mars 2012, suivis de
l'intervention militaire française en janvier 2013. Ces trois crises
entremêlées marquent aujourd'hui des lignes de rupture
considérables au Sahel. Elles s'ajoutent à des équilibres
sociaux incertains, des matrices étatiques et institutionnelles
défaillantes et des sous-performances économiques qui se
perpétuent depuis les années 1960, le tout dans un environnement
climatique aride qui accentue la compétition pour l'accès
à l'eau et aux terres arables. La multiplication de foyers
parallèles de tensions politiques, sociales, religieuses et ethniques
s'est intensifiée ces dernières années sans rencontrer de
perspectives de solutions réelles et durables. Ces crises multiples au
Sahel ont pourtant pour terreau commun l'accumulation des
inégalités résultant de la pauvreté et de l'absence
de perspectives économiques pérennes pour les populations, en
particulier dans les zones rurales. Cette conjugaison négative de crises
plurielles et protéiformes dans la région appelle non seulement
des réponses militaires et sécuritaires fortes, mais
également un renouveau de la politique d'aide au développement
des Etats industrialisés vers cette région. Si la
communauté internationale, au premier rang de laquelle la France, est
fortement engagée sur le volet militaire pour neutraliser la menace
terroriste et tenter d'endiguer les flux migratoires, une réponse
sécuritaire seule ne saurait résoudre les crises qui secouent le
Sahel.
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