UNIVERSITE D'ORLEANS
Laboratoire de recherche
juridique «pothier »
Mémoire de recherche en
droit des affaires
option : fiscalité
et société
EN VUE DE L'OBTENTION DU GRADE DE MASTER
EN DROIT
PAR DIENA DIAKIESE SERGE
« Les pactes d'actionnaires
et la répartition des pouvoirs dans les sociétés en droit
français et en droit italien »
sous la direction de : M. THIBAULT MASSART, professeur de droit
privé
Remerciement
A mon directeur Thibault Massart qui m'a donné des bons
conseils pour élaborer ce travail.
DEDICACE
A mon père jean DIAKENGA et à ma
mère alphonsine LUPATSHA, qui mon soutenus sans relâche tout au
long de ce cursus.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET LE POUVOIR
PARTIE I : LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'EXERCICE DU
POUVOIR
CHAPITRE I : LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'ATTRIBUTION DU
POUVOIR
SECTION 1 : LA REPARTITION INITIALE DU POUVOIR PAR LE PACTE
SECTION 2 : LA DISTRIBUTION DE L'EXERCICE DES POUVOIRS
CONCLUSION PREMIER CHAPITRE
CHAPITRE II: LE contrôle DU POUVOIR PAR LE
PACTE
· LES PACTES ACCESSOIRES
CONCLUSION DEUXIEME CHAPITRE
CONCLUSION PREMIER PARTIE
PARTIE II LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'EVOLUTION DU POUVOIR
CHAPITRE 1: L'EVOLUTION QUANT AUX TITULAIRES DU
POUVOIR
SECTION 1 : L'APPLICATION DU PACTE AUX TRANSMISSIONS FAMILLIALES
SECTION 2 : LES TRANSFERTS « MORTIS
CAUSA » EN DROIT ITALIEN
CONCLUSION PREMIER CHAPITRE
CHAPITRE 2 LES TRANSMISSIONS A UNE SOCIETE HOLDING DE
contrôle
SECTION 1 : L'APPORT DE TITRES A UNE SOCIETE HOLDING
DE contrôle
SECTION 2 : LA CLAUSE DE LIBRE TRANSFERT DANS LES SOCIETES DU
GROUPE EN DROIT ITALIEN
CONCLUSION DEUXIEME CHAPITRE
CONCLUSION DEUXIEME PARTIE
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
INTRODUCTION
La définition du terme
donne des indications précises par rapport au sujet envisagé dans
cette étude. En effet, un pacte d'actionnaires « est une
convention signée par tous les actionnaires ou par certains d'entre eux
seulement(1). D'un point de vue formel, les statuts d'une société
constituent l'exemple type du pacte d'actionnaires. Alors de quels pacte
s'agit-il? De toute évidence des « autres pactes »,
ceux qui par cette expression se réfèrent à un contrat
passé entre actionnaires, dont le contenu n'est pas incorporé
dans les statuts et qui ont généralement pour objet de
déterminer les modalités et conditions d'acquisition et de perte
de la qualité d'actionnaire, les droits et obligations attachés
à cette qualité et les règles d'organisation et de
fonctionnement de la société et les modalités de
participation des actionnaires à la gestion de celle-ci.
Ces conventions sont
généralement destinées à demeurer occultes et par
conséquent, à ne pas être porter à la connaissance
des tiers non-signataires. Là est l'ambiguïté entre : la
loi, qui pour protéger les catégories d'actionnaires ou
d'investisseurs les plus faibles, oblige ces pactes à se
dénaturer dans un souci légitime de transparence, surtout quand
il s'agit de sociétés cotées et le souhait, pareillement
légitime, des auteurs, qui ne peuvent envisager la stipulation de telles
conventions, que lorsqu'elles peuvent rester secrètes.
Les mots
« occulte » et « secrète » sont
ceux à l'égard desquels les lois et les juges ont le plus
préjugés. En effet, il est acquis en Italie qu'un pacte
d'actionnaires est « una convenzione tra due o piu persone o stati,
un accordo, una condizione o un insieme di condizioni »(2)(une
convention entre deux ou plusieurs personnes ou Etats, un accord, une condition
ou un ensemble de conditions).
1 Dictionnaire Permanent Droit des affaires, Feuillets 157, 1
er novembre 2001
2 Nuovo dizionario della lingua italiana, Armando Curcio
Editore, Milano, 1998
Le fait qu'elle puisse être établie de façon
licite et juridiquement légitime, à l'intérieur de la
structure sociétaire et même uniquement entre certains
actionnaires, sans avoir besoin d'en faire communication, non seulement aux
tiers, mais aussi aux autres actionnaires, lui donne une efficacité
relative qui suffit aux souscripteurs de la convention. Là se situe
l'ambivalence de ces pactes.
Les lois doivent établir
les règles de référence, donner des critères
d'interprétation des phénomènes factuels. Elles doivent
être adaptées aux évolutions de la pratique tout en
respectant la culture juridique du pays, en faisant en sorte que ces points de
repères historiques fondamentaux ne deviennent des chaînes
inéluctables qui ralentissent l'évolution juridique et surtout
créent des fractures entre la loi et la réalité.
Il ne s'agit donc pas de juger a
priori ce qui est bon et ce qui est mauvais, mais plutôt d'intervenir sur
la détermination des principes et surtout sur leur applicabilité
dans la pratique des affaires. C'est en analysant cette question, qu'on se rend
compte que les lois françaises et italiennes ont engagé une lutte
législative contre ces pactes dans la crainte que ces conventions soient
utilisés pour cacher des faits illicites ou illégitimes.
Certes, l'avouer de
manière aussi claire n'est pas la voie choisie normalement par le
législateur. Il ne faut pas oublier que les principes impératifs
et le respect de l'ordre sociétaire doivent tant bien que mal, s'ajuster
par rapport au respect d'un autre principe, celui de la liberté
contractuelle des parties. Finalement, les parties au pacte ont le droit de
déterminer des accords occultes, tout en assurant le respect des
préceptes juridiques fondamentaux.
En tout état de cause, il
s'agit d'envisager une étude structurée et relativement complexe,
par rapport à un sujet qui ne peut pas être analysé
uniquement d'un point de vue juridique, mais qui demande une
compréhension globale du phénomène « pactes
d'actionnaires ».
En particulier, pour ce qui concerne les dynamiques
économiques, sociales et financières qui a priori justifient
l'engagement des actionnaires dans ces conventions.
En effet, la question
fondamentale, qui est sous-jacente et doit précéder toute analyse
juridique, est celle qui devra relever les raisons essentielles qui
amènent les actionnaires à souscrire de telles clauses.
Cette étude analyse les
liens étroits qui existent entre le rôle de
l'investisseur-actionnaire et la gestion effective du pouvoir . Car cette
dernière sera déterminante, voire essentielle, pour arriver
à concrétiser l'objectif majeur de tout actionnaire, qui est
celui de rentabiliser au maximum l'investissement financier effectué
dans le capital d'une société.
Dans cette optique, les pactes
para-sociaux deviennent des moyens juridiques, voire des instruments, qui
devront permettre la réalisation de l'objectif principal et comme tels
seront soumis, par leurs auteurs, à cet impératif
économique.
Finalement, au vu de la
complexité du sujet et de l'ampleur des questions posées, il est
certain que cette étude ne peut les traiter de manière
exhaustive. Elle visera plutôt à donner une lecture
parallèle des droits italien et français, ainsi que de la
pratique des affaires en matière de pactes d'actionnaires.
Par conséquent, dans cette introduction il est
nécessaire d'envisager avant tout l'examen du « domaine
d'investigation: les pactes d'actionnaires et ultérieurement, il sera
possible d'en établir « la méthode
d'investigation : la confrontation des systèmes juriques»
Les clauses sur les pactes
d'actionnaires et le pouvoir sont nombreuses dans les protocoles, dans les
statuts et dans les pactes adjoints et sont fort variées. Elles tendent
à assurer la sécurité d'un minoritaire au regard de
l'évolution économique de l'entreprise et sont destinées
à permettre un contrôle de la gestion de celle-ci; ce
contrôle peut aller du moins au plus, par paliers successifs.
Beaucoup de conventions extra
statutaires concernent la situation des dirigeants. En effet, d'une part les
dirigeants occupent dans la société la place principale, ils
peuvent ainsi exercer une influence plus notable sur la société
elle même. D'autres part, les dirigeants sont souvent tentés
d'user de leur influence prépondérante pour se faire consentir
des avantages ou des prérogatives qui s'accommodent mieux de la
discrétion des contrats que du caractère public des stipulations
statutaires.
Toute convention conclue avec les
dirigeants comporte, par conséquent, un risque d'abus, surtout lorsque
l'intéressé a la qualité de représentant
légal de la personne morale, car on est en présence d'une sorte
de contrat avec soi même. Cela explique notamment que, dans les
sociétés anonymes, les contrats entre la société et
ses dirigeants sont soumis à une réglementation spéciale,
sauf lorsqu'il s'agit de conventions courantes établies à des
conditions normales. Afin de préciser ce sujet, il convient de dire que
la loi interprète de façon très restrictive les accords
extra-statutaires qui limitent les pouvoirs légaux des organes
d'administration ou de direction(d'ailleurs, il n'apparaît pas de
différences substantielles remarquables, par rapport au fait qu'ils
soient ou non insérés dans les statuts).
En effet, d'une part ces accords
sont inopposables aux tiers, puisque les dirigeants sont réputés
disposer de tous les pouvoirs pour agir en toute circonstance au nom de la
société. D'autre part, même entre les parties, ces
conventions suscitent de nombreuses objections, car elles faussent le jeu
social en privant les dirigeants des attributions que la loi leur accorde, dans
l'intérêt même de la société. Il paraît
donc difficile de tolérer la coexistence d'une organisation officielle
et d'une hiérarchie parallèle occulte résultant de pactes
extra-statutaires, même si ceux-ci lient tous les associés.
De même, pour ce qui
concerne les conventions qui augmentent les attributions des organes
d'administration ou de direction, car elles ne peuvent porter atteinte aux
prérogatives de la collectivité des associés et doivent
pour cette raison être frappées de nullité. Les organes de
direction n'ont de compétence de principe qu'en matière d'actes
de gestion. Ils peuvent chercher, par un accord extra-statutaire, d'avoir le
pouvoir de modifier des règles statutaires, ce qui est normalement
contraire aux principes fondamentaux d'organisation de la
société.
L'étude se concentrera
essentiellement sur la question concernant la gestion du pouvoir à
l'intérieur de la société, en essayant de
déterminer de quelle façon, ceux qui ne détiennent pas ce
pouvoir peuvent arriver à influencer tangiblement l'organisation
sociétaire. En effet, les dirigeants font partie d'une des
catégories qui peuvent ingérer considérablement dans la
vie sociétaire, tant leur rôle est principal et ils peuvent avoir
le statut d'associés, d'actionnaires ou n'avoir aucun de ces deux
rôles. Normalement, le dirigeant doit appliquer les décisions que
la majorité des actionnaires ont prises en assemblée.
Finalement, il arrive couramment que les dirigeants ne soient que
des « hommes de paille », qui doivent exécuter
la volonté plus ou moins expresse du groupe majoritaire.
Dans cette analyse, une
question fondamentale revient, concernant les minoritaires et leurs moyens de
protection. Il est évident que, selon les modalités de
répartition du pouvoir, les différentes catégories
d'actionnaires peuvent intervenir dans le coeur des décisions
sociétaires de manière plus ou moins incisive. Bien
évidemment, ceux qui craignent le plus de subir des choix non
désirés sont les actionnaires qui ont, moins que d'autres, la
possibilité d'intervenir dans la gestion du pouvoir
sociétaire.
Par conséquent,
il est fort probable que, dès la constitution de la structure
sociétaire, des conventions interviennent portant sur la situation
même de la société, même si elles entraînent le
plus d'objections en terme de validité et d'efficacité. En effet,
on peut se demander pourquoi les associés ont recours à une
technique purement contractuelle, puisque les statuts ont
précisément pour rôle de fixer l'organisation et le
fonctionnement de la société. La conclusion de simples contrats
ne serait-elle pas l'indice qui relève une volonté de dissimuler
des stipulations dont la régularité pourrait être
discutable? Il n'est pas possible de donner une réponse unique à
cette question, car la réalité est dans tout domaine très
complexe et ne peut être envisagée de façon trop
simpliste.
Les
intéressés utilisent parfois les conventions extra-statutaires
à un stade de leurs relations où normalement les statuts
n'existent pas encore, parce que la société n'est pas encore
constituée ou ils ne sont plus pleinement en vigueur, parce que la
société est dissoute ou en phase de changements importants. Les
pactes d'actionnaires sont alors, préalable aux accords statutaires ou
la suite logique des stipulations contenues dans ces derniers. Finalement,
même en période de plein fonctionnement de la
société, des conventions peuvent être nécessaires,
du moment que tous les actionnaires n'y participent pas forcément. Rien
ne s'oppose à ce que des associés plus motivés que
d'autres s'unissent par des conventions particulières qui renforcent
les liens sociétaires, en établissant des règles
spécifiques à l'organisation du pouvoir de celle-ci.
Ce travail sera composée de deux partie, la
première consacré à l'étude des « pactes
d'actionnaires et l'exercice du pouvoir » et la seconde aux
« pactes d'actionnaires et l'évolution du pouvoir »
PARTIE 1 : LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'EXERCICE DU
POUVOIR
C'est principalement au cours de
la vie sociale que les accords extra-statutaires, conclu
généralement entre associés, tentent d'exercer une
influence sur le déroulement de la vie sociale. C'est à ce moment
là que le conflit est le plus aigu entre le principe de
prééminence des statuts, par hypothèse conforme à
la loi et celui de la liberté contractuelle. Ces accords, ce sont
multipliés à une période récente, sous l'influence
de l'intensification des relations commerciales internationales(3). Beaucoup
d'étrangers comprennent et supportent mal le caractère rigide du
droit français et du droit italien des sociétés. Ils
cherchent à assouplir ces contraintes par des conventions dont on
retiendra une des principales: les conventions de vote.
La question de la validité
ou de la nullité des conventions comportant des engagements de vote est
l'une des plus irritantes du droit français. D'une part, notamment dans
les groupes de sociétés, les holdings ou les filiales communes,
un associé s'engage souvent à voter pendant un certain temps,
dans uns sens déterminé à l'avance.
Ces engagements permettent la
stabilité nécessaire à la réalisation d'objectifs
complexes et de longue durée. Une société ne saurait voir
ses grandes orientations remises en cause lors de chaque assemblée
annuelle, sous peine de souffrir de la même impuissance que les
régimes politiques dominés par des assemblées
parlementaires à majorité instable. En outre, on peut toujours
renoncer à un droit acquis. En effet, le titulaire du droit de vote
pourrait en disposer et y renoncer ou accepter d'en restreindre la
liberté d'exercice.
D'autre part, le droit de vote doit
être l'expression d'une volonté librement exprimée en
conclusion des débats de l'assemblée des associés ou, s'il
y a eu consultation écrite, des informations communiquées
à l'occasion de celle-ci. A la limite, la consultation des
associés ne servirait à rien, si chacun ne faisait
qu'émettre un vote dans un sens déterminé à
l'avance par une convention immuable(4).
3 Guyon, les sociétés, aménagement
statutaires et conventions entre associés, in Traité des
contrats
4 Référence donné par le Lamy,
sociétés commerciales, n° 3041
De plus, on peut se demander, si le droit de vote n'est pas une
prérogative personnelle en dehors du commerce, puisqu'en cas de
démembrement d'une action, le certificat de vote n'est pas cessible,
à la différence du certificat d'investissement(art. L. 228-29 c.
com).
Par conséquent, le droit
français adopte une position réservée à
l'égard des conventions de vote. On ne saurait affirmer qu'elles sont
toujours valables ou qu'elles sont toujours nulles, car cette certitude est
regrettable, étant donné que ces conventions sont usuellement et
souvent conformes à l'intérêt de la société.
Cette hostilité de principe contraste avec les dispositions de nombreux
droits étrangers qui admettent plus ou moins largement la
validité des conventions de vote. Ici encore, le droit français
souffre d'une excessive rigidité, génératrice de
discriminations à rebours. Néanmoins, la loi du 3 janvier 1994 a
apporté sur ce point un progrès car, sans valider
expressément les conventions de vote dans les sociétés par
actions simplifiées, elle rend celle-ci en partie inutiles, dans la
mesure où les décisions collectives se prennent dans les
conditions prévues par les statuts(art. L 227-9 c. com.).
L'histoire de la prohibition des
conventions de vote est révélatrice, par ses sinuosités,
de la difficulté, de la difficulté de la matière. Il faut
attendre plus de cinquante ans après la promulgation de la loi du 24
juillet 1867, pour trouver les premières décisions annulant les
conventions de vote. La prohibition demeurait d'ailleurs limitée,
puisque les tribunaux admettaient que les actionnaires pouvaient valablement
remettre leurs titres à un mandataire commun qui votait en leur lieu et
place. C'étaient les syndicats de blocage, dont la constitution
était aisée tant que les actions étaient
représentées par des titres au porteur
matérialisés. Toutefois, le mandataire commun ne devait pas
recevoir à l'avance et une fois pour toute l'ordre de voter dans un sens
déterminé.
Le syndicat de blocage était
une délégation du droit de vote, pratique autorisée par la
loi, qui ne devenait contestable que par son aspect collectif. Les membres du
syndicat constituaient une sorte de sous-assemblée, non prévue
par la loi.
Brutalement et sans que cette intervention ait été
souhaitée, la loi du 13 novembre 1933 est intervenu pour
déclarer « nulles et nul effet, dans leurs dispositions
principales et accessoires, les clauses ayant pour objet de porter atteinte au
libre exercice du droit de vote dans les sociétés
commerciales ». Ce texte n'a été qu'un coup
d'épée dans l'eau , car d'un certain côté, il
édictait une prohibition trop générale, eu égard
aux pratiques suivies dans beaucoup de sociétés. Par d'autres
côtés, il était trop limité, puisqu'il ne
s'appliquait ni aux sociétés civiles, ni aux votes en conseil
d'administration.
La jurisprudence continua de se
décider au coup par coup, tantôt annulant les conventions de vote,
tantôt trouvant un prétexte pour les valider. L'avant projet de
loi sur les sociétés préparé par la commission
Pleven comportait un article 825 qui reproduisait le décret-loi de 1937,
mais cet article disparu du projet définitif, de telle sorte que le
texte définitif ne comporte aucune disposition précise en ce
domaine.
Historiquement dans le droit
italien, la question de la validité des syndicats remonte au
début du Xxème siècle. Reconnus et
réglementés par le projet élaboré en 1925 par
la « commission réal » instituée pour la
réforme du code de commerce en 1865, les syndicats de vote ont depuis
toujours donné matière à d'importantes discussions en
doctrine et jurisprudence. Le législateur en 1942 a décidé
de ne pas réguler expressis verbis les syndicats d'actionnaires,
préférant remettre à la libre évaluation du juge
toute considération concernant leur validité. Par la suite,
toutes les tentatives pour essayer de leur donner un cadre de
légitimité ont échoué, y compris le projet DE
GREGORIO.
La position prise par la
jurisprudence italienne sur la licéité de ces pactes a
été globalement négative. Mis à part de très
rares ouvertures, aucune argumentation n'a été capable
d'ôter aux juges l'idée selon laquelle certains syndicats de vote
étaient contraires à l'intérêt de la
société ou pouvaient en vider de signification les organes,
méritant ainsi la suprême sanction de la nullité.
Une telle position aurait dû
marquer la fin de tout accord concernant le vote ou suggérer une
souscription discrète de ces pactes. Mais il n'en fut rien, car au
contraire la fracture entre la pratique et la jurisprudence augmenta à
tel point que cette dissension est de nos jours l'aspect le plus
intéressant de ce type de contrats.
De plus, quand on considère les publications officielles
des accords para-sociaux d'instituts et d'entreprises publiques, on comprend
que le phénomène concerne non seulement des
attitudes « loges secrètes » de groupes
d'actionnaires de sociétés de petite taille, mais aussi la
gestion de sociétés parmis les plus importantes du pays.
Il suffit de penser à la
décision de l'IRI, quand cette société a decidé de
privatiser les activités de la SME concernant la distribution
commerciale (société générale supermarchés)
et la restauration (auto grill). L'IRI prévoyait, comme condition
à la cession des sociétés, la création d'un noyau
stable d'actionnaires de référence et l'établissement
entre eux d'un accord de syndicat. C'est à dire d'un accord qui,
étant établi pour la création d'un centre
décisionnel endosocial fort, pourrait faire partie des hypothèses
qui, « considérant le nombre d'adhérents au syndicat,
l'indétermination et la généralité des obligations
qui lient les adhérents et sa durée », sont
considérés par la Cour de Cassation comme contraires aux
principes du droit des sociétés. Cela dit, la simple diffusion
des pactes para-sociaux, même avec un jugement contraire exprimé
par la jurisprudence, ne peut à elle seule justifier la vivacité
du débat resurgit dernièrement concernant ce type de pactes. En
effet, la reprise d'intérêt peut par contre, s'expliquer par
rapport à deux éléments(5).
Avant tout, la réforme des
marchés financiers, effectuée entre 1990 et 1992 et surtout celle
intervenue par le Testo Unico 1998/58, ont modifié le panorama normatif.
La croissante importance des groupes de société a
suggéré, dans l'attente d'une discipline ad hoc, de
considérer dans de nombreuses dispositions législatives les
syndicats de vote comme instruments aptes à obtenir le contrôle ou
à influencer la gestion du groupe social(par exemple: les lois sur
l'édition, le système radiotélévisé, la
protection de la concurrence, les sociétés
d'intermédiation mobilière, les offres publiques d'achat, les
privatisations) des entreprises de l'État(6).
5CARTE SAINT MARTIN, les sociétés
dites « holdings », n° 310
6GUYON, op.loc. Cit. Note 3
Deuxièmement, la dernière décennie a
marqué la fin du gentlemen's agreement qui unissait les
para-associés dans l'engagement à accepter, sans contredire les
décisions prises par l'organe institué dans le pacte, pour
résoudre
les conflits qui de temps à autre pouvaient se
présenter concernant l'interprétation ou l'exécution du
contrat para-social. Cela voulait dire, que le recours à
l'autorité judiciaire ordinaire était exclu. Un exemple important
a été celui de CIR-Famiglia Formenton, où une possible
sanction « métajuridique », n'avait pas
découragé le cocontractant para social de s'adresser à la
Cour d'Appel de Rome, pour demander la nullité de l'accord souscrit
consciemment et connaissant dès lors l'éventuelle nullité
de l'acte.
Il est clair, que cette situation
est, entre autre , le reflet d'une profonde transformation de la classe des
chefs d'entreprise italiens. Les années 80 ont donné les bases
pour la naissance et le développement de groupes industriels nouveaux,
qui grâce à l'extrême facilité du recours au
crédit et à la globalisation des marchés, ont pris
conscience de leurs propres capacités d'opérer à un
certain niveau, sans devoir respecter les règles fixées par
l'establishment (groupe de pouvoir) traditionnel. En ce sens,
l'éventuelle « disqualification
éthico-social » établie par les autres adhérents
à la communauté des affaires, s'est révélée
inadaptée dans la prévention de l'évolution de la clause
compromissoire non-écrite, selon laquelle tout conflit entre les membres
devait trouver une solution à l'intérieur de la communauté
des affaires.
Avant de procéder à
l'examen de l'état de la jurisprudence et de la doctrine, concernant la
licéité des syndicats de vote, une considération d'ordre
méthodologique s'impose. La présence, à
l'intérieur de la catégorie des syndicats de vote, d'une ample
gamme de pactes, profondément différents les uns des autres, par
rapport aux modalités de formation de la volonté para-sociale et
aux instruments utilisés dans l'imposition des liens engagés,
rendent nécessairement imparfaite une simple lecture abstraite,
privée de rapports avec des cas concrets. Cette réalité
semble finalement avoir été prise en considération par les
juges qui, abandonnant définitivement l'intransigeante fermeture par
rapport à la validité de tout syndicat de vote, retiennent
que « la question de la nullité des pactes para-sociaux,
concernant l'exercice du vote, doit être résolue selon l'examen de
chaque situation ».
Afin d'approfondir les
différentes questions posées par cette introduction, cette
première partie se composera d'un premier chapitre qui
envisagera « les pactes d'actionnaires et l'attribution du
pouvoir » et d'un deuxième chapitre analysant « le
contrôle du pouvoir par le pacte ».
CHAPITRE I. LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'ATTRIBUTION
DU POUVOIR
Actuellement aucun texte en
droit français ne valide ou ne prohibe expressément les
conventions qui portent atteinte au libre exercice du droit de vote. En
revanche, plusieurs textes visent indirectement de tels accord, mais ils
donnent des indices contradictoires. En faveur de la nullité deux textes
sont à citer : l'article 1844, al. 1 du c. civ., qui accorde à
tout associé le droit de participer aux décisions collectives.
L'al. 4 de ce même article ne prévoit pas la possibilité de
déroger à l'al. 1, alors qu'il autorise des dérogations
statutaires à ses autres dispositions, concernant le droit de vote des
usufruitiers ou des indivisaires . A vrai dire, ce texte ne suffit pas à
prohiber les conventions de vote ; il n'interdit que les statuts, à
savoir qu'une manifestation de volonté collective prive l'associé
de ce droit essentiel ou de son aménagement dans des conditions
défavorables. Il est par ailleurs repris dans les sociétés
anonymes par l'article L225-122 c. com., qui pose le principe d'ordre
public « à valeur nominale égale, droit de vote
égal ».
Ces textes n'interdisent pas
les conventions individuelles extra-statutaires portant sur l'exercice du droit
de vote, dans le but unique de les interdire. Il faudrait admettre que le droit
de vote est indispensable entre les mains de son titulaire. Certains l'ont
suggéré en faisant référence à un droit
fonction, qui s'exercerait dans l'intérêt de la
société et non dans celui de son titulaire; cette notion, qui est
inconnue au droit français, ne fait qu'obscurcir le débat.
En réalité,
l'article 1844 du c. civ. Français établit que le droit de vote a
un caractère essentiel, car il est la caratéristique qui
distingue l'associé des autres partenaires de la société,
mais il n'ajoute pas que ce droit est totalement indisponible entre les mains
de son titulaire. Cela veut dire que des renonciations temporaires et
limitées seraient valables. D'ailleurs, la Cour de Cassation semble bien
distinguer le droit de participer aux décisions collectives, qui est
l'ordre public et celui d'y voter, lequel serait susceptible
d'aménagements. L'article 1488 n'apporte finalement aucun argument
essentiel en faveur ou à l'encontre des conventions qui limitent le
droit de voter sans porter atteinte à celui de participer d'une autre
manière aux décisions collectives.
Un autre texte milite plus nettement en faveur de
l'illicéité des conventions de vote mais son domaine est
limité, car il ne s'applique que dans les sociétés par
actions et ne vise que certaines conventions de vote.
A vrai dire, celles qui sont le plus souvent contestables. Il
s'agit de l'article L. 242-9 c. com., qui punit de peines
correctionnelles « ceux qui se seront accorder garantir ou
promettre des avantages pour voter dans un certain sens ou pour ne pas
participer au vote, ainsi que ceux qui auront accordé, garanti ou promis
ces avantages ».
Ce texte, qui n'a pas eu
d'applications jurisprudentielles notables, interdit à l'actionnaire de
monnayer son droit de vote. On peut admettre que, lorsque les conditions de
l'incrimination sont remplies, la convention de vote est nulle, mais l'article
L. 242-9 c. com. Est rédigé dans des termes ambigus, notamment
parce qu'il ne définit pas les avantages que l'actionnaire doit se faire
consentir pour voter dans un sens déterminé. Si le
mot « avantage » vise toutes les contreparties, ce
sont toutes les conventions de vote qui sont prohibées, car elles ont un
caractère synallagmatique.
Par contre, dans le langage
juridique ce mot désigne presque toujours les ruptures
d'égalité injustifiées. En effet, dans le cadre de cet
article ce mot serait la rémunération d'un trafic d'influence. Au
contraire, il n'y aurait pas avantage et la convention de vote serait valable,
si des actionnaires s'entendaient dans l'intérêt de la
société, pour voter dans un certain sens, car en fin de compte ,
c'est aussi le leur. Par conséquent, aucun texte, analogue au
décret-loi du 31 août 1937, aujourd'hui abrogé, ne prohibe
formellement les conventions de vote.
Au contraire, les lois
récentes reconnaissent les conséquences produites par de telles
conventions, ce qui revient à en admettre la validité, car ce qui
est nul ne saurait produire aucun effet. Les lois du 3 janvier et du 12 juillet
1985 considèrent qu'une société en contrôle une
autre lorsqu'elle dispose seule de la majorité des voix en vertu d'un
accord conclu avec d'autres actionnaires, du moment que ce pacte n'est pas
contraire à l'intérêt de la société(art.
233-3 et L. 233-16 c. com.) C'est admettre implicitement la validité des
conventions de vote dans les groupes.
La loi du 2 août 1989,
article 18, vise également les « actions de
concert » tendant à mettre en oeuvre une politique commune
vis-à-vis d'une société(art. L. 233-10 c. com.). Elle les
soumet à une réglementation spécifique en cas de
franchissement de seuils de participation et d'OPA. L'action de concert n'est
pas une action illicite ou irrégulière, comme en droit de la
concurrence ou en droit pénal, c'est une pratique valable,
génératrice de certaines obligations, puisqu'elle peut avoir pour
objet : l'acquisition, la cession ou l'exercice du droit de vote. Il s'agit de
conventions qui sont valables, au moins en principe.
En droit italien,
étant donné l'absence historique permanente d'une discipline
spécifique de la part du législateur, le jugement sur la
légitimité des syndicats de vote a toujours été
rattaché aux principes généraux du droit
sociétaire. Dans le temps, cela a donné lieu à une
jurisprudence oscillante, perpétuellement embarrassée entre les
thèses traditionnellement acceptées et les nouvelles qui
prenaient de plus en plus d'ampleur, produisant ainsi un répertoire de
jugements caractérisé par d'inévitables contradictions,
accélérations, revirements, surtout à cheval entre les
régimes en vigueur avant et après le code de 1942; par contre,
l'introduction des articles 122 et 123 du texte unique concernant les
dispositions en matière d'intermédiation financière(d.lgs.
24 febbraio 1998, n° 58) ont établi la reconnaissance
définitive de la validité des conventions de vote dans l'ordre
juridique italien. Le législateur a ainsi donné le mot de la fin,
à un débat historique qui s'est développé en
doctrine et en jurisprudence depuis 1942. Les premières
interprétations ont toujours été très restrictives
et, seulement dans le courant des années, une tendance doctrinale plus
mitigée a commencé à envisager une compatibilité
possible entre les syndicats de vote et les principes qui règlent le
droit sociétaire italien. En effet, les doutes et les divergences
n'avaient pas étés dépassés même après
l'introduction, dans les années quatre-vingt, des dispositions
législatives intervenant dans plusieurs matières et faisant
référence aux pactes d'actionnaires
Selon une certaine
orientation de pensée, le fait que les lois relient à la
présence des syndicats de vote toute une série d'effets
très importants, ne pouvait que déposer en leur faveur. Selon
d'autres interprétations, on retenait que le législateur n'avait
fait que prendre acte de leur existence, sans avoir l'intention d'exprimer
aucun jugement concernant leur validité. Aujourd'hui, la question n'a
plus la même importance et ce, dans les sociétés
cotées, qui sont celles principalement concernées par ce texte de
loi, comme dans celles non cotées.
La raison qui
motivait le jugement négatif porté par une partie de la doctrine
et de la jurisprudence sur la licéité des conventions de vote
afférent à l'exigence d'assurer un fonctionnement correct de
l'assemblée, concernant toutes les sociétés par actions et
pas uniquement une catégorie spécifique. Par conséquent,
une fois admise la validité du principe des syndicats de vote pour les
sociétés cotées, il n'existe aucune raison pour
considérer ces mêmes contrats nuls, s'ils sont établis dans
le cadre de sociétés non cotées. Cela étant, il
existe diverses catégories de syndicats de vote. En effet , la Cour
Suprême(Cour de Cassation), affirme maintenant une reconnaissance
générale de ces pactes, a déclaré nuls les
syndicats de vote à durée indéterminée.
En particulier, ces contrats ne
mériteraient pas une protection juridique, selon l'art. 1322 du c. civ.,
car ils ne seraient pas compatibles avec l'attitude généralement
peu favorable à entériner des obligations qui auraient une
durée indeterminée. Par ailleurs, le jugement cité,
à cause des argumentations avec lesquelles il arrive à s'opposer
aux positions qui nient la validité des conventions de vote, a
été unanimement critiqué dans sa partie afférente
à la durée de ces pactes para-sociaux.
Par la suite, la Cour d'Appel de
Milan, intervenant dans un cas d'espèce analogue, s'est prononcée
de façon complètement différente, par rapport à la
Cour de Cassation. En particulier, les juges de Milan ont
considéré que le fait que, si de façon
générale l'ordre juridique était défavorable aux
obligations aux obligations à durée indéterminée,
cela ne voulait pas dire que nécessairement le lien établit
n'était pas valable, car les normes prévoient des remèdes
à ce genre de situation, permettant la récession ad
nutum.
Dans les cas des syndicats de
vote, il existe les conditions qui permettent de procéder à une
application analogique de la discipline du retrait prévue pour les
sociétés de personnes et les associations(art. 2284 et 24 c.
civ.), au vu des aspects communs de ces deux régimes juridiques.
Finalement, dans le même cadre doit être pris en compte l'art. 123
du Texte Unique qui a, de manière très explicite, prévue
l'admissibilité des conventions de vote à durée
indéterminée établies dans les sociétés
cotées, en attribuant à tous les cocontractants le droit de
sortir du pacte avec un préavis de six mois.
Afin de procéder dans
l'analyse de la question, ce premier chapitre envisagera l'étude de
« La répartition initiale du pouvoir par le pacte »
dans la première section et « La distribution de l'exercice
des pouvoirs » dans la seconde.
SECTION 1: LA REPARTITION INITIALE DU POUVOIR PAR LE
PACTE
Malgré des bases
incertaines, la jurisprudence française, bien que peu abondante, est
relativement stable. Les conventions de vote sont valables, si elles
remplissent les conditions ci-après examinées. En effet; elles ne
doivent pas priver le promettant de toute possibilité de participer aux
décisions collectives, elles doivent donc avoir un domaine
limité, de telle sorte que la clause par laquelle un associé
s'engagerait à toujours voter dans le même sens qu'un autre serait
contestable, car il n'aurait plus aucune liberté. On estime souvent que
pour être valable le pacte doit être conclu pour une durée
déterminée. Cette opinion est contestable aussi en droit
français, car une telle convention est finalement plus contraignante
qu'un engagement conclu sans limitation de durée. En effet, celui-ci
peut être résilié à tout moment par le promettant
à condition d'agir de bonne foi et de respecter un préavis(7).
Engagés du point de la
société, ces accords doivent être conformes à
l'intérêt de la société ou du groupe. Au contraire,
les conventions sont nulles , notamment parce qu'elles empêchent les
actionnaires d'opérer librement les choix qui s'imposent. Ce
critère a l'avantage de la souplesse, il laisse aux tribunaux un large
pouvoir d'appréciation, ce qui n'est pas négligeable dans une
matière où le meilleur côtoie le pire. Il présente,
en revanche, l'inconvénient d'être mal définit et cela
d'autant qu'aucune décision de principe de la Cour de Cassation n'est
intervenue depuis l'abrogation du décret-loi de 1937. En outre, il
semble que cet intérêt doit s'apprécier, non seulement au
moment de la conclusion du pacte, mais encore tout au long de son
exécution. Or, l'évolution de l'environnement social peut faire
qu'un accord devienne contraire à l'intérêt de la
société, alors qu'il y était conforme à
l'origine.
7 SAYAG, mandat social et contrat de travail, attraits, limites
et fictions, in Rev. Soc. 1981
Enfin, est-ce possible
d'envisager le fait qu'une convention pour être valable doit tout
simplement ne pas être contraire à l'intérêt social
ou faut-il qu'elle produise des conséquences favorables au regard de
celui-ci. Cette incertitude est à son comble dans les groupes de
sociétés, c'est à dire dans la situation où les
conventions de vote sont le plus couramment pratiquées. En effet, si
l'intérêt d'une société isolée est
déjà difficile à définir, il en va a fortiori bien
davantage de celui du groupe(8).
Parmi les motifs retenues pour
valider les conventions de vote, en droit français, on rencontre le plus
souvent la recherche d'une majorité stable, la volonté
d'opérer une restructuration, une augmentation de capital ou surtout
organiser les relations entre actionnaires d'un même groupe. Au
contraire, les engagements généraux paraissent suspects, car ils
sont rarement compatibles avec l'intérêt de la
société et peuvent dissimuler des fraudes(9).
Afin d'envisager et
d'expliquer plus clairement l'analyse des théories contraires en droit
italien, donnant une interprétation négative au
développement des syndicats de vote, il sera intéressant de
prendre en compte un des principes fondamentaux du droit des
sociétés: « l'intangibilité du droit de
vote ». Selon une première source d'interprétation, les
syndicats d'actionnaires dériveraient de la limitation que ces pactes
imposent au libre exercice du droit de vote. Cette théorie, qui a
été élaborée sous l'ancien code de commerce,
était originairement liée à une vision particulière
du vote, considéré comme res extra commercium. C'est à
dire, comme droit directement personnel de l'assuré, absolument
inséparable du titre même et pour lequel on ne pouvait accepter
aucune « manipulation ». On considérait que le
vote était donné à l'associé, afin de
réaliser l'intérêt de la société et non pas
directement son intérêt personnel.
8 HOANG, Notion d'association et du contrat d'organisation, paris
I, 2000, ASCARELLI
9 DI SABATO, manuale delle sociétà, torino, 1992,
p. 252
Selon cette
conception la protection de la liberté de vote était
considérée comme un principe d'ordre public, qui
demandait « il fuzionamento regolare delle società
anonime a difesa del capitale e dell'economia nazionale(...). Se il
contratto(...) vincola i contraenti nella loro libertà di voto e di
condotta nell'assemblea dei soci (...) esso si fonda sopra una causa contraria
alla legge ed è percio improduttivo di effeti giuridici »(le
fonctionnement régulier des sociétés anonymes pour la
défense du capital et de l'économie nationale(...). Si le contrat
lie les cocontractants dans leur liberté de vote et de conduite durant
les assemblées des associés (...) celui-ci se fonde sur des bases
contraires à la loi et par conséquent,ne peut en aucun cas
produire d'effets juridiques).
L'intangibilité du
droit de vote dérivait de l'application de deux principes,
considérés comme prioritaires dans la constitution juridique de
la société de capitaux : celui concernant l'impossibilité
de séparer le vote de la qualité d'associé, à
savoir que l'un ne pouvait circuler sans l'autre; et celui considérant
intouchable l'expression du vote libre et spontané. Par
conséquent, toute compression de la liberté de l'associé
qui l'empêchait de manifester de façon complètement
autonome son propre vote, était illégitime. La conclusion logique
d'une telle conception était la nullité de tout type d'accord
concernant le vote, car contraire aux principes fondamentaux de l'ordre
juridique sociétaire.
Avec l'entrée en
vigueur du Code Civil de 1942, la position s'assouplit avec une
« ouverture » vers les syndicats de vote à
l'unanimité. Le pacte Toffolo c/ Iesi, a été la
première occasion offerte à la Cour de Cassation pour affronter
ex professo la validité des pactes para-sociaux. Selon le nouveau Code
Civil, la Cour de Cassation considère à l'unanimité de
ceux qui sont à la majorité, introduisant ainsi une distinction
qui, encore de nos jours, trouve l'accord de la quasi-totalité des
auteurs(10).
10 FARENGA, « sociétà,
validità ed efficacia del contrtti parasociali », 1988,
1125-1126
Après avoir
établi que, comme durant le régime précèdent, le
code de 1942 s'inspire du principe d'intérêt public de la
« libertà e della spontaneità del voto nella formazione
delle volontà dell'ente che deve risultare dalla volontà
effetiva, manifesta nelle assemblle »( liberté et de
spontanéité du vote dans la formation de la volonté qui
doit résulter de la volonté effective, manifestée durant
l'assemblée); la Cour affirme , que le syndicat d'actionnaires est
licite,si dans son règlement on ne reconnaît la validité
des délibérations adoptées uniquement à
l'unanimité. Le pacte de syndicat pour lequel l'associé se soumet
à la volonté de la majorité des participants au syndicat,
sans voter librement durant l'assemblée sociale, reste contraire
à la loi.
Parallèlement à
l'impossibilité absolue disposer du vote, une nouvelle thèse se
développe. Celle-ci veut fonder la licéité des syndicats
de vote par rapport au principe fondamental
dénommé « méthode
d'assemblée ». C'est à dire l'ensemble des principes
d'intérêt public qui réglementent le fonctionnement de la
société et pour lesquels la volonté sociale devrait: 1) se
former durant l'assemblée, après un 2) débat avec les
autres associés et sur la base du 3) principe majoritaire.
En effet, à partir du
moment où le législateur attribue à la
société de capitaux la personnalité juridique, il leur
impose une structure spécifique, qui sépare complètement
le patrimoine de l'entreprise de celui de ses associés.
L'intégrité de ce patrimoine est préservée, entre
autre à l'égard des tiers, à travers la soustraction aux
associés du pouvoir d'en disposer ou de le modifier par des actes
relevant de l'autonomie privée. Par conséquent, selon les Cours
de l'examen de la légitimité des syndicats doit être
encadré dans le contexte appartenant aux principes d'ordre public.
Avant tout, les syndicats de
vote constitueraient un moyen pouvant vider l'assemblée sociale de ses
pouvoirs et de ses fonctions. En effet, le syndicat qui lie la majorité
des actions de la société, se substituent de facto à
l'assemblée, faisant ainsi que la volonté sociale se forme
à l'extérieur du siège institutionnellement
préposé. En outre , le syndicat prédéterminant le
contenu du vote, ne permettait plus à l'associé de participer
activement à la formation de la volonté sociale durant la
discussion et l'échange d'opinions, avec les autres associés .
Car les syndicats de vote limiteraient considérablement la
confrontation dialectique entre associés, empêchant toute
possibilité de changement d'idée, suite au débat en
assemblée.
La méthode du vote
syndiqué, déterminant à l'intérieur de celui-ci une
stérilisation de la majorité, empêcherait tout lien avec
une minorité extérieur au pacte, qui pourrait donner lieu
à une majorité effective de signe opposé. Dans un
système qui détermine une occultation importante des votes de la
minorité on découvre un détournement important des
règles majoritaires, puisque la majorité qui se forme en
assemblée ne serait qu'apparente et fictive.
Considérant le
« conflit d'intérêts », selon cette
théorie négative des pactes d'actionnaires, ceux-ci bouleversent
le cadre sociétaire, étant porteur d'intérêts en
opposition avec ceux de la société. De même teneur semble
être aussi la relation au Code Civil de 1942, précisant que
« le intense a cui non si deve indulgere sono specialmente dirette a
turbare il processo di formazione della volontà sociale determinandola
in modo non conforme all'interesse della società, e cioè in senso
contrario a quella che sarebbe stata la presumibile risultante del libero
esercizio del diritto di votto »(les ententes sur lesquelles on ne
peut faire preuve de clémence sont celles qui sont spécialement
orientées pour déranger le processus de formation de la
volonté sociale, faisant en sorte qu'elle se détermine de
façon non conforme à l'intérêt de la
société, c'est à dire qu'elle se détermine de
façon non conforme à l'intérêt de la
société, c'est à dire de façon contraire à
ce qui aurait dû être le résultat d'un libre exercice du
droit de vote).
Un dernier
élément négatif dans l'évolution des syndicats de
vote est celui qui concerne « l'indétermination et
l'indéterminabilité de l'objet » du pacte. En effet,
dans cette ligne de pensée, tous les accords devraient être
considérés nuls en application de l'art. 1346 du C. Civ., puisque
ceux-ci obligent l'actionnaire à se soumettre à la volonté
du syndicat pour toute résolution d'assemblée avant le vote
déterminant.
Dans la prochaine section, il sera analysé comment les
conventions de vote peuvent intervenir efficacement dans l'organisation interne
de la structure interne sociétaire et en définir la
répartition des pouvoirs qui devront s'exprimer au sein de celle-ci.
SECTION 2: LA DISTRIBUTION DE L'EXERCICE DES
POUVOIRS
L'examen des principales
décisions de justice en droit français intervenues avant comme
après la loi de 1966 donne l'impression qu'un mouvement de plus en plus
net se dessine en faveur de la validité des conventions de vote. En
effet, on ne tardera pas à atteindre le stade où la
validité sera présumée et où l'annulation supposera
que le demandeur prouve que la convention est contraire à
l'intérêt de la société ou frauduleuse.
La catégorie des
conventions de vote révèle une grande variété,
encore augmentée par une difficulté de qualification, car il
arrive que pour valider une convention de vote les tribunaux lui donnent une
autre quelification. Normalement l'engagement de vote peut trouver sa source
dans un accord de courtoisie, dont l'efficacité est garantie par
l'appartenance de son auteur à un milieu où l'on doir
respectée la parole donnée; dans un contrat individuel ou
collectif ou dans la constitution d'un groupement ad hoc, notamment une
société holding.
Les conventions peuvent
être conclues entre associés, notamment ceux qui s'unissent pour
exercer en commun le contrôle ou entre les associés et des tiers.
Par exemple, les opérations de restructuration et les cessions de
contrôle sont souvent accompagnées de conventions de vote, tendant
notamment à garantir à une personne un siège au conseil
d'administration. Les conventions les plus usuelles peuvent se rencontrer dans
tous les organes délibérants de la société, plus
spécialement le conseil d'administration et le direction.
Les accords peuvent viser un
vote déterminé ou s'appliquer à tous les votes qui
interviendront pendant une certaine durée. Ils peuvent organiser les
sens des suffrages, faisant en sorte que le promettant s'engage à voter
selon les indications qui lui seront données avant ou pendant
l'assemblée par le chef de file. Ils peuvent transférer le droit
de vote à un tiers, qui se décidera au nom et pour le compte des
actionnaires. Enfin, les conventions peuvent stipuler des obligations
précises, comme la nomination de telle catégorie de personne
à tel poste de direction ou des engagements plus diffus, comme celui de
maintenir la pérennité de la société(11).
11 CARBONE, la convenzioni di voto e la teoria generale del
contrario, NGCC, 1992
De la combinaison de ces divers éléments, il
apparaît que la convention la plus discutable, bien que sans doute plus
pratiquée, est celle qui vise le maintien au conseil d'administration
d'un actionnaire qui n'a plus la majorité. En effet, on ne voit pas quel
intérêt peut avoir la société à maintenir en
place un dirigeant dans de telles conditions, si ce n'est que pour rassurer
ceux qui sont en relation d'affaires avec elle, pour arriver dans la courte
période à mettre en place le nouveau ayant le plein appui de la
majorité sociale.
L'exécution d'une
convention valable et la non-exécution d'une convention nulle
n'entraîne pas de difficulté. En revanche, les conséquences
du vote émis en exécution d'une convention
irrégulière ne sont pas claires. Sous l'empire du
décret-loi de 1937 la délibération n'était pas
libre. Est-ce possible d'envisager le même régime dans
l'état actuel du droit, compte tenu du régime très
restrictif des nullités d'assemblées établies par les
articles 235-1 C. Com. Et 1844-10 du C. civ.? L'absence de la sanction la plus
dissuasive serait choquante et ne ferait pas intervenir l'intervenir
l'interdiction des conventions de vote dont l'efficacité serait
réduite. Il faut donc admettre , que le vote émis en
exécution d'une convention irrégulière constitue une
violation des dispositions légales impératives qui
régissent le droit de vote.
La nullité de la
délibération serait par conséquent, encourue dans les
mêmes conditions que si l'irrégularité de vote avait eu
une cause autre. Il faut notamment en déduire, que la nullité
peut être écartée si la majorité prévue par
la loi était acquise, défalcation faite des votes émis en
exécution de l'engagement illicite. De plus, étant une
nullité de protection, elle ne saurait être demandée par
l'actionnaire qui a émis le vote contesté.
Envisagée du point de
vue de l'engagement de vote lui-même, l'irrégularité
entraîne moins de difficultés. En effet, l'engagement,
étant par hypothèse extra-statutaire, il n'est soumis qu'au droit
commun des obligations, sans qu'il y ait lieu d'appliquer le régime plus
restrictif qui régit la nullité des actes des
sociétés. Par conséquent, la convention doit être
annulée puisqu'elle contrevient à des dispositions d'ordre
public. En principe, cette nullité rejaillit sur la totalité de
la convention de vote(art. 1172 C. Civ.). Toutefois, les tribunaux se
contentent parfois de réputer la convention de vote non écrite,
parce qu'elle a un caractère accessoire et peut se détacher du
reste du contrat dont elle fait partie.
L'inexécution d'une
convention valable a pour seule sanction l'attribution de dommages et
intérêts au cocontractant, par application de l'article 1142 du C.
Civ.. En effet, il s'agit de la violation d'une obligation de faire ou de ne
pas faire. L'évaluation du dommage subi par la victime de
l'inexécution est généralement difficile, surtout si la
convention avait un objet complexe, parce qu'elle tendait à
l'organisation d'une majorité stable ou préparait une mesure de
restructuration. Une action judiciaire en exécution forcée
n'est pas inconcevable, si le bénéficiaire de la convention
sait, avant le vote, que son consentement a l'intention de ne pas tenir ses
engagements.
Toutefois, cette action se
heurte à des objections, car elle risque de devoir être
précédée par un référé tendant au
report de la tenue de l'assemblée, de telle sorte que des querelles
entre associés viendraient perturber la vie sociale. A cela on peut
répondre que, puisque la convention de vote n'est valable que si elle
est conforme à l'intérêt social, la société
elle-même a intérêt à ce qu'elle soit
exécutée. Le report de l'assemblée serait dès lors
une mesure d'intérêt général. En revanche, le vote
émis en violation de la convention est valable à l'égard
de la société, c'est à dire qu'il ne peut pas vicier la
délibération. En effet, la convention extra-statutaire est
inopposable à la société.
Les conventions de vote sont
parfois assorties de mécanismes contractuels qui cherchent à en
assurer l'efficacité. Tant que les actionnaires au porteur
étaient matérialisées, il était facile de les
remettre au chef de file du syndicat de blocage, qui votait avec elles au nom
de tous les participants à l'accord. Ce procédé n'est plus
utilisable depuis que les actions au porteur sont inscrites en compte.
L'application des principes
présentés dans cette section concernant le droit italien a fait
l'objet d'importantes critiques, de la part de la doctrine récente,
surtout dans les effets que celle-ci peut avoir dans la distribution de
l'exercice du pouvoir. Le leit motiv commun à chaque auteur est la
démonstration que les syndicats de vote ne sont pas contraires aux
principes indérogeables du droit des sociétés. En effet,
pour ce qui concerne l'intangibilité du vote, l'évaluation
considère les deux aspects du principe énoncé.
In primis, à la suite de
l'entrée en vigueur du code de 1942, le dogme selon lequel le vote ne
pouvait ne pouvait pas être commercialisé et moins encore
séparé du lien qui le tient lié à l'action, tombe
définitivement. On admet finalement la séparation entre le droit
et le titre. Le même phénomène se reproduit pour ce qui
concerne l'idée selon laquelle le vote doit être exercé
dans l'intérêt social. Dans le système juridique actuel, le
vote est attribué dans l'intérêt individuel de
l'actionnaire, à condition qu'il ne soit pas exercé en
contradiction avec l'intérêt social.
Bien évidemment, plus
difficile paraît l'évaluation du deuxième aspect du
problème, qui concerne la manifestation libre et spontanée du
vote.
D'un point de vu purement théorique, il a
été mis en évidence le fait que la simple notion de
liberté de vote ne représente pas un concept juridiquement
définissable, mais plutôt une expression rhétorique. Elle
pourrait, en effet, se remplir de signification seulement à travers une
vision doctrinale particulière, portant sur la défense de la
conception démocratique de la société anonyme, ainsi que
des minorités d'actionnaires.
Selon une perspective un peu
différente, il a été relevé que le principe de la
formation spontanée de la volonté sociale dans le processus de
l'assemblée sociétaire est le résultat d'une
équivoque dérivant de la transposition hypostatique du concept de
délibéré collégial, du milieu du droit
public(constitutionnel et administratif) à celui du droit privé,
qui tend à utiliser de façon optimale les ressources
patrimoniales des individus, même s'ils sont en union entre eux.
En partant de cette
dernière considération et considérant la nature
patrimoniale du droit de vote(considéré comme attribut
afférent la propriété ou d'autres droits réels sur
les actions, selon l'art. 2352 du C. Civ.), il a été
considéré que, bien que la gestion sociale est exercée de
façon collective, sous fictio iuris de la personne morale, il n'existe
aucune raison valable pour dévier du princiê de droit
privé. En effet, selon ce dernier, chacun est libre d'user et de jouir
comme bon lui semble, dans les limites du respect des droits d'autrui et des
normes d'ordre public des droits patrimoniaux, dont il est titulaire.
D'un autre point de vue, la
distinction entre syndicats de vote à majorité et syndicats de
vote à l'unanimité, a été acceptée par toute
la jurisprudence, même celle plus rigoureuse par rapport aux syndicats de
vote. Cela veut dire, qu'en admettant que dans l'ordre juridique italien il
existe le principe de la liberté et la spontanéité du
vote, cette liberté et cette spontanéité devraient
nécessairement se qualifier dans le temps et dans l'espace(12).
12 GALGANO, tre pareri ed un provvendimento sui limiti
soggettivi di efficacia del sindicato di blocco, in contratto e impresa, 1990,
2, 558
Par conséquent, il faudrait définir un moment
durant lequel les deux faces nobles du droit de vote trouvent effectivement une
vraie raison d'être. C'est-à-dire où se termine-elles et
jusqu'à la votation en assemblée? Ou jusqu'au moment qui
précède le vote?. Or l'admission de la validité des
syndicats à l'unanimité suppose nécessairement la non
existence d'un principe indérogeable, selon lequel la
démonstration de l'atteinte à la liberté et à la
spontanéité du vote de l'actionnaire serait établie durant
la séance même du vote.
De deux choses l'une: soit
la volonté de l'associé peut, toujours librement et
spontanément se prédéterminer à l'extérieur
et avant l'assemblée, cela signifie qu'aussi les syndicats à
majorité sont valables. L'associé, au moment de la souscription
est parfaitement libre d'adhérer au non au pacte et d'assumer de
façon consciente l'engagement de soumission à la volonté
de la majorité des actions syndiqués. Soit la volonté de
l'associé doit librement et spontanément se déterminer
uniquement au moment du vote en assemblée. Dans ce cas, même les
syndicats à l'unanimité ne peuvent jouir d'aucune marge de
licéité, car dans les accords de ce genre, l'associé
s'engage aussi à voter selon ce qui a été
décidé de façon unanime par l'assemblée
para-sociale. C'est-à-dire dans un moment chronologiquement
antérieur, par rapport à l'assemblée sociale, en
promettant de ne pas modifier sa conviction, entre la première et la
deuxième déclaration.
Les deux énoncés
liberté/spontanéité du vote en assemblée et la
validité uniquement des syndicats à l'unanimité restent,
de ce point de vue, dans une situation de permanence contradiction. Par
conséquent, indépendamment de l'existence ou non de ce principe,
on est obligé de conclure que dans l'ordre juridique italien, le seuil
de garantie de la liberté et de la spontanéité du vote est
anticipé au moment de la souscription du syndicat de vote(13).
13 LIBONATI, sindicati di voto e gestione d'impresa, in Rev.
Dir. Comm., 1991, 1, p. 101
Pour ce qui concerne
l'impossibilité de déroger à la « méthode
d'assemblée », seules les règles formelles de la
procédure de l'assemblée sont impératives. En particulier,
celles qui requièrent que la volonté sociale de tous les
associés ou de la majorité. Elle ne réfère jamais
au contenu du vote ou aux modalités de son expression.
Par conséquent, pour ce
qui concerne l'idée selon laquelle les pouvoirs de l'assemblée
seraient vidés de toute possibilité effective d'action, il faut
dire que: même dans les cas où le syndicat regroupe la
majorité absolue des actions de la société, il ne se
substitue jamais à l'assemblée, car formellement c'est toujours
et seulement celle-ci qui peut se prononcer sur les questions à l'ordre
du jour, formant ainsi la volonté sociale(14).
Il est nécessaire de
différencier entre formation et manifestation de la volonté
sociale. Ce qui est requis par l'ordre juridique est uniquement que le vote
soit exprimé durant l'assemblée et non pas que la volonté
se soit nécessairement formée dans le même moment. Faisant
référence à la « discussion en
assemblée », comme principe de l'ordre juridique
sociétaire, ainsi considéré, il se pose en contraste avec
la réalité des assemblées qui démontre l'importance
minime des débats d'assemblée. En effet, les normes du code qui
donnent la possibilité à l'actionnaire de former son opinion
avant l'assemblée, lui permettant d'avoir un ordre du jour, la vision du
bilan et la relation des syndics, portent inévitablement à douter
de la validité d'un tel principe.
En effet, la discussion qui
devrait normalement précéder le délibéré est
une matière laissée à la libre disponibilité des
associés. Si bien, qu'un délibéré adopté
sans discussion préliminaire est valable, de même pour le vote
exprimé par le biais d'un représentant muni d'instructions
précises(formulées par l'actionnaire avant et à
l'extérieur de l'assemblée, n'ayant pas la possibilité
d'évaluer les opinions et les intérêts qui pourraient
émerger durant le débat en assemblée)(15).
14 GORE, HOPPENOT, La filiale commune et le droit
français des sociétés, in la filiale commune, p. 6, Paris
1975
15 SAINTOURENS, La flexibilité du droit des
sociétés, in Rev. dr. Com. 1987, 457
La loi se préoccupe uniquement de garantir à
l'associé l'information concernant les faits qui intéressent la
société, permettant en assemblée l'éclaircissement
d'éventuels doutes et une formalisation du délibéré
qui convienne aux décisions prises. En outre, si l'associé ne
désir pas se prévaloir de ces facultés, mais au contraire
préformer sa volonté, ce comportement ne peut pas être
considéré contraire à la loi. Par ailleurs, dans l'ordre
juridique italien 2347 C. Civ. Prévoit implicitement la
possibilité que la volonté des associés-communautaire se
forme en dehors de l'assemblée, ceux-ci devant fournir les
indications(forcément concordées) au représentant
commun.
Pour conclure, on ne
comprendrait pas pourquoi et à la faveur de qui, le législateur
devrait protéger le jus poenitendi du
para-associé qui, même quand il change d'avis durant
l'assemblée par rapport à la volonté sociale, le fait
uniquement dans son intérêt personnel et sûrement pas parce
qu'il aurait été convaincu durant le débat
d'assemblée de la faiblesse des arguments présentées par
les autres associés, argumentations sur lesquelles il a eu le temps de
réfléchir bien avant l'assemblée.
Pour ce qui concerne les
« majorités fictives », il est clair que les
syndicats font parties d'une phase qui précède le vote social.
Ils font parties de diverses motivations qui peuvent porter l'associé
à déterminer sa volonté dans un sens que dans un autre.
Étant donné que l'ordre juridique italien ne prévoit
aucune norme qui empêche les actionnaires de s'associer, sous une forme
quelconque, afin d'exercer leur vote en assemblée et le principe
majoritaire reste invarié.
Si l'on considère que
les mêmes résultats peuvent être obtenus à travers la
cession des actions syndiquées à un holding ou en communion entre
les para-associés, le phénomène n'est pas très
différent de ce qui se vérifie quotidiennement dans de nombreuses
sociétés de grandes dimensions. En effet, durant leurs
assemblées prévalent des majorités bien inférieures
au 50 % + 1 des actions, qui sont fictives d'un certain point de vue. Sans
considérer les effets dur l'ordre sociétaire de l'adoption,
encore limitée uniquement aux sociétés qui privatisent, du
« vote de liste » qui, permettant la nomination de certains
administrateurs pour les minorités, représente une
éclatante atteinte au principe de majorité.
S'agissant du « conflit
d'intérêts », au regard du code de 1942, la doctrine est
d'accord pour repousser l'idée que le syndicat de vote soit, par nature,
en contraste avec l'intérêt social. Quelle que soit l'extension
du concept de conflits d'intérêt, on admet de façon unanime
l'impossibilité de déterminer a priori un tel conflit, qui doit
être par contre certifié concrètement, faisant
référence au seul délibéré
d'assemblée. En outre, l'art. 2373 c. civ. Requiert une
démonstration ultérieure de la nuisance à la
société, à cause d'un délibéré pris
avec le vote déterminant de celui qui est porteur d'un
intérêt en conflit avec l'intérêt social.
Par conséquent, la
contrariété à l'intérêt social ne peut de
toute façon servir comme ligne de démarcation abstraite et
générique, entre les syndicats considérés comme
« bons » et ceux évalués comme
« mauvais », sauf dans le cas où le syndicat aurait
comme unique but le blocus de l'activité sociale. La volonté
para-sociale peut être le produit d'intérêts divergents
d'un ou de plusieurs para-associés, par rapport à
l'intérêt social. A savoir que la nullité touchera de toute
façon uniquement la délibération de l'assemblée et
n'aura aucune conséquence négative sur la validité du
syndicat de vote.
Prenant en
considération le dernier élément touchant
« l'indétermination et l'indéterminabilité des
obligations objet » du pacte, on l'impression que cette idée
se base essentiellement sur un préjugé jurisprudentiel, qui juge
invalides ces pactes, car ils videraient de ses pouvoirs l'assemblée.
Quand la Cour d'Appel de Rome relève l'indétermination du pacte
Cir/Formenton, elle ne considère pas forcément nul cet accord
selon les termes de l'art. 1346 C. Civ. Elle se limite uniquement à
souligner que le pacte est nul, car il vide complètement la
« fonction de la méthode d'assemblée »,
étant ainsi contraire à l'ordre public. De toute façon,
l'objet du syndicat apparaît déterminable, car le syndicat est un
contrat qui établit une procédure à travers laquelle son
contenu sera intégré au fur et à mesure. Dans la
réalité, les pactes sont presque tous limités à
certaines matières et pour un temps bien défini(16).
16 SAINT-GIRONS, in Rev. Trim. dr. Com., 1991, 349
CONCLUSION PREMIER CHAPITRE
Il existe une
variété importante de pactes d'actionnaires établissant
des accords spécifiques sur la façon dont les actionnaires
désirent envisager la distribution de l'exercice du pouvoir.
Parallèlement, il est assez difficile de tenter d'en définir une
qualification, qui demanderait de les répertoriés de façon
systématique, en risquant sûrement, par un souci de
synthèse, d'en éliminer les aspects les plus complexes, qui de
toute évidence,sont ceux qui intéressent prioritairement les
études doctrinales.
Les conventions de vote
s'intègrent le plus souvent dans la détermination de
l'organisation de l'exercice du pouvoir des organes délibérants
de la société, car c'est bien dans ce cadre qu'ils trouvent les
moyens les plus importants pour s'exprimer. En effet, il est possible
d'envisager plusieurs types d'accords concernant l'exercice des droits de vote
des actionnaires, en intervenant sur un vote de façon spécifique
ou en ciblant plusieurs d'entre eux. Il n'est pas prohibé
d'établir des conventions qui détermineraient une certaine
typologie de suffrage auquel les actionnaires devraient se soumettre lors des
délibérations de l'assemblée etc.
Finalement, les deux droits ne
présentent pas de différences majeures, si bien qu'ils
conviennent qu'avec des conventions irrégulières, les
décisions prises ne sauraient être valables, car il s'agit d'une
violation des dispositions légales impératives. Encore une fois,
les différences se situent de façon particulière à
un autre niveau, qui est certainement plus afférent à la
philosophie doctrinale, qu'à des questions concernant uniquement
l'application des dispositions légales.
En effet, le droit
français s'exprime plus sur la dématérialisation de
l'action, comme élément fondateur de la discipline
spécifique des conventions de vote. En effet, la fin de la
correspondance entre l'action et l'élément matériel de
celle-ci a déterminé forcément des changements importants,
tant juridiques, tant juridiques que pratiques, dans l'organisation de
l'exercice effectif du pouvoir.
Bien évidemment, se manque de matérialité a
été comblée par toute une série de dispositions
administratives, comptables et de communication de titres dont les actionnaires
disposent. Cela rend certainement plus complexe, non seulement la gestion
juridico-administrative de la société, mais aussi la distribution
du pouvoir en tant que tel.
Le droit italien emploie
surtout le terme d'intangibilité du droit de vote et finalement,
considère cette non « physicité » comme
quelque chose qui risque de ne plus respecter la
liberté/spontanéité de la déclaration de
volonté, qui devrait être un des éléments fondateurs
des droits des actionnaires. Cette crainte se fonde sur une confusion, qui peut
exister entre la « formation » de la volonté et
la « manifestation » des choix des associés.
Cette question, à l'apparence très théorique, a
été mitigée par la détermination des dispositions
très techniques, surtout dans le texte unique de 1998/58.
Il est possible d'envisager
une confrontation entre la dématérialisation de l'action, qui
concerne essentiellement des aspects plus pratiques et plus facilement
contrôlable de la vie sociétaire, par rapport aux dimensions
juridiques appartenant aux conventions de droit de vote, et
l'intangibilité du droit de vote, qui semble concerner plus
l'élément substantiel de la question en présence. En
effet, dans ce dernier cas, on envisage plutôt une perte
d'identité de l'actionnaire une perte d'identité de l'actionnaire
en tant que tel. I aurait eu perdu, en effet, de facto son titre, ce qui lui
permettait d'exister réellement dans la gestion de la vie
sociétaire.
L'intangibilité du droit de vote non seulement fait perdre
la spontanéité/liberté à la
souscription de la convention de vote, mais risque effectivement
de vider les titres de leurs droits.
Il s'agit de questions
certes doctrinales, mais qui permettent d'envisager de façon
complète la complexité de ces conventions. Ces dernières
devront de toute manière être soumises à une
réglementation spécifique qui, d'un point de vue plus
pragmatique, doit en établir les principes d'applications et
d'interprétation.
Dans l'analyse comparative
des deux droits en présence, on se rend compte jusqu'à quel point
le souci majeur est le même pour les deux conceptions juridiques. En
effet, la répartition initiale par le pacte du pouvoir ne peut en aucun
cas vider l'assemblée de ses pouvoirs et de ses fonctions, en
déterminant ainsi une majorité apparente fictive.
Les principes sur lesquels les deux droits se fondent, sont ceux
de la non-privation totale de choix de la part des actionnaires, qui seraient
relégués à un rôle mineur de façon permanente
et exclusive, ainsi que la reconnaissance constante et quasi perpétuelle
du droit de vote ou que l'on se concentre sur la nécessité d'une
majorité stable et réelle, le résultat ne paraît pas
changer. La loi pose inévitablement ces principes, comme
éléments déterminant pour la validité de ces
conventions d'actionnaires.
Le droit italien se doit
d'envisager la pertinence de toute évolution logique de son raisonnement
juridique, jusqu'à évaluer précisément le
rôle important que joue la « méthode
d'assemblée ». En effet, une seule différence notable
paraît s'établir entre les deux droits. Les interventions
législatives italiennes, perçoivent de façon bien plus
négative la rédaction de pactes extra-statutaires intervenant
dans les conventions de vote. Leur préoccupation majeure est celle
concernant la protection des minorités et le maintien de la
correspondance entre décisions prises par l'assemblée et
réalité effective de l'actionnariat.
Le droit français
préfère, sans par ailleurs négliger les aspects ci-dessus
cités, se concentrer sur le principe de stabilité de la
majorité. En effet, les conventions de vote peuvent être
considérées dignes de protection de la part du droit, si en
outre, elles permettent d'en assurer d'en déduire une nullité,
même si ces conventions respectent l'ordre public sociétaire et de
l'intérêt social.
Le droit italien reste
attaché à l'idée qu'indépendamment de la
stabilité ou pas du pouvoir à l'intérieur de la structure
sociétaire, si la majorité expresse n'est que fictive et n'est
pas la démonstration réelle des choix de l'assemblée, le
pacte ne sera pas reconnu comme valable. Cela explique la difficulté que
ce droit a eu à se séparer de l'idée que le vote soit
presque « physiquement » rattaché à
l'actionnaire et sa nécessité d'intégrer les normes avec
le principe d'unanimité des décisions prises en
assemblée(18).
18 KLEIN, in Rev. Dr. Bancaire, 1991, 112
Il n'est de toute
façon pas plausible que le droit français évolue vers un
nouveau critère d'évaluation, en l'élevant au même
rang que les autres. Mais que ce droit accède à une vision a
priori plus pragmatique des pactes d'actionnaires extra-statutaires concernant
les conventions de vote. Car il est vrai, que des accords trop vagues et
génériques paraissent souvent nébuleux et obscures dans
les finalités réelles. Ce qui fait préférer la
rédaction d'accords ayant un objet précis qui permette de
garantir la stabilité de la majorité, tout en respectant
l'intérêt social et celui des actionnaires minoritaires.
CHAPITRE II: LE contrôle DU POUVOIR PAR LE
PACTE
L'autonomie contractuelle des parties
revêt aussi dans ce domaine un rôle primordial, de telle sorte que
le nombre d'organes du syndicat et la gamme de pouvoirs qui leur est
conférée varie selon les cas. Généralement, si pour
les syndicats de vote à majorité, la formation d'une
majorité para-sociale(et par conséquent, d'une minorité
qui doit suivre ses décisions) requiert un niveau de procédure
très semblable dans les deux droits pour les sociétés de
capitaux, ceux de l'unanimité sont toujours caractérisé
par une structure assez simple.
Dans cette dernière
hypothèse, le syndicat de vote se limite à
prédéterminer l'obligation des associés syndiqués
à se réunir avant le délibéré social, pour
décider quelle sera la position commune qui devra être tenue rendu
durant l'assemblée de la société. Dans sa configuration
plus complexe, le syndicat de vote peut prévoir(aussi en alternance
entre eux), la présence de centres intermédiaires, tels que :
l'assemblée des associés syndiqués, la direction du
syndicat, le président et le secrétaire, reprenant ainsi,
mutatis mutandis, la structure d'une société par
actions.
Dans la plupart des cas, les
décisions du syndicat sont prises par l'assemblée des
associés syndiqués(dénommée
aussi « assemblée de participants au
syndicat »), qui regroupe tous les participants au pacte para social.
L'assemblée se réunit après une convocation formelle,
normalement dix jours avant la date fixée pour l'assemblée de la
société, avec un ordre du jour(presque toujours il s'agit de la
reproduction de celui de l'assemblée sociale), établi par le
président de l'assemblée et , dans certains cas, préparer
la publication de l'avis de convocation de l'assemblée du syndicat dans
les journaux(19).
19 ALFANDARI, JEANTIN, in Rev. Trim. dr. Com., 1992,
401
Les délibérations sont prises, s'il s'agit de
syndicats de vote à majorité, avec un quorum
prédéterminé qui varie selon les matières objet du
délibéré. Par conséquent, il sera légitime
de demander le vote favorable à 50 % +1 ou de 75 % des actions
syndiquées, selon qu'il s'agit de déterminer la volonté du
syndicat par rapport à un délibéré
d'assemblée ordinaire ou extraordinaire. En outre, le secrétaire
ou le président peuvent donner à un tiers mandataire les
instructions concernant le vote des actions qui devront être suivies
durant l'assemblée sociale(20).
Dans plusieurs syndicats,
l'assemblée a uniquement pour rôle d'élire les membres de
la direction du syndicat. Celle-ci, dénommée aussi comité
de direction ou conseil de direction, est constituée d'un nombre
variable entre trois et sept, avec un président et joue un rôle
essentiel dans la détermination de la volonté du syndicat( voter
en faveur ou contre une résolution de l'assemblée sociale), selon
les indications de la majorité simple ou qualifiée des membres,
en charge ou présents, de la direction.
Une matière aussi
complexe que le rôle de la liberté contractuelle dans le droit des
sociétés ne peut donner lieu à de considérations
rigides. Par contre, des considérations tout à fait possibles. La
plus évidente est l'état peu satisfaisant du droit positif
français, écartelé entre les séquelles d'une
réglementation exagérément protectrice et les aspirations
d'un libéralisme excessif. En effet, le refrain qui revient le plus
souvent dans cette matière est celui de l'incertitude: validité
incertaine de s pactes d'actionnaires et des conventions de vote,
fiabilité dubitative des clauses de garantie du passif, nullité
des clauses de garantie du passif, nullité des clauses de statuts qui
limitent trop étroitement les droits des associés ou qui rompent
trop gravement l'égalité entre eux ou la proportion qui doit
exister entre la quotité du capital détenue et l'importance des
droits attribués, portée incertaine des clauses qui
dérogent à la répartition légale des pouvoirs des
principaux organes sociaux, etc(21).
21 COSTI, I sindicati di voto nelle legislazione più
recente, Giur. Comm., 1992, I, p.25 à p. 41
Cette incertitude, incompatible avec la sécurité
des affaires, devrait conduire à s'abstenir de recourir à des
tels accords, mais les imperfections de la législation en rendent la
conclusion quasiment inévitable, dès que les relations entre
actionnaires sont un tant soit peu originales. De telle sorte, que le droit, au
lieu de faciliter la prise de décision, la rend plus complexe et plus
aléatoire.
Autre question importante est
celle qui analyse le fait, que le recours à des techniques
contractuelles complexes risque de créer des inégalités
entre les sociétés. En effet, seules les entreprises importantes
sont normalement suffisamment bien conseillées pour utiliser ces
procédés. Les autres doivent se contenter du droit commun,
déterminant ainsi un système juridique à deux vitesses
existe. Par contre, il ne doit pas être exagéré, car les
sociétés, dans leur immense majorité, poursuivent des
objectifs qui peuvent être atteints en s'en tenant à l'application
du droit commun. Seules les sociétés importantes ou complexes, en
raison notamment de la présence d'associés étrangers, ont
besoin d'une organisation personnalisée, mais elles sont alors en mesure
de rémunérer les services qui permettent de la mettre en
place.
Par ailleurs, dans la mesure du
possible, il faudrait surtout dans le domaine des conventions de vote,
préférer les aménagements statutaires aux accords
extra-statutaires.
En effet, les statuts obligent tous les associés et sont
opposables aux tiers, au contraire, les conventions para-sociales n'ont que
l'effet relatif des contrats. Cela veut dire, que rien ne garantit qu'elles
seront respectées par les acquéreurs de droits sociaux et leur
inexécution risque de n'être sanctionnée que par une
condamnation à des dommages intérêts.
En effet, indépendamment
des modalités de formation de la volonté para-sociale, à
majorité ou à l'unanimité, le syndicat qui ne
prévoit pas un mécanisme qui lie les cocontractants à
l'exécution des obligation para-sociales, risque d'être soumis
à la liberté de l'associé d'exprimer son vote même
de façon contraire à la décision du syndicat. Ce peut
être onéreux, si on pense qu'après le vote de
l'assemblée, il pourrait être impossible de modifier les termes de
celui-ci, même si une autre assemblée devait se tenir avec un
ordre du jour contraire au précédent. Il existe
différentes formules aptes à empêcher l'insubordination du
para associé.
La caractéristique commune à chacune d'entre elles
est de créer un lien ultérieur s'imposant au para-associé,
qui s'engage non seulement à voter d'une certaine façon, mais
aussi à mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour que
son propre vote soit exprimé durant l'assemblée selon la
volonté para-sociale, évitant ainsi les revirements de
dernière minute. Pour cette raison, les syndicats qui présentent
ces obligations ultérieures sont dénommés, même si
de façon impropre, pacte « à efficacité
réelle ». Parmi les plus pratiqués, en voici
quelques-uns: le mandat irrévocable au représentant commun des
associés, la cession de la propriété des actions à
une société fiduciaire , la procuration à un tiers, la
cession des actions à une société holding, la constitution
d'actions en propriété.
La méfiance surtout des juges
italiens à l'égard des syndicats de vote devient extrême,
par rapport aux clauses à travers lesquelles les para-associés
prédéterminent les critères pour la désignation des
personnes exerçant les fonctions sociales(administrateurs et syndics).
En effet, c'est bien à travers celles-ci que les actionnaires risquent
le plus de limité leur liberté et autonomie contractuelle. En
outre, à travers ces clauses les administrateurs acceptent de se
conformer aux décisions du syndicat par rapport aux choix de gestion de
la société, aux modalités de liquidation du patrimoine
social etc.
Encore une foi, on constate le
position négative de la jurisprudence italienne, qui considère
nul le pacte par le biais duquel les associés
prédéterminent les critères de nomination des
administrateurs, plutôt que par l'assemblée sociale. Par
conséquent, l'assemblée des associés est
complètement libre de nommer les administrateurs sans suivre les
indications para-sociales. Plus encore, sont considérés nuls les
accords qui tendent, par exemple, à répartir le patrimoine
sociale en cas de résolution ou de liquidation de la
société.
En doctrine, la position change
selon le type de clause examiné. Normalement accepté sont les
clauses para-sociales de nomination des administrateurs. D'ailleurs même
l'art. 2368 C. Civ. Italien prévoit pour la nomination des charges
sociales qu'un acte constitutif peut établir des normes
particulières. Le contenu de cet article est repris de façon plus
explicite dans le cadre législatif des privatisations, qui permet
d'insérer dans les statuts des sociétés des clauses de
vote de liste, afin de permettre la nomination de un ou plusieurs
administrateurs représentant la minorité de l'actionnariat.
D'ailleurs, même la doctrine, la plus favorable à
reconnaître la licéité des syndicats de vote, reste assez
sceptique sur la légitimité des clauses qui contiennent
l'engagement de la part des para-associés à faire en sorte que
les administrateurs suivent un comportement prédéterminé
dans la gestions sociale. Dans ces hypothèses, la
légitimité est presque toujours niée, sur la base d'une
construction juridique, qui n'est pas convaincante.
Il est nécessaire de reprendre entièrement les
points les plus significatifs concernant le raisonnement qui est à la
base de cette nullité.
Selon cette hypothèse,
quand on constitue des alliances entre actionnaires, pour garantir une certaine
stabilité et l'hégémonie des associés
syndiqués dans la gestion de l'entreprise, ce qui intéresse
principalement est la gestion même de la société. Par
conséquent, les accords concernent non seulement les thèmes de
compétence de l'assemblée, mais surtout la nomination aux
fonctions sociales, la politique industrielle ou commerciale de la
société et les investissements. A travers ces pactes on essaie
d'épauler la prise de décisions par le syndicat des actionnaires
de contrôle, organe extra-social n'ayant pas de responsabilité et
de transparence, quand bien même celle-ci serait de compétence et
de la responsabilité uniquement des administrateurs.
Dans la réalité,
l'engagement des actionnaires d'accepter et de mettre en application les
décisions prises par le syndicat a un sens. L'actionnaire est
assuré sur le fait que le tiers nommé suivra les instructions du
syndicat. Mais si on considère que le tiers doit être libre,
étant un mandataire social qui ne peut devenir un simple
exécutant, alors cela revient à dire aussi que le pacte ne peut
même pas lier les parties entre elles et les associés
syndiqués devraient soumettre le tiers à des pressions
excessives, afin que celui-ci applique les instructions du syndicat.
Bien évidemment, cette
argumentation ne peut convaincre. Certainement, l'engagement des
para-associés repose sur la promesse que le tiers exécute les
décisions prises par le syndicat. Le para-associé ne peut que
promettre le fait qu'un ou plusieurs administrateurs et/ou le conseil
d'administration, dans son ensemble suive, les indications du syndicat. Il
prend le risque d'un fait indépendant de sa volonté. La
prestation dérivée avec la promesse n'est qu'une simple
prestation de garantie, la seule frontière étant que
l'activité du tiers ne soit pas illicite.
Au para-associé on ne
demande pas qu'il s'active vis-à-vis du tiers, pour faire en sorte que
celui-ci exécute « le fait » promis. Ainsi
qu'en cas de non-exécution de la promesse de la part du tiers, le
para-associé n'est pas condamné aux dommages et
intérêts, mais uniquement à compenser la non
-réalisation de l'intérêt d'autrui. Le fait étant
indépendant d'un comportement illégitime de la part du
para-associé. Par conséquent, le para-associé peut
intervenir, mais il s'agit d'un acte volontaire et non pas obligatoire par
rapport aux agissements du tiers. Même si cela était le cas, de
toute façon il n'est aucunement possible de qualifier cette
activité d'illégitime. L'administrateur n'est absolument pas
obligé d'accepter toutes les requêtes présentées par
le para-associé.
Il paraît difficile
de comprendre pour quelles raisons la promesse du para-associé serait
illégitime, et celle, par exemple, du vendeur d'un terrain qui promet
d'obtenir une concession de construction ou une autorisation
ministérielle particulière serait considérée comme
légitime. Par conséquent, les clauses ci-dessus examinées
paraissent de ce point de vue licites, à moins que l'administrateur
n'agisse en violation de ses obligations fiduciaires à ses
fiduciaryduties.
Pour ce qui concerne
l'évolution législative des syndicats de vote dans le cadre de
l'ordre juridique italien, quelques précisions sont nécessaires.
En effet, le mention des pactes para-sociaux et surtout des syndicats de vote,
de la part du législateur, est interprétée de façon
différente, dans plusieurs dispositions normatives. Selon la plupart de
auteurs déjà cités, les nombreux rappels
législatifs ont signés la reconnaissance de la
licéité de ces pactes. En effet, on
parle « reconnaissance explicite »,
de « compatibilité » des pactes de syndicat de
l'ordre sociétaire en vigueur ». Devant croire
que « le contrôle exercé par le syndicat
étant explicitement discipliné par le législateur,
signifie qu'on reconnaît la validité-efficacité du pacte
afférent ». Une autre partie de la doctrine a pris des
dispositions plus modérées, considérant que le confins de
la matière se sont élargis considérablement par rapport au
passé. Surtout pour ce qui concerne la position de l'associé et
son autonomie contractuelle.
Une dernière
perspective doctrinale considère que la simple mention de ces accords ne
peut être considérée en aucun cas comme une reconnaissance
générale sur la licéité des pactes para-sociaux.
Considérant que ces mentions législatives ne font que prendre
acte d'un simple « fait juridique », laissant ainsi
impréjugé le problème, si ces pactes produisent ou non des
effets en qualité d' « actes juridiques »,
c'est à dire s'ils produisent des effets engageant ceux qui les ont
souscrits en plaine autonomie.
Par ailleurs, la
jurisprudence semble être partagée sur ce point. Aussi dans ce cas
la querelle Cir/formenton a produit du matériel important. Dans C.I.R
s.p.a c/ S.I.R.E.F s.p.a ed altri, le tribunal de milan a soutenu que
l'obligation, selon la loi 416/1981, de signaler l'existence de syndicats de
vote a comme effet, bien que limité, de rendre possible un
contrôle des concentrations dans le secteur de l'édition et que
des conclusions analogues pourraient se faire par rapport aux obligations de
communication imposées par la Co.N.So.B . A contrario toujours pour le
même cas en espèce, le tribunal de Milan a considéré
que les circulaires Consob et la loi du 5 Août 1981, n. 416 ( art. 2,
al. 5) concernant le secteur de l'édition, mentionnent
expressément les syndicats de vote, en se prononçant sur leur
réalité et importance juridique et, implicitement, sur leur
validité. En acceptent ainsi la possibilité qui est
laissée aux actionnaires d'exercer ou non leur autonomie contractuelle.
La même idée est reprise par la déclaration du
collège arbitral de juillet 1990(22).
Afin de bien cerner
le fondement de ce raisonnements il est opportun d'élargir le terrain
d'enquête. En effet, si on considère la loi anti-trust, le
législateur s'est préocuppé de toucher,
indépendamment de leur forme juridique, toutes les ententes et les
concentrations qui peuvent nuire au jeu de la concurrence sur le marché
national. Selon l'esprit de la loi 287/1990, les communications d'ententes et
concentrations, même si régulées par un régime
profondément différent pour ce qui concerne les principes et les
modalités, servent en effet à faire en sorte que cette
évaluation soit remise à l'autorité garante, et non pas
laissée au seul arbitrage des cocontractants(23).
22 Civ.1, 13 juin 1995, in Rev. 1996, 75.
23 ROSSI, Le diverse prospettive dei sindacati azionari nelle
sociétà quotate e in quelle non quotate, in Riv. Soc. 1991, p.
1366 et 1367
Il est clair, que la loi
opère un plan complètement différent par rapport à
celui de la licéité des formes juridiques utilisées pour
constituer les accords prohibés. Il n'appartient certainement pas
à l'autorité d'évaluer la licéité d'un
contrat de transfert d'entreprise ou de fusion, dans les cas où les
formalités prévues par le code sont respectées. L'organe
de vigilance doit simplement établir si la situation donnée
fausse ou non la concurrence. Le pacte est pris en considération
uniquement parce qu'il établit une entente, une concentration ou
réalise un abus de position dominante sur le marché(24).
La confirmation de cette
considération peut être trouvée dans la loi (287/1990, art.
5, al.2) qui établit la détermination du contrôle d'une
entreprise ne peut être considérée telle, dans le cas
où une banque ou un institut financier viendrait à
acquérir, au moment de la constitution d'une entreprise ou de
l'augmentation de son capital, les participations de cette entreprise, avec le
but de les revendre sur le marché. A moins que, durant la période
de possession de ces participations(de toute façon non supérieure
24 mois), elle n'exerce les droits de vote afférents à ces
actions. Cela veut dire, que si une banque acquière les participations
des entreprises sans avoir l'intention de les revendre, c'est à dire
pour une période de temps dépassant les 24 mois ou elle exerce
les droits de vote s'y afférent, cela constituera, a contrario, une
concentration(art. 5 de la loi 287/1990) et si le seuil des
bénéfices est atteint, selon les termes de l'art. 16, le tout
devra être notifié à l'autorité garante(25).
24 RESCIO,I sindicati di voto, in Trattato delle
sociétà per azioni, COLOMBO e PORTALE, torino, 1994
25 GALGANO, Diritto commerciale, 2, Le sociétà,
Bologna, 1992, partie 26.2, p. de 488 à 449
Peut on dire que la loi
287/1990, intervenue avant la réception de la Vième Dir CEE en
matière bancaire(par le d.lgs. Du 14-12-1992, n. 481), reconnaissait
déjà en 1990 la possibilité aux banques d'acquérir
l'ensemble des actions d'une société? La réponse est
certainement négative. Par conséquent, négative doit
être aussi la réponse à propos des pactes par-sociaux. Le
d.l du 9-4-1991, n. 127, concernant la réception de la VI ème et
VII ème Dir. CEE explicite ces concepts. En effet, l'article 26 de la
relation au schéma du décret législatif cité
déclare expréssement que « le fait de tenir compte
de l'existence des pactes para-sociaux, pour ce qui concerne le bilan
consolidé des sociétés contrôlées, laisse
impréjugé le problème de la validité juridique des
pactes de syndicat délibérés à la majorité,
puiqu'on ne tiendra compte que du fait q'un accord existe, en
considérant que de facto il sera respecté ou que les lois
d'autres pays lui attribuent une validité juridique ».
Finalement, la loi
149/1992, à l'art. 7, al. 2 établit que « durante
la pendenza dell'offerta di vendita, l'offerente deve esercitare i propri
diritti sociali in modo da non modificare la consistenza del patrimonio della
società i cui titolli formano oggetto dell'oferta, né stipulare o
modificare a pena di nullità, accordi circa l'esercizio del proprio
diritto di voto. A pena di nullità degli stessi devono essere resi noti
gli accordi già esistenti »(Durant la période de
validité de l'offre de la vente, l'offrant doit exercer ses droits
sociaux de façon à ne pas modifier la consistance du patrimoine
de la société dont les titres forment l'objet de l'offre, il ne
peut, à peine de nullité, ni établir ni modifier les
accords concernant l'exercice de son droit de vote. A peine de nullité,
il faudra que les accords déjà existants soient rendus publics).
Certains auteurs ont interprété la référence
à la nullité des accords concernant l'exercice du droit de vote,
comme une reconnaissance implicite de ces pactes de la prt du
législateur.
En outre, un principe
semblable est inscrit aussi à l'art. 12, al. 5 de la même loi, qui
prévoit la nullité de l'accord sur le vote, de bloque ou de
simple consultation qui n'est pas communiqué à la Co.N.So.B, dans
les cinq jours à compter de la signature du pacte. Indépendamment
de la validité ou non d'un tel raisonnement, concernant uniquement les
sociétés faisant objet de la normative sur la S.A., on ne peut a
contrario faire découler des articles en question, une reconnaissance
généralisée des syndicats de vote, comme permettant
l'expression de l'autonomie contractuelle des cocontractants.
Peut-on
considérer comme valable un pacte concernant la nomination des
administrateurs de la société(qui constitue lui aussi un accord
sur l'exercice du vote en assemblée), simplement parce qu'il a
été communiqué à la Co.N.So.B dans les temps
prévus par la loi?. Il faut en déduire alors que la
nullité, à laquelle fait référence la norme,
suppose que le pacte soit par lui-même illicite.
La
possibilité de constituer des actes aptes à dépasser
l'éventuelle impasse para-sociale est profondément liée
aux problématiques analysées jusqu'à présent. Pour
les assemblées sociales, aussi que para-sociales, il se peut que pour
des raisons diverses, on ne puisse délibérer sur les arguments
proposés dans l'ordre du jour. En réalité, il existe
différentes possibilités, selon qu'il s'agit de syndicats du
deuxième type, l'associé est par définition laissé
libre de voter comme bon lui semble, si l'unanimité n'est pas atteinte;
pour ceux à majorité il existe plusieurs remèdes:
-le premier propose de laisser les
associés libres de voter durant l'assemblée de la
société comme bon leur semble;
-le deuxième établit
qu'un tiers décide en qualité d'arbitre pour les associés
dissidentes, après avoir de toute façon essayé de
concilier les parties;
-le troisième propose
l'abstention du vote en assemblée, de telle sorte que celle-ci soit
invalidée;
-le quatrième et dernier
demande aux associés de voter de façon contraire aux propositions
présentées durant l'assemblée.
Afin de présenter de
façon exhaustive le sujet étudié dans ce deuxième
chapitre, il conviendra d'envisager l'analyse de certains pactes accessoires
aux conventions de vote, dans les deux droits étudiés, qui seront
évalués dans la prochaine section (« les pactes
accessoires »). En effet, ces pactes accessoires ont la
possibilité de moduler les modalités d'intervention dont les
actionnaires disposent, afin de pouvoir exprimer de façon plus valable
leur volonté à l'intérieur des synergies
sociétaires(26).
26 CORAPI, Gli statuti delle sociétà per azioni,
1971, 181 et suivants, Milano.
LES PACTES ACCESSOIRES
Ces engagements extra-statutaires
recourent en droit français à trois outils juridiques principaux,
outre la promesse de vente conditionnelle. Il s'agit, pour l'essentiel bien
évidemment de la convention de vote, de la promesse de porte fort et,
accessoirement, du mécanisme de l'engagement d'honneur.
La convention de vote se
définit comme l'engagement par lequel un associé ou un mandataire
social(administrateur, membre du directoire ou membre du conseil de
surveillance) s'engage à voter dans un sens déterminé sur
un projet précis. Longtemps discutée, la licéité de
la convention de vote semble aujourd'hui par le législateur
français qu'auparavant. En effet, non seulement aucune disposition
légale ou même s'y réfère, les validant ainsi
implicitement par l'article L. 233-3 C. Com.
Le législateur a
institué une présomption de contrôle d'une
société dès lors qu'un actionnaire détient seul ou
avec d'autres, en vertu d'un accord, la majorité des droits de vote.
Enfin, ainsi que le souligne la doctrine, les conventions de vote constituent
un mécanisme d'assouplissement et d'adaptation du droit des
sociétés.
Il convient néanmoins, pour
qu'une convention soit valable, qu'elle réponde a priori à trois
exigences cumulatives:
-la convention doit être
temporaire, car une convention de vote conclue pour une durée
limitée est jugée illicite, de même qu'une convention
conclue pour la durée de la société;
-la convention ne doit pas porter
atteinte à l'intérêt social au moment où la clause
joue. Les limites que s'imposent les associés ne doivent en aucun cas
être en mesure de fausser leur appréciation et les conduire
à adapter des décisions contraires à
l'intérêt social. Le juge apprécie alors si les limites
consenties en leur seul nom par les cocontractants contrarient abusivement la
conduite rationnelle et éclairée de la société;
-la convention ne doit pas voir
pour objet de contourner la loi; de façon générale, la
convention ne saurait valablement avoir un objet contraire à un droit
d'ordre public. En pratique, on observe que sont notamment
déclarées illicites sur ce fondement, les conventions qui
remettent en cause le principe de révocabilité ad
nutum des mandataires sociaux, de liberté du droit de
vote, de proportionnalité entre le taux nominal de l'action et le poids
du suffrage auquel cette action donne droit ou en cas de trafic de droit de
vote ou de renonciation pure et simple au droit de vote par ailleurs, est
déclarée licite, la convention d'orientation du droit de vote ou
celle organisant le droit de vote par regroupement au sein d'un holding ou
n'emportant qu'une renonciation temporaire au droit de vote.
La promesse de porte-fort est une
convention par laquelle un associé promet le fait quelconque d'un tiers,
qu'il s'agisse de la société ou bien d'un mandataire social(c.
Civ. Français art. 1120). C'est sous cette forme que les majoritaires
s'engageront par exemple à ce que la société ne prenne
aucune décision d'évolution du capital sans l'autorisation
préalable de bénéficiaires ou bien à ce que, si une
augmentation de capital ou émission de titres devait être
réservée, le bénéficiaire figure parmi celle des
personnes auxquelles l'augmentation ou l'émission sera
réservée, à hauteur de la quote-part du
bénéficiaire dans le capital social.
Le recours à ce
mécanisme en matière de droit des sociétés, quoique
fréquent, ne va pas sans difficulté, à tel point
que « parce qu'elle est souvent apparue comme un instrument
juridique permettant de contourner certaines règles impératives,
la promesse de porte fort est une technique qui a toujours inspiré
beaucoup de méfiance et l'on dénote actuellement un renforcement
de cette tendance » Ce passage « de la
méfiance à une hostilité
déclarée » fait ainsi ce contrat soit un
« contrat sous haute surveillance ».
Par ailleurs, ce type
d'engagement, pas davantage que la convention de vote, ne saurait engager la
société ou un tiers puisque si le tiers-improprement
dénommé « tiers
représenté »- pour lequel le promettant s'est
porté fort ne prend pas la décision envisagée, seule la
responsabilité contractuelle du promettant se trouvera engagée,
la promesse de porte fort demeurant inopposable à ce tiers. Dès
lors, la violation d'une promesse de porte fort se traduira par la seule
allocation de dommages et intérêts.
Dans la législation
italienne et dans la pratique en la matière, bien que ces pactes existes
et reçoivent les mêmes observations jusqu'ici retenues, il n'est
pas possible de retrouver ces catégories précisément
dénommées et établies comme la structure normative
française ou par la pratique des affaires française. Pour cette
raison, on détermine uniquement un titre général des
pactes para-sociaux, laissant ces conventions accessoires se qualifier au fur
et à mesure par simples clauses, selon leurs caractéristiques
spécifiques et les finalités d'établissement.
Le pacte de consultation est un
type de pacte qui se définit comme l'accord par le biais duquel deux ou
plusieurs associés conviennent de débattre avant
l'assemblée des questions sur lesquelles ils exerceront leur droit de
vote, droit qui par ailleurs reste libre.
L'engagement de l'associé vise uniquement la discussion
qui précède l'assemblée. Par conséquent, il reste
libre de voter comme il le croit, car aucun lien ne s'établit à
la suite de cette consultation préventive. Il est évident, que ce
genre d'accord ne ressemble pas aux syndicats de vote à
l'unanimité. Car ceux-ci représentent un quid pluris par rapport
aux pactes de consultation.
D'un côté, les pactes de
consultation représentent un moyen de confrontation utile entre
associés, permettant à chacun des cocontractants de
connaître et comprendre les
positions des autres avant l'assemblée, ce qui enrichit le
processus de délibération de chaque membre. D'un
côté, ils constituent un instrument intéressant pour
éviter les effets onéreux et contraignants dérivant de
l'application des normes spéciales prévues pour les pactes
para-sociaux, comme par exemple la loi sur les offres publiques
d'acquisition(27).
27 OPPETIT, L'engagement d'honneur, D., 1979, chron. p. 107
et suivants.
Par conséquent, les
membres du pacte s'obligent à suivre réciproquement une
prestation dont le contenu est l'information et la connaissance.
L'énergie synallagmatique est très forte et intime, car on ne
peut prétendre à la prestation de l'autre, sans effectuer
simultanément la sienne. Se consulter ne signifie pas uniquement
demander l'opinion ou le jugement d'autrui, mais discuter sur le choix que
chacun effectuera. Les membres du pacte sont en même temps le consultant
et le consulté. L'accord établit un circuit d'information, d'avis
et de connaissance qui enrichit le délibéré de chacun des
membres, leur donnant une prise de conscience plus ample.
Ce dernier
élément permet d'identifier une autre différence entre les
pactes de consultation et les syndicats de vote, car les premiers ont un
caractère procédurier, tandis que les autres ont un
caractère structurel et d'organisation. En effet, les sujets
obligés à la consultation ne constituent pas un groupe, qui en
plus doit assumer des décisions engageant les autres membres, le but
étant d'informer des membres. Cette consultation génère
des devoirs de véridicité et de communication complète des
éléments fournis, car une consultation réticente ou fausse
constitue un manquement aux obligations engagées.
A compter du début des
années 90 on a enregistré en Italie une importante transformation
des syndicats de vote en pacte de consultation, jusqu'à solliciter
l'intervention du législateur en 1992, pour une réforme de l'art.
10 de la loi 142/1992. En effet, on considère que ces pactes font
parties des moyens permettant le contrôle du droit de vote et permettant
ainsi l'évolution des dispositions en matière d'OPA obligatoire.
Par leur biais, il est effectivement possible d'acquérir le
contrôle de la société sans OPA. Ce principe sera repris
par la suite dans une nouvelle loi(474/1994), qui prévoit que les pactes
de consultation doivent également être communiqués à
la Co.N.So.B .
La violation des obligations
dérivant d'un pacte peut intervenir quand le devoir de consultation
n'est pas observé ou quand les informations transmises sont fausses ou
incomplètes. La question de responsabilité renvoie à une
autre question préliminaire qui est celle de l'efficacité
juridique de l'accord même. Sur ce point, il n'y a pas de doute que le
pacte protège des intérêts qui méritent cette
protection. En outre, la prestation informative est susceptible
d'évaluation économique, ce qui satisfait les principes requis
par les articles 1322, al. 2 et 1174 du Code Civil italien.
La responsabilité
se concentre dans l'obligation à verser les dommages et
intérêts.
Le dommage ne dérive pas d'un acte collégial, par
conséquent il n'est pas imputable à la personne morale. Le
dommage résulte de l'impossibilité de s'informer, afin de pouvoir
voter en connaissance de cause. Comment le déterminer? Car le juge ne
pourra pas faire référence à un marché ne peut
offrir de prestations identiques ou équivalentes. En effet, le bien
dû en application du pacte n'est pas, en principe, remplaçable. La
prestation a une qualité juridique intrinsèque, si bien que le
marché ne peut offrir des indices de confrontation et des
paramètres d'échange. Une solution peut être
envisagée dans l'introduction dans la convention d'une clause
pénale, qui permettrait de renforcer l'efficacité du lien, ainsi
que la détermination du dommage.
Pour ce qui concerne le syndicat de
bloc, il est considéré comme pacte para-social à travers
lequel, les associés se promettent réciproquement de ne pas
vendre leurs actions/quotes-parts pour un certain temps. C'est -à-dire
que le transfert est subordonné à l'agrément et/ou
préemption des autres para-associés ou des organes du syndicat.
Leur légitimité n'a jamais été mise en discussion,
à condition qu'ils respectent l'article 1379 C. Civ. Italien, qui
établit que ce pacte n'est valable qu'entre les parties, devant
être limité dans le temps et devant correspondre à un
intérêt effectif des cocontractants.
Presque toujours le syndicat de vote
s'associe à l'accord entre associés sur le bloc des actions
syndiquées, car il n'y aurait aucun sens à établir un
syndicat de vote, si par la suite il était possible d'échapper
aux obligations engagées en se
« déshabillant » de sa propre participation sociale,
même si dans ce cas, une interprétation de bonne foi du pacte
devrait pouvoir établir l'existence d'une obligation accessoire de
non-aliénation des actions syndiquées.
Etant donné que la
jurisprudence semble disposée à évaluer de façon
différente les divers types de contrats para-sociaux, en affirmant dans
certains cas leur invalidité(pour les syndicats de vote à
majorité) et dans d'autres leur légitimité(pour les
syndicats de vote à l'unanimité et syndicat de bloc), il est
important d'insérer les
dénommées « severability clauses ». Il
s'agit de clauses par le biais desquelles les cocontractants conviennent que
l'éventuelle déclaration de nullité d'une ou plusieurs
parties du contrat para-social ne touchera pas la validité de celles non
atteintes par la nullité. Cela, afin que la déclaration de
nullité du syndicat de vote, ne touche pas non plus le syndicat de
blocage.
En considérant
d'autres aspects, l'identification des pactes para-sociaux présente des
caractéristiques qui peuvent être ainsi
synthétisées: premièrement le pacte est accessoire
à l'acte constitutif et il ne peut en aucun cas vivre par lui
même; deuxièmement il faut que l'objet de ces pactes soit
l'échange de prestations, troisièmement seulement certains
associés sont concernés par ces accords, autrement il y aurait
modification de l'acte constitutif et non pas un pacte d'actionnaires;
quatrièmement en cas de violation de la part d'un des cocontractants du
pacte, celui-ci peut être résolu, au sens de l'article 1453 du C.
Civ. Italien et le responsable peut être appelé à
répondre directement des dommages dérivant de la violation.
D'un point de vue
juridique le droit italien fait la différence entre un pacte para-social
qui touchant la sphère de l'organisation de la société,
doit être compris dans les contrats associatifs, tandis que s' il
influence uniquement les rapports entre associés, il doit être
compris dans les contrats d'échange.
En effet, le syndicat de consultation est un contrat associatif,
tandis que le syndicat de vote est représentatif des contrats
d'échange.
La
« consultation » est un sujet connu dans de nombreux
domaines: comme par exemple, en droit international, pour les accords qui
prévoient la consultation entre États, sur certaines
matières ou liées à certains événements
spécifiques; en droit du travail où syndicats d'entrepreneurs et
d'ouvriers conviennent de s'informer ou de se consulter sur certains choix de
gestion ou d'organisation de la production(réduction de main d'oeuvre,
fermeture d'usines, introduction de nouvelles technologies, etc...). Les pactes
auxquels on fait référence, ne concernent pas les accords qu'on
peut définir comme « extérieur » et qui
peuvent être établis entre des sujets
hétérogènes (entre associés et administrateurs et
les comités de garantie, etc...); ni les accords établis par
d'autres sujets titulaires d'autres situations de droit privé(entre des
codébiteurs ou cocréditeurs solidaires, etc...)
L'analyse se concentre sur
les pactes de consultation « interne », établis
entre des sujets homogènes et plus précisément, entre
associés, comme membres d'un organe collégial de
société. Chaque membre de cet organe est titulaire d'un droit de
vote, c'est-à-dire du pouvoir de déclarer sa propre
préférence sur la matière soumise aux
délibérations d'assemblée. Dans les cas où la
règle majoritaire est en vigueur , le calcule des choix concordant
permet de déterminer la solution à la question posée.
Cette solution que la loi considère comme étant un
acte découlant de l'organe sociétaire, est imputable à la
personne morale. L'assemblée est l'endroit où les membres de
l'organe collégial votent, mais aussi où ils s'informent,
connaissent les alternatives, discutent des choix possibles. Débat et
votation constituent l'unité normale du processus d'assemblée.
Cela explique que les articles 2366, al. 3 et 2374, al. 1 C. Civ. Italien
protègent l'intérêt de l'associé par rapport
à une « information suffisante » sur les
thèmes soumis à l'assemblée.
En symétrie avec les
phases de la procédure collégiale, deux types d'accords peuvent
être envisagés: des accords sur la discussion et des accords sur
l'exercice du droit de vote. C'est-à-dire, des pactes de consultation ou
des pactes de vote. Le pacte de vote inclut nécessairement un pacte de
consultation, étant donné qu'il paraît normal que les
membres décident(à la majorité ou l'unanimité) le
contenu du vote, après avoir discuté et évalué les
choix possibles. Les membres du pacte de consultation s'engagent discuter
ensemble avant l'exercice du vote. Les membres du pacte de vote s'engagent
à voter, selon les décisions du syndicat, après avoir
discuté ensemble. Le pacte de vote a comme but de donner un ordre. Le
pacte de consultation est une convention de défense et de contrôle
par rapport aux associés de majorité. Dans ce cadre de
comparaison, on peut ajouter que la convention de vote, réglée
par le principe de l'unanimité, deviendra un pacte de consultation,
quand les membres, n'arrivant pas à un accord, se réservent de
voter librement en assemblée.
Le cadre du pacte de
consultation étant ainsi tracé, on pourra le définir comme
un accord à travers lequel deux ou plusieurs associés conviennent
de débattre les questions sur lesquelles successivement ils seront
appelés à voter. Le pacte ne lie pas les membres pour ce qui
concerne leur droit de vote et la façon dans laquelle ils l'exerceront.
Ce qui constitue les dénommés « parlements de
l'ombre », si on considère les syndicats de vote comme les
« gouvernements ombres ». Le vote reste libre et
juridiquement inconditionné. Il n' y a pas violation de normes
impératives ou de principes d'ordre public. Le
Debatterecht est un droit individuel et disponible,
car il est une caractéristique normale non essentielle du processus
d'assemblée(28).
28 STEPHANE GUNTZ, gemeinschaftsgefühl,éd.
Vunderkindt, bayern, 1991
CONCLUSION DEUXIEME CHAPITRE
Finalement, ce qui paraît
hors de doutes est le fait qu'à partir du moment où l'on essaye
de définir le rôle de l'autonomie contractuelle des actionnaires
membres d'un pacte d'actionnaires, une question devient pressante. En effet,
une foi acquis les principes du droit commun concernant les
éléments fondateurs de la matière contractuelle, il n'est
pas aisé d'arriver à déterminer leur présence
surtout dans les conventions de vote, où l'actionnaire accepte de
« limiter » sa liberté d'expression, en acceptant
des règles ou des modalités de comportement
prédéfinis.
Pour cette raison et afin de
trouver une voie respectueuse des principes du droit sociétaire; on
arrive à ébaucher une solution dans un élément qui
pourrait paraître presque accessoire, c'est-à-dire la
« connaissance ». En effet, par les conventions de vote,
qui normalement deviennent ou se constituent en syndicats de vote
représentés durant les assemblées, les actionnaires
désirent s'organiser non seulement par rapport aux paramètres
afférents à leur influence dans les décisions que
l'assemblée prendra. Il s'agit d'arriver, par les conventions de vote,
à contrôler le pouvoir et surtout à faire en sorte que les
choix déterminés durant l'assemblée ressemblent, le plus
possible, aux souhaits exprimés par les cocontractants au pacte.
Voici qu'un des
éléments absolument nécessaire, afin de concrétiser
de façon plus certaine l'autonomie contractuelle des parties au pacte,
se revèle être la connaissance effective de toute information
susceptible de jouer un rôle déterminant dans la formation de la
volonté et par conséquent, dans la manifestation de celle-ci
durant l'assemblée. De telle sorte, que l'expression de la
volonté contractuelle dépendra du degré d'autonomie
contractuelle que les actionnaires pourront avoir et conserver durant toute la
période où ils resteront dans la structure sociétaire.
Bien que la discipline des
syndicats de vote et surtout leur mise en application concrète peut
donner lieu à des difficultés de mise en synergie, d'un
côté des éléments nécessaires à
l'accomplissement du rôle qui appartient au syndicat à
l'intérieur du cadre sociétaire et de l'autre du respect
absolument nécessaire de la volonté et de la liberté des
actionnaires de pouvoir s'exprimer de façon autonome, elle ne peut
être réputée a priori de façon négative.
En effet, il n'est pas
souhaitable d'envisager un écrasement presque total des règles
importantes pour pouvoir gouverner ses syndicats, ayant comme seul point de
référence absolue revendication de l'autonomie contractuelle.
Certes, les syndicats de vote contraignent la liberté d'expression de
l'actionnaire et
peuvent arriver jusqu'à l'anéantir
complètement, si aucune limite n'est pré ordonnée par des
règles de principe.
En revanche, au vu de
leur rôle de maîtrise de stabilité de l'actionnariat et de
leur nécessité pour arriver à gouverner la
société, ils ne peuvent pas être considérés
systématiquement nuls. En effet, la volonté d'envisager de bonne
foi et surtout avec rigueur et équilibre l'évolution stable de la
structure et de l'autonomie contractuelle puisse en toute occasion, s'exprimer
de façon totale et qu'elle puisse toujours s'épanouir.
Finalement, aussi
paradoxale que cela puisse paraître, l'excès de
«liberté » et le manque de coordination, aussi pour ce
qui concerne la volonté et la capacité d'expression de
l'actionnariat, ne peut qu'aboutir à une forme d'anarchie
sociétaire, qui ne serait plus compatible avec les
nécessités d'équilibre, de stabilité et de
capacité de prendre les meilleures décisions pour la
société. Ceux-ci sont des éléments
déterminants pour arriver à coordonner les divers
impératifs de la gestion sociale qui permettront de donner a priori
satisfaction aux actionnaires qui ont investi dans le capital de la
société.
CONCLUSION PREMIERE PARTIE
La situation actuelle dans les
deux droits n'est pas totalement satisfaisante. Les associés et le cas
échéant les tiers, ne peuvent pas être complètement
assurés de la validité des conventions de vote conclues. Une
intervention du législateur encore plus rigoureuse, ne paraît pas
être la meilleure solution en particulier pour le droit français
qui, plus que celui italien, a déjà bien développé
toute une série de normes régissant les pactes d'actionnaires.
Il est de toute façon
certain, que la diversité des intérêts en cause est
incompatible avec une solution trop drastique, consistant à prohiber
toutes les clauses ou à les autoriser. Par conséquent, les
propositions de réforme se bornent généralement à
consacrer la jurisprudence, en prévoyant que les conventions de vote
sont valables dès lors qu'elles sont conformes à
l'intérêt de la société et à l'ordre public
sociétaire.
Si le législateur
français ou italien intervenait, encore que la supériorité
de la loi sur la jurisprudence et les interprétations doctrinales ne
soit pas évidente en la matière, il devrait s'efforcer de
préciser le critère de l'intérêt social, qui permet
de valider les conventions de vote. En effet, les engagements les plus
pernicieux sont ceux qui ont un domaine général, car leur
signataire s'engage à l'aveuglette, en donnant un blanc-seing au
bénéficiaire, qui échappe à tout contrôle.
Au contraire,l'engagement de
vote paraît conforme à l'intérêt social, lorsqu'il
porte sur des éléments déterminés: financement de
la société, agrément ou non-agrément de nouveaux
associés, répartition du pouvoir entre les actionnaires
prépondérants. Une loi pourrait présumer la
validité de tels engagements alors que, dans les autres cas, leurs
signataires devraient établir, en cas de contestation, qu'ils ne sont
pas contraires à l'intérêt de la société ou
du groupe.
En revanche, pour le droit
français comme pour le droit italien, la durée est un
élément moins important. Paradoxalement, les conventions conclues
sans limitation de durée sont moins contraignantes que les autres,
puisque les signataires peuvent y mettre fin à tout moment, à
condition de donner un préavis et de ne pas agir à contretemps.
Le cas le plus embarrassant reste celui du maintien au conseil
d'administration d'un actionnaire qui a cédé le contrôle de
la société. Un tel engagement est rarement conforme à
l'intérêt social, sauf s'il se limite à faciliter la
transmission du pouvoir. Il constitue plutôt un élément du
prix de la cession de contrôle.
Si l'on peut souhaiter
en droit italien une régulation juridique plus apte à comprendre
l'intégralité des modalités d'interprétation
concernant les conventions de vote, sans devoir se baser uniquement sur le
texte unique de 1998 qui, bien qu'innovateur, ne concerne que les
société cotées. Ce qui oblige systématiquement
à opérer de façon déductive, en risquant de rendre
trop arbitraire la question substantielle de la validité de ces pactes.
En droit français, pour ce qui concerne les conventions de vote en
général, la souplesse de la jurisprudence paraît
préférable. Mais de toute façon, il est certain que pour
les ordres juridiques analysés, une bonne jurisprudence vaut mieux
qu'une législation qui risque d'être médiocre.
PARTIE II : LES PACTES D'ACTIONNAIRES ET L'EVOLUTION
DU POUVOIR
Toutes les transmissions
de titres n'ayant pas la même incidence sur la géographie du
capital et le contrôle de la société, il est
fréquent que les pactes d'actionnaires conclus lors d'investissement en
fond propres prévoient des régimes dérogatoires pour
certains transferts. Selon les caractéristiques de la participation
initiale et la volonté des parties, les pactes d'actionnaires peuvent
prévoir un certain nombre de transmissions qui s'effectueront librement
sans que les mécanismes du pacte soient mis en oeuvre.
Il s'agit de pactes
d'actionnaires qui interviennent dans des situations bien
déterminées et particulières et surtout qui normalement
trouvent leur application dans un moment où la vie sociétaire a
déjà été amplement structurée. En effet,
dans le premier cas et dans le deuxième on peut les imaginer comme, des
accords qui ont étés établis par les associés en
prévoyant la succession en cas de décès des actionnaires,
où mis en place à la suite d'une évolution
particulière de la gestion sociétaire. Il n'en reste pas moins
que, dans les deux cas il s'agit de permettre à la société
d'envisager les changements imprévisibles en terme de temps ou les
mutations nécessaires, tout en préservant la stabilité et
les équilibres acquis.
L'évolution de la
vie sociétaire ne peut être envisagée sans prévoir
que des modifications plus au moins importantes peuvent intervenir et affaiblir
les équilibres internes à la structures. Il ne s'agit pas
d'essayer de s'assurer sur tous les événements, même les
plus impondérables,mais d'envisager un modusoperandi
convenu et accepté qu'il puisse donner les règles
d'agissements que les actionnaires devront mettre en oeuvre, si tel ou tel fait
venait à se réaliser. Cela signifie, choisir parmi les
événements les plus courants, qui de façon
systématique interviennent dans l'évolution de la vie
sociétaire et peuvent être source de difficultés
importantes, selon le régime et l'organisation sociétaire.
Les possibilités
sont plusieurs. Dans ce titre l'analyse se concentrera sur deux
éléments essentiels, qui de manière très
régulière interviennent en perturbant l'organisation et la
gestion de la société. En effet, un des aspects parmi les plus
importants à définir en amont est celui qui concerne les
modifications qui peuvent intervenir à cause de changements de
titulaires du pouvoir à l'intérieur de la structure
sociétaire.
Cette « évolution » peut se faire
par les transmissions familiales et/ou par les transmissions extra ou intra
groupe des titres détenus par les actionnaires.
Il s'agit là, de
faits parmi les plus courants qui interviennent dans la vie sociétaire
et qui peuvent être régulés de diverses manières,
selon le régime sociétaire, la taille, l'ancienneté, la
participation ou non aux marchés réglementés,
l'activité ou l'organisation interne entre actionnaires, etc.
Pour les raisons
énoncés, le Chapitre I de cette partie
présentera « L'évolution quant aux titulaires du
pouvoir » dans les transmissions familiales et le deuxième
Chapitre clôturera ce travail par « Les transmissions à
une société holding de contrôle ».
CHAPITRE I - L'EVOLUTION QUANT AUX TITULAIRES DU
POUVOIR
Lorsqu'il s'agit d'envisager des
modifications dans l'équilibre sociétaires, il faudra essayer
d'intervenir en établissant en amont, par la souscription de pactes
spécifiques, des règles qui devront permettre aux actionnaires
d'anticiper leur modus operandi au cas où
certains événements viendraient à se produire. Il s'agit
de préserver un des éléments fondamentaux de la
pérennité sociétaire, la stabilité des
équilibres déterminés en essayant de limiter au maximum
les périodes d'incertitude et de vacation du pouvoir
sociétaire.
Il paraît évident,
que si les actionnaires ont eu par avance la possibilité de
déterminer les modalités d'intervention, ainsi que les conditions
selon lesquelles les parties devront agir en cas de décès d'un
actionnaire ou de transmission de titres à une société
holding, le temps nécessaire à la réalisation de tels
passages sera réduit. Cela signifie, qu'indirectement la période
de vacation sera réduite voir même inexistante. Par ailleurs, il
est vrai, que si dans le cadre des transmissions familiales une activité
de « prévention » peut être envisagée
et ce, de manière quasi systématique, pour la deuxième
option, la question paraît se compliquer.
En effet, dans les
transmissions à une société holding de contrôle, les
modifications requises peuvent toucher de manière très forte la
stabilité de l'organisation sociétaire. Par ailleurs, elles
présentent des aspects très complexes qui ne permettent pas aux
organes sociétaires de pouvoir envisager sereinement des pactes
d'actionnaires « universel » et
soignant « toute pathologie » sociétaire. En
effet, et de toute évidence, la convention peut se révéler
insuffisante à la maîtrise de changements importants et
imprévisibles dans leur évolution réelle au niveau du
pouvoir de la société, bien que ceux-ci soient souhaités
et mis sous contrôle.
Ce Chapitre, envisagera avant
tout les problématiques posées par le droit français, en
finalisant l'analyse dans « L'application du pacte aux
transmissions familiales »(Section I) et en faisant
référence aux dangers possibles de confondre ces conventions avec
des pactes sur succession future.
La deuxième section Section
définira « Les transferts mortis
causa en droit italien », car bien que les
affinités soient importantes entre ces deux droits, les sujets
posés demandent une étude séparée et distincte. En
effet, les modalités d'approches, ainsi que la structure même du
raisonnement juridique, imposent une séparation nette, non seulement au
niveau de l'organisation logique du sujet, mais aussi dans la définition
de l'intitulé de départ, considéré a priori comme
un postulat originaire de la problématique présentée.
SECTION I - L'APPLICATION DU PACTE AUX TRANSMISSIONS
FAMILIALES
Lors de prises de
participation dans des sociétés familiales, il est assez
fréquent de ne pas soumettre aux effets du pacte les cessions aux
conjoints, ascendants et descendants ainsi que les successions et liquidations
de communauté. Néanmoins, deux restrictions sont
généralement prévues à cette mise à
l'écart temporaire du pacte d'actionnaires. Les
bénéficiaires devront tout d'abord reprendre à leur charge
les obligations du pacte. Ensuite, si la transmission entraîne un
changement de contrôle, les investisseurs retrouveront la
possibilité de mettre en oeuvre les protections traditionnelles du pacte
et d'exercer leurs droits de préemption et de sortie conjointe. La
question est donc de savoir si en droit français ce type de dispositions
est compatible avec l'article L. 228-23 C. Com. Et ne constitue pas un pacte
sur succession future prohibé.
Cette question paraît
très intéressante surtout, parce qu'elle met en relation
directement les principes du droit des sociétés, avec tout son
bagage d'interprétation et d'application des règles jusqu'ici
analysées et les principes du droit civil, qui concerne plutôt le
régime des personnes physiques. Il y a là, une interception
importante entre deux disciplines qui, pour des raisons évidentes, dans
la réalité peuvent se retrouver l'une imbriquée dans
l'autre, bien que cela ne soit pas forcément facile à
envisager.
D'un côté les
actionnaires peuvent ne pas « désirer »
l'entrée dans l'actionnariat des héritiers légitimes de
l'associé décédé, car il s'agit souvent et surtout
dans le cadre des pactes extra-statutaires, de contrat intuitus
personae, qui par conséquent, se fondent sur un rapport de
connaissance et de confiance avec l'actionnaire concerné qui n'est pas
forcément possible avec ses héritiers. Cette position est
d'ailleurs la même dans le cas de liquidation de communautés, dans
lesquelles les actionnaires viendraient à perdre(ou devraient modifier)
éventuellement la participation d'un membre du pacte qui pourrait
être important, voire fondamental, pour le maintien de la
stabilité des équilibres sociétaires.
De l'autre
côté, il existe la revendication légitime des parties
extérieures au cadre sociétaire, qui normalement sont
représentées par des personnes physiques tiers par rapport
à la dimension sociétaire, qui selon la loi ont le droit de
pouvoir entrer en possession des « biens » du de cujus ou
des biens appartenant à la communauté des conjoints ou tout au
moins de pouvoir en disposer, sans devoir se soumettre à des contraintes
qui ne sont pas forcément établies par la loi.
Il s'agit d'un conflit
d'intérêts, car la personne morale d'un côté et la
personne physique de l'autre se trouvent à devoir envisager une solution
en respectant les principes d'ordre public de la loi, en essayant de limiter
les dommages possibles que de telles «mutations » pourraient
apporter aux régimes sociétaires convenus. En sachant que pour
les actionnaires le but pour eux est d'éviter des changements trop
brusques et surtout indésirés dans le cadre de la gestion de
l'organisation des équilibres sociétaires.
L'article L. 228-23 C.
Com., exclut du domaine d'application des clauses d'agrément, les
successions, liquidations de communauté et cessions à un
conjoint, descendant et ascendant. Se fondant sur cette prohibition, certains
auteurs soutiennent que les transmissions familiales ne peuvent être
soumises aux clauses de préemption. Cependant, en raison de la
jurisprudence actuelle qui distingue les clauses d'agrément des droits
de préemption, les clauses de préemption devraient normalement
être reconnue au sein des SA, milite d'ailleurs en faveur d'une telle
position. De plus, il semble difficile de pouvoir invoquer le caractère
d'ordre public de l'article L. 228-23 C. Com., au sein des SA.
En tout état de
cause, lors d'une transmission de titres par voie successorale, il y a aura
reprise automatique des engagements du pacte par les héritiers,
conformément à l'article 1122 C. Civ.. Cet article dispose que
les héritiers et légataires universels ou à titre
universel, succèdent aux droits et obligations auxquels leur auteur
avait été partie.
Si le décès
entraîne modification du contrôle et si les investisseurs
souhaitent exercer leur droit de retrait. Même en l'absence de
stipulations particulières, le pacte contiendra donc une stipulation
pour autrui faite par chacun des contractants au nom de ses héritiers.
Certains auteurs y voient une des conséquences du titre universel de la
transmission, tant à l'actif qu'au passif, le contrat étant un
élément du patrimoine. Parce que les dispositions de l'article
1122 C. Civ ne s'appliquant aux ayant cause à titre particulier, le
pacte devra prévoir expressément une reprise des engagements du
pacte pour toutes les autres transmissions familiales et ce, afin de contourner
le principe de l'effet relatif des contrats.
Le risque de qualification
du pacte d'actionnaires en pacte sur succession future existe lorsque lors du
décès d'un signataire, personne physique du pacte, les
investisseurs souhaitent exercer leur droit de préemption sur les titres
litigieux. En effet, l'héritier peut se voir
ainsi « dépossédé » d'une partie
de sa succession.
L'article 1130,
alinéa 2 C. Civ. Prohibe les pactes sur succession future en ces
termes « On ne peut faire aucune stipulation sur une succession
non ouverte même avec le consentement de celui de la succession duquel il
s'agit ». En d'autres termes l'article 1130 défend de disposer
par écrit de cette chose future que constitue une succession non
ouverte. La jurisprudence a appliqué ces principes aux promesses de
vente et a conclu à la nullité des promesses de vente dont
l'option ne pouvait être levée qu'après le
décès du promettant. Le critère retenu pour la
nullité et la requalification en pacte sur succession future
étant la volonté du promettant de ne pas se lier personnellement
et de ne vouloir lier que les héritiers. Les conventions portant sur un
bien qui ne figure pas au moment de l'acte dans le patrimoine du
débiteur ont également été qualifiées de
pactes sur succession future prohibés. Cependant, une nouvelle voie a
été ouverte qui distingue les pactes sur succession future et les
pactes post mortem, ces derniers étant
considérés comme valides.
Les pactes
post mortem, sont des stipulations par lesquelles les
parties ont voulu retarder au décès, non pas à la
naissance du droit, mais seulement son exigibilité. Ces stipulations
sont valables, car elles produisent immédiatement leur effet juridique.
Un droit est crée immédiatement contre le promettant, mais ne
pourra éventuellement être exercé qu'au jour de son
décès, c'est-à-dire contre sa succession. Il y a donc une
différence essentielle entre la stipulation post
mortem et le pacte sur succession future, car ce dernier suspend
non seulement l'exercice, mais la naissance du droit.
Ainsi, il a
été jugé que l'engagement par un associé de
céder toutes ses parts à un coassocié en cas de
départ définitif de la société et notamment en cas
de décès constituait une promesse valable.
Plus récemment, la
Chambre civile de la Cour de Cassation a jugé une promesse de vente
exécutée après le décès comme
valide « même si l'exécution de la promesse ne
pouvait être exigée que par une levée d'option
postérieure au décès ». Des
considérations ci-dessus, il ressort que les droits de préemption
des investisseurs, mis en oeuvre en cas de transfert d'actions par voie de
succession, devraient être considérés comme valides(29).
29 Cass. Civ., 13 juin 1996, in Bull. Civ. 1997
SECTION II -LES TRANSFERTS « MORTIS
CAUSA » EN DROIT ITALIEN
Normalement, si dans les
sociétés de personnes
l'intuitupersonnae est un principe
général de ce genre de société, la règle
veut que la quote-part de l'associé ne puisse être transmise
à ses héritiers(auxquels est dû uniquement un droit de
crédit à la liquidation de sa quote-part), dans les
sociétés de capitaux la règle contraire s'applique. A ces
règles générales peuvent être appliquées des
dérogations qui peuvent inverser les principes énoncés.
Dans les sociétés de personnes les héritiers peuvent se
substituer au de cujus, en application d'une
clause « di continuazione »(pour continuer),
éventuellement contenue dans des pactes para-sociaux ou en s'accordant
avec les autres associés, selon les termes prévus par l'art. 2284
C. Civ. .
Dans les sociétés
de capitaux il faut faire un distinguo:
Pour ce qui concerne les SARL,
étant donné que l'art. 2479 C. Civ., dispose
que: « le quote sono transferibili ... per successione a causa
morte, salvo contrario disposizione dell'atto costituvo »(les
quotes-parts peuvent être transferées ... par succession à
cause de la mort de l'associé, à moins que l'acte constitutif ne
dispose autrement), toute dérogation est admise. Par conséquent,
sont aussi valides les clauses qui, en cas de mort de l'associé,
prévoient une non-transmissiblité absolue des quotes-parts et
limitent ce qui est dû aux héritiers à un crédit
pour la liquidation de celles-ci(de même que ce qui est prévu e
général pour les sociétés de personnes).
Pour les SA, on ne
considère pas valables les clauses qui en cas de mort de
l'associé, prévoient une non-transmissibilité absolue de
ses actions, étant donné que l'article 2355 C. Civ établit
que « L'atto costituvo puo sottopore a particolari condizioni
l'alienazione delle azioni nominative »(l'acte constitutif peut
soumettre la vente des actions nominatives à des conditions
particulières). En effet, la loi permet uniquement de limiter et non pas
d'exclure complètement le libre transfert des actions, prévoyant
un droit de préemption en faveur des associés vivants(30).
30 MERLE, sociétés commerciales, précis
Dalloz, 8 ème éd. 2001
Avant d'examiner le problème central de la validité
de ces clauses, il est opportun d'en vérifier leur fonctionnement
pratique, selon les termes et les schémas employés pour leur
constitution dans les statuts:
- en cas de mort d'un
associé ( ou en cas de transfert mortis causa des actions) il est
prévu l'obligation pour les héritiers ou les légataires,
d'offrir en vente(ou en option ou en préemption) aux autres
associés les actions possédées par le défunt. En
contrepartie à cette obligation il est prévu un droit d'achat(ou
de
préemption) des associés, qui doit être
exercé dans un certain délai; certaines clauses plus
précises spécifient que: « Fino a quando non sia
stata fatta l'offerta e non risulti che questa non è stata accettata,
l'erede o il legatario ... non sarà iscritto nel libro dei soci, non
sarà legittimato all'esercizio del diritto di voto e degli altri diritti
amministrativi inerenti alle azioni e non potrà elienare le azioni, con
effeto verso la società, a soggetti diversi dagli altri possessori di
azioni »
(jusqu'au moment où l'offre n'a pas été
effectuée et qu'il ne résulte pas que celle-ci n'a pas
été acceptée, l'héritier ou le légataire...
ne sera pas inscrit dans le livre des associés, il ne pourra pas exercer
son droit de vote et les actes administratifs afférents les actions et
il ne pourra pas vendre les actions ayant des effets à l'égard de
la société à des sujets autres que les associés
possédant d'autres actions);
- Si les associés décident
d'acheter les actions en vente, il est prévu que le prix sera
fixé par un ou plusieurs arbitres experts. De temps à autre, il
est prévu que la détermination de l'arbitre interviendra
uniquement en cas de non-accord sur le prix.
Ces clauses permettent,
d'assurer aux associés un droit de rachat des actions de
l'associé mort, à certaines conditions. Il ne s'agit pas d'un
véritable « droit de préemption »,
surtout si on considère le principe selon lequel il y aurait un droit de
préférence « aux même
conditions ». Il ne s'agit même pas d'une limitation au libre
transfert des actions, car après le décès de l'actionnaire
ses titres se transfèrent « librement »
à ses héritiers, lesquels ont une obligation de vente à
l'égard associés. Il s'agit du même principe qui s'applique
quand un héritier succède dans la propriété d'un
immeuble par rapport auquel le de cujus avait déjà établi
avec un tiers un préliminaire unilatéral de vente ou une option
de vente. En effet, l'héritier succède dans la
propriété du bien hérité sans qu'il y ait une
limitation de circulation du bien, mais il obligé d'en effectuer la
vente au tiers.
La validité de ces
clauses a été mise en doute à plusieurs reprises et pour
les raisons suivantes:
1.- car elles iraient à
l'encontre de la prohibition des pactes de succession, dont à l'article
458 C. Civ. ;
2.- car pour les SA l'article
2355 C. civ. Permet de limiter la circulation des actions uniquement dans les
transferts intervivos et pas dans ceux
mortis causa;
3.- et parce que les clauses qui
ne reconnaissent pas un « juste prix » aux héritiers
pourraient porter atteinte à la quote-part des actionnaires
légitimes.
Pour ce qui concerne le premier
aspect, la doctrine, contraire à cette interprétation, avait
analysé le cas de deux frères, copropriétaires d'une
entreprise, lesquels s'étaient échangés une option,
à travers laquelle ils reconnaissaient réciproquement, qu'en cas
de mort de l'un ou de l'autre, le survivant avait le droit de racheter aux
héritiers, à un prix donné, la quote-part appartenant au
frère défunt. Après la mort d'un des frères, les
héritiers avaient demandé au juge de déclarer nulles ou
inefficaces ces promesses faites par le de cujus. La
doctrine considérait que l'accord était valable, car il ne
s'agissait pas d'un pacte de succession, mais de deux contrats ayant des effets
juridiques différents. En outre, cet accord n'a pas comme objet
principal la succession, c'est-à-dire le transfert de rapports
juridiques du défunt à l'associé resté vivant, mais
l'émission d'une promesse ou option de la part de chacun des
frères.
Une position identique a
été adoptée par les juges dans une note concernant la
validité d'un article inséré dans un testament, par le
biais duquel le de cujus rappelait aux héritiers l'existence d'un
contrat de préemption qui l'engageait à préférer
ses quatre associés en cas de vente de certaines actions. Les juges
avaient considéré valable cet engagement, car le decujus par ce
acte n'entendait pas agir sur sa propre succession, mais il voulait obliger
soit même, avec effet immédiat ex nunc, à
préférer ces autres associés.
La cour suprême a
confirmé cette décision, relevant que: « .... con
l'alto inter vivos il de cuius aveva inteso costituire un diritto di prelazione
in ordine a titoli azionari, e di conseguenza il codicillo testamentario non
rivestiva alcun valore istituvo, ma meramente riprodutivo di un'obbligazione
preesistente all'apertura della successione » par conséquent:
« ... l'esistenza di un patto successorio, ben lungi dall'aver
considerato le azioni come relictum successorio e, quindi, con effeti
istitutivi all'apertura della successione(tali da realizzare quel votum
captandae hereditatis contrastato dalla legge), aveva al contrario prodotto
effeti obbligatori immediati »(... avec l'acte inter vivos le decujus
avait voulu constituer un droit de préemption sur les actions, par
conséquent, le texte du testament n'avait aucune valeur de constitution,
mais uniquement de reproduction d'une obligation préexistence à
l'ouverture de la succession) par conséquent(...l'existence d'un pacte
de
succession, qui ne voulait aucunement considérer les
actions comme relictum successoral, ayant donc des
effets institutifs sur l'ouverture de la succession(pouvant réaliser ce
qui est défini comme votum captandae
hereditatis non voulu par la loi) avait au contraire produit des
effets obligatoires immédiats).
Les clauses
statutaires ou extra statutaires prévoyant que les associés
vivants ont le droit d'acheter à un certain prix les actions de
l'associé défunt, ne peuvent être considérés
ni comme des « pactes de successions », ni comme des
contrats « mortis causa ».
En effet, ils n'instituent aucun héritier ou légataire et ils ne
prévoient pas que cela pourra être effectué par un
testament successif. De plus, ils ne disposent pas d'un droit qui sera acquis
à travers la succession, pas encore ouverte; et deuxièmement, la
mort n'est pas la source autonome de l'attribution patrimoniale, mais une
condition suspensive du droit de préemption, qui reste un contrat
inter vivos et à titre onéreux(et non
pas mortis causa à titre gratuit).
Par ailleurs, pour les SARL
et les sociétés de personnes, la loi même établit la
validité d'accords qui permettent aux associés vivants d'acheter
les quotes-parts du défunt, en consolidant et augmentant
proportionnellement leurs participations respectives. (articles 2479 et 2284 C.
Civ.). Étant donné, que pour ces régimes
sociétaires ces clauses sont considérées valables et ne
vont pas à l'encontre de la prohibition de pactes de succession, la
même solution doit être donnée, si ces clauses concernent la
participation d'un défunt dans une SA.
Pour ce qui concerne le
deuxième aspect, la jurisprudence est désormais univoque pour
affirmer qu'une clause statutaire ou extra-statutaire, est un contrat
inter vivos et non mortis
causa. En effet, il est accepté qu'à la mort de
l'associé, une clause de
« consolidamento »(consolidation) puisse prévoir que
la part des actions appartenant au de cujus passent
directement sous le capital d'actions détenu par les autres
actionnaires, déterminant ainsi une augmentation de leurs parts
respectives, ayant bien entendu, l'obligation de correspondre aux
héritiers la valeur correspondante aux titres hérités.
Cela signifie, qu'il
existerait dans ce cas précis uniquement un lien directe entre le
de cujus et les associés; en laissant de
côté de manière définitive l'idée selon
laquelle, les associés devraient
éventuellement « relever » auprès des
héritiers la quote-part des actions de l'associé
décédé, en créant un lien entre trois parties
(défunt - héritiers - société) successif au
décès de l'associé. Dans le premier cas les
héritiers deviennent des parties extérieures au rapport entre
actionnaires, car le lien s'effectue uniquement entre défunt et
associés. Par conséquent, il sera acquis qu'il n' y aura lieu
d'aucune disposition sur le patrimoine du défunt, qui pourrait
être interprétée comme pacte de succession future, mais
tout simplement une distribution et une disposition différente de
celui-ci, disposition qui ne peut aucunement ingérer
sur l'axe héréditaire patrimonial.
Pour ce qui concerne le
troisième aspect, il est possible de considérer ces clauses de
préemption ou d'option comme non valables, si elles prévoient que
la liquidation aux héritiers sera effectuée à un prix
excessivement bas. La raison de la non-validité de la clause, ne se
réalise pas dans le fait que le prix est trop bas par rapport à
la vraie valeur de l'action, mais plutôt et surtout dans le fait que le
critère d'évaluation du prix étant trop modeste,
empêche la vente des actions, ce qui transforme économiquement la
clause en une préclusion à la vente. En effet, l'art. 2355 C. Civ
permet uniquement des « limitations » et pas des
« préclusions » à la circulation des
actions.
Il est possible de
prévoir des mécanismes régulant le transfert des titres
à partir du moment où certaines conditions viendraient à
se réaliser, comme par exemple le décès de l'actionnaire
détenteur des actions. Il paraît évident, que quand il
s'agit de transferts concernant des SA, il ne soit pas admis que les parties au
pacte établissent une limitation de circulation de l'action de
façon totale et exclusive, ce qui contreviendrait au principe
mêmes des sociétés par actions, surtout s'il s'agit de
sociétés cotées. Bien évidemment, tout
dépendra du type d'actions détenues par le
decujus et son rôle prédominant ou non
dans le cadre de la gestion de la vie sociétaire(31).
31 VIDAL, droit des sociétés, LGDJ, 3 ème
éd. 2001
En effet, il s'agit
d'envisager des pactes qui organisent le passage des titres selon certaines
modalités en instaurant d'ors et déjà un droit,
valablement constitué, qui ne pourra se concrétiser que si la
condition suspensive énoncée dans l'accord devait se
réaliser. Les pactes intervivos sont les
accords qui prévoient sont des accords qui prévoient les
modalités de transfert de la titularité du droit, au cas
où un événement précis viendrait à se
déclarer et ce, sans entacher le droit de propriété qui
appartient de façon légitime aux héritiers. Ceux-ci, par
ailleurs, ont toujours la possibilité, de revendiquer leur crédit
pour la liquidation de la quote-part(32).
Par conséquent, pour
les actionnaires vivants, il n'est pas possible de disposer d'un droit sur le
bien à partir du moment où l'actionnaire concerné est
décédé, mais uniquement d'en définir les
règles de transfert. Par ailleurs, si la volonté du
decujus s'était déjà
exprimée avant sa mort dans le sens de vouloir procéder à
la cession de ses titres, par un acte formel, les héritiers ne pourront
pas y faire objection. La possibilité d'envisager une
transferabilité absolue des titres dans le cadre des SARL répond
davantage à cet impératif qui consiste à maintenir intacte
l'élément de l'intuitus personae,
normalement essentiel dans ce genre de société(33).
Mais , il ne pourra jamais être nié aux
héritiers de revendiquer un juste prix pour la liquidation de leurs
« biens ».
32 MERCADAL J. , mémento pratique: sociétés
commerciales, éd. Francis lefebvre
33 REINHARD R. , pactes d'actionnaires et groupes de
sociétés, éd. Gualino, paris 1994
CONCLUSION DE CHAPITRE
En
confrontant ces deux droits il n'existe pas de différences
substantielles majeures, bien que les voies entreprises pour l'analyse sont
différentes. En effet, le droit français ne peut envisager comme
valables des pactes mortis causa. L'élément essentiel qui unit
ces deux conceptions est le même, car il s'agit de ne pas accepter des
conventions qui nieraient l'existence d'un lien juridiquement étroit et
indéniable entre les biens de l'actionnaire décédé
et ses héritiers.
Il n'est pas
envisageable de pouvoir considérer comme licites des actes qui ne
reconnaitraient pas un principe appartenant au droit de propriété
et surtout à la suite de la mort du titulaire de ce droit, par rapport
à ces héritiers. Cela veut dire, que les actionnaires, y compris
celui qui décédera, peuvent envisager plusieurs situations qui,
si elles venaient à se déclarer, leur donneraient la
possibilité de mettre en place un certain processus. Et ce, afin que le
nouveau titulaire du droit de propriété sur les titres, tout en
maintenant son droit, ne puisse pas intervenir dans la structure
sociétaire et éventuellement perturber la stabilité de
l'actionnariat.
Le droit
français parle clairement de clauses de préemption en faveur des
actionnaires restants, sur la vente éventuelle ou forcée des
actions de la part de l'héritier, associé ou pas à un
droit de rachat. A partir de cette perspective, l'héritier surtout s'il
ne peut que vendre, car rien d'autre ne lui serait permis par les accords
établis dans le pacte, ne peut dénoncer ce dernier ou refuser la
vente que si le prix n'est pas correspondant à la valeur des titres
hérités.
Il est
vrai, que surtout dans le cas des SARL, les héritiers peuvent être
très limités dans leurs capacités de jouissance du droit
hérité, mais cela ne peut être accepté que s'il
existe des raisons majeures qui justifient concrètement cette attitude
de la part des actionnaires restants. C'est pour cette raison que dans les SA
la non transferabilité absolue, qui se concrétise dans
l'obligation de l'héritier de vendre, ne peut pas normalement ne pas
être acceptée. Par contre, il est possible de conditionner le
transfert, justement par le biais des clauses indiquées ci-dessus.
En conclusion, des conventions
mortis causa ou post mortem
à titre gratuit ou niant complètement tout droit
d'héritage de la propriété et ce, par diverses
modalités de facto non licites, ne peuvent avoir leur place aussi
dans ce contexte. Car, bien que rattaché de façon
plus étroite au droit des personnes morales plus qu'à celui des
personnes physiques, cela reviendrait à nier l'existence d'un lien bien
plus ancestral, qui appartient aux fondements de notre occidental. Par
ailleurs, il est tout à fait possible en droit français, comme en
droit italien d'envisager des conditions qui arrivent à prendre en
compte en même temps les droits et les intérêts et les
droits des actionnaires parties au pacte.
CHAPITRE II : LES TRANSMISSIONS A UNE SOCIETE HOLDING
DE contrôle
Pour des raisons de transmissions
familiales ou de renforcement de contrôle, les actionnaires majoritaires
peuvent apporter leurs titres à une société holding de
contrôle. Si la société holding de contrôle. Si la
société holding a été constituée avant
l'entrée des investisseurs dans le capital, toute disposition
nécessaire pourra figurer dans le pacte d'actionnaires conclus au niveau
de la société financée. Par conséquent, ce document
est ratifié par les investisseurs, le holding et les actionnaires
personnes physiques ou morales détiennent directement des titres de la
société.
Cependant, même si les titres
sont détenus individuellement par les membres du groupe majoritaire lors
de la prise de participation, certains investisseurs cherchent à
organiser ab initio leurs droits de façon conventionnelle. En effet, si
le pacte initialement conclu ne comprend aucune disposition spécifique
sur les apports de titres à un holding de contrôle, ce pacte devra
être entièrement renégocié lors de la survenance
d'une telle opération.
Afin d'envisager ce type de
transmissions selon une analyse comparative, il conviendra de présenter
« L'apport de titres à une société
holding de contrôle» (section I) selon les principes du droit
français et d'affronter dans une deuxième section « La
clause de libre transfert dans les sociétés du groupe en droit
italien »
SECTION I - L'APPORT DE TITRES A UNE SOCIETE HOLDING
DE contrôle
L'apport par le groupe
majoritaire de titres de la société financée à un
holding de contrôle peut être une opération sans incidence
sur les relations initialement instaurées, si ce sont les mêmes
individus qui sont à la tête du holding(il s'agirait alors d'un
transfert intra-groupe). Si tel est le cas, les investisseurs n'auront aucun
intérêt à exercer leur droit de préemption et de
retrait. Cependant, le non exercice des droits nés du pacte lors d'une
telle transaction entraînera la disparition ou plutôt
l'épuisement du pacte. L'effet relatif des contrats empêche que le
bénéficiaire de la transaction (même si c'est une
société holding) ne soit tenu par des engagements qu'il n'aurait
pas lui même contractés(34).
Une telle situation peut
néanmoins être évitée s'il est expressément
prévu dans le pacte que les transmissions de titres à une
société holding s'effectueront librement si certaines conditions
suspensives sont remplies. Les conditions suspensives
généralement inscrites dans le pacte sont au nombre de trois et
visent à maintenir après la transmission une situation identique
à celle qui existait auparavant.
Premièrement,
suite à la transmission, le contrôle au sein de la
société financée ne doit pas avoir été
modifié. Si les titres n'ont pas été transmis en
totalité au holding, il faut que le les titres du holding ajoutés
au titres encore détenus par le groupe majoritaire représentent
plus de 50 % des droits de vote et du capital de la société. La
deuxième condition tient au contrôle de la société
holding elle-même, ce contrôle devant être détenu
à plus de 50 % par le groupe majoritaire initial(35).
Finalement, la
société holding bénéficiaire de la transaction
devra souscrire aux obligations du groupe majoritaire si la totalité des
titres lui a été transmise. Ainsi, en cas de cession par la
société holding de valeurs mobilières de la
société financée, les investisseurs pourront exercer leur
droit de préemption. De même, en cas de modification du
contrôle de la société cible, par opérations
financières, la société holding pourra être dans
l'obligation de racheter les titres des investisseurs(36).
34 GUENGNANT T.,aménagements statutaires, LGDJ, 1997
35 DE VENDEUIL C., conventions entre associés, LGDJ,
2000
En tout état de
cause, pour que le pacte puisse produire ses effets lors d'une transmission de
titres à une société holding, le terme de transmission
devra être défini de façon extensive dans le pacte et
couvrir toute opération à titre onéreux ou gratuit
entraînant le transfert de valeurs mobilières de la
société. Une telle définition permettra donc de viser non
seulement les cessions mais aussi les échanges ou les apports en
société. Outre les dispositions relatives à l'apport de
titres à un
holding de contrôle, il est également envisageable
de prévoir dans le pacte des clauses sur la modification du
contrôle de la société holding.
Lorsqu'un majoritaire de
titres de la société cible est détenu par une
société holding, toute modification du contrôle du holding
aura des conséquences analogues dans la société cible. Il
est néanmoins possible de prévoir dans le pacte initialement
conclu un certain nombre de protections conventionnelles. Il peut par exemple
être stipulé, que préalablement à la cession du
contrôle de la société holding, les investisseurs pourront
exercer soit un droit de préemption sur les titres du holding, soit un
droit de préemption sur les titres de la société cible,
soit un droit de retrait.
Les modalités
d'exercice du droit de préemption sur les titres du holding ou sur les
titres de la société cible dépendront de la
répartition initiale du capital et du pourcentage de titres que le
groupe majoritaire continuera de détenir directement dans la
société financée par les investisseurs(titres non
apportés au holding). Lors de l'exercice d'un droit de préemption
sur les titres du holding, le prix offert par le tiers acquéreur ne sera
d'aucune utilité si le patrimoine de la société holding
comprend des actifs immobilisés autres que les titres de la
société cible. A défaut d'accord amiable, il pourra
être prévu dans le pacte que le prix d'acquisition des titres sera
déterminé par expertise.
Il convient
néanmoins de souligner, que l'insertion dans le pacte initial de
dispositions sur le chargement de contrôle de la société
holding risque d'alourdir de façon extravagante le document. De plus en
pratique, pour des raisons de diversification de portefeuille, les droits de
préemption sur des blocs de contrôle seront rarement mis en
oeuvre, les investisseurs préférant soit exercer leur droit de
retrait soit se maintenir dans la société même en
présence de nouveaux contrôleurs. C'est pourquoi, les
investisseurs préfèrent bien souvent laisser un vide contractuel
en la matière.
SECTION II : LA CLAUSE DE LIBRE TRANSFERT DANS LES
SOCIETES DU GROUPE EN DROIT ITALIEN
Si la
société dont les actions doivent être offertes en
préemption a comme associé une autre société, dans
le transfert de cette dernière à un tiers, celui-ci
acquière indirectement aussi les actions soumises au droit de
préemption à travers la vente de la société
propriétaire des actions soumises au droit de préemption, il faut
que la société qui contrôle l'associé, s'engage,
dans le cas où elle perdrait le contrôle, à offrir
préalablement en vente aux associés ayant droit les actions
soumises au droit de préemption.
Il est possible de
prévoir des clauses statutaires et extra-statutaires formulées de
telle sorte, que dans le cas où le
« contrôle » d'un associé serait
transféré à un tiers, l'associé devra offrir en
vente, par lettre recommandée avec accusé de réception,
toutes ses actions aux autres associés, les actions seront
attribuées à chacun en proportion de leurs participations au
capital de la société. Le prix de cession des actions, en cas de
non accord, sera déterminé normalement par le collège
d'arbitrage, qui deviendra et prendra dans ce cas aussi les fonctions d'organe
d'arbitrage.
Différant de
celui considéré dans le paragraphe précédent est le
cas où les statuts ou le pacte para-social prévoient une clause
de préemption déterminant un transfert libre des actions à
l'intérieur du groupe. Dans ces clauses, il faudra éviter que la
liberté des associés à transférer librement leurs
actions à l'intérieur du groupe, ne se transforme en un moyen
facile pour contourner la clause de préemption. En effet, on pourrait
utiliser la liberté de transfert intra-groupe pour transférer les
actions soumises au droit de préemption à une SARL
possédée au 100 % et ensuite, vendre cette SARL à un
tiers. Il sera alors nécessaire de prévoir une clause
établie dans les termes suivants : « Le parti potranno
trasferire le azioni o parti di esse a favore di proprie controllanti o
controllate, o controllate dalla medesima controllante, sempreché il
cessionario assuma gli obblighi previsti nel presente accordo; il cessionario
dovrà inoltre impegnarsi alla rivendita al cedente - che dovrà
dal canto suo impregnarsi al riacquisito - nel caso venga meno il rapporto di
controllo rilevante ai fini del presente articolo ... » (Les parties
devront transférer les actions ou partie de celles-ci en faveur de
sociétés contrôlées ou qui exercent, sachant que le
cessionnaire doit maintenir les obligations prévues par cet accord; le
cessionnaire devra en outre, s'engager à revendre à celui qui
cède - qui devra en assurer le rachat - si le rapport de contrôle
prévu par cet article devait ne plus être respecté).
Afin de donner une efficacité réelle au droit de
préemption il sera préférable d'insérer cette
clause dans les statuts.
Un autre exemple de
clause qui permet le libre transfert intra-groupe, avec l'obligation de
racheter, si la société qui achète cesse de faire partie
du groupe, est le suivant : « Gli impegni di offrire in prelazione
non si applicano ai transferimenti da ciascun socio a società da esso
controllata, o che eserciti il controllo su tale socio, o che sia da
quest'ultima controllata. Peraltro, nel caso in cui venga meno il rapporto di
controllo il socio che, ai sensi del presente comma, abbia alienato azioni o
diritti di opzione, deve ricquistare preventivamente le azioni dimesse o quelle
enventuelmente sottoscritte attraverso i dritti di opzione ceduti » (
Les engagements d'offre en préemption ne s'appliquent pas aux transferts
d'un associé à une société contrôlée
par celui-ci ou quant celle-ci exerce un contrôle sur cet associé
ou que l'associé contrôle. En outre, dans le cas où le
rapport de contrôle tomberait, l'associé qui selon les termes de
cet alinéa a vendu les actions ou les droits d'options qui ont
été cédés).
La formulation de cette
clause par contre, ne permet pas d'avoir une possibilité d'obligation
concrète pour ce qui concerne l'engagement de rachat prévu par la
clause elle même. En outre, même une action en dommages et
intérêts risque d'aboutir à des faibles résultats,
au vu de la difficulté évidente de quantification des dommages,
il faudra alors prévoir que : « i soci potranno
liberamente trasferire le azioni o parte di esse a proprie controllanti, o
controllate, o controllante dalla stessa controllante. Tale libertà di
transferimentoè risolutivamente condizionata al fatto che - nel caso in
cui venga meno il rapporto di controllo - il socio che abbia effetuato il
libero trasferimento di poprie azioni ai sensi del presente comma, ricquisti le
azioni trasferite. Nel caso in cui tale riacquisto non venga effetuato entro
trenta giorni dalla richiesta che ne sia fatta da uno dei soci, oltre agli
altri eventuali rimedi previsti dalla legge: i) ciscun socio avrà il
diritto sia di far dichiarare inefficaci i transferimenti di azioni liberamente
effetuato ai sensi del presente comma, sia di esercitare egli stesso la
prelazione su tali azioni, al prezzo di cui al successivo art. ...., ii) la
sociétà avrà il diritto-dovere di escludere dal voto e
dall'esercizio di ogni diritto sociale, nonché di cancellare dal libro
soci, le azioni liberamente effetuati ai sensi del presente comma » (
les associés pourront transférer librement les actions ou partie
de celle-ci à des sociétés qui les contrôlent ou
qu'ils contrôlent ou contrôlées par celle qui les
contrôlent.
Cette liberté de transfert est liée de façon
impérative au fait que - dans les cas où le rapport de
contrôle tomberait - l'associé qui a effectué librement les
transfert de ses actions, selon les termes de cet alinéa, rachète
les actions transférées. Dans le cas où le rachat ne
serait pas effectué dans les trente jours à compter de la demande
faite par un des associés, outre les solutions prévues par la loi
: i) chaque associé aura le droit de faire déclarer inefficace
les transferts des actions librement effectués, selon les termes de cet
alinéa et d'exercer lui-même la préemption sur ces actions,
au prix spécifié par l'article....; ii) la société
aura le droit-obligation d'exclure du vote et de l'exercice de tout droit
social et effacer du livre des associés, les actions librement
transférées, selon les termes de cet alinéa).
Le droit italien ne parle peut
être pas directement de holding ou de passage de la société
à une structure telle que celle-ci, mais il envisage plutôt la
question dans le sens du transfert des actions à l'intérieur d'un
groupe déjà constitué qui peut bien être un holding.
A partir du moment, où les équilibres sociétaires
subissent des modifications importantes dues soit à une concentration ou
à une restructuration de la société, il est clair que tous
les actionnaires doivent avoir par le biais de pactes de retraits ou par
l'application de conventions de préemption, la possibilité de
réagir face à des modifications non souhaitées
d'équilibres qui ne leur conviennent plus.
Que la société
transmette ses actions à un holding( de toute manière partie
intégrante du groupe) ou que les actionnaires puissent librement
établir des transferts à l'intérieur du groupe, ce sont
des pratiques normales dans l'évolution nécessaire à la
structure sociétaire. La question centrale reste celle rattachée
au pouvoir. En effet, à partir du moment ou ces mouvances sont
réalisées par des actionnaires minoritaires qui ne peuvent pas
par leurs choix modifier considérablement les équilibres
sociétaires, normalement elles ne posent pas de problèmes
majeurs. A moins que les minoritaires arrivent en s'unissant à
déterminer une influence qui pourrait nuire à la
stabilité de la société.
Le problème commence
à naître de façon plus tangible, à partir du moment
où ces modifications interviennent dans le groupe majoritaire et surtout
dans le groupe qui détient effectivement le pouvoir de gestion. En
effet, le noyau essentiel se situe à ce niveau, car tous les
actionnaires, surtout les minoritaires, mais y compris aussi les autres
actionnaires membres du groupe majoritaire, pourraient imaginer des
conséquences négatives qu'ils ne désirent pas assumer et
revendiquer l'application de certains droits leur permettant d'intervenir dans
de telles circonstances.
Si les changements introduits
par ces transferts n'atteignent pas les équilibres
préétablis pour le contrôle du pouvoir et sont
acceptés par les actionnaires au pacte, normalement ils seront aussi
acceptés et insérés dans l'ordre normal de la vie
sociétaire. Par ailleurs, si le contrôle du pouvoir subit des
modifications considérables à tel point que les équilibres
originaires se retrouvent bouleversés, il sera certainement plausible
d'envisager de la part des cocontractants des actions de protection ex post
et/ou de contrôle et de maîtrise ex ante des modifications requises
formellement par certains actionnaires.
A cet effet, en droit italien, les
clauses de retrait, de préemption, d'achat ou de vente entre
actionnaires au pacte deviennent nécessaires, afin de permettre à
ceux qui se trouvent en position d'action et donc de requête de
changements ou en position passive qui donc qui veulent maîtriser
l'événement, d'envisager et d'effectuer ces opérations,
sans nuire à une part ou à l'autre, tout en essayant de
préserver la stabilité des équilibres
sociétaires.
CONCLUSION DEUXIEME CHAPITRE
Les deux
droits envisagent des solutions permettant à la société de
modifier ses équilibres internes rattachés directement au
pouvoir, selon les priorités des uns et des autres. Certainement, cet
exercice ne donne pas toujours des résultats sans failles, car il est
fort possible que les mécanismes instaurés par les actionnaires
puissent, sans le vouloir, rendre la société trop rigide aux
changements. Ceci est possible, si les pactes établis ne sont pas
formulés de façon à tenir compte réellement du
rôle des différents types d'actionnaires dans la gestion de la vie
sociale, par rapport aux objectifs sociaux recherchés par l'ensemble des
associés.
A contrario,
une société où les actionnaires n'auraient pas
établi à l'avance certaines règles internes qui leur
permettent d'avoir un cadre préétabli et accepté par tous,
laisse les majoritaires dans une situation de puissance absolue, par rapport
à leurs choix. Cela ne peut amener à aucune stabilisation des
relations entre la gestion et les intérêts de tous les
investisseurs en présence dans la société.
Le transfert
à l'intérieur d'un même groupe de société ou
d'un holding constitué à cet effet, est une question que les
actionnaires doivent pouvoir régler entre eux de façon autonome
et surtout en amont de leurs relations sociétaires. En effet, il
n'apparaît pas que des dispositions législatives interviennent de
façon spécifique à cet égard, si ce n'est que pour
en régler certains détailles plus formels que substantiels
concernant la question. En quelques sorte, il s'agit d'un domaine dans lequel,
si l'intérêt social, ainsi que l'ordre public sociétaire
sont respectés, rien n'empêche aux parties au pacte de
déterminer leurs règles du jeu.
En effet, les
actionnaires déterminent dans ce contexte des règles qu'ils
appliqueront entre eux de façon exclusive et sur les quelles ils devront
prendre garde à leur intérêt. C'est-à-dire que la
loi, dans les deux droits présentés, laisse aux actionnaires un
champs très ouvert pour exprimer leur volonté, à travers
la formalisation de conventions ad hoc, en sous-entendant que si rien n'est
expressément établi entre les parties, elles ne feront
qu'appliquer les règles du droit commun(36).
36 DAIGRE J.J, pactes d'actionnaires, GLN Joly, éd.
1995
Cette
« liberté » législative est tout à
fait compréhensible, car il s'agit de conventions qui, par leur nature,
s'appliquent entre les actionnaires au pacte et qui dépendent
essentiellement de leur degré de spécification et de leur
nécessité de précision. En effet, elles concernent les
modalités selon lesquelles ses transferts pourront être
valablement établis, par rapport aux critères voulus et
acceptés par rapport aux critères voulus et acceptés par
les parties au pacte.
La valeur inter nos qui
appartient à ce type de pactes d'actionnaires de l'exprimer et de la
formaliser en essayant d'être le plus prêt possible de la
volonté des parties. Cela signifie, pouvoir envisager une autonomie
contractuelle plus ample dans le cadre de la vie sociétaire. Bien
évidemment, il existera, de ce point de vue, toujours de
différence entre le pouvoir que sont capables d'exercer les
majoritaires, par rapport aux minoritaires, surtout si ces derniers
intègrent la vie sociétaire postérieurement à la
mise en oeuvre de ces pactes, car si tel est le cas, ils ne peuvent normalement
que s'y conformer.
Les transmissions à
un holding ou celles qui peuvent être effectuées
spécifiquement à l'intérieur du groupe retrouvent leurs
raisons d'être dans la volonté de maîtriser autrement les
transferts familiaux ou uniquement dans le désir particulier de
renforcer le contrôle de la part d'un certain groupe d'actionnaires.
Tous ces aménagements ne posent normalement aucun
problème, si à la tête du holding restent les mêmes
actionnaires ou si le transfert intra-groupe s'effectue sans l'intervention
d'investisseurs extérieurs nouveaux.
Les moyens
disponibles sont pour les deux droits ceux s'explicitant à travers la
rédaction de conditions suspensives spécifiques ou en acceptant
la formalisation de clauses de préemption et/ou de retrait laissant aux
actionnaires un pouvoir de choix et d'intervention assez important au cas
où l'événement considéré viendrait à
se produire. Il s'agit d'établir les modalités selon lesquelles
les actionnaires pourront exprimer leur adhésion ou leur refus aux
changements influençant de manière déterminante les
équilibres du pouvoir sociétaire.
CONCLUSION DEUXIEME PARTIE
Ce deuxième titre
a essayé d'envisager deux raisons qui peuvent généralement
motiver une volonté d'intervenir dans le domaine de la gestion du
pouvoir sociétaire, de la part des actionnaires ou de partie de ceux-ci.
En effet, l'évolution des équilibres acquis durant la vie de la
société sont amenés à être modifiés de
façon régulière et imprévisible.
Par conséquent, il sera fondamental pour les acteurs qui
interviennent dans cet univers social d'envisager ex ante les modalités
de « gestion » de ces changements.
Ces modifications
peuvent être souhaitées pou renforcer le pouvoir d'un certain
groupe d'actionnaires(tant dans le cadre des transmissions familiales que dans
celui de transmissions intra-groupe ou à un holding) ou peuvent
intervenir de manière complètement arbitraire et imprévue,
dans le cas du décès de tel ou tel actionnaire. Cela signifie,
que dans les deux cas pour des raisons différentes, mais de toute
façon pertinentes, il sera opportun d'envisager les modalités
opérationnelles de ces changements.
Si dans le premier
cas, il s'agit normalement d'interventions voulues et régulées
par les parties qui les réaliseront, ce qui permet entre autre d'en
programmer l'exécution et d'en maîtriser plus aisément les
évolutions, dans le deuxième cas l'imprévu prime par
dessus tout. En effet, il n'est pas possible d'en déterminer les
modalités en terme de temps ou d'en prévoir l'ampleur
spécifique, par rapport au moment historique de la vie de la
société où l'événement viendrait à ce
produire et si tel fait atteint plus un actionnaire minoritaire ou majoritaire,
détenant un certain poids ou pas à l'intérieur de la
gestion du pouvoir sociétaire.
L'élément de l'incertitude est celui qui, bien que pouvant
paraître en apparence marginal, conditionne le plus les actionnaires
à intervenir pour en réguler les effets. Il est effectivement
intéressant de remarquer, que les pactes d'actionnaires maîtrisant
les transferts intra-groupe ou les transmissions à une
société holding, si établis de façon
spécifique et pertinente, peuvent réguler plus facilement les
changements. Par ailleurs, les transferts « mortis
causa » soit d'un point de vue juridique que
d'application, paraissent difficilement maîtrisables de la part des
actionnaires.
En droit français
comme en droit italien, il apparaît qu'en cas de dissensions importantes
entre le respect des principes juridiques protégeant les
intérêts légitimes des héritiers et la
liberté contractuelle déterminée entre autre, par la
nécessité de protéger l'actionnariat et ses
équilibres internes, le premier serait de toute façon prioritaire
sur le deuxième. Il paraît en effet, que les droits
rattachés à la personne en tant qu'individu priment sur
l'intérêt des actionnaires membres d'une structure
sociétaire et que ce principe soit affaibli uniquement à partir
du moment où l'élément de l'intuitu
personae apparaît pour la société comme
fondamental pour le maintien de sa stabilité et finalement pour sa
survie.
De là les
différences acceptées de régime entre les SARL et la SA et
les diverses possibilités offertes aux actionnaires de maîtriser
les chamboulements sociétaires dérivés du
décès d'un actionnaire. La loi une foi encore, n'établit
pas de règles rigides, mais donne des indications de principes à
travers lesquels les praticiens devront structurer leurs analyses, afin de
mettre en place des conventions qui tiennent face à la preuve d'un
éventuel jugement.
Il n'en reste pas moins
que, dans le cadre de l'évolution de la vie sociétaire les
actionnaires et surtout les membres appartenant au pool de direction et de
gestion du pouvoir, devront entre autre sécuriser les minoritaires sur
la stabilité des équilibres internes à la
société. Pour ce faire, ils devront envisager
l'aménagement de pactes intervenant dans les transmissions familiales,
par rapport aux héritiers ou par rapport aux transferts
inter vivo, ainsi que de conventions qui auront pour
but de renforcer le contrôle du pouvoir et qui se réalisent par le
biais des transferts de titres à une société holding
partie du groupe ou directement intra-groupe.
En conclusion, il
n'est pas raisonnable de ne pas prévoir que, durant toute la vie d'une
société, des événements plus au moins
aléatoires pourraient intervenir et chambouler le régime de
stabilité existant. Certes, le régime sociétaire et la
composition de l'actionnariat sont des indicateurs importants par rapport aux
choix qui doivent être effectués. Afin d'éviter
l'application du régime prévu par le droit commun qui pourrait ne
pas convenir à une situation donnée, il appartiendra aux
actionnaires d'exploiter leur liberté contractuelle qui paraît
être dans ce domaine assez large.
CONCLUSION GENERALE
Cette
étude, sur les pactes d'actionnaires entre la loi et la pratique des
affaires, selon la culture juridique française et italienne, a
été envisagée en considérant prioritairement les
contrats passés entre les actionnaires. Le contenu de ces pactes n'est
généralement pas incorporé dans les statuts, bien qu'il
puisse être rendu public par des procédures spécifiques de
communication ayant pour objet de déterminer: les modalités et
conditions d'acquisition et de perte de la qualité d'actionnaire; les
droits et obligations attachées à cette qualité; les
règles d'organisation et de fonctionnement de la société
et les modalités de participation des actionnaires à la gestion
de celle-ci.
Selon cette idée première, l'étude a cherché
à mettre en évidence les deux éléments essentiels
sous jacents aux dynamiques organisationnelles, en dissociant les pactes qui
par leur nature et leur fonction ont normalement plus d'influence dans le
domaine du capital social et ceux qui influencent prioritairement la
distribution et l'organisation du pouvoir sociétaire.
Il
est certain, que dans la pratique des affaires, il est possible d'envisager une
modulation spécifique de ces deux éléments et d'intervenir
de manière particulière dans la rédaction de ces accords
pour affiner l'un et l'autre, selon les priorités et les besoins de
l'entreprise. Bien qu'il existe des paramètres standards qui constituent
des voies obligatoires à parcourir pour leur formalisation, normalement
déterminées par un système législatif
structuré et très complexe, les parties ont la liberté
d'envisager des aménagements particuliers à leur situation.
La
loi reste la référence fondamentale pour limiter les
dérives de la pratique et essayer d'intervenir efficacement dans la
réglementation de certaines des conventions qui, selon le cas seront
soumises à des contraintes de communication ou de formalisation
prédéterminées par le cadre normatif spécifique. En
effet, les sociétés cotées sur les marchés
réglementés, se doivent de respecter des protocoles
préétablis par la commission des opérations de Bourses et
de valeurs française ou par la Co.N.Sob italienne.
De même, pour certains pactes bien qu'insérés
dans le cadre de sociétés non-cotées, au vu de leurs
conventions et du niveau d'ingérence que celles-ci présentent par
rapport aux clauses statutaires, la loi leur impose des formes de communication
ou de formalisation prédéterminées.
L'étude a relevé que les obligations imposées aux
premières peuvent avoir des conséquences directes sur la
validité du pacte, tant
est ce qu'on ne parle pas d'efficacité relative, mais
plutôt de nullité de l'acte-même. Pour les deuxièmes
l'efficacité de l'accord reste variable entre les parties et ressent
d'une nullité relative face aux tiers au pacte, à moins que
celui-ci ne soit contraire aux normes impératives et à l'ordre
public sociétaire.
Il a
été relevé en outre, que malgré les
différences d'approche tant économique, politiques, historiques
que législatives entre les deux pays pris en référence,
à l'heure actuelle, les deux ordres juridiques reconnaissent ces accords
extra-statutaires. En effet, si en France la loi a permis, par son
évolution constante, une correspondance plus importante entre la
pratique des affaires et les références juridiques, en Italie en
dépit du retard sur cet aspect, la jurisprudence et la doctrine ont
essayé de combler les manques.
Aujourd'hui surtout à cause de l'harmonisation communautaire du droit
sociétaire, bien que les juges Italiens se montrent moins disponibles
face à une reconnaissance de ces conventions par rapport à la
jurisprudence française, des avancées importantes ont
étés effectuées. En effet, la position plus en retrait de
la jurisprudence italienne relève, de nos jours, plus du poids de la
tradition, de la culture doctrinale et de la difficulté d'effectuer un
choix législatif systématique et structurel, homogène et
cohérent aux implications politiques, sociales et économiques,
fondamentales pour la restructuration globale du système
sociétaire.
Malgré les règles très rigides imposées aux
sociétés cotées, surtout pour ce qui concerne les pactes
aménageant les statuts par rapport à l'organisation et à
la gestion effective du pouvoir à l'intérieur des organes
sociétaires, dans tous les autres cas les normes et les jurisprudences
actuelles françaises et italiennes acceptent d'envisager a priori
positivement la validité des accords extra-statutaires. Cela veut dire,
que les conventions intervenant prioritairement sur les dynamiques
spécifiques concernant la gestion du capital social paraissent moins
inquiéter les législateurs et les juges.
Il paraît
acquis que des clauses afférentes aux conditions de retrait et de sortie
des actionnaires ou à la dilution du capital, ainsi que celles
concernant les droits de l'associé le plus favorisé et la clause
de préemption peuvent se définir normalement de manière
à ne pas perturber structurellement et fondamentalement les
équilibres déterminés par les statuts, surtout pour ce qui
concerne la répartition du pouvoir et l'administration de celui-ci. Ce
fait, permet à ces clauses d'être moins soumises à l'a
priori négatif de la jurisprudence, comme si les aménagements
touchant prioritairement la gestion économique de la
société, ne
pouvaient pas emporter les mêmes conséquences que
celles intervenant dans l'organisation du pouvoir.
On se rend
compte que tous les accord afférents prioritairement et plus directement
l'exercice du pouvoir, tels que les conventions de vote et les syndicats de
vote ou de bloc relatifs, créent plus de problèmes et
soulèvent plus d'inquiétude. La philosophie juridique des deux
pays paraît, de ce point de vue, homogène et uniforme et uniforme
et ce, indépendamment de certains décalages en terme concernant
les diverses formulations normatives françaises et italiennes.
Les
deux droits en présence se préoccupent plus d'envisager un cadre
normatif strict et réglementé, face à certains pactes
extra-statutaires, qui a priori sont considérés intervenir de
manière parfois trop invasive, par rapport aux normes impératives
établies dans les statuts et au principe de protection des
catégories retenues les plus faibles dans le cadre sociétaire,
dans la gestion du pouvoir. Cet élément prioritaire pourrait, par
lui même, avoir des répercutions importantes sur les
équilibres sociétaires allant jusqu'à conditionner
activement la gestion du capital social.
Cette
façon d'envisager la problématique est ressentie de
manière forte dans le régime spécifique des
sociétés cotées, dans lesquelles la
dématérialisation du capital des actions a effectivement
accentué le rôle fondamental du pouvoir sur la gestion du capital.
Prenant en compte les dynamiques présentes dans le monde des affaires,
il serait possible d'en convenir ainsi, si effectivement la puissance
financière de l'actionnariat qui détient le pouvoir pouvait
être complètement détachée de la manipulation de
celui-ci. C'est-à-dire, s'il était possible d'envisager un
pouvoir majoritaire même avec une possession minoritaire du capital
social.
Il n'est normalement pas pensable d'influencer de manière
déterminante la politique et la gestion du pouvoir sociétaire, en
détenant uniquement une cote-part minoritaire du capital social. Cela
signifie, que selon la quantité effective d'actions détenues et
selon la catégorie spécifique de celles-ci, on peut imaginer
réellement quelle sera la proportion disponible à l'actionnaire
pour intervenir dans le cadre décisionnaire de la structure sociale.
Finalement, dans la pratique des affaires le rôle et l'importance de ces
deux éléments se retrouvent inversés, par rapport à
ce que l'on retrouve comme priorités
« législatives ».
Une
conséquence évidente de cette inversion structurelle est le fait,
que les normes en la matière, dans les deux ordres juridiques
étudiés, se concentrent essentiellement sur la définition
du régime des pactes extra-statutaires gérant le pouvoir des
sociétés cotées sur les marchés
réglementées par voie déductive, en application du cadre
législatif principal. A la pratique jurisprudentielle et à
l'analyse doctrinale, le rôle d'en relever les éléments
communs et divergents. De plus, le cadre normatif ne sera fixé, par des
lois spécifiques, que pour ce qui concerne les sociétés de
capitaux.
En dehors
de ces sociétés de capitaux, les lois n'interviennent pas de
manière directe sur le régime de ces conventions, en touchant
presque exclusivement les aspects rattachés principalement à la
gestion du pouvoir à l'intérieur des organes sociétaires.
On dirait presque que les législateurs français et italiens n'ont
pas voulu se confronter directement à la question de la gestion des
équilibres financiers, en préférant intervenir sur un
autre front.
Cette
ligne directrice des normes régissant la matière, trace une
frontière qui d'un côté laisse entrevoir un domaine
très étroit et de l'autre offre d'amples marges de manoeuvre pour
toutes les autres réalités hétérogènes qui
composent le monde des affaires. Mais cela signifie aussi, que beaucoup de
choses sont laissées dans l'incertitude et que les actionnaires d'une SA
non cotée ne trouveront pas de réconfort dans les lois mais
peut-être et plutôt dans les évolutions doctrinales et
jurisprudentielles.
Il en
reste pas moins, que dans la pratique, sans capital on ne peut détenir
le pouvoir et que la typologie du capital détenu est essentielle pour
qualifier la proportion et l'influence de pouvoir qu'un actionnaire a à
l'intérieur du domaine sociétaire.
La position législative est tout à fait
compréhensible, car dans les sociétés de capitaux les
dynamiques rattachées à la gestion et l'organisation du pouvoir
sont essentielles pour arriver à déterminer qui effectivement
assume « les responsabilités » de la gestions
sociale, laquelle aura des répercussions évidentes sur le capital
et sur les choix stratégiques de la société, par rapport
à ses investisseurs.
De
là, toute la question afférente au principe de la
démocratie qui devrait régir les rapports sociétaires, en
respectant la pleine liberté d'expression du vote en assemblée.
Principe qui ne peut pas se concrétiser dans la réalité
des dynamiques sociales, car considérer le système majoritaire de
prise de décisions en assemblée, comme un mécanisme
démocratique, ne peut être qu'une illusion. Sur le même
paradigme d'interprétation, s'insère aussi toute la
problématique
concernant la protection de l'actionnaire plus faible,
normalement correspondant au minoritaire et la nécessité
d'envisager le respect fort, de l'ordre public sociétaire et des normes
impératives généralement contenues dans l'acte social
statutaire.
Par
conséquent, si le droit se préoccupe plus d'encadrer la
matière selon ces priorités, effectivement
déterminées par la forma mentis juridique, qui requière la
détermination et l'identification des sujets, dans leur rôle
sociétaire; la pratique opère selon des phrases chronologiques
nécessaires et correspondantes à la logique sociétaire. Le
législateur a une fonction institutionnelle qui lui impose de se
concentrer sur les aspects afférents les dynamiques purement juridiques
de la matière, qui demandent, entre autre, la définition des
sujets « responsables », de leurs capacités
d'intervention et surtout de déterminer les limites des accords inter
partes, par rapport au respect des principes d'ordre public sociétaire.
N'y-a-t-il pas une possibilité de rencontre entre ces deux positions
qui, bien que fondamentales dans leur cadre de référence,
paraissent parallèles et par conséquent, difficilement
joignables? Il est important de rappeler que l'évolution
législative communautaire concernant les SE, réitère cette
forma mentis, car il est possible pour les minoritaires de faire entendre leur
voix si une SA décide de créer une SE holding, au cas où
l'État membre veuille en assurer une protection majeure par rapport
à celle déjà en vigueur ou encore si une SA désire
se transformer en SE, le respect de liens nés avant le transfert doit
être en quelque sorte assuré par la société
concernée. Dans ce cadre encore le législateur se
préoccupe avant tout de la manière dont le pouvoir sera
effectivement gérer et valide ultérieurement le fait que le droit
en la matière doit se soucier avant tout de préserver les plus
faibles d'un « abus de pouvoir » de la part de ceux qui le
détiennent. Aucune mention n'est faite même indirectement de
l'évaluation éventuelle des répercussions importantes que
ces modifications peuvent générer dans le domaine des
équilibres financiers sociétaires. Peut-on alors imaginer, que si
l'on assure la protection des minoritaires en ciblant comme objet de l'action
le pouvoir, indirectement, des répercussions sur les
éléments financiers correspondant sont inévitables?
En définitive,
il s'agit de deux préoccupations différentes. Les actionnaires et
surtout les minoritaires, bien que conscients de l'importance de la
qualité de l'exercice du pouvoir, savent que la rentabilité de
leurs investissements ne peut être assurée que par un groupe
compétant, dirigeant
stratégiquement la société de façon
efficace et ce, indépendamment du niveau de protection des lois.
L'aspect législatif a pour eux son importance, car la loi
prévient les actions abusives du pouvoir, ce qui représente une
sécurité indéniable. Les actionnaires minoritaires savent
aussi que leur position les empêche de facto d'intervenir au-delà
de certaines limites.
Il s'agit donc de
choisir, si l'on veut être minoritaire tant dans les droits et les
obligations que dans les risques et enjeux financiers correspondants ou si l'on
préfère rentrer dans la « cour des grands »
et en assumer les responsabilités. Les principes légaux
impératifs jouent un rôle de support et d'aide face aux
inquiétudes des minoritaires appelés à jouer les seconds
rôles dans l'actionnariat.
Il n'y a donc aucune
opposition, mais des priorités différentes, tout à fait
légitimes d'un côté comme de l'autre et qui ne peuvent
être dissociées. On pourrait conclure alors, que le droit et la
pratique des affaires voyagent sur une même ligne, se préoccupant
l'une et l'autre d'aspects différents, mais complémentaire et
selon les circonstances hiérarchiquement différents, en assumant
des valeurs et des rôles inversés.
Ce qui reste
regrettable est le fait, que s'agissant du régime juridique des pactes
d'actionnaires, la jurisprudence, tant en droit français qu'en droit
italien, soit souvent myope, et se limite souvent aux aspects plus formels que
substantiels du rapport contractuel. Ce qui donne l'impression que la loi est
parfois très éloignée des vrais problèmes de cette
pratique des affaires, en se cantonnant à réglementer le jeu du
pouvoir, sans approcher de plus prêt les vraies questions
stratégiques. Les minoritaires désirent être
préservés des manipulations frauduleuses du pouvoir et augmenter
ainsi leur protection face aux majoritaires, mais en tenant compte du fait que
celle-ci engendre des effets bien plus génants que de limiter leur
capacité à intervenir sur la gestion sociétaire, qui est
en elle même déjà réduite par leur position
naturelle de minoritaires.
S'il est certain que
celui qui détient majoritairement des parts de capital social puisse
intervenir plus directement at aisément dans les choix
stratégiques de la gestion du pouvoir, il ne l'est pas, que celui qui
est minoritaire dans le partage de l'actionnariat puisse
récupérer une partie de son désavantage uniquement
grâce à des dispositions législatives, sans trop se soucier
des effets réels que celles-ci auront sur sa possibilité
effective d'intervenir dans l'organisation et la gestion du capital social.
Les pactes
d'actionnaires peuvent être envisagés comme des moyens
supplétifs qui, dûment aménagés et correctement
établis, peuvent concrétiser le désir légitime des
minoritaires, tout en respectant leur position et finalement sans
dénaturer le rôle spécifique de la majorité. Est-il
souhaitable que les lois aillent plus loin? Est-ce nécessaire que le
droit s'immisce dans des domaines qui, selon une vision réaliste,
devraient être laissés à la définition des
règles libérales du marché et de son organisation
structurelle, telle que nous la concevons dans nos régimes
économiques occidentaux?
Il est certain que
trop de lois, trop de réglementation peuvent amener à
l'étouffement de la liberté de choix et du désir à
l'autodétermination des parties. En revanche, il serait probablement
souhaitable que les législateurs français, italiens, mais aussi
communautaire fassent un effort de concrétisation du droit. Il est
possible d'envisager une évolution législative plus conforme aux
souhaits réels des actionnaires et pas uniquement des minoritaires, en
recadrant le système législatif de manière à
prendre en compte de façon plus tangible et directe les dynamiques
présentes dans la gestion et l'organisation du capital social. Cela
passe probablement par une définition nouvelle des modalités et
des principes afférents la gestion du pouvoir sociétaire.
En
attendant, les pactes d'actionnaires ont encore un avenir prometteur devant
eux, car leur intervention permet effectivement de mitiger ces contrastes et de
faire en sorte, que ces deux positions, apparemment inconciliables, puissent se
conjuguer et devenir complémentaires.
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