Les CPE présentent un certain nombre de
difficultés dans leur mise en place et leur suivi, tenant
essentiellement à leur complexité technique ainsi qu'à
leur manque de prévisibilité sur de longues durées.
En premier lieu, la définition d'une
situation de référence constitue un
point sensible dans la mise en place d'un CPE. Cet état sert par la
suite de base au prestataire pour concevoir, proposer, chiffrer et
évaluer les engagements de performance énergétique.
Au préalable de sa contractualisation, cette situation
requiert une connaissance et un certain nombre d'informations en amont,
impliquant généralement une assistance forte.
La finesse de cette définition dépendra de la
présence ou non de négociation et de dialogue avec les
prestataires selon que le pouvoir adjudicateur a recours à un dialogue
compétitif ou un simple appel d'offre.
Cette situation est élaborée en fonction des
informations réunies par le maître d'ouvrage et
communiquées au prestataire, discutées ou non entre les parties
selon la procédure choisie. Afin de disposer des informations
nécessaires, un dossier de consultation doit être adressé
aux entreprises, portant sur l'ensemble des caractéristiques du
bâtiment à la date donnée.
Une fois établie la situation de
référence, reste pour les prestataires potentiels à
proposer une évaluation chiffrée des économies
d'énergies réalisées sur la durée du projet, et au
maître d'ouvrage d'évaluer la fiabilité de ces
estimations.
Or les gains financiers prévisionnels dépendent
non seulement des quantités d'énergie économisées
mais sont proportionnels au poids des charges énergétiques.
D'où l'importance de l'évolution du prix des
énergies sur la durée du contrat, évolution qui
s'avère complexe à mesurer sur le long terme. Les perspectives
actuelles misent globalement sur une inflation importante du prix des
énergies qu'il s'agisse de l'électricité ou du gaz.
Ces estimations ont pour conséquence de favoriser les
CPE : leur financement s'en trouve amélioré et les gisements de
réduction de consommation d'énergie se reconstituent
progressivement par l'effet mécanique de la hausse des prix.
L'inflation de l'énergie constitue une variable
fondamentale lors de la modélisation des objectifs de performance
énergétique. Cependant, pour de longues durées, il ne
s'agit que d'hypothèses tendancielles, qui du point de vue des
établissements financiers intervenant en tant que prêteur sur les
CPE, présentent un risque non négligeable dans la
rentabilité du projet et la capacité pour le prestataire de
rembourser son emprunt de manière continue dans le temps.
En outre, les économies d'énergies, si
importantes soient elles, ne permettent généralement pas de
couvrir les investissements de rénovation.
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Cette idée selon laquelle le CPE permet de financer les
investissements par les économies, largement répandue chez un
grand nombre de maîtres d'ouvrages, s'est avérée impossible
en pratique, même dans le cas où n'est prise en compte que la part
des travaux dédiée à l'amélioration de la
performance énergétique.
L'une des conclusions du rapport d'Olivier Ortega sur les
CPE,7 est que rétrospectivement, chaque CPE présente
son économie propre en fonction des bâtiments auxquels il
s'applique, l'utilisation qui en est faite, les objectifs à atteindre
etc.
Une autre limite des CPE dans leur application tient au
comportement des usagers. Ce facteur vient nettement complexifier ce type de
contrat. En effet, qui du prestataire ou du maître d'ouvrage peut
garantir que les usagers adopteront un comportement respectueux de
l'environnement ? En ce sens, le Centre d'analyse stratégique (CAS) a
récemment été saisi sur le phénomène de
l'« effet rebond », défini comme « l'annulation des gains
de performance énergétique obtenus par la diffusion du
progrès technique, du fait d'une utilisation accrue des ressources
»8.
La prise en charge de « ce risque opérationnel
» nécessite par l'un ou l'autre des cocontractants d'être
identifié au préalable puis inscrit dans le contrat afin
d'éviter au maximum tout contentieux lorsque le projet entre en phase de
maintenance.
Afin de prévenir ces contentieux, il est possible de
définir un volet sensibilisation au contrat, l'une des parties
s'engageant à former les usagers aux bonnes pratiques pour une
utilisation appropriée des bâtiments.
Le CPE apparaît donc comme un contrat complexe, non
seulement dans sa rédaction mais aussi dans son application. De plus,
cet outil relativement peu médiatisé ne semble pas
bénéficier du soutien législatif nécessaire
à sa généralisation parmi les pouvoirs adjudicateurs.