I.2.4.2- L'EXCLUSION BANCAIRE
L'exclusion ici renvoie au fait que la banque ôte
à l'entreprise toute possibilité d'accès à ses
différents services. S'agissant particulièrement du crédit
bancaire, la banque peut refuser d'accorder un crédit à une
entreprise ; mais, elle peut tout aussi bien lui accorder un crédit
inférieur au montant demandé. On parle alors de rationnement au
sens de STIGLITZ et WEISS (1981). Le terme rationnement est fréquemment
utilisé dans la littérature économique. Il signifie que la
banque refuse de prêter à un seul emprunteur potentiel aux
conditions demandées (de quantité et de taux). Dans cette
optique, le marché de crédit peut être
schématisé comme suit :
14 Il faut cependant noter que dans la pratique, l'application
des modèles de score n'est pas aussi « implacable ». En effet
lorsque le score du demandeur n'est pas aussi éloigné du seuil,
la banque va souvent réexaminer l'ensemble des caractéristiques
du demandeur à travers une méthode plus qualitative avant de
prendre la décision finale.
Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
Graphique 2: Le rationnement de
crédit
Volume de crédits
Rationnement de crédit à l'équilibre
Demande 2
offre
Demande 1
Taux d'intérêt nominal
i *
Source : EBER, N. (2004)
Le graphique ci-dessus appelle le commentaire suivant :
lorsque la courbe de la demande coupe celle de l'offre, il n'y a pas de
rationnement. Si par contre, la courbe de demande ne coupe pas celle de
l'offre, il y a rationnemnt du crédit et à l'équilibre, le
taux d'intérêt d'équilibre est fixé à i*. Les
emprunteurs qui ont été rationnés (c'est-à-dire
exclus) ne peuvent pas emprunter, même s'ils manifestent leur
volonté de payer plus que le taux d'intérêt du
marché. Dans ce cas, le taux d'intérêt qu'un entrepreneur
accepte de payer agit comme moyen de discrimination car seules les entreprises
dont les projets sont à haut risque accepteraient d'emprunter à
de telles conditions. De plus, le rationnement, lorsqu'il s'établit
touche de manière aléatoire, les emprunteurs ayant exactement les
mêmes caractéristiques du point de vue de la banque.
Mais d'une façon générale, ce sont les
petits emprunteurs (les PME par exemple) qui sont exposés à la
pratique de l'exclusion bancaire parce que justement, leurs
caractéristiques s'y prêtent. JAPPELLI (1990) a mis en
évidence les raisons qui poussent les banques à rejeter les
demandes de financement des PME. Il montre à cet effet que les PME
exclues sont celles qui ont soit une mauvaise réputation (endettement
élevé ou non remboursé dans le passé, soit une
mauvaise situation financière (revenu insuffisant, richesse
insuffisante) et / ou professionnelle (absence d'emplois stables ...etc). il
précise en outre que, parmi les demandes de crédit
rejetées, on retrouve une forte proportion de chômeurs et de
femmes. De plus, il démontre que l'âge est un critère
fondamental puisque l'estimation statistique qu'être agé d'un an
de plus réduit, en moyenne la probabilité d'être
rationné de 0.5%. Par ailleurs, le
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Relation Banque-Entreprise et croissance économique
au Cameroun
statut matrimonial du promoteur joue également un
rôle important puisque les célibataires ont une probabilité
de rationnement supérieur à 3.4% par rapport aux promoteurs
mariés. JAPPELLI montre également qu'il existe une certaine
discrimination raciale sur les marchés de crédit dans la mesure
où, être blanc réduit la probabilité d'être
rationné d'environ 5.4% (toute chose égale par ailleurs). Ces
résultats de JAPPELLI sont conformes à ceux obtenus
antérieurement par d'autres auteurs comme HAYASHIP (1985) et ZELDES
(1989). Ces deux auteurs ont trouvé que les promoteurs d'entreprises les
plus rationnés sont les individus jeunes, qui épargnent peu et
qui disposent de peu de richesse. Bien plus, CROOK (1999) a confirmé la
diffulté pour certaines minorités à acceder au
crédit bancaire.
L'analyse ci-dessus montre clairement que les problèmes
d'asymétrie de l'information (antisélection ; aléa moral)
peuvent être résolus à travers la pratique de la
sélection de la clientèle et l'exclusion bancaire (le
rationnement).
Toutefois, les économies d'échelle peuvent
être évoquées ici comme une solution relativement
importante.
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