II.7. ÉTAT DES OUVRAGES D'APPROVISIONNEMENT EN
EAU POTABLE AU QUARTIER I À BANGANGTE
Le quartier I à Bangangté souffre d'un manque en
eau potable. Les Unités de Planification Participatives (UPP) y sont
absentes. La compagnie nationale de distribution de l'eau reste elle aussi
impuissante face à ce problème. Elle n'arrive pas à
approvisionner la population en eau potable de manière continue. Et ces
dernières se plaignent de coupures fréquentes (figure 10).
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Source : Enquête de terrain, Mai 2012
Figure 10: Fréquence de coupures
d'eau au quartier I
Le débit nominal de la ville de Bangangté
c'est-à-dire, la quantité d'eau à offrir quotidiennement
aux abonnés est de 1 296 m3 d'eau/jour. Mais la
quantité offerte par la CDE n'est que de 593 m3/jour ;
d'où un déficit de 703 m3 d'eau/jour. Cette
défaillance est due à :
- la vétusté du matériel qui n'a pas
été remplacé depuis plusieurs années ; il s'agit
des équipements de pompage, de stockage et de refoulement de l'eau ;
- l'absence dans les centres du matériel de rechange
;
- aucun des deux châteaux ne fonctionne normalement. Il
s'agit des châteaux de 800 m3 placé près du
dépôt des brasseries et celui de 600 m3 placé
près de Penko Hôtel. Cette situation est due à l'absence de
maintenance qui est la résultante de l'absence des techniciens
qualifiés. Le mauvais état des infrastructures est aussi
causé par l'incapacité de la CAM WATER à assurer les
coûts de remplacement et de pérenniser les installations (photos 5
;6 ;7) ;
- la station de captage de Banékané souffre du
problème de pompe de refoulement. Elle ne fonctionne qu'avec une seule
pompe ce qui rend difficile l'approvisionnement permanent du recevoir (photo
8).
Tableau 3: Durées des coupures d'eau au
quartier I
Durée des coupures
|
Effectif
|
Pourcentage
|
Quelques heures par semaine
|
2
|
1
|
Une fois par semaine
|
6
|
3
|
Quatre fois par semaine
|
134
|
67
|
Six fois par semaine
|
58
|
29
|
Source : Enquête de terrain, Mai 2012
Photo 6: Réservoir de stockage de 800
m3 hors usage Photo 7: Station de captage de
Banékané
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CLICHES TOUMGUEU, Mai 2012
Photo 8: Bâche de stockage
vétuste Photo 9: Unique pompe de refoulement
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II.8. LES FACTEURS ANTHROPIQUES DUS LA CROISSANCE
DÉMOGRAPHIQUE
La population de la ville de Bangangté est
passée de 18 610 habitants en 1987 à 28 011 habitants en 2005 et
elle était de 31 847 habitants en 2010. Le quartier I quant à lui
abrite une population d'environ 4 769 habitants (3ème RGPH).
L'amélioration des ouvrages hydrauliques n'a pas suivi ce boom
démographique.
II.8.1. Les facteurs anthropiques
II.8.1.1. Les aménagements agraires et
mentalités paysannes
Cette région d'occupation ancienne a connu des
transformations dans son agriculture. Bâtie sur un système
bocager, elle est caractérisée par un système de billons
et de sillons en damiers avec Openfield. On constate que le paysage
d'aujourd'hui s'est beaucoup dégradé par rapport à celui
qu'on voit sur les photos de 1964. Les produits cultivés : patates,
maïs, igname, arachide, manioc sont néfastes pour le sol lorsqu'il
n'y a aucune technique antiérosive comme le bocage ou autre chose. Selon
E.ROOSE : 1977 les plantes vivrières sont parmi les moins protectrices
du sol, ainsi les effets de l'érosion sont très poussés.
À travers cela, il faut ajouter que l'évolution de la
dégradation actuelle du sol est due à ces plantes à cycle
végétatif court ; ainsi pour le maïs et l'arachide,
après la récolte en juillet les pluies abondantes d'août,
de septembre et d'octobre balaient le sol et accroissent la turbidité
des cours d'eaux.
Il convient aussi de noter que l'érosion et le
ruissellement dépendent largement de la proportion du sol non couvert
par la végétation avant les grosses pluies. Nous retiendrons ici
l'exemple du maïs, des arachides et du manioc.
L'angle de chute d'une goutte de pluie est inférieur
à 25°. Il atteint exceptionnellement 45° lors de certaines
tornades. L'architecture des plantes (hauteur du feuillage et disposition en
gouttière) concentre ou disperse les gouttes. La vitesse de recouvrement
du sol par le maïs et l'arachide est très lente, on les appelle
à cet effet « plantes dégradantes » (E.ROOSE) parce
qu'elles recouvrent mal le sol a des premières pluies qui sont d'une
violence inouïe. L'architecture des plantes est aussi l'un des facteurs
qu'exploite l'érosion. Ainsi E. ROOSE a montré que le maïs
est une «plante entonnoire» : il se concentre le long de la tige,
déchaussent les racines et cisaillent le billon provoquant la naissance
des rigoles qui évoluent en ravines.
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Pour le cas de l'arachide et du manioc, leur voûte
foliaire en « parapluies » provoque une distension des gouttes de
pluies interceptées par les feuilles ; leurs tiges sont des barrages qui
freinent l'écoulement des eaux tandis que les racines pivotantes
favorisent leur infiltration.
Ceci montre clairement le rôle que ces pratiques
culturales jouent sur l'infiltration des eaux de surfaces vers la nappe. Ce
rôle grandit en fonction de la pente. S.MORIN 1979 affirme ainsi que
crues et ruissellements semblent plus forts sur le sol issu de socle que sur
ceux de la couverture basaltique : d'où l'évolution plus rapide
des terroirs de la région de Bangangté qui a environ 85% de sa
surface couverte par le socle.
Les paysages actuels de la région doivent aussi leur
évolution à l'introduction et la fixation des pasteurs Mbororo en
quête de pâturage. Ainsi J.L.DONGMO 1984 montre que la fixation des
pasteurs Mbororo engendre dans le voisinage immédiat du campement ou du
village une dénudation presque complète du sol ne laissant
subsister que quelques touffes de graminées incapables de s'opposer au
ruissellement. La concentration des drailles dues au piétinement
canalise le ruissellement et entraine la descente en masse des sols du versant.
Les abords des points d'eau, en dehors de ceux du campement, sont aussi des
points importants de dégradation. À Bangangté, les
pâturages disparaissent par la poussée excessive du reboisement
des Eucalyptus.
Par ce reboisement d'Eucalyptus, l'homme imprime plus
profondément sa marque sur le paysage. Comme on le constater à
l'entrée et à la sortie de Bangangté, un réseau
important d'Eucalyptus qui occupe les plantations entières. Cette
plante, à beaucoup d'égare, a des effets néfastes sur le
sol car, du fait de ses exigences en eau, elle pompe l'eau du sol provoquant
l'assèchement et l'induration du sol en saison sèche. Cet
assèchement par l'Eucalyptus provoque la baisse du niveau des sources et
des nappes dont les variations diurnes sont très importantes. En saison
sèche la nuit, du fait du pompage par les Eucalyptus, la nappe ne peut
plus se recharger suffisamment et alors elle n'atteindra plus son niveau de
base. Si la saison sèche se prolonge, comme c'est le plus souvent le
cas, le manque d'eau devient très évident.
L'on ne peut donc s'empêcher de penser que la
sécheresse climatique actuelle à Bangangté doublée
d'une sècheresse pédologique et caractérisée par un
système ouvert est l'une des causes du problème d'accès
à l'eau dans cette région en général et au quartier
I en particulier. Les sols y sont presque épuisés par rapport aux
autres régions Bamiléké. Donc les facteurs anthropiques
dus à la croissance démographique sont des causes à ne pas
négliger
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dans la recherche des solutions à l'approvisionnement
de la ville de Bangangté en eau potable8.
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