ANNEXES
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Annexe n° 1
AVIS DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE
DU 20 ET 21 MARS 2013 RELATIF A LA «
MICROKINESITHERAPIE »
AVIS - CNO n° 2013-02 DEONTOLOGIE AVIS DU
CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DU 20 ET 21 MARS 2013 RELATIF A LA «
MICROKINESITHERAPIE »
La « micro-kinésithérapie » constitue
une méthode non éprouvée qui ne bénéficie
d'aucune reconnaissance légale, qui fait appel à des
éléments physiopathologiques non démontrés tels que
« la mémorisation tissulaire de l'agression » ou « les
mécanismes d'autocorrection ». Elle ne fait pas non plus l'objet
d'une reconnaissance par le conseil national de l'ordre des
masseurs-kinésithérapeutes.
La « micro-kinésithérapie »
apparaît ainsi comme une technique non conventionnelle, qui pourrait
ouvrir la voie à une dérive thérapeutique.
L'article R.4321-87 du code de la santé publique
dispose que le masseur-kinésithérapeute ne peut conseiller et
proposer au patient ou à son entourage, comme étant salutaire ou
sans danger, un produit ou un procédé illusoire ou insuffisamment
éprouvé. Le même article proscrit toute pratique de
charlatanisme.
Par ailleurs l'article R.4321-80 du code de la santé
publique prévoit que :
« Dès lors qu'il a accepté de
répondre à une demande, le masseur-kinésithérapeute
s'engage personnellement à assurer au patient des soins consciencieux,
attentifs et fondés sur les données actuelles de la science
».
En outre, l'article R.4321-65 CSP dispose que « le
masseur-kinésithérapeute ne divulgue pas dans les milieux
professionnels une nouvelle pratique insuffisamment éprouvée sans
accompagner sa communication des réserves qui s'imposent. Il ne fait pas
une telle divulgation auprès d'un public non professionnel ».
Nous demeurons donc réservés sur la pratique,
par nos confrères, de la
«micro-kinésithérapie».
RÉFLEXION À PROPOS DE L'AVIS DU CNO
N° 2013-02
Comme son nom l'indique, l'Ordre des
Masseurs-kinésithérapeutes a été mis en place pour
veiller (surveiller) le bon exercice de cette profession. Ce bon exercice est
détaillé dans le code de déontologie que tout
kinésithérapeute se doit de respecter, et c'est donc à
juste titre que le Conseil National mentionne certains articles qui peuvent
servir de référence pour, non seulement mettre en garde, mais
aller jusqu'à interdire « tout produit ou procédé
illusoire, insuffisamment éprouvé ».
Cet article n'est pas spécifique de la
déontologie des masseurs-kinésithérapeutes, mais
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appartient au Code de la Santé Publique qui recommande
que tout acte thérapeutique repose sur une médecine basée
sur des preuves (EBM), c'est ce que nous avons essayé de faire en
micro-kinésithérapie depuis sa création en 1983. Il suffit
pour cela de consulter la liste des travaux et des études
effectuées, mais la publication de ces études dans des revues
spécialisées reste une difficulté à
résoudre.
Mais pour bien situer la micro-kinésithérapie
par rapport à la kinésithérapie, il est important de
rappeler un certain nombre de points qui sont essentiels :
1° La micro-kinésithérapie ne remplace pas
la kinésithérapie conventionnelle. Elle se veut
complémentaire, ce qui signifie qu'elle essaie d'apporter quelque chose
de plus qui peut s'ajouter aux traitements conventionnels. C'est pourquoi elle
fait appel à des données scientifiques qui ne sont pas (ou pas
assez) pris en compte par la kinésithérapie conventionnelle. La
micro-kinésithérapie se base sur les mécanismes
d'auto-réparation ou autocorrection qui sont communément admis
par le monde scientifique en ce qui concerne les capacités propres aux
êtres vivants. Tous les mécanismes immunologiques, ainsi que ceux
qui se manifestent dans les périodes de cicatrisation, de calcification,
etc., sont des mécanismes d'auto-poïèse, c'est-à-dire
effectués par l'organisme lui-même. Et ce n'est pas parce que
cette capacité ne s'est pas exprimée après une agression
que, pour autant, elle n'existe plus.
Le but de la micro-kinésithérapie est d'essayer
de comprendre pourquoi elle ne s'est pas manifestée et de chercher
à la remettre en route. Il s'agit d'hypothèses de travail, mais
qui paraissent se confirmer au dire des patients traités et des
évaluations effectuées.
2° La micro-kinésithérapie n'est pas, pour
le moment, prescrite par ordonnance médicale et n'entre donc pas dans la
liste des actes conventionnés. Elle n'est proposée qu'en
réponse à une demande du patient qui vient chercher une
thérapie complémentaire par rapport à une symptomatologie
qui ne répond pas (ou pas assez) aux traitements conventionnels.
Ici, on peut reprendre l'article R4321-80 du Code de la
Santé Publique qui mentionne que :
« Dès lors qu'il a accepté de
répondre à une demande, le masseur-kinésithérapeute
s'engage personnellement à assurer au patient des soins consciencieux,
attentifs et fondés sur les données actuelles (ou nouvelles ?) de
la science ».
3° La micro-kinésithérapie, dans ce sens,
rejoint le Rapport de l'Académie Nationale de Médecine (ANM)
du 5 mars 2013 (15 jours avant l'avis du CNO) sur les thérapies
complémentaires.
Dans son introduction, ce rapport définit très
exactement la demande du public pour ces thérapies
complémentaires :
« Le comportement du public vis à vis de la
médecine est ambivalent : convaincu et même séduit par les
avancées de la recherche, il est en même temps déçu,
et parfois révolté, par les nombreux domaines où les
résultats des traitements sont insuffisants, ou encore inquiet des
inconvénients dont leurs effets sont assortis. C'est souvent dans cet
esprit de relative défiance vis-à-vis de la médecine que
les patients se tournent, sans en informer leur référent
médical, vers des pratiques non conventionnelles dont les vertus leur
ont été vantées par les multiples sources d'information
non contrôlée qu'offre notre société. Le recours
à ces pratiques est aujourd'hui tel que leur diffusion a pris une
étonnante extension : il a été avancé que
près de 4 français sur 10 leur font appel... ».
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Ce rapport décrit également les domaines dans
lesquels ces thérapies complémentaires interviennent, mentionne
les thérapies corps esprit avec les touchers thérapeutiques, ou
les manipulations de l'appareil locomoteur avec les massages
thérapeutiques. La micro-kinésithérapie peut très
bien trouver sa place dans l'une ou l'autre de ces rubriques.
Enfin, ce rapport émet des recommandations :
· à l'adresse des usagers :
- d'en éviter l'usage en l'absence d'un diagnostic
médical
- de ne les accepter qu'avec une extrême prudence comme
traitement de première intention
- de ne pas y recourir lorsque la présentation clinique
est inhabituelle ou persistante en l'absence
d'un avis médical.
· et à l'adresse des hôpitaux et
établissements de soins :
- de ne confier leur mise en oeuvre qu'à des
médecins, sages-femmes ou professionnels de santé travaillant
sous contrôle médical, tous préalablement formés
à cet effet ;
- d'évaluer régulièrement ces pratiques
;
- d'exploiter dans toute la mesure possible les
résultats de ces traitements dans le cadre d'essais cliniques, uni ou
multi centriques ; de déposer un protocole d'essai pour tout projet dans
une indication inhabituelle ou controversée...
4° La micro-kinésithérapie cherche un cadre
légal pour pouvoir être proposée aux personnes qui en font
la demande. Aussi, les recommandations faites par l'ANM semblent plus
appropriées pour évaluer son impact que les déclarations
très restrictives émises par le CNO.
C'est pourquoi, après avoir un peu épuisé
les possibilités d'évaluations qu'il était possible de
faire en cabinet libéral, nous attendons et espérons des
propositions d'essais cliniques, d'abord sous la forme la plus simple de
pré-évaluation sur une dizaine de patients, par exemple, pour
déterminer si une tendance positive semble apparaître. Et ensuite,
si les pré-évaluations mettent en évidence des
possibilités d'amélioration, réaliser des protocoles plus
complexes qui peuvent s'effectuer sans risque ni perte de chance en ajoutant
simplement, par exemple, une séance de
micro-kinésithérapie à une groupe traité pour
évaluer son impact par rapport à un groupe témoin qui
reçoit le même traitement sans micro-kinésithérapie
(étude multi centrique).
Des pourparlers sont déjà engagés avec
des départements universitaires qui se spécialisent dans les
thérapies complémentaires, mais nous espérons pouvoir
dialoguer et coopérer avec beaucoup d'autres structures qui seraient
intéressées par ces recherches puisqu'il y a des praticiens de
cette technique disponibles pour cela sur pratiquement tout le territoire
français.
Daniel GROSJEAN
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