REPUBLIQUE DU CAMEROUN
*********
|
REPUBLIC OF CAMEROON
*********
|
|
|
|
MINISTERE DE
L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ********* UNIVERSITE DE
NGAOUNDERE ********* FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET
POLITIQUES ********* DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE *********
|
|
MINISTERY OF HIGHER EDUCATION ********* THE UNIVERSITY OF
NGAOUNDERE ********* FACULTY OF LAW AND
POLITICAL SCIENCES ********* DEPARTEMENT OF PRIVATE
LAW *********
|
THEME:
LE NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE
INTELLECTUELLE
Mémoire présenté en vue de
l'obtention du Master en Droit privé
(Option Droit des affaires)
Par:
ASSONJI FONGUE Franklin Kennedy
Matricule: 06A167JP
Sous la direction de :
Pr. FOMETEU Joseph
Maitre de conférences
Année académique 2013 - 2014
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Avertissement
L'Université de Ngaoundéré n'entend
donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce
mémoire, ces opinions devront être considérées comme
propres à leur auteur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Dédicace
A ma mère, Madame AJIFACK ELISE pour son amour, son
courage et son soutien indéfectible.
iv
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Remerciements
Mes premiers remerciements s'adressent à mon directeur
de mémoire, le Professeur JOSEPH FOMETEU. Sa grande expérience
d'enseignement et de recherche, sa disponibilité et ses conseils
précieux ont été autant d'encouragements. Puisse-t-il
trouver ici l'expression de ma profonde gratitude et celle de mon admiration
sincère.
Ensuite, mes remerciements vont à l'endroit de
l'ensemble des enseignants de la Faculté des sciences juridique et
politique, suivant leur poste et grade respectifs, pour les enseignements
qu'ils ont bien voulu nous dispenser.
Je tiens également à remercier ma famille,
d'avoir été, au long de cette année, une source
inépuisable et indispensable de force et d'inspiration, et de m'avoir
accordée sans relâche leur soutien. Je suis plus
particulièrement reconnaissant à la famille NTAPLI, à mon
frère ATEMKENG FONGUE Ruben Rousseau et à NOUMBA Hawa pour leur
présence et leur aide les semaines qui ont précédé
la remise définitive de ces pages.
Enfin, ces remerciements vont à l'endroit de mes amis
et camarades de classe et pour tous ceux qui, de près ou de loin, ont
contribué à l'élaboration de ce travail.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
ABR : Accord de Bangui Révisé
Al. : Alinéa
Art. : Article
Ass. Plén. : Arrêt de l'Assemblée
Plénière de la Cour de cassation
C. : Contre
Cass. : Cour de cassation
Chron. : Chronique
C. civ. : Code civil
C. com. : Code de commerce
CIP : Code de l'Industrie cinématographique
CPI: Code de la propriété intellectuelle
Cah. dr. entr. : Cahiers du droit de l'entreprise
Civ. : Arrêt de la Chambre civile ou de la Section
civile de la Cour de cassation
Coll. : Collection
Com. : Arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de
cassation
Crim. : Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de
cassation
Chron. : Chronique
D. : Dalloz ou Décret
Dr. et patrim. : Droit et patrimoine
Défrén. : Répertoire du notariat
Défrénois
Ed. : Edition
Ex. : Exemple
Gaz. Pal. : Gazette du Palais
J.-Cl. : Jurisclasseur
JO : Journal Officiel
Mél. : Mélanges
N° : Numéro
OAPI : Organisation Africaine de la Propriété
Intellectuelle
Obs. : Observations
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit
des Affaires
Op. cit. : Ouvrage précité
Ord. : Ordonnance
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
vi
P. : Page
PUAM : Presses universitaires d'Aix-Marseille
PUF : Presses universitaires de France
Rev. : Revue
RJDA : Revue de jurisprudence de droit des affaires
RJP : Revue juridique et politique
RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil
RTD com. : Revue trimestrielle de droit commercial
SA : Société anonyme
S.: Suivant
Spéc. : Spécialement
T. : Tome
V. : Voir
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE 1
Ière PARTIE: L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN A L'ENSEMBLE
DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE 10
CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU
NANTISSEMENT DES DROITS
DE PROPRIETE INTELLECTUELLE 12
Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de
propriété intellectuelle 12
Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de
propriété intellectuelle 22
Conclusion du chapitre I : 29
CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE
INTELLECTUELLE 30
Section 1 : Les préalables à la prise de
nantissement des droits de propriété intellectuelle 30
Section 2 : La finalité du nantissement 38
Conclusion du Chapitre II 45
Conclusion de la Ie partie 46
IIe PARTIE: L'IMPRECISION DES REGIMES SPECIFIQUES DE
CHACUN DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE 47
CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE
LITTERAIRE ET ARTISTIQUE 50
Section 1 : La justification de la complexité :
l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins
50
Section 2 : Le nécessaire réaménagement du
régime du nantissement du droit d'auteur 57
Conclusion du chapitre I 65
CHAPITRE II : L'IMPARFAITE SIMPLIFICATION DU
NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE INDUSTRIELLE 66
Section 1 : Le problème de la cohabitation entre l'AUS et
l'ABR 66
Section 2 : La simplification de la réalisation du
nantissement 71
Conclusion du chapitre II 77
Conclusion de la IIe partie 78
CONCLUSION GENERALE 79
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
RESUME
Traditionnellement, les biens immatériels sont
qualifiés, tantôt de biens incorporels, tantôt de
propriétés incorporelles ou intellectuelles, tantôt encore
de biens d'exploitation, la plupart de ces qualifications étant
insatisfaisantes. Pourtant, d'aucuns affirment qu'ils représentent une
richesse économique, une source de crédit fantastique pour les
débiteurs, et un gage de sécurité pour les
créanciers. Le législateur OHADA n'a pas ignoré la
portée de tels droits.
Faisant autrefois partie des éléments
facultatifs du fonds de commerce, les droits de propriété
intellectuelle, font désormais l'objet d'une réglementation
autonome. C'est l'Acte uniforme adopté le 15 décembre 2010, qui
va consacrer cette autonomisation. Seulement, cette dernière ne concerne
que le régime général du nantissement, puisque, les
régimes spécifiques font l'objet d'une autonomisation imparfaite.
Parlant justement de l'imparfaite autonomisation des régimes
spécifiques de nantissement des droits de propriété
intellectuelle, il faut souligner que les moyens d'intégration
juridiques mis en place, ne constituent pas un atout et contribuent par
conséquent à cette imperfection du nantissement.
Mots clés :
Autonomie - Biens immatériels - Crédit - Droit
d'auteur - Fonds de commerce - Garantie - Harmonisation - Nantissement -
Propriété industrielle - Propriété intellectuelle -
Sûretés - Uniformisation.
ix
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
ABSTRACT
Immaterial assets are traditionally described either as
intangible assets or as intangible or intellectual property, or else as
operating assets, but most of those terms are not satisfactory. However, some
people state that they represent a form of economic wealth, a fantastic source
of credit for the debtors, and a guarantee of safety for the creditors. And
yet, OHADA legislation seems to have not ignored immaterial assets.
Been considered for a long time as part of the facultative
elements of a business, the intellectual property rights have, from now on,
been the purpose of an autonomous regulations. It is the uniform Act, adopted
on the 15th December 2010, which have established this autonomy.
This autonomisation only concerns the general regime of the security interest,
seeing that, the autonomisation of the specific regimes of intellectual
property rights is not perfect. Talking about this imperfection, it should be
said that, harmonization and standardization of the intellectual property
rights contribute to make it more important.
Key words:
Autonomy - Business - Copyright - Credit -Harmonization -
Immaterial assets - Industrial property - Intellectual property - Security
interest - Standardization.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Epigraphe
« Depuis que j'existe, je rêve les grandeurs du
renoncement aux faux biens de ce monde et la conquête des biens
immatériels » (George SAND, Lélia)
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
1
INTRODUCTION GENERALE
2
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Le patrimoine est l'ensemble des biens et des obligations
d'une personne, envisagé comme une universalité de droit,
c'est-à-dire comme une masse mouvante dont l'actif et le passif ne
peuvent être dissociés. Si la détermination du passif d'un
patrimoine ne pose pas de problème, celle de l'actif est plus
problématique. Le problème vient de la difficulté qu'il ya
à cerner avec exactitude l'ensemble des éléments de
l'actif d'une personne. La situation n'était déjà pas
très simple autrefois, et elle se complique davantage aujourd'hui.
Pendant longtemps, en effet, on a considéré que le patrimoine des
personnes n'était constitué que des biens meubles et immeubles.
Par biens meubles, il fallait entendre ceux susceptibles d'appropriation
matérielle. La tendance s'est peu à peu renversée
après la seconde guerre mondiale. On a alors assisté à un
véritable essor de l'immatériel, au point où certains
auteurs ont estimé que « l'immatériel envahit nos vies
»1, qu'il impose partout sa présence2.
Cet état de choses se justifie par les progrès scientifiques et
techniques du siècle dernier, et de celui en cours. En ce
XXIe siècle, l'immatériel est au coeur de toutes les
préoccupations. Le patrimoine des personnes, des entreprises notamment,
est désormais composé pour une grande partie, de biens
immatériels. On part ainsi d'un patrimoine corporel, matériel
vers un patrimoine qui prend en compte l'immatériel. On assiste
d'ailleurs à une dématérialisation des échanges.
La place de plus en plus importante qu'occupe
l'immatériel dans le patrimoine des personnes (physiques ou morales),
nécessite qu'il soit désormais pris en compte dans le
recouvrement de ses créances par un créancier. L'actif
immatériel3ou incorporel4, notamment la
propriété intellectuelle vient désormais enrichir le
patrimoine, et se présente comme un bien susceptible de garantir le
crédit. Dans le contexte actuel, l'immatériel peut prendre une
valeur conséquente. A titre d'exemple, la propriété
intellectuelle représente sinon une partie substantielle, du moins la
plus importante de la valeur totale de plusieurs entreprises5. Il
faut dire que plusieurs entreprises, notamment celles en démarrage n'ont
souvent rien d'autre que les idées ou des découvertes, comme
actifs. C'est bien souvent le cas des nouvelles entreprises des secteurs de
hautes technologies et des biotechnologies en quête de financement. La
valeur de ces droits de propriété intellectuelle est, dans bien
des cas, très importante. D'après un rapport publié en
2005, les droits de propriété intellectuelle représentent
la première catégorie d'actifs sur la planète avec une
valeur de 5,5
1GAUTHIER (P. Y.), Rapport de synthèse :
in le droit et l'immatériel, Archives de philosophie du droit,
t. 43, Ed. Sirey, 1999, p.233.
2LEVY (M.) et JOUYET (J.-P.), «
l'immatériel, la croissance de demain»: Le Figaro du 9
décembre 2006.
3Il s'agit de l'actif immatériel qui est un
élément sans substance physique et ayant une valeur positive pour
l'entreprise. Mais afin de donner une connotation comptable au terme, il est
possible d'utiliser la notion d'actif immatériel.
4Les actifs incorporels sont des actifs
immatériels comptabilisables car identifiables par le prix
d'acquisition. 5SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), « la
prise de garanties en matière de propriété intellectuelle
au CANADA », LEGER ROBIC RICHARD/ROBIC, 2001,
www.robic.ca.
3
4
5
6
7
8
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
millions USD6. En outre, ils représentent
80% de la valeur des entreprises cotées7 en bourse. Dans la
même lancée, les premières marques mondiales valent 70
milliards USD chacune8. C'est dire toute l'importance que peut
revêtir les propriétés intellectuelles pour une entreprise,
car susceptibles de servir de sûreté.
Le droit des sûretés a dû évoluer
pour s'adapter aux nouveaux types de biens faisant partie du patrimoine d'un
individu, signe de son dynamisme. C'est sans doute cette adaptabilité
observée au fil du temps, qui a conduit certains, à affirmer
qu'il est un droit cyclique9. La définition de la notion de
sûreté a évolué entre l'AUS ancien du 1er
janvier 1998 et l'AUS nouveau, entré en vigueur le 15 décembre
2010. Les sûretés sont, aux termes de l'AUS ancien, les moyens
accordés au créancier par la loi de chaque Etat partie ou la
convention des parties pour garantir l'exécution des obligations, quelle
que soit la nature juridique de celles-ci. L'AUS nouveau définit la
sûreté comme l'affectation au bénéfice d'un
créancier d'un bien, d'un ensemble d'obligations, quelle que soit la
nature juridique de celles-ci et notamment qu'elles soient présentes ou
futures, déterminées ou déterminables, conditionnelles ou
inconditionnelles, et que leur montant soit fixe ou fluctuant10.
Des différentes sûretés prévues par
l'AUS, celle qui a été retenue pour les droits de
propriété intellectuelle est le nantissement. Dans le Code civil,
le terme nantissement désignait tout contrat par lequel un
débiteur rendait une chose à son créancier pour
sûreté de la dette. Lorsque la chose était
mobilière, il s'agissait d'un gage. Lorsque la chose était
immobilière, il s'agissait de l'antichrèse.
Postérieurement, d'autres nantissements furent consacrés par le
législateur, tels les nantissements de fonds de commerce, de
matériel ou d'outillage. L'expression désignait alors un gage
sans dépossession. Le même terme désignait ainsi des
sûretés assez diverses, ce qui était source de confusion.
La réforme intervenue en 2010 rompt avec cette tradition terminologique.
Le nantissement désigne aujourd'hui une sûreté portant sur
un bien incorporel.
La débaptisation11 ainsi observée des
sûretés va entrainer une double conséquence. Dans un
premier temps, certains droits autrefois considérés comme
étant susceptibles d'être mis en gage vont désormais devoir
être nantis. C'est par exemple le cas du gage des comptes de titres
financiers, qui devient un nantissement. La seconde conséquence, qui est
l'inverse de la première, fait partir certains droits de la
sûreté de nantissement à celui de gage. Une autre
conséquence, et non la
6SHAPIRO et HASSET, Intellectual Property report,
2005, cited by Malackowski in « IPS for 21st centurycorp».
7MALACKOWSKI, IP : from asset to asset class, in IP strategies for
21st century corporations, Wiley, 2011.
8 N°. 1: Coca-Cola; N°. 2 : Apple, in
Rapport Interbrand 2012.
9 LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties
du crédit, 6e éd. LGDJ, 2008, P.5.
10 Art. 1 de l'AUS du 15 décembre 2010.
11 LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties
du crédit, op. Cit.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
moindre, le nouvel Acte Uniforme sur les sûretés
consacre de nouveaux nantissements. C'est notamment le cas du nantissement des
droits de propriété intellectuelle. Il convient donc pour une
meilleure compréhension de ce nantissement, de définir les
termes.
D'après le Grand Robert12, le
nantissement est le fait de mettre quelqu'un en possession de quelque
chose par précaution. C'est ainsi qu'on peut nantir un voyageur de
provisions. Cette définition tout à fait littéraire n'est
pas celle qui a été envisagé par les rédacteurs du
Code civil. En effet, le code civil dispose en son article 2071 que «
le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet une
chose à son créancier pour sûreté de la dette
». Le code civil distingue deux types de nantissement: le gage et
l'antichrèse. Le gage s'appliquant aux biens meubles quelle que soit
leur nature13, et l'antichrèse s'appliquant aux immeubles.
Tandis que le gage s'opère sur des meubles corporels, le nantissement
quant à lui porte sur des meubles incorporels. C'est dans cet esprit que
l'AUS nouveau définit pour sa part le nantissement en son article 125 en
ces termes : « le nantissement est l'affectation d'un bien meuble
incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou
futurs, en garantie d'une ou plusieurs créances, présentes ou
futures, à condition que celles-ci soient déterminées ou
déterminables... ». Il ressort de cette définition que
le nantissement porte bien sur les meubles incorporels, présents ou
futurs, déterminés ou déterminables. Il faut noter
cependant que cette définition prend en compte un grand nombre de
meubles incorporels sur lesquels pourrait porter le nantissement. Or c'est la
question des droits de propriété intellectuelle qui nous
intéresse particulièrement.
Le terme « propriété
intellectuelle» désigne les créations de l'esprit
à savoir les inventions, les oeuvres littéraires et artistiques
et les symboles, noms, images et dessins ou modèles utilisés dans
le commerce14. La propriété intellectuelle se divise
en deux branches : la propriété industrielle, qui comprend les
inventions (brevets), les marques, les dessins et modèles industriels et
les indications géographiques ; et le droit d'auteur, qui se rapporte
aux oeuvres littéraires et artistiques15.
L'AUS définit le nantissement des droits de
propriété intellectuelle comme étant « la
convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation
tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle
existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques
12 REY (A.) (sous la direction de), « Grand
Robert de la langue française », version électronique,
2e éd., 2001.
13 Le Code civil dans sa définition du gage
assimile le sort des biens meubles corporels à ceux des meubles
incorporels.
14
http://www.wipo.int/about-ip/fr/
15 Il faut entendre ici les romans, poèmes
et pièces de théâtre, oeuvres cinématographique et
musicales ou encore les oeuvres relevant des arts plastiques comme les dessins,
les peintures, les photographies et les sculptures ainsi que les dessins et
modèles architecturaux. En outre, les droits attachés au droit
d'auteur comprennent ceux des artistes interprètes ou exécutants
sur leurs interprétations et exécutions, des producteurs de
phonogramme sur leurs enregistrements et des radiodiffuseurs sur leurs
programmes radiophoniques ou télévisuels.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
de fabrique et de commerce, des dessins et modèles
»16. Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle est donc d'abord un contrat par lequel un débiteur
affecte en garantie d'une obligation la totalité ou une partie de ses
droits de propriété intellectuelle existants ou futurs. Telle est
la définition qui sera retenue dans le cadre de ce travail.
Comme on l'a signalé, avant 2010, le droit positif des
sûretés de l'OHADA ne connaît les droits de
propriété intellectuelle que comme un complément
facultatif du nantissement du fonds de commerce. L'entrée en vigueur du
nouvel AUS, va venir fixer le régime juridique du nantissement des
droits de propriété intellectuelle autour de ses articles 156
à 161. Il faut souligner que le nantissement des droits de
propriété intellectuelle, met en rapport deux systèmes
juridiques. Par ailleurs, bien usité, il pourrait contribuer au
développement des entreprises africaines, et partant au
développement de l'Afrique. C'est d'ailleurs l'une des finalités
visées par les pères fondateurs de ces différents
systèmes juridiques.
Ainsi donc l'OAPI et l'OHADA sont les deux systèmes qui
sont mis à contribution lorsqu'il s'agit de parler de nantissement des
droits de propriété intellectuelle. La première,
l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle,
créée en 196217, institue une administration centrale
de la propriété intellectuelle et prévoit aussi une
législation régionale de la propriété
intellectuelle18 à travers l'accord de Bangui19
complété par ses annexes. L'OAPI ne s'intéresse qu'au
droit de la propriété intellectuelle. Autrement dit, ses
compétences sont donc limitées à la
propriété industrielle et à la propriété
littéraire et artistique. Toutefois, les droits afférents aux
domaines de la propriété intellectuelle qu'elle édicte,
sont des droits nationaux indépendants, soumis à la
législation de chacun des Etats membres dans lesquels ils ont effet. Il
convient de s'y pencher et de s'intéresser à la façon dont
cette organisation a réglé les questions relatives aux
sûretés grevant la propriété industrielle, et
éventuellement sa nécessaire « coopération »
avec l'OHADA pour régler les problèmes liés à cette
sûreté.
Plus récente, l'OHADA20 (Organisation pour
l'harmonisation en Afrique du droit des affaires) s'efforce de mettre en place
un cadre propice de nature à développer les affaires avec des
conditions propres à faciliter l'activité des entreprises. En
outre, elle s'efforce à garantir la sécurité juridique des
activités économiques, afin de favoriser l'essor de celles-ci et
d'encourager l'investissement.
16 Article 156 alinéa 1 de l'AUS.
17 Elle n'était alors que l'office africain et
malgache de la propriété intellectuelle (OAMPI).
18 Voir notamment, MBA (C.-R.), la protection
des inventions en droit de l'OAPI (Organisation africaine de la
propriété intellectuelle), Thèse Lyon, 2004.
19 Cet accord a été signé en 1977
et révisé en 1999.
20 Le traité relatif à l'OHADA a
été signé à Port Louis le 17 octobre 1993, a
été ratifié à la date du 31 décembre 2000
par seize Etats; il est entré en vigueur en 1995. Il va cependant
être modifié et complété par un autre traité
adopté le 17 octobre 2008 et entré en vigueur le 15
décembre 2010. Cette organisation regroupe aujourd'hui 17 Etats
africains.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
C'est par le truchement des Actes Uniformes que l'OHADA veut
remplir ce rôle. Ils sont destinés à instaurer une
législation commune aux Etats membres pour régir les
matières identifiées comme faisant partie du droit des
affaires21. L'organisation a pour parvenir à ses fins,
adopté des Actes uniformes dans certains domaines, parmi lesquels figure
l'acte uniforme portant organisation des sûretés.
La prise de garantie sur les titres de propriété
industrielle est relativement récente. Sur le plan législatif,
les premières réformes des sûretés dans les pays du
droit civil, qui ont conduit à organiser la garantie sur les biens
meubles incorporels, notamment la propriété sont intervenues au
Canada22. C'est bien plus tard, le 23 mars 2006, que la France va
opérer, via son législateur, une distinction entre les
sûretés sur les biens meubles corporels et les
sûretés grevant des biens meubles incorporels (nantissement). De
son côté, la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial
International (CNUDCI) a entrepris depuis 2002 d'effectuer des travaux sur les
sûretés réelles. Ces travaux ont abouti à
l'adoption, en décembre 2008, du Guide Législatif sur les
opérations garanties. Le groupe de travail VI (Sûretés) a
été chargé de faire des recommandations sur les
sûretés réelles grevant la propriété
intellectuelle. Ces recommandations constituent l'annexe au Guide
législatif. C'est dire que la propriété intellectuelle a
fait l'objet d'un traitement particulier, eu égard à la place que
joue cette matière dans l'économie mondiale actuelle. Dans
l'espace géographique regroupant les pays membres conjointement de
l'OAPI et de l'OHADA, c'est principalement dans les Actes Uniformes de l'OHADA
et dans l'Accord de Bangui qu'il faut chercher les sources des rapports entre
sûretés réelles et propriété industrielle.
Mais ces rapports sont complétés par les lois nationales,
notamment les règles de droit civil et les règles de
procédure civile.
Plusieurs institutions bancaires23 s'accordent pour
démontrer que l'octroi de crédits est l'un des moyens les plus
efficaces pour doter les entreprises commerciales d'un fonds de roulement ou de
financer leur développement. L'efficacité d'un crédit
garanti vient du fait qu'il sécurise les transactions en
réduisant les risques auxquels est exposé le créancier.
Par conséquent, il lui sera loisible d'accéder aux biens
grevés pour se faire rembourser en cas d'inexécution de
l'obligation garantie24.
21 MOULOUL (A.), comprendre l'OHADA, 2e
éd. PUA, 2009, p.46.
22 Débuté en 1986, le nouveau droit
des sûretés, qui se forme aujourd'hui le Code Civil du
Québec (CCQ), a fait l'objet du projet de loi 125 sanctionnée en
1991. Ce Code entre finalement en vigueur le 1er janvier 1994.
23 Il s'agit des études
réalisées par des organisations telles que la Banque
Internationale pour la Reconstruction et le Développement (BIRD), le
Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Africaine de
Développement (BAD).
24 Guide législatif de la CNUCDI sur les
garanties, introduction, par. 4, 5.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Les droits de propriété intellectuelle
constituent aujourd'hui une grande part du patrimoine des entreprises. Ces
dernières les utilisent de plus en plus pour obtenir des financements,
en les donnant en garantie25. Ceci s'explique assez aisément
quand on sait qu'aujourd'hui l'accès au financement est
vital26. Il s'avère alors important pour les entrepreneurs de
maitriser la valeur des différents droits de propriété
intellectuelle, afin de mieux négocier leurs emprunts.
Cette étude nous permet d'appréhender
l'effectivité et l'efficacité du nantissement des droits de
propriété intellectuelle au regard de
l'interpénétration des systèmes juridiques auxquels ce
dernier invite. En effet, le nantissement des droits de propriété
intellectuelle met en relation l'OAPI et l'OHADA. La reforme de l'AUS intervenu
en 2010 ouvre la voie au débat sur les sûretés
réelles et les droits de propriété intellectuelle,
particulièrement en ce qui concerne le nantissement de ces derniers.
La certitude de pouvoir recouvrer la créance est ce qui
pousse un banquier à accorder un prêt. Par conséquent, plus
la garantie est certaine et stable, plus le banquier est enclin à
accorder le crédit. Il est cependant aisé de constater qu'il est
difficile de juger de la stabilité et de la certitude des droits de
propriété intellectuelle. En effet, comment pourrait-on garantir
la stabilité des droits de propriété intellectuelle, quand
on sait que l'infraction de contrefaçon peut faire chuter leur valeur de
base. Le rapport de confiance qui lie le créancier au bien
grevé27, sur lequel repose le droit des sûretés,
disparait dans cette hypothèse. Or cette confiance qui semble
s'affaiblir au regard de ce qui précède, ne peut être
rétablie que si le législateur OHADA prend la peine de clairement
réglementer le nantissement des droits de propriété
intellectuelle. Ceci passe par la détermination de sa nature juridique
et du régime applicable. C'est en réalité ce qu'a fait le
législateur OHADA, lorsqu'il consacre un nantissement des droits de
propriété autonome. Or à regarder de près on
s'aperçoit de toute la difficulté qu'il y a encore à
mettre en oeuvre ce droit. Dès lors, l'autonomisation qu'a connue le
nantissement des droits de propriété intellectuelle est-elle
parfaite?
La plupart des textes applicables en Afrique sont
d'inspiration française. L'OHADA n'a pas fait l'exception, même si
on doit féliciter le législateur communautaire pour son effort
d'adaptation. En effet, le régime du nantissement a beaucoup
évolué. L'on peut, pour son étude, partir de son
régime avant la réforme de 2010, pour aboutir au nouveau
régime qui lui est consacré à partir du 15
25 Ce type de nantissement est très
développé en Europe, et beaucoup moins en Afrique. En effet, il
faut souligner que le niveau d'industrialisation est assez faible et la culture
de l'immatériel comme richesse, l'est encore plus.
26 Voir Intellectual Property and access to Finance
for High Growth SMEs, document de réflexion de la Direction
générale des entreprises et de l'industrie de la commission
européenne, Bruxelles, 14 novembre 2006.
27 KOFFI (K.), « les sûretés
réelles et les droits de propriété intellectuelle dans
l'espace OAPI-OHADA », mémoire de Master II en droit de la
propriété intellectuelle, soutenu en 2011, p. 13.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
décembre 2010 avec l'entrée en vigueur de l'AUS
nouveau. Par ailleurs l'on peut se cantonner à l'étude de la
reforme opérée par l'AUS nouveau. Dans cette hypothèse
l'on peut dans un premier temps s'attarder sur le régime juridique du
nantissement des droits de propriété intellectuelle dans le
nouvel acte uniforme; puis dans un second temps, questionner l'efficience et
l'efficacité de ce nantissement. Cette approche peut permettre de cerner
dans son ensemble ce nantissement et de mesurer son impact sur la vie
économique des entreprises. Dans la même veine, une autre
approche, et non la moins importante, consisterait à étudier ce
nantissement en ayant pour fil conducteur, le modèle de l'organisation
de tous les nantissements. Dans cette hypothèse l'approche consisterait
à s'attarder progressivement sur la définition de ce
nantissement, ses règles de constitution, ses règles
d'opposabilité et enfin sur les droits conférés.
Il semble cependant que l'approche qui correspond le mieux
à l'étude du nantissement des droits de propriété
intellectuelle, soit celle analytique. Ceci parce qu'elle permet sans doute de
voir toute la portée d'une telle réforme. Concrètement, Il
s'agit d'étudier la question de l'autonomisation du nantissement des
droits de propriété intellectuelle. Cette étude sera
menée selon la méthode analytique de type comparatif. Elle part
de la constatation de la fusion du régime du nantissement des meubles
incorporels à celui du gage, pour établir le détachement
consacré par l'AUS nouveau. Cette méthode est une attitude
vis-à-vis de l'objet de l'étude28. Dès lors, il
convient de rechercher les informations concrètes tant dans la
législation OAPI et OHADA que dans celle des pays ayant
légiférés sur la question.
Etant donné que le nantissement relève plus du
droit des sûretés que celui de la propriété
intellectuelle, ce n'est pas du côté de l'Accord de Bangui que
nous devons rechercher les règles qui les organisent. En effet, c'est
l'AUS qui les organise, à titre principal, et accessoirement quelques
règles de droit civil contenues dans les lois nationales29,
notamment le Code civil repris par la plupart des Etats membres de l'OAPI. Dans
le cadre de cette étude, il est important de souligner que les Etats
membres de l'OAPI sont conjointement membres de l'OHADA. A côté de
notre espace de référence, une incursion dans les
législations de certains pays occidentaux30 sur la même
question, permettra d'apprécier l'évolution tant
législative, jurisprudentielle que doctrinale.
L'AUS distingue plusieurs types de nantissements : le
nantissement de créance, le nantissement de compte bancaire, des droits
d'associés, valeurs mobilières et comptes de titres financiers,
du
28 GRAVITZ (M.), Méthodes des sciences
sociales, Dalloz, 2001, 11e éd., p. 441.
29 Pour ce qui est du Cameroun, il s'agit de la Loi
n°2000/11 du 19 décembre 2000 relative au droit d'auteur et droit
voisin du droit d'auteur.
30En France notamment.
9
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
fonds de commerce, et en fin des droits de
propriété intellectuelle. C'est ce dernier type de nantissement
qui intéresse cette étude. Comme souligné plus haut, la
propriété intellectuelle est divisée en deux: la
propriété industrielle et le droit d'auteur. La présente
étude s'étendra à toutes les matières de la
propriété intellectuelle. Elle prendra alors en compte aussi
bien, le droit d'auteur31, que la propriété
industrielle et ses composantes principales (brevet d'invention, marques de
produit ou services et dessins ou modèles industriels)32.
Conscient de la valeur sans cesse croissante des droits de
propriété intellectuelle, le législateur OHADA a compris
la nécessité d'autonomiser le régime général
du nantissement des droits de propriété intellectuelle. On
s'aperçoit alors de l'exhaustivité du régime commun
à l'ensemble des droits de propriété intellectuelle
(Ière partie). Toutefois, en consacrant
ainsi ce nantissement, le législateur OHADA a ignoré un certain
nombre de paramètres. Toute chose qui a conduit à une
imprécision des régimes spécifiques de chacun des
nantissements des droits de propriété intellectuelle
(IIe partie).
31 Ou encore appelé propriété
littéraire et artistique.
32 Ces composantes sont d'ailleurs celles qui sont
identifiées à l'article 156 de l'AUS nouveau qui stipule que
« Le nantissement des droits de propriété intellectuelle est
la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation
tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle
existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques de fabrique
et de commerce, des dessins et modèles.».
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
10
Ière PARTIE : L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN A L'ENSEMBLE DES
DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE
|
11
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
La réforme du droit des sûretés de l'OHADA
intervenu en 2010 poursuit un double objectif: d'une part, accroitre la
sécurité juridique des différents acteurs
économiques, et, d'autre part, doter les créanciers d'instruments
juridiques efficaces33, et donc attractifs. Le souci d'obéir
à cette double exigence de sécurité et
d'attractivité se fait ressentir dans tout le nouvel Acte uniforme. Il
rompt ainsi avec les incompréhensions et les insuffisances de l'AUS de
1998. Plusieurs innovations interviennent dans le cadre de sûretés
avec l'entrée en vigueur de cet Acte uniforme. Au-delà de
l'amélioration de l'accessibilité du droit des
sûretés et de la généralisation de l'exigence de
publicité portant sur les sûretés réelles sans
dépossession, le régime juridique des sûretés
préexistantes s'est vu amélioré, et, les nouveaux
mécanismes des garanties de financement pris en compte34.
Visant toujours les mêmes objectifs, le
législateur OHADA a consacré de nouvelles sûretés.
La majeure parie de ces sûretés existait déjà dans
l'AUS ancien et ont simplement vu leur nature changer avec l'entrée en
vigueur de l'AUS nouveau. C'est précisément le cas en ce qui
concerne les droits de propriété intellectuelle. Pendant
longtemps, le sort de ces droits était lié à celui du
fonds de commerce dont ils constituaient des éléments
facultatifs. On assiste désormais à la consécration d'un
régime général de ces droits, une consécration que
l'on pourrait juger exhaustive compte tenu de l'ensemble des règles
établies. Cette exhaustivité s'exprime au travers les
modalités de constitution du nantissement des droits de
propriété intellectuelle autonome (Chapitre I).
Cette consécration ne va pas sans entrainer avec elle des
conséquences. C'est ce qui justifie qu'il convienne de s'attarder sur
les effets de ce nantissement (Chapitre II).
33 CROCQ (P.), « Les grandes
orientations du projet de réforme de l'Acte Uniforme portant
organisation des sûretés »,
Droit & Patrimoine, n°197, novembre 2010.
34CROCQ (P.), idem.
12
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE
|
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle n'est pas inconnu du droit positif OHADA. En effet, il
était déjà consacré par l'AUS du 17 avril 1997.
Mais il n'avait pas de régime propre. Il n'intervenait que dans le
sillage du nantissement du fonds de commerce dont il était le
complément facultatif. En effet, l'article 69 ancien permettait de
classer en trois catégories les différents éléments
du fons de commerce susceptibles de faire l'objet d'un nantissement. On pouvait
ainsi distinguer les éléments qui devaient obligatoirement
figurer dans le nantissement (élément obligatoires), ceux qui
pouvaient être inclus (élément facultatifs) et ceux qui ne
devaient jamais en faire partie (éléments
exclus)35.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle a gagné en autonomie sous l'AUS du 15 décembre
2010. Cet Acte uniforme lui consacre une réglementation autonome autour
des articles 156 à 161. Ces articles organisent tant les
modalités de constitution de la sûreté que celles de son
inscription36. Il conviendrait de s'attarder donc sur le contenu du
nantissement des droits de propriété intellectuelle (Section I),
ainsi que sur le formalisme qui l'entoure (section II).
Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de
propriété intellectuelle
L'analyse du contenu du nantissement des droits de
propriété intellectuelle amène à faire dans un
premier temps le constat de l'élargissement de l'assiette du
nantissement (Paragraphe I). C'est du moins ce qui découle de l'article
156 AUS. Par ailleurs, l'alinéa 2 du même article établit
clairement une typologie de nantissement (Paragraphe II).
35 ISSA-SAYEGH (J.), OHADA, « Traité et
Actes Uniformes commentés et annotés », Juriscope,
2002, p. 652.
36 MIENDJEM (L. I.), « Régime
général des sûretés », in
Encyclopédie du droit OHADA (Sous la direction de Paul -
Gérard POUGOUE), Lamy, décembre 2011, p.1503, n°
161.
13
14
15
16
17
18
19
20
21
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
§ 1. L'élargissement de l'assiette du
nantissement
L'autonomie qui est consacré par le nouvel Acte
uniforme sur les sûretés vient d'une part maintenir le
nantissement des droits de propriété intellectuelle existants (A)
et étendre, d'autre part, ce nantissement aux droits futurs (B)
A- Le maintien du nantissement sur les droits
existants
L'Acte uniforme sur les sûretés ancien
déterminait les droits de propriété intellectuelle sur
lesquels devait porter le nantissement. Ces droits constituaient les
éléments facultatifs du fonds de commerce. L'article 69 (2)
stipule à cet effet que le nantissement peut porter : « sur les
autres éléments incorporels du fonds de commerce tels que les
brevets d'invention, marques de fabrique et de commerce, dessins et
modèles et autres droits de la propriété intellectuelle
ainsi que sur le matériel. ». Il est d'abord à noter que
cette énumération n'est pas exhaustive, et qu'ensuite, c'est la
même approche qui est envisagé dans l'Acte uniforme de 2010.
L'article 156 du nouvel AUS cite les droits de
propriété intellectuelle susceptibles d'être nantis. Il
s'agit notamment du brevet, des dessins et modèles et des marques de
commerce et de fabrique. Cependant, ce serait se fourvoyer que de penser que
cette énumération est exhaustive, car doivent être
susceptible d'être nantis tous les droits de propriété
intellectuelle consacrés par l'accord de Bangui de 1977,
révisé en 1999. En effet, l'ABR prévoit dix annexes,
chacune traitant d'un droit de propriété intellectuelle. Mais en
réalité seules neuf annexes visent véritablement les
droits de propriété intellectuelle37. Outre les
brevets, dessins et modèles, les marques de fabrique et de commerce, il
convient d'énumérer également les obtentions
végétales, la propriété littéraire et
artistique, les indications géographiques, le nom commercial, les
schémas de configuration topographique. De ces différents droits,
on distingue d'une part les créations industrielles auxquelles on va
adjoindre les signes distinctifs, et d'autre part les créations
ornementales et intellectuelles.
1- Les créations à caractère
technique et les signes distinctifs
Le droit lié à la création à
caractère technique par excellence est le brevet d'invention. Il fait
l'objet de l'annexe I de l'ABR. En effet, Il se définit comme
étant un titre délivré par l'OAPI, conférant un
monopole temporaire d'exploitation sur une invention à celui qui la
relève, en donne
37 L'annexe VIII est relative à la concurrence
qui n'est pas à proprement parlé un droit.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
une description suffisante et complète, et revendique
ce monopole38. Pour faire l'objet d'un brevet d'invention, certaines
conditions doivent être remplies. Elles ressortent de l'article 2 de
l'annexe I de l'ABR. Selon ce texte : « peut faire l'objet d'un brevet
d'invention, l'invention nouvelle impliquant une activité inventive et
susceptible d'application industrielle ». Quatre conditions en
ressortent. Il doit s'agir d'une invention, ensuite, l'invention doit
être nouvelle, puis, l'invention doit impliquer une activité
inventive et enfin l'invention doit être susceptible d'application
industrielle.
L'invention doit être entendue comme étant une
idée permettant une solution d'ordre technique. Elle est la
création humaine dont le but est de résoudre une
difficulté d'ordre technique. Par ailleurs, l'invention doit être
nouvelle, donc ne pas avoir d'antériorité dans l'état de
la technique39. Puis, l'invention doit impliquer une activité
inventive. En d'autres termes, une invention est considérée comme
résultant d'une activité inventive si pour un homme du
métier, ayant des connaissances et une habileté moyennes, elle ne
découle pas d'une manière évidente de l'état de la
technique à la date de dépôt de la demande du brevet, ou
bien si une priorité a été revendiquée à la
date de la priorité valablement revendiquée pour cette
demande40. La dernière condition requise pour qu'une
invention fasse l'objet d'un brevet d'invention, est la susceptibilité
d'application industrielle. Selon la doctrine, il ya application industrielle
lorsque l'invention porte non sur un principe abstrait, mais sur une conception
mise en oeuvre dans l'industrie. Il faut noter qu'au-delà de ces
conditions, il est nécessaire que l'invention soit conforme à
l'ordre public et aux bonnes moeurs.
Outre le brevet d'invention, font partie des créations
à caractère technique le Certificat d'obtention
végétale, le Certificat d'enregistrement du modèle
d'utilité et le schéma de configuration du circuit
intégré, objets des annexes I, II, IX et X de l'ABR.
A côté des créations à
caractère technique, l'Accord de Bangui révisé consacre
également les signes distinctifs. Parlant justement de ceux-ci, il
s'agit généralement de la marque de fabrique et de commerce, du
nom commercial et des indications géographiques. Pour ce qui est de la
marque de fabrique et de commerce, elle est perçue comme étant
signe distinctif susceptible de représentation graphique apposé
sur des produits ou identifiant des services émanant de
différentes entreprises41.
38 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la
direction de), « lexique des termes juridiques », Dalloz,
12e éd., 1999, p. 72.
39 Article 3 de l'annexe I de l'ABR « Une
invention est nouvelle si elle n'a pas d'antériorité dans
l'état de la technique. ».
40 Article 4 de l'annexe I de l'ABR. 41Art.
L. 711-1 et s., CPI.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Le nom commercial désigne toute appellation sous
laquelle un commerçant exerce son activité. La même
appellation est aussi utilisée pour désigner la
dénomination sous laquelle est connu et exploitée un
établissement industriel, artisanal ou agricole. Pour ce qui est des
indications géographiques, anciennement dénommées
appellations d'origine, elles sont prévues par l'annexe VI de l'ABR et
servent à désigner le lieu d'origine d'un produit et lié
dans l'esprit de la clientèle à une connotation de
qualité.
2- Les créations esthétiques et
intellectuelles
Les créations esthétiques sont celles ayant un
caractère ornemental, c'est bien souvent de l'art appliquée
à la science. C'est le cas des dessins et modèles. Le dessin
susceptible de faire l'objet d'une protection de la propriété
intellectuelle est « tout assemblage de lignes ou de couleurs »
tandis que le modèle est « toute forme plastique associée ou
non, à des lignes ou à des couleurs, pourvu que cet assemblage ou
forme donne une apparence spéciale à un produit industriel ou
artisanal et puisse servir de type pour la fabrication d'un produit industriel
ou artisanal ». Tout comme le brevet d'invention, le dessin ou
modèle doit remplir un certain nombre de conditions. Il doit d'abord
avoir une apparence spéciale, autrement dit, il doit être visible
extérieurement. Ensuite, le dessin ou le modèle doit être
apte à servir de type pour la fabrication d'un produit industriel ou
artisanal. Enfin, il doit être nouveau. En effet un dessin ou un
modèle industriel est nouveau, s'il n'a pas été
divulgué en tout lieu du monde, par une publication sous forme tangible,
par un usage ou par toute autre moyen avant la date de dépôt ou,
le cas échéant, avant la date de priorité de la demande
d'enregistrement42.
La propriété littéraire et artistique est
le droit exclusif qu'a le créateur d'une oeuvre littéraire et
artistique sur son oeuvre. On parle aussi de droit d'auteur. Ce droit
confère des attributs d'ordre intellectuel et moral et des attributs
d'ordre patrimonial43, seuls les seconds étant susceptibles
d'être nantis. Ils durent toute la vie de l'auteur et 70 ans après
sa mort44.
La question de savoir si la propriété
littéraire et artistique peut faire l'objet d'une sûreté
est discutable. En effet, en dehors du fait que l'accord de Bangui, pas plus
que les législations nationales, n'envisagent cette
opération45, s'ajoute l'apparent silence de l'article 156
quand il cite les exemples des droits pouvant être nantis. La
propriété littéraire et artistique semble en être
42Art. 2, alinéa 2 de l'annexe IV, ABR.
43 Art. 2, Annexe VII de l'ABR.
44 Art. 22, Annexe VII de l'ABR.
45 NGOMBE L. Y. « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de la concurrence des
legislations supranationales en Afrique », R.R.J, 2006-4 (II)
n°23 et 24, pp.2556-2557.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
exclue. De plus, le nantissement des droits de
propriété littéraire et artistique peut susciter des
réserves du fait des attributs moraux qui leur sont
attachés46. Cependant, en droit OHADA, ces difficultés
sont contestables. Tout d'abord, l'énumération faite à
l'article 156 n'est pas limitatif. Le silence de l'Annexe VII de l'Accord de
Bangui ne saurait être considéré comme une contestation,
dans la mesure ou ladite Annexe admet la cession ou la concession des droits de
propriété littéraire et artistique. Ce point de vue se
confirme d'ailleurs à l'examen du droit comparé, notamment en
droit français. Ensuite, les droits moraux ne sauraient faire obstacle
au nantissement du droit d'auteur ou des droits voisins, puisqu'ils ne sont pas
grevés par ledit nantissement, ce dernier ne portant que sur les droits
patrimoniaux. En définitive, la possibilité de nantir les droits
de propriété littéraire et artistique doit être
admise.
B- La prise en compte des droits futurs
L'OHADA a certes des sources hétéroclites,
cependant la plupart de ses dispositions est inspirée du Code civil de
1804. Il en résulte donc que les Actes uniformes subissent une
importante influence du Code civil. C'est notamment le cas de l'AUS, surtout en
ce qui concerne le nantissement des biens futurs. En effet, l'article 1130 du
Code civil stipule en son alinéa 1 que les choses futures peuvent
être l'objet d'une obligation. Cette prise en compte des droits futurs se
traduit dans l'AUS, lorsque le législateur, dans sa définition du
nantissement en donne le contenu de l'assiette. Il est donc possible pour le
constituant d'affecter en garantie d'une obligation tout ou partie de ses
droits de propriété intellectuelle existants ou
futurs47. La lecture conjointe de ces deux textes fait ressortir la
volonté du législateur OHADA, de prendre en compte les droits de
propriété intellectuelle futurs. Autrement dit, la
possibilité de nantir des propriétés est donc certaine.
Elle s'inscrit dans la ligne de l'objectif poursuivi en l'admission
généralisée des sûretés ayant pour assiette
des biens futurs dont l'intérêt est, entre autres, d'éviter
de nouveaux frais de constitution et de faire prendre rang à la
sûreté immédiatement48.
Il faut signaler que si de grandes difficultés ne se
posent pas quant à ce qui concerne le nantissement des droits de
propriété industrielle, tel n'est pas le cas pour les droits
d'auteur. En ce
46 MARTIAL N. Droit des sûretés
réelles sur propriétés intellectuelles,
Préface de Dominique Legeais, Aix-en-Provence, PUA, 2007, n°143, p.
107.
47 Article 156, alinéa 1 de l'AUS : «
Le nantissement des droits de propriété intellectuelle est la
convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation
tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle
existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques de fabrique
et de commerce, des dessins et modèles. ».
48 BLACK YONDO L., et alii, Le nouvel acte
uniforme du droit des sûretés. La reforme du droit des
sûretés de l'OHADA, Sous la direction de Pierre Crocq,
éd. Lamy, 2012, n°37, p.48.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
qui concerne la première hypothèse, On remarque
qu'il est bien usité par les entreprises nouvellement
créées, les « start-up »49. Il en va
autrement du droit d'auteur. La difficulté à nantir un droit
d'auteur vient d'une part de la nature particulière des droits
grevés sur ce type de créations. En effet, Outre les droits
moraux incessibles, aux créations littéraires et artistiques sont
également grevés les droits patrimoniaux, qui eux, peuvent faire
l'objet d'un nantissement.
Les droits de la propriété intellectuelle
même existants, ne sont pas facilement évaluables et du coup, la
situation sera beaucoup plus complexe pour ceux à venir. En vertu de la
liberté contractuelle, les parties peuvent contracter sur la base des
biens intellectuels non encore existants. Mais, il ne faut pas oublier que la
délicatesse des tels biens exige un certain formalisme. La
volatilité qui les caractérise complexifie davantage leur
évaluation. Les critères d'évaluation ont eux-mêmes
leurs propres limites. L'évaluation de la valeur des droits d'auteur
futurs comme les titres de la propriété industrielle lorsque cela
est possible, sera faite avec une part de subjectivité. Ce qui peut
engendrer des conséquences multiples.
Comme pour les oeuvres existantes, il n'existe pas des
mécanismes ou des méthodes d'évaluation de la valeur
financière des oeuvres futures. On peut légitimement dire que
l'obligation de conservation qui pèse sur le débiteur d'une
oeuvre existante sera difficilement demandée au débiteur ayant
donné en garantie son droit d'auteur futur. A cela s'ajoute l'absence
d'enregistrement. La simple réunion de certains critères suffit
à protéger une personne, ayant apporté quelque chose
d'originale dans le domaine littéraire et artistique50.
L'article L-131-1 du Code de Propriété Intellectuelle
français énonce que: « La cession globale des oeuvres
futures est nulle. » Cette disposition fait aussi l'objet d'une
consécration dans la loi camerounaise de 2000. Un tel libellé a
des implications sur l'évaluation des oeuvres futures lorsque cela est
possible; les conséquences ne manqueront pas. Elles sont d'ailleurs
évidentes.
Le législateur camerounais de 2000 prohibe la cession
globale des oeuvres futures. La loi dispose en article 22 alinéa 2 que :
« La cession globale des oeuvres futures est nulle ». Cette
expression est beaucoup vague. Seulement à l'analyse, il possible de le
faire à certains cocontractants de l'auteur tels l'éditeur par
exemple.
49 La « start-up» se définit comme
étant une jeune entreprise à fort potentiel de croissance et qui
fait la plupart du temps l'objet de levée de fonds. On en parle aussi
pour qualifier les entreprises en constructions qui ne sont pas encore
lancées sur le marché commercial;
http://fr.wikipedia.org/wiki/Startup.
50 V. L'article 13 alinéa 1er de la
loi camerounaise sur le droit d'auteur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
A titre de droit comparé, le Code d'Industrie
Cinématographique français semble être précis
à ce sujet lorsqu'il approuve et permet le nantissement sur le film
futur51.Distinguant la notion de gage et de nantissement,
l'ordonnance française du 23 mars 2006 en explicite davantage la
situation. L'article 2355 introduit dans le Code Civil français et issu
de cette ordonnance dispose en ces termes que: « Le nantissement est
l'affectation en garantie d'une obligation d'un bien meuble incorporel ou d'un
ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs ».
S'agissant du nantissement du logiciel futur, le problème s'est
résolu autrement et la doctrine française semble être
d'accord que les travaux préparatoires des logiciels sont
assimilés aux logiciels52.Il est donc admis qu'une
sûreté puisse grever ces travaux53. La
détermination de l'objet se trouve possible de ce seul fait et la
sûreté prendra rang avant la confection définitive du
programme. Les simples projets de création c'est-à-dire les
idées54, sont inadmissibles. Au plan textuel, il y a une
certitude de prise en compte des oeuvres futures bien que cela demeure partiel
et la pratique pourra en combler.
§ 2. La typologie du nantissement des droits de
propriété intellectuelle
L'article 156 distingue stipule clairement que le nantissement
peut être conventionnel ou judiciaire.
Dans chacune des hypothèses, un certains nombre de
règles doit être observé.
A- Le nantissement conventionnel
Le nantissement conventionnel résulte d'une convention
passée entre le créancier et le débiteur ou le constituant
de la sûreté conformément aux exigences de l'article 1108
du Code Civil. Le nantissement conventionnel exige donc de la part des parties
la soumission à un double degré d'exigence.
D'une part, il doit être soumis aux exigences du Code
civil, notamment l'article 1108 qui stipule que: « Quatre conditions
sont essentielles pour la validité d'une convention: le
51 V. l'article 32 du CIC.
52 V. La directive européenne de 1991,
inédit.
53 MESTRE (J.), PUTMAN (E.), BILLIAU (M.), Droit
spécial des sûretés réelles; op.cit p.449.
54 En droit de la propriété
intellectuelle, les idées sont insusceptibles d'appropriation et donc ne
sont pas protégeables.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
consentement de la partie qui s'oblige, · la
capacité de contracter, · un objet certain qui forme la
matière de l'engagement, · une cause licite dans l'obligation
». Ainsi donc des conditions citées par l'article 1108 du Code
civil, il y a d'abord le consentement, qui est le fait de donner son accord. Le
consentement de la partie qui s'oblige doit être libre et
éclairé. Dans le cas contraire, il y a vice du consentement. Ces
vices sont l'erreur, le dol ou la violence. Il faut distinguer le vice du
consentement (il y a eu rencontre des volontés ; le consentement a
été donné mais il a été vicié) de
l'absence de consentement (il n'y a pas eu rencontre des volontés).
Ensuite, la partie contractante doit être capable,
c'est-à-dire être titulaire de certains droits et en mesure de les
exercer.
On distingue traditionnellement la capacité de
jouissance (possibilité d'être titulaire de certains droits) et la
capacité d'exercice (possibilité d'exercer soi même les
droits dont on est titulaire)55. Le mineur de moins de dix-huit ans
qui n'a pas été émancipé ne peut en principe
contracter seul que pour les actes de la vie courante. La tutelle, la curatelle
et la sauvegarde de justice sont destinées à protéger des
majeurs qui ne pourront effectuer seuls certains actes.
La tutelle crée une incapacité d'exercice
générale : seul le tuteur sera autorisé à
intervenir à l'acte. Le majeur placé en curatelle sera
représenté de manière continue dans les actes de la vie
civile. La curatelle est un régime moins strict que la tutelle, puisque
le majeur n'est pas hors d'état d'agir lui-même. Il a simplement
besoin d'être conseillé ou contrôlé dans les actes de
la vie civile. La sauvegarde de justice, quant à elle, n'entraine pas
l'incapacité de la personne qui en bénéficie, puisque
celle-ci conserve l'exercice de ses droits. Les actes qu'elle passe ne pourront
faire l'objet d'une action en nullité que lorsque l'acte litigieux
aurait dû être conclu par un mandataire spécial. Ils
pourront aussi être rescindés en cas de lésion ou
réduits en cas d'excès.
Puis, l'objet du contrat permet de déterminer ce
à quoi le débiteur s'est engagé. On distingue parfois
l'objet de la prestation, l'objet de l'obligation, et l'objet du contrat.
L'objet doit exister, être déterminé et licite. Pour
certains auteurs, l'objet du contrat désigne l'opération
juridique que les parties ont voulu effectuer. L'objet de l'obligation
désigne la prestation ou la chose que chacune des parties s'est
engagée à fournir. C'est le cas du prix pour l'acheteur ou de la
chose pour le vendeur. Enfin, la cause permet de déterminer pourquoi le
débiteur s'est engagé. Elle doit exister et être licite. En
ce qui concerne l'existence de la cause, la cause de l'obligation du
débiteur est le but immédiat et direct qui le conduit à
s'engager. On oppose à la cause, ainsi définie, le motif qui est
un
55 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la
direction de), « lexique des termes juridiques », Dalloz,
12e éd., 1999, p. 78, V. capacité.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
mobile personnel, subjectif et lointain. La cause est, au
contraire, objective ; nécessaire à la validité des actes
juridiques, elle est toujours la même pour chaque catégorie
d'actes. La notion de cause, lorsqu'elle est envisagée sous l'aspect de
la licéité ou de sa légalité, recouvre les motifs
personnels qui conduisent une partie à contracter. Lorsque le motif est
illicite, il entraine la nullité de l'acte à la double condition
d'être cause impulsive et déterminante de l'opération et
d'avoir été connu de l'autre partie.
D'autre part, aux exigences du Code civil, le nantissement des
droits de propriété intellectuelle doit se soumettre à
celles de l'AUS du 15 décembre 2010. En effet, d'après l'article
157 AUS, cette convention doit à peine de nullité,
constatée par un écrit. Ce dernier doit à son tour,
à peine de nullité, contenir les mentions suivantes
prévues par l'article 157 AUS : la désignation du
créancier, du débiteur et du constituant du nantissement si
celui-ci n'est pas le débiteur; Les éléments identifiant
ou permettant de déterminer les droits apportés en garantie; les
éléments permettant l'individualisation de la créance
garantie tels que son montant ou son évaluation, sa durée et son
échéance56.
Les droits de propriété intellectuelle ont
pendant un certain temps été des éléments
facultatifs du fonds de commerce, et donc suivaient le même
régime. Dans ce sens, selon l'article 70 AUS ancien, le nantissement
conventionnel du fonds de commerce doit être constitué par acte
authentique ou sous seing privé dûment enregistré. La
formalité d'enregistrement est nécessaire non seulement pour
donner date certaine à l'acte sous seing privé, mais aussi pour
procéder à l'inscription du nantissement. Autrement dit,
d'après le jugement du Tribunal de commerce de Versailles57,
la formalité de l'enregistrement est une condition de validité de
l'acte. Cette position est contestée par certains auteurs, pour qui la
formalité d'enregistrement n'est pas une condition de validité.
Elle est simplement destinée à donner date certaine à
l'acte et par conséquent peut être supprimée sans dommage,
car la date certaine peut être conférée par l'inscription
de l'acte au Registre du commerce et du crédit mobilier qui au surplus
rend l'acte opposable à tous. Il faut souligner que le
législateur de 2010 a supprimé la formalité
d'enregistrement.
Dans certains cas, le nantissement naît non pas d'une
convention entre le créancier et le débiteur ou le constituant,
mais d'un acte d'autorité initié par le créancier et
imposé au débiteur par le juge : c'est le nantissement
judiciaire.
56 Article 157, AUS du 15 décembre 2010.
57
Trib. Com. Versailles, 28 juin 1950 ; D.
1959, p. 518 selon lequel faute d'être enregistré, l'acte sous
seing privé constatant un nantissement est nul.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
B- Le nantissement judiciaire
Avant l'entrée en vigueur de l'Acte uniforme OHADA
portant organisation de sûretés le 1er janvier 1998, seuls le
Sénégal et le Mali58 parmi les pays membres de l'OHADA
connaissaient le nantissement judiciaire du fonds de commerce. Le nantissement
judiciaire du fonds de commerce n'était pas en vigueur en raison de ce
que ces Etats étaient restés en cette matière sous
l'empire de la loi Cordelet du 17 mars 1909 qui ne connaissait pas cette forme
de nantissement. Et même plus tard, lorsqu'il est crée en France,
par une loi du 12 novembre 1955, le législateur colonial n'a pas
jugé utile de l'introduire dans les colonies françaises.
La consécration d'un régime autonome du
nantissement des droit de propriété intellectuelle, le 15
décembre 2010, va conduit le législateur OHADA à
légiférer sur les règles relatives au nantissement
judiciaire des droits de propriété intellectuelle. En effet, le
nantissement judiciaire est prévu par l'article 158 AUS. Cet article
stipule, à cet effet que « la juridiction compétente
peut autoriser le créancier à prendre une inscription de
nantissement sur les droits de propriété intellectuelle
». Le même article indique que « est régi par
les dispositions des procédures simplifiées de recouvrement et
des voies d'exécution ».
Le renvoi effectué par l'article 158 AUS aux
dispositions de AUVE sur la saisie la saisie conservatoire des titres sociaux
touche exactement aux articles 85 à 90 AUVE. Concrètement, il est
procédé à la saisie conservatoire par la signification,
dans un délai de huit jours à peine de caducité. Outre les
mentions prévues pour le nantissement conventionnel, l'acte de
signification doit contenir à peine de nullité, les mentions
suivantes contenues à l'article 86 AUVE. Il s'agit notamment dans cette
hypothèse d'une copie du procès verbal de saisie, de la mention
en caractères très apparents , du droit qui appartient au
débiteur, si les conditions de validité ne sont pas
réunies, d'en demander la main levée à la juridiction du
lieu de son domicile. Ensuite, mention doit être faite concernant la
juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations
notamment celles relatives à l'exécution de la saisie; puis,
l'élection de domicile du créancier dans le ressort territorial
juridictionnel où la saisie est effectuée s'il n y demeure pas
afin qu'il y soit fait toute signification ou offre. Enfin, il est
nécessaire que soit reproduit, sur l'acte de saisie, les articles 62 et
63 AUVE relatifs aux contestations justifiant une main levée.
58 Le Sénégal l'avait consacré
dans son code des obligations civiles et commerciales (IIIe partie,
article 874-900) et le Mali l'avait prévu dans son Code de commerce aux
articles 151 à 172.
22
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de
propriété intellectuelle
Le formalisme nécessaire à la constitution du
gage des droits de propriété intellectuelle, résulte de la
lecture couplée des articles 157 et 160 AUS, et tourne autour d'une
double exigence : l'exigence d'un écrit (paragraphe 1) et l'exigence
d'un système rigoureux de publicité (paragraphe 2).
§ 1. L'exigence de l'écrit
C'est à la lecture de l'article 157 AUS que ressort
l'exigence d'un écrit. Cet article précise en effet que : «
à peine de nullité, le nantissement des droits de
propriété intellectuelle doit être constaté dans un
écrit contenant les mentions suivantes:
1°) la désignation du créancier, du
débiteur et du constituant du nantissement si celui-ci n'est pas le
débiteur;
2°) Les éléments identifiant ou permettant
de déterminer les droits apportés en garantie;
3°) Les éléments permettant
l'individualisation de la créance garantie tels que son montant ou son
évaluation, sa durée et son échéance. ».
C'est dire à quel point l'écrit est important (A), mais qu'en
outre, sa valeur est indéniable (B).
A- L'importance de l'écrit
Les droits de la propriété intellectuelle sont
intangibles et ont des attributs assez variés. Lorsqu'ils sont nantis,
la détermination des leurs éléments
caractéristiques ne peut raisonnablement être faite que par un
écrit.
Plusieurs éléments importants apparaissent dans
l'écrit et permettent à chacune des parties de s'engager en
parfaite connaissance de cause. L'exigence de ces éléments rentre
dans la politique générale de l'OHADA dont l'un des objectifs est
de garantir une sécurité juridique et judiciaire aux
différents acteurs du droit des affaires.
La première fonction de l'écrit est de
déterminer l'assiette du nantissement. En effet, le nantissement ne
saurait porter sur des droits indéterminés. Le nantissement porte
doit donc porter sur tout ou partie des droits d'un créateur ou d'un
auteur selon les cas. Par ailleurs, le nantissement
23
24
25
26
27
28
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
peut aussi porter sur des biens futurs. Ainsi donc, un
créateur peut nantir soit la totalité, soit une partie de ses
droits sur sa création. Mais cette situation est plus expressive en
droit d'auteur, car bien que les droits moraux ne puissent faire l'objet d'un
nantissement, la diversité des droits patrimoniaux permettent qu'ils
soient séparés. Chacun des droits pouvant alors constituer un
nantissement autonome. Il en sera par exemple le cas pour le nantissement par
l'auteur de ses droits de représentation ou d'adaptation. Le droit qui
fait l'objet du nantissement doit donc être expressément
désigné par la convention. Il faut souligner que le
législateur de 2010 a clairement limité l'étendu de
l'assiette du nantissement en l'article 159 AUS59, tout en donnant
la possibilité de l'étendre conventionnellement aux accessoires
et aux fruits résultant de l'exploitation des droits de
propriété intellectuelle, objet du nantissement.
Ensuite, l'importance de l'écrit se
révèle dans la possibilité qu'elle donne d'identifier les
parties à la convention du nantissement. En effet, aussi bien le
créancier que le débiteur doit être clairement
identifié60. Il en est de même du constituant du
nantissement si celui-ci n'est pas le débiteur. L'intérêt
de cette identification vient du fait qu'il sera aisé en cas de litige
de trouver et d'identifier la personne contre qui d'éventuelles
poursuites pourraient être engagées. Enfin l'écrit permet
de déterminer le montant de la créance garantie, sa
durée61 et son échéance.
B- La valeur de l'écrit
En matière de nantissement des droits de
propriété intellectuelle, l'écrit a une valeur certaine.
Elle est exigé ad validatem et dont l'inobservation entraine
une sanction.
1- L'écrit exigé ad
validatem
En France, depuis l'ordonnance du 23 mars 2006, on doit
désormais parler de nantissement concernant les sûretés sur
titres de la propriété industrielle62.
Néanmoins, l'article 2355 du Code civil qui définit le
nantissement ne donne aucune indication quant à la forme que celui-ci
doit
59 Art. 159 AUS : « Le nantissement des
droits de propriété intellectuelle ne s'étend pas, sauf
convention contraire des parties, aux accessoires et aux fruits
résultant de l'exploitation des droits de propriété
intellectuelle objet du nantissement ».
60 Art. 157 (1) AUS
61 Etant entendu que cette durée est
fonction de l'objet du nantissement. Il pourra donc s'agir soit d'une
création industrielle, soit d'un droit d'auteur.
62 WELLHOFF (S.), les garanties du
crédit et les titres de la propriété industrielle,
Université de Nantes, IRDP Nantes, mémoire juin 2007, p. 14.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
revêtir. En effet l'alinéa 5 se contente de
renvoyer aux dispositions spéciales applicables à chaque
sûreté sur titres de la propriété industrielle pour
analyser la place de l'écrit.
Ainsi, le Code de la propriété intellectuelle
exige l'écrit pour les brevets63, les obtentions
végétales64, les topographies de produit semi
conducteurs65. Cette exigence s'étend également aux
marques, aux dessins et modèles. Pour l'ensemble de ces titres,
l'écrit est donc obligatoire.
Les législateurs OHADA et OAPI exigent l'écrit
pour respectivement le nantissement66 et le gage67
portant sur le nantissement des droits de propriété
intellectuelle. Dans l'espace OHADA, la valeur de l'écrit pour la
constitution du gage des droits de propriété intellectuelle est
assez claire pour ce qui est des droits de propriété
industrielle. L'accord de Bangui révisé reprend dans presque tous
ses annexes que l'écrit est exigé comme condition de
validité du gage. Il en est ainsi notamment à l'article 33 al. 2
de l'annexe 1 relatif aux brevets d'invention. Pour ce qui est du droit
d'auteur et des droits voisins, il n'existe aucun texte spécial relatif
au gage, à moins qu'on ne remonte à l'époque coloniale
pour évoquer le nantissement des films cinématographiques
organisé par la loi du 22 février 1944. Cette loi fait
également de l'écrit, une condition de validité du
gage.
En définitive, on peut dire que l'écrit est une
condition de validité du nantissement des droits de
propriété intellectuelle dont l'inobservation entraîne la
nullité.
2- La sanction de l'absence de l'écrit
L'inobservation de la formalité qu'est la
rédaction d'un écrit est sanctionnée par les
législateurs OHADA et OAPI par la nullité de l'acte.
L'établissement d'un écrit dont le défaut est
sanctionné par la nullité n'est pas une solution nouvelle dans
les Etats membres de l'OAPI. L'exigence d'un écrit, à peine de
nullité, a été prévue par les Annexes de l'accord
de Bangui pour le gage sur les droits sur les inventions68, les
modèles d'utilité69, les marques de produits ou de
services70, les
63 Art. L. 613-8 alinéa 5
du Code de la propriété intellectuelle exige que « les
actes comportant une transmission ou une licence, visés aux deux
premiers alinéas, sont constatés par écrit, à peine
de nullité ».
64 Art. L. 623-24 du CPI.
65 Art. L. 622-7 du CPI.
66 Art.157 (1) de l'AUS.
67 Art. 33 (2), Annexe I de l'ABR : « les
actes comportant, soit transmission de propriété, soit concession
de droit d'exploitation ou cession de droit, soit gage ou mainlevée de
gage relativement à une demande de brevet ou à un brevet,
doivent, sous peine de nullité, être constatés par
écrit. ».
68 Article 33, 2), Annexe I de l'ABR.
69 Article 28, 2), Annexe II de l'ABR.
70 Article 26, 1), Annexe III de l'ABR.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
dessins et modèles industriels71, les
schémas de configuration de circuits
intégrés72. La lecture combinée des articles
157 AUS et 33 (2), annexe I de l'ABR, permet de se rendre compte que la nature
du contrat de nantissement est mise en cause. Ils semblent en faire un contrat
solennel plutôt qu'un contrat réel. Certains estiment toutefois
que cette remise en cause n'est que théorique73. Ils
considèrent que l'exigence obligatoire de l'écrit est d'un
intérêt pratique, et que par conséquent elle permet de
sécuriser l'opération du gage à l'égard des
parties. La sécurité visée par l'écrit n'a de
véritable impact que sur les parties. Pour espérer la voir
s'étendre aux tiers, il est important qu'une autre mesure soit prise,
que le nantissement soit publié. C'est ce qui justifie que les
législateurs OHADA et OAPI aient posé une exigence de
publicité.
§ 2. L'exigence de publicité
L'étude du régime de la publicité pour la
constitution du nantissement des droits de propriété
intellectuelle s'articule autour de ses modalités (A) et de sa valeur
(B).
A- Les modalités de publicité
Les législateurs communautaires OHADA et OAPI formulent
un régime de publicité axé autour de l'exigence d'une
double inscription. L'une des inscriptions se fait au registre de commerce et
du crédit mobilier (RCCM), l'autre se fait dans un registre
spécial prévu à cet effet au sein de l'OAPI.
1- L'inscription au registre de commerce et du
crédit mobilier
Le RCCM est régi par l'Acte uniforme sur le droit
commercial général (AUDCG), lequel est entré en vigueur le
1er janvier 1998 dans l'ensemble des Etats parties au Traité
OHADA. L'objectif principal visé par l'OHADA était de faire de ce
Registre, un instrument de publicité efficace afin de permettre aux
entreprises d'avoir le maximum d'informations sur la situation juridique et
financière de leurs partenaires et d'avoir la possibilité de
mettre en place des garanties juridiques
71 Article 20, 2), Annexe IV de l'ABR.
72 Article 18, 2), Annexe IX de l'ABR.
73 ZOMISSI (G.), Le gage des droits de
propriété intellectuelle dans l'espace OHADA,
Université de Yaoundé II, mémoire, p. 38.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
sécurisées74. Il convient donc de
présenter le RCCM et s'attarder sur la procédure d'inscription du
nantissement.
Il est important, pour présenter le RCCM d'analyser
aussi bien le fonctionnement de l'OHADA que son contenu. En ce qui concerne son
fonctionnement, le législateur OHADA a opté pour un
système de centralisation des données du RCCM. Ainsi il existe
trois niveaux de centralisation des données. D'abord, un Registre tenu
par le Greffe de chaque Tribunal Régional. Ensuite, et pour
compléter le premier, un Fichier National tenu au Greffe du Tribunal
Régional. Ce fichier centralise les renseignements consignés dans
chaque Registre du Commerce local et comprend un extrait de chaque dossier
individuel des personnes physiques et morales classées par ordre
alphabétique. Enfin, un Fichier Central OHADA à Abidjan. Ce
Fichier, commun à tous les Etats parties au Traité de l'OHADA est
tenu auprès de la CCJA75 et centralise tous les
renseignements dans chaque Fichier National.
Quant au contenu du RCCM, il faut souligner que le Registre
tenu au Greffe comprend: un Registre d'arrivée, qui mentionne dans
l'ordre chronologique la date et le numéro de chaque déclaration
avec les mentions requises76, la collection des dossiers
individuels77. Les déclarations qui y sont faites, sont
établies en quatre (4) exemplaires sur des formulaires fournis par le
Greffe. Ces exemplaires sont destinés respectivement au Greffe, au
déclarant, au Fichier National et au Fichier Central. Il faut souligner
qu'obligation est faite aux parties au nantissement d'y inscrire leur
sûreté. Cette inscription s'effectue suivant une certaine
procédure.
L'inscription au RCCM se fait au Greffe de la juridiction
compétente. Le créancier garanti ou le constituant du
nantissement doit présenter certains documents et inscrire certaines
mentions, sous le contrôle du Greffier. Le créancier garanti doit
produire l'acte constitutif du nantissement, de la créance ou du
contrat. Il faut en outre remplir un formulaire d'inscription en quatre (4)
exemplaires.
Une fois saisi du dossier, le greffier doit vérifier la
conformité du formulaire avec le titre présenté. Son
rôle se limite à cette tâche matérielle. Par
conséquent, il est incompétent pour
74 ERNST et YOUNG, « le droit OHADA :
Histoires, Institutions et Actes Uniformes », Ed. FFA, octobre 2006,
p.555
75 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.
76 Il s'agit notamment des nom et prénom,
raison sociale, objet de la déclaration.
77 Ces dossiers sont classés par ordre
alphabétique et contiennent: pour les personnes physiques, toutes les
indications relatives à leur identité, à la nature de
l'activité exercée, à l'adresse du principal
établissement et autres établissements secondaires. Pour les
sociétés commerciales et autres personnes morales, toutes les
indications relatives à la dénomination sociale, à la
forme juridique, à l'objet social, au siège social.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
soulever l'irrégularité juridique du titre
présenté. Si tout parait conforme, il procède à
l'inscription de la sûreté sur le registre chronologique et, dans
le même temps ;
- Fait mention de l'inscription au dossier individuel ouvert
au nom de la personne physique ou morale contre laquelle l'inscription est
prise;
- Classe les actes et un formulaire de déclaration qui
lui a été remise au dossier tenu sous le nom de la personne
physique ou morale contre laquelle est prise l'inscription, avec mention de
cette date d'inscription et de son numéro d'ordre;
- Remet à la personne qui a requis l'inscription le
second exemplaire de sa déclaration visée par le greffe qui
mentionne la date et le numéro d'ordre de l'inscription.
2- L'inscription au registre spécial
Aux termes de l'article 160, alinéa 3, de l'AUS, «
si le nantissement a pour objet un droit inscrit à l'un des
registres régis par la réglementation applicable en
matière de propriété intellectuelle, il doit, en outre,
être satisfait aux règles de publicité prévues par
cette réglementation ». Ainsi, l'inscription aux registres par
la réglementation des propriétés intellectuelles ne doit
être effectuée que si cette réglementation l'impose. Dans
les Etats membres de l'OAPI, l'obligation d'inscrire dans les registres ne
concerne que les droits de propriété industrielle, à
l'exclusion des droits de propriété littéraire et
artistique. Bien que dans ce dernier cas aucune inscription ne soit
imposée, il convient de souligner que l'oeuvre littéraire est
protégée en tant que telle78, c'est-à-dire
dès sa création et sans dépôt obligatoire
auprès d'un organisme officiel.
D'après l'article 13 de l'Accord, l'OAPI tient pour
l'ensemble de ses Etats membres un registre spécial pour chacune de ses
propriétés intellectuelles. De manière invariable il est
prévu que les actes comportant, soit transmission de
propriété, soit concession du droit d'exploitation ou de cession
de ce droit, soit gage ou mainlevée de gage relativement à une
demande de brevet ou à un brevet79, à une demande de
modèle d'utilité enregistré80, à un
dessin ou un modèle industriel81, à un nom
commercial82 ne sont opposables au tiers que s'ils ont
été inscrits dans le registre correspondant tenu par l'OAPI.
78 GAUTIER (P.-Y.), Propriété
littéraire et artistique, 8e éd., Paris, 2012,
n°186, p. 187.
79 Art. 26 et 27, Annexe I de l'ABR.
80 Art. 20 et 21, Annexe II de l'ABR.
81 Art. 20 et 26, Annexe III de l'ABR.
82 Art. 14, Annexe V de l'ABR.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Cette inscription doit être prise dans un délai de
12 mois à compter de la date à laquelle les actes ont
été accomplis. Il n'est cependant pas prévu de sanction
à l'inobservation de ce délai. Il en résulte comme le
précisent si bien certains auteurs83 que, même
après ce délai de 12 mois, la sûreté peut toujours
être inscrite.
B- La valeur de la publicité
La valeur des formalités de publicité est assez
clairement posée à travers les multiples dispositions des annexes
de l'Accord de Bangui révisé. En général, le
législateur OAPI énonce que les contrats portant sur les droits
de la propriété industrielle ne sont opposables aux tiers que
s'ils ont été inscrits dans les registres spéciaux
prévus à cet effet. L'inscription est donc une condition
d'opposabilité aux tiers du gage des droits de propriété
industrielle. Dans le même ordre d'idées, selon l'article 160 de
l'AUS, l'inscription du nantissement de propriété intellectuelle
a pour effet de rendre celui-ci opposable aux tiers. Il s'ensuit que la
sanction du défaut d'inscription est l'inopposabilité du
nantissement.
En l'absence de législation particulière en
matière de propriété littéraire artistique, il
semble possible d'étendre à ce domaine les dispositions relatives
à la propriété industrielle. Une bonne partie de la
doctrine semble épouser cette conception. En effet, elle estime que
durant la vie de la sûreté, l'inscription assure
l'opposabilité du droit de préférence du créancier
nanti. Elle conditionne également l'exercice de son droit de suite en
l'encontre d'un éventuel acquéreur du bien. Mais dans
l'immédiat, l'inscription permet aussi de déterminer le rang des
créanciers gagistes sur les mêmes droits. Certains auteurs sont
cependant allés plus loin pour proposer que l'inscription soit
érigée en condition de validité du nantissement.
Pour certains auteurs84, le caractère
immatériel des droits de propriété intellectuelle rend
impossible ou tout au moins difficilement réalisable la
dépossession. Il faudrait alors considérer que l'inscription en
est le substitut et devrait en épouser la valeur. Ainsi parce que la
dépossession est une condition de validité du gage, il faudrait
également considérer l'inscription qui la remplace comme une
condition de validité du gage des droits de propriété
intellectuelle. Cette doctrine estime donc que comme la dépossession,
l'inscription est de l'essence même du gage des meubles incorporels en
général, et à ce titre, la validité du contrat de
nantissement
83 ANOUKAHA (F.), CISSE-NIANG (A.), ISSA-SAYEGH
(I.), NDIAYE YANKHOBA (I.), FOLI (M.), SAMB (M.), OHADA,
Sûretés, juriscope 2002, p.121, n°317.
84 MESTRE (J.), PUTMAN (E.) et BILLIAU (M.),
Droit spécial des sûretés réelles, LGDJ,
1996, n°969 ; VIVANT (M.), « l'immatériel en
sûreté », in Mélanges CABRILLAC, LITEC
1999.
29
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
dépendrait de son accomplissement85.
L'opposabilité dont il est question ici ne produit ses
effets, à la lumière de l'article 57 dudit Acte uniforme, qu'au
jour de l'inscription au Registre du commerce et non à la date de l'acte
de nantissement. Il s'agit de l'application à l'inscription de
l'adage prior tempore optior jure. Le créancier a donc
intérêt à être diligent, car il peut être
primé par un créancier qui, bénéficiant
postérieurement sur les mêmes droits d'une sûreté,
aurait été premier à l'inscription. Le même article
57 règle la situation des inscriptions concurrentes
réalisées le même jour sur les mêmes biens. Ainsi
donc, lorsque les inscriptions sur les mêmes droits de
propriété intellectuelles s'effectuent le même jour, la
priorité est donnée à la sûreté dont la date
du titre est la plus ancienne. Si par contre les titres de nantissement ont la
même date, ces derniers sont réputés avoir le même
rang.
Conclusion du chapitre I :
L'entrée en vigueur de l'AUS nouveau le 15
décembre 2010 a innové le régime général des
sûretés. Il a notamment consacré un nantissement autonome
des droits de propriété intellectuelle, détachant ainsi ce
nantissement de celui du fonds de commerce. En effet, avant l'entrée en
vigueur de l'AUS, les droits de propriété intellectuelle
faisaient partie des éléments facultatifs du fonds de commerce.
Consacrer un nantissement autonome des droits de propriété
intellectuelle offre une nouvelle possibilité aux investisseurs. Il
constitue en réalité un nouveau moyen de financement.
85 ZOMISSI (G.), Le gage des droits de
propriété intellectuelle dans l'espace OHADA,
Université de Yaoundé II, mémoire, p. 41.
30
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE
INTELLECTUELLE
|
De manière courante, la propriété
intellectuelle sert à protéger les produits et créations
par l'octroi de monopole ou de droit exclusif, à savoir principalement
les brevets, les droits d'auteurs, les droits des marques, les droits des
dessins et modèles. Or, au regard de la valeur économique qu'ils
peuvent avoir, les droits de propriété intellectuelle peuvent
servir de moyen de financement. En effet, le patrimoine incorporel est plus que
jamais l'objet de toutes les attentions. La consécration d'un
nantissement autonome des droits de propriété intellectuelle
produit des effets. Ces derniers peuvent s'analyser autour des finalités
du nantissement (Section II), cependant, il convient de s'attarder sur un
nombre de règles et de précautions qui doivent être
respectées. Elles constituent les préalables à la prise de
nantissement (Section I).
Section 1 : Les préalables à la prise de
nantissement des droits de propriété intellectuelle
Avant d'envisager toute prise de nantissement sur les droits
de propriété intellectuelle, il convient pour tout
créancier, de déterminer la valeur des droits nantis (Paragraphe
I) et de vérifier l'existence du nantissement (Paragraphe II).
§ 1. La nécessaire évaluation de la
valeur des droits nantis
Par évaluation de la propriété
intellectuelle, on entend une analyse systématique des actifs de
propriété intellectuelle détenus, utilisés ou
acquis par une entreprise86. Pour Ian COCKBURN, sans
évaluation, pas de gestion possible87. La valeur d'un actif
dépend de sa capacité de générer des recettes et du
taux d'actualisation appliqué à ces recettes. La pratique a mis
en place des méthodes d'évaluation (A), qui ne vont pas sans
rencontrer de difficultés (B).
86 COCKBURN (I.), Evaluation de la
propriété intellectuelle: guide pratique,
http://www.wipo.int/sme/fr/documents/value_ip_intangible_assets.htm,
consulté le 22 février 2014 à 04:45.
87 Idem.
31
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
A- Les techniques d'évaluation
Les méthodes d'évaluation de la
propriété intellectuelle se repartissent en trois grandes
catégories : les méthodes axées sur le marché, les
méthodes fondées sur les coûts et la méthode des
revenus88.
Lorsque la situation est idéale, l'expert
indépendant préférera toujours déterminer la valeur
sur le marché en se référant à des transactions
commerciales comparables. C'est un exercice déjà difficile
lorsqu'il faut évaluer des actifs tels que des briques et du mortier car
il est impossible de trouver une transaction qui soit exactement comparable.
Mais lorsqu'il s'agit d'évaluer un élément de
propriété intellectuelle, chercher une transaction commerciale
comparable est presque vain. Cela est dû non seulement à une
incompatibilité mais aussi au fait que la propriété
intellectuelle n'est en général pas conçue pour être
vendue, que de nombreuses ventes ne constituent souvent qu'une petite partie
d'une transaction plus importante et que des éléments demeurent
extrêmement confidentiels. Il existe d'autres facteurs qui limitent
l'utilité de cette méthode, à savoir l'existence
d'acheteurs spéciaux, des capacités de négociation
différentes et les effets déformateurs des points de retournement
des cycles économiques. En résumé, cela explique pourquoi
je suis contre cette méthode qui fait la part belle à
l'approximation.
Les méthodes fondées sur les coûts, tels
que le «coût de création» ou le «coût de
remplacement» d'un actif donné, partent du principe qu'il y a un
lien entre le coût et la valeur et ne présentent pas grand-chose
d'autre comme avantage que la facilité d'utilisation. Cette
méthode ne tient pas compte des changements de la valeur de rendement de
l'argent, ni de la maintenance.
Les méthodes d'évaluation reposant sur les
méthodes des revenus peuvent être réparties en quatre
groupes: capitalisation des bénéfices cumulatifs, méthodes
de différenciation des bénéfices bruts, méthode des
bénéfices excédentaires et méthode de
l'allégement fiscal au titre des redevances89.
- La capitalisation des bénéfices cumulatifs
permet de calculer la valeur d'un droit de propriété
intellectuelle en multipliant la rentabilité cumulative
réalisable de l'actif par un multiple qui a été
établi après cotation de la vigueur relative du droit de
propriété intellectuelle. Ainsi, un multiple est
88 KING (K.), « la valeur de la
propriété intellectuelle, de l'actif incorporel et du fonds de
commerce »,
http://www.wipo.int/sme/fr/documents/value_ip_intangible_assets.htm,
consulté le22 février 2014 à 04:45.
89 Idem.
32
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
déterminé après évaluation d'une
marque à la lumière de facteurs tels que la
prépondérance, la stabilité, la part de marché, le
caractère international, l'évolution de la rentabilité, le
support commercial et publicitaire et la protection. Si ce processus de
capitalisation reconnaît certains des facteurs dont il faut tenir compte,
il présente des inconvénients majeurs, liés
essentiellement à la capacité bénéficiaire
cumulative. Cette méthode fait peu cas de l'avenir.
-Les méthodes de différenciation des
bénéfices bruts sont souvent associées à une
évaluation des marques. Ces méthodes tiennent compte des
différences de prix de vente, corrigées des différences de
coûts de commercialisation. Il s'agit de la différence de marge
entre un produit de marque ou un produit breveté et un produit sans
marque ou générique. Cette formule sert à éliminer
les liquidités et à calculer la valeur. Trouver des
équivalents communs est bien plus difficile pour un brevet ou des
différences de prix notables que pour une marque réservée
au commerce de détail.
-La méthode des bénéfices
excédentaires fait intervenir la valeur la plus récente des
actifs corporels nets utilisés comme point de référence
pour un taux de rendement estimatif. Elle sert à calculer les
bénéfices nécessaires pour pouvoir encourager les
investisseurs à investir dans ces actifs corporels nets. Les recettes
dépassant ces bénéfices nécessaires pour attirer
les investissements sont considérées constituer les recettes
excédentaires attribuables aux droits de propriété
intellectuelle. S'il est vrai que, théoriquement, cette méthode
fait fond sur de futurs avantages économiques découlant de
l'utilisation de l'actif, il n'en reste pas moins qu'elle tient difficilement
compte des autres utilisations de l'actif.
-La méthode de l'allégement au titre des
redevances prend en considération ce que l'acheteur peut se permettre ou
serait prêt à payer pour une licence portant sur un droit de
propriété intellectuelle analogue. Le flux des redevances est
alors capitalisé, reflétant le lien risque-rendement de
l'investissement dans l'actif.
B- Les difficultés de l'évaluation
La nécessité d'évaluer les droits de
propriété intellectuelle avant toute prise de nantissement est
indéniable. Cependant, au regard d'un certains nombre d'aspects, cette
évaluation n'est pas tout à fait aisée. Cette
difficulté est valable aussi bien pour les droits de
propriété intellectuelle existants, que pour les droits futurs
33
34
35
36
37
38
39
40
41
42
43
44
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
1- La difficile évaluation des droits
existants
L'évaluation des droits de propriété
intellectuelle existants n'est pas aisée. C'est sans doute ce qui
justifie d'ailleurs que, certains auteurs estiment qu'évaluer les droits
de propriété intellectuelle relève plus de l'art que de la
science90. La principale difficulté à laquelle est
confronté un créancier est le caractère fluctuant de la
valeur de ces différents droits. Ainsi, plusieurs raisons peuvent
conduire un droit de propriété intellectuelle à perdre sa
valeur.
L'auteur à sur son oeuvre des droits moraux et des
droits patrimoniaux. Et comme il a déjà été
souligné, seuls les droits patrimoniaux peuvent faire l'objet d'un
nantissement. Or pour être pris en compte par un éventuel
créancier, l'oeuvre doit avoir une valeur bien précise. C'est
celle-ci qui convaincra le créancier. La valeur financière d'une
oeuvre dépend de sa réussite ou du moins sa consommation
sociale91. Il peut arriver qu'à sa divulgation, l'oeuvre
perde sa valeur. La perte de la valeur d'une oeuvre peut résulter de
plusieurs facteurs. C'est par exemple le cas lorsque l'oeuvre n'atteint pas la
cible sociale souhaitée ou les objectifs sociopolitiques. Il est bien
vrai que la qualité d'une oeuvre importe peu pourvu qu'elle soit
originale. Mais, il ne faut pas oublier que la qualité de l'oeuvre peut
justifier sa réussite et influencer son évaluation certaine. Or
la question de qualité s'analyse bien souvent subjectivement, ce qui
rend la tache difficile. La volatilité des droits de la
propriété intellectuelle ne facilite leur évaluation.
Tout comme l'auteur, la création peut perdre une grande
valeur une fois qu'elle a fait l'objet d'une divulgation. C'est
généralement le cas lorsque la création n'a pas encore
été mise à la connaissance du public. Lorsque la
création a été mise à la connaissance du public, la
contrefaçon peut venir porter un grand coup à la valeur du bien
crée. En réalité, la divulgation fait partie des droits
d'un créateur. Ce qui est préjudiciable, c'est bien la
divulgation prématurée. Elle consiste à communiquer
certaines informations relatives à une invention avant d'avoir
déposé une demande de brevet. Ces informations peuvent être
contenues dans un abrégé, une affiche, une thèse en
souffrance, et même une description orale de l'invention à un
quelconque auditoire, même s'il s'avère en définitive que
la divulgation n'est pas le fait de l'inventeur92. Dans la plupart
des pays,
90 SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), la prise
de garantie en matière de propriété intellectuelle au
CANADA,
info@robic.com -
www.robic.ca.
91 KODJI (Z.), Le droit d'auteur en garantie de
crédit, mémoire de Master II en droit privé, option
droit des affaires, soutenu en 2008, Université de
Ngaoundéré.
92 WIPO, Principes directeurs pour
l'élaboration d'une politique de propriété intellectuelle
à l'intention des universités
et des instituts de
recherche-développement,
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
une divulgation prématurée compromet la
brevetabilité d'une invention. Par ailleurs, la contrefaçon est
une violation d'un droit de propriété intellectuelle par le fait
de reproduire ou d'imiter quelque chose sans en avoir le droit ou en affirmant
ou laissant présumer que la copie est authentique93. En
conséquence, la contrefaçon et la divulgation
prématurée contribuent à créer le doute dans
l'esprit des investisseurs, et donc, conduisent ces derniers à
hésiter quand il s'agit d'octroyer du crédit. En d'autres termes,
L'évaluation incertaine des oeuvres qu'elles soient futures ou
existantes a pour conséquence immédiate de provoquer la
réticence des créanciers qu'ils soient des personnes physiques ou
des personnes morales à savoir des établissements de
crédit. Cette hésitation est encore plus grande en ce qui
concerne le nantissement des droits futurs.
2- La difficile évaluation des droits
futurs
Les droits de la propriété intellectuelle
même existants, ne sont pas facilement évaluables et du coup, la
situation sera beaucoup plus complexe pour ceux à venir. En effet, la
véritable complexité vient de ce qu'une telle évaluation
est principalement spéculative On peut légitimement dire que
l'obligation de conservation qui pèse sur le débiteur d'une
oeuvre existante sera difficilement demandée au débiteur ayant
donné en garantie son droit d'auteur futur. A cela s'ajoute l'absence
d'enregistrement. La simple réunion de certains critères suffit
à protéger une personne, ayant apporté quelque chose
d'originale dans le domaine littéraire et artistique94.
L'article L-131-1 du Code de Propriété Intellectuelle
français énonce que: « La cession globale des oeuvres
futures est nulle. » Cette disposition fait aussi l'objet d'une
consécration dans la loi camerounaise de 2000. Un tel libellé a
des implications sur l'évaluation des oeuvres futures lorsque cela est
possible; les conséquences ne manqueront pas. Elles sont d'ailleurs
évidentes.
L'évaluation de la valeur des oeuvres futures comme
pour les oeuvres existantes n'est pas sans conséquences. Il y aurait
aussi une difficulté évidente à constituer des
sûretés faute de certitude lorsqu'il va falloir évaluer la
valeur d'une oeuvre. Ce constat mérite d'être nuancé. Les
stipulations contractuelles peuvent envisager une évaluation autre que
la complexité liée à l'oeuvre elle-même. Mais, la
grande probabilité est de se heurter à l'insuffisance des
critères d'évaluation. Même le nantissement des films
cinématographiques qui, aux yeux de certains, parait avoir un
régime beaucoup plus simple, cela demeure une tache ardente et
difficile.
http://books.google.cm/books?id=swDFcumUsOgC&dq=divulgation+d%27une+propri%C3%A9t%C3%A9+intellectue
lle&hl=fr&source=gbs_navlinks_s, consulté le 26 mars 2014
à 19H55.
93
http://fr.wikipedia.org/wiki/Contrefa%C3%A7on.
94 Art. 13 (1) de la loi camerounaise sur le droit
d'auteur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
La prise de nantissement des droits de propriété
intellectuelle entraine un certain nombre de difficultés, et ce, qu'il
s'agisse des droits existants ou futurs. Cependant, ces difficultés
n'empêchent pas de manière péremptoire, la
possibilité de nantir ces droits. C'est justement pour éviter
d'éventuels écueils, qu'il est nécessaire de
vérifier l'existence du nantissement.
§ 2. La nécessité de vérifier
l'existence du nantissement
Avant toute prise de nantissement sur les droits de
propriété intellectuelle, il importe qu'un certain nombre
d'informations soit réuni pour éviter toute remise en cause dudit
nantissement. Ces informations concernent tant la durée (A) que
l'existence d'éventuels contentieux liés au nantissement (B).
A- La durée du nantissement
La durée du nantissement est intimement liée
à la durée de la protection qui est accordée par l'OAPI.
Or, il est clair que la protection varie selon l'objet de la protection. On en
déduit alors que la durée du nantissement est fonction de son
objet. Ainsi, l'Annexe I de l'accord octroi une durée de protection de
vingt ans pour le brevet95. Cette durée est de dix ans pour
les modèles d'utilité et les schémas de configuration de
circuits intégrés. En d'autres termes, le monopole d'exploitation
des modèles d'utilité et des schémas de configuration
topographique96 a une durée de dix ans, sans
possibilité de renouvèlement. Cette durée est la
même les marques de produits ou de services et les noms
commerciaux97, à la différence que le délai de
dix ans est renouvelable indéfiniment. La protection dans ces cas, est
susceptible d'être « éternelle ». La durée de
protection des dessins et modèles industrielles est de quinze
années au maximum. Dans ce dernier cas, la durée de protection
est de cinq ans, sauf que cette durée est renouvelable deux fois.
De manière générale, la durée de
la protection en matière de propriété littéraire et
artistique est très étendue. En effet, elle varie selon qu'il
s'agit des droits moraux ou des droits patrimoniaux. Les droits moraux sont
illimités dans le temps. Après l'expiration des droits
patrimoniaux, l'organisme
95 Art. 9 de l'Annexe ABR : « Le brevet
expire au terme de la vingtième année civile à compter de
la date de dépôt de la demande... ».
96 Art. 7 (2) de l'Annexe IX, ABR.
97 Art. 19 de l'annexe III pour la durée de
protection des marques de produits ou de services et l'art. 11 de l'Annexe V
pour les noms commerciaux.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
national de gestion collective des droits visés
à l'article 60 est en droit de respecter les droits moraux en faveur des
auteurs98. Quant aux droits patrimoniaux, ceux auxquels on
s'intéresse, ils sont protégés pendant la vie de l'auteur
et soixante-dix ans après sa mort. Il faut souligner qu'au regard de la
diversité de nature des oeuvres de l'esprit, le durée de
protection est tout aussi diversifiée. La première des oeuvres,
est l'oeuvre de collaboration dont les droits patrimoniaux sont
protégés pendant la vie du dernier auteur survivant et
soixante-dix ans après sa mort. En suite, pour ce qui est des oeuvres
publiées de manière anonyme ou sous un pseudonyme, les droits
patrimoniaux sont protégés jusqu'à l'expiration d'une
période de soixante-dix ans à compter de la fin de l'année
civile où une telle oeuvre a été publiée licitement
pour la première fois, ou, à défaut d'un tel
évènement intervenu dans les soixante-dix ans à partir de
la réalisation de cette oeuvre. La même durée de protection
est réservée aux oeuvres collectives et
audiovisuelles99. Pour la dernière catégorie d'oeuvres
envisagée par l''Annexe VII de l'ABR, c'est-à-dire celle
réservée aux oeuvres des arts appliqués, les droits
patrimoniaux sont protégés jusqu'à l'expiration d'une
période de vingt cinq ans à partir de la réalisation d'une
telle oeuvre100. La vérification de la durée du
nantissement faite, il convient de vérifier qu'il n'existe pas de
contentieux lié au nantissement.
B- Le contentieux lié au nantissement
Vérifier l'existence d'un contentieux lié au
nantissement revient pour le créancier gagiste, de s'assurer des
conditions de levée du nantissement d'une part, et des conditions de
radiation du nantissement d'autre part.
1- Les conditions de levée du
nantissement
La mainlevée est l'acte par lequel un particulier ou un
juge arrête les effets d'une sûreté, d'une opposition. En
l'espèce, la main levée sera l'acte par lequel une partie ou le
juge arrête les effets du nantissement. En effet, la personne physique ou
morale contre laquelle a été prise une inscription de
nantissement peut, à tout moment, saisir la juridiction
compétente, ou l'autorité compétente dans l'Etat partie,
d'une demande visant à obtenir la mainlevée ou le cantonnement du
nantissement. La juridiction compétente, ou l'autorité
compétente dans l'Etat partie, peut, en tout état de cause et
98 Art. 22(2), de l'Annexe VII, ABR.
99 Art. 25, de l'Annexe VII, ABR.
100 Art. 26, de l'Annexe VII, ABR.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
avant même d'avoir statué au fond, donner
mainlevée totale ou partielle du nantissement si le requérant
justifie de motifs sérieux et légitimes101.
La condition exigée pour obtenir levée du
nantissement est l'existence de motifs sérieux et légitimes. La
question pourrait alors se poser de savoir ce que le législateur entend
par motifs sérieux et légitimes. Par ailleurs, allant dans la
même veine, quelles seraient les critères qui lui permettraient
d'apprécier les caractères sérieux et légitimes des
motifs évoqués par la personne qui souhaite obtenir la
levée du nantissement. En réalité, c'est au juge qu'il
reviendra d'apprécier les motifs justifiant la demande de
mainlevée du nantissement des droits de propriété
intellectuelle. Cette appréciation sera faite in concreto, en
d'autres termes, au cas par cas. Le risque dans cette hypothèse et que,
ce qui dans un Etat partie est constitutif de motif grave et légitime ne
l'est pas forcément dans un autre.
Outre la justification de motifs graves et légitimes,
la mainlevée de nantissement doit obéir à une
formalité particulière. C'est du moins ce qui ressort de l'ABR.
En effet, l'article 33(2) de l'Annexe I stipule que les actes comportant, soit
transmission de propriété, soit concession de droit
d'exploitation ou cession de ce droit, soit gage ou mainlevée de
gage102 relativement à une demande de brevet ou à un
brevet, doivent, sous peine de nullité, être constatés par
écrit103. Le formalisme entourant la mainlevée de
nantissement des droits de propriété est d'une telle importance
que, la non exécution de cette formalité est sanctionnée
par la nullité. Les actes qui ont pour objet la mainlevée de
gage, seront donc nuls s'ils ne sont pas constatés par écrit. Les
conditions qui entourent la levée du nantissement des droits de
propriété intellectuelle sont d'une importance telle que, l'on
devrait également s'interroger sur les conditions de radiation du
nantissement des droits de propriété intellectuelle.
2- Les conditions de radiation du
nantissement
La radiation se définie comme l'exécution par le
conservateur des hypothèques d'un acte ou d'un jugement de
mainlevée d'une hypothèque et qui se réalise par une
mention en marge de l'inscription. Plus précisément, en
matière de sûreté, la radiation est l'opération
matérielle qui consiste à rayer ou à supprimer une
inscription sur un registre en y portant une mention en marge de
101 C'est ce qui ressort de la lecture in fine de
l'article 61 AUS du 15 décembre 2010.
102 La notion de gage doit entendue ici comme nantissement.
103 Ces dispositions sont reprises aux art. 28(2), Annexe II ABR
; art. 26 (2), Annexe III, ABR ; art. 20(2) Annexe IV, ABR.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
l'inscription initiale. La radiation peut, en plus
d'être totale ou partielle, être conventionnelle ou judiciaire. Ce
sont d'ailleurs, sur ces aspects qu'il convient de s'arrêter.
La radiation conventionnelle est celle qui émane de la
volonté des parties à la convention de nantissement, notamment du
créancier ou de son cessionnaire régulièrement
subrogé et justifiant de ses droits. A cet effet, elle ne peut
être opérée que sur dépôt ou transmission
électronique d'un acte authentique ou sous seing privé de
consentement à la radiation, donné par le créancier ou son
cessionnaire régulièrement subrogé et justifiant de ses
droits, ainsi que d'un formulaire portant mention:
- Des nom, prénom, dénomination sociale,
domicile ou siège social, ainsi que, le cas échéant, le
numéro d'immatriculation de la personne physique ou morale contre
laquelle avait été requise l'inscription, ou en cas d'inscription
portant sur des droits d'associés et valeurs mobilières, le
numéro d'immatriculation de la personne morale dont les droits
d'associés et valeurs mobilières font l'objet de cette
inscription;
- De la nature et de la date du ou des actes
déposés.
Une fois la vérification de la conformité de
l'acte faite, le greffier porte l'inscription de la radiation sur RCCM, et
délivre un certificat de radiation à toute personne qui en fera
la demande.
La radiation judiciaire résulte quant à elle,
d'une juridiction compétente du lieu de l'inscription. Elle devient
nécessaire lorsque le créancier ou son subrogé refuse de
consentir à la radiation conventionnelle, et n'a d'effet que si elle est
inscrite en marge de l'inscription initiale. Par ailleurs, elle est
ordonnée par la juridiction compétente ou par l'autorité
compétente dans l'Etat partie104. Une fois l'ensemble de ces
informations vérifiées, le créancier nanti peut
désormais prendre un nantissement en parfaite connaissance de cause.
Section 2 : La finalité du nantissement
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle tel que perçu par l'AUS du 15 décembre 2010,
constitue désormais un important outil de financement pour les
entreprises. C'est d'ailleurs là, la finalité,
l'intérêt pour une entreprise. Le financement de la
propriété intellectuelle, c'est-à-dire l'utilisation en
garantie d'une créance de marques, dessins et modèles, brevets et
droits d'auteur ou autres actifs intellectuels, suscite un intérêt
croissant dans les milieux concernés. En effet, de plus
104 Art. 63, AUS du 15 décembre 2010.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
en plus d'entreprises, utilisent leurs droits de
propriété intellectuelle comme une source de crédit, et de
plus en plus d'institutions financières réalisent des
opérations dans lesquelles des droits sont donnés en
sûreté. On en déduit aisément que, le nantissement
des droits de propriété intellectuelle est aussi bien
bénéfique pour les entreprises en fonctionnement (Paragraphe I),
que pour les entreprises en difficulté (Paragraphe II).
§ 1. Le nantissement et les entreprises en
fonctionnement
Il a déjà été souligné que
les droits de propriété intellectuelle constituaient dans bien
des cas, des actifs de grande valeur, mais qu'en plus ils étaient aussi
une source importante de financement. Les actifs incorporels peuvent augmenter
la valeur des entreprises, et le fait de savoir en apprécier
l'importance permet à leurs dirigeants de prendre des décisions
financières et commerciales plus informées. Une meilleure
évaluation de ces actifs peut faciliter les négociations avec les
investisseurs (A) et l'accès au crédit (B).
A- Le nantissement, une garantie aux investisseurs
Le nantissement est l'affectation d'un meuble incorporel ou
d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en
garantie d'une ou de plusieurs créances, présentes ou futurs,
à condition que celles-ci soient déterminées ou
déterminables105. Les droits de propriété
intellectuelle peuvent donc être nantis et constituent pour le
créancier une garantie. La valeur de ces droits est un aspect non
négligeable pour tout créancier, pour tout investisseur.
L'investisseur étant entendu comme toute personne qui place des capitaux
dans l'achat de biens de production106.
Des nombreux risques auxquels est exposée une banque,
le plus grave et le plus traditionnel découle de l'activité de
prêteur. Le banquier est toujours exposé à la
défaillance de son débiteur. Analyser le risque, le
prévenir si possible, détecter sa réalisation, se garantir
sont des aspects permanents du métier de banquier, lequel prête
l'argent d'autrui, opère avec des marges étroites et dispose de
fonds propres très limités au regard de la masse des capitaux
qu'il gère. L'analyse traditionnelle distingue différents types
de risques : le risque général (crise mondiale, guerre...), le
105 Art. 125 AUS du 15 décembre 2010.
106 REY (A.), GRAND ROBERT de la langue
française, version électronique 2.0, Le Robert/SEJER, 2005,
www.lerobert.com, V°
investisseur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
risque professionnel (crise affectant une branche
d'activité : agriculture, énergie, immobilier) et le risque de
l'entreprise. Elle doit être complétée par l'apparition
plus récente du risque né de l'endettement excessif de certains
pays, appelé risque-pays ou risque souverain107.
Pour pallier l'éventuelle insolvabilité de son
débiteur, le banquier essaie de se garantir par ce que l'on appelle des
« sûretés ». Celles-ci ne sont pas essentielles à
la décision du crédit; plus importante est la confiance que le
banquier accorde à son client. Elles n'en assurent pas moins une
certaine protection en exerçant notamment sur le débiteur une
action psychologique qui doit l'aider à respecter scrupuleusement ses
engagements. En l'espèce, le nantissement constitue cette garantie.
Normalement, les biens donnés en sûreté sont des actifs
corporels tels que des biens immobiliers, des équipements ou des stocks.
L'apport des droits de propriété intellectuelle en garantie d'un
prêt peut contribuer à augmenter le montant de celui-ci. Lorsque
l'emprunteur engage ses brevets, ses marques ou ses oeuvres
protégées par le droit d'auteur, la valeur des biens
donnés en garantie croît, et avec elle, les chances d'obtenir le
montant recherché. Certaines banques utilisent aussi les actifs de
propriété intellectuelle comme instrument de renforcement du
crédit. Devant le nombre croissant d'opérations de financement
qui sont ainsi appuyées par des droits de propriété
intellectuelle et l'augmentation des sommes liées à la concession
de licences de propriété intellectuelle, Wall Street et les
marchés financiers du monde entier commencent à manifester de
l'intérêt108.
B- Le nantissement, un moyen de crédit
Littéralement, le crédit est l'influence dont
jouit une personne ou une chose auprès de quelqu'un, par la confiance
qu'elle inspire. Plus encore, c'est la confiance qu'inspire quelqu'un, sa
réputation de solvabilité109. Désormais, le
crédit ne repose plus sur la confiance, elle est une opération
financière. En effet, c'est l'opération par laquelle une personne
met une somme d'argent à la disposition d'une autre, et par extension,
le crédit est cette somme. La définition qui en est donnée
par le droit commercial est encore plus large dans la mesure, constitue une
opération de crédit tout acte par lequel une personne met ou
promet de mettre des fonds à la disposition d'une
107 BURGARD (J. J.), « Crédit», in
Encyclopaedie Universalis 2010, Logiciel Encyclopaedia Universalis, Paris
2010.
108 LONGCROFT (L.), « Propriété
intellectuelle et financement - une introduction », in
Magazine de l'OMPI, septembre 2008,
http://www.wipo.int/wipo_magazine/fr/2008/05/article_0001.html,
consulté le 30 mars 2014 à 19H 00.
109 REY (A.), GRAND ROBERT de la langue
française, version électronique 2.0, Le Robert/SEJER, 2005,
www.lerobert.com, V°
crédit.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
autre personne ou prend dans l'intérêt de
celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement ou une
garantie110.
En France, la loi du 24 janvier 1984, qui régit
l'activité bancaire, définit le crédit comme une
opération de banque ne pouvant être effectuée «
à titre habituel » que par des sociétés
spécialement agréées comme « établissements de
crédit ». Ces derniers jouissent donc du monopole de ces
opérations. Ils constituent six catégories. Quatre sont
autorisées à recueillir des dépôts à vue: les
banques, les banques coopératives ou mutualistes (Crédit
agricole, banques populaires, Crédit mutuel, Crédit
coopératif), les caisses d'épargne, les caisses de crédit
municipal. Les deux autres catégories - sauf exceptions définies
par des textes particuliers ou lors de leur agrément - ne peuvent faire
que du crédit: sociétés financières et institutions
financières spécialisées (Crédit foncier de France,
Crédit national, Crédit d'équipement des petites et
moyennes entreprises, etc.). Certains organismes d'État peuvent
également faire du crédit dans certaines conditions:
Trésor public, Caisse des dépôts et consignations,
Poste111.
La question que l'on se pose est celle de savoir en quoi le
nantissement constitue un moyen de crédit. Le crédit suppose un
minimum de confiance, une confiance en la solvabilité de son partenaire
économique. Or nantir ses droits de propriété
intellectuelle, notamment lorsque la valeur de ceux-ci est certaine, permet
d'assurer au banquier un minimum de sécurité. Une fois la
sensation de sécurité acquise, il devient plus évident
pour le banquier ou le créancier potentiel de prêter.
Comme on l'a souligné, de plus en plus d'entreprises,
utilisent leurs droits de propriété intellectuelle comme une
source de crédit, et de plus en plus d'institutions financières
réalisent des opérations dans lesquelles des droits sont
donnés en sûreté. Une institution112 des Nations
Unis mène des travaux avec ses Etats membres afin de moderniser les
pratiques en matière de financement garanti et de permettre aux
titulaires de droits de propriété intellectuelle d'obtenir des
crédits dans de bonnes conditions de coût. Selon cette
institution, pour rentabiliser les droits de propriété
intellectuelle d'une entreprise, il convient que ces droits soient pris en
compte lors de l'élaboration du plan de
développement113 de ladite entreprise. En effet, les
connaissances nouvelles ou originales et l'expression créative
d'idées constituent un élément moteur des entreprises
florissantes du XXIe siècle. Par conséquent, la
protection de ces connaissances et expressions créatives contre une
110 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de),
« lexique des termes juridiques », Dalloz, 12e
éd., 1999, p. 162, V. crédit (opérations de).
111 BURGARD (J. J.), « Crédit», in
Encyclopaedie Universalis 2010, Logiciel Encyclopaedia Universalis, Paris
2010
112 Commission des Nations Unis pour le droit commercial
international (CNUDCI).
113 Le plan de développement est entendu comme
étant un mécanisme permettant de s'assurer que les ressources ou
actifs d'une entreprise sont employés utilement dans toutes les
activités afin d'acquérir et de conserver un avantage
concurrentiel sur le marché.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
divulgation involontaire ou l'utilisation non autorisée
par des concurrents joue un rôle de plus en plus décisif dans
l'acquisition et la conservation d'un avantage concurrentiel.
Convaincre un créancier d'octroyer un crédit
nécessite, de la part du dirigeant d'une entreprise souhaitant nantir
ses droits de propriété intellectuelle, de répondre
à un ensemble de questions. C'est notamment celles de savoir quels
actifs de propriété intellectuelle l'entreprise détient,
quelle est la situation de son porte feuille de propriété
intellectuelle, comment l'entreprise prévoit protéger ses actifs
de propriété intellectuelle, Quel est le rôle des actifs de
propriété intellectuelle dans la réussite de l'entreprise.
Toutes ces questions visent à éclairer l'investisseur potentiel
non seulement sur les risques éventuels qu'il court en investissant,
mais également sur la valeur de la garantie qu'il a.
Pour une entreprise en fonctionnement, le nantissement des
droits de propriété intellectuelle joue donc un double
rôle: il est d'une part une garantie pour les investisseurs de par la
valeur des droits nantis, et d'autre part un outil facilitant l'accès au
crédit grâce à la confiance qu'il instaure entre le
créancier et le débiteur. Le recours au nantissement pour obtenir
du crédit n'est pas propre aux entreprises en fonctionnement.
L'intérêt de ce recours est tout aussi grand pour les entreprises
qui traversent des moments difficiles.
§ 2. Le nantissement des droits de
propriété intellectuelle et les entreprises en
difficulté
L'entreprise est l'unité économique qui implique
la mise en oeuvre de moyens humains et matériels de production ou de
distribution de richesses reposant sur une organisation
préétablie. Elle est une personne morale au sens du droit
à partir du moment qu'elle remplie toutes les conditions exigées
pour sa constitution. En tant que telle, elle nait, vit et meurt. Il n'est donc
pas rare de voir une entreprise traverser un certain nombre de
difficultés qui menace son existence. Ainsi, une entreprise d'apparence
prospère se trouve toujours sous la menace de sérieuses
difficultés114. Le nantissement intervient donc comme un
moyen de financement du redressement de l'entreprise (A) quand le sauvetage est
encore possible, ou plus encore comme un moyen de rachat de l'entreprise
(B).
114 Il suffit, par exemple, qu'un nouveau brevet soit
déposé et exploité pour que sa production soit à
terme moins compétitive, ou que survienne une crise économique ou
une mésintelligence entre les associés.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
A- Un outil de financement du redressement
Les facteurs de défaillance d'une entreprise peuvent
être d'origine interne ou externe à celle ci115. Les
facteurs interne tiennent ou bien aux dirigeants ou bien à la
production, ou bien encore à l'état financier de l'entreprise.
Les facteurs externes quant à eux n'ont qu'une faible incidence - sauf
exception - sur les défaillances des entreprises, et ils correspondent
aux variations de la politique du crédit, aux évènements
aléatoires affectant l'économie (crises sectorielles,
régionale ou nationale), ou à la défaillance d'un
débiteur important ou de plusieurs d'entre eux. Les signes
extérieurs des difficultés que traverse une entreprise sont
variés et vont depuis l'apparition de certains
déséquilibres ou difficultés jusqu'aux reports
d'échéances, un règlement tardif des impôts, taxes
et cotisations sociales, l'inscription de privilèges, de protêts,
un recours permanent au découvert bancaire ou encore des cessions
d'actifs, une paralysie des organes de gestion etc... Chacune des causes
spécifiques entraîne son lot de conséquences, et
l'accumulation des facteurs d'aggravation financière et sociale
désespérée.
Quoi qu'il en soit, le droit de procédure collectives
d'apurement du passif OHADA retient une définition restrictive de
l'entreprise en difficulté dans le cadre de ses conditions d'ouverture
et incluant à la fois l'état de cessation des paiements ainsi que
la situation difficile mais non irrémédiablement
compromise116. Il ressort de l'AUPCAP que trois procédures
sont envisageables quand l'entreprise traverse des difficultés. Il
s'agit du règlement préventif, du redressement judiciaire et de
la liquidation des biens. Le concordat n'intervient cependant que dans les deux
premiers cas, parce que l'entreprise peut encore être sauvée.
Le sauvetage de l'entreprise reste la priorité, et
c'est dans cette optique que peuvent être nantis les droits de
propriété intellectuelle. Le nantissement permettra d'avoir des
capitaux frais, permettant ainsi à l'entreprise d'éponger sinon
la totalité de son passif, du moins une partie conséquente. C'est
notamment le cas lorsque la valeur des droits nantis est importante. Nantir les
droits de propriété intellectuelle peut aussi faire partie des
propositions que le dirigeant de l'entreprise fait dans le
concordat117. La recherche de fonds peut conduire le débiteur
à céder ou à
115 POUGOUE (P. G.) et KALIEU (Y.), L'organisation des
procédures collectives d'apurement du passif OHADA, P.U.A, 1999, p.
19 et 20.
116 Art. 2 alinéas 2 et 4 de l'Acte Uniforme portant
organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA.
117 Le concordat est le document qui comporte l'ensemble des
mesures de redressement envisagés par le débiteur. De la
qualité du concordat dépend l'ouverture de la procédure de
redressement. Il est alors important que le concordat soit sérieux.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
louer les actifs de l'entreprise, et emprunter les
fonds118. Sur ce dernier point, c'est-à-dire l'emprunt des
fonds, il n'est plus nécessaire de rappeler l'importance de la relation
de confiance qui doit exister entre le prêteur et le débiteur, ni
la nécessité de sécuriser le contrat de prêt par un
nantissement.
Quand l'ensemble des mesures visant le sauvetage de
l'entreprise est épuisé, et qu'aucun résultat positif
n'est observé, on songe souvent à la liquidation des biens. Dans
cette hypothèse, les droits de propriété intellectuelle
peuvent constituer une garantie de rachat de l'entreprise.
B- Une garantie de rachat de l'entreprise
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle peut aussi servir à garantir le financement d'un rachat
ou d'une reprise d'entreprise et ce, qu'il s'agisse d'une acquisition, d'un
LBO119 ou d'autres types de financement, dès lors qu'un
banquier ou financier vient prêter de l'argent à des personnes
physique ou morales.
Une reprise d'entreprise est l'achat du capital, ou du moins
de la majorité du capital d'une entreprise existante par une personne,
ou un groupe de personnes, ou une autre entreprise120 qui en
assureront la gestion. Dans le cas d'une reprise d'entreprise
par ses salariés, les repreneurs sont une partie
(généralement les cadres dirigeants), voire la totalité
des salariés existants de l'entreprise. Comme en général
ils ne disposent que d'une petite partie des capitaux nécessaires, le
complément est habituellement apporté par un organisme financier
spécialiste de ce genre d'opérations (banque d'investissement ou
fonds de capital-investissement par exemple). Cet apport extérieur
comporte généralement une participation au capital et/ou un
prêt121.
Le leveraged buy-out, abrégé en LBO,
terme anglais pour acquisition avec effet de levier, ou encore acquisition par
emprunt122 ou rachat d'entreprise par endettement123, est
une technique financière parfois utilisée pour acheter une
entreprise. Le « LBO » consiste à financer une fraction du
rachat d'une entreprise en ayant recours à l'endettement bancaire ou
obligataire, ce qui permet
118 EBANGA KANE (P.), « La nature juridique du concordat
du redressement judiciaire dans le droit des affaires OHADA », in
Juridis n° 50, p.109 et s., Ohadata D-08-23.
119 Levered buy-out.
120 Il s'agit alors du domaine des fusion-acquisitions.
121
http://fr.wikipedia.org/wiki/Reprise_d%27entreprise,
consulté le 1er avril 2014 à 12H08.
122 MENARD (L.) et al. Dictionnaire de la
comptabilité et de la gestion financière, 3e éd.,
Montréal, Institut canadien des comptables agréés,
version électronique, c2011.
123 Idem.
45
Le nantissement des droits de
propriété intellectuelle
d'augmenter la rentabilité des capitaux propres. La
dette d'acquisition, bancaire ou non, est remboursée par une ponction
plus importante sur les flux de trésorerie de la société
achetée124. Les banques jouent un rôle primordial dans
les opérations de LBO puisque ce sont elles qui assurent la plus grande
partie de l'investissement. La plupart des banques ont donc
développé des services spécialisés en financement
LBO. Dans le cadre d'opération de LBO mettant en jeu des montants
significatifs, les banques syndiquent le financement, c'est-à-dire
qu'elles redistribuent une partie de l'emprunt qu'elles ont garanti à un
tour de table de financiers (généralement d'autres banques) par
cession ou transfert de créances.
Dans chacune de ces hypothèses de rachat, le rôle
du banquier est indéniable, corrélativement, celui que doit jouer
le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Ils
garantissent ainsi les investissements des différents organes financiers
intervenant soit dans la reprise, soit dans l'opération de LBO.
Conclusion du Chapitre II
Il n'est aucun doute que les droits de propriété
intellectuelles sont désormais un outil qui est mis à la
disposition des créanciers et qui leur permettra d'obtenir du
crédit. Ces droits sont un important moyen de financement pour elle.
Très usité dans d'autres continents, ils prennent de plus en plus
de l'importance en Afrique. Le législateur OHADA a à cet effet
mis en place les règles de prise de nantissement. Ainsi, il ressort de
là que, tout créancier doit, pour prendre un nantissement,
s'assurer d'abord de l'existence des droits à nantir, ensuite de
déterminer la valeur desdits droits. Ces éléments
constituent donc les préalables à la prise de nantissement. Ils
contribuent à atteindre la finalité du nantissement qui
s'apprécie à un degré différent selon que l'on se
trouve dans les entreprises en fonctionnement ou dans les entreprises en
difficulté.
124
http://www.lesechos.fr/finance-marches/vernimmen/definition_flux-de-tresorerie-disponible.html#xtor=SEC-3168,
consulté le 1er avril 2014 à 12H10.
46
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Conclusion de la Ie partie
L'AUS entré en vigueur en date du 15 décembre
2010 est venu rendre autonome le nantissement des droits de
propriété intellectuelle. Autrefois rattaché au fonds de
commerce, les droits de propriété intellectuelle sont
désormais des droits à part entière, susceptibles
d'être nantis. Cette autonomisation est passée par la
consécration d'un régime juridique autonome,
détaché de celui du fonds de commerce. Ce nantissement
obéit désormais à des conditions bien précises, et
ce qu'elles soient de fond ou de forme. Ainsi le contenu dudit nantissement a
été clairement fixé, tout comme le formalisme qui entoure
sa constitution. Par ailleurs, la consécration d'un tel nantissement ne
pouvait aller sans avoir d'effets. C'est concrètement dans la pratique
que les effets pourraient se faire ressentir, car désormais le
nantissement des droits de propriété intellectuelle pourrait
aussi bien permettre de financer une entreprise en fonctionnement, que sauver
celle qui est en difficulté.
Le régime général du nantissement des
droits de propriété intellectuelle a ainsi connu une
autonomisation. Cependant, à regarder de près, on se rend bien
compte que malgré le travail fait, des lacunes persistent.
L'autonomisation totale à laquelle on se serait attendue, n'est pas
atteinte. Par conséquent, si l'autonomie du régime
général du nantissement des droits de propriété
intellectuelle semble exhaustive, tel n'est pas le cas des régimes
spécifiques qui s'avèrent imprécis (IIe Partie).
47
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
IIe PARTIE : L'IMPRECISION DES REGIMES SPECIFIQUES DE CHACUN DES DROITS
DE PROPRIETE INTELLECTUELLE
|
|
|
|
|
|
|
|
|
48
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
La propriété intellectuelle est
généralement divisée en deux secteurs : la
propriété industrielle qui, d'une façon
générale, protège les inventions et le droit d'auteur qui
protège les oeuvres littéraires et artistiques.
La propriété industrielle prend
des formes très variées. Il s'agit notamment des brevets
protégeant les inventions et des dessins et modèles industriels,
qui sont des créations esthétiques définissant l'apparence
de produits industriels. La propriété industrielle couvre aussi
les marques de produits, les marques de services, les schémas de
configuration de circuits intégrés, les noms commerciaux et les
dénominations commerciales ainsi que les indications
géographiques, et la protection contre la concurrence
déloyale.
Le droit d'auteur vise les créations
artistiques, telles que les livres, la musique, les peintures et les
sculptures, les films et les oeuvres fondées sur la technologie telles
que les programmes d'ordinateur et les bases de données
électroniques. Dans la plupart des langues européennes autres que
l'anglais, le droit d'auteur est désigné par les «droits de
l'auteur». L'expressiondroits d'auteur vise l'acte fondamental
qui, en ce qui concerne les créations littéraires et artistiques,
ne peut être effectué que par l'auteur ou avec son autorisation.
Il s'agit de la réalisation de copies de l'oeuvre. L'expression
droits de l'auteur vise le créateur de l'oeuvre artistique, son
auteur. Cette expression souligne ainsi le fait, reconnu par de nombreuses
législations, que l'auteur détient certains droits
spécifiques sur son oeuvre que lui seul peut exercer (tels que le droit
d'empêcher une reproduction déformée). D'autres droits
(tels que le droit de réaliser des copies) peuvent être
exercés par des tiers, par exemple un éditeur el l'auteur a
concédé une licence cet effet.
Qu'il s'agisse de droit d'auteur ou de droit de
propriété industrielle, le nantissement est la garantie qui
convient d'être prise à leur égard. C'est dans ce sens que
le législateur OHADA a clairement encadré les règles qui
entourent cette sûreté. Il a consacré un nantissement des
droits de propriété intellectuelle autonome en
réglementant les conditions générales de prise de ce
nantissement. Or il se trouve qu'il n'est pas très aisé
d'encadrer parfaitement ce nantissement. La difficulté nait en
réalité du système OHADA lui-même, de la technique
mise en place pour diffuser le droit.
Pour la diffusion de son droit, l'OHADA a eu recours à
un ensemble d'instruments législatifs supranationaux portant sur
diverses matières et appelés actes uniformes125. Ces
actes uniformes obéissent à une technique bien
particulière. Ainsi donc le principal objectif de l'OHADA est de
rechercher l'uniformisation maximum. Le Traité a d'ailleurs
institué un processus rigoureux à cette
125 Pour une vue d'ensemble sur l'OHADA, MATOR (B.),
PILKINGTON (N.), SELLERS (D.), THOUVENET (S.), le droit uniforme des
affaires issu de l'OHADA, Litec, 2004 ; TIGER (P.), Le droit des
affaires en Afrique, PUF, coll. « Que sais-je? », 3e
éd. 2001.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
fin. Il s'agit de l'uniformisation. C'est un principe qui
connait toutefois des tempéraments, l'harmonisation en l'occurrence.
Il convient, pour mieux cerner ces techniques, de les
définir. Le Pr ISSA -SAYEGH126 définit ces deux
méthodes en ces termes: « l'harmonisation ou coordination... est
l'opération consistant à rapprocher les systèmes
juridiques d'origine et d'inspiration différentes (voire divergentes)
pour les mettre en cohérence entre eux en réduisant ou en
supprimant leurs différences et leurs contradictions de façon
à atteindre des résultats compatibles entre eux et avec les
objectifs communautaires recherchés », tandis que «
l'uniformisation ou unification du droit est, a priori, une forme plus
brutale mais aussi plus radicale d'intégration juridique. Elle consiste
à instaurer, dans une matière juridique donnée, une
réglementation unique, identique en tous points pour tous les Etats
membres, dans laquelle il n'y a pas de face, en principe, pour des
différences ». Comme on l'a souligné, l'OHADA a pris en
compte les deux techniques, et des répercussions se font ressentir dans
bien d'actes uniformes, et en particulier l'AUS du 15 décembre 2010.
Ainsi donc, la propriété littéraire et
artistique a fait l'objet d'une harmonisation, tandis que la
propriété industrielle a fait l'objet d»une uniformisation.
Toute chose qui a forcément eu un impact sur les régimes
particuliers des différents des différents droits de
propriété intellectuelle. Le nantissement des droits de
propriété littéraire et artistique s'en trouve
complexifié (Chapitre I) d'une part, et, d'autre part, la simplification
que devait apporter l'uniformisation des droits de propriété
industrielle est imparfaite (Chapitre II).
49
126 ISSA-SAYEGH (J.), « L'intégration juridique des
Etats africains de la zone franc », Revue PENANT n° 823 janvier -
avril 1997, p. 5 et s.
50
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS
DE PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE
L'harmonisation est l'opération consistant à
rapprocher les systèmes juridiques d'origine et d'inspiration
différentes pour les mettre en cohérence entre eux en
réduisant ou en supprimant leurs différences et leurs
contradictions de façon à atteindre des résultats
compatibles entre eux et avec les objectifs communautaires recherchés.
En matière de droit d'auteur, non seulement presque chaque Etat-membre
dispose de sa propre législation mais, de plus, sur certains points, ces
textes nationaux ne paraissent pas conformes à la législation
régionale. Ainsi donc, le droit d'auteur fait l'objet d'une
harmonisation (Section I). Cette dernière ne va pas sans causer de
problème, ce qui conduit à réaménager le
régime de nantissement du droit d'auteur (Section II).
Section 1 : La justification de la complexité :
l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins
Dans le domaine des sûretés, l'Acte uniforme n'a
pas une compétence exclusive, mais une compétence sinon
concurrente, du moins partagée avec les législations nationales,
qui peuvent se déployer pour autant qu'elles ne lui sont pas contraires.
Dans l'ensemble des Etats-membres aussi bien de l'OAPI que de l'OHADA, on peut
constater que le droit d'auteur a fait l'objet d'une harmonisation (Paragraphe
I). Cette méthode, loin d'être parfaite, et, pour cela, entraine
un certain nombre de conséquences (Paragraphe II).
§ 1. Le constat de l'harmonisation du droit
d'auteur
L'OHADA compte à la date d'aujourd'hui
dix-sept127 Etats membres, l'OAPI quant à elle en compte
seize128 . Cependant, à quelques exceptions près, les
Etats membres de l'OAPI sont
127 Il s'agit des Etats suivants: Bénin, Burkina Faso,
Cameroun, République centrafricaine, Comores, République du
Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau,
Guinée équatoriale, Mali, Niger, République
démocratique du Congo, Sénégal, Tchad et Togo.
51
52
53
54
55
56
57
58
59
60
61
62
63
64
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
également membres de l'OHADA. La réglementation
en matière de droit d'auteur fait l'objet d'une simple harmonisation, de
sorte que, sur ce point, c'est principalement la législation nationale
de chaque Etat membre qu'il faut consulter129. En matière de
droit d'auteur, l'OHADA applique la technique de renvoi aux lois nationales
(A), ce qui n'est pas sans poser de difficultés dans sa mise en oeuvre
(B).
A- Le renvoi aux lois nationales
Le droit de la propriété industrielle a fait
l'objet d'une uniformisation quasi parfaite, de telle sorte qu'il est difficile
pour les Etats de légiférer encore sur la question. Ceci n'a pas
été le cas pour le droit d'auteur, dont l'harmonisation a conduit
les organisations à procéder à un renvoi, du moins pour ce
qui concerne certains aspects, aux textes nationaux, quant en ce qui concerne
les règles qui régissent la matière. En
réalité, l'harmonisation postule l'élaboration de normes
ayant un niveau d'identité ou d'unité de premier degré.
Elle opère un niveau de similitude législative ou
réglementaire qui laisse place à la survie de certaines
spécificités nationales. Autant l'entreprise d'harmonisation
puise dans le Etats impliqués, autant l'ossature juridique qui en
résulte laisse en friche de nombreux aspects qui seront régis par
des normes propres à chacun de ces Etats130.
Il est aisé de constater qu'il existe presqu'autant de
législation nationale sur la protection du droit d'auteur, que d'Etats
membres de l'OAPI. C'est notamment le cas du Benin131, du Burkina
Faso132, du Togo133, de la République
Démocratique du Congo134, de la Cote d'Ivoire135,
du Cameroun136... Ces différentes lois nationales peuvent
être considérées comme des lois supplétives
complétant l'annexe VII de l'accord l'ABR. Par ailleurs, comment
interpréter les règles relatives au droit d'auteur figurant
directement dans l'ABR et censées s'appliquer directement dans les Etats
membres? Ne s'agit-il pas de règles spéciales? La
législation OHADA renvoie d'ailleurs à cette législation
spéciale concernant justement le nantissement des droits de
propriété intellectuelle. Les
128 Bénin, Burkina Faso, Cameroun, République
centrafricaine, République du Congo, Côte d'Ivoire, Gabon,
Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali,
Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad, Togo.
129 NGOMBE (L. Y.), « A propos de la
supranationalité de la législation de l'organisation africaine de
la propriété intellectuelle (OAPI) sur le droit
d'auteur», RDPI, n° 176, octobre 2005, p. 9.
130 KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et
uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens
d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709,
2008.
131 Loi n° 2005 - 30 du 05avril 2006 relative à la
protection du droit d'auteur et des droits voisins en République du
Bénin.
132 Loi n° 032 - 99/AN portant protection de la
propriété littéraire et artistique.
133 Loi n° 91 - 12 portant protection du droit d'auteur, du
folklore et des droits voisins.
134 Ordonnance-loi n° 86-033 du 05 avril 1986 portant
protection des droits d'auteurs et des droits voisins.
135 Loi du 25 juillet 1996 portant protection des droits
d'auteurs et des droits voisins.
136 Loi n°2000/11 du 19 décembre 2000 relative au
droit d'auteur et droit voisin du droit d'auteur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
lois nationales sur le droit d'auteur qui se conforment aux
dispositions de l'Annexe VII de l'ABR ou les complètent doivent, de
même, être considérées comme des règles
spéciales dérogeant au droit
commun137.
En outre, il est important d'avoir présent à
l'esprit que ces renvois aux lois nationales pourraient à l'avenir
être moins nombreux si les questions directement traitées dans le
texte national s'étendent138. L'adage specialia
generalibus derogant pourra alors permettre de consacrer la
priorité d'une convention internationale abordant des questions
particulières (en l'occurrence la législation OAPI) sur celle
abordant celle des questions plus générales (ici la
législation de l'OHADA)139. Cette solution ne fait pas
l'unanimité140, mais sur la question à laquelle on
s'intéresse, elle parait la mieux adaptée. Les renvois divers aux
règles particulières autorisent, d'ailleurs, à
considérer qu'il y a souvent compétences distributives des deux
législations avec comme principe l'application
préférentielle des règles de la législation de la
propriété intellectuelle quand elles existent.
Comme il a été souligné, si les textes
sur la propriété intellectuelle - du moins ceux relatifs aux
brevets et aux marques - ont fait l'objet d'une unification (ou presque), le
droit d'auteur ne parait que partiellement harmonisé. Il est en tout cas
possible, en l'état actuel des législations de constater des
limites à l'harmonisation, du moins des difficultés liées
à la technique d'harmonisation.
B- Les difficultés liées à la
technique d'harmonisation
La méthode d'harmonisation pose deux séries de
difficultés, la première étant relative au contenu des
règles qui font l'objet d'harmonisation. La seconde, quant à
elle, est relative à l'autonomie des Etats, et partant, aux risques qui
y sont liés.
1- Les difficultés liées au contenu des
règles
A l'opposé de l'uniformisation qui prône une
identité de contenu législatif ou réglementaire de second
degré, l'harmonisation postule l'élaboration de normes ayant un
niveau d'identité ou d'unité
137 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des
législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4 p. 2553
et s.
138 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des
législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4
p. 2553 et s. n°18.
139 MALAN (A.), la concurrence des conventions
internationales dans le droit des conflits, PUAM, 2005, n°55.
140 BRIRE (C.), les conflits de conventions internationales
en droit privé, LGDJ, 2001, n°276.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
de premier degré. Il faut noter que la similitude que
produit toute harmonisation est moins élevée que celle d'une
uniformisation. Les normes harmonisées ne couvrent pas tous les aspects
du domaine qu'elles régissent et sont notamment complétées
par des règles nationales dont la similitude est loin d'être
garantie. C'est ainsi que survivent les divergences normatives entre les Etats
impliqués dans une entreprise d'harmonisation. Ce sont les
éléments particuliers aux divers intervenants qui
caractérisent l'harmonisation, la distinguant dès lors de
l'uniformisation.
En d'autres termes, l'harmonisation supprime certes les
divergences, mais elle favorise, l'existence de spécificités
législatives ou réglementaires nationales. Ce faisant, elle
laisserait aux autorités nationales certains aspects du droit qui,
parfois, constituent des pierres d'achoppement lors d'une entreprise
d'intégration juridique. En ce qu'elle exige un niveau d'unité
législative ou réglementaire inférieur aux standards de
l'uniformisation, l'harmonisation serait ainsi plus aisément
réalisable141.
D'une manière générale, en matière
de droit d'auteur, les textes spéciaux à appliquer seront les
lois nationales des Etats membres. La consultation de ces lois nationales ne
permet pas de trouver de dispositions relatives à des règles
particulières applicables aux sûretés,
précisément au nantissement, des droits de
propriété littéraire et artistique. Par conséquent,
c'est, finalement, le seul texte OHADA qui sera applicable142. Exit
les difficultés liées au contenu des règles, Il convient
de prendre à présent en compte, celles tenant à
l'autonomie des Etats.
2- Les difficultés tenant à l'autonomie des
Etats
L'article 10 du Traité instaurant l'OHADA
prévoit que les actes uniformes sont directement applicables et
obligatoires dans les Etats membres, nonobstant toute disposition contraire de
droit interne, antérieure ou postérieure. Cette formule est si
forte qu'elle vient porter atteinte à l'autonomie juridique des Etats
membres de l'OHADA. L'autonomie des législations nationales cessant
là où commence la contrariété à l'acte
uniforme, il faut s'entendre, selon les termes du professeur
GRIMALDI143, sur ce qu'est cette contrariété. Selon
cet auteur, la loi nationale ne peut certainement pas opérer contra
pactum, contredire l'acte uniforme: par exemple retirer au
créancier nanti le droit de préférence, que l'Acte attache
au nantissement des droits de propriété intellectuelle. En sens
opposé, elle peut assurément opérer secundum
pactum, sur renvoi, sur
141 KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et
uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens
d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709,
2008.
142 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des
législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4 p. 2557
et s. n°23.
143 GRIMALDI (M.), L'acte uniforme portant organisation des
sûretés, LPA n°205, 13 octobre 2004, p. 30, n°4.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
délégation de l'Acte uniforme : soit pour
réglementer des sûretés que l'Acte uniforme lui abandonne
expressément, telle nantissement des droits de propriété
intellectuelle.
Par ailleurs, une autre crainte pourrait être
envisageable, celle relative aux effets de l'autonomie reconnue aux Etats
parties. En effet, elle tient au risque que les législations nationales,
sans contredire l'Acte uniforme, ne brise la cohérence de l'ensemble.
L'Acte tempère ce risque à l'endroit où la
cohérence s'impose comme un impératif. C'est notamment le cas en
ce qui concerne le classement des sûretés144.
L'harmonisation du droit d'auteur a entrainer un certain
nombre de conséquences sur son régime juridique.
§ 2. Les conséquences de l'harmonisation du
droit d'auteur sur son régime juridique
L'harmonisation du droit d'auteur a eu de conséquences
graves sur le régime du nantissement des droits d'auteur. Ainsi, les
règles relatives à la prise de ce type de nantissement s'en
trouvent altérées (A), tout comme le formalisme qui l'accompagne
(B).
A- L'altération des règles de prise de
nantissement
Apprécier l'altération qu'a subit le
nantissement des droits d'auteur du fait de son harmonisation, n'est possible
qu'en confrontant ce régime spécifique, au régime
général du nantissement des droits de propriété
intellectuelle. En réalité, la question que l'on pourrait se
poser ici, est celle de savoir, à quoi renvoi la prise de nantissement
des droits d'auteur, quand on sait que les critères de protection du
droit d'auteur diffèrent de ceux d'un créateur. En effet, le
principe retenu par le texte régional et adopté par les lois
nationales est celui de la protection du seul fait de la création. Ainsi
un auteur n'aura pas forcément un document constatant son droit sur sa
création. En revanche lorsque le constituant est le cessionnaire, il est
en principe en mesure de produire un « titre » puisqu'un contrat
écrit145 a dû être conclu entre l'auteur et
lui.
144 Voir dans ce sens l'article 126 AUS du 15 décembre
2010.
145 C'est du moins ce qu'exigent le texte régional et les
lois nationales sur le droit d'auteur.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
La propriété incorporelle de l'oeuvre est
indépendante de la propriété de l'objet matériel
qui en est le support. Comme nous le fait remarquer la Cour de Cassation
française146, la remise de l'objet matériel à
un tiers n'implique pas la divulgation de cette oeuvre. Dans la plupart des
cas, des litiges peuvent opposer le propriétaire de l'objet
matériel et le titulaire des droits d'auteur, en particulier, l'exercice
du droit patrimonial. Le droit romain distinguait les notions d'opus
et d'opéra. L'opus désignait la chose
matérielle, la copie ou le manuscrit dont la possession peut être
transférée, tandis qu'opéra désigne un
discours, c'est-à-dire une « affaire» que l'éditeur ne
peut conduire qu'au nom de l'auteur. L'exemplaire d'après lequel
l'éditeur fait imprimer un ouvrage de l'auteur (opus) et
appartient entièrement à l'éditeur après que
celui-ci l'a acquis sous forme de manuscrit ou d'imprimé pour en faire
tout ce qu'il veut et ce qui peut être fait en son nom. Mais l'usage
qu'il ne peut en faire qu'au nom d'un autre (c'est-à-dire l'auteur) est
une affaire (opéra) que cet autre effectue.
Selon la loi camerounaise147 en son article 21
alinéa 1er : « La propriété d'une
oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet
matériel. Sauf stipulation contraire, l'acquéreur de l'original
ou d'un exemplaire d'une n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun
des droits d'auteur prévus par la présente loi. Ces droits
subsistent en la personne du premier titulaire du droit d'auteur ou de ses
ayants-cause qui ne pourront toutefois exiger de l'acquéreur la mise
à leur disposition dudit objet. » Cet article traduit
effectivement de la dichotomie entre d'une part, les droits intellectuels
rattachés à l'oeuvre148 et les droits corporels sur
l'oeuvre. Le législateur français va dans le même sens et
cela à travers l'article L.111-3 du Code de la Propriété
Intellectuelle149.
En effet, on semble être en présence de deux
droits autonomes. Ainsi, la propriété d'une oeuvre ne suit pas
celle de son support. La difficulté viendra le plus souvent de ce que le
comportement du propriétaire est susceptible de troubler les droits
moraux de l'auteur. Les finalités du droit moral et du droit de
propriété ne sont pas à mettre sur le même plan. Le
droit de propriété veut assurer l'emprise privative, absolue d'un
sujet sur l'objet. Le droit moral offre à l'auteur le droit au respect
de son oeuvre, le droit de l'utiliser comme il le conçoit150.
En prenant l'exemple d'un logiciel, il faut préciser que celui-ci ne
doit pas être confondu avec son support. De même, l'oeuvre d'art ne
saurait
146 Cass. 1ere, 29 novembre 2005,
www.atoute.org. Inédit.
147 Loi du 19 décembre 2000 sur le droit d'auteur,
op.cit.
148 En effet, une partie peut être cédée.
149 L'alinéa 1er fait ressortir que la
propriété incorporelle définie par l'article L.111-1 est
indépendante de la propriété de l'objet matériel.
Il énonce en ces termes que : « L'auteur d'une oeuvre de
l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit
de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce
droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que les
attributs d'ordre patrimonial. ».
150 C'est la distinction entre le droit « introverti»
et le droit «extraverti ».
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
se réduire à son support matériel, ni
s'identifier à lui. Il est donc aisé de constater que lorsque le
logiciel ou toute autre oeuvre de l'esprit fait l'objet d'un contrat de
nantissement, cela pourrait provoquer des mésententes entre le
constituant et le créancier.
En tout état de cause, il doit être
rappelé dans tout contrat de nantissement des droits d'auteur que ledit
contrat porte sur les biens incorporels et non sur l'objet corporel. La
dépossession d'un tableau ou d'une sculpture n'emportera pas ipso facto
nantissement du bien incorporel. De plus, la dépossession du support
matériel ne saurait faire obstacle à l'exercice du droit
d'auteur151. Il s'avère que ce contrat de nantissement se
limite aux droits patrimoniaux accordés à l'auteur. Il va aussi
falloir examiner toutes les prérogatives accordées à
l'auteur sur son activité créative, constituant ainsi les
données secondaires.
B- L'altération du formalisme
En droit OHADA, dans la forme, le nantissement est
passé du réel au solennel et doit, par conséquent à
peine de nullité, être constaté par un écrit quelque
que soit la valeur de la créance engagée, qu'il s'agisse d'un
nantissement en matière civile ou d'un nantissement conclu en
matière commerciale. Une des exigences de cet acte est que
l'écrit doit désigner impérativement les créances
nanties et, mieux si des créances sont futures il faut absolument que
celles-ci soient individualisées au jour de l'acte. Dans la mesure
où il s'agit d'affectation en garantie d'une obligation les
créances garanties doivent également être
désignées dans l'acte constitutif. Ceci est nécessaire et
l'acte uniforme de l'OHADA précise que « le créancier
nanti acquiert un droit sur la créance dès la naissance de
celle-ci »152. Il peut être sous seing privé
ou être constaté par acte authentique. Sa validité repose
également sur la signature des deux parties. Par conséquent, la
seule signature du constituant ne suffit pas à le rendre valable, si
elle n'est pas accompagnée de la signature du
bénéficiaire. En matière fiscale, son enregistrement ne
supporte qu'un droit fixe, il a d'ailleurs été abandonné
de nos jours. Le nantissement est une sûreté
réelle153.
Le texte OHADA prévoit que tout nantissement portant
sur des droits de propriété intellectuelle doit satisfaire aux
obligations de publicité du texte OHADA et du texte relatif aux
propriétés intellectuelles. Ainsi, en matière de
propriété industrielle, s'appliqueront les formalités
prévues par
151 NGOMBÉ (Y. L.), « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OAPI et de l'OHADA : un aspect de la concurrence des
législations supranationales en Afrique », op. cit. p. 2558.
152 Art. 128 AUS du 15 décembre 2010.
153 Le Juridique des Affaires, « Comprendre la notion de
nantissement des meubles incorporels en droit OHADA »,
http://www.burkinapmepmi.com/spip.php?article18793,
dimanche, 20 octobre 2013.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
l'Acte uniforme OHADA ainsi que les dispositions de l'ABR. Le
créancier qui entend user de cette sûreté concernant un
droit de propriété industrielle dans les Etats membres des deux
organisations devra donc veiller à respecter scrupuleusement les deux
législations.
En revanche, comme il a été souligné, en
matière de droit d'auteur, les textes spéciaux à appliquer
seront les lois nationales des Etats membres. La consultation de ces lois
nationales ne permet pas de trouver de dispositions relatives à des
règles particulières applicables aux sûretés,
précisément au nantissement, des droits de
propriété littéraire et artistique. Par conséquent,
c'est, finalement, le seul texte OHADA qui sera applicable. Ainsi, l'absence de
l'écrit ne sera pas sanctionnée par la nullité comme ne
propriété industrielle, mais par l'inopposabilité
conformément au texte de l'OHADA, texte général.
La doctrine dominante est d'ailleurs sceptique quant à
la consécration d'un nantissement général portant sur la
propriété littéraire et artistique. L'inexistence d'un
système généralisé de publicité des droits
d'auteurs et des sûretés y relatives constitue, à ses yeux,
un véritable obstacle à l'efficacité de telles
sûretés154. En effet, ne pouvant ni être remis
matériellement au créancier en raison de leur nature
incorporelle, ni faire l'objet de signification dans les mains du
débiteur155 en vue d'en assurer la publicité, ces
droits de propriété littéraire et artistique ne peuvent
faire l'objet de sûretés opposables aux tiers. Au regard des
difficultés et des conséquences qui ressortent de l'harmonisation
des droits de propriété intellectuelle, Il s'avère
nécessaire de réaménager le régime du nantissement
des droits d'auteur.
Section 2 : Le nécessaire
réaménagement du régime du nantissement du droit
d'auteur
L'ensemble des problèmes auxquelles est
confronté le droit d'auteur du fait de son harmonisation invite à
rechercher des moyens visant sinon à les éliminer, du moins
à les limiter à leur simple expression. C'est ce qui conduit
à réaménager le régime du nantissement. Pour
être efficace, ce réaménagement devra être
accentué sur le plan régional (A), puisque c'est celui qui nous
intéresse ici. On pourrait aussi se servir des législations
étrangères (B), et française notamment, pour combler les
lacunes éventuelles de notre propre droit régional.
154 STENGER (J.-P), « Le gage des droits de
propriété intellectuelle », RDPI, 1995, n°61,
p. 16 ; VIVANT M. « L'immatériel en sûreté», in
Mélanges Michel Cabrillac, Paris, Dalloz, Litec, 1999, n°
1, p. 405.
155 Le débiteur n'existant pas dans le cas du droit
d'auteur comme dans l'hypothèse d'un droit de créance.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
§ 1. Le réaménagement du droit
régional
Le réaménagement du droit régional
nécessite que l'on s'attarde sur un double aspect. Le premier aspect est
sans doute l'uniformisation du droit d'auteur (A), au même titre que
celui de la propriété industrielle. Le second aspect quant
à lui peut être considéré comme une
conséquence du premier, il s'agit de la nécessité de
clairement définir le contenu du nantissement des droits d'auteur
(B).
A- L'uniformisation du droit d'auteur
Pour le docteur NGOMBE156, le droit d'auteur dans
les Etats membres de l'OAPI a fait l'objet d'une uniformisation
inachevée. Pour cet auteur, les limites actuelles de l'harmonisation
concernent aussi bien les dispositions relatives à l'existence
même du droit, que les dispositions relatives à sa mise en oeuvre.
Par rapport au premier point, les limites se constatent autour du champ et du
contenu de la protection. Par rapport au second point, c'est-à-dire les
dispositions relatives à la mise en oeuvre du droit, les limites
concernent l'exploration des droits, la procédure et les sanctions.
L'auteur propose donc, pour améliorer cette situation, d'étendre
le champ matériel de l'harmonisation d'une part, et d'étendre le
champ géographique de l'harmonisation d'autre part.
Sans être retissant aux propositions de cet auteur, on
pourrait se permettre d'envisager une uniformisation du droit d'auteur. La
forme d'uniformisation qui aide davantage à atteindre une
uniformisation-résultat est la codification. Selon le professeur
GRIMALDI, celle-ci s'entend « d'un exposé rationnel et
cohérent du droit civil, d'un corpus qui, selon une heureuse expression,
« réunit» et « unit» [...] et qui établit
ainsi le droit commun »157. Cependant, en raison des nombreux
fondements qu'elle requiert en amont, la codification n'a jusqu'ici
été formellement utilisée qu'au sein d'entités
étatiques d'influence romano-germanique158.
Comme on peut le constater, l'unification et l'uniformisation
ne laissent guère de pouvoir substantiel aux différents acteurs
législatifs nationaux dans les domaines qu'ils entendent encadrer. C'est
cette exigence qui amoindrit leur portée pratique. Élaborer une
législation au contenu identique dans un ensemble d'entités
étatiques reviendrait à admettre que leurs
sociétés, du moins les diverses élites nationales, ont des
intérêts centripètes au moment de l'unification ou de
l'uniformisation. Or,
156 NGOMBE (L. Y.), « le droit d'auteur dans les Etats
membres de l'Organisation africaine de la propriété
intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée ? » e.Bulletin
du droit d'auteur, janvier - mars 2005.
157 GRIMALDI (M.), Codes et codifications : pour
souligner le dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du
Code civil du Québec et le bicentenaire du Code
Napoléonien », [2005].
158 OPPETIT (B.), « De la codification », D.
chron. 1996, n°33-35.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
il semble bien que les intérêts et les valeurs
défendus par une société à une période
déterminée ne sont pas les mêmes que ceux approuvés
dans une autre société au cours de la même période.
Au surplus, dans une même société, les valeurs, les
intérêts varient notamment suivant les classes sociales,
l'éducation reçue, les tranches d'âges et les
catégories professionnelles. Il faut toutefois noter qu'à travers
la lex mercatoria et ses récents succédanés,
semble émerger un système normatif commun aux opérateurs
du commerce international.
En clair, l'uniformisation participe d'une approche moniste
qui, traditionnellement, suppose qu'un texte international dûment
ratifié par un État devienne une source directe de droit sans
qu'il soit nécessaire d'en reprendre les dispositions dans une loi
interne. Uniformiser les règles qui régissent le nantissement du
droit d'auteur reviendrait donc à faire disparaitre les
différentes lois nationales au profit d'une règle qui serait
communément applicable à l'ensemble des Etats membres de l'OHADA
et de l'OAPI. Une fois cette perspective accomplie, il reste important de
déterminer clairement le contenu du nantissement.
B- La nécessité de clairement
définir le contenu du nantissement
Définir clairement le contenu du nantissement,
constitue une autre étape non moins importante, du processus
d'amélioration à mettre en place. En effet il s'avère
nécessaire de savoir précisément quels seront les droits
qui pourront faire l'objet du nantissement. L'intérêt d'une telle
approche réside dans la multiplicité des droits qui sont
liés à l'auteur. En effet, il est connu que l'auteur a, sur sa
création, des droits moraux qui sont inaliénables, et des droits
patrimoniaux sur lesquelles il peut exercer bon nombre d'actes, parmi lesquels,
le nantissement. Par ailleurs il faut noter qu'il existe une certaine
complication tenant au nantissement des droits d'auteur. Cette complication est
précisément liée à l'oeuvre elle-même. Le
problème qui se pose ici est celui de la séparation de l'oeuvre
et du support.
A ce propos précisément, La
propriété incorporelle de l'oeuvre est indépendante de la
propriété de l'objet matériel qui en est le support. Comme
nous le fait remarquer la Cour de Cassation française159, la
remise de l'objet matériel à un tiers n'implique pas la
divulgation de cette oeuvre. Dans la plupart des cas, des litiges peuvent
opposer le propriétaire de l'objet matériel et le titulaire des
droits d'auteur, en particulier, l'exercice du droit patrimonial. Le droit
romain distinguait les notions d'opus et d'opéra.
L'opus désignait la chose matérielle, la copie ou le
manuscrit dont la
159 Cass. 1ere, 29 novembre 2005,
www.atoute.org. Inédit.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
possession peut être transférée, tandis
qu'opéra désigne un discours, c'est-à-dire une
« affaire » que l'éditeur ne peut conduire qu'au nom de
l'auteur. L'exemplaire d'après lequel l'éditeur fait imprimer un
ouvrage de l'auteur (opus) et appartient entièrement à
l'éditeur après que celui-ci l'a acquis sous forme de manuscrit
ou d'imprimé pour en faire tout ce qu'il veut et ce qui peut être
fait en son nom. Mais l'usage qu'il ne peut en faire qu'au nom d'un autre
(c'est-à-dire l'auteur) est une affaire (opéra) que cet autre
effectue.
Selon la loi camerounaise160en son article 21
alinéa 1er : « La propriété d'une
oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet
matériel. Sauf stipulation contraire, l'acquéreur de l'original
ou d'un exemplaire d'une n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun
des droits d'auteur prévus par la présente loi. Ces droits
subsistent en la personne du premier titulaire du droit d'auteur ou de ses
ayants-cause qui ne pourront toutefois exiger de l'acquéreur la mise
à leur disposition dudit objet. » Cet article traduit
effectivement de la dichotomie entre d'une part, les droits intellectuels
rattachés à l'oeuvre161 et les droits corporels sur
l'oeuvre. Le législateur français va dans le même sens et
cela à travers l'article L.111-3 du Code de la Propriété
Intellectuelle162.
En effet, on semble être en présence de deux
droits autonomes. Ainsi, la propriété d'une oeuvre ne suit pas
celle de son support. La difficulté viendra le plus souvent de ce que le
comportement du propriétaire est susceptible de troubler les droits
moraux de l'auteur. Les finalités du droit moral et du droit de
propriété ne sont pas à mettre sur le même plan. Le
droit de propriété veut assurer l'emprise privative, absolue d'un
sujet sur l'objet. Le droit moral offre à l'auteur le droit au respect
de son oeuvre, le droit de l'utiliser comme il le conçoit163.
En prenant l'exemple d'un logiciel, il faut préciser que celui-ci ne
doit pas être confondu avec son support. De même, l'oeuvre d'art ne
saurait se réduire à son support matériel, ni s'identifier
à lui. Il est donc aisé de constater que lorsque le logiciel ou
toute autre oeuvre de l'esprit fait l'objet d'un contrat de nantissement, cela
pourrait provoquer des mésententes entre le constituant et le
créancier.
En tout état de cause, il doit être
rappelé dans tout contrat de nantissement des droits d'auteur que ledit
contrat porte sur les biens incorporels et non sur l'objet corporel. La
dépossession d'un tableau ou d'une sculpture n'emportera pas ipso facto
nantissement du bien incorporel. De plus, la
160 Loi du 19 décembre 2000 sur le droit d'auteur,
op.cit.
161 En effet, une partie peut être cédée.
162 L'alinéa 1er fait ressortir que la
propriété incorporelle définie par l'article L.111-1 est
indépendante de la propriété de l'objet matériel.
Il énonce en ces termes que: « L'auteur d'une oeuvre de
l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit
de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce
droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que les
attributs d'ordre patrimonial. ».
163 C'est la distinction entre le droit « introverti»
et le droit «extraverti ».
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
dépossession du support matériel ne saurait
faire obstacle à l'exercice du droit d'auteur164. Il
s'avère que ce contrat de nantissement se limite aux droits patrimoniaux
accordés à l'auteur. Il va à présent falloir
examiner le réaménagement inspiré des législations
étrangères.
§ 2. Le réaménagement inspiré des
législations étrangères : l'exemple français
Le droit d'auteur se rapporte aux oeuvres littéraires
et artistiques telles que romans, poèmes et pièces de
théâtre, oeuvres cinématographiques et musicales ou encore
oeuvres relevant des arts plastiques comme les dessins, les peintures, les
photographies et les sculptures ainsi que les dessins et modèles
architecturaux. Les droits attachés au droit d'auteur comprennent ceux
des artistes interprètes ou exécutants sur leurs
interprétations et exécutions, des producteurs de phonogrammes
sur leurs enregistrements et des radiodiffuseurs sur leurs programmes
radiophoniques ou télévisuels165. Ces biens peuvent
être affectés en garantie d'une créance. En droit
français, en ce qui concerne les règles applicables à la
sûreté, seuls le logiciel et le film cinématographique ont
fait l'objet de dispositions législatives précises. C'est en ce
sens qu'il est intéressant d'analyser le contenu de l'assiette du
nantissement (A.), avant d'analyser par la suite la problématique de
l'adaptation du régime du nantissement français au droit OHADA
(B), précisément en ce qui concerne ledit contenu.
A- Le contenu de l'assiette du nantissement
Le Code de la propriété intellectuelle n'a
envisagé que le régime du nantissement de logiciels (1) et celui
des films cinématographiques (2). Pour tout ce qui n'a pas
été envisagé par des règles spécifiques, et
conformément aux dispositions de l'article 2355 alinéa 5 du Code
civil, ce sont celles relatives au gage de meubles corporels qui ont vocation
à s'appliquer.
1- Le nantissement de logiciels
Transposant la directive européenne n° 91-250 du 14
juin 1991 sur la protection juridique des
164 NGOMBÉ (Y. L.), « Les sûretés
mobilières et les propriétés intellectuelles dans les
Etats membres de l'OAPI et de l'OHADA : un aspect de la concurrence des
législations supranationales en Afrique », op. cit. p. 2558.
165 Définition donnée par l'Organisation
Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), disponible sur
www.wipo.org/about-ip/fr/.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
programmes d'ordinateur, la loi n° 94-361 du 10 mai
1994166 a prévu des dispositions spécifiques relatives
au contrat de nantissement du droit d'exploitation des logiciels. L'article 7
de ladite loi, inséré à l'article L. 132-34 du Code de la
propriété intellectuelle, a mis en place un système qui
permet au créancier d'assurer, en toute sécurité, le
financement du développement des logiciels. Assez lacunaire, l'article
se contente d'énoncer que « le droit d'exploitation de l'auteur
du logiciel défini à l'article L. 122-6 peut faire l'objet d'un
nantissement ». Les modalités de ce nantissement ont
été précisées par le décret d'application
n° 96-103 du 2 février 1996167.
Lorsque le logiciel est nanti individuellement, le contrat de
garantie doit être inscrit, à des fins d'opposabilité aux
tiers, sur le registre spécial des logiciels tenus par l'Institut
national de la propriété industrielle (INPI), ce qui semble
supposer qu'il soit constaté par écrit. La demande d'inscription
qui peut être faite par l'une des parties à l'acte ou par un
mandataire spécialement habilité, doit comporter certaines
mentions telles que la désignation précise du logiciel et ses
éléments, et le montant de la créance. L'inscription est
valable cinq ans sauf renouvellement168. En revanche, lorsque le
logiciel est nanti avec l'ensemble du fonds de commerce, le nantissement ne
pourra être inscrit sur le registre spécial des logiciels tenu par
l'INPI, que sur présentation du certificat d'inscription du nantissement
délivré par le greffe du tribunal de commerce.
Sur la possibilité de prendre un nantissement sur les
logiciels futurs, des doutes ont été émises par la
doctrine. Ces doutes étant justifiés par le défaut de
disposition législative. Par ailleurs, cette possibilité semble
assez peu opportune en pratique car lors de l'inscription du nantissement, il
est obligatoire de déterminer le code source qui comme le précise
l'article R. 132-8 du Code de la propriété intellectuelle, est
l'un des éléments majeurs d'identification du logiciel.
Le nantissement du droit d'exploitation de logiciels entraine
un certains nombre d'effets. D'abord, l'absence de dépossession.
Maintenu en possession, le débiteur va conserver l'exercice du droit
d'exploitation. Cela fait planer une menace pour le créancier qui ne
peut agir lui-même en contrefaçon169, et qui doit s'en
remettre au débiteur pour la maintenance et l'évolution du
logiciel.
166 Loi la loi n° 94-361 du 10 mai
1994239, portant mise en oeuvre de la directive n° 91-250 du
Conseil des communautés européennes en date du 14 mai 1991
concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et modifiant le
Code de la propriété intellectuelle du 10 mai 1994,
publiée au JO du 11 mai 1994. Cette loi a été
complétée par le décret n° 96-103 du 2 février
1996, publié au JO du 9 février 1996, p. 2122.
167 Décret d'application n°
96-103 du 2 février 1996 pris pour l'application de la loi no 94-361 du
10 mai 1994 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et
modifiant le code de la propriété intellectuelle, publié
au JO du 9 février 1996, p. 2122.
168 Art. R. 132-8 à R. 132-17 du CPI.
169 GAVANON (J.), Propriété littéraire
et artistique, Fasc. 1360, n° 28.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
En outre, le créancier dispose d'un droit de
préférence, d'un droit de rétention, d'un droit de suite
et d'un droit de réalisation.
2- Le nantissement de films
cinématographiques
Le film cinématographique est souvent
présenté comme un bien d'une nature complexe, à la fois
meuble corporel (négatifs et copies) et meuble incorporel (droit
d'auteur). Sa réalisation lente et couteuse exige des crédits de
financements. Il est alors apparu opportun d'élaborer un régime
spécifique qui permettrait au constituant, généralement le
producteur, d'offrir en garantie à ses créanciers le film, et ce
avant d'être achevé. De ce fait, le législateur est
intervenu pour créer une garantie sur mesure dérogeant à
ces deux conditions, et peut-être aussi parce que les dispositions
relatives au gage traditionnel étaient inadaptées en raison d'une
part de l'interdiction de nantir une chose future et d'autre part de la
nécessité pour le débiteur de se dessaisir du bien au
profit de son créancier. L'organisation de cette sûreté
résulte de la loi n° 90 du 22 février 1944170, et
du décret n° 628 du 29 février 1944171,
aujourd'hui codifiés dans le Code de l'industrie
cinématographique172.
L'assiette de la garantie peut être formée d'une
partie de l'oeuvre cinématographique ou de l'ensemble de ses
éléments corporels (négatifs et copies) et incorporels (le
droit d'exploitation du film). Par ailleurs, et là résidait toute
l'originalité du mécanisme, il était possible, avant que
l'ordonnance du 23 mars 2006 n'en consacre le principe173, de nantir
un film futur. Dans ce cas, le dépôt portait sur le titre du
film.
Quant à la créance garantie, le Code de
l'industrie cinématographique n'a posé aucune condition. Par
conséquent, il pourra s'agir aussi bien d'une créance liée
au financement de l'oeuvre donnée en nantissement que d'une
créance étrangère à la production du film en
cause.
Le nantissement de films cinématographiques
n'entraîne pas la dépossession du constituant, ce que certains
auteurs avaient jugé dangereux. La formalité autrefois
exigée pour le gage, est toutefois réalisée de
manière fictive. En effet, le producteur du film est amené
à se dessaisir de l'élément corporel de l'oeuvre
cinématographique, à savoir le négatif, auprès d'un
laboratoire qui est intervenu pour effectuer des opérations de
postproduction, et se trouve désigné pour le tirage
170 Loi n° 90 du 22 février 1944 relative à
la publication des actes, conventions et jugements en matière de
cinématographie, publiée au JO 10 mars 1944, p. 729.
171 Décret n° 628 du 29
février 1944 fixant le régime de la rémunération et
la position du conservateur du régime public de la
cinématographie et de l'audiovisuel, publié au JO du 10 mars
1944.
172 La codification dans le Code de l'industrie
cinématographique résulte du décret n° 56-158 du 27
janvier 1956, publié au JO 31 janvier 1956, p. 1267.
173 Articles 2333 et 2355 du Code civil.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
de copies positives.
Le régime du nantissement des droits d'auteur semble
être extrêmement clair en droit français. Cependant la
problématique de l'adaptabilité d'un tel régime dans notre
contexte demeure.
B- La problématique de l'adaptation du
régime du nantissement français au droit OHADA
Traiter de la problématique de l'adaptabilité du
régime du nantissement français au droit OHADA, passe par le
constat de l'absence d'une réglementation précise sur la question
du
nantissement.de ces
différentes oeuvres de l'esprit. Il existe donc une incertitude qui
montre l'intérêt d'un minimum de formalités en droit
d'auteur, aussi bien pour enregistrer les contrats que pour tout autre acte
dont peut être objet le monopole d'exploitation. Un registre pourrait
être créé à cet effet par l'OAPI. Une double
inscription nationale et régionale peut aussi être envisageable.
Il est même souhaitable de s'orienter vers une
généralisation d'une double inscription régionale dans les
registres tenus par l'OAPI et l'OHADA. La généralisation de la
publicité de nantissement des droits d'auteur serait une
évolution souhaitable.
Pour revenir dans le cadre spécifique du Cameroun, il
est important de souligner que les oeuvres cinématographiques en tant
que créations intellectuelles bénéficient d'un encadrement
juridique174. Cependant, il est aisé de se rendre compte du
déclin général de l'activité
cinématographique. Plus important encore, le constat du silence
législatif quant à la possibilité d'affecter ces oeuvres
en garantie d'une obligation.
C'est ainsi que du point de vue de certains175,
point de vue auquel nous adhérons, la crédibilité de la
prise de garantie en matière des oeuvres cinématographiques dans
le contexte camerounais passe par certains préalables. Ainsi, trois
voies au moins peuvent guider leur raisonnement.
Tout d'abord, il est nécessaire de
réaménager le texte régissant l'activité
cinématographique afin, non seulement de permettre l'exercice d'une
telle activité, mais aussi prévoir un nantissement fiable et
organisé dont la finalité est de stimuler le financement des
productions cinématographiques.
174 Loi no 88/017 du 16 décembre 1988 fixant
l'orientation de l'activité cinématographique et son
Décret d'application du 9 novembre 1990.
175 KODJI (Z.), Le droit d'auteur en garantie de
crédit, mémoire de Master II en droit privé, option
droit des affaires, soutenu en 2008, Université de
Ngaoundéré.
65
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Ensuite, il faut consacrer et réadapter les
sûretés telles que expérimentées dans certains pays.
En effet, le nantissement des films cinématographiques tel que voulu
dans le cadre du droit français ne satisfait pas à tous les
contours de l'efficacité reconnue à une telle opération
juridique. Au lieu du système de délégation des recettes,
il est préférable de parler du nantissement issu des droits
d'exploitation des oeuvres cinématographiques. Le créancier nanti
exploitera le film jusqu'à concurrence de ses droits. Ceci
éviterait de faire heurter le droit du créancier nanti face
l'éventualité du privilège légal accordé au
service du Trésor lors de ses recouvrements.
Enfin, la création d'un fonds OIF rendra
l'opération moins complexe. Il est qualifié de fonds de garantie
notamment en Afrique du Nord est destiné aux promoteurs des projets
culturels faute de garantie pour lancer leurs entreprises culturelles. Il
s'adresse aux divers secteurs parmi lesquels la production et la distribution
cinématographique et audiovisuelle, l'industrie liée au
cinéma, les exploitations de salles du cinéma. En fait, ce fonds
servirait de caution aux industries cinématographiques.
Néanmoins, il faut redéfinir la qualification juridique de ce
fonds. Le terme «garantie» pose des problèmes car, il un sens
juridique bien précis. En fait, on penserait avec certitude qu'il aurait
une automaticité à puiser des fonds pour garantir la dette des
producteurs et des auteurs des films cinématographiques. Or, ce fonds
n'est ni une personne morale ni une personne physique. Il serait
préférable de le qualifier de fonds OIF. Cela rendra plus lisible
le nantissement des films cinématographiques lorsqu'il va falloir
garantir un prêt bancaire pour la réalisation d'un film ou pour le
simple fonctionnement des industries cinématographiques.
Conclusion du chapitre I
Le droit d'auteur, contrairement au droit de la
propriété industrielle, a fait l'objet d'une harmonisation. Cette
harmonisation s'observe dans l'espace OHADA à travers le renvoi aux lois
nationales et les difficultés qui en découlent, toute chose qui
ne va pas sans entrainer de conséquences sur le régime juridique
du droit d'auteur. Au regard des difficultés liées à la
technique de l'harmonisation, il s'est avéré nécessaire,
de faire des propositions, afin de réaménager le régime du
nantissement du droit d'auteur. Le régime général du
nantissement des droits de propriété intellectuelle, aurait en
principe eu pour effet de simplifier les régimes spécifiques de
nantissement. Or, on peut encore constater une certaine imperfection dans le
nantissement des droits de propriété industrielle, qui, lui, a
fait l'objet d'uniformisation.
66
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
CHAPITRE II : L'IMPARFAITE SIMPLIFICATION DU
NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE INDUSTRIELLE
L'uniformisation du droit est, a priori, une forme
plus brutale mais aussi plus radicale d'intégration juridique. Elle
consiste à instaurer, dans une matière juridique donnée,
une réglementation unique, identique en tous points pour tous les Etats
membres, dans laquelle il n'y a pas de face, en principe, pour des
différences. Partant, au regard de cette définition et des
règles qui régissent la propriété intellectuelle,
on peut conclure que la propriété intellectuelle fait bel et bien
l'objet d'une uniformisation. On a d'ailleurs estimé à juste
titre que, l'uniformisation du droit de la propriété
industrielle, sous l'égide de l'OAPI était quasiment
complète. En outre, du côté de l'OAPI, il convient de
distinguer entre les textes relatifs à la propriété
industrielle et celui relatif à la propriété
littéraire et artistique. Aussi bien l'esprit que la lettre de l'accord
de Bangui sont sans ambiguïté sur la vocation des annexes relatives
à la propriété industrielle à s'appliquer de
manière uniforme à l'ensemble des Etats membres176.
L'uniformisation a eu pour finalité de simplifier la réalisation
du nantissement des droits de propriété industrielle (Section
II). Cependant, il subsiste un problème, celui de la cohabitation entre
les différents textes communautaires (Section I).
Section 1 : Le problème de la cohabitation entre
l'AUS et l'ABR
Le nantissement des droits de propriété
industrielle, de par sa nature, fait appel à deux systèmes
juridiques complémentaires. Il est transversal, car pour le cerner, il
est nécessaire de faire aussi bien appel aux règles de l'OHADA,
que de ceux de l'OAPI. Le domaine de l'OHADA recoupe donc celui de l'OAPI. La
coordination entre les deux systèmes juridique n'est pas parfaite, ce
qui conduit au constat d'une inadéquation entre l'AUS et l'ABR
(Paragraphe I), qui nécessite une mise en adéquation (Paragraphe
II).
176 NGOMBE (L. Y.), « le droit d'auteur dans les Etats
membres de l'Organisation africaine de la propriété
intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée ? »,
e.Bull. du dr. auteur, janvier - mars 2005.
67
68
69
70
71
72
73
74
75
76
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
§ 1. Le constat d'une inadéquation entre l'Acte
uniforme sur les sûretés et l'Accord de Bangui
L'inadéquation existante entre les différentes
législations communautaires est tant sémantique (A)
qu'institutionnelle (B).
A- L'inadéquation sémantique
La pratique tout comme le vocabulaire ont beaucoup
évolué depuis l'entrée en vigueur de l'ABR. Certains
termes correspondent de moins en moins aux réalités
socio-économiques, précisément en ce qui concerne certains
termes. C'est par exemple le cas de l'expression « gage », qui,
aujourd'hui, ne recouvre pas le même contenu qu'à l'origine. Il
faut le rappeler le gage est le contrat par lequel le constituant accorde
à un créancier le droit de se faire payer par
préférence sur un bien meuble corporel ou un ensemble de meubles
corporels, présents ou futurs177. Le gage, parce qu'il porte
sur un bien meuble, corporel, emporte dépossession du titulaire de son
bien. Ayant une nature différente, la propriété
industrielle saurait difficilement faire l'objet d'un gage. C'est d'ailleurs ce
qui marque l'inadaptation de l'appellation de « gage », quand il
s'agit de sûreté, portant sur les droits de
propriété industrielle.
Toutefois, les choses sont restées en l'état, et
selon les statistiques de l'OAPI, il n'existe à ce jour aucun gage
inscrit aux registres spéciaux de l'Organisation. Ayant certainement
été bien conseillé, les usagers de l'OAPI ont plutôt
choisi d'inscrire des nantissements de marques178, lesquels
répondent mieux au caractère immatériel ou incorporel du
droit de propriété industrielle. La pratique a donc
devancé le législateur OAPI dans la réforme, du moins lui
a ouvert le chemin. C'est d'ailleurs, l'une des innovations majeures de la
réforme des sûretés de l'OHADA : la distinction bien meuble
corporel et bien meuble incorporel. L'on pourrait toutefois se poser la
question de savoir pourquoi l'Administration de l'OAPI a - t - elle
accepté d'inscrire le nantissement, alors que celui-ci ne figure ni dans
l'Accord de Bangui, ni dans l'Instruction Administrative179. Une
certaine réponse pourrait se trouver dans les dispositions de
l'Instruction Administrative n°118, admet que tout acte affectant la vie
des titres doit être inscrit au registre spécial. Mais, le
législateur OAPI devrait l'exprimer de façon expresse et
claire.
177 Art.92 AUS du 15 décembre 2010.
178 De 2006 à 2010, 37 nantissements de marques ont
été inscrit au registre spécial des marques de l'OAPI.
179 Instruction administrative n°120 donne une liste
exhaustive d'actes devant faire l'objet d'inscription aux registres
spéciaux.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
B- L'inadéquation institutionnelle
L'inadéquation sémantique est d'une certaine
manière la preuve d'une inadéquation institutionnelle, existante
entre l'OAPI et l'OHADA. C'est le signe d'un manque de collaboration entre ces
dernières. Or l'importance d'une telle collaboration n'est plus à
démontrer. En effet, la supranationalité des législations
de chacune de ces deux organisations est précisée dans les
textes. Dans ce sens, le Traité de l'OHADA paraît être le
plus clair, puisqu'il prévoit en son article 10(2) que les dispositions
des Actes uniformes s'appliquent dans l'ordre interne y compris en cas de
législation nationale contraire votée
postérieurement180.
Les travaux de la CNUDCI qui ont abouti à l'adoption du
Guide Législatif sur les opérations garanties. Le projet de
supplément au Guide Législatif consacré aux
sûretés réelles grevant des propriétés
intellectuelles, qui a fortement impliqué l'OMPI, a été
adopté par l'Assemblée
Générale en 2010 à sa 65e
session181. Et les recommandations de ses travaux mettent toujours
en rapport le système des opérations garanties et celui de la
propriété intellectuelle des Etats pour établir les
recoupements et relever les incompatibilités en vue d'optimiser les
synergies. Or, les recommandations de la CNUDCI ont fortement inspiré
les auteurs de la réforme de l'acte uniforme sur les
sûretés de 2010. Cette collaboration entre la CNUDCI et l'OMPI
devrait inspirer l'OHADA, l'OAPI et tout autre office de
propriété intellectuelle d'un Etat membre de l'OHADA dans
l'élaboration de règles relatives aux sûretés
réelles grevant des propriétés industrielle.
§ 2. La nécessité de la mise en
adéquation : la distinction entre le gage et le nantissement
Dans l'optique d'ouvrir la possibilité de constituer
une sûreté réelle mobilière sur des biens nouveaux
et/ou futurs, le législateur OHADA a fait que le critère de la
dépossession ne soit plus une condition de son opposabilité. Il
fait désormais reposer cette distinction sur un nouveau critère,
celui de la nature juridique de l'assiette (B). Avant de s'attarder sur ce
nouveau critère, il convient d'évoquer la justification d'une
telle distinction (A).
A- La justification de la distinction
L'ancien critère de distinction entre le gage et le
nantissement était fondé sur l'existence ou l'absence de la
dépossession. Les sûretés réelles mobilières
étaient constituées, d'une part, des
180 ABARCHI (V. D.), « la supranationalité de
l'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA)
», Revue burkinabé de droit, n°37, 2000, p.9.
181 Résolution A/RES/65/22.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
sûretés réelles mobilières avec
dépossession et, d'autre part, des sûretés
mobilières sans dépossession182. Cette distinction
découlait de l'article 39 AUS ancien qui opposait expressément le
gage au nantissement sans dépossession. Cette distinction existait
déjà en Afrique, plus précisément au
Sénégal, où le législateur faisait
déjà la distinction entre le gage et le nantissement sans
dépossession.
Pour le professeur ISSA - SAYEGH183,
sûretés réelles avec dépossession sont apparues les
premières. Elles remplissaient deux fonctions essentielles: d'une part,
elle permettait au créancier d'être assuré que son
débiteur ne dissiperait pas le meuble; d'autre part, elle agissait comme
une mesure de publicité auprès des créanciers du
débiteur en leur évitant de considérer ce bien comme
faisant partie du patrimoine de leur obligé. Etaient donc rangés
dans cette catégorie, le droit de rétention et le gage. Quant aux
sûretés réelles, elles ont été
imaginées par la pratique et ont reçu la consécration du
législateur. Etaient donc classé dans cette catégorie, le
nantissement du fonds de commerce et le privilège du vendeur, le
nantissement des matériels professionnels et des véhicules
automobiles, le nantissement des droits d'associés et des valeurs
mobilières, et enfin le nantissement des stocks.
Ce critère de distinction avait pour
inconvénient majeur d'empêcher la création d'une
sûreté mobilière sans dépossession sur un bien
nouveau, sauf à recourir à la technique de
l'entiercement184 puisque le gage suppose nécessairement la
dépossession et que le nantissement sur un bien nouveau ou futur n'est
pas expressément prévu par l'AUS185. Afin
d'éviter cela, et de faciliter la sûreté mobilière
sur des biens futurs et/ou nouveaux, le législateur OHADA a
consacré un nouveau critère de distinction entre le gage et le
nantissement.
B- Une distinction fondée sur la nature
juridique de l'assiette
Contrairement au droit positif où la distinction est
fondée sur la dépossession ou non du bien grevé, le
législateur OHADA a opté pour une distinction en fonction de la
nature corporelle ou incorporelle.
182 ISSA-SAYEGH et alii, OHADA - Sûretés, op.
cit. n°s 166 et s., pp. 63 et s.
183 Idem.
184 C'est la remise, aux fins de sûreté, d'un objet
mobilier à un tiers qui en assume la garde pour le compte d'autrui.
185 CROCQ ( - P) « Les grandes orientations du projet de
reforme de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés
», Droit et patrimoine n° 197, novembre 2010, p.55.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
1- Le gage, une sûreté sur un bien meuble
corporel
Les fondements du gage font obstacle à son adaptation
aux propriétés industrielles: d'abord parce qu'elles ne
répondent pas à la dichotomie classique du droit des biens et
ensuite parce que le maintien du titre entre les mains du débiteur est
contradictoire avec la qualification de gage. Le souci d'encourager le
développement du gage sans obliger le constituant à se
déposséder du bien mis en gage a incité le
législateur OHADA à redéfinir le gage et le
nantissement186. En effet, le gage est désormais
défini comme « le contrat par lequel le constituant accorde
à un créancier le droit de se faire payer par
préférence sur un bien meuble corporel ou un ensemble de biens
meubles corporels, présents ou futurs»187. Cette
nouvelle définition du gage n'oblige plus le constituant à se
défaire du bien gagé. Comme l'intitulé du Chapitre IV du
nouvel acte uniforme, l'emploi du qualificatif « meubles corporels
» dénote de la volonté du législateur de
dissocier le matériel de l'immatériel. Partant, les droits de
propriété intellectuelle, notamment ceux de la
propriété industrielle ne peuvent plus faire l'objet de gage, et
les garanties prises dans ce domaine ne devront plus être
qualifiées comme telles.
En faisant le choix de fonder la distinction, non sur le
critère de dépossession ou de l'absence de dépossession de
la chose gagée, mais plutôt sur sa nature corporelle ou
incorporelle, le législateur OHADA introduit une distinction plus
rationnelle et quelque peu plus sûr. Car, une telle distinction a le
mérite d'éviter d'organiser une dépossession «
fictive » du constituant, au détriment d'une inscription du gage au
RCCM. En tout état de cause, la sûreté réelle
grevant les droits de propriété industrielle n'est plus
qualifiée de gage, mais de nantissement, qui du reste est une
sûreté sur un bien meuble incorporel.
2- Le nantissement, une sûreté sur un bien
meuble incorporel
Le législateur OHADA a fait le choix de clairement
définir les termes qu'il devait employé dans le nouvel AUS. Le
nantissement fait désormais l'objet d'un chapitre, le chapitre V du
nouvel Acte uniforme. Il est intitulé « Nantissement de meubles
incorporels ». En effet, désormais défini par l'article
125 du nouvel acte uniforme sur les sûretés, le nantissement
consiste en « l'affectation d'un bien meuble incorporel ou d'un
ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en garantie
d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à
condition que celles-ci soient déterminées ou
déterminables ». En d'autres termes, le nantissement ne peut
porter que sur un bien meuble incorporel ou un ensemble de bien meuble
incorporel, qu'ils
186 . MARCEAU-COTTE (A.) et LAISNEY (L-J.), « Vers un
nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010,
p.66.
187 Art. 92, AUS du 15 décembre 2010.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
soient présents ou futurs. Ainsi, le nantissement est
la garantie qui porte sur tout bien ou ensemble de biens qui échappent
à toute appréhension matérielle. De ce point de vue, l'on
doit admettre que le législateur OHADA s'est fortement inspiré de
la distinction et de la qualification faites par son homologue français
à l'issue de la réforme188
dessûretés189, bien que le premier ait poussé
plus loin sa définition.
Par ailleurs, les différents droits susceptibles
d'être nantis ont été édictés dans une liste
limitative. C'est l'article 126 AUS qui établi cette « short
list» en stipulant que peuvent notamment être nantis: les
créances, le compte bancaire, les droits d'associés, les valeurs
mobilières et le compte de titres financiers, le fonds de commerce et
enfin les droits de propriété intellectuelle. Il est en outre
précisé que, le nantissement de ces droits peut être
conventionnel ou judiciaire190.
Section 2 : La simplification de la réalisation
du nantissement
Bien qu'ayant opéré la distinction entre bien
meuble corporel et bien meuble incorporel, le législateur OHADA n'a pas
défini un régime spécifique à la réalisation
d'un nantissement sur des droits de propriété intellectuelle.
L'acte uniforme sur les sûretés applique à ce nantissement
le régime de droit commun du gage191, donc d'une
sûreté sur bien corporel. La simplification de la
réalisation du nantissement passe par la détermination des moyens
de réalisation du nantissement (Paragraphe I), et la
détermination des droits issus du contrat de nantissement (Paragraphe
II).
§ 1. La détermination des moyens de
réalisation du nantissement
Le régime applicable à la réalisation
d'une sûreté réelle sur des droits de
propriété industrielle est le régime de droit commun :
celui du gage. Mais sans que le législateur ne l'ait prévu
expressément, le créancier garanti ne dispose pas d'un droit de
rétention, en raison de l'absence de dépossession pour une telle
catégorie du bien. La réalisation peut être conventionnelle
(A) ou judiciaire (B).
188 Ordonnance n°200-346 du 23 mars 2006 relative aux
sûretés.
189Chapitre III : Du nantissement de meubles
incorporels, Art. 2355, Code civil français
190 Art. 125-2 de l'AUS du 15 décembre 2010.
191 Art. 97-2, 104, 105 et 226 de l'AUS.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
A. La réalisation conventionnelle
La réalisation conventionnelle, comme son nom
l'indique, est celle qui est faite d'accord partie. Les différentes
parties au nantissement des droits de propriété intellectuelle se
mettent d'accord et procède à la vente, sans l'intervention du
juge. Il s'agit dans cette hypothèse de la vente amiable.
L'acte de vente doit nécessairement être
constaté par écrit, sous peine de nullité192.
La vente peut être réalisée, soit par acte sous seing
privé, soit par acte authentique et comporter certaines mentions. Ces
mentions visent essentiellement à renseigner l'acquéreur sur la
valeur réelle du fonds de commerce ou de l'élément
cédé et les tiers sur l'identité des parties. De plus, le
vendeur (débiteur) doit produire un état des inscriptions prises
sur le titre de propriété industrielle sans laquelle il ne peut y
avoir de vente. Toutefois, le législateur n'a prévu aucune
sanction en cas d'omission d'une telle production. Les droits de
propriété industrielle sont, non seulement spécifiques,
mais ils renferment chacun des spécificités propres. Ainsi, si la
vente ou cession d'un brevet193 est totale, il n'en va pas de
même de celle réalisée sur une marque. En effet, la cession
d'une marque peut être effectuée pour tout ou partie des produits
ou services auxquels elle s'applique194.
La vente ou cession emporte transmission de
propriété. Ainsi, il est fait obligation au vendeur et à
l'acquéreur de déposer deux copies certifiées par eux au
RCCM. L'inscription est faite à la demande de l'acquéreur
immatriculé. De même, la cession doit être inscrite au
Registre Spécial approprié de l'OAPI par la partie la plus
diligente. Mais contrairement à la constitution du nantissement du fonds
de commerce où le législateur OHADA fait obligation aux parties
de satisfaire à la publicité prévue par les dispositions
relatives à la propriété intellectuelle, ici aucune
allusion n'est faite à une telle procédure. L'acquéreur
qui se fierait aux seuls textes de l'OHADA pourrait courir de graves risques de
voir le titre acquis inopposable à des tiers. Surtout qu'aucune sanction
n'a été prévue pour le défaut de production de
l'état des inscriptions sur le titre.
B. La réalisation judiciaire
La réalisation judiciaire est ouverte en cas de
défaillance du débiteur. Deux opportunités lui sont alors
offertes. Le créancier nanti peut procéder soit à la vente
forcée de l'objet du nantissement, soit à l'attribution
judiciaire.
192 Art. 26(2), Annexe III; art. 33(3), Annexe I de l'ABR.
193 Art. 33(2), Annexe I de l'ABR.
194 Art. 26(2), Annexe III de l'ABR.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Dans la première hypothèse, il convient de se
référer à l'article 104 AUS pour déterminer les
règles de procédure y relatives. En effet, la procédure de
vente est toujours judiciaire et elle suppose toujours un titre
exécutoire. Ainsi, faute de paiement à l'échéance,
le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire
procéder à la vente forcée de la chose nanti, huit jours
après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers
constituant du nantissement dans les conditions prévues par les
dispositions organisant les voies d'exécution auxquelles le contrat de
nantissement ne peut déroger.
Dans la deuxième hypothèse, c'est-à-dire
celle de l'attribution judiciaire, le créancier, selon les termes de
l'alinéa 2 de l'article 104 AUS nouveau, peut faire ordonner par la
juridiction compétente que le bien nanti lui sera attribué en
paiement jusqu'à due concurrence du solde de sa créance et
d'après estimation suivant les cours ou à dire d'expert. Un
problème pourrait se poser en cas d'attribution. C'est celui de la
valeur du bien nanti. Plus concrètement, comment sera
réglé le litige résultant de la différence des
valeurs entre les sommes dues et le bien nanti? Le législateur OHADA a
résolu le problème en énonçant à l'article
105 AUS qu' « en cas d'attribution judiciaire ou conventionnelle,
lorsque la valeur du bien excède la valeur qui lui est dû, le
créancier gagiste doit consigner une somme égale à la
différence s'il existe d'autres créanciers d'un gage sur le
même bien ou, à défaut, verser cette somme au constituant.
Toute clause contraire est réputée non
écrite.»
§ 2. La détermination des droits du
créancier nanti
Il appartient aux parties à l'acte du nantissement de
convenir de la durée de l'inscription, et donc des droits inscrits sans
que cette durée dépasse dix ans à compter de
l'inscription195. L'inscription garantit, au même titre que le
principal, deux années d'intérêts. L'AUS confère au
créancier nanti trois droits. Le droit de suite et de réalisation
qu'on analysera d'un côté, et le droit de
préférence, qu'on analysera de l'autre.
A- Les droits du créancier nanti avant
l'échéance de la dette
Les droits de propriété intellectuelle sont
soumis à une certaine précarité196. Celle-ci
vient d'une part, de la possibilité qu'une fois consacré, ceux-ci
puissent faire l'objet d'une radiation ou d'une annulation, et, d'autre part,
de la possibilité d'une dévalorisation rapide. Dans le cas
195 Art 58(2), AUS.
196 Cf. pour une présentation des causes de cette
précarité, MARTIAL (N.), « La conjugaison du droit des
suretés réelles au temps des propriétés
intellectuelles », RLDI, n° 11, déc. 2005, n°9, p. 61.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
notamment de la propriété industrielle, les
nouvelles créations de modèles d'utilité peuvent rendre
obsolètes les anciennes, causant dès lors la fluctuation de leur
valeur.
Cette précarité peut contribuer à
diminuer l'efficacité, et donc l'attrait, de la garantie portant sur ces
derniers197. Il parait donc opportun de conférer au
créancier certaines prérogatives avant l'échéance
de la garantie. On pourrait donc, pour ce dernier admettre, d'une part une
faculté de remboursement anticipé (1), d'autre part admettre une
faculté de subrogation réelle en cas de diminution ou de
disparition de l'assiette du nantissement (2).
1- L'admission d'une faculté de remboursement
anticipé
La fonction principale du nantissement des droits de
propriété industrielle est bien de garantir le paiement de la
dette. Or comme on l'a indiqué, cette finalité peut être
mise à mal du fait de la précarité de ceux-ci. Ainsi, le
risque pour le créancier de se retrouver à
l'échéance avec une garantie inefficace est donc
élevé. C'est pour éviter cet état de chose qu'il
convient de lui reconnaitre une faculté de remboursement anticipé
de sa dette. Une telle faculté impliquerait que le créancier ait
le droit d'obtenir, avant l'échéance, un paiement sur les fruits
et revenus résultant de l'exploitation des droits de
propriété intellectuelle. Or il s'avère que l'article 159
AUS y fait obstacle en ces termes : « Le nantissement des droits de
propriété intellectuelle ne s'étend pas, sauf convention
contraire des parties, aux accessoires et aux fruits résultant de
l'exploitation du droit de propriété intellectuelle objet du
nantissement ». Pourtant, l'admission d'une telle faculté
renforcerait l'attractivité du nantissement des droits de
propriété intellectuelle.
La lecture du droit comparé permet de ressortir un cas
sur lequel l'OHADA pourrait s'appuyer pour une éventuelle reforme dans
ce sens. Le droit français a en effet, consacré le paiement
anticipé en matière de nantissement sur les films
cinématographiques. Qualifié de « délégation
de recettes », il permet au créancier, par une adjonction au droit
de préférence qu'il tient du nantissement, d'exercer un recours
direct contre les exploitants du film sur les recettes de
celui-ci198. Il peut ainsi se faire rembourser la créance
avant l'échéance de la dette, évitant ainsi au
créancier le risque de dépréciation de l'objet de la
sûreté. Outre cette faculté, il serait judicieux d'admettre
au créancier une faculté de substitution des droits de
propriété intellectuelle pour d'autres en cas de diminution de la
valeur des premiers.
197 KABRE (D. W.), « Etude critique du nantissement des
droits de propriété intellectuelle en droit OHADA »,
www.publication.lecames.org,
n° 80, p. 158, consulté le 13 mars 2015 à 22H17.
198 Art. 36 du C.I.C
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
2- L'admission d'une faculté de subrogation
réelle des propriétés intellectuelles
La question pourrait se poser de savoir quelle est
l'utilité de la subrogation réelle en matière de
nantissement de la propriété industrielle, étant entendu
que généralement, leur disparition en cours de garantie
résulte d'un acte d'aliénation. Dans cette hypothèse, le
créancier peut y faire face en usant de son droit de suite
conformément aux articles 161 et 97 de l'AUS.
Cependant, cette réflexion prend tout son sens lorsque
la disparition résulte, avant la réalisation de la garantie,
d'une dépréciation des droits de propriété
intellectuelle nantis. Dans ce cas, l'inefficacité du droit de suite
n'est plus à démontrer. Seule la subrogation réelle
permettra au créancier de retrouver la possibilité à
l'échéance de réaliser sa garantie199. Mais
pour qu'une telle subrogation soit opposable au tiers, les formalités de
publicité requises doivent être effectuées.
Certains auteurs ont proposé de consacrer une
hypothèque ouverte sur propriété intellectuelle
inspirée du droit canadien et du floating charge
anglais200. Une telle sûreté consiste à affecter
des propriétés intellectuelles présentes ou futures
indéterminées du constituant en garantie de la dette. Le
caractère ouvert de cette garantie tient en ce que celle-ci ne vise pas
des propriétés intellectuelles déterminées. La
constitution de l'hypothèque ouverte implique à titre de
validité, d'une part l'établissement d'un écrit qui doit
indiquer le caractère ouvert de la garantie et le motif de la
clôture de celle-ci, d'autre part l'inscription de l'hypothèque au
registre. Toutefois, l'opposabilité de cette sûreté ne
résulte pas de cette inscription; elle découle d'une inscription
d'un avis de clôture. Ce dernier fixe l'assiette de l'hypothèque
ouverte, objet de la réalisation. Cette assiette est constituée
par les propriétés intellectuelles qui existent dans le
patrimoine du constituant au moment de l'avis de clôture. Ainsi, avant un
tel avis, le constituant jouit d'une totale liberté d'exploiter ses
droits de propriété intellectuelle et n'est pas tenu à une
obligation de conservation.
B- Les droits du créancier nanti à
l'échéance de la dette
Le nantissement des droits de propriété
industrielle confère au créancier un droit de suite et de
réalisation (A), de même qu'un droit de préférence
(B) qu'il exerce en cas de défaillance du constituant, pour lesquels
l'article 161 fait un renvoi aux règles communes applicables.
1- Le droit de suite et de réalisation
Conformément à l'article 161 alinéa 2
AUS, le droit de suite conféré au créancier s'exerce selon
les dispositions de l'article 97 alinéa 2 de l'AUS. Ce dernier stipule
précisément
199 MARTIAL (M.), Droit des sûretés
réelles sur propriété intellectuelle, op. cit.,
n°543-544, pp. 354-546.
200 Ibid., n° 545 - 552, pp. 356-361.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
que: « lorsque le gage a été
régulièrement publié, les ayants cause à titre
particulier du constituant ne peuvent être regardés comme des
possesseurs de bonne foi et le créancier gagiste peut exercer son droit
de suite à leur encontre ». Il convient de souligner que le
droit de suite est le droit pour le créancier inscrit de saisir le ou
les droits de propriété intellectuelle grevés en quelques
mains qu'ils se trouvent, même entre les mains d'un tiers
acquéreur. C'est d'ailleurs le sens de l'article 97, alinéa 2
ci-dessus. En fait la publication du nantissement a pour effet de porter
celui-ci à la connaissance des tiers et de le rendre opposable à
ces derniers. Il en résulte que ceux qui auront acquis des droits sur
propriétés intellectuelles après une telle publication ne
peuvent plus être crus en leur bonne foi.
Le droit de réalisation a pour sa part fait l'objet
d'amples développements plus haut, sauf à préciser que
L'une des innovations introduite par le législateur, dans le mode de
réalisation, est l'introduction du pacte commissoire. Les aléas
des procédures judiciaires sont ainsi évités tout en
assurant la protection des droits du constituant puisque le pacte commissoire
est strictement encadré par des règles protectrices des droits du
constituant201. Il faut en effet que le bien apporté en
garantie soit une somme d'argent ou un bien dont la valeur fait l'objet d'une
cotation officielle ou pour les autres biens, que le débiteur de la
dette garantie soit un débiteur professionnel et que la valeur du bien
soit fixée à dires d'expert202. Il s'agit d'une
attribution conventionnelle qui intervient dès l'inexécution
d'une obligation garantie et sans intervention du juge, pourvu que ce mode de
réalisation ait été convenu entre les
parties203. Ainsi, le créancier pourra s'attribuer le droit
de propriété industrielle en paiement s'il estime pouvoir en
faire une exploitation personnelle204. Outre ce droit, le
créancier nanti dispose également du droit de
préférence.
2- Le droit de préférence
Le droit de préférence est le droit pour
certains créanciers d'échapper au concours des autres
créanciers (ou de certaines catégories de créanciers dans
la distribution du prix de vente des biens du débiteur et être
payés avant ceux auxquels ils sont
préférés205. En d'autres termes, c'est le fait
pour le créancier d'être payé par préférence
à tous les autres sur le prix de vente du bien grevé. Le
nantissement des droits de propriété industrielle confère
au créancier un droit de préférence qu'il exerce
conformément aux dispositions de l'article 226 de l'Acte uniforme sur
les sûretés. En effet, aux termes des dispositions de cet article,
le créancier nanti vient au quatrième rang dans l'ordre
201 FILLE - LAMBIE (O.) et MARCEAU - COTTE (A.), « Les
sûretés sur les meubles incorporels: le nouveau nantissement de
l'Acte uniforme sur les sûretés », Droit et patrimoine,
n°197, novembre 2010, p.72.
202 Art. 104(3) de l'AUS.
203 MARCEAU-COTTE (A.) et LAISNEY (L-J.), « Vers un
nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010,
p.66.
204 WELLHOFF (S.), Les garanties du crédit et les
titres de la propriété industrielle, Université de
Nantes, mémoire soutenu en juin 2007, p. 49.
205 CORNU (G.) (Sous la direction de), Vocabulaire
juridique, 8e éd., PUF, 2008, p. 705.
77
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
de priorité de distribution des deniers provenant de la
réalisation des droits de propriété industrielle. Il y a
lieu de constater que les nantissements d'une façon
générale ont gagné une place dans l'ordre de
priorité relativement à l'ancien régime de
priorité. La date d'opposabilité du nantissement détermine
le rang d'un créancier nanti par rapport à d'autres
créanciers sur le même bien.
Lorsque le créancier inscrit est en présence de
créanciers chirographaires, il les primes. En cas de pluralité de
créanciers inscrits, chaque créancier exerce son droit de
préférence dans l'ordre d'inscription de sa sûreté.
Il peut arriver que le créancier nanti se trouve primé par
d'autres créanciers ayant une sûreté meilleure que la
sienne. C'est ainsi que le classement de la distribution des deniers provenant
de la réalisation des meubles. Le nantissement des droits de
propriété intellectuelle ne vient, comme on l'a souligné
plus haut, qu'au quatrième rang. Les créanciers inscrits peuvent
donc être primés, dans l'ordre, par:
- Les créanciers des frais de justice engagés pour
parvenir à la réalisation du bien vendu et à la
distribution elle-même;
- Les créanciers des frais engagés pour la
conservation du bien dans l'intérêt des créanciers dont le
titre est antérieur en date;
- Les créanciers de salaire super
privilégiés.
Conclusion du chapitre II
Parce qu'ayant été uniformisé, on aurait
pu croire que l'appréhension de la propriété industrielle
se serait fait sans ambages. C'était sans compter sur les
problèmes de cohabitation entre les deux ordres juridiques qui
interviennent en matière de nantissement des droits de
propriété industrielle. Il s'avère donc qu'il existe entre
l'AUS et l'ABR, une inadéquation tant sémantique
qu'institutionnel, d'où l'invite d'une mise en adéquation. Il
faut cependant reconnaitre qu'il existe une simplification quant à la
réalisation du nantissement. Ladite simplification se manifeste à
travers la détermination des moyens de réalisation du
nantissement d'une part, et la détermination des droits des
créanciers nantis.
78
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Conclusion de la IIe partie
Harmonisation et uniformisation sont les deux techniques
d'intégration juridique choisis par le législateur OHADA. La
première est l'opération législative consistant à
mettre en accord des dispositions d'origine (et souvent de date)
différente, plus spécialement à modifier des dispositions
existantes afin de les mettre en cohérence avec une reforme nouvelle. La
seconde - l'uniformisation - en ce qui la concerne, est l'action de faire
régner, au sein d'un système juridique, l'unité
d'interprétation, d'assurer l'égale et uniforme application de la
loi. Chacune de ces techniques ayant ses particularités, elles ne
manquent pas d'influencer les régimes particuliers des droits de
propriété intellectuelle, notamment en ce qui concerne leur
nantissement. Si l'Harmonisation contribue fortement à complexifier le
nantissement du droit d'auteur, l'uniformisation n'atteint pas forcément
les objectifs attendus. En effet, la simplification que cette dernière
devait apporter, s'avère être imparfaite.
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
79
CONCLUSION GENERALE
80
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Présents depuis tout temps, c'est essentiellement
à l'époque contemporaine que la multiplication et la diffusion
des biens immatériels ont réussi à créer des
richesses nouvelles206. En effet, ils occupent une place
prépondérante dans les fortunes privées207 et
l'affirmer est devenu un axiome incontesté208. Autrefois, les
richesses résidaient dans le patrimoine mobilier corporel.
Désormais, les richesses se sont dématérialisées.
La valeur du bien a muté. Elle ne réside plus dans le corpus mais
dans la chose immatérielle, le corpus ne servant qu'à faire
exister, qu'à faire relever la chose.
La puissance économique que ces droits
représentent est incontestable, particulièrement, pour ce qui est
des droits de propriété intellectuelle. Le législateur
OHADA a compris l'importance que pouvait avoir ces droits, c'est ce qui
justifie qu'il ait consacré un nantissement des droits de
propriété intellectuelle. L'Acte uniforme sur les
sûretés, entré en vigueur le 15 décembre 2010, a
proposé un nouveau visage au régime général du
nantissement des droits de propriété intellectuelle. En
réalité, la consécration d'un régime
général du nantissement des droits de propriété
intellectuelle autonome, s'est accompagnée d'un certain nombre de
lacunes, précisément, d'une imparfaite autonomisation des
régimes spécifiques de nantissement des droits de
propriété intellectuelle.
L'autonomisation du régime général du
nantissement nous a conduit à s'intéresser au nouveau
régime récemment entré en vigueur, pour y découvrir
le contenu et le formalisme qui l'entoure. Par ailleurs, ce nouveau
régime général nous a semblé justifier l'analyse de
la nouvelle fonction de ce nantissement, être pris comme un moyen de
financement, particulièrement pour les entreprises émergentes.
Pris globalement, le régime du nantissement des droits de
propriété intellectuelle semble irréprochable. Cependant,
à regarder de près, notamment le régime du droit d'auteur
et de la propriété industrielle, certaines imperfections sont
bien visibles. La principale imperfection semble pourtant être celle
liée aux moyens d'intégration juridique choisis, autant pour la
propriété industrielle, que pour le droit d'auteur. Les
législateurs ayant opté respectivement pour l'uniformisation et
l'harmonisation.
Bien que pour certaines de ces imperfections le
législateur à fait des efforts de correction, il a fallut faire
quelques propositions pour que l'encadrement du nantissement des droits de
propriété intellectuelle cesse d'être disparate.
206 RIPERT (G.), Aspects juridiques du capitalisme
moderne, LGDJ, 1951, 2e éd., n°54.
207 CATALA (P.), « la transformation du patrimoine en droit
civil moderne », RTD civ, 1996, p. 185.
208 HANIA PINTO (V.), les biens immatériels saisis par
le droit des sûretés réelles mobilières
conventionnelles, Université Paris-Est Créteil, Thèse
7 décembre 2011, p.318, n°622.
81
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Ouvrages généraux
· CORNU (G.) (Sous la direction de), Vocabulaire
juridique, Association Henri Capitant, PUF, 8e éd.,
2009.
· GRAVITZ (M.), Méthodes des sciences
sociales, Dalloz, 11e éd, 2001,.
· GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de),
Lexique des termes juridiques, Dalloz, 12e éd.,
1999.
· . ISSA-SAYEGH (J.), OHADA, Traité et Actes
Uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2002.
· MOULOUL (A.), Comprendre l'OHADA, 2e
éd. PUA, 2009.
· RIPERT (G.), Aspects juridiques du capitalisme
moderne, LGDJ, 2e éd, 1951.
Ouvrages spécialisés
· BERNARD (A.), La propriété
intellectuelle Livre II, Marques et Brevets, Dessins et Modèles,
DELMAS, Ed. Belfond, Paris, 1995.
· ERNST & YOUNG, Le droit OHADA : Histoires,
Institutions et Actes Uniformes, Ed. FFA, octobre 2006.
· KALIEU ELONGO (Y.), Droit et pratiques des
sûretés réelles OHADA, Presses Universitaires
d'Afrique, Yaoundé, 2010.
· LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties du
crédit, LGDJ, 3e éd., 2002
· LISANTI (C.), Les sûretés
conventionnelles sur meubles incorporels, Litec, 2001.
· LUCAS (A.), LUCAS (H.-J.) et LUCAS-SCHLOETTER (A.),
Traité de la propriété littéraire et
artistique, 4e éd., Paris, LexisNexis, 2012.
· MARTOR (B.), PILKINGTON (N.), SELLERS (D.) et THOUVENOT
(S.), Le droit uniforme des affaires issu de l'OHADA, Editions du
Juris-Classeur, Litec, février 2007.
· MESTRE (J.), PUTTMAN (E.), BILLIAU (M.), Droit
spécial des sûretés réelles, LGDJ, 1996.
· MINKAO SHE (A.), Droit des Sûretés et
des Garanties du crédit dans l'Espace OHADA, Tome 2 : Les Garanties
Réelles, Dianoïa, 2010.
82
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
· VIVANT (M.), Le droit des brevets, Dalloz, coll.
Connaissance du droit, 1997.
· VIVANT (M.) et BRUGUIERE (J.-M.), Droit
d'auteur, Dalloz, 1er éd., 2009.
Articles
· ABARCHI (V. D.), « La supranationalité de
l'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA),
Revue burkinabé de droit, n°37, 2000
· CATALA (P.), «La transformation du patrimoine en
droit civil moderne », RTD civ, 1996
· COLETTE (IT.), « Méthode
d'évaluation du prix d'une technologie », Rev.
Propriété Industrielle, mai 2006.
· CROCQ (P.), « Les grandes orientations du projet
de réforme de l'Acte Uniforme portant organisation des
sûretés », Droit & Patrimoine, n°197, novembre
2010.
· EBANGA KANE (P.), « La nature juridique du
concordat du redressement judiciaire dans le droit des affaires OHADA »,
Ohadata D-08-23.
· FILLE-LAMBIE (O.), MARCEAU-COTTE (A.), « Les
sûretés sur les meubles incorporels : le nouveau nantissement de
l'Acte Uniforme sur les sûretés », Droit & patrimoine,
n°197, novembre 2010.
· GRIMALDI (M.), « L'acte uniforme portant
organisation des sûretés », LPA n°205, 13 octobre
2004.
· ISSA-SAYEGH (J.), « Le gage sur créances
de sommes d'argent », Penant, numéro spécial 840 «
Sûretés et garanties bancaires ».
· KABRE (D. W.), « Etude critique du nantissement
des droits de propriété intellectuelle en droit OHADA »,
www.publication.lecames.org,
n° 80, consulté le 13 mars 2015 à 22H17
· KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et
uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens
d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709, 2008
· KENFACK DOUAJNI (G.), «Les nouvelles
sûretés introduites dans l'Acte Uniforme adopté le 15
décembre 2010 » in Revue de l'ERSUMA, numéro spécial
novembre - décembre 2011.
· LEGER (R.), « La prise de garantie en
matière de propriété intellectuelle au CANADA »,
www.robic.ca/publications/Pdf/279-BHS.pdf.
· LEVY (M.) et JOUYET (J.-P.), «
L'immatériel, la croissance de demain»: Le Figaro du 9
décembre 2006
83
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
· MARCEAU-COTTE (A.), LAISNEY (L-J.), « Vers un
nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010.
· NGOMBE (L. Y.) :
Ø « Les sûretés mobilières et
les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA
et de l'OAPI : un aspect de la concurrence de législations
supranationales en Afrique », R.R.J. 2006-4.
Ø « L'intégration juridique des Etats
africains de la zone franc », Revue PENANT n° 823 janvier - avril
1997
Ø « Le droit d'auteur dans les Etats membres de
l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) :
une harmonisation inachevée?» e.Bull. du dr. auteur, janvier - mars
2005
· PIEDELIEVRE (A.), « Le matériel et
l'immatériel. Essai d'approche de la notion de bien », Etudes
à M. De JUGLAIT, Aspects du droit privé en fin du
20e siècle, Montchrestien, Litec, 1986.
· SAKHO (M.), « Le nouvel Acte Uniforme OHADA
portant organisation des sûretés: propos introductifs d'une
refonte d'envergure autour du droit des sûretés », in Revue
de l'ERSUMA, numéro spécial novembre - décembre 2011.
· SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), « La prise de
garanties en matière de propriété intellectuelle au
CANADA », LEGER ROBIC RICHARD/ROBIC, 2001,
www.robic.ca
· STENGER (J.-P.), « Le gage des droits de
propriété intellectuelle », RDPI, 1995.
Thèses et Mémoires
· MBA (C.-R.), La protection des inventions en droit de
l'OAPI (Organisation africaine de la propriété
intellectuelle), Thèse Lyon, 2004.
· PINTO HANIA (V.), Les biens immatériels saisis
parle droit des sûretés réelles mobilières
conventionnelles, Thèse décembre 2011, Université
Paris-Est Créteil.
· KODJI (Z), Le droit d'auteur en garantie de
crédit, mémoire de Master II en droit privé, option
droit des affaires, soutenu en 2008, Université de
Ngaoundéré.
· KOFFI (K.), Les sûretés
réelles et les droits de propriété intellectuelle dans
l'espace OAPI-OHADA, mémoire de Master II en droit de la
propriété intellectuelle, soutenu en 2011
84
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
· WELLHOFF (S.), Les garanties du crédit et
les titres de propriété industrielle, Mémoire de
Master en Droit, soutenu en juin 2007.
· ZOMISSI (G.), Le gage des droits de
propriété intellectuelle dans l'espace OHADA,
Université de Yaoundé II, mémoire de Master en Droit,
soutenu en 2011
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
INDEX ALPHABETIQUE
(Les numéros correspondent aux pages)
A
Acte uniforme
assiette
|
vi, 11, 12,
|
13,
|
21,
|
25, 29, 50, 53, 54, 56, 69, 70, 74,
12, 13, 16, 23, 61, 63, 68, 69, 7,
|
78
10
|
Autonomie
|
|
|
|
|
vi
|
autonomisation
|
|
|
|
vi, vii, 7, 8, 9, 11, 46,
|
78
|
|
B
|
|
|
|
|
brevet
|
|
9,
|
13,
|
14, 15, 24, 27, 32, 33, 35, 37, 42,
|
72
|
|
C
|
|
|
|
|
crédit vi, 2, 3, 6, 7, 20, 24, 25, 33, 34, 39, 40,
41, 42, 43, 45, 64, 74, 79, 3, 9
D
débiteur
dessins et modèles
droit d'auteur.v, 4, 8,
3,
|
4, 5,
|
17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 34, 39, 40,
|
42,
|
43,
|
57,
|
62,
|
69,
|
70,
|
72,
|
73,
|
74
|
|
|
4, 5, 9, 13,
|
15,
|
16,
|
24,
|
25,
|
30,
|
35,
|
38,
|
48,
|
61
|
9,
|
15,
|
16, 17, 23, 24, 33, 34, 40, 48, 50, 51,
|
52,
|
53,
|
54,
|
55,
|
56,
|
57,
|
58,
|
59,
|
60,
|
|
|
61, 62, 63, 64, 65, 66, 76, 78, 3, 9,
|
10
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
E
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
85
entreprise iv, 2, 3, 17, 30, 38, 40, 41, 42, 43, 44, 46,
51, 53, 9
G
garantie 4, 6, 7, 9, 16, 17, 18, 20, 22, 23, 33, 34, 38,
39, 40, 41, 42, 44, 48, 53, 56, 61, 62, 63, 64,
70, 74, 2, 3, 9
H
harmonisation v, 5, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 57, 58, 65,
66, 68, 78, 2, 3, 9
I
inscription 12, 20, 21, 25, 26, 27, 28, 29, 36, 37, 38,
43, 62, 63, 67, 70, 72, 73, 75, 8
N
nantissementv, vi, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 16,
18, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 32,
33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46,
48, 49, 50, 51, 53, 54, 55, 56, 57, 59, 60, 61,
62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75,
76, 78, 2, 7, 8, 9, 10
86
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
O
obligation 4, 6, 9, 16, 17, 18, 19, 26, 27, 34, 56, 64,
72, 74
opposabilité 8, 28, 29, 62, 68, 74
P
propriété industrielle 4, 5, 6, 9, 16, 17,
24, 27, 28, 48, 49, 51, 56, 57, 62, 65, 66, 67, 70, 71, 72, 74,
75, 78, 3
propriété intellectuelle. iv, vi, 2, 3, 4,
5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 25,
27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 37, 38, 39, 40, 41,
42, 43, 44, 45, 46, 48, 49, 51, 52, 53, 54, 56,
57, 58, 61, 62, 65, 66, 68, 70, 71, 72, 74, 75, 76, 78,
79, 2, 3, 4
propriété littéraire et artistique
5, 9, 13, 15, 27, 35, 49, 51, 53, 57, 66
R
réalisation v, 36, 39, 48, 62, 65, 66, 71, 72, 73,
74, 75, 10, 11
S
sûreté 3, 4, 5, 12, 15, 16, 18, 24, 26, 27,
28, 29, 36, 37, 39, 40, 41, 48, 56, 57, 61, 62, 67, 68, 69, 70,
71, 75, 10
sûretés...3, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 15, 16,
18, 21, 24, 28, 29, 34, 40, 50, 52, 53, 54, 56, 57, 60, 64, 67,
68, 69, 70, 71, 74, 78, 79, 2, 3
U
uniformisation 48, 49, 51, 52, 53, 57, 58, 65, 66, 76,
78, 2, 10
V
valeur financière 17, 33
87
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
TABLE DES MATIERES
Avertissement ii
Dédicace iii
Remerciements iv
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS v
SOMMAIRE vii
RESUME viii
ABSTRACT ix
Epigraphe x
INTRODUCTION GENERALE 1
Ière PARTIE: L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN A L'ENSEMBLE
DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE 10
CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU
NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE 12
Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de
propriété intellectuelle 12
§ 1. L'élargissement de l'assiette du
nantissement 13
A- Le maintien du nantissement sur les droits existants
13
1- Les créations à caractère
technique et les signes distinctifs 13
2- Les créations esthétiques et
intellectuelles 15
B- La prise en compte des droits futurs 16
§ 2. La typologie du nantissement des droits de
propriété intellectuelle 18
A- Le nantissement conventionnel 18
B- Le nantissement judiciaire 21
Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de
propriété intellectuelle 22
§ 1. L'exigence de l'écrit 22
A- L'importance de l'écrit 22
B- La valeur de l'écrit 23
1- L'écrit exigé ad validatem
23
2- La sanction de l'absence de l'écrit
24
§ 2. L'exigence de publicité 25
A- Les modalités de publicité
25
1- L'inscription au registre de commerce et du
crédit mobilier 25
2- L'inscription au registre spécial
27
B- La valeur de la publicité 28
88
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Conclusion du chapitre I : 29
CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE
INTELLECTUELLE 30
Section 1 : Les préalables à la prise de
nantissement des droits de propriété intellectuelle 30
§ 1. La nécessaire évaluation de la valeur
des droits nantis 30
A- Les techniques d'évaluation 31
B- Les difficultés de l'évaluation
32
1- La difficile évaluation des droits existants
33
2- La difficile évaluation des droits futurs
34
§ 2. La nécessité de vérifier
l'existence du nantissement 35
A- La durée du nantissement 35
B- Le contentieux lié au nantissement
36
1- Les conditions de levée du nantissement
36
2- Les conditions de radiation du nantissement
37
Section 2 : La finalité du nantissement 38
§ 1. Le nantissement et les entreprises en
fonctionnement 39
A- Le nantissement, une garantie aux investisseurs
39
B- Le nantissement, un moyen de crédit
40
§ 2. Le nantissement des droits de
propriété intellectuelle et les entreprises en difficulté
42
A- Un outil de financement du redressement
43
B- Une garantie de rachat de l'entreprise 44
Conclusion du Chapitre II 45
Conclusion de la Ie partie 46
IIe PARTIE: L'IMPRECISION DES REGIMES SPECIFIQUES DE
CHACUN DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE 47
CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS
DE PROPRIETE
LITTERAIRE ET ARTISTIQUE 50
Section 1 : La justification de la complexité:
l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins 50
§ 1. Le constat de l'harmonisation du droit d'auteur
50
A- Le renvoi aux lois nationales 51
B- Les difficultés liées à la
technique d'harmonisation 52
1- Les difficultés liées au contenu des
règles 52
2- Les difficultés tenant à l'autonomie
des Etats 53
§ 2. Les conséquences de l'harmonisation du droit
d'auteur sur son régime juridique 54
A- L'altération des règles de prise de
nantissement 54
89
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
B- L'altération du formalisme 56
Section 2 : Le nécessaire réaménagement du
régime du nantissement du droit d'auteur 57
§ 1. Le réaménagement du droit
régional 58
A- L'uniformisation du droit d'auteur 58
B- La nécessité de clairement
définir le contenu du nantissement 59
§ 2. Le réaménagement inspiré des
législations étrangères: l'exemple français
61
A- Le contenu de l'assiette du nantissement
61
1- Le nantissement de logiciels 61
2- Le nantissement de films cinématographiques
63
B- La problématique de l'adaptation du
régime du nantissement français au droit OHADA 64
Conclusion du chapitre I 65 CHAPITRE II : L'IMPARFAITE
SIMPLIFICATION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE
PROPRIETE INDUSTRIELLE 66
Section 1 : Le problème de la cohabitation entre l'AUS et
l'ABR 66
§ 1. Le constat d'une inadéquation entre l'Acte
uniforme sur les sûretés et l'Accord de Bangui 67
A- L'inadéquation sémantique
67
B- L'inadéquation institutionnelle 68
§ 2. La nécessité de la mise en
adéquation: la distinction entre le gage et le nantissement 68
A- La justification de la distinction 68
B- Une distinction fondée sur la nature juridique
de l'assiette 69
1- Le gage, une sûreté sur un bien meuble corporel
70
2- Le nantissement, une sûreté sur un bien meuble
incorporel 70
Section 2 : La simplification de la réalisation du
nantissement 71
§ 1. La détermination des moyens de
réalisation du nantissement 71
A- La réalisation conventionnelle 72
B- La réalisation judiciaire 72
§ 2. La détermination des droits du
créancier nanti 73
A- Les droits du créancier nanti avant
l'échéance de la dette 73
1- L'admission d'une faculté de remboursement
anticipé 74
2- L'admission d'une faculté de subrogation
réelle des propriétés intellectuelles 75
B- Les droits du créancier nanti à
l'échéance de la dette 75
1- Le droit de suite et de réalisation
75
2- Le droit de préférence 76
Conclusion du chapitre II 77
90
Le nantissement des droits de propriété
intellectuelle
Conclusion de la IIe partie 78
CONCLUSION GENERALE 79
BIBLIOGRAPHIE 81
INDEX ALPHABETIQUE 85
|