WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle.

( Télécharger le fichier original )
par Franklin Kennedy ASSONJI FONGUE
Univesité de Ngaoudéré (Cameroun) - Master 2014
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

REPUBLIQUE DU CAMEROUN

*********

REPUBLIC OF CAMEROON

*********

 
 
 

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR
*********
UNIVERSITE DE NGAOUNDERE
*********
FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES
ET POLITIQUES
*********
DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE
*********

 

MINISTERY OF HIGHER EDUCATION
*********
THE UNIVERSITY OF NGAOUNDERE
*********
FACULTY OF LAW AND POLITICAL
SCIENCES
*********
DEPARTEMENT OF PRIVATE LAW
*********

THEME:

LE NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE

INTELLECTUELLE

Mémoire présenté en vue de l'obtention du
Master en Droit privé

(Option Droit des affaires)

Par:

ASSONJI FONGUE Franklin Kennedy

Matricule: 06A167JP

Sous la direction de :

Pr. FOMETEU Joseph

Maitre de conférences

Année académique 2013 - 2014

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Avertissement

L'Université de Ngaoundéré n'entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire, ces opinions devront être considérées comme propres à leur auteur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Dédicace

A ma mère, Madame AJIFACK ELISE pour son amour, son courage et son soutien indéfectible.

iv

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Remerciements

Mes premiers remerciements s'adressent à mon directeur de mémoire, le Professeur JOSEPH FOMETEU. Sa grande expérience d'enseignement et de recherche, sa disponibilité et ses conseils précieux ont été autant d'encouragements. Puisse-t-il trouver ici l'expression de ma profonde gratitude et celle de mon admiration sincère.

Ensuite, mes remerciements vont à l'endroit de l'ensemble des enseignants de la Faculté des sciences juridique et politique, suivant leur poste et grade respectifs, pour les enseignements qu'ils ont bien voulu nous dispenser.

Je tiens également à remercier ma famille, d'avoir été, au long de cette année, une source inépuisable et indispensable de force et d'inspiration, et de m'avoir accordée sans relâche leur soutien. Je suis plus particulièrement reconnaissant à la famille NTAPLI, à mon frère ATEMKENG FONGUE Ruben Rousseau et à NOUMBA Hawa pour leur présence et leur aide les semaines qui ont précédé la remise définitive de ces pages.

Enfin, ces remerciements vont à l'endroit de mes amis et camarades de classe et pour tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à l'élaboration de ce travail.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS

ABR : Accord de Bangui Révisé

Al. : Alinéa

Art. : Article

Ass. Plén. : Arrêt de l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation

C. : Contre

Cass. : Cour de cassation

Chron. : Chronique

C. civ. : Code civil

C. com. : Code de commerce

CIP : Code de l'Industrie cinématographique

CPI: Code de la propriété intellectuelle

Cah. dr. entr. : Cahiers du droit de l'entreprise

Civ. : Arrêt de la Chambre civile ou de la Section civile de la Cour de cassation

Coll. : Collection

Com. : Arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation

Crim. : Arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation

Chron. : Chronique

D. : Dalloz ou Décret

Dr. et patrim. : Droit et patrimoine

Défrén. : Répertoire du notariat Défrénois

Ed. : Edition

Ex. : Exemple

Gaz. Pal. : Gazette du Palais

J.-Cl. : Jurisclasseur

JO : Journal Officiel

Mél. : Mélanges

N° : Numéro

OAPI : Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle

Obs. : Observations

OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires

Op. cit. : Ouvrage précité

Ord. : Ordonnance

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

vi

P. : Page

PUAM : Presses universitaires d'Aix-Marseille

PUF : Presses universitaires de France

Rev. : Revue

RJDA : Revue de jurisprudence de droit des affaires

RJP : Revue juridique et politique

RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil

RTD com. : Revue trimestrielle de droit commercial

SA : Société anonyme

S.: Suivant

Spéc. : Spécialement

T. : Tome

V. : Voir

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE 1

Ière PARTIE: L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN A L'ENSEMBLE DES DROITS DE

PROPRIETE INTELLECTUELLE 10

CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU NANTISSEMENT DES DROITS

DE PROPRIETE INTELLECTUELLE 12

Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de propriété intellectuelle 12

Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de propriété intellectuelle 22

Conclusion du chapitre I : 29

CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE

INTELLECTUELLE 30

Section 1 : Les préalables à la prise de nantissement des droits de propriété intellectuelle 30

Section 2 : La finalité du nantissement 38

Conclusion du Chapitre II 45

Conclusion de la Ie partie 46

IIe PARTIE: L'IMPRECISION DES REGIMES SPECIFIQUES DE CHACUN DES DROITS DE

PROPRIETE INTELLECTUELLE 47

CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE

LITTERAIRE ET ARTISTIQUE 50

Section 1 : La justification de la complexité : l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins

50

Section 2 : Le nécessaire réaménagement du régime du nantissement du droit d'auteur 57

Conclusion du chapitre I 65

CHAPITRE II : L'IMPARFAITE SIMPLIFICATION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE

PROPRIETE INDUSTRIELLE 66

Section 1 : Le problème de la cohabitation entre l'AUS et l'ABR 66

Section 2 : La simplification de la réalisation du nantissement 71

Conclusion du chapitre II 77

Conclusion de la IIe partie 78

CONCLUSION GENERALE 79

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

RESUME

Traditionnellement, les biens immatériels sont qualifiés, tantôt de biens incorporels, tantôt de propriétés incorporelles ou intellectuelles, tantôt encore de biens d'exploitation, la plupart de ces qualifications étant insatisfaisantes. Pourtant, d'aucuns affirment qu'ils représentent une richesse économique, une source de crédit fantastique pour les débiteurs, et un gage de sécurité pour les créanciers. Le législateur OHADA n'a pas ignoré la portée de tels droits.

Faisant autrefois partie des éléments facultatifs du fonds de commerce, les droits de propriété intellectuelle, font désormais l'objet d'une réglementation autonome. C'est l'Acte uniforme adopté le 15 décembre 2010, qui va consacrer cette autonomisation. Seulement, cette dernière ne concerne que le régime général du nantissement, puisque, les régimes spécifiques font l'objet d'une autonomisation imparfaite. Parlant justement de l'imparfaite autonomisation des régimes spécifiques de nantissement des droits de propriété intellectuelle, il faut souligner que les moyens d'intégration juridiques mis en place, ne constituent pas un atout et contribuent par conséquent à cette imperfection du nantissement.

Mots clés :

Autonomie - Biens immatériels - Crédit - Droit d'auteur - Fonds de commerce - Garantie - Harmonisation - Nantissement - Propriété industrielle - Propriété intellectuelle - Sûretés - Uniformisation.

ix

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

ABSTRACT

Immaterial assets are traditionally described either as intangible assets or as intangible or intellectual property, or else as operating assets, but most of those terms are not satisfactory. However, some people state that they represent a form of economic wealth, a fantastic source of credit for the debtors, and a guarantee of safety for the creditors. And yet, OHADA legislation seems to have not ignored immaterial assets.

Been considered for a long time as part of the facultative elements of a business, the intellectual property rights have, from now on, been the purpose of an autonomous regulations. It is the uniform Act, adopted on the 15th December 2010, which have established this autonomy. This autonomisation only concerns the general regime of the security interest, seeing that, the autonomisation of the specific regimes of intellectual property rights is not perfect. Talking about this imperfection, it should be said that, harmonization and standardization of the intellectual property rights contribute to make it more important.

Key words:

Autonomy - Business - Copyright - Credit -Harmonization - Immaterial assets - Industrial property - Intellectual property - Security interest - Standardization.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Epigraphe

« Depuis que j'existe, je rêve les grandeurs du renoncement aux faux biens de ce monde et la conquête des biens immatériels » (George SAND, Lélia)

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

1

INTRODUCTION GENERALE

2

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Le patrimoine est l'ensemble des biens et des obligations d'une personne, envisagé comme une universalité de droit, c'est-à-dire comme une masse mouvante dont l'actif et le passif ne peuvent être dissociés. Si la détermination du passif d'un patrimoine ne pose pas de problème, celle de l'actif est plus problématique. Le problème vient de la difficulté qu'il ya à cerner avec exactitude l'ensemble des éléments de l'actif d'une personne. La situation n'était déjà pas très simple autrefois, et elle se complique davantage aujourd'hui. Pendant longtemps, en effet, on a considéré que le patrimoine des personnes n'était constitué que des biens meubles et immeubles. Par biens meubles, il fallait entendre ceux susceptibles d'appropriation matérielle. La tendance s'est peu à peu renversée après la seconde guerre mondiale. On a alors assisté à un véritable essor de l'immatériel, au point où certains auteurs ont estimé que « l'immatériel envahit nos vies »1, qu'il impose partout sa présence2. Cet état de choses se justifie par les progrès scientifiques et techniques du siècle dernier, et de celui en cours. En ce XXIe siècle, l'immatériel est au coeur de toutes les préoccupations. Le patrimoine des personnes, des entreprises notamment, est désormais composé pour une grande partie, de biens immatériels. On part ainsi d'un patrimoine corporel, matériel vers un patrimoine qui prend en compte l'immatériel. On assiste d'ailleurs à une dématérialisation des échanges.

La place de plus en plus importante qu'occupe l'immatériel dans le patrimoine des personnes (physiques ou morales), nécessite qu'il soit désormais pris en compte dans le recouvrement de ses créances par un créancier. L'actif immatériel3ou incorporel4, notamment la propriété intellectuelle vient désormais enrichir le patrimoine, et se présente comme un bien susceptible de garantir le crédit. Dans le contexte actuel, l'immatériel peut prendre une valeur conséquente. A titre d'exemple, la propriété intellectuelle représente sinon une partie substantielle, du moins la plus importante de la valeur totale de plusieurs entreprises5. Il faut dire que plusieurs entreprises, notamment celles en démarrage n'ont souvent rien d'autre que les idées ou des découvertes, comme actifs. C'est bien souvent le cas des nouvelles entreprises des secteurs de hautes technologies et des biotechnologies en quête de financement. La valeur de ces droits de propriété intellectuelle est, dans bien des cas, très importante. D'après un rapport publié en 2005, les droits de propriété intellectuelle représentent la première catégorie d'actifs sur la planète avec une valeur de 5,5

1GAUTHIER (P. Y.), Rapport de synthèse : in le droit et l'immatériel, Archives de philosophie du droit, t. 43, Ed. Sirey, 1999, p.233.

2LEVY (M.) et JOUYET (J.-P.), « l'immatériel, la croissance de demain»: Le Figaro du 9 décembre 2006.

3Il s'agit de l'actif immatériel qui est un élément sans substance physique et ayant une valeur positive pour l'entreprise. Mais afin de donner une connotation comptable au terme, il est possible d'utiliser la notion d'actif immatériel.

4Les actifs incorporels sont des actifs immatériels comptabilisables car identifiables par le prix d'acquisition. 5SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), « la prise de garanties en matière de propriété intellectuelle au CANADA », LEGER ROBIC RICHARD/ROBIC, 2001, www.robic.ca.

3

4

5

6

7

8

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

millions USD6. En outre, ils représentent 80% de la valeur des entreprises cotées7 en bourse. Dans la même lancée, les premières marques mondiales valent 70 milliards USD chacune8. C'est dire toute l'importance que peut revêtir les propriétés intellectuelles pour une entreprise, car susceptibles de servir de sûreté.

Le droit des sûretés a dû évoluer pour s'adapter aux nouveaux types de biens faisant partie du patrimoine d'un individu, signe de son dynamisme. C'est sans doute cette adaptabilité observée au fil du temps, qui a conduit certains, à affirmer qu'il est un droit cyclique9. La définition de la notion de sûreté a évolué entre l'AUS ancien du 1er janvier 1998 et l'AUS nouveau, entré en vigueur le 15 décembre 2010. Les sûretés sont, aux termes de l'AUS ancien, les moyens accordés au créancier par la loi de chaque Etat partie ou la convention des parties pour garantir l'exécution des obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ci. L'AUS nouveau définit la sûreté comme l'affectation au bénéfice d'un créancier d'un bien, d'un ensemble d'obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ci et notamment qu'elles soient présentes ou futures, déterminées ou déterminables, conditionnelles ou inconditionnelles, et que leur montant soit fixe ou fluctuant10.

Des différentes sûretés prévues par l'AUS, celle qui a été retenue pour les droits de propriété intellectuelle est le nantissement. Dans le Code civil, le terme nantissement désignait tout contrat par lequel un débiteur rendait une chose à son créancier pour sûreté de la dette. Lorsque la chose était mobilière, il s'agissait d'un gage. Lorsque la chose était immobilière, il s'agissait de l'antichrèse. Postérieurement, d'autres nantissements furent consacrés par le législateur, tels les nantissements de fonds de commerce, de matériel ou d'outillage. L'expression désignait alors un gage sans dépossession. Le même terme désignait ainsi des sûretés assez diverses, ce qui était source de confusion. La réforme intervenue en 2010 rompt avec cette tradition terminologique. Le nantissement désigne aujourd'hui une sûreté portant sur un bien incorporel.

La débaptisation11 ainsi observée des sûretés va entrainer une double conséquence. Dans un premier temps, certains droits autrefois considérés comme étant susceptibles d'être mis en gage vont désormais devoir être nantis. C'est par exemple le cas du gage des comptes de titres financiers, qui devient un nantissement. La seconde conséquence, qui est l'inverse de la première, fait partir certains droits de la sûreté de nantissement à celui de gage. Une autre conséquence, et non la

6SHAPIRO et HASSET, Intellectual Property report, 2005, cited by Malackowski in « IPS for 21st centurycorp». 7MALACKOWSKI, IP : from asset to asset class, in IP strategies for 21st century corporations, Wiley, 2011.

8 N°. 1: Coca-Cola; N°. 2 : Apple, in Rapport Interbrand 2012.

9 LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties du crédit, 6e éd. LGDJ, 2008, P.5.

10 Art. 1 de l'AUS du 15 décembre 2010.

11 LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties du crédit, op. Cit.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

moindre, le nouvel Acte Uniforme sur les sûretés consacre de nouveaux nantissements. C'est notamment le cas du nantissement des droits de propriété intellectuelle. Il convient donc pour une meilleure compréhension de ce nantissement, de définir les termes.

D'après le Grand Robert12, le nantissement est le fait de mettre quelqu'un en possession de quelque chose par précaution. C'est ainsi qu'on peut nantir un voyageur de provisions. Cette définition tout à fait littéraire n'est pas celle qui a été envisagé par les rédacteurs du Code civil. En effet, le code civil dispose en son article 2071 que « le nantissement est un contrat par lequel un débiteur remet une chose à son créancier pour sûreté de la dette ». Le code civil distingue deux types de nantissement: le gage et l'antichrèse. Le gage s'appliquant aux biens meubles quelle que soit leur nature13, et l'antichrèse s'appliquant aux immeubles. Tandis que le gage s'opère sur des meubles corporels, le nantissement quant à lui porte sur des meubles incorporels. C'est dans cet esprit que l'AUS nouveau définit pour sa part le nantissement en son article 125 en ces termes : « le nantissement est l'affectation d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en garantie d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à condition que celles-ci soient déterminées ou déterminables... ». Il ressort de cette définition que le nantissement porte bien sur les meubles incorporels, présents ou futurs, déterminés ou déterminables. Il faut noter cependant que cette définition prend en compte un grand nombre de meubles incorporels sur lesquels pourrait porter le nantissement. Or c'est la question des droits de propriété intellectuelle qui nous intéresse particulièrement.

Le terme « propriété intellectuelle» désigne les créations de l'esprit à savoir les inventions, les oeuvres littéraires et artistiques et les symboles, noms, images et dessins ou modèles utilisés dans le commerce14. La propriété intellectuelle se divise en deux branches : la propriété industrielle, qui comprend les inventions (brevets), les marques, les dessins et modèles industriels et les indications géographiques ; et le droit d'auteur, qui se rapporte aux oeuvres littéraires et artistiques15.

L'AUS définit le nantissement des droits de propriété intellectuelle comme étant « la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques

12 REY (A.) (sous la direction de), « Grand Robert de la langue française », version électronique, 2e éd., 2001.

13 Le Code civil dans sa définition du gage assimile le sort des biens meubles corporels à ceux des meubles incorporels.

14 http://www.wipo.int/about-ip/fr/

15 Il faut entendre ici les romans, poèmes et pièces de théâtre, oeuvres cinématographique et musicales ou encore les oeuvres relevant des arts plastiques comme les dessins, les peintures, les photographies et les sculptures ainsi que les dessins et modèles architecturaux. En outre, les droits attachés au droit d'auteur comprennent ceux des artistes interprètes ou exécutants sur leurs interprétations et exécutions, des producteurs de phonogramme sur leurs enregistrements et des radiodiffuseurs sur leurs programmes radiophoniques ou télévisuels.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

de fabrique et de commerce, des dessins et modèles »16. Le nantissement des droits de propriété intellectuelle est donc d'abord un contrat par lequel un débiteur affecte en garantie d'une obligation la totalité ou une partie de ses droits de propriété intellectuelle existants ou futurs. Telle est la définition qui sera retenue dans le cadre de ce travail.

Comme on l'a signalé, avant 2010, le droit positif des sûretés de l'OHADA ne connaît les droits de propriété intellectuelle que comme un complément facultatif du nantissement du fonds de commerce. L'entrée en vigueur du nouvel AUS, va venir fixer le régime juridique du nantissement des droits de propriété intellectuelle autour de ses articles 156 à 161. Il faut souligner que le nantissement des droits de propriété intellectuelle, met en rapport deux systèmes juridiques. Par ailleurs, bien usité, il pourrait contribuer au développement des entreprises africaines, et partant au développement de l'Afrique. C'est d'ailleurs l'une des finalités visées par les pères fondateurs de ces différents systèmes juridiques.

Ainsi donc l'OAPI et l'OHADA sont les deux systèmes qui sont mis à contribution lorsqu'il s'agit de parler de nantissement des droits de propriété intellectuelle. La première, l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle, créée en 196217, institue une administration centrale de la propriété intellectuelle et prévoit aussi une législation régionale de la propriété intellectuelle18 à travers l'accord de Bangui19 complété par ses annexes. L'OAPI ne s'intéresse qu'au droit de la propriété intellectuelle. Autrement dit, ses compétences sont donc limitées à la propriété industrielle et à la propriété littéraire et artistique. Toutefois, les droits afférents aux domaines de la propriété intellectuelle qu'elle édicte, sont des droits nationaux indépendants, soumis à la législation de chacun des Etats membres dans lesquels ils ont effet. Il convient de s'y pencher et de s'intéresser à la façon dont cette organisation a réglé les questions relatives aux sûretés grevant la propriété industrielle, et éventuellement sa nécessaire « coopération » avec l'OHADA pour régler les problèmes liés à cette sûreté.

Plus récente, l'OHADA20 (Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires) s'efforce de mettre en place un cadre propice de nature à développer les affaires avec des conditions propres à faciliter l'activité des entreprises. En outre, elle s'efforce à garantir la sécurité juridique des activités économiques, afin de favoriser l'essor de celles-ci et d'encourager l'investissement.

16 Article 156 alinéa 1 de l'AUS.

17 Elle n'était alors que l'office africain et malgache de la propriété intellectuelle (OAMPI).

18 Voir notamment, MBA (C.-R.), la protection des inventions en droit de l'OAPI (Organisation africaine de la propriété intellectuelle), Thèse Lyon, 2004.

19 Cet accord a été signé en 1977 et révisé en 1999.

20 Le traité relatif à l'OHADA a été signé à Port Louis le 17 octobre 1993, a été ratifié à la date du 31 décembre 2000 par seize Etats; il est entré en vigueur en 1995. Il va cependant être modifié et complété par un autre traité adopté le 17 octobre 2008 et entré en vigueur le 15 décembre 2010. Cette organisation regroupe aujourd'hui 17 Etats africains.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

C'est par le truchement des Actes Uniformes que l'OHADA veut remplir ce rôle. Ils sont destinés à instaurer une législation commune aux Etats membres pour régir les matières identifiées comme faisant partie du droit des affaires21. L'organisation a pour parvenir à ses fins, adopté des Actes uniformes dans certains domaines, parmi lesquels figure l'acte uniforme portant organisation des sûretés.

La prise de garantie sur les titres de propriété industrielle est relativement récente. Sur le plan législatif, les premières réformes des sûretés dans les pays du droit civil, qui ont conduit à organiser la garantie sur les biens meubles incorporels, notamment la propriété sont intervenues au Canada22. C'est bien plus tard, le 23 mars 2006, que la France va opérer, via son législateur, une distinction entre les sûretés sur les biens meubles corporels et les sûretés grevant des biens meubles incorporels (nantissement). De son côté, la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI) a entrepris depuis 2002 d'effectuer des travaux sur les sûretés réelles. Ces travaux ont abouti à l'adoption, en décembre 2008, du Guide Législatif sur les opérations garanties. Le groupe de travail VI (Sûretés) a été chargé de faire des recommandations sur les sûretés réelles grevant la propriété intellectuelle. Ces recommandations constituent l'annexe au Guide législatif. C'est dire que la propriété intellectuelle a fait l'objet d'un traitement particulier, eu égard à la place que joue cette matière dans l'économie mondiale actuelle. Dans l'espace géographique regroupant les pays membres conjointement de l'OAPI et de l'OHADA, c'est principalement dans les Actes Uniformes de l'OHADA et dans l'Accord de Bangui qu'il faut chercher les sources des rapports entre sûretés réelles et propriété industrielle. Mais ces rapports sont complétés par les lois nationales, notamment les règles de droit civil et les règles de procédure civile.

Plusieurs institutions bancaires23 s'accordent pour démontrer que l'octroi de crédits est l'un des moyens les plus efficaces pour doter les entreprises commerciales d'un fonds de roulement ou de financer leur développement. L'efficacité d'un crédit garanti vient du fait qu'il sécurise les transactions en réduisant les risques auxquels est exposé le créancier. Par conséquent, il lui sera loisible d'accéder aux biens grevés pour se faire rembourser en cas d'inexécution de l'obligation garantie24.

21 MOULOUL (A.), comprendre l'OHADA, 2e éd. PUA, 2009, p.46.

22 Débuté en 1986, le nouveau droit des sûretés, qui se forme aujourd'hui le Code Civil du Québec (CCQ), a fait l'objet du projet de loi 125 sanctionnée en 1991. Ce Code entre finalement en vigueur le 1er janvier 1994.

23 Il s'agit des études réalisées par des organisations telles que la Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement (BIRD), le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Africaine de Développement (BAD).

24 Guide législatif de la CNUCDI sur les garanties, introduction, par. 4, 5.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Les droits de propriété intellectuelle constituent aujourd'hui une grande part du patrimoine des entreprises. Ces dernières les utilisent de plus en plus pour obtenir des financements, en les donnant en garantie25. Ceci s'explique assez aisément quand on sait qu'aujourd'hui l'accès au financement est vital26. Il s'avère alors important pour les entrepreneurs de maitriser la valeur des différents droits de propriété intellectuelle, afin de mieux négocier leurs emprunts.

Cette étude nous permet d'appréhender l'effectivité et l'efficacité du nantissement des droits de propriété intellectuelle au regard de l'interpénétration des systèmes juridiques auxquels ce dernier invite. En effet, le nantissement des droits de propriété intellectuelle met en relation l'OAPI et l'OHADA. La reforme de l'AUS intervenu en 2010 ouvre la voie au débat sur les sûretés réelles et les droits de propriété intellectuelle, particulièrement en ce qui concerne le nantissement de ces derniers.

La certitude de pouvoir recouvrer la créance est ce qui pousse un banquier à accorder un prêt. Par conséquent, plus la garantie est certaine et stable, plus le banquier est enclin à accorder le crédit. Il est cependant aisé de constater qu'il est difficile de juger de la stabilité et de la certitude des droits de propriété intellectuelle. En effet, comment pourrait-on garantir la stabilité des droits de propriété intellectuelle, quand on sait que l'infraction de contrefaçon peut faire chuter leur valeur de base. Le rapport de confiance qui lie le créancier au bien grevé27, sur lequel repose le droit des sûretés, disparait dans cette hypothèse. Or cette confiance qui semble s'affaiblir au regard de ce qui précède, ne peut être rétablie que si le législateur OHADA prend la peine de clairement réglementer le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Ceci passe par la détermination de sa nature juridique et du régime applicable. C'est en réalité ce qu'a fait le législateur OHADA, lorsqu'il consacre un nantissement des droits de propriété autonome. Or à regarder de près on s'aperçoit de toute la difficulté qu'il y a encore à mettre en oeuvre ce droit. Dès lors, l'autonomisation qu'a connue le nantissement des droits de propriété intellectuelle est-elle parfaite?

La plupart des textes applicables en Afrique sont d'inspiration française. L'OHADA n'a pas fait l'exception, même si on doit féliciter le législateur communautaire pour son effort d'adaptation. En effet, le régime du nantissement a beaucoup évolué. L'on peut, pour son étude, partir de son régime avant la réforme de 2010, pour aboutir au nouveau régime qui lui est consacré à partir du 15

25 Ce type de nantissement est très développé en Europe, et beaucoup moins en Afrique. En effet, il faut souligner que le niveau d'industrialisation est assez faible et la culture de l'immatériel comme richesse, l'est encore plus.

26 Voir Intellectual Property and access to Finance for High Growth SMEs, document de réflexion de la Direction générale des entreprises et de l'industrie de la commission européenne, Bruxelles, 14 novembre 2006.

27 KOFFI (K.), « les sûretés réelles et les droits de propriété intellectuelle dans l'espace OAPI-OHADA », mémoire de Master II en droit de la propriété intellectuelle, soutenu en 2011, p. 13.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

décembre 2010 avec l'entrée en vigueur de l'AUS nouveau. Par ailleurs l'on peut se cantonner à l'étude de la reforme opérée par l'AUS nouveau. Dans cette hypothèse l'on peut dans un premier temps s'attarder sur le régime juridique du nantissement des droits de propriété intellectuelle dans le nouvel acte uniforme; puis dans un second temps, questionner l'efficience et l'efficacité de ce nantissement. Cette approche peut permettre de cerner dans son ensemble ce nantissement et de mesurer son impact sur la vie économique des entreprises. Dans la même veine, une autre approche, et non la moins importante, consisterait à étudier ce nantissement en ayant pour fil conducteur, le modèle de l'organisation de tous les nantissements. Dans cette hypothèse l'approche consisterait à s'attarder progressivement sur la définition de ce nantissement, ses règles de constitution, ses règles d'opposabilité et enfin sur les droits conférés.

Il semble cependant que l'approche qui correspond le mieux à l'étude du nantissement des droits de propriété intellectuelle, soit celle analytique. Ceci parce qu'elle permet sans doute de voir toute la portée d'une telle réforme. Concrètement, Il s'agit d'étudier la question de l'autonomisation du nantissement des droits de propriété intellectuelle. Cette étude sera menée selon la méthode analytique de type comparatif. Elle part de la constatation de la fusion du régime du nantissement des meubles incorporels à celui du gage, pour établir le détachement consacré par l'AUS nouveau. Cette méthode est une attitude vis-à-vis de l'objet de l'étude28. Dès lors, il convient de rechercher les informations concrètes tant dans la législation OAPI et OHADA que dans celle des pays ayant légiférés sur la question.

Etant donné que le nantissement relève plus du droit des sûretés que celui de la propriété intellectuelle, ce n'est pas du côté de l'Accord de Bangui que nous devons rechercher les règles qui les organisent. En effet, c'est l'AUS qui les organise, à titre principal, et accessoirement quelques règles de droit civil contenues dans les lois nationales29, notamment le Code civil repris par la plupart des Etats membres de l'OAPI. Dans le cadre de cette étude, il est important de souligner que les Etats membres de l'OAPI sont conjointement membres de l'OHADA. A côté de notre espace de référence, une incursion dans les législations de certains pays occidentaux30 sur la même question, permettra d'apprécier l'évolution tant législative, jurisprudentielle que doctrinale.

L'AUS distingue plusieurs types de nantissements : le nantissement de créance, le nantissement de compte bancaire, des droits d'associés, valeurs mobilières et comptes de titres financiers, du

28 GRAVITZ (M.), Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 2001, 11e éd., p. 441.

29 Pour ce qui est du Cameroun, il s'agit de la Loi n°2000/11 du 19 décembre 2000 relative au droit d'auteur et droit voisin du droit d'auteur.

30En France notamment.

9

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

fonds de commerce, et en fin des droits de propriété intellectuelle. C'est ce dernier type de nantissement qui intéresse cette étude. Comme souligné plus haut, la propriété intellectuelle est divisée en deux: la propriété industrielle et le droit d'auteur. La présente étude s'étendra à toutes les matières de la propriété intellectuelle. Elle prendra alors en compte aussi bien, le droit d'auteur31, que la propriété industrielle et ses composantes principales (brevet d'invention, marques de produit ou services et dessins ou modèles industriels)32.

Conscient de la valeur sans cesse croissante des droits de propriété intellectuelle, le législateur OHADA a compris la nécessité d'autonomiser le régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle. On s'aperçoit alors de l'exhaustivité du régime commun à l'ensemble des droits de propriété intellectuelle (Ière partie). Toutefois, en consacrant ainsi ce nantissement, le législateur OHADA a ignoré un certain nombre de paramètres. Toute chose qui a conduit à une imprécision des régimes spécifiques de chacun des nantissements des droits de propriété intellectuelle (IIe partie).

31 Ou encore appelé propriété littéraire et artistique.

32 Ces composantes sont d'ailleurs celles qui sont identifiées à l'article 156 de l'AUS nouveau qui stipule que « Le nantissement des droits de propriété intellectuelle est la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques de fabrique et de commerce, des dessins et modèles.».

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

10

Ière PARTIE : L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN
A L'ENSEMBLE DES DROITS DE PROPRIETE
INTELLECTUELLE

11

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

La réforme du droit des sûretés de l'OHADA intervenu en 2010 poursuit un double objectif: d'une part, accroitre la sécurité juridique des différents acteurs économiques, et, d'autre part, doter les créanciers d'instruments juridiques efficaces33, et donc attractifs. Le souci d'obéir à cette double exigence de sécurité et d'attractivité se fait ressentir dans tout le nouvel Acte uniforme. Il rompt ainsi avec les incompréhensions et les insuffisances de l'AUS de 1998. Plusieurs innovations interviennent dans le cadre de sûretés avec l'entrée en vigueur de cet Acte uniforme. Au-delà de l'amélioration de l'accessibilité du droit des sûretés et de la généralisation de l'exigence de publicité portant sur les sûretés réelles sans dépossession, le régime juridique des sûretés préexistantes s'est vu amélioré, et, les nouveaux mécanismes des garanties de financement pris en compte34.

Visant toujours les mêmes objectifs, le législateur OHADA a consacré de nouvelles sûretés. La majeure parie de ces sûretés existait déjà dans l'AUS ancien et ont simplement vu leur nature changer avec l'entrée en vigueur de l'AUS nouveau. C'est précisément le cas en ce qui concerne les droits de propriété intellectuelle. Pendant longtemps, le sort de ces droits était lié à celui du fonds de commerce dont ils constituaient des éléments facultatifs. On assiste désormais à la consécration d'un régime général de ces droits, une consécration que l'on pourrait juger exhaustive compte tenu de l'ensemble des règles établies. Cette exhaustivité s'exprime au travers les modalités de constitution du nantissement des droits de propriété intellectuelle autonome (Chapitre I). Cette consécration ne va pas sans entrainer avec elle des conséquences. C'est ce qui justifie qu'il convienne de s'attarder sur les effets de ce nantissement (Chapitre II).

33 CROCQ (P.), « Les grandes orientations du projet de réforme de l'Acte Uniforme portant organisation des sûretés »,

Droit & Patrimoine, n°197, novembre 2010. 34CROCQ (P.), idem.

12

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle n'est pas inconnu du droit positif OHADA. En effet, il était déjà consacré par l'AUS du 17 avril 1997. Mais il n'avait pas de régime propre. Il n'intervenait que dans le sillage du nantissement du fonds de commerce dont il était le complément facultatif. En effet, l'article 69 ancien permettait de classer en trois catégories les différents éléments du fons de commerce susceptibles de faire l'objet d'un nantissement. On pouvait ainsi distinguer les éléments qui devaient obligatoirement figurer dans le nantissement (élément obligatoires), ceux qui pouvaient être inclus (élément facultatifs) et ceux qui ne devaient jamais en faire partie (éléments exclus)35.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle a gagné en autonomie sous l'AUS du 15 décembre 2010. Cet Acte uniforme lui consacre une réglementation autonome autour des articles 156 à 161. Ces articles organisent tant les modalités de constitution de la sûreté que celles de son inscription36. Il conviendrait de s'attarder donc sur le contenu du nantissement des droits de propriété intellectuelle (Section I), ainsi que sur le formalisme qui l'entoure (section II).

Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de propriété intellectuelle

L'analyse du contenu du nantissement des droits de propriété intellectuelle amène à faire dans un premier temps le constat de l'élargissement de l'assiette du nantissement (Paragraphe I). C'est du moins ce qui découle de l'article 156 AUS. Par ailleurs, l'alinéa 2 du même article établit clairement une typologie de nantissement (Paragraphe II).

35 ISSA-SAYEGH (J.), OHADA, « Traité et Actes Uniformes commentés et annotés », Juriscope, 2002, p. 652.

36 MIENDJEM (L. I.), « Régime général des sûretés », in Encyclopédie du droit OHADA (Sous la direction de Paul - Gérard POUGOUE), Lamy, décembre 2011, p.1503, n° 161.

13

14

15

16

17

18

19

20

21

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

§ 1. L'élargissement de l'assiette du nantissement

L'autonomie qui est consacré par le nouvel Acte uniforme sur les sûretés vient d'une part maintenir le nantissement des droits de propriété intellectuelle existants (A) et étendre, d'autre part, ce nantissement aux droits futurs (B)

A- Le maintien du nantissement sur les droits existants

L'Acte uniforme sur les sûretés ancien déterminait les droits de propriété intellectuelle sur lesquels devait porter le nantissement. Ces droits constituaient les éléments facultatifs du fonds de commerce. L'article 69 (2) stipule à cet effet que le nantissement peut porter : « sur les autres éléments incorporels du fonds de commerce tels que les brevets d'invention, marques de fabrique et de commerce, dessins et modèles et autres droits de la propriété intellectuelle ainsi que sur le matériel. ». Il est d'abord à noter que cette énumération n'est pas exhaustive, et qu'ensuite, c'est la même approche qui est envisagé dans l'Acte uniforme de 2010.

L'article 156 du nouvel AUS cite les droits de propriété intellectuelle susceptibles d'être nantis. Il s'agit notamment du brevet, des dessins et modèles et des marques de commerce et de fabrique. Cependant, ce serait se fourvoyer que de penser que cette énumération est exhaustive, car doivent être susceptible d'être nantis tous les droits de propriété intellectuelle consacrés par l'accord de Bangui de 1977, révisé en 1999. En effet, l'ABR prévoit dix annexes, chacune traitant d'un droit de propriété intellectuelle. Mais en réalité seules neuf annexes visent véritablement les droits de propriété intellectuelle37. Outre les brevets, dessins et modèles, les marques de fabrique et de commerce, il convient d'énumérer également les obtentions végétales, la propriété littéraire et artistique, les indications géographiques, le nom commercial, les schémas de configuration topographique. De ces différents droits, on distingue d'une part les créations industrielles auxquelles on va adjoindre les signes distinctifs, et d'autre part les créations ornementales et intellectuelles.

1- Les créations à caractère technique et les signes distinctifs

Le droit lié à la création à caractère technique par excellence est le brevet d'invention. Il fait l'objet de l'annexe I de l'ABR. En effet, Il se définit comme étant un titre délivré par l'OAPI, conférant un monopole temporaire d'exploitation sur une invention à celui qui la relève, en donne

37 L'annexe VIII est relative à la concurrence qui n'est pas à proprement parlé un droit.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

une description suffisante et complète, et revendique ce monopole38. Pour faire l'objet d'un brevet d'invention, certaines conditions doivent être remplies. Elles ressortent de l'article 2 de l'annexe I de l'ABR. Selon ce texte : « peut faire l'objet d'un brevet d'invention, l'invention nouvelle impliquant une activité inventive et susceptible d'application industrielle ». Quatre conditions en ressortent. Il doit s'agir d'une invention, ensuite, l'invention doit être nouvelle, puis, l'invention doit impliquer une activité inventive et enfin l'invention doit être susceptible d'application industrielle.

L'invention doit être entendue comme étant une idée permettant une solution d'ordre technique. Elle est la création humaine dont le but est de résoudre une difficulté d'ordre technique. Par ailleurs, l'invention doit être nouvelle, donc ne pas avoir d'antériorité dans l'état de la technique39. Puis, l'invention doit impliquer une activité inventive. En d'autres termes, une invention est considérée comme résultant d'une activité inventive si pour un homme du métier, ayant des connaissances et une habileté moyennes, elle ne découle pas d'une manière évidente de l'état de la technique à la date de dépôt de la demande du brevet, ou bien si une priorité a été revendiquée à la date de la priorité valablement revendiquée pour cette demande40. La dernière condition requise pour qu'une invention fasse l'objet d'un brevet d'invention, est la susceptibilité d'application industrielle. Selon la doctrine, il ya application industrielle lorsque l'invention porte non sur un principe abstrait, mais sur une conception mise en oeuvre dans l'industrie. Il faut noter qu'au-delà de ces conditions, il est nécessaire que l'invention soit conforme à l'ordre public et aux bonnes moeurs.

Outre le brevet d'invention, font partie des créations à caractère technique le Certificat d'obtention végétale, le Certificat d'enregistrement du modèle d'utilité et le schéma de configuration du circuit intégré, objets des annexes I, II, IX et X de l'ABR.

A côté des créations à caractère technique, l'Accord de Bangui révisé consacre également les signes distinctifs. Parlant justement de ceux-ci, il s'agit généralement de la marque de fabrique et de commerce, du nom commercial et des indications géographiques. Pour ce qui est de la marque de fabrique et de commerce, elle est perçue comme étant signe distinctif susceptible de représentation graphique apposé sur des produits ou identifiant des services émanant de différentes entreprises41.

38 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de), « lexique des termes juridiques », Dalloz, 12e éd., 1999, p. 72.

39 Article 3 de l'annexe I de l'ABR « Une invention est nouvelle si elle n'a pas d'antériorité dans l'état de la technique. ».

40 Article 4 de l'annexe I de l'ABR. 41Art. L. 711-1 et s., CPI.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Le nom commercial désigne toute appellation sous laquelle un commerçant exerce son activité. La même appellation est aussi utilisée pour désigner la dénomination sous laquelle est connu et exploitée un établissement industriel, artisanal ou agricole. Pour ce qui est des indications géographiques, anciennement dénommées appellations d'origine, elles sont prévues par l'annexe VI de l'ABR et servent à désigner le lieu d'origine d'un produit et lié dans l'esprit de la clientèle à une connotation de qualité.

2- Les créations esthétiques et intellectuelles

Les créations esthétiques sont celles ayant un caractère ornemental, c'est bien souvent de l'art appliquée à la science. C'est le cas des dessins et modèles. Le dessin susceptible de faire l'objet d'une protection de la propriété intellectuelle est « tout assemblage de lignes ou de couleurs » tandis que le modèle est « toute forme plastique associée ou non, à des lignes ou à des couleurs, pourvu que cet assemblage ou forme donne une apparence spéciale à un produit industriel ou artisanal et puisse servir de type pour la fabrication d'un produit industriel ou artisanal ». Tout comme le brevet d'invention, le dessin ou modèle doit remplir un certain nombre de conditions. Il doit d'abord avoir une apparence spéciale, autrement dit, il doit être visible extérieurement. Ensuite, le dessin ou le modèle doit être apte à servir de type pour la fabrication d'un produit industriel ou artisanal. Enfin, il doit être nouveau. En effet un dessin ou un modèle industriel est nouveau, s'il n'a pas été divulgué en tout lieu du monde, par une publication sous forme tangible, par un usage ou par toute autre moyen avant la date de dépôt ou, le cas échéant, avant la date de priorité de la demande d'enregistrement42.

La propriété littéraire et artistique est le droit exclusif qu'a le créateur d'une oeuvre littéraire et artistique sur son oeuvre. On parle aussi de droit d'auteur. Ce droit confère des attributs d'ordre intellectuel et moral et des attributs d'ordre patrimonial43, seuls les seconds étant susceptibles d'être nantis. Ils durent toute la vie de l'auteur et 70 ans après sa mort44.

La question de savoir si la propriété littéraire et artistique peut faire l'objet d'une sûreté est discutable. En effet, en dehors du fait que l'accord de Bangui, pas plus que les législations nationales, n'envisagent cette opération45, s'ajoute l'apparent silence de l'article 156 quand il cite les exemples des droits pouvant être nantis. La propriété littéraire et artistique semble en être

42Art. 2, alinéa 2 de l'annexe IV, ABR.

43 Art. 2, Annexe VII de l'ABR.

44 Art. 22, Annexe VII de l'ABR.

45 NGOMBE L. Y. « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de la concurrence des legislations supranationales en Afrique », R.R.J, 2006-4 (II) n°23 et 24, pp.2556-2557.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

exclue. De plus, le nantissement des droits de propriété littéraire et artistique peut susciter des réserves du fait des attributs moraux qui leur sont attachés46. Cependant, en droit OHADA, ces difficultés sont contestables. Tout d'abord, l'énumération faite à l'article 156 n'est pas limitatif. Le silence de l'Annexe VII de l'Accord de Bangui ne saurait être considéré comme une contestation, dans la mesure ou ladite Annexe admet la cession ou la concession des droits de propriété littéraire et artistique. Ce point de vue se confirme d'ailleurs à l'examen du droit comparé, notamment en droit français. Ensuite, les droits moraux ne sauraient faire obstacle au nantissement du droit d'auteur ou des droits voisins, puisqu'ils ne sont pas grevés par ledit nantissement, ce dernier ne portant que sur les droits patrimoniaux. En définitive, la possibilité de nantir les droits de propriété littéraire et artistique doit être admise.

B- La prise en compte des droits futurs

L'OHADA a certes des sources hétéroclites, cependant la plupart de ses dispositions est inspirée du Code civil de 1804. Il en résulte donc que les Actes uniformes subissent une importante influence du Code civil. C'est notamment le cas de l'AUS, surtout en ce qui concerne le nantissement des biens futurs. En effet, l'article 1130 du Code civil stipule en son alinéa 1 que les choses futures peuvent être l'objet d'une obligation. Cette prise en compte des droits futurs se traduit dans l'AUS, lorsque le législateur, dans sa définition du nantissement en donne le contenu de l'assiette. Il est donc possible pour le constituant d'affecter en garantie d'une obligation tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle existants ou futurs47. La lecture conjointe de ces deux textes fait ressortir la volonté du législateur OHADA, de prendre en compte les droits de propriété intellectuelle futurs. Autrement dit, la possibilité de nantir des propriétés est donc certaine. Elle s'inscrit dans la ligne de l'objectif poursuivi en l'admission généralisée des sûretés ayant pour assiette des biens futurs dont l'intérêt est, entre autres, d'éviter de nouveaux frais de constitution et de faire prendre rang à la sûreté immédiatement48.

Il faut signaler que si de grandes difficultés ne se posent pas quant à ce qui concerne le nantissement des droits de propriété industrielle, tel n'est pas le cas pour les droits d'auteur. En ce

46 MARTIAL N. Droit des sûretés réelles sur propriétés intellectuelles, Préface de Dominique Legeais, Aix-en-Provence, PUA, 2007, n°143, p. 107.

47 Article 156, alinéa 1 de l'AUS : « Le nantissement des droits de propriété intellectuelle est la convention par laquelle le constituant affecte en garantie d'une obligation tout ou partie de ses droits de propriété intellectuelle existants ou futurs, tels que des brevets d'invention, des marques de fabrique et de commerce, des dessins et modèles. ».

48 BLACK YONDO L., et alii, Le nouvel acte uniforme du droit des sûretés. La reforme du droit des sûretés de l'OHADA, Sous la direction de Pierre Crocq, éd. Lamy, 2012, n°37, p.48.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

qui concerne la première hypothèse, On remarque qu'il est bien usité par les entreprises nouvellement créées, les « start-up »49. Il en va autrement du droit d'auteur. La difficulté à nantir un droit d'auteur vient d'une part de la nature particulière des droits grevés sur ce type de créations. En effet, Outre les droits moraux incessibles, aux créations littéraires et artistiques sont également grevés les droits patrimoniaux, qui eux, peuvent faire l'objet d'un nantissement.

Les droits de la propriété intellectuelle même existants, ne sont pas facilement évaluables et du coup, la situation sera beaucoup plus complexe pour ceux à venir. En vertu de la liberté contractuelle, les parties peuvent contracter sur la base des biens intellectuels non encore existants. Mais, il ne faut pas oublier que la délicatesse des tels biens exige un certain formalisme. La volatilité qui les caractérise complexifie davantage leur évaluation. Les critères d'évaluation ont eux-mêmes leurs propres limites. L'évaluation de la valeur des droits d'auteur futurs comme les titres de la propriété industrielle lorsque cela est possible, sera faite avec une part de subjectivité. Ce qui peut engendrer des conséquences multiples.

Comme pour les oeuvres existantes, il n'existe pas des mécanismes ou des méthodes d'évaluation de la valeur financière des oeuvres futures. On peut légitimement dire que l'obligation de conservation qui pèse sur le débiteur d'une oeuvre existante sera difficilement demandée au débiteur ayant donné en garantie son droit d'auteur futur. A cela s'ajoute l'absence d'enregistrement. La simple réunion de certains critères suffit à protéger une personne, ayant apporté quelque chose d'originale dans le domaine littéraire et artistique50. L'article L-131-1 du Code de Propriété Intellectuelle français énonce que: « La cession globale des oeuvres futures est nulle. » Cette disposition fait aussi l'objet d'une consécration dans la loi camerounaise de 2000. Un tel libellé a des implications sur l'évaluation des oeuvres futures lorsque cela est possible; les conséquences ne manqueront pas. Elles sont d'ailleurs évidentes.

Le législateur camerounais de 2000 prohibe la cession globale des oeuvres futures. La loi dispose en article 22 alinéa 2 que : « La cession globale des oeuvres futures est nulle ». Cette expression est beaucoup vague. Seulement à l'analyse, il possible de le faire à certains cocontractants de l'auteur tels l'éditeur par exemple.

49 La « start-up» se définit comme étant une jeune entreprise à fort potentiel de croissance et qui fait la plupart du temps l'objet de levée de fonds. On en parle aussi pour qualifier les entreprises en constructions qui ne sont pas encore lancées sur le marché commercial; http://fr.wikipedia.org/wiki/Startup.

50 V. L'article 13 alinéa 1er de la loi camerounaise sur le droit d'auteur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

A titre de droit comparé, le Code d'Industrie Cinématographique français semble être précis à ce sujet lorsqu'il approuve et permet le nantissement sur le film futur51.Distinguant la notion de gage et de nantissement, l'ordonnance française du 23 mars 2006 en explicite davantage la situation. L'article 2355 introduit dans le Code Civil français et issu de cette ordonnance dispose en ces termes que: « Le nantissement est l'affectation en garantie d'une obligation d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs ». S'agissant du nantissement du logiciel futur, le problème s'est résolu autrement et la doctrine française semble être d'accord que les travaux préparatoires des logiciels sont assimilés aux logiciels52.Il est donc admis qu'une sûreté puisse grever ces travaux53. La détermination de l'objet se trouve possible de ce seul fait et la sûreté prendra rang avant la confection définitive du programme. Les simples projets de création c'est-à-dire les idées54, sont inadmissibles. Au plan textuel, il y a une certitude de prise en compte des oeuvres futures bien que cela demeure partiel et la pratique pourra en combler.

§ 2. La typologie du nantissement des droits de propriété intellectuelle

L'article 156 distingue stipule clairement que le nantissement peut être conventionnel ou judiciaire.

Dans chacune des hypothèses, un certains nombre de règles doit être observé.

A- Le nantissement conventionnel

Le nantissement conventionnel résulte d'une convention passée entre le créancier et le débiteur ou le constituant de la sûreté conformément aux exigences de l'article 1108 du Code Civil. Le nantissement conventionnel exige donc de la part des parties la soumission à un double degré d'exigence.

D'une part, il doit être soumis aux exigences du Code civil, notamment l'article 1108 qui stipule que: « Quatre conditions sont essentielles pour la validité d'une convention: le

51 V. l'article 32 du CIC.

52 V. La directive européenne de 1991, inédit.

53 MESTRE (J.), PUTMAN (E.), BILLIAU (M.), Droit spécial des sûretés réelles; op.cit p.449.

54 En droit de la propriété intellectuelle, les idées sont insusceptibles d'appropriation et donc ne sont pas protégeables.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

consentement de la partie qui s'oblige,
· la capacité de contracter,
· un objet certain qui forme la matière de l'engagement,
· une cause licite dans l'obligation
». Ainsi donc des conditions citées par l'article 1108 du Code civil, il y a d'abord le consentement, qui est le fait de donner son accord. Le consentement de la partie qui s'oblige doit être libre et éclairé. Dans le cas contraire, il y a vice du consentement. Ces vices sont l'erreur, le dol ou la violence. Il faut distinguer le vice du consentement (il y a eu rencontre des volontés ; le consentement a été donné mais il a été vicié) de l'absence de consentement (il n'y a pas eu rencontre des volontés).

Ensuite, la partie contractante doit être capable, c'est-à-dire être titulaire de certains droits et en mesure de les exercer.

On distingue traditionnellement la capacité de jouissance (possibilité d'être titulaire de certains droits) et la capacité d'exercice (possibilité d'exercer soi même les droits dont on est titulaire)55. Le mineur de moins de dix-huit ans qui n'a pas été émancipé ne peut en principe contracter seul que pour les actes de la vie courante. La tutelle, la curatelle et la sauvegarde de justice sont destinées à protéger des majeurs qui ne pourront effectuer seuls certains actes.

La tutelle crée une incapacité d'exercice générale : seul le tuteur sera autorisé à intervenir à l'acte. Le majeur placé en curatelle sera représenté de manière continue dans les actes de la vie civile. La curatelle est un régime moins strict que la tutelle, puisque le majeur n'est pas hors d'état d'agir lui-même. Il a simplement besoin d'être conseillé ou contrôlé dans les actes de la vie civile. La sauvegarde de justice, quant à elle, n'entraine pas l'incapacité de la personne qui en bénéficie, puisque celle-ci conserve l'exercice de ses droits. Les actes qu'elle passe ne pourront faire l'objet d'une action en nullité que lorsque l'acte litigieux aurait dû être conclu par un mandataire spécial. Ils pourront aussi être rescindés en cas de lésion ou réduits en cas d'excès.

Puis, l'objet du contrat permet de déterminer ce à quoi le débiteur s'est engagé. On distingue parfois l'objet de la prestation, l'objet de l'obligation, et l'objet du contrat. L'objet doit exister, être déterminé et licite. Pour certains auteurs, l'objet du contrat désigne l'opération juridique que les parties ont voulu effectuer. L'objet de l'obligation désigne la prestation ou la chose que chacune des parties s'est engagée à fournir. C'est le cas du prix pour l'acheteur ou de la chose pour le vendeur. Enfin, la cause permet de déterminer pourquoi le débiteur s'est engagé. Elle doit exister et être licite. En ce qui concerne l'existence de la cause, la cause de l'obligation du débiteur est le but immédiat et direct qui le conduit à s'engager. On oppose à la cause, ainsi définie, le motif qui est un

55 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de), « lexique des termes juridiques », Dalloz, 12e éd., 1999, p. 78, V. capacité.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

mobile personnel, subjectif et lointain. La cause est, au contraire, objective ; nécessaire à la validité des actes juridiques, elle est toujours la même pour chaque catégorie d'actes. La notion de cause, lorsqu'elle est envisagée sous l'aspect de la licéité ou de sa légalité, recouvre les motifs personnels qui conduisent une partie à contracter. Lorsque le motif est illicite, il entraine la nullité de l'acte à la double condition d'être cause impulsive et déterminante de l'opération et d'avoir été connu de l'autre partie.

D'autre part, aux exigences du Code civil, le nantissement des droits de propriété intellectuelle doit se soumettre à celles de l'AUS du 15 décembre 2010. En effet, d'après l'article 157 AUS, cette convention doit à peine de nullité, constatée par un écrit. Ce dernier doit à son tour, à peine de nullité, contenir les mentions suivantes prévues par l'article 157 AUS : la désignation du créancier, du débiteur et du constituant du nantissement si celui-ci n'est pas le débiteur; Les éléments identifiant ou permettant de déterminer les droits apportés en garantie; les éléments permettant l'individualisation de la créance garantie tels que son montant ou son évaluation, sa durée et son échéance56.

Les droits de propriété intellectuelle ont pendant un certain temps été des éléments facultatifs du fonds de commerce, et donc suivaient le même régime. Dans ce sens, selon l'article 70 AUS ancien, le nantissement conventionnel du fonds de commerce doit être constitué par acte authentique ou sous seing privé dûment enregistré. La formalité d'enregistrement est nécessaire non seulement pour donner date certaine à l'acte sous seing privé, mais aussi pour procéder à l'inscription du nantissement. Autrement dit, d'après le jugement du Tribunal de commerce de Versailles57, la formalité de l'enregistrement est une condition de validité de l'acte. Cette position est contestée par certains auteurs, pour qui la formalité d'enregistrement n'est pas une condition de validité. Elle est simplement destinée à donner date certaine à l'acte et par conséquent peut être supprimée sans dommage, car la date certaine peut être conférée par l'inscription de l'acte au Registre du commerce et du crédit mobilier qui au surplus rend l'acte opposable à tous. Il faut souligner que le législateur de 2010 a supprimé la formalité d'enregistrement.

Dans certains cas, le nantissement naît non pas d'une convention entre le créancier et le débiteur ou le constituant, mais d'un acte d'autorité initié par le créancier et imposé au débiteur par le juge : c'est le nantissement judiciaire.

56 Article 157, AUS du 15 décembre 2010.

57 Trib. Com. Versailles, 28 juin 1950 ; D. 1959, p. 518 selon lequel faute d'être enregistré, l'acte sous seing privé constatant un nantissement est nul.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

B- Le nantissement judiciaire

Avant l'entrée en vigueur de l'Acte uniforme OHADA portant organisation de sûretés le 1er janvier 1998, seuls le Sénégal et le Mali58 parmi les pays membres de l'OHADA connaissaient le nantissement judiciaire du fonds de commerce. Le nantissement judiciaire du fonds de commerce n'était pas en vigueur en raison de ce que ces Etats étaient restés en cette matière sous l'empire de la loi Cordelet du 17 mars 1909 qui ne connaissait pas cette forme de nantissement. Et même plus tard, lorsqu'il est crée en France, par une loi du 12 novembre 1955, le législateur colonial n'a pas jugé utile de l'introduire dans les colonies françaises.

La consécration d'un régime autonome du nantissement des droit de propriété intellectuelle, le 15 décembre 2010, va conduit le législateur OHADA à légiférer sur les règles relatives au nantissement judiciaire des droits de propriété intellectuelle. En effet, le nantissement judiciaire est prévu par l'article 158 AUS. Cet article stipule, à cet effet que « la juridiction compétente peut autoriser le créancier à prendre une inscription de nantissement sur les droits de propriété intellectuelle ». Le même article indique que « est régi par les dispositions des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution ».

Le renvoi effectué par l'article 158 AUS aux dispositions de AUVE sur la saisie la saisie conservatoire des titres sociaux touche exactement aux articles 85 à 90 AUVE. Concrètement, il est procédé à la saisie conservatoire par la signification, dans un délai de huit jours à peine de caducité. Outre les mentions prévues pour le nantissement conventionnel, l'acte de signification doit contenir à peine de nullité, les mentions suivantes contenues à l'article 86 AUVE. Il s'agit notamment dans cette hypothèse d'une copie du procès verbal de saisie, de la mention en caractères très apparents , du droit qui appartient au débiteur, si les conditions de validité ne sont pas réunies, d'en demander la main levée à la juridiction du lieu de son domicile. Ensuite, mention doit être faite concernant la juridiction devant laquelle seront portées les autres contestations notamment celles relatives à l'exécution de la saisie; puis, l'élection de domicile du créancier dans le ressort territorial juridictionnel où la saisie est effectuée s'il n y demeure pas afin qu'il y soit fait toute signification ou offre. Enfin, il est nécessaire que soit reproduit, sur l'acte de saisie, les articles 62 et 63 AUVE relatifs aux contestations justifiant une main levée.

58 Le Sénégal l'avait consacré dans son code des obligations civiles et commerciales (IIIe partie, article 874-900) et le Mali l'avait prévu dans son Code de commerce aux articles 151 à 172.

22

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de propriété intellectuelle

Le formalisme nécessaire à la constitution du gage des droits de propriété intellectuelle, résulte de la lecture couplée des articles 157 et 160 AUS, et tourne autour d'une double exigence : l'exigence d'un écrit (paragraphe 1) et l'exigence d'un système rigoureux de publicité (paragraphe 2).

§ 1. L'exigence de l'écrit

C'est à la lecture de l'article 157 AUS que ressort l'exigence d'un écrit. Cet article précise en effet que : « à peine de nullité, le nantissement des droits de propriété intellectuelle doit être constaté dans un écrit contenant les mentions suivantes:

1°) la désignation du créancier, du débiteur et du constituant du nantissement si celui-ci n'est pas le débiteur;

2°) Les éléments identifiant ou permettant de déterminer les droits apportés en garantie;

3°) Les éléments permettant l'individualisation de la créance garantie tels que son montant ou son évaluation, sa durée et son échéance. ». C'est dire à quel point l'écrit est important (A), mais qu'en outre, sa valeur est indéniable (B).

A- L'importance de l'écrit

Les droits de la propriété intellectuelle sont intangibles et ont des attributs assez variés. Lorsqu'ils sont nantis, la détermination des leurs éléments caractéristiques ne peut raisonnablement être faite que par un écrit.

Plusieurs éléments importants apparaissent dans l'écrit et permettent à chacune des parties de s'engager en parfaite connaissance de cause. L'exigence de ces éléments rentre dans la politique générale de l'OHADA dont l'un des objectifs est de garantir une sécurité juridique et judiciaire aux différents acteurs du droit des affaires.

La première fonction de l'écrit est de déterminer l'assiette du nantissement. En effet, le nantissement ne saurait porter sur des droits indéterminés. Le nantissement porte doit donc porter sur tout ou partie des droits d'un créateur ou d'un auteur selon les cas. Par ailleurs, le nantissement

23

24

25

26

27

28

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

peut aussi porter sur des biens futurs. Ainsi donc, un créateur peut nantir soit la totalité, soit une partie de ses droits sur sa création. Mais cette situation est plus expressive en droit d'auteur, car bien que les droits moraux ne puissent faire l'objet d'un nantissement, la diversité des droits patrimoniaux permettent qu'ils soient séparés. Chacun des droits pouvant alors constituer un nantissement autonome. Il en sera par exemple le cas pour le nantissement par l'auteur de ses droits de représentation ou d'adaptation. Le droit qui fait l'objet du nantissement doit donc être expressément désigné par la convention. Il faut souligner que le législateur de 2010 a clairement limité l'étendu de l'assiette du nantissement en l'article 159 AUS59, tout en donnant la possibilité de l'étendre conventionnellement aux accessoires et aux fruits résultant de l'exploitation des droits de propriété intellectuelle, objet du nantissement.

Ensuite, l'importance de l'écrit se révèle dans la possibilité qu'elle donne d'identifier les parties à la convention du nantissement. En effet, aussi bien le créancier que le débiteur doit être clairement identifié60. Il en est de même du constituant du nantissement si celui-ci n'est pas le débiteur. L'intérêt de cette identification vient du fait qu'il sera aisé en cas de litige de trouver et d'identifier la personne contre qui d'éventuelles poursuites pourraient être engagées. Enfin l'écrit permet de déterminer le montant de la créance garantie, sa durée61 et son échéance.

B- La valeur de l'écrit

En matière de nantissement des droits de propriété intellectuelle, l'écrit a une valeur certaine. Elle est exigé ad validatem et dont l'inobservation entraine une sanction.

1- L'écrit exigé ad validatem

En France, depuis l'ordonnance du 23 mars 2006, on doit désormais parler de nantissement concernant les sûretés sur titres de la propriété industrielle62. Néanmoins, l'article 2355 du Code civil qui définit le nantissement ne donne aucune indication quant à la forme que celui-ci doit

59 Art. 159 AUS : « Le nantissement des droits de propriété intellectuelle ne s'étend pas, sauf convention contraire des parties, aux accessoires et aux fruits résultant de l'exploitation des droits de propriété intellectuelle objet du nantissement ».

60 Art. 157 (1) AUS

61 Etant entendu que cette durée est fonction de l'objet du nantissement. Il pourra donc s'agir soit d'une création industrielle, soit d'un droit d'auteur.

62 WELLHOFF (S.), les garanties du crédit et les titres de la propriété industrielle, Université de Nantes, IRDP Nantes, mémoire juin 2007, p. 14.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

revêtir. En effet l'alinéa 5 se contente de renvoyer aux dispositions spéciales applicables à chaque sûreté sur titres de la propriété industrielle pour analyser la place de l'écrit.

Ainsi, le Code de la propriété intellectuelle exige l'écrit pour les brevets63, les obtentions végétales64, les topographies de produit semi conducteurs65. Cette exigence s'étend également aux marques, aux dessins et modèles. Pour l'ensemble de ces titres, l'écrit est donc obligatoire.

Les législateurs OHADA et OAPI exigent l'écrit pour respectivement le nantissement66 et le gage67 portant sur le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Dans l'espace OHADA, la valeur de l'écrit pour la constitution du gage des droits de propriété intellectuelle est assez claire pour ce qui est des droits de propriété industrielle. L'accord de Bangui révisé reprend dans presque tous ses annexes que l'écrit est exigé comme condition de validité du gage. Il en est ainsi notamment à l'article 33 al. 2 de l'annexe 1 relatif aux brevets d'invention. Pour ce qui est du droit d'auteur et des droits voisins, il n'existe aucun texte spécial relatif au gage, à moins qu'on ne remonte à l'époque coloniale pour évoquer le nantissement des films cinématographiques organisé par la loi du 22 février 1944. Cette loi fait également de l'écrit, une condition de validité du gage.

En définitive, on peut dire que l'écrit est une condition de validité du nantissement des droits de propriété intellectuelle dont l'inobservation entraîne la nullité.

2- La sanction de l'absence de l'écrit

L'inobservation de la formalité qu'est la rédaction d'un écrit est sanctionnée par les législateurs OHADA et OAPI par la nullité de l'acte. L'établissement d'un écrit dont le défaut est sanctionné par la nullité n'est pas une solution nouvelle dans les Etats membres de l'OAPI. L'exigence d'un écrit, à peine de nullité, a été prévue par les Annexes de l'accord de Bangui pour le gage sur les droits sur les inventions68, les modèles d'utilité69, les marques de produits ou de services70, les

63 Art. L. 613-8 alinéa 5 du Code de la propriété intellectuelle exige que « les actes comportant une transmission ou une licence, visés aux deux premiers alinéas, sont constatés par écrit, à peine de nullité ».

64 Art. L. 623-24 du CPI.

65 Art. L. 622-7 du CPI.

66 Art.157 (1) de l'AUS.

67 Art. 33 (2), Annexe I de l'ABR : « les actes comportant, soit transmission de propriété, soit concession de droit d'exploitation ou cession de droit, soit gage ou mainlevée de gage relativement à une demande de brevet ou à un brevet, doivent, sous peine de nullité, être constatés par écrit. ».

68 Article 33, 2), Annexe I de l'ABR.

69 Article 28, 2), Annexe II de l'ABR.

70 Article 26, 1), Annexe III de l'ABR.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

dessins et modèles industriels71, les schémas de configuration de circuits intégrés72. La lecture combinée des articles 157 AUS et 33 (2), annexe I de l'ABR, permet de se rendre compte que la nature du contrat de nantissement est mise en cause. Ils semblent en faire un contrat solennel plutôt qu'un contrat réel. Certains estiment toutefois que cette remise en cause n'est que théorique73. Ils considèrent que l'exigence obligatoire de l'écrit est d'un intérêt pratique, et que par conséquent elle permet de sécuriser l'opération du gage à l'égard des parties. La sécurité visée par l'écrit n'a de véritable impact que sur les parties. Pour espérer la voir s'étendre aux tiers, il est important qu'une autre mesure soit prise, que le nantissement soit publié. C'est ce qui justifie que les législateurs OHADA et OAPI aient posé une exigence de publicité.

§ 2. L'exigence de publicité

L'étude du régime de la publicité pour la constitution du nantissement des droits de propriété intellectuelle s'articule autour de ses modalités (A) et de sa valeur (B).

A- Les modalités de publicité

Les législateurs communautaires OHADA et OAPI formulent un régime de publicité axé autour de l'exigence d'une double inscription. L'une des inscriptions se fait au registre de commerce et du crédit mobilier (RCCM), l'autre se fait dans un registre spécial prévu à cet effet au sein de l'OAPI.

1- L'inscription au registre de commerce et du crédit mobilier

Le RCCM est régi par l'Acte uniforme sur le droit commercial général (AUDCG), lequel est entré en vigueur le 1er janvier 1998 dans l'ensemble des Etats parties au Traité OHADA. L'objectif principal visé par l'OHADA était de faire de ce Registre, un instrument de publicité efficace afin de permettre aux entreprises d'avoir le maximum d'informations sur la situation juridique et financière de leurs partenaires et d'avoir la possibilité de mettre en place des garanties juridiques

71 Article 20, 2), Annexe IV de l'ABR.

72 Article 18, 2), Annexe IX de l'ABR.

73 ZOMISSI (G.), Le gage des droits de propriété intellectuelle dans l'espace OHADA, Université de Yaoundé II, mémoire, p. 38.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

sécurisées74. Il convient donc de présenter le RCCM et s'attarder sur la procédure d'inscription du nantissement.

Il est important, pour présenter le RCCM d'analyser aussi bien le fonctionnement de l'OHADA que son contenu. En ce qui concerne son fonctionnement, le législateur OHADA a opté pour un système de centralisation des données du RCCM. Ainsi il existe trois niveaux de centralisation des données. D'abord, un Registre tenu par le Greffe de chaque Tribunal Régional. Ensuite, et pour compléter le premier, un Fichier National tenu au Greffe du Tribunal Régional. Ce fichier centralise les renseignements consignés dans chaque Registre du Commerce local et comprend un extrait de chaque dossier individuel des personnes physiques et morales classées par ordre alphabétique. Enfin, un Fichier Central OHADA à Abidjan. Ce Fichier, commun à tous les Etats parties au Traité de l'OHADA est tenu auprès de la CCJA75 et centralise tous les renseignements dans chaque Fichier National.

Quant au contenu du RCCM, il faut souligner que le Registre tenu au Greffe comprend: un Registre d'arrivée, qui mentionne dans l'ordre chronologique la date et le numéro de chaque déclaration avec les mentions requises76, la collection des dossiers individuels77. Les déclarations qui y sont faites, sont établies en quatre (4) exemplaires sur des formulaires fournis par le Greffe. Ces exemplaires sont destinés respectivement au Greffe, au déclarant, au Fichier National et au Fichier Central. Il faut souligner qu'obligation est faite aux parties au nantissement d'y inscrire leur sûreté. Cette inscription s'effectue suivant une certaine procédure.

L'inscription au RCCM se fait au Greffe de la juridiction compétente. Le créancier garanti ou le constituant du nantissement doit présenter certains documents et inscrire certaines mentions, sous le contrôle du Greffier. Le créancier garanti doit produire l'acte constitutif du nantissement, de la créance ou du contrat. Il faut en outre remplir un formulaire d'inscription en quatre (4) exemplaires.

Une fois saisi du dossier, le greffier doit vérifier la conformité du formulaire avec le titre présenté. Son rôle se limite à cette tâche matérielle. Par conséquent, il est incompétent pour

74 ERNST et YOUNG, « le droit OHADA : Histoires, Institutions et Actes Uniformes », Ed. FFA, octobre 2006, p.555

75 Cour Commune de Justice et d'Arbitrage.

76 Il s'agit notamment des nom et prénom, raison sociale, objet de la déclaration.

77 Ces dossiers sont classés par ordre alphabétique et contiennent: pour les personnes physiques, toutes les indications relatives à leur identité, à la nature de l'activité exercée, à l'adresse du principal établissement et autres établissements secondaires. Pour les sociétés commerciales et autres personnes morales, toutes les indications relatives à la dénomination sociale, à la forme juridique, à l'objet social, au siège social.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

soulever l'irrégularité juridique du titre présenté. Si tout parait conforme, il procède à l'inscription de la sûreté sur le registre chronologique et, dans le même temps ;

- Fait mention de l'inscription au dossier individuel ouvert au nom de la personne physique ou morale contre laquelle l'inscription est prise;

- Classe les actes et un formulaire de déclaration qui lui a été remise au dossier tenu sous le nom de la personne physique ou morale contre laquelle est prise l'inscription, avec mention de cette date d'inscription et de son numéro d'ordre;

- Remet à la personne qui a requis l'inscription le second exemplaire de sa déclaration visée par le greffe qui mentionne la date et le numéro d'ordre de l'inscription.

2- L'inscription au registre spécial

Aux termes de l'article 160, alinéa 3, de l'AUS, « si le nantissement a pour objet un droit inscrit à l'un des registres régis par la réglementation applicable en matière de propriété intellectuelle, il doit, en outre, être satisfait aux règles de publicité prévues par cette réglementation ». Ainsi, l'inscription aux registres par la réglementation des propriétés intellectuelles ne doit être effectuée que si cette réglementation l'impose. Dans les Etats membres de l'OAPI, l'obligation d'inscrire dans les registres ne concerne que les droits de propriété industrielle, à l'exclusion des droits de propriété littéraire et artistique. Bien que dans ce dernier cas aucune inscription ne soit imposée, il convient de souligner que l'oeuvre littéraire est protégée en tant que telle78, c'est-à-dire dès sa création et sans dépôt obligatoire auprès d'un organisme officiel.

D'après l'article 13 de l'Accord, l'OAPI tient pour l'ensemble de ses Etats membres un registre spécial pour chacune de ses propriétés intellectuelles. De manière invariable il est prévu que les actes comportant, soit transmission de propriété, soit concession du droit d'exploitation ou de cession de ce droit, soit gage ou mainlevée de gage relativement à une demande de brevet ou à un brevet79, à une demande de modèle d'utilité enregistré80, à un dessin ou un modèle industriel81, à un nom commercial82 ne sont opposables au tiers que s'ils ont été inscrits dans le registre correspondant tenu par l'OAPI.

78 GAUTIER (P.-Y.), Propriété littéraire et artistique, 8e éd., Paris, 2012, n°186, p. 187.

79 Art. 26 et 27, Annexe I de l'ABR.

80 Art. 20 et 21, Annexe II de l'ABR.

81 Art. 20 et 26, Annexe III de l'ABR.

82 Art. 14, Annexe V de l'ABR.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Cette inscription doit être prise dans un délai de 12 mois à compter de la date à laquelle les actes ont été accomplis. Il n'est cependant pas prévu de sanction à l'inobservation de ce délai. Il en résulte comme le précisent si bien certains auteurs83 que, même après ce délai de 12 mois, la sûreté peut toujours être inscrite.

B- La valeur de la publicité

La valeur des formalités de publicité est assez clairement posée à travers les multiples dispositions des annexes de l'Accord de Bangui révisé. En général, le législateur OAPI énonce que les contrats portant sur les droits de la propriété industrielle ne sont opposables aux tiers que s'ils ont été inscrits dans les registres spéciaux prévus à cet effet. L'inscription est donc une condition d'opposabilité aux tiers du gage des droits de propriété industrielle. Dans le même ordre d'idées, selon l'article 160 de l'AUS, l'inscription du nantissement de propriété intellectuelle a pour effet de rendre celui-ci opposable aux tiers. Il s'ensuit que la sanction du défaut d'inscription est l'inopposabilité du nantissement.

En l'absence de législation particulière en matière de propriété littéraire artistique, il semble possible d'étendre à ce domaine les dispositions relatives à la propriété industrielle. Une bonne partie de la doctrine semble épouser cette conception. En effet, elle estime que durant la vie de la sûreté, l'inscription assure l'opposabilité du droit de préférence du créancier nanti. Elle conditionne également l'exercice de son droit de suite en l'encontre d'un éventuel acquéreur du bien. Mais dans l'immédiat, l'inscription permet aussi de déterminer le rang des créanciers gagistes sur les mêmes droits. Certains auteurs sont cependant allés plus loin pour proposer que l'inscription soit érigée en condition de validité du nantissement.

Pour certains auteurs84, le caractère immatériel des droits de propriété intellectuelle rend impossible ou tout au moins difficilement réalisable la dépossession. Il faudrait alors considérer que l'inscription en est le substitut et devrait en épouser la valeur. Ainsi parce que la dépossession est une condition de validité du gage, il faudrait également considérer l'inscription qui la remplace comme une condition de validité du gage des droits de propriété intellectuelle. Cette doctrine estime donc que comme la dépossession, l'inscription est de l'essence même du gage des meubles incorporels en général, et à ce titre, la validité du contrat de nantissement

83 ANOUKAHA (F.), CISSE-NIANG (A.), ISSA-SAYEGH (I.), NDIAYE YANKHOBA (I.), FOLI (M.), SAMB (M.), OHADA, Sûretés, juriscope 2002, p.121, n°317.

84 MESTRE (J.), PUTMAN (E.) et BILLIAU (M.), Droit spécial des sûretés réelles, LGDJ, 1996, n°969 ; VIVANT (M.), « l'immatériel en sûreté », in Mélanges CABRILLAC, LITEC 1999.

29

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

dépendrait de son accomplissement85.

L'opposabilité dont il est question ici ne produit ses effets, à la lumière de l'article 57 dudit Acte uniforme, qu'au jour de l'inscription au Registre du commerce et non à la date de l'acte de nantissement. Il s'agit de l'application à l'inscription de l'adage prior tempore optior jure. Le créancier a donc intérêt à être diligent, car il peut être primé par un créancier qui, bénéficiant postérieurement sur les mêmes droits d'une sûreté, aurait été premier à l'inscription. Le même article 57 règle la situation des inscriptions concurrentes réalisées le même jour sur les mêmes biens. Ainsi donc, lorsque les inscriptions sur les mêmes droits de propriété intellectuelles s'effectuent le même jour, la priorité est donnée à la sûreté dont la date du titre est la plus ancienne. Si par contre les titres de nantissement ont la même date, ces derniers sont réputés avoir le même rang.

Conclusion du chapitre I :

L'entrée en vigueur de l'AUS nouveau le 15 décembre 2010 a innové le régime général des sûretés. Il a notamment consacré un nantissement autonome des droits de propriété intellectuelle, détachant ainsi ce nantissement de celui du fonds de commerce. En effet, avant l'entrée en vigueur de l'AUS, les droits de propriété intellectuelle faisaient partie des éléments facultatifs du fonds de commerce. Consacrer un nantissement autonome des droits de propriété intellectuelle offre une nouvelle possibilité aux investisseurs. Il constitue en réalité un nouveau moyen de financement.

85 ZOMISSI (G.), Le gage des droits de propriété intellectuelle dans l'espace OHADA, Université de Yaoundé II, mémoire, p. 41.

30

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE INTELLECTUELLE

De manière courante, la propriété intellectuelle sert à protéger les produits et créations par l'octroi de monopole ou de droit exclusif, à savoir principalement les brevets, les droits d'auteurs, les droits des marques, les droits des dessins et modèles. Or, au regard de la valeur économique qu'ils peuvent avoir, les droits de propriété intellectuelle peuvent servir de moyen de financement. En effet, le patrimoine incorporel est plus que jamais l'objet de toutes les attentions. La consécration d'un nantissement autonome des droits de propriété intellectuelle produit des effets. Ces derniers peuvent s'analyser autour des finalités du nantissement (Section II), cependant, il convient de s'attarder sur un nombre de règles et de précautions qui doivent être respectées. Elles constituent les préalables à la prise de nantissement (Section I).

Section 1 : Les préalables à la prise de nantissement des droits de propriété intellectuelle

Avant d'envisager toute prise de nantissement sur les droits de propriété intellectuelle, il convient pour tout créancier, de déterminer la valeur des droits nantis (Paragraphe I) et de vérifier l'existence du nantissement (Paragraphe II).

§ 1. La nécessaire évaluation de la valeur des droits nantis

Par évaluation de la propriété intellectuelle, on entend une analyse systématique des actifs de propriété intellectuelle détenus, utilisés ou acquis par une entreprise86. Pour Ian COCKBURN, sans évaluation, pas de gestion possible87. La valeur d'un actif dépend de sa capacité de générer des recettes et du taux d'actualisation appliqué à ces recettes. La pratique a mis en place des méthodes d'évaluation (A), qui ne vont pas sans rencontrer de difficultés (B).

86 COCKBURN (I.), Evaluation de la propriété intellectuelle: guide pratique, http://www.wipo.int/sme/fr/documents/value_ip_intangible_assets.htm, consulté le 22 février 2014 à 04:45.

87 Idem.

31

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

A- Les techniques d'évaluation

Les méthodes d'évaluation de la propriété intellectuelle se repartissent en trois grandes catégories : les méthodes axées sur le marché, les méthodes fondées sur les coûts et la méthode des revenus88.

Lorsque la situation est idéale, l'expert indépendant préférera toujours déterminer la valeur sur le marché en se référant à des transactions commerciales comparables. C'est un exercice déjà difficile lorsqu'il faut évaluer des actifs tels que des briques et du mortier car il est impossible de trouver une transaction qui soit exactement comparable. Mais lorsqu'il s'agit d'évaluer un élément de propriété intellectuelle, chercher une transaction commerciale comparable est presque vain. Cela est dû non seulement à une incompatibilité mais aussi au fait que la propriété intellectuelle n'est en général pas conçue pour être vendue, que de nombreuses ventes ne constituent souvent qu'une petite partie d'une transaction plus importante et que des éléments demeurent extrêmement confidentiels. Il existe d'autres facteurs qui limitent l'utilité de cette méthode, à savoir l'existence d'acheteurs spéciaux, des capacités de négociation différentes et les effets déformateurs des points de retournement des cycles économiques. En résumé, cela explique pourquoi je suis contre cette méthode qui fait la part belle à l'approximation.

Les méthodes fondées sur les coûts, tels que le «coût de création» ou le «coût de remplacement» d'un actif donné, partent du principe qu'il y a un lien entre le coût et la valeur et ne présentent pas grand-chose d'autre comme avantage que la facilité d'utilisation. Cette méthode ne tient pas compte des changements de la valeur de rendement de l'argent, ni de la maintenance.

Les méthodes d'évaluation reposant sur les méthodes des revenus peuvent être réparties en quatre groupes: capitalisation des bénéfices cumulatifs, méthodes de différenciation des bénéfices bruts, méthode des bénéfices excédentaires et méthode de l'allégement fiscal au titre des redevances89.

- La capitalisation des bénéfices cumulatifs permet de calculer la valeur d'un droit de propriété intellectuelle en multipliant la rentabilité cumulative réalisable de l'actif par un multiple qui a été établi après cotation de la vigueur relative du droit de propriété intellectuelle. Ainsi, un multiple est

88 KING (K.), « la valeur de la propriété intellectuelle, de l'actif incorporel et du fonds de commerce », http://www.wipo.int/sme/fr/documents/value_ip_intangible_assets.htm, consulté le22 février 2014 à 04:45.

89 Idem.

32

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

déterminé après évaluation d'une marque à la lumière de facteurs tels que la prépondérance, la stabilité, la part de marché, le caractère international, l'évolution de la rentabilité, le support commercial et publicitaire et la protection. Si ce processus de capitalisation reconnaît certains des facteurs dont il faut tenir compte, il présente des inconvénients majeurs, liés essentiellement à la capacité bénéficiaire cumulative. Cette méthode fait peu cas de l'avenir.

-Les méthodes de différenciation des bénéfices bruts sont souvent associées à une évaluation des marques. Ces méthodes tiennent compte des différences de prix de vente, corrigées des différences de coûts de commercialisation. Il s'agit de la différence de marge entre un produit de marque ou un produit breveté et un produit sans marque ou générique. Cette formule sert à éliminer les liquidités et à calculer la valeur. Trouver des équivalents communs est bien plus difficile pour un brevet ou des différences de prix notables que pour une marque réservée au commerce de détail.

-La méthode des bénéfices excédentaires fait intervenir la valeur la plus récente des actifs corporels nets utilisés comme point de référence pour un taux de rendement estimatif. Elle sert à calculer les bénéfices nécessaires pour pouvoir encourager les investisseurs à investir dans ces actifs corporels nets. Les recettes dépassant ces bénéfices nécessaires pour attirer les investissements sont considérées constituer les recettes excédentaires attribuables aux droits de propriété intellectuelle. S'il est vrai que, théoriquement, cette méthode fait fond sur de futurs avantages économiques découlant de l'utilisation de l'actif, il n'en reste pas moins qu'elle tient difficilement compte des autres utilisations de l'actif.

-La méthode de l'allégement au titre des redevances prend en considération ce que l'acheteur peut se permettre ou serait prêt à payer pour une licence portant sur un droit de propriété intellectuelle analogue. Le flux des redevances est alors capitalisé, reflétant le lien risque-rendement de l'investissement dans l'actif.

B- Les difficultés de l'évaluation

La nécessité d'évaluer les droits de propriété intellectuelle avant toute prise de nantissement est indéniable. Cependant, au regard d'un certains nombre d'aspects, cette évaluation n'est pas tout à fait aisée. Cette difficulté est valable aussi bien pour les droits de propriété intellectuelle existants, que pour les droits futurs

33

34

35

36

37

38

39

40

41

42

43

44

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

1- La difficile évaluation des droits existants

L'évaluation des droits de propriété intellectuelle existants n'est pas aisée. C'est sans doute ce qui justifie d'ailleurs que, certains auteurs estiment qu'évaluer les droits de propriété intellectuelle relève plus de l'art que de la science90. La principale difficulté à laquelle est confronté un créancier est le caractère fluctuant de la valeur de ces différents droits. Ainsi, plusieurs raisons peuvent conduire un droit de propriété intellectuelle à perdre sa valeur.

L'auteur à sur son oeuvre des droits moraux et des droits patrimoniaux. Et comme il a déjà été souligné, seuls les droits patrimoniaux peuvent faire l'objet d'un nantissement. Or pour être pris en compte par un éventuel créancier, l'oeuvre doit avoir une valeur bien précise. C'est celle-ci qui convaincra le créancier. La valeur financière d'une oeuvre dépend de sa réussite ou du moins sa consommation sociale91. Il peut arriver qu'à sa divulgation, l'oeuvre perde sa valeur. La perte de la valeur d'une oeuvre peut résulter de plusieurs facteurs. C'est par exemple le cas lorsque l'oeuvre n'atteint pas la cible sociale souhaitée ou les objectifs sociopolitiques. Il est bien vrai que la qualité d'une oeuvre importe peu pourvu qu'elle soit originale. Mais, il ne faut pas oublier que la qualité de l'oeuvre peut justifier sa réussite et influencer son évaluation certaine. Or la question de qualité s'analyse bien souvent subjectivement, ce qui rend la tache difficile. La volatilité des droits de la propriété intellectuelle ne facilite leur évaluation.

Tout comme l'auteur, la création peut perdre une grande valeur une fois qu'elle a fait l'objet d'une divulgation. C'est généralement le cas lorsque la création n'a pas encore été mise à la connaissance du public. Lorsque la création a été mise à la connaissance du public, la contrefaçon peut venir porter un grand coup à la valeur du bien crée. En réalité, la divulgation fait partie des droits d'un créateur. Ce qui est préjudiciable, c'est bien la divulgation prématurée. Elle consiste à communiquer certaines informations relatives à une invention avant d'avoir déposé une demande de brevet. Ces informations peuvent être contenues dans un abrégé, une affiche, une thèse en souffrance, et même une description orale de l'invention à un quelconque auditoire, même s'il s'avère en définitive que la divulgation n'est pas le fait de l'inventeur92. Dans la plupart des pays,

90 SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), la prise de garantie en matière de propriété intellectuelle au CANADA, info@robic.com - www.robic.ca.

91 KODJI (Z.), Le droit d'auteur en garantie de crédit, mémoire de Master II en droit privé, option droit des affaires, soutenu en 2008, Université de Ngaoundéré.

92 WIPO, Principes directeurs pour l'élaboration d'une politique de propriété intellectuelle à l'intention des universités

et des instituts de recherche-développement,

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

une divulgation prématurée compromet la brevetabilité d'une invention. Par ailleurs, la contrefaçon est une violation d'un droit de propriété intellectuelle par le fait de reproduire ou d'imiter quelque chose sans en avoir le droit ou en affirmant ou laissant présumer que la copie est authentique93. En conséquence, la contrefaçon et la divulgation prématurée contribuent à créer le doute dans l'esprit des investisseurs, et donc, conduisent ces derniers à hésiter quand il s'agit d'octroyer du crédit. En d'autres termes, L'évaluation incertaine des oeuvres qu'elles soient futures ou existantes a pour conséquence immédiate de provoquer la réticence des créanciers qu'ils soient des personnes physiques ou des personnes morales à savoir des établissements de crédit. Cette hésitation est encore plus grande en ce qui concerne le nantissement des droits futurs.

2- La difficile évaluation des droits futurs

Les droits de la propriété intellectuelle même existants, ne sont pas facilement évaluables et du coup, la situation sera beaucoup plus complexe pour ceux à venir. En effet, la véritable complexité vient de ce qu'une telle évaluation est principalement spéculative On peut légitimement dire que l'obligation de conservation qui pèse sur le débiteur d'une oeuvre existante sera difficilement demandée au débiteur ayant donné en garantie son droit d'auteur futur. A cela s'ajoute l'absence d'enregistrement. La simple réunion de certains critères suffit à protéger une personne, ayant apporté quelque chose d'originale dans le domaine littéraire et artistique94. L'article L-131-1 du Code de Propriété Intellectuelle français énonce que: « La cession globale des oeuvres futures est nulle. » Cette disposition fait aussi l'objet d'une consécration dans la loi camerounaise de 2000. Un tel libellé a des implications sur l'évaluation des oeuvres futures lorsque cela est possible; les conséquences ne manqueront pas. Elles sont d'ailleurs évidentes.

L'évaluation de la valeur des oeuvres futures comme pour les oeuvres existantes n'est pas sans conséquences. Il y aurait aussi une difficulté évidente à constituer des sûretés faute de certitude lorsqu'il va falloir évaluer la valeur d'une oeuvre. Ce constat mérite d'être nuancé. Les stipulations contractuelles peuvent envisager une évaluation autre que la complexité liée à l'oeuvre elle-même. Mais, la grande probabilité est de se heurter à l'insuffisance des critères d'évaluation. Même le nantissement des films cinématographiques qui, aux yeux de certains, parait avoir un régime beaucoup plus simple, cela demeure une tache ardente et difficile.

http://books.google.cm/books?id=swDFcumUsOgC&dq=divulgation+d%27une+propri%C3%A9t%C3%A9+intellectue lle&hl=fr&source=gbs_navlinks_s, consulté le 26 mars 2014 à 19H55.

93 http://fr.wikipedia.org/wiki/Contrefa%C3%A7on.

94 Art. 13 (1) de la loi camerounaise sur le droit d'auteur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

La prise de nantissement des droits de propriété intellectuelle entraine un certain nombre de difficultés, et ce, qu'il s'agisse des droits existants ou futurs. Cependant, ces difficultés n'empêchent pas de manière péremptoire, la possibilité de nantir ces droits. C'est justement pour éviter d'éventuels écueils, qu'il est nécessaire de vérifier l'existence du nantissement.

§ 2. La nécessité de vérifier l'existence du nantissement

Avant toute prise de nantissement sur les droits de propriété intellectuelle, il importe qu'un certain nombre d'informations soit réuni pour éviter toute remise en cause dudit nantissement. Ces informations concernent tant la durée (A) que l'existence d'éventuels contentieux liés au nantissement (B).

A- La durée du nantissement

La durée du nantissement est intimement liée à la durée de la protection qui est accordée par l'OAPI. Or, il est clair que la protection varie selon l'objet de la protection. On en déduit alors que la durée du nantissement est fonction de son objet. Ainsi, l'Annexe I de l'accord octroi une durée de protection de vingt ans pour le brevet95. Cette durée est de dix ans pour les modèles d'utilité et les schémas de configuration de circuits intégrés. En d'autres termes, le monopole d'exploitation des modèles d'utilité et des schémas de configuration topographique96 a une durée de dix ans, sans possibilité de renouvèlement. Cette durée est la même les marques de produits ou de services et les noms commerciaux97, à la différence que le délai de dix ans est renouvelable indéfiniment. La protection dans ces cas, est susceptible d'être « éternelle ». La durée de protection des dessins et modèles industrielles est de quinze années au maximum. Dans ce dernier cas, la durée de protection est de cinq ans, sauf que cette durée est renouvelable deux fois.

De manière générale, la durée de la protection en matière de propriété littéraire et artistique est très étendue. En effet, elle varie selon qu'il s'agit des droits moraux ou des droits patrimoniaux. Les droits moraux sont illimités dans le temps. Après l'expiration des droits patrimoniaux, l'organisme

95 Art. 9 de l'Annexe ABR : « Le brevet expire au terme de la vingtième année civile à compter de la date de dépôt de la demande... ».

96 Art. 7 (2) de l'Annexe IX, ABR.

97 Art. 19 de l'annexe III pour la durée de protection des marques de produits ou de services et l'art. 11 de l'Annexe V pour les noms commerciaux.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

national de gestion collective des droits visés à l'article 60 est en droit de respecter les droits moraux en faveur des auteurs98. Quant aux droits patrimoniaux, ceux auxquels on s'intéresse, ils sont protégés pendant la vie de l'auteur et soixante-dix ans après sa mort. Il faut souligner qu'au regard de la diversité de nature des oeuvres de l'esprit, le durée de protection est tout aussi diversifiée. La première des oeuvres, est l'oeuvre de collaboration dont les droits patrimoniaux sont protégés pendant la vie du dernier auteur survivant et soixante-dix ans après sa mort. En suite, pour ce qui est des oeuvres publiées de manière anonyme ou sous un pseudonyme, les droits patrimoniaux sont protégés jusqu'à l'expiration d'une période de soixante-dix ans à compter de la fin de l'année civile où une telle oeuvre a été publiée licitement pour la première fois, ou, à défaut d'un tel évènement intervenu dans les soixante-dix ans à partir de la réalisation de cette oeuvre. La même durée de protection est réservée aux oeuvres collectives et audiovisuelles99. Pour la dernière catégorie d'oeuvres envisagée par l''Annexe VII de l'ABR, c'est-à-dire celle réservée aux oeuvres des arts appliqués, les droits patrimoniaux sont protégés jusqu'à l'expiration d'une période de vingt cinq ans à partir de la réalisation d'une telle oeuvre100. La vérification de la durée du nantissement faite, il convient de vérifier qu'il n'existe pas de contentieux lié au nantissement.

B- Le contentieux lié au nantissement

Vérifier l'existence d'un contentieux lié au nantissement revient pour le créancier gagiste, de s'assurer des conditions de levée du nantissement d'une part, et des conditions de radiation du nantissement d'autre part.

1- Les conditions de levée du nantissement

La mainlevée est l'acte par lequel un particulier ou un juge arrête les effets d'une sûreté, d'une opposition. En l'espèce, la main levée sera l'acte par lequel une partie ou le juge arrête les effets du nantissement. En effet, la personne physique ou morale contre laquelle a été prise une inscription de nantissement peut, à tout moment, saisir la juridiction compétente, ou l'autorité compétente dans l'Etat partie, d'une demande visant à obtenir la mainlevée ou le cantonnement du nantissement. La juridiction compétente, ou l'autorité compétente dans l'Etat partie, peut, en tout état de cause et

98 Art. 22(2), de l'Annexe VII, ABR.

99 Art. 25, de l'Annexe VII, ABR.

100 Art. 26, de l'Annexe VII, ABR.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

avant même d'avoir statué au fond, donner mainlevée totale ou partielle du nantissement si le requérant justifie de motifs sérieux et légitimes101.

La condition exigée pour obtenir levée du nantissement est l'existence de motifs sérieux et légitimes. La question pourrait alors se poser de savoir ce que le législateur entend par motifs sérieux et légitimes. Par ailleurs, allant dans la même veine, quelles seraient les critères qui lui permettraient d'apprécier les caractères sérieux et légitimes des motifs évoqués par la personne qui souhaite obtenir la levée du nantissement. En réalité, c'est au juge qu'il reviendra d'apprécier les motifs justifiant la demande de mainlevée du nantissement des droits de propriété intellectuelle. Cette appréciation sera faite in concreto, en d'autres termes, au cas par cas. Le risque dans cette hypothèse et que, ce qui dans un Etat partie est constitutif de motif grave et légitime ne l'est pas forcément dans un autre.

Outre la justification de motifs graves et légitimes, la mainlevée de nantissement doit obéir à une formalité particulière. C'est du moins ce qui ressort de l'ABR. En effet, l'article 33(2) de l'Annexe I stipule que les actes comportant, soit transmission de propriété, soit concession de droit d'exploitation ou cession de ce droit, soit gage ou mainlevée de gage102 relativement à une demande de brevet ou à un brevet, doivent, sous peine de nullité, être constatés par écrit103. Le formalisme entourant la mainlevée de nantissement des droits de propriété est d'une telle importance que, la non exécution de cette formalité est sanctionnée par la nullité. Les actes qui ont pour objet la mainlevée de gage, seront donc nuls s'ils ne sont pas constatés par écrit. Les conditions qui entourent la levée du nantissement des droits de propriété intellectuelle sont d'une importance telle que, l'on devrait également s'interroger sur les conditions de radiation du nantissement des droits de propriété intellectuelle.

2- Les conditions de radiation du nantissement

La radiation se définie comme l'exécution par le conservateur des hypothèques d'un acte ou d'un jugement de mainlevée d'une hypothèque et qui se réalise par une mention en marge de l'inscription. Plus précisément, en matière de sûreté, la radiation est l'opération matérielle qui consiste à rayer ou à supprimer une inscription sur un registre en y portant une mention en marge de

101 C'est ce qui ressort de la lecture in fine de l'article 61 AUS du 15 décembre 2010.

102 La notion de gage doit entendue ici comme nantissement.

103 Ces dispositions sont reprises aux art. 28(2), Annexe II ABR ; art. 26 (2), Annexe III, ABR ; art. 20(2) Annexe IV, ABR.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

l'inscription initiale. La radiation peut, en plus d'être totale ou partielle, être conventionnelle ou judiciaire. Ce sont d'ailleurs, sur ces aspects qu'il convient de s'arrêter.

La radiation conventionnelle est celle qui émane de la volonté des parties à la convention de nantissement, notamment du créancier ou de son cessionnaire régulièrement subrogé et justifiant de ses droits. A cet effet, elle ne peut être opérée que sur dépôt ou transmission électronique d'un acte authentique ou sous seing privé de consentement à la radiation, donné par le créancier ou son cessionnaire régulièrement subrogé et justifiant de ses droits, ainsi que d'un formulaire portant mention:

- Des nom, prénom, dénomination sociale, domicile ou siège social, ainsi que, le cas échéant, le numéro d'immatriculation de la personne physique ou morale contre laquelle avait été requise l'inscription, ou en cas d'inscription portant sur des droits d'associés et valeurs mobilières, le numéro d'immatriculation de la personne morale dont les droits d'associés et valeurs mobilières font l'objet de cette inscription;

- De la nature et de la date du ou des actes déposés.

Une fois la vérification de la conformité de l'acte faite, le greffier porte l'inscription de la radiation sur RCCM, et délivre un certificat de radiation à toute personne qui en fera la demande.

La radiation judiciaire résulte quant à elle, d'une juridiction compétente du lieu de l'inscription. Elle devient nécessaire lorsque le créancier ou son subrogé refuse de consentir à la radiation conventionnelle, et n'a d'effet que si elle est inscrite en marge de l'inscription initiale. Par ailleurs, elle est ordonnée par la juridiction compétente ou par l'autorité compétente dans l'Etat partie104. Une fois l'ensemble de ces informations vérifiées, le créancier nanti peut désormais prendre un nantissement en parfaite connaissance de cause.

Section 2 : La finalité du nantissement

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle tel que perçu par l'AUS du 15 décembre 2010, constitue désormais un important outil de financement pour les entreprises. C'est d'ailleurs là, la finalité, l'intérêt pour une entreprise. Le financement de la propriété intellectuelle, c'est-à-dire l'utilisation en garantie d'une créance de marques, dessins et modèles, brevets et droits d'auteur ou autres actifs intellectuels, suscite un intérêt croissant dans les milieux concernés. En effet, de plus

104 Art. 63, AUS du 15 décembre 2010.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

en plus d'entreprises, utilisent leurs droits de propriété intellectuelle comme une source de crédit, et de plus en plus d'institutions financières réalisent des opérations dans lesquelles des droits sont donnés en sûreté. On en déduit aisément que, le nantissement des droits de propriété intellectuelle est aussi bien bénéfique pour les entreprises en fonctionnement (Paragraphe I), que pour les entreprises en difficulté (Paragraphe II).

§ 1. Le nantissement et les entreprises en fonctionnement

Il a déjà été souligné que les droits de propriété intellectuelle constituaient dans bien des cas, des actifs de grande valeur, mais qu'en plus ils étaient aussi une source importante de financement. Les actifs incorporels peuvent augmenter la valeur des entreprises, et le fait de savoir en apprécier l'importance permet à leurs dirigeants de prendre des décisions financières et commerciales plus informées. Une meilleure évaluation de ces actifs peut faciliter les négociations avec les investisseurs (A) et l'accès au crédit (B).

A- Le nantissement, une garantie aux investisseurs

Le nantissement est l'affectation d'un meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en garantie d'une ou de plusieurs créances, présentes ou futurs, à condition que celles-ci soient déterminées ou déterminables105. Les droits de propriété intellectuelle peuvent donc être nantis et constituent pour le créancier une garantie. La valeur de ces droits est un aspect non négligeable pour tout créancier, pour tout investisseur. L'investisseur étant entendu comme toute personne qui place des capitaux dans l'achat de biens de production106.

Des nombreux risques auxquels est exposée une banque, le plus grave et le plus traditionnel découle de l'activité de prêteur. Le banquier est toujours exposé à la défaillance de son débiteur. Analyser le risque, le prévenir si possible, détecter sa réalisation, se garantir sont des aspects permanents du métier de banquier, lequel prête l'argent d'autrui, opère avec des marges étroites et dispose de fonds propres très limités au regard de la masse des capitaux qu'il gère. L'analyse traditionnelle distingue différents types de risques : le risque général (crise mondiale, guerre...), le

105 Art. 125 AUS du 15 décembre 2010.

106 REY (A.), GRAND ROBERT de la langue française, version électronique 2.0, Le Robert/SEJER, 2005, www.lerobert.com, V° investisseur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

risque professionnel (crise affectant une branche d'activité : agriculture, énergie, immobilier) et le risque de l'entreprise. Elle doit être complétée par l'apparition plus récente du risque né de l'endettement excessif de certains pays, appelé risque-pays ou risque souverain107.

Pour pallier l'éventuelle insolvabilité de son débiteur, le banquier essaie de se garantir par ce que l'on appelle des « sûretés ». Celles-ci ne sont pas essentielles à la décision du crédit; plus importante est la confiance que le banquier accorde à son client. Elles n'en assurent pas moins une certaine protection en exerçant notamment sur le débiteur une action psychologique qui doit l'aider à respecter scrupuleusement ses engagements. En l'espèce, le nantissement constitue cette garantie. Normalement, les biens donnés en sûreté sont des actifs corporels tels que des biens immobiliers, des équipements ou des stocks. L'apport des droits de propriété intellectuelle en garantie d'un prêt peut contribuer à augmenter le montant de celui-ci. Lorsque l'emprunteur engage ses brevets, ses marques ou ses oeuvres protégées par le droit d'auteur, la valeur des biens donnés en garantie croît, et avec elle, les chances d'obtenir le montant recherché. Certaines banques utilisent aussi les actifs de propriété intellectuelle comme instrument de renforcement du crédit. Devant le nombre croissant d'opérations de financement qui sont ainsi appuyées par des droits de propriété intellectuelle et l'augmentation des sommes liées à la concession de licences de propriété intellectuelle, Wall Street et les marchés financiers du monde entier commencent à manifester de l'intérêt108.

B- Le nantissement, un moyen de crédit

Littéralement, le crédit est l'influence dont jouit une personne ou une chose auprès de quelqu'un, par la confiance qu'elle inspire. Plus encore, c'est la confiance qu'inspire quelqu'un, sa réputation de solvabilité109. Désormais, le crédit ne repose plus sur la confiance, elle est une opération financière. En effet, c'est l'opération par laquelle une personne met une somme d'argent à la disposition d'une autre, et par extension, le crédit est cette somme. La définition qui en est donnée par le droit commercial est encore plus large dans la mesure, constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une

107 BURGARD (J. J.), « Crédit», in Encyclopaedie Universalis 2010, Logiciel Encyclopaedia Universalis, Paris 2010.

108 LONGCROFT (L.), « Propriété intellectuelle et financement - une introduction », in Magazine de l'OMPI, septembre 2008, http://www.wipo.int/wipo_magazine/fr/2008/05/article_0001.html, consulté le 30 mars 2014 à 19H 00.

109 REY (A.), GRAND ROBERT de la langue française, version électronique 2.0, Le Robert/SEJER, 2005, www.lerobert.com, V° crédit.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

autre personne ou prend dans l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement ou une garantie110.

En France, la loi du 24 janvier 1984, qui régit l'activité bancaire, définit le crédit comme une opération de banque ne pouvant être effectuée « à titre habituel » que par des sociétés spécialement agréées comme « établissements de crédit ». Ces derniers jouissent donc du monopole de ces opérations. Ils constituent six catégories. Quatre sont autorisées à recueillir des dépôts à vue: les banques, les banques coopératives ou mutualistes (Crédit agricole, banques populaires, Crédit mutuel, Crédit coopératif), les caisses d'épargne, les caisses de crédit municipal. Les deux autres catégories - sauf exceptions définies par des textes particuliers ou lors de leur agrément - ne peuvent faire que du crédit: sociétés financières et institutions financières spécialisées (Crédit foncier de France, Crédit national, Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises, etc.). Certains organismes d'État peuvent également faire du crédit dans certaines conditions: Trésor public, Caisse des dépôts et consignations, Poste111.

La question que l'on se pose est celle de savoir en quoi le nantissement constitue un moyen de crédit. Le crédit suppose un minimum de confiance, une confiance en la solvabilité de son partenaire économique. Or nantir ses droits de propriété intellectuelle, notamment lorsque la valeur de ceux-ci est certaine, permet d'assurer au banquier un minimum de sécurité. Une fois la sensation de sécurité acquise, il devient plus évident pour le banquier ou le créancier potentiel de prêter.

Comme on l'a souligné, de plus en plus d'entreprises, utilisent leurs droits de propriété intellectuelle comme une source de crédit, et de plus en plus d'institutions financières réalisent des opérations dans lesquelles des droits sont donnés en sûreté. Une institution112 des Nations Unis mène des travaux avec ses Etats membres afin de moderniser les pratiques en matière de financement garanti et de permettre aux titulaires de droits de propriété intellectuelle d'obtenir des crédits dans de bonnes conditions de coût. Selon cette institution, pour rentabiliser les droits de propriété intellectuelle d'une entreprise, il convient que ces droits soient pris en compte lors de l'élaboration du plan de développement113 de ladite entreprise. En effet, les connaissances nouvelles ou originales et l'expression créative d'idées constituent un élément moteur des entreprises florissantes du XXIe siècle. Par conséquent, la protection de ces connaissances et expressions créatives contre une

110 GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de), « lexique des termes juridiques », Dalloz, 12e éd., 1999, p. 162, V. crédit (opérations de).

111 BURGARD (J. J.), « Crédit», in Encyclopaedie Universalis 2010, Logiciel Encyclopaedia Universalis, Paris 2010

112 Commission des Nations Unis pour le droit commercial international (CNUDCI).

113 Le plan de développement est entendu comme étant un mécanisme permettant de s'assurer que les ressources ou actifs d'une entreprise sont employés utilement dans toutes les activités afin d'acquérir et de conserver un avantage concurrentiel sur le marché.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

divulgation involontaire ou l'utilisation non autorisée par des concurrents joue un rôle de plus en plus décisif dans l'acquisition et la conservation d'un avantage concurrentiel.

Convaincre un créancier d'octroyer un crédit nécessite, de la part du dirigeant d'une entreprise souhaitant nantir ses droits de propriété intellectuelle, de répondre à un ensemble de questions. C'est notamment celles de savoir quels actifs de propriété intellectuelle l'entreprise détient, quelle est la situation de son porte feuille de propriété intellectuelle, comment l'entreprise prévoit protéger ses actifs de propriété intellectuelle, Quel est le rôle des actifs de propriété intellectuelle dans la réussite de l'entreprise. Toutes ces questions visent à éclairer l'investisseur potentiel non seulement sur les risques éventuels qu'il court en investissant, mais également sur la valeur de la garantie qu'il a.

Pour une entreprise en fonctionnement, le nantissement des droits de propriété intellectuelle joue donc un double rôle: il est d'une part une garantie pour les investisseurs de par la valeur des droits nantis, et d'autre part un outil facilitant l'accès au crédit grâce à la confiance qu'il instaure entre le créancier et le débiteur. Le recours au nantissement pour obtenir du crédit n'est pas propre aux entreprises en fonctionnement. L'intérêt de ce recours est tout aussi grand pour les entreprises qui traversent des moments difficiles.

§ 2. Le nantissement des droits de propriété intellectuelle et les entreprises en difficulté

L'entreprise est l'unité économique qui implique la mise en oeuvre de moyens humains et matériels de production ou de distribution de richesses reposant sur une organisation préétablie. Elle est une personne morale au sens du droit à partir du moment qu'elle remplie toutes les conditions exigées pour sa constitution. En tant que telle, elle nait, vit et meurt. Il n'est donc pas rare de voir une entreprise traverser un certain nombre de difficultés qui menace son existence. Ainsi, une entreprise d'apparence prospère se trouve toujours sous la menace de sérieuses difficultés114. Le nantissement intervient donc comme un moyen de financement du redressement de l'entreprise (A) quand le sauvetage est encore possible, ou plus encore comme un moyen de rachat de l'entreprise (B).

114 Il suffit, par exemple, qu'un nouveau brevet soit déposé et exploité pour que sa production soit à terme moins compétitive, ou que survienne une crise économique ou une mésintelligence entre les associés.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

A- Un outil de financement du redressement

Les facteurs de défaillance d'une entreprise peuvent être d'origine interne ou externe à celle ci115. Les facteurs interne tiennent ou bien aux dirigeants ou bien à la production, ou bien encore à l'état financier de l'entreprise. Les facteurs externes quant à eux n'ont qu'une faible incidence - sauf exception - sur les défaillances des entreprises, et ils correspondent aux variations de la politique du crédit, aux évènements aléatoires affectant l'économie (crises sectorielles, régionale ou nationale), ou à la défaillance d'un débiteur important ou de plusieurs d'entre eux. Les signes extérieurs des difficultés que traverse une entreprise sont variés et vont depuis l'apparition de certains déséquilibres ou difficultés jusqu'aux reports d'échéances, un règlement tardif des impôts, taxes et cotisations sociales, l'inscription de privilèges, de protêts, un recours permanent au découvert bancaire ou encore des cessions d'actifs, une paralysie des organes de gestion etc... Chacune des causes spécifiques entraîne son lot de conséquences, et l'accumulation des facteurs d'aggravation financière et sociale désespérée.

Quoi qu'il en soit, le droit de procédure collectives d'apurement du passif OHADA retient une définition restrictive de l'entreprise en difficulté dans le cadre de ses conditions d'ouverture et incluant à la fois l'état de cessation des paiements ainsi que la situation difficile mais non irrémédiablement compromise116. Il ressort de l'AUPCAP que trois procédures sont envisageables quand l'entreprise traverse des difficultés. Il s'agit du règlement préventif, du redressement judiciaire et de la liquidation des biens. Le concordat n'intervient cependant que dans les deux premiers cas, parce que l'entreprise peut encore être sauvée.

Le sauvetage de l'entreprise reste la priorité, et c'est dans cette optique que peuvent être nantis les droits de propriété intellectuelle. Le nantissement permettra d'avoir des capitaux frais, permettant ainsi à l'entreprise d'éponger sinon la totalité de son passif, du moins une partie conséquente. C'est notamment le cas lorsque la valeur des droits nantis est importante. Nantir les droits de propriété intellectuelle peut aussi faire partie des propositions que le dirigeant de l'entreprise fait dans le concordat117. La recherche de fonds peut conduire le débiteur à céder ou à

115 POUGOUE (P. G.) et KALIEU (Y.), L'organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA, P.U.A, 1999, p. 19 et 20.

116 Art. 2 alinéas 2 et 4 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif OHADA.

117 Le concordat est le document qui comporte l'ensemble des mesures de redressement envisagés par le débiteur. De la qualité du concordat dépend l'ouverture de la procédure de redressement. Il est alors important que le concordat soit sérieux.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

louer les actifs de l'entreprise, et emprunter les fonds118. Sur ce dernier point, c'est-à-dire l'emprunt des fonds, il n'est plus nécessaire de rappeler l'importance de la relation de confiance qui doit exister entre le prêteur et le débiteur, ni la nécessité de sécuriser le contrat de prêt par un nantissement.

Quand l'ensemble des mesures visant le sauvetage de l'entreprise est épuisé, et qu'aucun résultat positif n'est observé, on songe souvent à la liquidation des biens. Dans cette hypothèse, les droits de propriété intellectuelle peuvent constituer une garantie de rachat de l'entreprise.

B- Une garantie de rachat de l'entreprise

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle peut aussi servir à garantir le financement d'un rachat ou d'une reprise d'entreprise et ce, qu'il s'agisse d'une acquisition, d'un LBO119 ou d'autres types de financement, dès lors qu'un banquier ou financier vient prêter de l'argent à des personnes physique ou morales.

Une reprise d'entreprise est l'achat du capital, ou du moins de la majorité du capital d'une entreprise existante par une personne, ou un groupe de personnes, ou une autre entreprise120 qui en assureront la gestion. Dans le cas d'une reprise d'entreprise par ses salariés, les repreneurs sont une partie (généralement les cadres dirigeants), voire la totalité des salariés existants de l'entreprise. Comme en général ils ne disposent que d'une petite partie des capitaux nécessaires, le complément est habituellement apporté par un organisme financier spécialiste de ce genre d'opérations (banque d'investissement ou fonds de capital-investissement par exemple). Cet apport extérieur comporte généralement une participation au capital et/ou un prêt121.

Le leveraged buy-out, abrégé en LBO, terme anglais pour acquisition avec effet de levier, ou encore acquisition par emprunt122 ou rachat d'entreprise par endettement123, est une technique financière parfois utilisée pour acheter une entreprise. Le « LBO » consiste à financer une fraction du rachat d'une entreprise en ayant recours à l'endettement bancaire ou obligataire, ce qui permet

118 EBANGA KANE (P.), « La nature juridique du concordat du redressement judiciaire dans le droit des affaires OHADA », in Juridis n° 50, p.109 et s., Ohadata D-08-23.

119 Levered buy-out.

120 Il s'agit alors du domaine des fusion-acquisitions.

121 http://fr.wikipedia.org/wiki/Reprise_d%27entreprise, consulté le 1er avril 2014 à 12H08.

122 MENARD (L.) et al. Dictionnaire de la comptabilité et de la gestion financière, 3e éd., Montréal, Institut canadien des comptables agréés, version électronique, c2011.

123 Idem.

45

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

d'augmenter la rentabilité des capitaux propres. La dette d'acquisition, bancaire ou non, est remboursée par une ponction plus importante sur les flux de trésorerie de la société achetée124. Les banques jouent un rôle primordial dans les opérations de LBO puisque ce sont elles qui assurent la plus grande partie de l'investissement. La plupart des banques ont donc développé des services spécialisés en financement LBO. Dans le cadre d'opération de LBO mettant en jeu des montants significatifs, les banques syndiquent le financement, c'est-à-dire qu'elles redistribuent une partie de l'emprunt qu'elles ont garanti à un tour de table de financiers (généralement d'autres banques) par cession ou transfert de créances.

Dans chacune de ces hypothèses de rachat, le rôle du banquier est indéniable, corrélativement, celui que doit jouer le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Ils garantissent ainsi les investissements des différents organes financiers intervenant soit dans la reprise, soit dans l'opération de LBO.

Conclusion du Chapitre II

Il n'est aucun doute que les droits de propriété intellectuelles sont désormais un outil qui est mis à la disposition des créanciers et qui leur permettra d'obtenir du crédit. Ces droits sont un important moyen de financement pour elle. Très usité dans d'autres continents, ils prennent de plus en plus de l'importance en Afrique. Le législateur OHADA a à cet effet mis en place les règles de prise de nantissement. Ainsi, il ressort de là que, tout créancier doit, pour prendre un nantissement, s'assurer d'abord de l'existence des droits à nantir, ensuite de déterminer la valeur desdits droits. Ces éléments constituent donc les préalables à la prise de nantissement. Ils contribuent à atteindre la finalité du nantissement qui s'apprécie à un degré différent selon que l'on se trouve dans les entreprises en fonctionnement ou dans les entreprises en difficulté.

124 http://www.lesechos.fr/finance-marches/vernimmen/definition_flux-de-tresorerie-disponible.html#xtor=SEC-3168, consulté le 1er avril 2014 à 12H10.

46

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Conclusion de la Ie partie

L'AUS entré en vigueur en date du 15 décembre 2010 est venu rendre autonome le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Autrefois rattaché au fonds de commerce, les droits de propriété intellectuelle sont désormais des droits à part entière, susceptibles d'être nantis. Cette autonomisation est passée par la consécration d'un régime juridique autonome, détaché de celui du fonds de commerce. Ce nantissement obéit désormais à des conditions bien précises, et ce qu'elles soient de fond ou de forme. Ainsi le contenu dudit nantissement a été clairement fixé, tout comme le formalisme qui entoure sa constitution. Par ailleurs, la consécration d'un tel nantissement ne pouvait aller sans avoir d'effets. C'est concrètement dans la pratique que les effets pourraient se faire ressentir, car désormais le nantissement des droits de propriété intellectuelle pourrait aussi bien permettre de financer une entreprise en fonctionnement, que sauver celle qui est en difficulté.

Le régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle a ainsi connu une autonomisation. Cependant, à regarder de près, on se rend bien compte que malgré le travail fait, des lacunes persistent. L'autonomisation totale à laquelle on se serait attendue, n'est pas atteinte. Par conséquent, si l'autonomie du régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle semble exhaustive, tel n'est pas le cas des régimes spécifiques qui s'avèrent imprécis (IIe Partie).

47

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

IIe PARTIE : L'IMPRECISION DES REGIMES
SPECIFIQUES DE CHACUN DES DROITS DE
PROPRIETE INTELLECTUELLE

 
 
 
 
 
 
 
 

48

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

La propriété intellectuelle est généralement divisée en deux secteurs : la propriété industrielle qui, d'une façon générale, protège les inventions et le droit d'auteur qui protège les oeuvres littéraires et artistiques.

La propriété industrielle prend des formes très variées. Il s'agit notamment des brevets protégeant les inventions et des dessins et modèles industriels, qui sont des créations esthétiques définissant l'apparence de produits industriels. La propriété industrielle couvre aussi les marques de produits, les marques de services, les schémas de configuration de circuits intégrés, les noms commerciaux et les dénominations commerciales ainsi que les indications géographiques, et la protection contre la concurrence déloyale.

Le droit d'auteur vise les créations artistiques, telles que les livres, la musique, les peintures et les sculptures, les films et les oeuvres fondées sur la technologie telles que les programmes d'ordinateur et les bases de données électroniques. Dans la plupart des langues européennes autres que l'anglais, le droit d'auteur est désigné par les «droits de l'auteur». L'expressiondroits d'auteur vise l'acte fondamental qui, en ce qui concerne les créations littéraires et artistiques, ne peut être effectué que par l'auteur ou avec son autorisation. Il s'agit de la réalisation de copies de l'oeuvre. L'expression droits de l'auteur vise le créateur de l'oeuvre artistique, son auteur. Cette expression souligne ainsi le fait, reconnu par de nombreuses législations, que l'auteur détient certains droits spécifiques sur son oeuvre que lui seul peut exercer (tels que le droit d'empêcher une reproduction déformée). D'autres droits (tels que le droit de réaliser des copies) peuvent être exercés par des tiers, par exemple un éditeur el l'auteur a concédé une licence cet effet.

Qu'il s'agisse de droit d'auteur ou de droit de propriété industrielle, le nantissement est la garantie qui convient d'être prise à leur égard. C'est dans ce sens que le législateur OHADA a clairement encadré les règles qui entourent cette sûreté. Il a consacré un nantissement des droits de propriété intellectuelle autonome en réglementant les conditions générales de prise de ce nantissement. Or il se trouve qu'il n'est pas très aisé d'encadrer parfaitement ce nantissement. La difficulté nait en réalité du système OHADA lui-même, de la technique mise en place pour diffuser le droit.

Pour la diffusion de son droit, l'OHADA a eu recours à un ensemble d'instruments législatifs supranationaux portant sur diverses matières et appelés actes uniformes125. Ces actes uniformes obéissent à une technique bien particulière. Ainsi donc le principal objectif de l'OHADA est de rechercher l'uniformisation maximum. Le Traité a d'ailleurs institué un processus rigoureux à cette

125 Pour une vue d'ensemble sur l'OHADA, MATOR (B.), PILKINGTON (N.), SELLERS (D.), THOUVENET (S.), le droit uniforme des affaires issu de l'OHADA, Litec, 2004 ; TIGER (P.), Le droit des affaires en Afrique, PUF, coll. « Que sais-je? », 3e éd. 2001.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

fin. Il s'agit de l'uniformisation. C'est un principe qui connait toutefois des tempéraments, l'harmonisation en l'occurrence.

Il convient, pour mieux cerner ces techniques, de les définir. Le Pr ISSA -SAYEGH126 définit ces deux méthodes en ces termes: « l'harmonisation ou coordination... est l'opération consistant à rapprocher les systèmes juridiques d'origine et d'inspiration différentes (voire divergentes) pour les mettre en cohérence entre eux en réduisant ou en supprimant leurs différences et leurs contradictions de façon à atteindre des résultats compatibles entre eux et avec les objectifs communautaires recherchés », tandis que « l'uniformisation ou unification du droit est, a priori, une forme plus brutale mais aussi plus radicale d'intégration juridique. Elle consiste à instaurer, dans une matière juridique donnée, une réglementation unique, identique en tous points pour tous les Etats membres, dans laquelle il n'y a pas de face, en principe, pour des différences ». Comme on l'a souligné, l'OHADA a pris en compte les deux techniques, et des répercussions se font ressentir dans bien d'actes uniformes, et en particulier l'AUS du 15 décembre 2010.

Ainsi donc, la propriété littéraire et artistique a fait l'objet d'une harmonisation, tandis que la propriété industrielle a fait l'objet d»une uniformisation. Toute chose qui a forcément eu un impact sur les régimes particuliers des différents des différents droits de propriété intellectuelle. Le nantissement des droits de propriété littéraire et artistique s'en trouve complexifié (Chapitre I) d'une part, et, d'autre part, la simplification que devait apporter l'uniformisation des droits de propriété industrielle est imparfaite (Chapitre II).

49

126 ISSA-SAYEGH (J.), « L'intégration juridique des Etats africains de la zone franc », Revue PENANT n° 823 janvier - avril 1997, p. 5 et s.

50

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE

L'harmonisation est l'opération consistant à rapprocher les systèmes juridiques d'origine et d'inspiration différentes pour les mettre en cohérence entre eux en réduisant ou en supprimant leurs différences et leurs contradictions de façon à atteindre des résultats compatibles entre eux et avec les objectifs communautaires recherchés. En matière de droit d'auteur, non seulement presque chaque Etat-membre dispose de sa propre législation mais, de plus, sur certains points, ces textes nationaux ne paraissent pas conformes à la législation régionale. Ainsi donc, le droit d'auteur fait l'objet d'une harmonisation (Section I). Cette dernière ne va pas sans causer de problème, ce qui conduit à réaménager le régime de nantissement du droit d'auteur (Section II).

Section 1 : La justification de la complexité : l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins

Dans le domaine des sûretés, l'Acte uniforme n'a pas une compétence exclusive, mais une compétence sinon concurrente, du moins partagée avec les législations nationales, qui peuvent se déployer pour autant qu'elles ne lui sont pas contraires. Dans l'ensemble des Etats-membres aussi bien de l'OAPI que de l'OHADA, on peut constater que le droit d'auteur a fait l'objet d'une harmonisation (Paragraphe I). Cette méthode, loin d'être parfaite, et, pour cela, entraine un certain nombre de conséquences (Paragraphe II).

§ 1. Le constat de l'harmonisation du droit d'auteur

L'OHADA compte à la date d'aujourd'hui dix-sept127 Etats membres, l'OAPI quant à elle en compte seize128 . Cependant, à quelques exceptions près, les Etats membres de l'OAPI sont

127 Il s'agit des Etats suivants: Bénin, Burkina Faso, Cameroun, République centrafricaine, Comores, République du Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Niger, République démocratique du Congo, Sénégal, Tchad et Togo.

51

52

53

54

55

56

57

58

59

60

61

62

63

64

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

également membres de l'OHADA. La réglementation en matière de droit d'auteur fait l'objet d'une simple harmonisation, de sorte que, sur ce point, c'est principalement la législation nationale de chaque Etat membre qu'il faut consulter129. En matière de droit d'auteur, l'OHADA applique la technique de renvoi aux lois nationales (A), ce qui n'est pas sans poser de difficultés dans sa mise en oeuvre (B).

A- Le renvoi aux lois nationales

Le droit de la propriété industrielle a fait l'objet d'une uniformisation quasi parfaite, de telle sorte qu'il est difficile pour les Etats de légiférer encore sur la question. Ceci n'a pas été le cas pour le droit d'auteur, dont l'harmonisation a conduit les organisations à procéder à un renvoi, du moins pour ce qui concerne certains aspects, aux textes nationaux, quant en ce qui concerne les règles qui régissent la matière. En réalité, l'harmonisation postule l'élaboration de normes ayant un niveau d'identité ou d'unité de premier degré. Elle opère un niveau de similitude législative ou réglementaire qui laisse place à la survie de certaines spécificités nationales. Autant l'entreprise d'harmonisation puise dans le Etats impliqués, autant l'ossature juridique qui en résulte laisse en friche de nombreux aspects qui seront régis par des normes propres à chacun de ces Etats130.

Il est aisé de constater qu'il existe presqu'autant de législation nationale sur la protection du droit d'auteur, que d'Etats membres de l'OAPI. C'est notamment le cas du Benin131, du Burkina Faso132, du Togo133, de la République Démocratique du Congo134, de la Cote d'Ivoire135, du Cameroun136... Ces différentes lois nationales peuvent être considérées comme des lois supplétives complétant l'annexe VII de l'accord l'ABR. Par ailleurs, comment interpréter les règles relatives au droit d'auteur figurant directement dans l'ABR et censées s'appliquer directement dans les Etats membres? Ne s'agit-il pas de règles spéciales? La législation OHADA renvoie d'ailleurs à cette législation spéciale concernant justement le nantissement des droits de propriété intellectuelle. Les

128 Bénin, Burkina Faso, Cameroun, République centrafricaine, République du Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad, Togo.

129 NGOMBE (L. Y.), « A propos de la supranationalité de la législation de l'organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) sur le droit d'auteur», RDPI, n° 176, octobre 2005, p. 9.

130 KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709, 2008.

131 Loi n° 2005 - 30 du 05avril 2006 relative à la protection du droit d'auteur et des droits voisins en République du Bénin.

132 Loi n° 032 - 99/AN portant protection de la propriété littéraire et artistique.

133 Loi n° 91 - 12 portant protection du droit d'auteur, du folklore et des droits voisins.

134 Ordonnance-loi n° 86-033 du 05 avril 1986 portant protection des droits d'auteurs et des droits voisins.

135 Loi du 25 juillet 1996 portant protection des droits d'auteurs et des droits voisins.

136 Loi n°2000/11 du 19 décembre 2000 relative au droit d'auteur et droit voisin du droit d'auteur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

lois nationales sur le droit d'auteur qui se conforment aux dispositions de l'Annexe VII de l'ABR ou les complètent doivent, de même, être considérées comme des règles spéciales dérogeant au droit

commun137.

En outre, il est important d'avoir présent à l'esprit que ces renvois aux lois nationales pourraient à l'avenir être moins nombreux si les questions directement traitées dans le texte national s'étendent138. L'adage specialia generalibus derogant pourra alors permettre de consacrer la priorité d'une convention internationale abordant des questions particulières (en l'occurrence la législation OAPI) sur celle abordant celle des questions plus générales (ici la législation de l'OHADA)139. Cette solution ne fait pas l'unanimité140, mais sur la question à laquelle on s'intéresse, elle parait la mieux adaptée. Les renvois divers aux règles particulières autorisent, d'ailleurs, à considérer qu'il y a souvent compétences distributives des deux législations avec comme principe l'application préférentielle des règles de la législation de la propriété intellectuelle quand elles existent.

Comme il a été souligné, si les textes sur la propriété intellectuelle - du moins ceux relatifs aux brevets et aux marques - ont fait l'objet d'une unification (ou presque), le droit d'auteur ne parait que partiellement harmonisé. Il est en tout cas possible, en l'état actuel des législations de constater des limites à l'harmonisation, du moins des difficultés liées à la technique d'harmonisation.

B- Les difficultés liées à la technique d'harmonisation

La méthode d'harmonisation pose deux séries de difficultés, la première étant relative au contenu des règles qui font l'objet d'harmonisation. La seconde, quant à elle, est relative à l'autonomie des Etats, et partant, aux risques qui y sont liés.

1- Les difficultés liées au contenu des règles

A l'opposé de l'uniformisation qui prône une identité de contenu législatif ou réglementaire de second degré, l'harmonisation postule l'élaboration de normes ayant un niveau d'identité ou d'unité

137 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4 p. 2553 et s.

138 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4 p. 2553 et s. n°18.

139 MALAN (A.), la concurrence des conventions internationales dans le droit des conflits, PUAM, 2005, n°55.

140 BRIRE (C.), les conflits de conventions internationales en droit privé, LGDJ, 2001, n°276.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

de premier degré. Il faut noter que la similitude que produit toute harmonisation est moins élevée que celle d'une uniformisation. Les normes harmonisées ne couvrent pas tous les aspects du domaine qu'elles régissent et sont notamment complétées par des règles nationales dont la similitude est loin d'être garantie. C'est ainsi que survivent les divergences normatives entre les Etats impliqués dans une entreprise d'harmonisation. Ce sont les éléments particuliers aux divers intervenants qui caractérisent l'harmonisation, la distinguant dès lors de l'uniformisation.

En d'autres termes, l'harmonisation supprime certes les divergences, mais elle favorise, l'existence de spécificités législatives ou réglementaires nationales. Ce faisant, elle laisserait aux autorités nationales certains aspects du droit qui, parfois, constituent des pierres d'achoppement lors d'une entreprise d'intégration juridique. En ce qu'elle exige un niveau d'unité législative ou réglementaire inférieur aux standards de l'uniformisation, l'harmonisation serait ainsi plus aisément réalisable141.

D'une manière générale, en matière de droit d'auteur, les textes spéciaux à appliquer seront les lois nationales des Etats membres. La consultation de ces lois nationales ne permet pas de trouver de dispositions relatives à des règles particulières applicables aux sûretés, précisément au nantissement, des droits de propriété littéraire et artistique. Par conséquent, c'est, finalement, le seul texte OHADA qui sera applicable142. Exit les difficultés liées au contenu des règles, Il convient de prendre à présent en compte, celles tenant à l'autonomie des Etats.

2- Les difficultés tenant à l'autonomie des Etats

L'article 10 du Traité instaurant l'OHADA prévoit que les actes uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les Etats membres, nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antérieure ou postérieure. Cette formule est si forte qu'elle vient porter atteinte à l'autonomie juridique des Etats membres de l'OHADA. L'autonomie des législations nationales cessant là où commence la contrariété à l'acte uniforme, il faut s'entendre, selon les termes du professeur GRIMALDI143, sur ce qu'est cette contrariété. Selon cet auteur, la loi nationale ne peut certainement pas opérer contra pactum, contredire l'acte uniforme: par exemple retirer au créancier nanti le droit de préférence, que l'Acte attache au nantissement des droits de propriété intellectuelle. En sens opposé, elle peut assurément opérer secundum pactum, sur renvoi, sur

141 KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709, 2008.

142 NGOMBE (L. Y.), « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de le concurrence des législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006 - 4 p. 2557 et s. n°23.

143 GRIMALDI (M.), L'acte uniforme portant organisation des sûretés, LPA n°205, 13 octobre 2004, p. 30, n°4.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

délégation de l'Acte uniforme : soit pour réglementer des sûretés que l'Acte uniforme lui abandonne expressément, telle nantissement des droits de propriété intellectuelle.

Par ailleurs, une autre crainte pourrait être envisageable, celle relative aux effets de l'autonomie reconnue aux Etats parties. En effet, elle tient au risque que les législations nationales, sans contredire l'Acte uniforme, ne brise la cohérence de l'ensemble. L'Acte tempère ce risque à l'endroit où la cohérence s'impose comme un impératif. C'est notamment le cas en ce qui concerne le classement des sûretés144.

L'harmonisation du droit d'auteur a entrainer un certain nombre de conséquences sur son régime juridique.

§ 2. Les conséquences de l'harmonisation du droit d'auteur sur son régime juridique

L'harmonisation du droit d'auteur a eu de conséquences graves sur le régime du nantissement des droits d'auteur. Ainsi, les règles relatives à la prise de ce type de nantissement s'en trouvent altérées (A), tout comme le formalisme qui l'accompagne (B).

A- L'altération des règles de prise de nantissement

Apprécier l'altération qu'a subit le nantissement des droits d'auteur du fait de son harmonisation, n'est possible qu'en confrontant ce régime spécifique, au régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle. En réalité, la question que l'on pourrait se poser ici, est celle de savoir, à quoi renvoi la prise de nantissement des droits d'auteur, quand on sait que les critères de protection du droit d'auteur diffèrent de ceux d'un créateur. En effet, le principe retenu par le texte régional et adopté par les lois nationales est celui de la protection du seul fait de la création. Ainsi un auteur n'aura pas forcément un document constatant son droit sur sa création. En revanche lorsque le constituant est le cessionnaire, il est en principe en mesure de produire un « titre » puisqu'un contrat écrit145 a dû être conclu entre l'auteur et lui.

144 Voir dans ce sens l'article 126 AUS du 15 décembre 2010.

145 C'est du moins ce qu'exigent le texte régional et les lois nationales sur le droit d'auteur.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

La propriété incorporelle de l'oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel qui en est le support. Comme nous le fait remarquer la Cour de Cassation française146, la remise de l'objet matériel à un tiers n'implique pas la divulgation de cette oeuvre. Dans la plupart des cas, des litiges peuvent opposer le propriétaire de l'objet matériel et le titulaire des droits d'auteur, en particulier, l'exercice du droit patrimonial. Le droit romain distinguait les notions d'opus et d'opéra. L'opus désignait la chose matérielle, la copie ou le manuscrit dont la possession peut être transférée, tandis qu'opéra désigne un discours, c'est-à-dire une « affaire» que l'éditeur ne peut conduire qu'au nom de l'auteur. L'exemplaire d'après lequel l'éditeur fait imprimer un ouvrage de l'auteur (opus) et appartient entièrement à l'éditeur après que celui-ci l'a acquis sous forme de manuscrit ou d'imprimé pour en faire tout ce qu'il veut et ce qui peut être fait en son nom. Mais l'usage qu'il ne peut en faire qu'au nom d'un autre (c'est-à-dire l'auteur) est une affaire (opéra) que cet autre effectue.

Selon la loi camerounaise147 en son article 21 alinéa 1er : « La propriété d'une oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Sauf stipulation contraire, l'acquéreur de l'original ou d'un exemplaire d'une n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun des droits d'auteur prévus par la présente loi. Ces droits subsistent en la personne du premier titulaire du droit d'auteur ou de ses ayants-cause qui ne pourront toutefois exiger de l'acquéreur la mise à leur disposition dudit objet. » Cet article traduit effectivement de la dichotomie entre d'une part, les droits intellectuels rattachés à l'oeuvre148 et les droits corporels sur l'oeuvre. Le législateur français va dans le même sens et cela à travers l'article L.111-3 du Code de la Propriété Intellectuelle149.

En effet, on semble être en présence de deux droits autonomes. Ainsi, la propriété d'une oeuvre ne suit pas celle de son support. La difficulté viendra le plus souvent de ce que le comportement du propriétaire est susceptible de troubler les droits moraux de l'auteur. Les finalités du droit moral et du droit de propriété ne sont pas à mettre sur le même plan. Le droit de propriété veut assurer l'emprise privative, absolue d'un sujet sur l'objet. Le droit moral offre à l'auteur le droit au respect de son oeuvre, le droit de l'utiliser comme il le conçoit150. En prenant l'exemple d'un logiciel, il faut préciser que celui-ci ne doit pas être confondu avec son support. De même, l'oeuvre d'art ne saurait

146 Cass. 1ere, 29 novembre 2005, www.atoute.org. Inédit.

147 Loi du 19 décembre 2000 sur le droit d'auteur, op.cit.

148 En effet, une partie peut être cédée.

149 L'alinéa 1er fait ressortir que la propriété incorporelle définie par l'article L.111-1 est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Il énonce en ces termes que : « L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que les attributs d'ordre patrimonial. ».

150 C'est la distinction entre le droit « introverti» et le droit «extraverti ».

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

se réduire à son support matériel, ni s'identifier à lui. Il est donc aisé de constater que lorsque le logiciel ou toute autre oeuvre de l'esprit fait l'objet d'un contrat de nantissement, cela pourrait provoquer des mésententes entre le constituant et le créancier.

En tout état de cause, il doit être rappelé dans tout contrat de nantissement des droits d'auteur que ledit contrat porte sur les biens incorporels et non sur l'objet corporel. La dépossession d'un tableau ou d'une sculpture n'emportera pas ipso facto nantissement du bien incorporel. De plus, la dépossession du support matériel ne saurait faire obstacle à l'exercice du droit d'auteur151. Il s'avère que ce contrat de nantissement se limite aux droits patrimoniaux accordés à l'auteur. Il va aussi falloir examiner toutes les prérogatives accordées à l'auteur sur son activité créative, constituant ainsi les données secondaires.

B- L'altération du formalisme

En droit OHADA, dans la forme, le nantissement est passé du réel au solennel et doit, par conséquent à peine de nullité, être constaté par un écrit quelque que soit la valeur de la créance engagée, qu'il s'agisse d'un nantissement en matière civile ou d'un nantissement conclu en matière commerciale. Une des exigences de cet acte est que l'écrit doit désigner impérativement les créances nanties et, mieux si des créances sont futures il faut absolument que celles-ci soient individualisées au jour de l'acte. Dans la mesure où il s'agit d'affectation en garantie d'une obligation les créances garanties doivent également être désignées dans l'acte constitutif. Ceci est nécessaire et l'acte uniforme de l'OHADA précise que « le créancier nanti acquiert un droit sur la créance dès la naissance de celle-ci »152. Il peut être sous seing privé ou être constaté par acte authentique. Sa validité repose également sur la signature des deux parties. Par conséquent, la seule signature du constituant ne suffit pas à le rendre valable, si elle n'est pas accompagnée de la signature du bénéficiaire. En matière fiscale, son enregistrement ne supporte qu'un droit fixe, il a d'ailleurs été abandonné de nos jours. Le nantissement est une sûreté réelle153.

Le texte OHADA prévoit que tout nantissement portant sur des droits de propriété intellectuelle doit satisfaire aux obligations de publicité du texte OHADA et du texte relatif aux propriétés intellectuelles. Ainsi, en matière de propriété industrielle, s'appliqueront les formalités prévues par

151 NGOMBÉ (Y. L.), « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OAPI et de l'OHADA : un aspect de la concurrence des législations supranationales en Afrique », op. cit. p. 2558.

152 Art. 128 AUS du 15 décembre 2010.

153 Le Juridique des Affaires, « Comprendre la notion de nantissement des meubles incorporels en droit OHADA », http://www.burkinapmepmi.com/spip.php?article18793, dimanche, 20 octobre 2013.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

l'Acte uniforme OHADA ainsi que les dispositions de l'ABR. Le créancier qui entend user de cette sûreté concernant un droit de propriété industrielle dans les Etats membres des deux organisations devra donc veiller à respecter scrupuleusement les deux législations.

En revanche, comme il a été souligné, en matière de droit d'auteur, les textes spéciaux à appliquer seront les lois nationales des Etats membres. La consultation de ces lois nationales ne permet pas de trouver de dispositions relatives à des règles particulières applicables aux sûretés, précisément au nantissement, des droits de propriété littéraire et artistique. Par conséquent, c'est, finalement, le seul texte OHADA qui sera applicable. Ainsi, l'absence de l'écrit ne sera pas sanctionnée par la nullité comme ne propriété industrielle, mais par l'inopposabilité conformément au texte de l'OHADA, texte général.

La doctrine dominante est d'ailleurs sceptique quant à la consécration d'un nantissement général portant sur la propriété littéraire et artistique. L'inexistence d'un système généralisé de publicité des droits d'auteurs et des sûretés y relatives constitue, à ses yeux, un véritable obstacle à l'efficacité de telles sûretés154. En effet, ne pouvant ni être remis matériellement au créancier en raison de leur nature incorporelle, ni faire l'objet de signification dans les mains du débiteur155 en vue d'en assurer la publicité, ces droits de propriété littéraire et artistique ne peuvent faire l'objet de sûretés opposables aux tiers. Au regard des difficultés et des conséquences qui ressortent de l'harmonisation des droits de propriété intellectuelle, Il s'avère nécessaire de réaménager le régime du nantissement des droits d'auteur.

Section 2 : Le nécessaire réaménagement du régime du nantissement du droit d'auteur

L'ensemble des problèmes auxquelles est confronté le droit d'auteur du fait de son harmonisation invite à rechercher des moyens visant sinon à les éliminer, du moins à les limiter à leur simple expression. C'est ce qui conduit à réaménager le régime du nantissement. Pour être efficace, ce réaménagement devra être accentué sur le plan régional (A), puisque c'est celui qui nous intéresse ici. On pourrait aussi se servir des législations étrangères (B), et française notamment, pour combler les lacunes éventuelles de notre propre droit régional.

154 STENGER (J.-P), « Le gage des droits de propriété intellectuelle », RDPI, 1995, n°61, p. 16 ; VIVANT M. « L'immatériel en sûreté», in Mélanges Michel Cabrillac, Paris, Dalloz, Litec, 1999, n° 1, p. 405.

155 Le débiteur n'existant pas dans le cas du droit d'auteur comme dans l'hypothèse d'un droit de créance.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

§ 1. Le réaménagement du droit régional

Le réaménagement du droit régional nécessite que l'on s'attarde sur un double aspect. Le premier aspect est sans doute l'uniformisation du droit d'auteur (A), au même titre que celui de la propriété industrielle. Le second aspect quant à lui peut être considéré comme une conséquence du premier, il s'agit de la nécessité de clairement définir le contenu du nantissement des droits d'auteur (B).

A- L'uniformisation du droit d'auteur

Pour le docteur NGOMBE156, le droit d'auteur dans les Etats membres de l'OAPI a fait l'objet d'une uniformisation inachevée. Pour cet auteur, les limites actuelles de l'harmonisation concernent aussi bien les dispositions relatives à l'existence même du droit, que les dispositions relatives à sa mise en oeuvre. Par rapport au premier point, les limites se constatent autour du champ et du contenu de la protection. Par rapport au second point, c'est-à-dire les dispositions relatives à la mise en oeuvre du droit, les limites concernent l'exploration des droits, la procédure et les sanctions. L'auteur propose donc, pour améliorer cette situation, d'étendre le champ matériel de l'harmonisation d'une part, et d'étendre le champ géographique de l'harmonisation d'autre part.

Sans être retissant aux propositions de cet auteur, on pourrait se permettre d'envisager une uniformisation du droit d'auteur. La forme d'uniformisation qui aide davantage à atteindre une uniformisation-résultat est la codification. Selon le professeur GRIMALDI, celle-ci s'entend « d'un exposé rationnel et cohérent du droit civil, d'un corpus qui, selon une heureuse expression, « réunit» et « unit» [...] et qui établit ainsi le droit commun »157. Cependant, en raison des nombreux fondements qu'elle requiert en amont, la codification n'a jusqu'ici été formellement utilisée qu'au sein d'entités étatiques d'influence romano-germanique158.

Comme on peut le constater, l'unification et l'uniformisation ne laissent guère de pouvoir substantiel aux différents acteurs législatifs nationaux dans les domaines qu'ils entendent encadrer. C'est cette exigence qui amoindrit leur portée pratique. Élaborer une législation au contenu identique dans un ensemble d'entités étatiques reviendrait à admettre que leurs sociétés, du moins les diverses élites nationales, ont des intérêts centripètes au moment de l'unification ou de l'uniformisation. Or,

156 NGOMBE (L. Y.), « le droit d'auteur dans les Etats membres de l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée ? » e.Bulletin du droit d'auteur, janvier - mars 2005.

157 GRIMALDI (M.), Codes et codifications : pour souligner le dixième anniversaire de l'entrée en vigueur du Code civil du Québec et le bicentenaire du Code Napoléonien », [2005].

158 OPPETIT (B.), « De la codification », D. chron. 1996, n°33-35.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

il semble bien que les intérêts et les valeurs défendus par une société à une période déterminée ne sont pas les mêmes que ceux approuvés dans une autre société au cours de la même période. Au surplus, dans une même société, les valeurs, les intérêts varient notamment suivant les classes sociales, l'éducation reçue, les tranches d'âges et les catégories professionnelles. Il faut toutefois noter qu'à travers la lex mercatoria et ses récents succédanés, semble émerger un système normatif commun aux opérateurs du commerce international.

En clair, l'uniformisation participe d'une approche moniste qui, traditionnellement, suppose qu'un texte international dûment ratifié par un État devienne une source directe de droit sans qu'il soit nécessaire d'en reprendre les dispositions dans une loi interne. Uniformiser les règles qui régissent le nantissement du droit d'auteur reviendrait donc à faire disparaitre les différentes lois nationales au profit d'une règle qui serait communément applicable à l'ensemble des Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI. Une fois cette perspective accomplie, il reste important de déterminer clairement le contenu du nantissement.

B- La nécessité de clairement définir le contenu du nantissement

Définir clairement le contenu du nantissement, constitue une autre étape non moins importante, du processus d'amélioration à mettre en place. En effet il s'avère nécessaire de savoir précisément quels seront les droits qui pourront faire l'objet du nantissement. L'intérêt d'une telle approche réside dans la multiplicité des droits qui sont liés à l'auteur. En effet, il est connu que l'auteur a, sur sa création, des droits moraux qui sont inaliénables, et des droits patrimoniaux sur lesquelles il peut exercer bon nombre d'actes, parmi lesquels, le nantissement. Par ailleurs il faut noter qu'il existe une certaine complication tenant au nantissement des droits d'auteur. Cette complication est précisément liée à l'oeuvre elle-même. Le problème qui se pose ici est celui de la séparation de l'oeuvre et du support.

A ce propos précisément, La propriété incorporelle de l'oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel qui en est le support. Comme nous le fait remarquer la Cour de Cassation française159, la remise de l'objet matériel à un tiers n'implique pas la divulgation de cette oeuvre. Dans la plupart des cas, des litiges peuvent opposer le propriétaire de l'objet matériel et le titulaire des droits d'auteur, en particulier, l'exercice du droit patrimonial. Le droit romain distinguait les notions d'opus et d'opéra. L'opus désignait la chose matérielle, la copie ou le manuscrit dont la

159 Cass. 1ere, 29 novembre 2005, www.atoute.org. Inédit.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

possession peut être transférée, tandis qu'opéra désigne un discours, c'est-à-dire une « affaire » que l'éditeur ne peut conduire qu'au nom de l'auteur. L'exemplaire d'après lequel l'éditeur fait imprimer un ouvrage de l'auteur (opus) et appartient entièrement à l'éditeur après que celui-ci l'a acquis sous forme de manuscrit ou d'imprimé pour en faire tout ce qu'il veut et ce qui peut être fait en son nom. Mais l'usage qu'il ne peut en faire qu'au nom d'un autre (c'est-à-dire l'auteur) est une affaire (opéra) que cet autre effectue.

Selon la loi camerounaise160en son article 21 alinéa 1er : « La propriété d'une oeuvre est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Sauf stipulation contraire, l'acquéreur de l'original ou d'un exemplaire d'une n'est investi, du fait de cette acquisition, d'aucun des droits d'auteur prévus par la présente loi. Ces droits subsistent en la personne du premier titulaire du droit d'auteur ou de ses ayants-cause qui ne pourront toutefois exiger de l'acquéreur la mise à leur disposition dudit objet. » Cet article traduit effectivement de la dichotomie entre d'une part, les droits intellectuels rattachés à l'oeuvre161 et les droits corporels sur l'oeuvre. Le législateur français va dans le même sens et cela à travers l'article L.111-3 du Code de la Propriété Intellectuelle162.

En effet, on semble être en présence de deux droits autonomes. Ainsi, la propriété d'une oeuvre ne suit pas celle de son support. La difficulté viendra le plus souvent de ce que le comportement du propriétaire est susceptible de troubler les droits moraux de l'auteur. Les finalités du droit moral et du droit de propriété ne sont pas à mettre sur le même plan. Le droit de propriété veut assurer l'emprise privative, absolue d'un sujet sur l'objet. Le droit moral offre à l'auteur le droit au respect de son oeuvre, le droit de l'utiliser comme il le conçoit163. En prenant l'exemple d'un logiciel, il faut préciser que celui-ci ne doit pas être confondu avec son support. De même, l'oeuvre d'art ne saurait se réduire à son support matériel, ni s'identifier à lui. Il est donc aisé de constater que lorsque le logiciel ou toute autre oeuvre de l'esprit fait l'objet d'un contrat de nantissement, cela pourrait provoquer des mésententes entre le constituant et le créancier.

En tout état de cause, il doit être rappelé dans tout contrat de nantissement des droits d'auteur que ledit contrat porte sur les biens incorporels et non sur l'objet corporel. La dépossession d'un tableau ou d'une sculpture n'emportera pas ipso facto nantissement du bien incorporel. De plus, la

160 Loi du 19 décembre 2000 sur le droit d'auteur, op.cit.

161 En effet, une partie peut être cédée.

162 L'alinéa 1er fait ressortir que la propriété incorporelle définie par l'article L.111-1 est indépendante de la propriété de l'objet matériel. Il énonce en ces termes que: « L'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que les attributs d'ordre patrimonial. ».

163 C'est la distinction entre le droit « introverti» et le droit «extraverti ».

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

dépossession du support matériel ne saurait faire obstacle à l'exercice du droit d'auteur164. Il s'avère que ce contrat de nantissement se limite aux droits patrimoniaux accordés à l'auteur. Il va à présent falloir examiner le réaménagement inspiré des législations étrangères.

§ 2. Le réaménagement inspiré des législations étrangères : l'exemple français

Le droit d'auteur se rapporte aux oeuvres littéraires et artistiques telles que romans, poèmes et pièces de théâtre, oeuvres cinématographiques et musicales ou encore oeuvres relevant des arts plastiques comme les dessins, les peintures, les photographies et les sculptures ainsi que les dessins et modèles architecturaux. Les droits attachés au droit d'auteur comprennent ceux des artistes interprètes ou exécutants sur leurs interprétations et exécutions, des producteurs de phonogrammes sur leurs enregistrements et des radiodiffuseurs sur leurs programmes radiophoniques ou télévisuels165. Ces biens peuvent être affectés en garantie d'une créance. En droit français, en ce qui concerne les règles applicables à la sûreté, seuls le logiciel et le film cinématographique ont fait l'objet de dispositions législatives précises. C'est en ce sens qu'il est intéressant d'analyser le contenu de l'assiette du nantissement (A.), avant d'analyser par la suite la problématique de l'adaptation du régime du nantissement français au droit OHADA (B), précisément en ce qui concerne ledit contenu.

A- Le contenu de l'assiette du nantissement

Le Code de la propriété intellectuelle n'a envisagé que le régime du nantissement de logiciels (1) et celui des films cinématographiques (2). Pour tout ce qui n'a pas été envisagé par des règles spécifiques, et conformément aux dispositions de l'article 2355 alinéa 5 du Code civil, ce sont celles relatives au gage de meubles corporels qui ont vocation à s'appliquer.

1- Le nantissement de logiciels

Transposant la directive européenne n° 91-250 du 14 juin 1991 sur la protection juridique des

164 NGOMBÉ (Y. L.), « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OAPI et de l'OHADA : un aspect de la concurrence des législations supranationales en Afrique », op. cit. p. 2558.

165 Définition donnée par l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), disponible sur www.wipo.org/about-ip/fr/.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

programmes d'ordinateur, la loi n° 94-361 du 10 mai 1994166 a prévu des dispositions spécifiques relatives au contrat de nantissement du droit d'exploitation des logiciels. L'article 7 de ladite loi, inséré à l'article L. 132-34 du Code de la propriété intellectuelle, a mis en place un système qui permet au créancier d'assurer, en toute sécurité, le financement du développement des logiciels. Assez lacunaire, l'article se contente d'énoncer que « le droit d'exploitation de l'auteur du logiciel défini à l'article L. 122-6 peut faire l'objet d'un nantissement ». Les modalités de ce nantissement ont été précisées par le décret d'application n° 96-103 du 2 février 1996167.

Lorsque le logiciel est nanti individuellement, le contrat de garantie doit être inscrit, à des fins d'opposabilité aux tiers, sur le registre spécial des logiciels tenus par l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), ce qui semble supposer qu'il soit constaté par écrit. La demande d'inscription qui peut être faite par l'une des parties à l'acte ou par un mandataire spécialement habilité, doit comporter certaines mentions telles que la désignation précise du logiciel et ses éléments, et le montant de la créance. L'inscription est valable cinq ans sauf renouvellement168. En revanche, lorsque le logiciel est nanti avec l'ensemble du fonds de commerce, le nantissement ne pourra être inscrit sur le registre spécial des logiciels tenu par l'INPI, que sur présentation du certificat d'inscription du nantissement délivré par le greffe du tribunal de commerce.

Sur la possibilité de prendre un nantissement sur les logiciels futurs, des doutes ont été émises par la doctrine. Ces doutes étant justifiés par le défaut de disposition législative. Par ailleurs, cette possibilité semble assez peu opportune en pratique car lors de l'inscription du nantissement, il est obligatoire de déterminer le code source qui comme le précise l'article R. 132-8 du Code de la propriété intellectuelle, est l'un des éléments majeurs d'identification du logiciel.

Le nantissement du droit d'exploitation de logiciels entraine un certains nombre d'effets. D'abord, l'absence de dépossession. Maintenu en possession, le débiteur va conserver l'exercice du droit d'exploitation. Cela fait planer une menace pour le créancier qui ne peut agir lui-même en contrefaçon169, et qui doit s'en remettre au débiteur pour la maintenance et l'évolution du logiciel.

166 Loi la loi n° 94-361 du 10 mai 1994239, portant mise en oeuvre de la directive n° 91-250 du Conseil des communautés européennes en date du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et modifiant le Code de la propriété intellectuelle du 10 mai 1994, publiée au JO du 11 mai 1994. Cette loi a été complétée par le décret n° 96-103 du 2 février 1996, publié au JO du 9 février 1996, p. 2122.

167 Décret d'application n° 96-103 du 2 février 1996 pris pour l'application de la loi no 94-361 du 10 mai 1994 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et modifiant le code de la propriété intellectuelle, publié au JO du 9 février 1996, p. 2122.

168 Art. R. 132-8 à R. 132-17 du CPI.

169 GAVANON (J.), Propriété littéraire et artistique, Fasc. 1360, n° 28.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

En outre, le créancier dispose d'un droit de préférence, d'un droit de rétention, d'un droit de suite et d'un droit de réalisation.

2- Le nantissement de films cinématographiques

Le film cinématographique est souvent présenté comme un bien d'une nature complexe, à la fois meuble corporel (négatifs et copies) et meuble incorporel (droit d'auteur). Sa réalisation lente et couteuse exige des crédits de financements. Il est alors apparu opportun d'élaborer un régime spécifique qui permettrait au constituant, généralement le producteur, d'offrir en garantie à ses créanciers le film, et ce avant d'être achevé. De ce fait, le législateur est intervenu pour créer une garantie sur mesure dérogeant à ces deux conditions, et peut-être aussi parce que les dispositions relatives au gage traditionnel étaient inadaptées en raison d'une part de l'interdiction de nantir une chose future et d'autre part de la nécessité pour le débiteur de se dessaisir du bien au profit de son créancier. L'organisation de cette sûreté résulte de la loi n° 90 du 22 février 1944170, et du décret n° 628 du 29 février 1944171, aujourd'hui codifiés dans le Code de l'industrie cinématographique172.

L'assiette de la garantie peut être formée d'une partie de l'oeuvre cinématographique ou de l'ensemble de ses éléments corporels (négatifs et copies) et incorporels (le droit d'exploitation du film). Par ailleurs, et là résidait toute l'originalité du mécanisme, il était possible, avant que l'ordonnance du 23 mars 2006 n'en consacre le principe173, de nantir un film futur. Dans ce cas, le dépôt portait sur le titre du film.

Quant à la créance garantie, le Code de l'industrie cinématographique n'a posé aucune condition. Par conséquent, il pourra s'agir aussi bien d'une créance liée au financement de l'oeuvre donnée en nantissement que d'une créance étrangère à la production du film en cause.

Le nantissement de films cinématographiques n'entraîne pas la dépossession du constituant, ce que certains auteurs avaient jugé dangereux. La formalité autrefois exigée pour le gage, est toutefois réalisée de manière fictive. En effet, le producteur du film est amené à se dessaisir de l'élément corporel de l'oeuvre cinématographique, à savoir le négatif, auprès d'un laboratoire qui est intervenu pour effectuer des opérations de postproduction, et se trouve désigné pour le tirage

170 Loi n° 90 du 22 février 1944 relative à la publication des actes, conventions et jugements en matière de cinématographie, publiée au JO 10 mars 1944, p. 729.

171 Décret n° 628 du 29 février 1944 fixant le régime de la rémunération et la position du conservateur du régime public de la cinématographie et de l'audiovisuel, publié au JO du 10 mars 1944.

172 La codification dans le Code de l'industrie cinématographique résulte du décret n° 56-158 du 27 janvier 1956, publié au JO 31 janvier 1956, p. 1267.

173 Articles 2333 et 2355 du Code civil.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

de copies positives.

Le régime du nantissement des droits d'auteur semble être extrêmement clair en droit français. Cependant la problématique de l'adaptabilité d'un tel régime dans notre contexte demeure.

B- La problématique de l'adaptation du régime du nantissement français au droit OHADA

Traiter de la problématique de l'adaptabilité du régime du nantissement français au droit OHADA, passe par le constat de l'absence d'une réglementation précise sur la question du nantissement.de ces différentes oeuvres de l'esprit. Il existe donc une incertitude qui montre l'intérêt d'un minimum de formalités en droit d'auteur, aussi bien pour enregistrer les contrats que pour tout autre acte dont peut être objet le monopole d'exploitation. Un registre pourrait être créé à cet effet par l'OAPI. Une double inscription nationale et régionale peut aussi être envisageable. Il est même souhaitable de s'orienter vers une généralisation d'une double inscription régionale dans les registres tenus par l'OAPI et l'OHADA. La généralisation de la publicité de nantissement des droits d'auteur serait une évolution souhaitable.

Pour revenir dans le cadre spécifique du Cameroun, il est important de souligner que les oeuvres cinématographiques en tant que créations intellectuelles bénéficient d'un encadrement juridique174. Cependant, il est aisé de se rendre compte du déclin général de l'activité cinématographique. Plus important encore, le constat du silence législatif quant à la possibilité d'affecter ces oeuvres en garantie d'une obligation.

C'est ainsi que du point de vue de certains175, point de vue auquel nous adhérons, la crédibilité de la prise de garantie en matière des oeuvres cinématographiques dans le contexte camerounais passe par certains préalables. Ainsi, trois voies au moins peuvent guider leur raisonnement.

Tout d'abord, il est nécessaire de réaménager le texte régissant l'activité cinématographique afin, non seulement de permettre l'exercice d'une telle activité, mais aussi prévoir un nantissement fiable et organisé dont la finalité est de stimuler le financement des productions cinématographiques.

174 Loi no 88/017 du 16 décembre 1988 fixant l'orientation de l'activité cinématographique et son Décret d'application du 9 novembre 1990.

175 KODJI (Z.), Le droit d'auteur en garantie de crédit, mémoire de Master II en droit privé, option droit des affaires, soutenu en 2008, Université de Ngaoundéré.

65

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Ensuite, il faut consacrer et réadapter les sûretés telles que expérimentées dans certains pays. En effet, le nantissement des films cinématographiques tel que voulu dans le cadre du droit français ne satisfait pas à tous les contours de l'efficacité reconnue à une telle opération juridique. Au lieu du système de délégation des recettes, il est préférable de parler du nantissement issu des droits d'exploitation des oeuvres cinématographiques. Le créancier nanti exploitera le film jusqu'à concurrence de ses droits. Ceci éviterait de faire heurter le droit du créancier nanti face l'éventualité du privilège légal accordé au service du Trésor lors de ses recouvrements.

Enfin, la création d'un fonds OIF rendra l'opération moins complexe. Il est qualifié de fonds de garantie notamment en Afrique du Nord est destiné aux promoteurs des projets culturels faute de garantie pour lancer leurs entreprises culturelles. Il s'adresse aux divers secteurs parmi lesquels la production et la distribution cinématographique et audiovisuelle, l'industrie liée au cinéma, les exploitations de salles du cinéma. En fait, ce fonds servirait de caution aux industries cinématographiques. Néanmoins, il faut redéfinir la qualification juridique de ce fonds. Le terme «garantie» pose des problèmes car, il un sens juridique bien précis. En fait, on penserait avec certitude qu'il aurait une automaticité à puiser des fonds pour garantir la dette des producteurs et des auteurs des films cinématographiques. Or, ce fonds n'est ni une personne morale ni une personne physique. Il serait préférable de le qualifier de fonds OIF. Cela rendra plus lisible le nantissement des films cinématographiques lorsqu'il va falloir garantir un prêt bancaire pour la réalisation d'un film ou pour le simple fonctionnement des industries cinématographiques.

Conclusion du chapitre I

Le droit d'auteur, contrairement au droit de la propriété industrielle, a fait l'objet d'une harmonisation. Cette harmonisation s'observe dans l'espace OHADA à travers le renvoi aux lois nationales et les difficultés qui en découlent, toute chose qui ne va pas sans entrainer de conséquences sur le régime juridique du droit d'auteur. Au regard des difficultés liées à la technique de l'harmonisation, il s'est avéré nécessaire, de faire des propositions, afin de réaménager le régime du nantissement du droit d'auteur. Le régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle, aurait en principe eu pour effet de simplifier les régimes spécifiques de nantissement. Or, on peut encore constater une certaine imperfection dans le nantissement des droits de propriété industrielle, qui, lui, a fait l'objet d'uniformisation.

66

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

CHAPITRE II : L'IMPARFAITE SIMPLIFICATION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE INDUSTRIELLE

L'uniformisation du droit est, a priori, une forme plus brutale mais aussi plus radicale d'intégration juridique. Elle consiste à instaurer, dans une matière juridique donnée, une réglementation unique, identique en tous points pour tous les Etats membres, dans laquelle il n'y a pas de face, en principe, pour des différences. Partant, au regard de cette définition et des règles qui régissent la propriété intellectuelle, on peut conclure que la propriété intellectuelle fait bel et bien l'objet d'une uniformisation. On a d'ailleurs estimé à juste titre que, l'uniformisation du droit de la propriété industrielle, sous l'égide de l'OAPI était quasiment complète. En outre, du côté de l'OAPI, il convient de distinguer entre les textes relatifs à la propriété industrielle et celui relatif à la propriété littéraire et artistique. Aussi bien l'esprit que la lettre de l'accord de Bangui sont sans ambiguïté sur la vocation des annexes relatives à la propriété industrielle à s'appliquer de manière uniforme à l'ensemble des Etats membres176. L'uniformisation a eu pour finalité de simplifier la réalisation du nantissement des droits de propriété industrielle (Section II). Cependant, il subsiste un problème, celui de la cohabitation entre les différents textes communautaires (Section I).

Section 1 : Le problème de la cohabitation entre l'AUS et l'ABR

Le nantissement des droits de propriété industrielle, de par sa nature, fait appel à deux systèmes juridiques complémentaires. Il est transversal, car pour le cerner, il est nécessaire de faire aussi bien appel aux règles de l'OHADA, que de ceux de l'OAPI. Le domaine de l'OHADA recoupe donc celui de l'OAPI. La coordination entre les deux systèmes juridique n'est pas parfaite, ce qui conduit au constat d'une inadéquation entre l'AUS et l'ABR (Paragraphe I), qui nécessite une mise en adéquation (Paragraphe II).

176 NGOMBE (L. Y.), « le droit d'auteur dans les Etats membres de l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée ? », e.Bull. du dr. auteur, janvier - mars 2005.

67

68

69

70

71

72

73

74

75

76

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

§ 1. Le constat d'une inadéquation entre l'Acte uniforme sur les sûretés et l'Accord de Bangui

L'inadéquation existante entre les différentes législations communautaires est tant sémantique (A) qu'institutionnelle (B).

A- L'inadéquation sémantique

La pratique tout comme le vocabulaire ont beaucoup évolué depuis l'entrée en vigueur de l'ABR. Certains termes correspondent de moins en moins aux réalités socio-économiques, précisément en ce qui concerne certains termes. C'est par exemple le cas de l'expression « gage », qui, aujourd'hui, ne recouvre pas le même contenu qu'à l'origine. Il faut le rappeler le gage est le contrat par lequel le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence sur un bien meuble corporel ou un ensemble de meubles corporels, présents ou futurs177. Le gage, parce qu'il porte sur un bien meuble, corporel, emporte dépossession du titulaire de son bien. Ayant une nature différente, la propriété industrielle saurait difficilement faire l'objet d'un gage. C'est d'ailleurs ce qui marque l'inadaptation de l'appellation de « gage », quand il s'agit de sûreté, portant sur les droits de propriété industrielle.

Toutefois, les choses sont restées en l'état, et selon les statistiques de l'OAPI, il n'existe à ce jour aucun gage inscrit aux registres spéciaux de l'Organisation. Ayant certainement été bien conseillé, les usagers de l'OAPI ont plutôt choisi d'inscrire des nantissements de marques178, lesquels répondent mieux au caractère immatériel ou incorporel du droit de propriété industrielle. La pratique a donc devancé le législateur OAPI dans la réforme, du moins lui a ouvert le chemin. C'est d'ailleurs, l'une des innovations majeures de la réforme des sûretés de l'OHADA : la distinction bien meuble corporel et bien meuble incorporel. L'on pourrait toutefois se poser la question de savoir pourquoi l'Administration de l'OAPI a - t - elle accepté d'inscrire le nantissement, alors que celui-ci ne figure ni dans l'Accord de Bangui, ni dans l'Instruction Administrative179. Une certaine réponse pourrait se trouver dans les dispositions de l'Instruction Administrative n°118, admet que tout acte affectant la vie des titres doit être inscrit au registre spécial. Mais, le législateur OAPI devrait l'exprimer de façon expresse et claire.

177 Art.92 AUS du 15 décembre 2010.

178 De 2006 à 2010, 37 nantissements de marques ont été inscrit au registre spécial des marques de l'OAPI.

179 Instruction administrative n°120 donne une liste exhaustive d'actes devant faire l'objet d'inscription aux registres spéciaux.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

B- L'inadéquation institutionnelle

L'inadéquation sémantique est d'une certaine manière la preuve d'une inadéquation institutionnelle, existante entre l'OAPI et l'OHADA. C'est le signe d'un manque de collaboration entre ces dernières. Or l'importance d'une telle collaboration n'est plus à démontrer. En effet, la supranationalité des législations de chacune de ces deux organisations est précisée dans les textes. Dans ce sens, le Traité de l'OHADA paraît être le plus clair, puisqu'il prévoit en son article 10(2) que les dispositions des Actes uniformes s'appliquent dans l'ordre interne y compris en cas de législation nationale contraire votée postérieurement180.

Les travaux de la CNUDCI qui ont abouti à l'adoption du Guide Législatif sur les opérations garanties. Le projet de supplément au Guide Législatif consacré aux sûretés réelles grevant des propriétés intellectuelles, qui a fortement impliqué l'OMPI, a été adopté par l'Assemblée

Générale en 2010 à sa 65e session181. Et les recommandations de ses travaux mettent toujours en rapport le système des opérations garanties et celui de la propriété intellectuelle des Etats pour établir les recoupements et relever les incompatibilités en vue d'optimiser les synergies. Or, les recommandations de la CNUDCI ont fortement inspiré les auteurs de la réforme de l'acte uniforme sur les sûretés de 2010. Cette collaboration entre la CNUDCI et l'OMPI devrait inspirer l'OHADA, l'OAPI et tout autre office de propriété intellectuelle d'un Etat membre de l'OHADA dans l'élaboration de règles relatives aux sûretés réelles grevant des propriétés industrielle.

§ 2. La nécessité de la mise en adéquation : la distinction entre le gage et le nantissement

Dans l'optique d'ouvrir la possibilité de constituer une sûreté réelle mobilière sur des biens nouveaux et/ou futurs, le législateur OHADA a fait que le critère de la dépossession ne soit plus une condition de son opposabilité. Il fait désormais reposer cette distinction sur un nouveau critère, celui de la nature juridique de l'assiette (B). Avant de s'attarder sur ce nouveau critère, il convient d'évoquer la justification d'une telle distinction (A).

A- La justification de la distinction

L'ancien critère de distinction entre le gage et le nantissement était fondé sur l'existence ou l'absence de la dépossession. Les sûretés réelles mobilières étaient constituées, d'une part, des

180 ABARCHI (V. D.), « la supranationalité de l'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA) », Revue burkinabé de droit, n°37, 2000, p.9.

181 Résolution A/RES/65/22.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

sûretés réelles mobilières avec dépossession et, d'autre part, des sûretés mobilières sans dépossession182. Cette distinction découlait de l'article 39 AUS ancien qui opposait expressément le gage au nantissement sans dépossession. Cette distinction existait déjà en Afrique, plus précisément au Sénégal, où le législateur faisait déjà la distinction entre le gage et le nantissement sans dépossession.

Pour le professeur ISSA - SAYEGH183, sûretés réelles avec dépossession sont apparues les premières. Elles remplissaient deux fonctions essentielles: d'une part, elle permettait au créancier d'être assuré que son débiteur ne dissiperait pas le meuble; d'autre part, elle agissait comme une mesure de publicité auprès des créanciers du débiteur en leur évitant de considérer ce bien comme faisant partie du patrimoine de leur obligé. Etaient donc rangés dans cette catégorie, le droit de rétention et le gage. Quant aux sûretés réelles, elles ont été imaginées par la pratique et ont reçu la consécration du législateur. Etaient donc classé dans cette catégorie, le nantissement du fonds de commerce et le privilège du vendeur, le nantissement des matériels professionnels et des véhicules automobiles, le nantissement des droits d'associés et des valeurs mobilières, et enfin le nantissement des stocks.

Ce critère de distinction avait pour inconvénient majeur d'empêcher la création d'une sûreté mobilière sans dépossession sur un bien nouveau, sauf à recourir à la technique de l'entiercement184 puisque le gage suppose nécessairement la dépossession et que le nantissement sur un bien nouveau ou futur n'est pas expressément prévu par l'AUS185. Afin d'éviter cela, et de faciliter la sûreté mobilière sur des biens futurs et/ou nouveaux, le législateur OHADA a consacré un nouveau critère de distinction entre le gage et le nantissement.

B- Une distinction fondée sur la nature juridique de l'assiette

Contrairement au droit positif où la distinction est fondée sur la dépossession ou non du bien grevé, le législateur OHADA a opté pour une distinction en fonction de la nature corporelle ou incorporelle.

182 ISSA-SAYEGH et alii, OHADA - Sûretés, op. cit. n°s 166 et s., pp. 63 et s.

183 Idem.

184 C'est la remise, aux fins de sûreté, d'un objet mobilier à un tiers qui en assume la garde pour le compte d'autrui.

185 CROCQ ( - P) « Les grandes orientations du projet de reforme de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés », Droit et patrimoine n° 197, novembre 2010, p.55.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

1- Le gage, une sûreté sur un bien meuble corporel

Les fondements du gage font obstacle à son adaptation aux propriétés industrielles: d'abord parce qu'elles ne répondent pas à la dichotomie classique du droit des biens et ensuite parce que le maintien du titre entre les mains du débiteur est contradictoire avec la qualification de gage. Le souci d'encourager le développement du gage sans obliger le constituant à se déposséder du bien mis en gage a incité le législateur OHADA à redéfinir le gage et le nantissement186. En effet, le gage est désormais défini comme « le contrat par lequel le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence sur un bien meuble corporel ou un ensemble de biens meubles corporels, présents ou futurs»187. Cette nouvelle définition du gage n'oblige plus le constituant à se défaire du bien gagé. Comme l'intitulé du Chapitre IV du nouvel acte uniforme, l'emploi du qualificatif « meubles corporels » dénote de la volonté du législateur de dissocier le matériel de l'immatériel. Partant, les droits de propriété intellectuelle, notamment ceux de la propriété industrielle ne peuvent plus faire l'objet de gage, et les garanties prises dans ce domaine ne devront plus être qualifiées comme telles.

En faisant le choix de fonder la distinction, non sur le critère de dépossession ou de l'absence de dépossession de la chose gagée, mais plutôt sur sa nature corporelle ou incorporelle, le législateur OHADA introduit une distinction plus rationnelle et quelque peu plus sûr. Car, une telle distinction a le mérite d'éviter d'organiser une dépossession « fictive » du constituant, au détriment d'une inscription du gage au RCCM. En tout état de cause, la sûreté réelle grevant les droits de propriété industrielle n'est plus qualifiée de gage, mais de nantissement, qui du reste est une sûreté sur un bien meuble incorporel.

2- Le nantissement, une sûreté sur un bien meuble incorporel

Le législateur OHADA a fait le choix de clairement définir les termes qu'il devait employé dans le nouvel AUS. Le nantissement fait désormais l'objet d'un chapitre, le chapitre V du nouvel Acte uniforme. Il est intitulé « Nantissement de meubles incorporels ». En effet, désormais défini par l'article 125 du nouvel acte uniforme sur les sûretés, le nantissement consiste en « l'affectation d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles incorporels, présents ou futurs, en garantie d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à condition que celles-ci soient déterminées ou déterminables ». En d'autres termes, le nantissement ne peut porter que sur un bien meuble incorporel ou un ensemble de bien meuble incorporel, qu'ils

186 . MARCEAU-COTTE (A.) et LAISNEY (L-J.), « Vers un nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010, p.66.

187 Art. 92, AUS du 15 décembre 2010.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

soient présents ou futurs. Ainsi, le nantissement est la garantie qui porte sur tout bien ou ensemble de biens qui échappent à toute appréhension matérielle. De ce point de vue, l'on doit admettre que le législateur OHADA s'est fortement inspiré de la distinction et de la qualification faites par son homologue français à l'issue de la réforme188 dessûretés189, bien que le premier ait poussé plus loin sa définition.

Par ailleurs, les différents droits susceptibles d'être nantis ont été édictés dans une liste limitative. C'est l'article 126 AUS qui établi cette « short list» en stipulant que peuvent notamment être nantis: les créances, le compte bancaire, les droits d'associés, les valeurs mobilières et le compte de titres financiers, le fonds de commerce et enfin les droits de propriété intellectuelle. Il est en outre précisé que, le nantissement de ces droits peut être conventionnel ou judiciaire190.

Section 2 : La simplification de la réalisation du nantissement

Bien qu'ayant opéré la distinction entre bien meuble corporel et bien meuble incorporel, le législateur OHADA n'a pas défini un régime spécifique à la réalisation d'un nantissement sur des droits de propriété intellectuelle. L'acte uniforme sur les sûretés applique à ce nantissement le régime de droit commun du gage191, donc d'une sûreté sur bien corporel. La simplification de la réalisation du nantissement passe par la détermination des moyens de réalisation du nantissement (Paragraphe I), et la détermination des droits issus du contrat de nantissement (Paragraphe II).

§ 1. La détermination des moyens de réalisation du nantissement

Le régime applicable à la réalisation d'une sûreté réelle sur des droits de propriété industrielle est le régime de droit commun : celui du gage. Mais sans que le législateur ne l'ait prévu expressément, le créancier garanti ne dispose pas d'un droit de rétention, en raison de l'absence de dépossession pour une telle catégorie du bien. La réalisation peut être conventionnelle (A) ou judiciaire (B).

188 Ordonnance n°200-346 du 23 mars 2006 relative aux sûretés.

189Chapitre III : Du nantissement de meubles incorporels, Art. 2355, Code civil français

190 Art. 125-2 de l'AUS du 15 décembre 2010.

191 Art. 97-2, 104, 105 et 226 de l'AUS.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

A. La réalisation conventionnelle

La réalisation conventionnelle, comme son nom l'indique, est celle qui est faite d'accord partie. Les différentes parties au nantissement des droits de propriété intellectuelle se mettent d'accord et procède à la vente, sans l'intervention du juge. Il s'agit dans cette hypothèse de la vente amiable.

L'acte de vente doit nécessairement être constaté par écrit, sous peine de nullité192. La vente peut être réalisée, soit par acte sous seing privé, soit par acte authentique et comporter certaines mentions. Ces mentions visent essentiellement à renseigner l'acquéreur sur la valeur réelle du fonds de commerce ou de l'élément cédé et les tiers sur l'identité des parties. De plus, le vendeur (débiteur) doit produire un état des inscriptions prises sur le titre de propriété industrielle sans laquelle il ne peut y avoir de vente. Toutefois, le législateur n'a prévu aucune sanction en cas d'omission d'une telle production. Les droits de propriété industrielle sont, non seulement spécifiques, mais ils renferment chacun des spécificités propres. Ainsi, si la vente ou cession d'un brevet193 est totale, il n'en va pas de même de celle réalisée sur une marque. En effet, la cession d'une marque peut être effectuée pour tout ou partie des produits ou services auxquels elle s'applique194.

La vente ou cession emporte transmission de propriété. Ainsi, il est fait obligation au vendeur et à l'acquéreur de déposer deux copies certifiées par eux au RCCM. L'inscription est faite à la demande de l'acquéreur immatriculé. De même, la cession doit être inscrite au Registre Spécial approprié de l'OAPI par la partie la plus diligente. Mais contrairement à la constitution du nantissement du fonds de commerce où le législateur OHADA fait obligation aux parties de satisfaire à la publicité prévue par les dispositions relatives à la propriété intellectuelle, ici aucune allusion n'est faite à une telle procédure. L'acquéreur qui se fierait aux seuls textes de l'OHADA pourrait courir de graves risques de voir le titre acquis inopposable à des tiers. Surtout qu'aucune sanction n'a été prévue pour le défaut de production de l'état des inscriptions sur le titre.

B. La réalisation judiciaire

La réalisation judiciaire est ouverte en cas de défaillance du débiteur. Deux opportunités lui sont alors offertes. Le créancier nanti peut procéder soit à la vente forcée de l'objet du nantissement, soit à l'attribution judiciaire.

192 Art. 26(2), Annexe III; art. 33(3), Annexe I de l'ABR.

193 Art. 33(2), Annexe I de l'ABR.

194 Art. 26(2), Annexe III de l'ABR.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Dans la première hypothèse, il convient de se référer à l'article 104 AUS pour déterminer les règles de procédure y relatives. En effet, la procédure de vente est toujours judiciaire et elle suppose toujours un titre exécutoire. Ainsi, faute de paiement à l'échéance, le créancier gagiste muni d'un titre exécutoire peut faire procéder à la vente forcée de la chose nanti, huit jours après une sommation faite au débiteur et, s'il y a lieu, au tiers constituant du nantissement dans les conditions prévues par les dispositions organisant les voies d'exécution auxquelles le contrat de nantissement ne peut déroger.

Dans la deuxième hypothèse, c'est-à-dire celle de l'attribution judiciaire, le créancier, selon les termes de l'alinéa 2 de l'article 104 AUS nouveau, peut faire ordonner par la juridiction compétente que le bien nanti lui sera attribué en paiement jusqu'à due concurrence du solde de sa créance et d'après estimation suivant les cours ou à dire d'expert. Un problème pourrait se poser en cas d'attribution. C'est celui de la valeur du bien nanti. Plus concrètement, comment sera réglé le litige résultant de la différence des valeurs entre les sommes dues et le bien nanti? Le législateur OHADA a résolu le problème en énonçant à l'article 105 AUS qu' « en cas d'attribution judiciaire ou conventionnelle, lorsque la valeur du bien excède la valeur qui lui est dû, le créancier gagiste doit consigner une somme égale à la différence s'il existe d'autres créanciers d'un gage sur le même bien ou, à défaut, verser cette somme au constituant. Toute clause contraire est réputée non écrite

§ 2. La détermination des droits du créancier nanti

Il appartient aux parties à l'acte du nantissement de convenir de la durée de l'inscription, et donc des droits inscrits sans que cette durée dépasse dix ans à compter de l'inscription195. L'inscription garantit, au même titre que le principal, deux années d'intérêts. L'AUS confère au créancier nanti trois droits. Le droit de suite et de réalisation qu'on analysera d'un côté, et le droit de préférence, qu'on analysera de l'autre.

A- Les droits du créancier nanti avant l'échéance de la dette

Les droits de propriété intellectuelle sont soumis à une certaine précarité196. Celle-ci vient d'une part, de la possibilité qu'une fois consacré, ceux-ci puissent faire l'objet d'une radiation ou d'une annulation, et, d'autre part, de la possibilité d'une dévalorisation rapide. Dans le cas

195 Art 58(2), AUS.

196 Cf. pour une présentation des causes de cette précarité, MARTIAL (N.), « La conjugaison du droit des suretés réelles au temps des propriétés intellectuelles », RLDI, n° 11, déc. 2005, n°9, p. 61.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

notamment de la propriété industrielle, les nouvelles créations de modèles d'utilité peuvent rendre obsolètes les anciennes, causant dès lors la fluctuation de leur valeur.

Cette précarité peut contribuer à diminuer l'efficacité, et donc l'attrait, de la garantie portant sur ces derniers197. Il parait donc opportun de conférer au créancier certaines prérogatives avant l'échéance de la garantie. On pourrait donc, pour ce dernier admettre, d'une part une faculté de remboursement anticipé (1), d'autre part admettre une faculté de subrogation réelle en cas de diminution ou de disparition de l'assiette du nantissement (2).

1- L'admission d'une faculté de remboursement anticipé

La fonction principale du nantissement des droits de propriété industrielle est bien de garantir le paiement de la dette. Or comme on l'a indiqué, cette finalité peut être mise à mal du fait de la précarité de ceux-ci. Ainsi, le risque pour le créancier de se retrouver à l'échéance avec une garantie inefficace est donc élevé. C'est pour éviter cet état de chose qu'il convient de lui reconnaitre une faculté de remboursement anticipé de sa dette. Une telle faculté impliquerait que le créancier ait le droit d'obtenir, avant l'échéance, un paiement sur les fruits et revenus résultant de l'exploitation des droits de propriété intellectuelle. Or il s'avère que l'article 159 AUS y fait obstacle en ces termes : « Le nantissement des droits de propriété intellectuelle ne s'étend pas, sauf convention contraire des parties, aux accessoires et aux fruits résultant de l'exploitation du droit de propriété intellectuelle objet du nantissement ». Pourtant, l'admission d'une telle faculté renforcerait l'attractivité du nantissement des droits de propriété intellectuelle.

La lecture du droit comparé permet de ressortir un cas sur lequel l'OHADA pourrait s'appuyer pour une éventuelle reforme dans ce sens. Le droit français a en effet, consacré le paiement anticipé en matière de nantissement sur les films cinématographiques. Qualifié de « délégation de recettes », il permet au créancier, par une adjonction au droit de préférence qu'il tient du nantissement, d'exercer un recours direct contre les exploitants du film sur les recettes de celui-ci198. Il peut ainsi se faire rembourser la créance avant l'échéance de la dette, évitant ainsi au créancier le risque de dépréciation de l'objet de la sûreté. Outre cette faculté, il serait judicieux d'admettre au créancier une faculté de substitution des droits de propriété intellectuelle pour d'autres en cas de diminution de la valeur des premiers.

197 KABRE (D. W.), « Etude critique du nantissement des droits de propriété intellectuelle en droit OHADA », www.publication.lecames.org, n° 80, p. 158, consulté le 13 mars 2015 à 22H17.

198 Art. 36 du C.I.C

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

2- L'admission d'une faculté de subrogation réelle des propriétés intellectuelles

La question pourrait se poser de savoir quelle est l'utilité de la subrogation réelle en matière de nantissement de la propriété industrielle, étant entendu que généralement, leur disparition en cours de garantie résulte d'un acte d'aliénation. Dans cette hypothèse, le créancier peut y faire face en usant de son droit de suite conformément aux articles 161 et 97 de l'AUS.

Cependant, cette réflexion prend tout son sens lorsque la disparition résulte, avant la réalisation de la garantie, d'une dépréciation des droits de propriété intellectuelle nantis. Dans ce cas, l'inefficacité du droit de suite n'est plus à démontrer. Seule la subrogation réelle permettra au créancier de retrouver la possibilité à l'échéance de réaliser sa garantie199. Mais pour qu'une telle subrogation soit opposable au tiers, les formalités de publicité requises doivent être effectuées.

Certains auteurs ont proposé de consacrer une hypothèque ouverte sur propriété intellectuelle inspirée du droit canadien et du floating charge anglais200. Une telle sûreté consiste à affecter des propriétés intellectuelles présentes ou futures indéterminées du constituant en garantie de la dette. Le caractère ouvert de cette garantie tient en ce que celle-ci ne vise pas des propriétés intellectuelles déterminées. La constitution de l'hypothèque ouverte implique à titre de validité, d'une part l'établissement d'un écrit qui doit indiquer le caractère ouvert de la garantie et le motif de la clôture de celle-ci, d'autre part l'inscription de l'hypothèque au registre. Toutefois, l'opposabilité de cette sûreté ne résulte pas de cette inscription; elle découle d'une inscription d'un avis de clôture. Ce dernier fixe l'assiette de l'hypothèque ouverte, objet de la réalisation. Cette assiette est constituée par les propriétés intellectuelles qui existent dans le patrimoine du constituant au moment de l'avis de clôture. Ainsi, avant un tel avis, le constituant jouit d'une totale liberté d'exploiter ses droits de propriété intellectuelle et n'est pas tenu à une obligation de conservation.

B- Les droits du créancier nanti à l'échéance de la dette

Le nantissement des droits de propriété industrielle confère au créancier un droit de suite et de réalisation (A), de même qu'un droit de préférence (B) qu'il exerce en cas de défaillance du constituant, pour lesquels l'article 161 fait un renvoi aux règles communes applicables.

1- Le droit de suite et de réalisation

Conformément à l'article 161 alinéa 2 AUS, le droit de suite conféré au créancier s'exerce selon les dispositions de l'article 97 alinéa 2 de l'AUS. Ce dernier stipule précisément

199 MARTIAL (M.), Droit des sûretés réelles sur propriété intellectuelle, op. cit., n°543-544, pp. 354-546.

200 Ibid., n° 545 - 552, pp. 356-361.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

que: « lorsque le gage a été régulièrement publié, les ayants cause à titre particulier du constituant ne peuvent être regardés comme des possesseurs de bonne foi et le créancier gagiste peut exercer son droit de suite à leur encontre ». Il convient de souligner que le droit de suite est le droit pour le créancier inscrit de saisir le ou les droits de propriété intellectuelle grevés en quelques mains qu'ils se trouvent, même entre les mains d'un tiers acquéreur. C'est d'ailleurs le sens de l'article 97, alinéa 2 ci-dessus. En fait la publication du nantissement a pour effet de porter celui-ci à la connaissance des tiers et de le rendre opposable à ces derniers. Il en résulte que ceux qui auront acquis des droits sur propriétés intellectuelles après une telle publication ne peuvent plus être crus en leur bonne foi.

Le droit de réalisation a pour sa part fait l'objet d'amples développements plus haut, sauf à préciser que L'une des innovations introduite par le législateur, dans le mode de réalisation, est l'introduction du pacte commissoire. Les aléas des procédures judiciaires sont ainsi évités tout en assurant la protection des droits du constituant puisque le pacte commissoire est strictement encadré par des règles protectrices des droits du constituant201. Il faut en effet que le bien apporté en garantie soit une somme d'argent ou un bien dont la valeur fait l'objet d'une cotation officielle ou pour les autres biens, que le débiteur de la dette garantie soit un débiteur professionnel et que la valeur du bien soit fixée à dires d'expert202. Il s'agit d'une attribution conventionnelle qui intervient dès l'inexécution d'une obligation garantie et sans intervention du juge, pourvu que ce mode de réalisation ait été convenu entre les parties203. Ainsi, le créancier pourra s'attribuer le droit de propriété industrielle en paiement s'il estime pouvoir en faire une exploitation personnelle204. Outre ce droit, le créancier nanti dispose également du droit de préférence.

2- Le droit de préférence

Le droit de préférence est le droit pour certains créanciers d'échapper au concours des autres créanciers (ou de certaines catégories de créanciers dans la distribution du prix de vente des biens du débiteur et être payés avant ceux auxquels ils sont préférés205. En d'autres termes, c'est le fait pour le créancier d'être payé par préférence à tous les autres sur le prix de vente du bien grevé. Le nantissement des droits de propriété industrielle confère au créancier un droit de préférence qu'il exerce conformément aux dispositions de l'article 226 de l'Acte uniforme sur les sûretés. En effet, aux termes des dispositions de cet article, le créancier nanti vient au quatrième rang dans l'ordre

201 FILLE - LAMBIE (O.) et MARCEAU - COTTE (A.), « Les sûretés sur les meubles incorporels: le nouveau nantissement de l'Acte uniforme sur les sûretés », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010, p.72.

202 Art. 104(3) de l'AUS.

203 MARCEAU-COTTE (A.) et LAISNEY (L-J.), « Vers un nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010, p.66.

204 WELLHOFF (S.), Les garanties du crédit et les titres de la propriété industrielle, Université de Nantes, mémoire soutenu en juin 2007, p. 49.

205 CORNU (G.) (Sous la direction de), Vocabulaire juridique, 8e éd., PUF, 2008, p. 705.

77

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

de priorité de distribution des deniers provenant de la réalisation des droits de propriété industrielle. Il y a lieu de constater que les nantissements d'une façon générale ont gagné une place dans l'ordre de priorité relativement à l'ancien régime de priorité. La date d'opposabilité du nantissement détermine le rang d'un créancier nanti par rapport à d'autres créanciers sur le même bien.

Lorsque le créancier inscrit est en présence de créanciers chirographaires, il les primes. En cas de pluralité de créanciers inscrits, chaque créancier exerce son droit de préférence dans l'ordre d'inscription de sa sûreté. Il peut arriver que le créancier nanti se trouve primé par d'autres créanciers ayant une sûreté meilleure que la sienne. C'est ainsi que le classement de la distribution des deniers provenant de la réalisation des meubles. Le nantissement des droits de propriété intellectuelle ne vient, comme on l'a souligné plus haut, qu'au quatrième rang. Les créanciers inscrits peuvent donc être primés, dans l'ordre, par:

- Les créanciers des frais de justice engagés pour parvenir à la réalisation du bien vendu et à la distribution elle-même;

- Les créanciers des frais engagés pour la conservation du bien dans l'intérêt des créanciers dont le titre est antérieur en date;

- Les créanciers de salaire super privilégiés.

Conclusion du chapitre II

Parce qu'ayant été uniformisé, on aurait pu croire que l'appréhension de la propriété industrielle se serait fait sans ambages. C'était sans compter sur les problèmes de cohabitation entre les deux ordres juridiques qui interviennent en matière de nantissement des droits de propriété industrielle. Il s'avère donc qu'il existe entre l'AUS et l'ABR, une inadéquation tant sémantique qu'institutionnel, d'où l'invite d'une mise en adéquation. Il faut cependant reconnaitre qu'il existe une simplification quant à la réalisation du nantissement. Ladite simplification se manifeste à travers la détermination des moyens de réalisation du nantissement d'une part, et la détermination des droits des créanciers nantis.

78

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Conclusion de la IIe partie

Harmonisation et uniformisation sont les deux techniques d'intégration juridique choisis par le législateur OHADA. La première est l'opération législative consistant à mettre en accord des dispositions d'origine (et souvent de date) différente, plus spécialement à modifier des dispositions existantes afin de les mettre en cohérence avec une reforme nouvelle. La seconde - l'uniformisation - en ce qui la concerne, est l'action de faire régner, au sein d'un système juridique, l'unité d'interprétation, d'assurer l'égale et uniforme application de la loi. Chacune de ces techniques ayant ses particularités, elles ne manquent pas d'influencer les régimes particuliers des droits de propriété intellectuelle, notamment en ce qui concerne leur nantissement. Si l'Harmonisation contribue fortement à complexifier le nantissement du droit d'auteur, l'uniformisation n'atteint pas forcément les objectifs attendus. En effet, la simplification que cette dernière devait apporter, s'avère être imparfaite.

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

79

CONCLUSION GENERALE

80

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Présents depuis tout temps, c'est essentiellement à l'époque contemporaine que la multiplication et la diffusion des biens immatériels ont réussi à créer des richesses nouvelles206. En effet, ils occupent une place prépondérante dans les fortunes privées207 et l'affirmer est devenu un axiome incontesté208. Autrefois, les richesses résidaient dans le patrimoine mobilier corporel. Désormais, les richesses se sont dématérialisées. La valeur du bien a muté. Elle ne réside plus dans le corpus mais dans la chose immatérielle, le corpus ne servant qu'à faire exister, qu'à faire relever la chose.

La puissance économique que ces droits représentent est incontestable, particulièrement, pour ce qui est des droits de propriété intellectuelle. Le législateur OHADA a compris l'importance que pouvait avoir ces droits, c'est ce qui justifie qu'il ait consacré un nantissement des droits de propriété intellectuelle. L'Acte uniforme sur les sûretés, entré en vigueur le 15 décembre 2010, a proposé un nouveau visage au régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle. En réalité, la consécration d'un régime général du nantissement des droits de propriété intellectuelle autonome, s'est accompagnée d'un certain nombre de lacunes, précisément, d'une imparfaite autonomisation des régimes spécifiques de nantissement des droits de propriété intellectuelle.

L'autonomisation du régime général du nantissement nous a conduit à s'intéresser au nouveau régime récemment entré en vigueur, pour y découvrir le contenu et le formalisme qui l'entoure. Par ailleurs, ce nouveau régime général nous a semblé justifier l'analyse de la nouvelle fonction de ce nantissement, être pris comme un moyen de financement, particulièrement pour les entreprises émergentes. Pris globalement, le régime du nantissement des droits de propriété intellectuelle semble irréprochable. Cependant, à regarder de près, notamment le régime du droit d'auteur et de la propriété industrielle, certaines imperfections sont bien visibles. La principale imperfection semble pourtant être celle liée aux moyens d'intégration juridique choisis, autant pour la propriété industrielle, que pour le droit d'auteur. Les législateurs ayant opté respectivement pour l'uniformisation et l'harmonisation.

Bien que pour certaines de ces imperfections le législateur à fait des efforts de correction, il a fallut faire quelques propositions pour que l'encadrement du nantissement des droits de propriété intellectuelle cesse d'être disparate.

206 RIPERT (G.), Aspects juridiques du capitalisme moderne, LGDJ, 1951, 2e éd., n°54.

207 CATALA (P.), « la transformation du patrimoine en droit civil moderne », RTD civ, 1996, p. 185.

208 HANIA PINTO (V.), les biens immatériels saisis par le droit des sûretés réelles mobilières conventionnelles, Université Paris-Est Créteil, Thèse 7 décembre 2011, p.318, n°622.

81

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages

Ouvrages généraux

· CORNU (G.) (Sous la direction de), Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, PUF, 8e éd., 2009.

· GRAVITZ (M.), Méthodes des sciences sociales, Dalloz, 11e éd, 2001,.

· GUINCHARD (S.) et MONTAGNIER (G.) (Sous la direction de), Lexique des termes juridiques, Dalloz, 12e éd., 1999.

· . ISSA-SAYEGH (J.), OHADA, Traité et Actes Uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2002.

· MOULOUL (A.), Comprendre l'OHADA, 2e éd. PUA, 2009.

· RIPERT (G.), Aspects juridiques du capitalisme moderne, LGDJ, 2e éd, 1951.

Ouvrages spécialisés

· BERNARD (A.), La propriété intellectuelle Livre II, Marques et Brevets, Dessins et Modèles, DELMAS, Ed. Belfond, Paris, 1995.

· ERNST & YOUNG, Le droit OHADA : Histoires, Institutions et Actes Uniformes, Ed. FFA, octobre 2006.

· KALIEU ELONGO (Y.), Droit et pratiques des sûretés réelles OHADA, Presses Universitaires d'Afrique, Yaoundé, 2010.

· LEGEAIS (D.), Sûretés et garanties du crédit, LGDJ, 3e éd., 2002

· LISANTI (C.), Les sûretés conventionnelles sur meubles incorporels, Litec, 2001.

· LUCAS (A.), LUCAS (H.-J.) et LUCAS-SCHLOETTER (A.), Traité de la propriété littéraire et artistique, 4e éd., Paris, LexisNexis, 2012.

· MARTOR (B.), PILKINGTON (N.), SELLERS (D.) et THOUVENOT (S.), Le droit uniforme des affaires issu de l'OHADA, Editions du Juris-Classeur, Litec, février 2007.

· MESTRE (J.), PUTTMAN (E.), BILLIAU (M.), Droit spécial des sûretés réelles, LGDJ, 1996.

· MINKAO SHE (A.), Droit des Sûretés et des Garanties du crédit dans l'Espace OHADA, Tome 2 : Les Garanties Réelles, Dianoïa, 2010.

82

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

· VIVANT (M.), Le droit des brevets, Dalloz, coll. Connaissance du droit, 1997.

· VIVANT (M.) et BRUGUIERE (J.-M.), Droit d'auteur, Dalloz, 1er éd., 2009.

Articles

· ABARCHI (V. D.), « La supranationalité de l'organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), Revue burkinabé de droit, n°37, 2000

· CATALA (P.), «La transformation du patrimoine en droit civil moderne », RTD civ, 1996

· COLETTE (IT.), « Méthode d'évaluation du prix d'une technologie », Rev. Propriété Industrielle, mai 2006.

· CROCQ (P.), « Les grandes orientations du projet de réforme de l'Acte Uniforme portant organisation des sûretés », Droit & Patrimoine, n°197, novembre 2010.

· EBANGA KANE (P.), « La nature juridique du concordat du redressement judiciaire dans le droit des affaires OHADA », Ohadata D-08-23.

· FILLE-LAMBIE (O.), MARCEAU-COTTE (A.), « Les sûretés sur les meubles incorporels : le nouveau nantissement de l'Acte Uniforme sur les sûretés », Droit & patrimoine, n°197, novembre 2010.

· GRIMALDI (M.), « L'acte uniforme portant organisation des sûretés », LPA n°205, 13 octobre 2004.

· ISSA-SAYEGH (J.), « Le gage sur créances de sommes d'argent », Penant, numéro spécial 840 « Sûretés et garanties bancaires ».

· KABRE (D. W.), « Etude critique du nantissement des droits de propriété intellectuelle en droit OHADA », www.publication.lecames.org, n° 80, consulté le 13 mars 2015 à 22H17

· KAMDEM (F. I.), « Harmonisation, unification et uniformisation. Plaidoyer pour un discours affiné sur les moyens d'intégration juridique », in Rev. dr. unif, n°709, 2008

· KENFACK DOUAJNI (G.), «Les nouvelles sûretés introduites dans l'Acte Uniforme adopté le 15 décembre 2010 » in Revue de l'ERSUMA, numéro spécial novembre - décembre 2011.

· LEGER (R.), « La prise de garantie en matière de propriété intellectuelle au CANADA », www.robic.ca/publications/Pdf/279-BHS.pdf.

· LEVY (M.) et JOUYET (J.-P.), « L'immatériel, la croissance de demain»: Le Figaro du 9 décembre 2006

83

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

· MARCEAU-COTTE (A.), LAISNEY (L-J.), « Vers un nouveau gage OHADA », Droit et patrimoine, n°197, novembre 2010.

· NGOMBE (L. Y.) :

Ø « Les sûretés mobilières et les propriétés intellectuelles dans les Etats membres de l'OHADA et de l'OAPI : un aspect de la concurrence de législations supranationales en Afrique », R.R.J. 2006-4.

Ø « L'intégration juridique des Etats africains de la zone franc », Revue PENANT n° 823 janvier - avril 1997

Ø « Le droit d'auteur dans les Etats membres de l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) : une harmonisation inachevée?» e.Bull. du dr. auteur, janvier - mars 2005

· PIEDELIEVRE (A.), « Le matériel et l'immatériel. Essai d'approche de la notion de bien », Etudes à M. De JUGLAIT, Aspects du droit privé en fin du 20e siècle, Montchrestien, Litec, 1986.

· SAKHO (M.), « Le nouvel Acte Uniforme OHADA portant organisation des sûretés: propos introductifs d'une refonte d'envergure autour du droit des sûretés », in Revue de l'ERSUMA, numéro spécial novembre - décembre 2011.

· SOTIRIADIS (B. H.) et DANIS (C.), « La prise de garanties en matière de propriété
intellectuelle au CANADA », LEGER ROBIC RICHARD/ROBIC, 2001, www.robic.ca

· STENGER (J.-P.), « Le gage des droits de propriété intellectuelle », RDPI, 1995.

Thèses et Mémoires

· MBA (C.-R.), La protection des inventions en droit de l'OAPI (Organisation africaine de la propriété intellectuelle), Thèse Lyon, 2004.

· PINTO HANIA (V.), Les biens immatériels saisis parle droit des sûretés réelles mobilières conventionnelles, Thèse décembre 2011, Université Paris-Est Créteil.

· KODJI (Z), Le droit d'auteur en garantie de crédit, mémoire de Master II en droit privé, option droit des affaires, soutenu en 2008, Université de Ngaoundéré.

· KOFFI (K.), Les sûretés réelles et les droits de propriété intellectuelle dans l'espace OAPI-OHADA, mémoire de Master II en droit de la propriété intellectuelle, soutenu en 2011

84

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

· WELLHOFF (S.), Les garanties du crédit et les titres de propriété industrielle, Mémoire de Master en Droit, soutenu en juin 2007.

· ZOMISSI (G.), Le gage des droits de propriété intellectuelle dans l'espace OHADA, Université de Yaoundé II, mémoire de Master en Droit, soutenu en 2011

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

INDEX ALPHABETIQUE

(Les numéros correspondent aux pages)

A

Acte uniforme

assiette

vi, 11, 12,

13,

21,

25, 29, 50, 53, 54, 56, 69, 70, 74,

12, 13, 16, 23, 61, 63, 68, 69, 7,

78

10

Autonomie

 
 
 
 

vi

autonomisation

 
 
 

vi, vii, 7, 8, 9, 11, 46,

78

 

B

 
 
 
 

brevet

 

9,

13,

14, 15, 24, 27, 32, 33, 35, 37, 42,

72

 

C

 
 
 
 

crédit vi, 2, 3, 6, 7, 20, 24, 25, 33, 34, 39, 40, 41, 42, 43, 45, 64, 74, 79, 3, 9

D

débiteur

dessins et modèles

droit d'auteur.v, 4, 8,

3,

 

4, 5,

17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 34, 39, 40,

42,

43,

57,

62,

69,

70,

72,

73,

74

 
 

4, 5, 9, 13,

15,

16,

24,

25,

30,

35,

38,

48,

61

9,

15,

16, 17, 23, 24, 33, 34, 40, 48, 50, 51,

52,

53,

54,

55,

56,

57,

58,

59,

60,

 
 

61, 62, 63, 64, 65, 66, 76, 78, 3, 9,

10

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

E

 
 
 
 
 
 
 
 
 

85

entreprise iv, 2, 3, 17, 30, 38, 40, 41, 42, 43, 44, 46, 51, 53, 9

G

garantie 4, 6, 7, 9, 16, 17, 18, 20, 22, 23, 33, 34, 38, 39, 40, 41, 42, 44, 48, 53, 56, 61, 62, 63, 64,

70, 74, 2, 3, 9

H

harmonisation v, 5, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 57, 58, 65, 66, 68, 78, 2, 3, 9

I

inscription 12, 20, 21, 25, 26, 27, 28, 29, 36, 37, 38, 43, 62, 63, 67, 70, 72, 73, 75, 8

N

nantissementv, vi, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 16, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 32,

33, 34, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 48, 49, 50, 51, 53, 54, 55, 56, 57, 59, 60, 61,

62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75, 76, 78, 2, 7, 8, 9, 10

86

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

O

obligation 4, 6, 9, 16, 17, 18, 19, 26, 27, 34, 56, 64, 72, 74

opposabilité 8, 28, 29, 62, 68, 74

P

propriété industrielle 4, 5, 6, 9, 16, 17, 24, 27, 28, 48, 49, 51, 56, 57, 62, 65, 66, 67, 70, 71, 72, 74,

75, 78, 3

propriété intellectuelle. iv, vi, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 25,

27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 48, 49, 51, 52, 53, 54, 56,

57, 58, 61, 62, 65, 66, 68, 70, 71, 72, 74, 75, 76, 78, 79, 2, 3, 4

propriété littéraire et artistique 5, 9, 13, 15, 27, 35, 49, 51, 53, 57, 66

R

réalisation v, 36, 39, 48, 62, 65, 66, 71, 72, 73, 74, 75, 10, 11

S

sûreté 3, 4, 5, 12, 15, 16, 18, 24, 26, 27, 28, 29, 36, 37, 39, 40, 41, 48, 56, 57, 61, 62, 67, 68, 69, 70,

71, 75, 10

sûretés...3, 5, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 15, 16, 18, 21, 24, 28, 29, 34, 40, 50, 52, 53, 54, 56, 57, 60, 64, 67,

68, 69, 70, 71, 74, 78, 79, 2, 3

U

uniformisation 48, 49, 51, 52, 53, 57, 58, 65, 66, 76, 78, 2, 10

V

valeur financière 17, 33

87

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

TABLE DES MATIERES

Avertissement ii

Dédicace iii

Remerciements iv

LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS v

SOMMAIRE vii

RESUME viii

ABSTRACT ix

Epigraphe x

INTRODUCTION GENERALE 1

Ière PARTIE: L'EXHAUSTIVITE DU REGIME COMMUN A L'ENSEMBLE DES DROITS DE

PROPRIETE INTELLECTUELLE 10

CHAPITRE I : LES MODALITES DE CONSTITUTION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE

PROPRIETE INTELLECTUELLE 12

Section 1 : Le contenu du nantissement des droits de propriété intellectuelle 12

§ 1. L'élargissement de l'assiette du nantissement 13

A- Le maintien du nantissement sur les droits existants 13

1- Les créations à caractère technique et les signes distinctifs 13

2- Les créations esthétiques et intellectuelles 15

B- La prise en compte des droits futurs 16

§ 2. La typologie du nantissement des droits de propriété intellectuelle 18

A- Le nantissement conventionnel 18

B- Le nantissement judiciaire 21

Section 2 : Le formalisme du nantissement des droits de propriété intellectuelle 22

§ 1. L'exigence de l'écrit 22

A- L'importance de l'écrit 22

B- La valeur de l'écrit 23

1- L'écrit exigé ad validatem 23

2- La sanction de l'absence de l'écrit 24

§ 2. L'exigence de publicité 25

A- Les modalités de publicité 25

1- L'inscription au registre de commerce et du crédit mobilier 25

2- L'inscription au registre spécial 27

B- La valeur de la publicité 28

88

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Conclusion du chapitre I : 29

CHAPITRE II : LES EFFETS DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE

INTELLECTUELLE 30

Section 1 : Les préalables à la prise de nantissement des droits de propriété intellectuelle 30

§ 1. La nécessaire évaluation de la valeur des droits nantis 30

A- Les techniques d'évaluation 31

B- Les difficultés de l'évaluation 32

1- La difficile évaluation des droits existants 33

2- La difficile évaluation des droits futurs 34

§ 2. La nécessité de vérifier l'existence du nantissement 35

A- La durée du nantissement 35

B- Le contentieux lié au nantissement 36

1- Les conditions de levée du nantissement 36

2- Les conditions de radiation du nantissement 37

Section 2 : La finalité du nantissement 38

§ 1. Le nantissement et les entreprises en fonctionnement 39

A- Le nantissement, une garantie aux investisseurs 39

B- Le nantissement, un moyen de crédit 40

§ 2. Le nantissement des droits de propriété intellectuelle et les entreprises en difficulté 42

A- Un outil de financement du redressement 43

B- Une garantie de rachat de l'entreprise 44

Conclusion du Chapitre II 45

Conclusion de la Ie partie 46

IIe PARTIE: L'IMPRECISION DES REGIMES SPECIFIQUES DE CHACUN DES DROITS DE

PROPRIETE INTELLECTUELLE 47

CHAPITRE I : LA COMPLEXITE DU NANTISSEMENT DES DROITS DE PROPRIETE

LITTERAIRE ET ARTISTIQUE 50

Section 1 : La justification de la complexité: l'harmonisation du droit d'auteur et droits voisins 50

§ 1. Le constat de l'harmonisation du droit d'auteur 50

A- Le renvoi aux lois nationales 51

B- Les difficultés liées à la technique d'harmonisation 52

1- Les difficultés liées au contenu des règles 52

2- Les difficultés tenant à l'autonomie des Etats 53

§ 2. Les conséquences de l'harmonisation du droit d'auteur sur son régime juridique 54

A- L'altération des règles de prise de nantissement 54

89

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

B- L'altération du formalisme 56

Section 2 : Le nécessaire réaménagement du régime du nantissement du droit d'auteur 57

§ 1. Le réaménagement du droit régional 58

A- L'uniformisation du droit d'auteur 58

B- La nécessité de clairement définir le contenu du nantissement 59

§ 2. Le réaménagement inspiré des législations étrangères: l'exemple français 61

A- Le contenu de l'assiette du nantissement 61

1- Le nantissement de logiciels 61

2- Le nantissement de films cinématographiques 63

B- La problématique de l'adaptation du régime du nantissement français au droit OHADA 64

Conclusion du chapitre I 65
CHAPITRE II : L'IMPARFAITE SIMPLIFICATION DU NANTISSEMENT DES DROITS DE

PROPRIETE INDUSTRIELLE 66

Section 1 : Le problème de la cohabitation entre l'AUS et l'ABR 66

§ 1. Le constat d'une inadéquation entre l'Acte uniforme sur les sûretés et l'Accord de Bangui 67

A- L'inadéquation sémantique 67

B- L'inadéquation institutionnelle 68

§ 2. La nécessité de la mise en adéquation: la distinction entre le gage et le nantissement 68

A- La justification de la distinction 68

B- Une distinction fondée sur la nature juridique de l'assiette 69

1- Le gage, une sûreté sur un bien meuble corporel 70

2- Le nantissement, une sûreté sur un bien meuble incorporel 70

Section 2 : La simplification de la réalisation du nantissement 71

§ 1. La détermination des moyens de réalisation du nantissement 71

A- La réalisation conventionnelle 72

B- La réalisation judiciaire 72

§ 2. La détermination des droits du créancier nanti 73

A- Les droits du créancier nanti avant l'échéance de la dette 73

1- L'admission d'une faculté de remboursement anticipé 74

2- L'admission d'une faculté de subrogation réelle des propriétés intellectuelles 75

B- Les droits du créancier nanti à l'échéance de la dette 75

1- Le droit de suite et de réalisation 75

2- Le droit de préférence 76

Conclusion du chapitre II 77

90

Le nantissement des droits de propriété intellectuelle

Conclusion de la IIe partie 78

CONCLUSION GENERALE 79

BIBLIOGRAPHIE 81

INDEX ALPHABETIQUE 85






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault