Nom de l'étudiant(e) : Alice
Bellia Programme : ESC Master
Nom du tuteur : Dardo Mario De Vecchi
Année : 2013/2014
Conflits linguistiques et rapports de force
entre les langues en présence au sein
des
entreprises internationales.
1
ATTESTATION DE NON PLAGIAT
Je soussigne Alice Bellia atteste sur l'honneur que le
présent dossier a été écrit de mes propres mains,
et que toutes les sources d'information externes ont été
citées.
Fait à Marseille, le 20 août 2014
2
REMERCIEMENTS
Tous mes remerciements et respects sont adressés
à Dardo Mario De VECCHI, mon professeur et tuteur à Kedge
Business School.
3
RÉSUMÉ
Sujet : Conflits linguistiques et
rapports de force entre les langues en
présence au sein des entreprises internationales.
Auteur : Alice Bellia
Sous la supervision de Dardo Mario De Vecchi
Résumé : 11% des PME ont
déclaré avoir perdu des contrats à cause de lacunes
linguistiques et interculturelles et pourtant seulement 48% des PME ont mis en
place des stratégies linguistiques pour faciliter leurs échanges
internationaux
Dans un monde de plus en plus internationalisé, la
nécessité de s'ouvrir au monde et à la diversité
culturelle devient crucial.
Cependant quand les mots sont des armes et la langue un outil
de domination la question des rapports entre les langues au sein des
entreprises se pose : Comment le multilinguisme se présente dans
l'entreprise ? Existent-ils des conflits d'ordre linguistique ? Un rapport de
force entre les langues en présence ?
Mots clés : entreprise, culture
d'entreprise, culture nationale,
communication, multilinguisme, conflits linguistiques,
pouvoir.
4
ABSTRACT
Theme: Linguistic conflicts and
balance of power in multinational
corporations
Author: Alice Bellia
Under the supervision of Dardo Mario De Vecchi
Abstract: 11% of SMB have lost
contacts due to a lack of language proficiency and intercultural competencies.
Only 48% of these SMD have implemented linguistic strategies to facilitate
international trade.
In a more and more globalised worlds it has become a necessity
to manage in diversity in with an open mind. But when words are meant as
weapons and language as a domination tool, it is legitimate to ask ourselves
how these languages interact within an organization: How does multilingualism
present itself within the corporation? Are there linguistic conflicts? A
balance of power among the languages?
Key words: organization, organizational
culture, national culture, communication, multilingualism, conflicts over
languages, power.
5
Sommaire
INTRODUCTION 7
1. L'Europe des diversités 9
1.1 État des lieux sociolinguistique en Europe 9
1.1.1 Une Europe multilingue 9
1.1.2 Europe et identité 11
1.2 Les enjeux économiques et linguistiques de l'espace
européen 12
1.2.1. Concurrence et complémentarités 12
1.2.2. Les enjeux linguistiques : l'importance de la traduction
13
1.3. Situation des entreprises en Europe 14
1.3.1. L'Europe des grandes firmes 14
1.3.2. La relation franco-allemande 15
1.3.3. La situation des entreprises en France et en Allemagne :
une relation bilatérale 16
1.4. Une Europe ethnique et linguistique 17
1.4.1. Origine des langues européennes 17
1.4.2. Difficulté d'établir un état des
lieux linguistique 18
1.5. Diversité linguistique en Europe : obstacle ou atout
? 19
1.5.1. Langues minoritaires / langues majoritaires 19
1.5.2. Volonté d'unification : une utopie ? 20
1.5.3. Échecs de la création d'une langue
véhiculaire européenne 21
2. Culture d'entreprise et facteurs d'influence
24
2.1. La notion d'entreprise 24
2.1.1. Définition 24
2.1.2. Internationalisation des entreprises 25
2.1.3. La multinationale : vecteur de l'internationalisation
25
2.2. L'entreprise à l'ère contemporaine 26
2.2.1. Fusions & acquisitions 26
2.2.2. Les enjeux structurels explicatifs de ces fusions 28
2.2.3. Les situations linguistiques de ces entreprises 29
2.2.4. Vers un besoin de normalisation et de transmission du
savoir 30
2.2 La culture d'entreprise au service de la performance 32
2.3.1 Définition de la culture d'entreprise 32
6
2.3.2 Rôle et éléments constitutifs 34
2.3.3 De l'importance du parler d'entreprise 36
2.3 De la culture locale à la culture d'entreprise 37
2.4.1 Intégration & assimilation 37
2.4.2 Manager dans la diversité 40
2.4.3 Communication interculturelle 41
2.4 Le langage : outil de domination 43
2.5.1 Stratégie et rapports de force 43
2.5.2 Rapport entre les langues en présence 44
3 MaRs Marketing : Étude de cas d'un sous-traitant
in-shore 46
3.1 Présentation de Mars Marketing 46
3.1.1 Histoire et fondation 46
3.1.2 Structure et organisation 47
3.1.3 Une entreprise internationale 48
3.2 Les enjeux d'un sous-traitant 50
3.2.1 Définition de la sous-traitance 50
3.2.2 Avantages et plus-value 51
3.3 Bilan sociolinguistique de l'entreprise : Entre
résistance et domination 52
3.3.1 Importance du groupe et des normes : le rôle du
langage 52
3.3.2 Situation linguistique 53
3.3.3 Conflits entre les langues en présence 54
3.4 Communication interculturelle 56
3.4.1 Les conflits culturels 56
3.4.2 Importance de l'étiquette 57
3.4.3 L'intermédiaire : l'employé bilingue 58
3.5 Le rôle de l'employé bilingue 60
3.5.1 Gérer les différences culturelles 60
3.5.2 Comprendre et intégrer les différents niveaux
de langues 62
3.5.3 Une position de pouvoir ? 64
CONCLUSION 66
BIBLIOGRAPHIE 68
ANNEXES 74
7
INTRODUCTION
11% des PME ont déclaré avoir perdu des contrats
à cause de lacunes linguistiques et interculturelles et pourtant
seulement 48% des PME ont mis en place des stratégies linguistiques pour
faciliter leurs échanges internationaux.1
Dans un monde de plus en plus internationalisé, la
nécessité de s'ouvrir au monde et à la diversité
culturelle devient crucial.
En plus de répondre à des besoins de
communication de plus en plus pressants avec l'essor des TIC, l'ouverture
à la diversité linguistique joue un rôle
prépondérant dans les rapports sociaux.2
Bourdieu est l'un des premiers à reconnaître le
pouvoir symbolique du langage ainsi que son implication dans les rapports
sociaux.3
En effet, un même mot peut recouvrir une multitude de
réalités, de visions du monde et donc mener à une
multitude de points de vue différents ce qui rend difficile le partage
d'une vision du monde commune mais pose le contexte pour un rapport de force
symbolique par le langage qui d'après Bourdieu équivaudrait
à l'usage de la force.
Le langage est alors utilisée pour définir et
déterminer les différences et similitudes, pour dresser une
frontière entre le « nous » et les « autres
».4
1 Etienne Davignon, Viscount, (2007), « Languages
means business : Companies work better with languages », DG Education
and Culture, European Comission
2 Wodak, Ruth, (2012), « Language, power and
identity », in Language Teaching
3 Bourdieu, Pierre, (1977), « Sur le pouvoir
symbolique », in Annales. Économies, Sociétés,
Civilisations
4 Wodak, Ruth, (2012), « Language, power and
identity », in Language Teaching, pp. 216
8
C'est pourquoi, les employés multilingues constituent
un véritable enjeu pour le développement de nombreuses
entreprises : plus qu'un employé ordinaire, l'employé bilingue ou
multilingue devient un réel pivot pour son entreprise puisqu'il
constitue la passerelle entre deux entreprises, deux cultures, deux
langues mais surtout deux identités.
Dans un tel contexte nous sommes en droit de nous demander :
Comment le multilinguisme se présente dans l'entreprise
? Existent-ils des conflits d'ordre linguistique ? Un rapport de force entre
les langues en présence ?
Afin de comprendre la situation linguistique dans le monde du
travail, il faut d'abord se pencher sur le cadre linguistique dans lequel ces
entreprises elles-mêmes évoluent. C'est pourquoi je dresserai dans
une première partie un état des lieux des sociolinguistique en
Europe et plus particulièrement des entreprises franco-allemandes , puis
le phénomène des fusions et acquisition dans une seconde partie
afin de présenter le contexte et apporter des précisions pour
l'étude de cas de Mars Marketing, un centre d'appels européen
à vocation internationale.
L'ambition de ce devoir est de donner des pistes de
réflexions par rapport aux problématiques
précédemment énoncées et apporter un regard neuf
d'un sous-traitant in-shore dans le vaste monde de la mondialisation.
9
1. L'Europe des diversités
1.1 État des lieux sociolinguistique en
Europe
1.1.1 Une Europe multilingue
Le Bilinguisme se rapporte par définition à
« la situation d'un pays qui a deux langues officielles » comme c'est
le cas de la Belgique par exemple ou encore de la Suisse.
Celui-ci est souvent le résultat d'un découpage
géographique forgé dans l'histoire comme c'est le cas de la
Suisse qui incorpore des populations françaises, italiennes et
allemandes, la Belgique où le français et le flamand sont
parlés, sans oublier la particularité
québécoise.5
Le multilinguisme est particulièrement présent
dans les zones frontalières.
En Europe les situations de bilinguisme et de multilinguisme
sont nombreuses et résultent de politiques géographiques et de
migrations ancrées dans l'histoire, certains pays où
régions multilingues sont le résultat de politiques coloniales au
service desquelles le langage était utilisé comme un outil
domination.
Il existe en Europe Plus de 23 langues officielles: l`allemand
, l`anglais, le bulgare, le danois, l`espagnol, l`estonien, le finnois, le
français, le grec, le hongrois , l`irlandais, l`italien, le letton , le
lituanien, le maltais , le néerlandais, le polonais, le portugais, le
roumain ,le slovaque, le slovène ,le suédois et le
tchèque. C'est un choix délibéré de la part des
institutions de l'Union européenne de respecter toutes les langues
officielles afin que les institutions de l'union Européenne soient
« ouvertes et accessibles au public, ainsi qu'aux administrations et
à toutes sortes de groupes d'intérêt officiels ou officieux
» ; il relève du
5 Grand Larousse Universel, volume 9
10
devoir de la commission de « promouvoir une culture
démocratique qui respecte et protège les
spécificités individuelles, locales, régionales et
nationales. »6
C'est pourquoi, en accord avec l'article 21 du traité
instituant la communauté européenne, chaque ressortissant d'un
état membre peut s'exprimer dans sa propre langue et espérer
recevoir une réponse dans la même langue :
« Tout citoyen de l'Union peut écrire à
toute institution ou organe visé au présent article ou à
l'article 7 dans l'une des langues visées à l'article 314 et
recevoir une réponse rédigée dans la même langue.
»
En Europe, ce multilinguisme est protégé et
encouragé dans le sens où celui-ci encourage la tolérance
et l'ouverture d'esprit, qualités importantes dont les marchés
européens peuvent bénéficier.7
6 European Comission « Multilinguisme et
traduction », Directorate-General for Translation
7 Etienne Davignon, Viscount, (2007), «
Languages means business : Companies work better with languages », DG
Education and Culture, European Comission
1.1.2 Europe et identité
La notion d'Europe est un large concept puisqu'elle peut
désigner une alliance des pays, mais aussi une réalité
géopolitique, économique, un ensemble culturel ou encore une
construction historique. L'idée d'Europe comme objet géopolitique
voit le jour au XVIIème siècle avec l'émergence des
relations internationales entre les puissances8 puis elle prendra
forme après la prise de conscience d'après-guerre de s'associer
pour garantir la paix et redresser les peuples européens.
Être européen c'est tout un héritage
judéo-chrétien et gréco-romain, une vision de la
modernité et du progrès qui a traversé les époques
et les courants (l'humanisme, le siècle des lumières)
modulé au gré des révolutions industrielles :
L'Européanité est avant tout « le
sentiment d'appartenance ou de conscience d'être européen ; traits
communs de culture qui constituent une identité européenne ou
suscitent un sentiment d'appartenance à l'Europe ».9
Outre cet aspect culturel et identitaire, l'Europe est
aujourd'hui surtout une mégalopole au sein de laquelle se
développent des « géodynamiques de l'Europe
».10
11
8 Thébault, Vincent et al., (2012),
Géopolitique de l'Europe, Paris, Nathan, p. 70
9 Thébault, Vincent et al., (2012),
Géopolitique de l'Europe, Paris, Nathan, p. 33
10 Thébault, Vincent et al., (2012),
Géopolitique de l'Europe, Paris, Nathan, p. 24
1.2 Les enjeux économiques et linguistiques de
l'espace européen
1.2.1. Concurrence et complémentarités
« Les échanges intra-communautaires
représentaient moins de 40% du commerce extérieur des pays
membres en 1958. Leur croissance a été spectaculaire depuis la
création de la CEE : ils ont été multipliés par 8
en volume de1958 à 1987 et par 3 entre 1990 et 2000. L'institution du
marché commun puis du marché unique et les élargissements
successifs expliquent ce phénomène ».11
Chaque pays européen est doté d'une
spécialisation donnée que ce soit dans le domaine agricole ou
industriel par exemple. Aussi, il est convenu que le système bancaire
est une spécialité allemande et l'automobile française ce
qui encourage le développement des régions
transfrontalières et l'essor des flux de travailleurs
transfrontaliers.12
Cette nouvelle réalité de flux de travailleurs
transfrontaliers sont à l'image de cette nouvelle Europe de plus en plus
spécialisée et complémentaire.
Les profils, souvent multilingues, de ces « pendlers
» (mot allemand pour désigner ces travailleurs
transfrontaliers qui font les allers-retours entre les pays comme une «
pendule »), sont fortement appréciés dans une Europe
métissée et multiculturelle.
12
11Thébault, Vincent et al., (2012),
Géopolitique de l'Europe, Paris, Nathan, p. 70 12
Thébault, Vincent et al., (2012), Géopolitique de
l'Europe, Paris, Nathan
13
1.2.2. Les enjeux linguistiques : l'importance de la
traduction
L'industrie du langage s'élevait à 8,4 billions
d'euros entre les états membres en 2008, à ce rythme-là,
En 2015 plus d'1,1 billion aura été dépensé en
logiciels de traduction et la valeur de l'industrie du langage pourrait
dépasser les 20 billions.13
Il faut noter que la DGT (la direction générale
de la traduction de la commission européenne) a traduit en 2008 plus de
1 805 689 pages dont 72,5 % à partir de l'anglais.14
C'est un secteur qui ne connaît pas la crise puisqu'il
est crucial dans la promotion de l'apprentissage des langues pour aller
au-delà des frontières et assurer un succès
économique en Europe mais aussi dans le reste du monde : le besoin d'un
moyen de traduction sûr et peu cher devient une préoccupation
mondiale.
C'est pourquoi les outils d'aide aux traductions, les TALN
(traitement automatique du langage naturel) viennent s'ajouter aux traducteurs
« humains » dits TAL. Parmi ces TALN on retrouve les traductions
automatiques ou assistées par ordinateur, banques de données et
logiciels de traduction sont en plein essor (ASD, AECMA, Acrocheck...) et sont
de plus en plus utilisées au sein des entreprises multinationales
HyperSITE utilisé au sein de l'entreprise Boeing par
exemple.)15
Ces logiciels sont nécessaires pour le
développement des relations commerciales entre les
pays.
13 Rinsche, Adriane et al., (2009), «Study on
the size of the language industry in the EU», Surrey, The language
technology centre LTD
14 Rinsche, Adriane et al., (2009), «Study on
the size of the language industry in the EU», Surrey, The language
technology centre LTD
15 Cours de Management et langage
14
1.3. Situation des entreprises en Europe
1.3.1. L'Europe des grandes firmes
Les entreprises européennes ont tendance à
fusionner grâce aux politiques de libéralisation promues par
l'Union Européenne. En effet les entreprises européennes
bénéficient d'un cadre privilégié qui facilite et
encourage le phénomène de fusions et acquisitions. (M&A)
Ce phénomène s'explique par l'augmentation de
l'économie d'échelle, une concurrence accrue sur le marché
unique mais aussi la création d'une monnaie unique (qui ne subit donc
aucune fluctuation de devise) qui ont engendré de véritables
« Goliath industriels européens ». Ces conditions uniques
permettent la libre circulation des flux (import/export) entre les
réseaux transeuropéens qui après avoir obtenue une monnaie
et un marché unique souhaitent renforcer la compétitivité
de l'euro au sein de l'économie mondiale afin de « stimuler
l'investissement, d'augmenter la production et de créer de nouveaux
emplois » mais aussi en élargissant l'Union européenne vers
l'Europe centrale et orientale16.
L'Euro encourage donc les entreprises à travailler
à l'échelle européenne et les concurrents les plus faibles
sont rachetés comme ce fut le cas de la banque belge BBL qui a
été reprise par le groupe hollandais ING.17
Ces grandes firmes européennes, se sont
regroupées en 1983 autour de « la table ronde des industriels
européens » (ERT), qui constitue un nouveau lobby
européen.
Parmi ses membres, on retrouve des groupes comme
Nestlé, Renault, Total, Bayer... qui adhèrent à titre
nominatif et non pas au nom de la compagnie.18
16 Balanyá, Belén, (2000), Europe
Inc. : Liaisons dangereuses entre institutions et milieux d'affaires
européens, Marseille, Agone, p. 47
17 Balanyá, Belén, (2000), Europe
Inc. : Liaisons dangereuses entre institutions et milieux d'affaires
européens, Marseille, Agone, p. 87
15
1.3.2. La relation franco-allemande
Au coeur de ces réseaux transeuropéens, on
retrouve tout naturellement la France et l'Allemagne ou plutôt le couple
franco-allemand comme il est convenu de les désigner depuis la fin de la
seconde guerre mondiale.
Outre le fait que ce couple soit le « moteur » de
l'intégration européenne et à l'origine de toutes les
grandes décisions19 au sein de l'union européenne, la
France et l'Allemagne sont interdépendants : l'Allemagne est le
principal client et partenaire de la France et vice versa. Cette relation
privilégiée s'inscrit dans la continuité d'une histoire
commune, d'une proximité géographique, politique mais aussi
économique.
Même si l'Allemagne fait figure de «
première de la classe »20 avec ses « 200 milliards
d'euros d'excédents commerciaux, une industrie prospère, une
dette publique maîtrisée, un chômage qui ne dépasse
pas les 7% de la population active » comparée à la France et
son « déficit commercial, désindustrialisation, finances
publiques malmenées, chômage supérieur à 10%
»21, en cas de crise ou de problème européen,
c'est bien vers ces deux pays que tous les regards seront rivés. Sans
leur accord ou leur engagement rien ne peut se faire en Europe.22
18 Balanyâ, Belén, (2000), Europe Inc.
: Liaisons dangereuses entre institutions et milieux d'affaires
européens, Marseille, Agone, p. 37
19 Balanyâ, Belén, (2000), Europe Inc.
: Liaisons dangereuses entre institutions et milieux d'affaires
européens, Marseille, Agone, p. 112
20 Lemaître, Frédéric, (2011),
« L'Allemagne, exaspérante première de la classe », in
Le monde, p. 1
21 Montferrand, Bernard de, et al., (2011),
France-Allemagne : l'heure de vérité, Paris, Tallandier,
p. 16
22 Montferrand, Bernard de, et al., (2011),
France-Allemagne : l'heure de vérité, Paris, Tallandier,
p. 229
16
1.3.3. La situation des entreprises en France et en
Allemagne : une relation bilatérale
D'après la chambre de commerce et d'industrie franco
allemand, il y aurait en 2013 en France « 2 800 entreprises allemandes
implantées sur 9 600 sites et employant plus de 300 000 salariés
» 23 cette réalité économique est renforcée
par une dynamique d'investissements allemands en France :
« Avec 106 projets en 2013, l'Allemagne est de nouveau le
deuxième investisseur direct créateur d'emplois en France,
derrière les États-Unis (122 projets) et devant l'Italie (64
projets). Selon l'AFII - l'Agence Française pour les Investissements
Internationaux - les entreprises allemandes ont créé
l'année dernière 3641 emplois en France. Par ailleurs, les
investissements allemands représentent 15 % de l'ensemble des projets
d'investissements en France. Il s'agit principalement d'investissements dans
les domaines de la production industrielle, la recherche et le
développement, l'ingénierie ainsi que les prestations de services
aux entreprises dans les secteurs de l'automobile, des machines, des nouvelles
technologies, des techniques électroniques et de l'énergie
».
On retrouve également sur le site internet de la
chambre franco allemande de commerce et d'industrie un Communiqué de
presse en date du 18 mars 2014 qui établit un état des lieux
positif de la collaboration franco-allemande : « D'après les
derniers chiffres publiés par DESTATIS (l'institut de statistiques
allemand), le commerce franco-allemand s'élevait à 164,6
milliards d'euros en 2013 (importations et exportations). La France est ainsi,
de nouveau, le premier partenaire commercial de l'Allemagne
».24
23 Seidel-Lauer, Alexandra, (2013), « La Chambre
Franco-Allemande de Commerce et d'Industrie (CFACI) et l'AFII renforcent leur
partenariat », in Chambre Franco-Allemadne de Commerce et d'Industrie,
disponible sur internet, consulté le 10/08/2014 18 :45 :12
24 Seidel-Lauer, Alexandra, (2013), « La Chambre
Franco-Allemande de Commerce et d'Industrie (CFACI) et l'AFII renforcent leur
partenariat », in Chambre Franco-Allemadne de Commerce et d'Industrie,
disponible sur internet, consulté le 10/08/2014 18 :45 :12
17
1.4. Une Europe ethnique et linguistique
1.4.1. Origine des langues européennes
On dénombre au sein de l'union européenne, pas
moins de 225 langues qui partagent une origine indo- européenne,
contrairement aux langues voisines comme celles utilisées au sud de la
méditerranée qui ont une origine chamito-sémitiques
(arabe, berbère) ou les langues altaïques que l'on retrouve dans
une partie de l'Asie. Cette parenté linguistique entre les pays
européens constitue un élément d'unification même si
on est loin d'une langue commune25.
On trouve cependant sur le continent européen des
langues qui ne sont pas indo européennes comme les langues ouraliennes
(Finlande, Hongrie) et d'autres langues aux héritages divers comme le
basque en France qui a de nombreux héritages dont l'indo
-européen et maltais.
Il en résulte de nombreuses imbrications linguistiques
comme montré sur la carte ci-dessous.
Figure 1 Carte des diversités linguistiques en
Europe26
25 Balanyá, Belén, (2000), Europe Inc. :
Liaisons dangereuses entre institutions et milieux d'affaires
européens, Marseille, Agone, p. 24
26 « Carte de l'Europe avec les langages, les groupes
linguistiques et les familles de langues », in
Cartograf.fr, disponible sur internet,
consulté le 10/08/2014 19 :12 :39
1.4.2. Difficulté d'établir un état
des lieux linguistique
Aussi, il est difficile de faire un état des lieux
linguistiques en Europe : trop de langues, de dialectes, de parlers, de
patois... sans compter que les langues n'ont pas la même valeur sociale,
politique et littéraire ; certaines langues sont dites importantes et
d'autres moindres.
Dans ce cas là où se situe la limite entre les
langues importantes et les autres ?
Bernard Poche, chercheur et directeur en sociologie au CNRS,
écrit dans son livre « les langues minoritaires en Europe »
que « Les plus grandes langues sont les plus métissées.
L'anglais de type germanique, mais à substrat celtique, est si
imprégné par l'apport normand, les influences françaises
et latines, que l'hybridation offre presque un maximum : or c'est la langue qui
possède la plus grande force d'expansion mondiale » 27
Toujours dans le même ouvrage, Bernard Poche
précise que les grandes langues de culture vont en se rapprochant :
l'écriture s'est internationalisée, adoption de l'alphabet latin,
les allemands ont abandonné l'écriture gothique afin d'assurer un
statut prestigieux à leur langues.
18
27 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 231
19
1.5. Diversité linguistique en Europe : obstacle
ou atout ?
1.5.1. Langues minoritaires / langues majoritaires
Malgré la volonté farouche de l'union
européenne de protéger et sauvegarder sa diversité
linguistique, il serait naïf de croire que toutes les langues
européennes bénéficient de la même reconnaissance et
sont utilisées sans distinction aucune :
Les langues les plus utilisées en Europe sont
l'anglais, l'allemand, l'espagnol, le français et l'italien même
si l'utilisation de langues régionales persiste dans des pays comme le
royaume uni avec le welsh et le gaélique ou encore
l'irlandais.28
On parle alors de langues majoritaires et minoritaires.
Les langues majoritaires ou langues d'état sont les
langues officielles (et littéraires) d'un état dont la forme et
unitaire et centralisée.29 Elles sont associées
à la modernité, la rationalité, la productivité et
la rentabilité. Elles sont également synonymes de pouvoir et de
prestige.30
Les langues minoritaires quant à elles sont des langues
non étatiques, un fait confus qui découlerait de
représentations sociales, de sensibilités. Elles sont le signe
d'une appartenance identitaire et sont ancrées dans la culture
populaire. Elles deviennent des « sujets fantômes », de telle
sorte qu'il est impossible de les dénombrer en Europe. Leur utilisation
est aujourd'hui
28 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 231
29 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 182
30 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 62
20
« militante »31 et protégée
par la « Charte Européenne des langues régionales ou
minoritaires », une initiative du Conseil de l'Europe en 1992.
Les langues ne sont donc pas égales entre elles, les
plus pratiquées sont estimées en « position favorable »
ou à défaut celles qui bénéficient d'un soutien
politique, institutionnel, culturel ou encore médiatique important comme
c'est le cas du catalan en catalogne ou encore du
luxembourgeois32.
1.5.2. Volonté d'unification : une utopie ?
La question est de savoir s'il est possible de mettre fin
à ces inégalités linguistique et avec quels moyens. La
création d'une langue véhiculaire unique serait une solution mais
pourra elle concilier les revendications ethniques, géographiques,
politiques, intellectuelles qui s'identifient à une langue
?33 Les langues contiennent en effet l'histoire des
sociétés et de des hommes et les perpétuent. Cependant
dans une politique d'harmonisation de l'Europe, après la création
d'un marché et d'une monnaie commune, la création d'une langue
véhiculaire commune a souvent était considérée et
ce malgré la garantie de l'usage de toutes les langues officielles entre
les états membres.34 Or aujourd'hui toutes ces tentatives se
sont soldées par un échec.
31 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 49
32 Poche, Bernard, (2000), Les langues
minoritaires en Europe, Grenoble : PUG (Presses universitaires de
Grenoble), p. 150
33 Deproost, Paul-Augustin, (2004), Langues
imaginaires européens, Paris, L'Harmattan, p. 7
34 Deproost, Paul-Augustin, (2004), Langues
imaginaires européens, Paris, L'Harmattan, p. 29
21
1.5.3. Échecs de la création d'une langue
véhiculaire européenne
Déjà en 1885, on peut constater en France une
volonté de créer une langue internationale auxiliaire pour
répondre à l'émergence du Volapük, langue
à vocation universelle inventée par l'allemand M.Schleyer et qui
permettrait « à tous les peuples de communiquer entre eux »
tout en répondant à « tous les besoins commerciaux et
intellectuels du monde entier ».
Lorsque M. Letellier met au point cette langue, il met un
point d'honneur à ne pas « sacrifier l'amour-propre de peuple
à peuple puisque c'est notre propre langue que nous parlerons »,
langue qui sera transformée grammaticalement au moyen de 25 lettres de
l'alphabet auxquelles M. Letellier a attribué certaines fonctions
convenues.
Cette langue internationale ou encore «langue maternelle
internationale » devait se plier à tous les dialectes et
s'apprendre « de façon très rapide puisque la grammaire ne
contient que 16 pages » et répondait à un besoin social
puisqu'elle permettait « de mettre à la portée de toutes les
races, par la transcription, les chefs d'oeuvre intellectuels [...] de
multiplier les relations commerciales, de faire diminuer
considérablement le prix de revient des
marchandises.»35
Bien sûr, la volonté de développer une
langue universelle qui rassemblerait les hommes ne date pas d'hier et se
rapporte au mythe biblique de la tour de Babel.
En effet, on peut lire dans l'Ancien Testament, 1er
verset du chapitre 11 de la Genèse que tous les habitants sur la terre
utilisaient la même langue et décidèrent d'ériger
une tour qui irait jusqu'aux cieux « faisons- nous un nom et ne soyons pas
dispersés sur toute la terre ». Cette
35 CHÉRIE, Alfred, La langue
internationale démontrée pratique, facile et actuellement
à la portée de chaque peuple d'Europe ou d'Asie au moyen de
l'analyse grammaticale de sa langue maternelle d'après les travaux
(1858-1886) de M. C. L. A. Letellier : comparaison avec Volapuk /
conférences faites par Alfred Chérie, de Paris à Dijon,
Lyon et Marseille, Paris, A. Chérie
volonté d'unité, cette manifestation d'orgueil
fut punie par le seigneur, qui décida de « confondre leur langage
pour qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres »
Cette parabole montre bien la puissance du langage et les jeux
de pouvoirs qu'il implique, une langue commune fait certes l'unité des
peuple mais assurerait en sus une position de pouvoir telle qu'elle pourrait
rivaliser avec la puissance divine.
Cependant une langue unique et puissante peut être
tournée en dérision comme ce fut le cas de la langue
internationale du Dr Zamenhof : L'Esperanto.
Risée par les médias et considérée
comme une solution déraisonnable par ses pairs, l'esperanto a
échoué comme langue internationale :
« Une langue, inventée, artificielle, ne peut pas
servir de langue commune. C'est pourquoi l'esperanto reste toujours une
fantaisie. »36
Tout comme le volapuk ou la langue de Mr Lettelier,
l'esperanto se voulait répondre à une grammaire et un vocabulaire
simple afin d'être accessible au plus grand nombre cependant celle -ci
était appréhendée de manière très dure par
l'opinion publique :
22
36 Piron, Claude, (1987), Esperanto : l'image et la
réalité, Paris : Université de Paris VIII
23
L'esperanto serait une « langue faite de bric et de broc
à partir d'éléments empruntés aux langues d'Europe
occidentale », un « code rigide, inexpressif et sans vie »
« défendu par une poignée de militants manquant de
réalisme qui s'imaginent que la paix découlerait automatiquement
de l'adoption d'une langue universelle ».37
En somme, l'esperanto serait une langue simpliste, « sans
âme » ni peuple ou territoire
La solution optimale serait d'utiliser une langue vivante qui
passerait outre les frontières, les barrières spatiales et
linguistiques comme ce fut jadis le cas du français, une lingua
franca acceptée et reconnue de tous.
Aujourd'hui cette lingua franca, s'il doit y en avoir
une, serait l'anglais.
Pour conclure cette partie sur la diversité des langues
en Europe, il faut retenir que le multilinguisme de l'Europe contribue à
sa compétitivité et qu'il est important de sauvegarder cette
particularité. C'est pour cette raison que lors du sommet de Barcelone
entre les états membres de 2002 il a été
décidé que chaque citoyen apprenne au moins deux langues
étrangères en plus de sa langue maternelle.38
Avec l'internationalisation des marchés et la
mondialisation, les langues ne sont plus seulement utilisées pour
augmenter les ventes et faire du marketing, elles sont devenues cruciales dans
le développement de relations stratégiques entre les pays et
entre les entreprises.
37 Piron, Claude, (1987), Esperanto : l'image et la
réalité, Paris : Université de Paris VIII, p. 21
38 Etienne Davignon, Viscount, (2007), «
Languages means business : Companies work better with languages », DG
Education and Culture, European Comission
24
2. Culture d'entreprise et facteurs d'influence
2.1. La notion
d'entreprise
2.1.1. Définition
La notion d'entreprise est définie comme « Toute
entité exerçant une activité économique »
c'est-à-dire « activité consistant à offrir des biens
ou des services sur un marché donné. Son statut juridique et son
mode de financement sont indépendants. »39
Le terme d'entreprise s'est implanté progressivement et
sert à regrouper différents types d'activités. C'est une
notion fonctionnelle définie par sa finalité
économique.
Toutefois « l'entreprise » peut également
désigner des personnes physiques, des particuliers exerçant une
activité économique (ex : agriculteur)40 ou des
organismes publics à la condition que celui-ci soit « une
unité économique » et « opère de manière
indépendante sur le marché ».
Enfin, le concept d'entreprise et de concurrence sont
intrinsèquement liés puisqu'il existe des ententes entre les
entreprises, « des arrangements entre entreprises concurrentes
destinés à limiter ou à éliminer la concurrence
s'exerçant entre elles. Ces arrangements ont pour but d'augmenter les
prix et les bénéfices des entreprises participantes, sans
produire d'avantages compensatoires objectifs. » 41
39 Parthenia, Avgeri, (2005), Entreprises, concurrence
et Europe (3ème édition), Paris, Foucher
40 Parthenia, Avgeri, (2005), Entreprises, concurrence
et Europe (3ème édition), Paris, Foucher, p. 10
41 Parthenia, Avgeri, (2005), Entreprises, concurrence
et Europe (3ème édition), Paris, Foucher, p. 9
25
2.1.2. Internationalisation des entreprises
Le phénomène d'internationalisation a
commencé dans les années 1980 et repose sur le constat de «
la nature imparfaite de la concurrence »42
corrélée à la volonté de développer de
« nouveaux relais de croissance » pour pallier la saturation des
marchés ou pour plus simplement répondre à une politique
d'expansion.43
En effet, face à une clientèle de plus en plus
multiculturelle, les attentes varient et se diversifient, souvent en faveur
d'un rapprochement des normes et des cultures. Cette clientèle
internationale est désormais accessible grâce à l'essor du
libéralisme économique ainsi que la globalisation de
l'économie et l'ouverture des frontières qui l'accompagnent.
Cette internationalisation des entreprises est
également rendue possible par le développement des nouvelles
technologies de l'information44
2.1.3. La multinationale : vecteur de
l'internationalisation
La Multinationale est définie par la CNUCED (
Conférence nationale des nations unies sur le commerce et le
développement) comme une : « Entreprise qui, indépendamment
de sa forme juridique particulière, exerce un contrôle direct ou
indirect sur les actifs possédés par une ou plusieurs autres
entreprises situées dans des pays différents de celui où
cette entreprise a son siège social. » (Définition de la
CNUCED (2004), World Investment Report, publication des Nations
Unies)45
42 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod,
p. 23
43 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod,
p. 30
44 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod,
p.28
45 Mazerolle, Fabrice, (2006), Les firmes
multinationales, Paris, Vuibert
Selon le CNUCED, il y'avait en 2004, 70 000 multinationales
avec 690 000 filiales dans le monde (CNUCED (2004), World Investment
Report, publication des Nations Unies). Celles-ci ont de plus en plus
tendance à travailler en réseau en facilitant la
coopération entre les multinationales.
26
2.2. L'entreprise à l'ère
contemporaine
2.2.1. Fusions & acquisitions
Les fusions et acquisitions d'entreprises (M&A en anglais)
est un phénomène fascinant : elles sont de plus en plus nombreuse
et les sommes avancées frôlent l'indécence. Les entreprises
concernées justifient ce phénomène en avançant la
nécessité de survivre dans un monde globalisé « eat
or be eaten », le phénomène est tel qu'on parle de «
mergermania ».46
Franck Ceddaha, spécialiste des opérations de
fusions et acquisitions définit ce phénomène comme la
« mise en commun d'actifs ou d'intérêts économique
entre deux ou plusieurs entités »47 ou encore «
Alliances stratégiques dans un but de croissance conjointe »48
46 Bellavance, Christian, (1998), « Mergers : why
and how ? », in CA Magazine
47 Ceddaha, Franck, (2005), « Fusions,
acquisitions : évaluation, négociation, structuration »,
Paris, Economica
48 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod
27
Ce phénomène s'explique par la volonté
d'obtenir des gains financiers grâce à un gain d'expertise, de
parts de marchés et ressources et surtout davantage de
possibilités pour restructurer et moduler la nouvelle entité
engendrée afin qu'elle soit le plus compétitive et efficace
possible.
Les transactions se font généralement entre
entreprises du même secteur d'activité, le plus fréquemment
entre concurrent s directs ou positionnés sur un segment
complémentaire dans le but de créer de la valeur. Cependant il
arrive parfois que ces transactions soient réalisées pour des
raisons moins rationnelles, elles peuvent être dictées par une
dimension émotionnelle et subjective. (Par ex : âge, état
de santé... .)49
C'est pourquoi il est important de comprendre les objectifs de
l'investisseur en amont par le biais d'un diagnostic stratégique
préalablement effectué. En effet, il est possible que des mesures
d'intégration post acquisitions soient prises de la part de
l'investisseur pour s'assurer le contrôle de l'entité acquise ou
avec laquelle il fusionne. Cela peut se traduire par exemple par des
changements au niveau de la direction générale, une fusion du
management afin d'asseoir son contrôle sur la nouvelle
entité.50
49 Sillero, Alberto, (2002), Diagnostic global
d'entreprise : guide pratique d'investigation et de due diligence
destiné aux opérations d'acquisition, de fusion et
d'évaluation d'entreprises, Paris, Eska, p. 35
50 Sillero, Alberto, (2002), Diagnostic global
d'entreprise : guide pratique d'investigation et de due diligence
destiné aux opérations d'acquisition, de fusion et
d'évaluation d'entreprises, Paris, Eska, p. 43
28
2.2.2. Les enjeux structurels explicatifs de ces
fusions
Enjeux stratégiques
|
Positionnement et image recherchés par l'entreprise,
degré
d'interdépendances stratégiques entre les 2
entités
|
Enjeux managériaux
|
Niveau de contrôle et de coordination attendu et
exercé sur les différentes entités du groupe, Culture
d'entreprise de des dirigeants, niveau de ressources disponibles et
capacité de mobilisation de ressources supplémentaires
|
Enjeux financiers
|
Capacités de financement et d'endettement, degré
d'engagement
financier recherché, accès aux aides et
subventions du pays partenaire.
|
Enjeux commerciaux
|
Degré de connaissance des marchés visés,
accessibilité des marchés cibles, profils, comportements et
attitudes des acheteurs, degré de notoriété accru
|
Source : « Entreprises multinationales :
Stratégie, Restructuration, Gouvernance » Olivier Meier, Guillaume
Schier,
DUNOD p4451
En somme le phénomène de fusions et acquisitions
se veut être une réponse adaptée à
l'élargissement des marchés, exigences de taille et besoin de
partager de nouvelles ressources face à une concurrence mondiale :
« L'évolution de l'économie mondiale
conduit les entreprises à devenir plus efficientes et productives, et
donc à s'allier à d'autres entreprises, pour pouvoir faire face
à une pression concurrentielle plus forte », la fusion entre deux
entreprises permettrait « de faire ensemble ce qu'elle ne pourraient pas
faire seules, comme par exemple de mettre au point de nouveaux produits ou
d'accéder à de nouveaux marchés »52
51 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod,
p. 44
52 Meier, Olivier et al., (2005), Entreprises
multinationales : stratégie restructuration gouvernance, Paris, Dunod,
p. 105
29
2.2.3. Les situations linguistiques de ces entreprises
Lors des fusions et acquisitions de nombreux facteurs sont
considérés comme nous l'avons vu dans la partie ci-dessus (2.3.2)
mais il y a un autre facteur que je n'ai pas mentionné : le facteur
linguistique.
En effet, les entreprises vont avoir tendance à
fusionner avec des entreprises bénéficiant d'une situation
linguistique similaire ou proche de la leur. Par exemple lorsque les
américains ont souhaité investir en Europe, ils ont
préféré fusionner avec des entreprises anglaises ce qui
facilite non seulement les échanges mais permet aussi aux familles des
expatriés d'être moins dépaysés (les enfants peuvent
aller à l'école sans difficulté par ex).53
Une étude du cabinet KPMG va dans ce sens en indiquant
qu'une fusion entre une entreprise américaine et anglaise avait 45 fois
plus de chances d'être une réussite que n'importe quelle autre
combinaison entre un entreprise européenne et américaine qui a 11
fois moins de chances de réussir.54
Cependant si « Ce type de facteurs secondaires peut faire
basculer une décision entre par exemple deux territoires comme l'Alsace
et la région du Nord pas de calais, mais il y'a peu de chances que cela
mette en balance des pays comme Madagascar et la France » 55
Cette tendance ne peut donc pas être
généralisée mais une chose est sûre : les
entreprises s'orientent là où leurs intérêts les
mènent quitte à considérer trop tardivement les facteurs
culturels et linguistiques.
53 Mazerolle, Fabrice, (2006), Les firmes
multinationales, Paris, Vuibert, p. 74
54 Gill, Carol, (2012), The role of leadership in
successful international mergers and acquisitions: Why Renault-Nissan succeeded
and Daimlerchrysler-Mitsubishi failed, in Human resource management,
p. 434
55 Mucchieli, Jean-Louis, (2003), « Les
déterminantes et les impacts de la multinationalisation des entreprises
», Archives audiovisuelles de la recherche en science humaines et
sociales.
30
Cette hâte de fusionner ou d'acquérir une
entreprise cible sans considérer la situation sociolinguistique de
celle-ci précipite l'entreprise source à sa perte : En 2007 sur
200 opérations majeures de fusions et acquisitions en Europe seulement
9% ont été considérées comme des
réussites.56 La réunion de deux entreprises implique
également le contact de nouvelles langues et de facto le
développement de relations de pouvoir entre les langues en
présence. Nous approfondirons cet aspect dans la partie 2 .5.2 de ce
devoir.
2.2.4. Vers un besoin de normalisation et de transmission
du savoir
Nous avons déjà abordé l'importance des
« language industries » (qui « font des langages naturels leur
matière première et leur instrument »i) que nous
avons évoqué dans la partie précédente pour mettre
en exergue le challenge que représentait le multilinguisme
européen au niveau de la communication entre les pays de l'union
européenne.
Dans un contexte d'entreprises interculturelles et
multilingues les enjeux linguistiques sont les mêmes cependant viennent
s'ajouter le besoin d'un référentiel commun pour les
activités industrielles et commerciales, un besoin de normalisation.
« La normalisation a pour objet de fournir des documents
de référence comportant des solutions à des
problèmes techniques et commerciaux, concernant des produits, biens et
services, qui se posent de façon répétée dans des
relations entre partenaires économiques, scientifiques, techniques et
sociaux. »57
La normalisation contribue à une meilleure croissance
économique que les brevets et licences. Et prodigue aux entreprises une
longueur d'avance par rapport à leurs concurrents en s'adaptant aux
demandes des marchés et aux nouvelles technologies.58
56 Weber, Yaakov, et al., (2012), « Mergers
and acquisitions process : the use of corporate culture analysis », in
Cross Cultural Management : An International Journal, p. 288
57 (de) Vecchi, D, cours de management et langage,
scéance
58 (de) Vecchi, D, cours de management et langage
31
Pour pérenniser cet avantage compétitif, la
nouvelle entité doit également mettre au point un système
de transmission du savoir et des connaissances entre ses membres, on parle de
Knowledge management.
Le Knowledge Management (souvent abrégé sous
l'acronyme KM) part du postulat que les entreprises sont des êtres
vivants et qu'elles possèdent ce qu'elles « savent
»59et encourage les individus à partager leurs
connaissances pour faire progresser l'entreprise.
Il consiste en l'explicitation de connaissances tacites ainsi
qu'à leur intégration et répond à un besoin de
formalisation.
« Les systèmes de Knowledge management cherchent
l'exploitation de données qui seront interprétées pour
devenir des informations à intégrer dans l'expérience
humaine afin de devenir un atout pour l'entreprise. »60
Lors d'une fusion il faut donc prendre en compte l'importance
de la communication et l'intégration de celle-ci par tous les membres,
c'est pourquoi la normalisation est un processus crucial lors de la
réunion de deux entreprises. Allié au Knowledge Management, ce
processus assure une communication optimale (et ce même dans un contexte
multiculturel) et une meilleure performance puisque les connaissances sont
transmises de manière explicites et formalisées. Cependant il
reste un facteur de taille à considérer, comment faire accepter
le changement aux employés, comment les inciter à participer au
partage de leur connaissances et changer leur habitues. En somme : Comment
« promouvoir » la fusion auprès des employés et
éviter un choc des cultures tout en maintenant (voir augmentant) la
productivité ?
59 (de) Vecchi, D, cours de management et langage
60(de) Vecchi, D, cours de Management et langage
32
2.2 La culture d'entreprise au service de la
performance
2.3.1 Définition de la culture d'entreprise
Difficile de définir la culture d'entreprise de
manière unanime, certaines définitions peuvent même aller
jusqu'à se contredire ce qui crée une confusion autour de sa
signification.
Une définition qui mettrait tout le monde d'accord
serait de dire que la culture d'une entreprise est tout simplement la
manière dont les choses sont faites au sein d'une organisation.
Schein61 va plus loin et écrit que la
culture d'entreprise représente« un ensemble de prémisses et
de croyances partagées [...] qui a fonctionné suffisamment bien
pour qu'il soit considéré valide, et par conséquent est
enseigné aux nouveaux membres comme la manière appropriée
de percevoir, de penser et de ressentir par rapport à ces
problèmes«
Geertz62 rajoute que cette culture est
également un « système de symboles partagés.
»
La diversité de ces définitions met en valeur la
diversité même de la notion de culture, il est déjà
difficile pour un manager d'en saisir les nuances et subtilités qu'en
est-il lorsque celui-ci est confronté à une culture d'entreprise
différente de la sienne dans un contexte international ?
Il y-a deux manières principales d'appréhender
la culture d'une entreprise, la première est de considérer
celle-ci comme une « variable » une facette de l'entreprise que l'on
peut changer, moduler, faire évoluer. La deuxième en revanche est
de considérer la culture d'une entreprise comme son essence même,
elle est dans ce cas difficilement modifiable et doit être
considérée à chaque prise de décision au sein de
l'organisation
Les managers évoluant dans le premier cas de figure,
ont souvent du mal à définir leur culture
61 Schein, Edgar H. et al., (2004), Organizational
culture and leadership (3ème edition), San Fransisco, Jossey-Bass, p.
12
62 Geertz, Clifford, (1973), The interpretation of
cultures: selected essays, New York, Basic Books
33
d'entreprise, ne sachant pas vraiment quelles sont les
règles, les normes ou encore les valeurs de celle-ci ce qui crée
une confusion et ce sans compter l'influence importante que la culture
nationale peut avoir sur celle de l'entreprise. En effet, les employés
apportent leur culture à l'entreprise par la langue, le niveau de
langage qu'ils utilisent et leur us et coutumes.
Pour se réapproprier cette culture et affecter leur
valeurs, attitudes et attentes les managers peuvent utiliser des
procédés comme l'utilisation d'artefacts, de codes, de
héros et même de mythes et légendes63 (comme
l'histoire du fondateur de Harrah's Entertainment64 qui en se
promenant le long d'un couloir de l'un de ses casinos a remarqué que
l'une des ampoules ne fonctionnait pas et a ordonné qu'on la change sur
le champ. L'un des employés présents au moment de la scène
confirme que l'ampoule était encore chaude ce qui montre la connaissance
et l'investissement du fondateur au sein de son organisation)
La deuxième approche relève plus de l'ordre du
processus, chaque jour les membres de l'organisation créent la culture
et celle-ci affectent leur conduite et leur comportement en retour.
Les membres la créent de manière consciente mais
aussi parfois sans même s'en rendre compte, certains membres ne sont
parfois pas conscients d'avoir été « endoctriné
» par les croyances et les valeurs qui garantissent que tous les membres
de l'organisation se considèrent comme un « tout » et avancent
dans la même direction vers les mêmes objectifs à savoir la
longévité et la productivité de l'entreprise.
Chaque organisation possède sa propre culture, sa
propre façon de faire les choses et de gérer ses employés
et j'aimerai insister sur le caractère unique de cette culture qui est
spécifique à une organisation en particulier dans un contexte
défini : tout comme chaque culture ou civilisation a son propre langage,
artefacts, valeurs, mythes et légendes, héros, histoire et
63 Mendenhall, Mark E., (1989), « A painless
approach to integrating «international» into OB, HRM and Management
courses », in Organizational Behavior teaching Review, n°3, pp.
23-27
64 Delong, Thomas et al., (2002), « Harrah's
Entertainment, Inc: Rewarding Our People», Cambridge, Harvard BS
34
normes c'est aussi le cas de chaque entreprise quel que soit
sa taille ou son prestige. Comprendre et adhérer à la culture
d'une entreprise c'est devenir un membre actif de celle-ci et la faire
avancer.
2.3.2 Rôle et éléments constitutifs
Le rôle de la culture d'entreprise est de contribuer
à la performance de l'entreprise. Par exemple la culture d'entreprise
d'Apple met l'accent sur l'innovation, l'esprit collaboratif et la passion
à l'image de son fondateur Steve Job ce qui a largement contribué
à son succès. Comme nous l'avons vu dans la partie ci-dessus,
celle - ci est influencée par trois éléments principaux
à savoir les valeurs et les attitudes du PDG, l'environnement dans
laquelle l'entreprise évolue et la culture locale.
La culture d'entreprise est passée aux nouveaux
employée par un processus de socialisation et influence notre
comportement au travail. Celle-ci est principalement observable au niveau des
artefacts et des valeurs même si son implication va au-delà de ces
éléments.
Les artefacts c'est-à-dire les manifestations physiques
et observables de la culture d'entreprise : acronymes, histoires et
légendes, rituels et évènements mais plus
concrètement des places de parking spéciales, la
décoration ou encore la manière de s'habiller (formelle ou plus
décontractée.)65 Ceux- ci se concentrent autour de
trois points cruciaux : le langage, les symboles non-verbaux et son sens,
chacun de ces trois points est décisif pour comprendre et
interpréter la culture d'une entreprise.
Selon Schein, les valeurs d'une entreprise représentent
le deuxième niveau de la culture d'entreprise : Les valeurs d'une
entreprise regroupent l'ensemble des convictions et priorités
65 Kinicki, Angelo, et al., (2003), Organizational
behavior: key concepts, skills & best practices, Boston, McGraw-Hill/Irwin,
p. 37
35
communes à un groupe de personnes, ce sont ces valeurs
qui soudent les personnes entre elles et créent un groupe à
proprement parler plutôt qu'un ensemble d'étrangers travaillant au
même endroit.
Ce sont les valeurs propres à une entreprise qui
dictent un code de conduite à adopter à chaque niveau de
l'organisation mais aussi transmettent ce qui est vraiment important, ce
à quoi il faut faire attention et comment interpréter
différentes significations et situations : C'est en partageant ces
valeurs que les membres de l'organisation constituent un groupe efficace
d'employés qui se motivent les uns les autres à donner le
meilleur d'eux-mêmes et par conséquent la meilleure performance
possible. Si les valeurs de l'entreprise sont assimilées et
profondément ancrées dans chaque employé écrit
Chener alors il n'est pas nécessaire de les encadrer ou de les
superviser.
36
2.3.3 De l'importance du parler d'entreprise
Défini comme « l'ensemble de termes et expressions
propres à une entreprise qui contribuent à sa culture, à
sa connaissance et à son identité à un moment donné
de son histoire. »
Chaque jargon d'entreprise est unique et contribue à
l'identité de l'organisation. Il est important de noter que celui-ci
n'est pas figé dans le temps et évolue au gré du
développement de l'entreprise. C'est un élément phare dans
la transmission des connaissances et l'intégration des nouveaux
employés qui est utilisé aussi bien au sein de l'entreprise qu'en
dehors (communication externe).
Si celui-ci jouit d'une place privilégiée dans
la vie en entreprise, il est pourtant très souvent négligé
puisque 65% des employés ont admis ne pas tout le temps le
comprendre.
Paradoxalement ce sont les nouvelles recrues qui le
connaissent le mieux puisqu'elles ont tendance à faire preuve de
curiosité et d'intérêt. En revanche, les employés
existants et plus particulièrement les postes « seniors » ne
prennent plus la peine de se remettre au goût du jour ou n'osent pas
demander de peur d'admettre leur ignorance.
Enfin un tel chiffre peut correspondre à un manque
d'initiation, une formation bâclée ou tout simplement un refus
délibéré de comprendre.
37
2.3 De la culture locale à la culture
d'entreprise
Aussi, une fusion ou acquisition entre deux ou plusieurs
entreprises, même si elle représente un phénomène
d'actualité, connaît des limites puisqu'une étude du
cabinet français d'audit, d'expertise comptable KPMG a
démontré que sur 100 dirigeants impliqués dans 100 accords
entre 1996 et 1998, 83% des fusions et acquisitions n'ont produit aucun
bénéfices pour les actionnaires et parties prenantes de
l'entreprise.66
En effet, il faut penser aux impacts et retombées non
pas seulement économiques mais aussi l'impact sur l'emploi (crées
ou supprimés), sur la compétitivité ainsi que d'autres
facteurs à prendre en considération comme celui de la culture
d'entreprise : C'est un facteur important de la performance qui donne avantage
un compétitif en coordonnant les efforts des employés dans une
dynamique de fédération.
C'est pourquoi celle-ci doit être
considérée en amont de la négociation ce qui
réduirait considérablement les échecs des fusions et
acquisitions. La question qui se pose maintenant est de savoir comment «
promouvoir » la fusion auprès des employés et éviter
un choc des cultures tout en maintenant (voir augmentant) la
productivité ?
2.4.1 Intégration & assimilation
Pour qu'une entreprise et plus particulièrement une
entreprise multiculturelle soit performante, elle ne peut pas faire abstraction
de la culture de ses parties prenantes. Que ce
66 Gill, Carol, (2012), The role of leadership in successful
international mergers and acquisitions: Why Renault-Nissan succeeded and
Daimlerchrysler-Mitsubishi failed, in Human resource management
38
soit la culture des clients, des employés ou des
collaborateurs, celle-ci doit être respectée et prise en
considération.
C'est pourquoi de nombreuses multinationales misent sur
l'emploi de « talents locaux » tout en développant une culture
d'entreprise et des objectifs communs.
Pour réussir dans les relations interculturelles, les
managers doivent faire preuve d'ouverture d'esprit. Il est de portée
universelle que les managers arrogants, imbus d'eux même et
résistants à toute forme d'apprentissage auront une piètre
performance lors d'un contact avec d'autres cultures.
C'est pourquoi il est important d'apprendre par le biais de
cours portant sur la diversité culturelle par exemple afin que les
managers puissent adapter leur management à la culture locale.
Une des solutions est de recruter directement des locaux et de
leur enseigner la culture d'entreprise plutôt que former des
expatriés à la culture locale. Cela permet en sus d'éviter
la scission entre les employés locaux et « les autres » qui se
produit souvent quand ce sont des « étrangers » qui se
retrouvent en position d'encadrement et prodigue aux employés existants
de l'entreprise cible de se sentir valorisés et intégrés ,
c'est un symbole important qui donne confiance aux locaux et les
responsabilise.67
Les employés de la société source doivent
être délaissés pour autant, ils peuvent en effet jouer le
rôle de mentor dans la transmission de la culture d'entreprise et des
connaissances (cf. Knowledge Management que nous avons évoqué)
dans la mesure où ils tissent une relation de confiance et de
loyauté avec les employés locaux.
67 Byron, Sebastian, (1996), « Integrating local
and corporate cultures », in HR Magazine, Volume
41, n°9, pp. 114 Magazine, Volume 41, n°9,
p. 114
39
La notion d'unité et d'identité est donc
nécessaire pour qu'une fusion fonctionne sur le long terme, les facteurs
psychologiques ainsi que la question de l'identité doivent être au
coeur des considérations.68
En effet sans aucun engagement de la part des employés,
Si tous les employés de la nouvelle entité ne travaillent pas
ensemble dans la même direction alors celle-ci est vouée à
l'échec.69 Le problème des fusions et que le
problème d'identité est considéré une fois la
fusion aboutie or celui-ci doit être pris en considération bien en
amont. Aujourd'hui ce sont des aspects superficiels qui priment comme le choix
d'un nouveau nom et logo au détriment de problèmes
d'identité sous-jacents bien plus stratégiques.
Afin que la synergie psychologique s'exerce il faut se poser
la question fondamentale du « Qui sommes-nous ? » et de donner la
réponse à toutes les parties prenantes de l'entreprise. Qu'est ce
qui fait que cette organisation est unique et constitue son
essence.70
68 Bouchikhi, Hamid et al. (2012), « Making
Mergers Work », in MIT Sloan Management Review, Cambridge, MIT
69 Bouchikhi, Hamid et al. (2012), « Making
Mergers Work », in MIT Sloan Management Review, Cambridge, MIT,
p. 64
70 Bouchikhi, Hamid et al. (2012), « Making
Mergers Work », in MIT Sloan Management Review, Cambridge, MIT,
p. 66
40
2.4.2 Manager dans la diversité
« Les cultures nationales pèsent de tout leur
poids, même là où les grands efforts sont faits pour
créer, au-delà des frontières une culture d'entreprise
originale »71
La culture nationale « transcende la somme des cultures
particulières des groupes qui la composent ».72 Celle-
ci doit donc être considérée avec attention lors de
l'élaboration ou l'application de la culture, les managers doivent faire
en sorte que celles-ci ne soient pas en conflit.73
Prenons le cas d'école de la fusion ratée entre
le groupe allemand DaimlerChrysler et le groupe japonais
Mitsubishi.74 La culture japonaise a influencé la culture
d'entreprise et les pratiques RH de manière à créer des
entreprises orientées vers la recherche de profit et la
comptabilité avec une notion de l'urgence peu présente ce qui
mène à une piètre performance financière et des
marchés.
C'est pourquoi les entreprises japonais Mitsubishi ou encore
Nissan ont été acquises par des entreprises occidentales. La
culture d'entreprises occidentale veut que les employés soient
récompensés par rapport à leur performance or ceci
s'inscrit en conflit avec la culture d'entreprise asiatique beaucoup plus
collectiviste pour qui de telles pratiques sont choquantes. Lors de la
réunion de DaimlerChrysler et Mitsubishi, les employés japonais
ont fait preuve de résistance envers la culture d'entreprise et les
pratiques RH du DaimlerChrysler, les employés japonais refusaient en
effet de prendre des responsabilités, se comportaient de
manière
71 D'Iribarne, Philippe, (1989), « La logique de
l'honneur, Gestion des entreprises et traditions nationales », Paris, du
Seuil
72 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris,
Dunod
73 Kinicki, Angelo, et al., (2003), Organizational
behavior: key concepts, skills & best practices, Boston, McGraw-Hill/Irwin,
p. 65
74 Gill, Carol, (2012), The role of leadership in
successful international mergers and acquisitions: Why Renault-Nissan succeeded
and Daimlerchrysler-Mitsubishi failed, in Human resource management
41
résignée tout en rejetant fermement le
système de bonus relatif à la performance que j'évoque
ci-dessus.75
Pour éviter une telle situation d'échec, les
entreprises doivent travailler sur la communication interculturelle et
être sensibilisées aux différentes cultures nationales en
contact.
2.4.3 Communication interculturelle
Afin de développer une intelligence culturelle et
réussir à communiquer de manière optimale, Geert Hofstede
identifie 5 dimensions à respecter : L'importance de la distance
hiérarchique, l'orientation individualiste ou communautaire, la relation
à l'incertitude et à l'ambiguïté, l'orientation
masculine ou féminine des valeurs 76 et enfin la relation au
temps (monochronique ou polychronique)
75 Gill, Carol, (2012), The role of leadership in
successful international mergers and acquisitions: Why Renault-Nissan succeeded
and Daimlerchrysler-Mitsubishi failed, in Human resource management,
p. 437
76 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 32
42
Ces dimensions culturelles peuvent devenir des obstacles de
taille si elles ne sont pas intégrées dans une stratégie
d'ouverture culturelle.
La première chose à faire dans un contexte de
communication interculturelle est de se défaire des idées
reçues, biais et autres stéréotypes afin de faire preuve
d'intelligence culturelle c'est-à-dire « la capacité
à interpréter des situations interculturelles ambiguës avec
précision. » 77
Deuxièmement, l'affectation d'expatriés doit
être préparée en amont par des cours de sensibilisation
à la diversité culturelle afin d'éviter non seulement que
celui-ci commette des impairs mais aussi pour le préparer au choc
culturel inéluctable Une étude récente du cabinet d'audit
Pricewaterhouse Coopers a montré que plus de 25% d'expatriés ont
quitté leur emploi dans l'année suivant leur retour 78
souvent traumatisés par des problèmes d'ajustement à la
culture locale. L'utilisation de mentors ou de sponsors peut être un
moyen de diminuer ce bras de fer culturel cependant c'est une
réalité qui existe et avec laquelle il faut composer.
77 Kinicki, Angelo, et al., (2003), Organizational
behavior: key concepts, skills & best practices, Boston, McGraw-Hill/Irwin,
p. 68
78 Maingault, Amy et al., (2008), « Policy Tips,
Repatriation, Safe, Harbor Rules », in HR Magazine, pp.
34-35
43
2.4 Le langage : outil de domination
«Si celui dont j'étudie la langue ne respecte pas
la mienne, parler sa langue cesse d'être un geste d'ouverture, il devient
un acte d'allégeance et de soumission.»79
2.5.1 Stratégie et rapports de force
D'après Bachrach et Baratz80, il y a
relation de force et domination dès lors que A est impliqué dans
la prise de décision dont dépend B, la position de pouvoir vient
donc de l'interaction entre A et B et du fait que les actions de A peuvent
influencer celles de B. Cette position de pouvoir peut même être
exercée de manière invisible, par une pression psychologique dans
le but d'influencer B à suivre les mêmes valeurs sociales par
exemple.
Cette domination sociale est particulièrement
importante dans le cadre d'échanges interculturels entre deux
sociétés.
Quand on parle de relations de pouvoir et de domination au
sein d'une entreprise, on pense spontanément à l'organisation
hiérarchique qu'il est courant de rencontrer et de ses implications sur
les rapports sociaux.
Or, avec la mondialisation et l'essor des fusions &
acquisitions et de la sous-traitance, il est de plus en plus courant
d'évoluer dans plusieurs langues dans le monde de l'entreprise.
Dans le cadre d'une domination sociale, les groupes sociaux
(B) ont tendance à adopter ou, à défaut, imiter le langage
du groupe dominant (A) selon Bourdieu. Lorsque ce n'est pas le cas, le groupe B
peut répondre à cette domination sociale par la langue en
adoptant une forme de résistance en développant leur propre
langage alternatif.
79 Maalouf, Amin, (1998), Les identités
meurtrières, Paris, Grasset
80 Bachrach, Peter, (1962), « The Faces of Power
», in The American Political Science Review, pp. 947-952
44
Concernant les personnes qui maîtrisent la langue A,
elles se retrouvent dans une position de pouvoir de facto qui n'est pas sans
risques. Nous reviendrons sur ce point dans la partie 3 de ce devoir.
2.5.2 Rapport entre les langues en présence
Tout comme il existe des langues majoritaires et minoritaires
au sein d'un même pays (cf. 1.5.1), ce constat s'applique aussi au milieu
de l'entreprise avec une dynamique de langues dominantes et langues
dominées. Cependant si la distinction entre langues majoritaires et
minoritaires résultait le plus souvent d'une supériorité
ou infériorité numérique, ce n'est pas le cas pour les
langues dominantes et dominées en entreprise : c'est la langue du
pouvoir qui prime.
Cette langue est celle qui est vraisemblablement
définie par la politique linguistique de l'entreprise.81
Aussi la maitrise de la langue du pouvoir définit la
position sociale de celui qui la parle au sein de l'entreprise.
En effet, la personne ne maitrisant pas la langue du pouvoir
ou mal va avoir tendance à utiliser de nombreux marqueurs linguistiques
trahissant sa position de faiblesse lors de contacts avec la personne parlant
la langue dominante.82
Ils auront tendance à utiliser beaucoup plus de
formules interrogatives pour chercher l'aval de leur interlocuteur, utiliser
des formules de politesses plus que de raison tout en faisant preuve
d'hésitations verbales ou non verbales.83 Cependant en
adoptant un tel comportement, cette
81 Wodak, Ruth, (2012), « Language, power and
identity », in Language Teaching, p.216
82 Areni, Charles S, et al., (2005), « Language
power and persuasion », in Psychology & Marketing
83 Vaara, Eero, et al. (2005), « Language and the
Circuits of Power in a Merging Multinational Corporation», in Journal of
Management Studies
45
personne se voit obtenir un statut social diminué mais
risque également de perdre en crédibilité professionnelle
(nous reparlerons de ce phénomène plus précisément
dans la partie 3.5.3 de ce devoir). En revanche les personnes parlant la langue
A, accéderont plus facilement à des postes clefs, et seront les
garants de la transmission de l'information entre les deux entreprises. Leur
pouvoir s'en trouve donc sensiblement augmenté.84
Lors de notre étude du phénomène des
fusions et acquisitions , nous avons pu étudier les stratégies
des grands groupes pour optimiser leur performance en fusionnant avec leur
concurrents ou en délocalisant une partie de leur activité dans
des pays où les coûts seront moindres et la qualité au
rendez-vous. En sus du gain de temps et d'argent engendrés, les
entreprises « sources» ou donneurs d'ordre s'assuraient un
contrôle et un suivi optimal des opérations offshores mais
bénéficiaient aussi de plus de flexibilité et de temps
pour mener d'autres opérations en interne. Cependant, après notre
analyse de la culture d'entreprise et de son implication sur la performance il
apparaît désormais clair que celle-ci doit être pris en
compte lors d'une décision de partenariat commercial que ce soit dans le
cadre d'une fusion, acquisition ou encore de sous-traitance.
La culture d'entreprise, la culture nationale, les langues en
présence sont autant de facteurs qui doivent être
considérés avant de prendre une décision : C'est pourquoi
de plus en plus d'organisations ont adopté la solution innovante du
« in shore » qui consiste à externaliser certaines de ses
activités mais tout en restant sur le même territoire. C'est la
valeur ajoutée du centre d'appels Mars Marketing, implanté
à Marseille qui fait de sa localisation sa plus-value : un centre
d'appel marseillais, français et européen tourné vers le
monde.
84 Vaara, Eero, et al. (2005), « Language and the
Circuits of Power in a Merging Multinational Corporation», in Journal of
Management Studies
46
3 MaRs Marketing : Étude de cas d'un sous-
traitant in-shore
3.1 Présentation de Mars Marketing
3.1.1 Histoire et fondation
Mars Marketing est un centre d'appels fondé en 1996 par
2 femmes, Marie Eve Bensussan et Véronique Darier avec pour but
d'être un centre d'appels "humain" avec un grand sens du service et des
valeurs fortes telles que l'intelligence, l'humanité mais aussi la
justice et l'exemplarité :
Depuis 18 ans, M.A.R.S. Marketing propose des solutions de
développement des ventes et de la clientèle par
téléphone, en fidélisation ou en conquête. Nous
sommes implantés à Marseille - et uniquement à Marseille -
avec un plateau de 80 positions. Nos clients sont des sociétés
b2b comme l'hébergeur internet 1and1, ou b2c comme le portail de
location saisonnières Home Away/Bed And Breakfast, ou les vins Philippe
de Rothschild. Ce qui nous caractérise, c'est de faire des appels
intelligents... Dans un métier stéréotypé, il faut
prendre le temps de comprendre le client. «85
Tout est mis en oeuvre pour le bien-être et
l'épanouissement personnel des employés qui ne sont pas de
simples télévendeurs utilisés pour des missions
ponctuelles dont on se sépare une fois la mission finie. Ici chaque
employé est sous un contrat à durée
indéterminée et a la possibilité d'avoir des primes selon
ses résultats même lorsqu'il est encore en période d'essai.
De nombreux télévendeurs travaillent chez Mars Marketing depuis
plus de 4 ans, ce qui est extraordinaire dans le monde du
télémarketing. Mars Marketing peut se féliciter d'avoir un
taux de turnover des plus bas du secteur. Celui-ci s'explique par une
implication des
85 Bensussan-Demauret, Darier, et al. (2014), «
M.A.R.S Marketing...et ça repart ! » in
en-contact.com, disponible sur
internet, consulté le 10/08/2014 18 :30 :43
47
directrices et de la partie encadrant à prodiguer
coaching et conseils pour faire monter les télévendeurs en
compétence et faire en sorte qu'ils s'épanouissent à leur
poste.
La diversité des profils est également l'un des
facteurs qui différencient Mars des autre centres d'appels, les
employés proviennent d'horizons différents ce qui apporte une
diversité sociale et culturelle unique et permet à Mars Marketing
de s'orienter vers une stratégie tournée vers l'international.
C'est d'ailleurs pour cette raison que des grandes entreprises
comme le groupe américain Homeaway leader européen de la location
saisonnière ou encore le géant allemand 1&1 leader mondial
sur le marché en solution d'hébergement ont décidé
de faire appel à Mars Marketing pour développer l'expansion du
marché français en faisant de la vente additionnelle aux clients
existants dans un premier temps puis via de la prospection.
3.1.2 Structure et organisation
Ci-dessous est schématisée la structure
organisationnelle de Mars Marketing :
48
3.1.3 Une entreprise internationale
Comme indiqué plus haut, la force de Mars Marketing
réside dans la diversité de ses employés, outre le niveau
d'études élevé des employés, c'est la
diversité culturelle qui attire les clients et constitue un réel
avantage concurrentiel.
Parmi les effectifs on dénombre des employés
italiens, espagnols, irlandais, américains, mexicains. Tous sont
installés en France depuis des années et sont polyvalents quant
à leur langue de travail.
La diversité de ses employés permet à
Mars Marketing de prendre en charge des campagnes de ventes vers l'Italie,
l'Espagne ou encore le Royaume uni en « présentant un visage local
à la clientèle, en se positionnant de manière
ciblée sur ses différents marchés » et permet une
communication efficace en accord avec les règles et traditions
locales.86
Répartition des nationalités des
employés
chez MaRs Marketing
Français (23) Espagnols (8) Italiens (6) Algeriens (5)
Anglais (4) Marocains (3) Portugais (2) Ivoirien (2) Brésilien (1)
Mexicain (1)
2% 2% 2%
3% 2%
3%
5%
40%
7%
9%
11%
14%
86 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris,
Dunod
49
Paradoxalement un groupe comme 1&1 jouera sur le
caractère national amarré au territoire français de Mars
Marketing pour s'implanter sur le marché français. Un des
avantages de faire appel à un centre d'appels in-shore est la
connaissance et la compréhension du marché, des
préférences des clients, des us et coutumes qui permettent
d'adapter leur politique commerciale « en fonction des valeurs et attentes
de la culture du pays [...] en créant en amont de la relation un climat
de confiance avec ses futurs clients et partenaires »87
Aussi le leader européen en location saisonnière
Homeaway (groupe américain) divisé en filiales espagnoles,
italiennes et anglaises a également fait appel à Mars Marketing
pour sa stratégie marketing.
Allemand (Lidl, 1&1) Américain (Homeaway) Italien
(Homeliday) Espagnol (Homeliday) UK (Homeliday)
Français (Homeliday, Abritel)
Figure 2 : Répartition des nationalités
des clients - Mars Marketing
Mars Marketing compose donc avec des donneurs d'ordres de cinq
nationalités différentes.
87 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 73
3.2 Les enjeux d'un sous-traitant
3.2.1 Définition de la sous-traitance
« La sous-traitance est l'opération par laquelle
une société délègue à une autre (le plus
souvent une PME) une partie de sa production, la production de certains de ses
composants ou encore une partie d'un contrat obtenu par le donneur d'ordre. Le
sous-traitant s'engage à exécuter un produit ou une tâche
sur la base des instructions de l'entreprise donneuse d'ordre qui conserve la
haute main sur le produit et ses caractéristiques.
En cela le sous-traitant est distinct du fournisseur dans la
mesure où ce dernier est totalement responsable du produit ou service
qu'il propose à son client. La sous-traitance permet notamment à
la société donneuse d'ordre d'accroitre sa flexibilité et
de concentrer ses ressources sur les métiers qu'elle juge les plus
stratégiques. »88
50
88 « Définition : Sous-traitance », in
Lesechos.fr, disponible sur internet,
consulté le 13/08/2014
51
3.2.2 Avantages et plus-value
La sous-traitance des activités permet d'assurer des
couts fixes, une efficacité accrue, un gain de temps et une plus grande
flexibilité qui permet au donneur d'ordres de se concentrer sur le
développement d'autres activités89.
En effet, en faisant appel à un prestataire externe,
l'entreprise peut faire un usage optimal de ses ressources en interne tout en
bénéficiant en sus d'une dimension de contrôle importante
puisque la prérogative principale du prestataire est d'exécuter
les ordres de la société qui fait appel à lui. Aussi le
donneur d'ordres peut exiger du prestataire qu'il recrute une dizaine de
personnes pour une opération commerciale puis se rétracter et ne
demander plus que 4 personnes sans se soucier des procédures RH et du
recrutement. La flexibilité est donc beaucoup plus élevée
que l'usage des ressources en interne.
Enfin la sous-traitance permet de minimiser les risques en
assurant au donneur d'ordres une efficacité optimale des collaborateurs
et un gain d'argent considérable selon les pays (main d'oeuvre peu
chère) cependant on observe une nouvelle tendance qui se
développe en Europe et aux Etats-Unis, le « on shoring » qui
consiste à faire appel à des sous-traitants sur le même
territoire parfois même dans la même ville.90
L'avantage de ce nouveau phénomène est de
renforcer la proximité avec les clients cibles en faisant appel à
des employés de la même culture : C'est une des plus-values de
l'entreprise Mars Marketing.
89 Duffy, Hugh, (2014), « The benefits of
Outsourcing Marketing », in
cpasnet.com, disponible sur internet,
consulté le 15/08/2014 20 :11 :43
90 Simpson, Mike, (2012), Outsourcing
efficiency
52
3.3 Bilan sociolinguistique de l'entreprise : Entre
résistance et domination
3.3.1 Importance du groupe et des normes : le rôle du
langage
Un groupe est composé d'au moins deux personnes ou plus
qui interagissent librement et partagent les même objectifs, normes et
une identité commune.91 Le groupe se développe autour
du sentiment d'appartenance qui résulte d'un esprit d'équipe une
fois que chacun des membres a trouvé sa place. Le groupe travaille dans
un climat de confiance propice à l'entraide et à la
communication.92
Les normes du groupe (c'est-à-dire les opinions,
attitudes partagées ou actions qui influent le comportement social du
groupe) déterminent ce qui est « bien » et ce qui est «
mal », celles-ci sont souvent implicites, très peu discutées
ouvertement et exercent une influence considérable sur le
groupe.93
Au sein de Mars Marketing, les groupes se forment naturellement
autour des langues :
« Individuals who share a common language are likely to
share the same perceptions of rules and collective norms, roles and values
» 94 (Les individus partagent une langue sont plus à même de
partager les même règles et normes, rôles et valeurs
collectives) Aussi le langage fonctionne comme un élément de
reconnaissance tangible qui reflète une identité
91 Kinicki, Angelo, et al., (2003), Organizational
behavior: key concepts, skills & best practices, Boston, McGraw-Hill/Irwin,
p. 224
92 Mason, Claire M, et al., (2003), « Identifying
Group Task Satisfaction at Work », in Small Group Research
93 Kahneman, Daniel, (1992), « Reference points,
anchors, norms, and mixed feelings », in Organizational Behavoir and Human
Decision Processes, p. 296
94 Bouchien De Groot, Elizabeth, (2012), «
Personal preference or policy? Language choice in a European-based
international organization », in Corporate Communications : An
international Journal, p. 258
53
socioculturelle. Cette identité sociale qui en
résulte peut déterminer l'adhésion d'une personne à
un groupe linguistique ou pas et expliquer pourquoi les employés qui ne
maitrisent pas la langue normée auront tendance à s `effacer.
Le langage est en effet un élément
fédérateur essentiel au groupe ce qui signifie que ceux qui ne le
parlent pas sont exclus de celui-ci dans le meilleur des cas voir
rejetés par le biais d'un ostracisme, un « silent
treatment » très dur.95
3.3.2 Situation linguistique
Cette dynamique d'ostracisme et de conflits entre les groupes est
très marquée dans l'entreprise Mars Marketing et s'observe
à plusieurs niveaux :
- Entre les groupes de langues différentes (italiens,
espagnols et français majoritairement)
- Entre les opérations commerciales (cultures et parlers
d'entreprise différents)
- Entre les employés de Mars et les donneurs d'ordre (et
notamment l'entreprise allemande 1&1 et les employés
français.)
Dans ce dernier cas de figure on peut même évoquer
une certaine forme « d'ethnocentrisme ». En effet, les
employés de Mars Marketing vont avoir tendance à
considérer les membres du
95 PFEFFER, Jeffrey, (2003), « Bring back Shame
There's a better way to deal with accused of crossing ethical lines », in
money.cnn.com, disponible sur
internet, consulté le 14/08/2014 17 :31 :16
54
groupe 1&1 comme une menace et auront tendance à
exagérer les différences entre les deux organisations par le
biais d'une distorsion de la réalité.96
Mais pas seulement, les employés de Mars Marketing et
plus particulièrement la partie encadrante qui s'occupe de
l'opération 1&1 va également avoir tendance à ignorer
certains ordres prétextant ne pas avoir compris ou adopter un
comportement passif , en ne prenant pas partie aux réunions
hebdomadaires ou en refusant de s'intéresser à la documentation
envoyée.
En outre un phénomène de « thin
communication » se développe, c'est-à-dire que les
employés vont avoir tendance à échanger avec le groupe B
de manière très superficielle et le plus souvent en rapport avec
les activités de l'entreprise et auront toutefois de grandes
difficultés à engager une conversation. Ce
phénomène constitue un obstacle à la création d'une
culture commune et peut résulter en un accès inégal
à l'information.97
3.3.3 Conflits entre les langues en présence
1&1 en imposant l'allemand comme langue de travail et en
invitant ceux qui ne le parlent pas à « utiliser Google traduction
» envoie un symbole social fort.
Charles écrit « if people [...] face situations
where they feel deprived of their ability to communicate and express themselves
[sic] they feel a sense of frustration and a struggle to
96 Kinicki, Angelo, et al., (2003), Organizational
behavior: key concepts, skills & best practices, Boston, McGraw-Hill/Irwin,
p. 283
97 Bouchien De Groot, Elizabeth, (2012), «
Personal preference or policy? Language choice in a European-based
international organization », in Corporate Communications : An
international Journal, p. 257
55
maintain dignity»98. L'usage de l'allemand
n'est donc pas seulement une question de simples compétences
linguistiques mais revêt une dimension beaucoup plus stratégique
de domination où la dignité du récepteur est mise à
mal. En effet, les personnes ne parlant pas la langue ou peu ont l'impression
que leur capacités professionnelles s'en voient elles aussi
limitées puisqu'ils ne peuvent pas argumenter leur idées avec
l'aisance dont ils auraient fait preuve dans leur langue natale.99
Une solution serait d'utiliser une langue dite « neutre » pour mettre
tout le monde sur un pied d'égalité.
Il aurait été en effet plus logique d'utiliser
l'anglais. Il a été en effet démontré que l'usage
de l'anglais serait plus propice au développement d'un climat positif de
diversité qui se traduit par l'ouverture aux différents niveaux
de langues, vocabulaire et accents100
Comme je l'ai évoqué plus haut, les langues ont
un impact sur les interactions entre les groupes et permettent le transfert de
l'information et des connaissances tout comme elles peuvent maintenir certains
employés isolés : une langue véhiculaire unique
permettrait une meilleure compréhension et communication entre les
membres des deux entreprises ce qui créera de facto un environnement
stimulant propice au partage et donc une meilleure performance. Or la mise en
place d'une langue unique que seule une partie des employés comprend ne
va pas dans ce sens et va même jusqu'à créer des tensions
parfois racistes : les allemands de 1&1 sont qualifiés de «
nazis » autoritaires par les télévendeurs et parfois
même par les managers. Ceci ne relève plus d'un problème
linguistique mais bien d'un problème d'ouverture culturelle qui doit
être initié et encadré par les managers eux même afin
de montrer la voie à suivre aux équipes commerciales.
98 Lauring, Jakob, et al., (2011), «
Multicultural organizations: common language, knowledge sharing and performance
», in Personnel Review, p. 268
99 Vaara, Eero, et al. (2005), « Language and the
Circuits of Power in a Merging Multinational Corporation», in Journal of
Management Studies
100 Lauring, Jakob, et al., (2011), « Multicultural
organizations: common language, knowledge sharing and performance », in
Personnel Review, p. 157
56
3.4 Communication interculturelle
3.4.1 Les conflits culturels
Dès lors qu'il existe des interactions entre des
groupes d'individus de cultures différentes, le choc des cultures est
inévitable puisque « la tendance naturelle de tout individu
consiste généralement à appréhender l'autre par
rapport à sa propre culture, en instaurant une forme de
hiérarchisation entre les cultures »101. Ceux-ci
proviennent d'une catégorisation culturelle et de l'exagération
des distances culturelles (très souvent caractérisée par
l'utilisation de stéréotypes et préjugés) et
affectent les rapports de force entre les groupes culturels.102En
effet « le groupe en situation de force peut être tenté de
montrer la supériorité de ses valeurs et ainsi réduire
l'influence culturelle de l'autre groupe »103. C'est
précisément la situation de l'entreprise Mars Marketing qui doit
se conformer à la culture dominante de 1&1. Bien que celle-ci
s'inscrive de manière naturelle de par la position d'exécutant de
Mars Marketing vis-à-vis de 1&1, Cette relation de domination
culturelle n'en demeure pas moins hostile. En effet, certains des
employés de 1&1 ont montré une attitude de
supériorité qui a été préjudiciable aux
opérations commerciales puisqu'une telle attitude a provoqué le
désengagement des employés de Mars Marketing. C'est pourquoi la
recherche de consensus et compromis est nécessaire : celle-ci commence
par l'ouverture à la diversité culturelle, les us et coutumes et
se traduit par l'apprentissage et l'application de l'étiquette, les
règles de respect et de savoir-vivre spécifiques à chaque
culture qui permettent les échanges interculturels.
101 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 84
102 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 86-89
103 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 89
57
3.4.2 Importance de l'étiquette
Même si nous sommes tous européens nous n'en
demeurons pas moins des citoyens et ambassadeurs de notre propre pays avant
tout et sommes habitués à réagir et à se comporter
d'une certaine manière sans même nous en rendre compte.
Les différences culturelles, ou dites
d'étiquette entre la France et l'Allemagne sont relativement minimes du
fait de la proximité géographique des deux pays, de leur histoire
commune ou de leur développement économique et social similaire
mais doivent toutefois être considérées avec attention lors
d'un partenariat commercial.
Chaque culture a ses propres croyances, perceptions, valeurs
et coutumes qui déterminent leur façon de communiquer, il n'est
pas surprenant de rencontrer quelques difficultés voire obstacles
lorsque nous essayons de nous comprendre les uns les autres dans un contexte
d'inter culturalité. Les malentendus sont même monnaie
courante.
Pour s'assurer que l'émetteur et le récepteur
soient sur la même «longueur d'ondes» , il existe pourtant un
ensemble de codes à respecter qui à défaut de permettre
une communication optimale prodigue des bonnes pratiques et des comportements
à adopter pour faciliter la communication.
On parle d'étiquette. Si le mot peut paraître un
peu désuet et rappelle l'éducation réservée aux
jeunes filles de bonnes familles du début du siècle, il n'en est
pas moins une réalité qui doit être prise en compte lors
des échanges interculturels.
Celle-ci fait souvent appel aux bon sens de ceux qui la
pratiquent et se définit par un ensemble de règles de conduite
qui dictent comment se comporter lors de situations données.
Ces règles contribuent non seulement à faciliter
les relations interculturelles mais permettent également de donner
confiance à celui qui les applique et de témoigner son respect
à son interlocuteur.
58
L'apprentissage de l'étiquette nécessite celui
des cultures étrangères : les langues étrangères ne
doivent plus être considérées comme de simples ressources
mais comme des outils pour mener à bien une communication
interculturelle. Grâce à une bonne connaissance de
l'étiquette, le bilingue en entreprise peut donner l'illusion du
biculturalisme : un biculturalisme entre deux cultures nationales certes mais
aussi entre deux cultures d'entreprise.104
3.4.3 L'intermédiaire : l'employé
bilingue
Le bilinguisme est défini comme « savoir parler
couramment deux langues »105 , il faut cependant se pencher sur
la définition que l'on donne à la notion de couramment.
En France, on évalue le niveau linguistique d'une personne en
rapport avec sa compréhension et expression écrite et orale, son
aisance à passer d'une langue à l`autre ainsi que sa
maîtrise du vocabulaire et des subtilités grammaticales d'une
langue. Être bilingue c'est avoir la capacité à passer d'un
système de langue à un autre sans aucune difficulté
(code switching) de plus lors de situations d'asymétries de
pouvoir, l'employé bilingue est là pour
rééquilibrer la balance et garantir une continuité entre
les deux groupes linguistiques 106
Si le principal avantage du bilinguisme est d'avoir la
possibilité de s'exprimer dans la langue de son choix avec la même
aisance cet avantage indéniable arrive aussi avec son lot de
conséquences.
Le passage d'un code à l'autre n'est pas toujours
tâche aisée et parfois il peut y avoir des «
interférences » entre les langues, des problèmes de «
bruit » dans le continuum du transfert
104 Sabath, Ann Marie, (2000), International business
etiquette what you need to know to conduct business abroad with charm and
savvy. Franklin Lakes, NJ: Career Press
105 Dictionnaire le petit robert
106 Rakesh Mohan, Bhatt, (2013), « Optimization in bilingual
language use », in Bilingualism: Language and Cognition, p. 740
59
de l'information ce qui est préjudiciable puisque
l'employé bilingue est l'intermédiaire entre A et B, il est celui
qui fait en sort qu'il n'y a pas de « communication breakdowns »
entre les différents groupes sociolinguistiques. Ceux-ci se
caractérisent par des malentendus et des incompréhensions
linguistiques, des mésinterprétations culturelles dues à
l'importance des clichés et des stéréotypes et un manque
d'ouverture à la diversité. Ces « communication breakdowns
» entravent non seulement le leadership mais aussi la relation de
confiance qui doit exister entre les deux groupes.107Comme je
l'évoquais dans la partie 3.3.1 les membres du groupe qui ne parlent pas
la langue B vont avoir tendance à s'effacer lors d'interactions entres
les entités A et B. Pour l'employé bilingue c'est la situation
inverse , celui-ci va pouvoir se mettre en avant en intégrant le groupe
social et linguistique de B tout en restant membre du groupe A.
L'employé bilingue est donc plus qu'un simple intermédiaire entre
les groupes A et B, il est une partie prenante et membre de chacun de ces
groupes.108
107 Lauring, Jakob, et al., (2012), « Multicultural
organizations : Common language and group cohesiveness », in
Organizational Behaviour and Human Resource Management, pp. 270-271
108 Bouchien De Groot, Elizabeth, (2012), « Personal
preference or policy? Language choice in a European-based international
organization », in Corporate Communications : An international Journal, p.
259
3.5 Le rôle de l'employé bilingue
3.5.1 Gérer les différences culturelles
Un des rôles majeurs de l'employé bilingue est de
comprendre les attentes du client pour une meilleure communication et par
extension une meilleure performance.109
Pour ce faire, celui-ci doit commencer par intégrer la
culture du pays avec lequel il échange afin d'en saisir toutes les
nuances. Un bon indicateur est le modèle d'Hofstede que nous avons
déjà évoqué dans la partie 2.4.3 de ce devoir.
Ci-dessous l'analyse culturelle des modèles
français et allemands selon les dimensions
d'Hofstede :
110
60
109 Aoun, Joseph, (2004), Gérer les
différences culturelles pour communiquer plus efficacement avec les
diverses cultures du monde, Sainte-Foy (Québec), MultiMondes, p.
141
110 « Les dimensions culturelles de Geert Hofstede »,
in
Uni-giessen.de, disponible sur
internet, consulté le 12/08/2014 19 :40 :21
61
On retrouve en Allemagne une orientation en faveur de la
masculinité, c'est-à-dire une culture qui se place dans une
logique d'affrontements avec des conflits beaucoup plus « frontaux,
ouverts et durs » en revanche en France on privilégiera «
l'écoute et l'empathie dans un souci de cohésion sociale »
pour résoudre les conflits (MAS)111. La France quant à
elle à une distance hiérarchique plus marquée alors que
l'Allemagne fait partie des pays du monde avec la plus faible hiérarchie
entre ses membres (PDI), la démocratie et l'égalité sont
encouragées, chaque membre de l'entreprise peut participer à la
prise de décisions. Paradoxalement on remarque que les deux pays ont
tous les deux une culture plutôt individualiste (IDV), ce qui est
plutôt étonnant de la part de l'Allemagne qui prône
l'égalité et le collectif. Les cultures individualistes sont
généralement corrélées à la richesse et au
développement du pays, plus un pays est développé plus il
aura tendance à avoir une culture individualiste, c'est-à-dire
à valoriser sa qualité de vie personnelle.112 Enfin la
France fait preuve de moins de tolérance au changement et à
l'incertitude que l'Allemagne qui « accepte les avis opposés et
considère les conflits comme enrichissants ».113
Les cultures nationales influencent donc le style de
management adopté, comprendre cette culture c'est faire un pas en avant
vers une compréhension de la gestion de l'entreprise et par extension de
sa culture d'entreprise.
Ces différences, aussi minimes soient elles doivent
être prises avec beaucoup de considération lors des
échanges entre les deux pays.
111 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 32
112 Meier, Olivier et al., (2005), « Management
interculturel stratégie, organisation, performance », Paris, Dunod,
p. 33
113
62
3.5.2 Comprendre et intégrer les différents
niveaux de langues
S'il semble évident que l'employé bilingue doit
être en mesure d'interagir dans une langue B de manière claire et
concise, il ne faut pas limiter son rôle à celui d'un simple
traducteur. En effet, outre la compréhension de l'allemand par exemple,
afin de pouvoir mener une communication réussie avec 1&1, c'est
surtout leur jargon d'entreprise qu'il faut intégrer.
Comme nous l'avons vu dans les parties
précédentes, les entreprises qu'elles soient multinationales ou
pas sont désormais toutes multilingues (langue nationale, langue
affective et jargon d'entreprise : cf. partie 2.4)
En effet un des problèmes majeurs de Mars Marketing
avec 1&1 est qu'outre la barrière naturelle de la langue s'ajoute la
barrière du jargon d'entreprise. 1&1 utilise des
dénominations produits qui sont pour une oreille peu avertie
difficilement compréhensibles. Ce problème de dénomination
des produits est d'autant plus complexe puisque Mars Marketing utilise
également sa propre terminologie pour désigner les mêmes
produits.
Il en résulte de nombreux malentendus et quiproquos qui
ont parfois pu coûter très cher.
Par exemple au sein de Mars Marketing, on parle
d'équipe Mywebsite pour désigner les vendeurs qui vendent des
sites Mywebsite à des gens déjà clients chez 1&1 en
opposition avec l'équipe prospect qui vend des sites internet à
des prospects purs.
Les allemands de 1&1, eux, parleront de bestandskunde
(BK) pour désigner les clients déjà existants
(clients cible de l'opération dite « Mywebsite ») et de
neue Kunden (NK) pour désigner les prospects.
Le quiproquo est tel que lors du lancement de
l'opération de prospection un des managers de Mars Marketing , en charge
des opérations 1&1, pensait qu'il y aurait deux opérations
qui allaient débuter une qui serait désignée par
l'acronyme NK dont il ignorait d'ailleurs la
63
signification et une autre opération de prospection
sans comprendre qu'il s'agissait d'une seule et unique campagne de
prospection.
L'acronyme NK signifie en effet « Neue Kunde »,
nouveaux clients en français ce qui dans la logique germanique de
1&1 se rapporte à l'acquisition de nouveaux clients et donc par
extension, à de la prospection. La confusion provient d'un manque
d'informations et de normalisation sur la terminologie employée mais
aussi de l'absence d'une langue véhiculaire de travail commune.
En effet, conscients des problèmes de communication,
les interlocuteurs de Mars Marketing chez 1&1 utilisent également le
terme anglais « Prospect » pour designer la même
opération or ce terme est un néologisme (même si le
verbe to prospect existe). Cette méconnaissance de la langue
anglaise alliée au manque d'informations sur la terminologie
employée est source de bon nombre de malentendus et constitue un
réel problème de communication qui entrave la productivité
des deux côtés. (Cf. Illustration 1 dans Annexes)
C'est pourquoi faire appel à un employé bilingue
évite bien des impairs, il permet une communication
privilégiée dans une seule langue (dans le cas de Mars Marketing
et 1&1, l'allemand) et assure le continuum de l'information. Il est celui
qui pose les questions et élabore un lexique du jargon d'entreprise
qu'il transmet à son entreprise, il est un relais nécessaire de
l'information qui se doit d'assimiler toutes les fréquences du langage
afin d'optimiser la compréhension en évitant toute
interférence, tout bruit.
3.5.3 Une position de pouvoir ?
Max Weber, sociologue allemand, définit le pouvoir
comme « la capacité d'une personne ou d'un groupe à imposer
leur volonté aux autres et ce même contre leur gré
».114 Le pouvoir peut être manifesté de plusieurs
façons que soit physiquement, par la force par exemple ou bien de
manière plus subtile dans une stratégie de d'oppression et de
coercition. En ce sens, les langues instrumentalisent et symbolisent le
pouvoir.
Selon Michel Foucault les langues reflètent la
manière dont les relations de pouvoir dans une structure sociale
donnée fonctionnent entre les institutions et les groupe socioculturels
: ceux se trouvant dans une position de pouvoir auraient accès à
des connaissances spéciales, et utilise des politiques linguistiques
comme des moyens de garder cette position de pouvoir. 115
Le choix de l'allemand comme langue de communication avec le
client, même si ce choix s'inscrit dans une stratégie de
facilitation des échanges, est perçu comme une menace voire une
exclusion pour certaines personnes de l'entreprise ne pratiquant pas la
langue.
Ils craignent en effet pour leur position de pouvoir au sein
de l'entreprise et se sentent par conséquent obligés de
développer une stratégie alternative pour pallier ce sentiment
d'infériorité. Comme excéder sensiblement les objectifs
fixés, par exemple, les chiffres sont en effet un langage universel.
Concernant les personnes qui maîtrisent la langue A, elles se retrouvent
dans une position de pouvoir de facto qui n'est pas sans risques.
En effet, cette soudaine position de pouvoir peut donner lieu
à un sentiment de supériorité et à surestimer leurs
compétences linguistiques ce qui a de nombreuses conséquences
plus ou moins graves.
114 RANGEL-ORTIZ, Luis Xavier, (2008), « Languages and Power
», in J. González (Ed.) Encyclopedia of bilingual education,
pp. 474
64
115 Foucault, Michel, (1971), « L'ordre du discours
», Paris, Gallimard
65
Les problèmes le plus souvent rencontrés sont les
incompréhensions et malentendus.
Ceux-ci peuvent sembler anodins et sont facilement solvables
mais encore faut-il avoir le courage de reconnaître ses torts ; avouer
que l'on n'a pas tout compris et oser demander une reformulation des phrases un
peu trop complexes ou techniques.
Le problème est que le bilingue a une forte pression de
ses pairs et de sa hiérarchie qui voient en lui « le
médiateur» et qui ne jurent que par lui, difficile alors de leur
montrer ses faiblesses et de concéder qu'il ne sait pas tout, de peur de
passer pour un imposteur.
Parfois, c'est tout simplement la peur de «perdre la
face» qui domine. Un tel comportement peut mener à une perte de
confiance de la part de l'interlocuteur et donc à la perte de la
collaboration commerciale.
Parallèlement , l'interlocuteur de la langue A va lui
aussi avoir tendance à surestimer les capacités linguistiques de
son interlocuteur B en pensant que s'il a été choisi c'est qu'il
maîtrise totalement la langue et va attendre de lui qu'il calque son
discours sur le sien mais aussi son attitude et ses émotions ce qui peut
donner lieu à un certain ressentiment lorsque ce calque n'est pas
appliqué.
Plus qu'un rapport de force entre les langues, le problème
réside dans le choc des cultures. A l'inverse , le bilingue peut se
sentir sous pression et va avoir tendance à chercher l'aval de ses pairs
comme pour se rassurer , en répétant au fur et à mesure ce
qui a été dit et en demandant s'il a bien compris le sens.
Cette perte de confiance en soi, vient du fait que dans une
langue A qui n'est pas la sienne, le bilingue ne peut exercer sa verve comme il
l'aurait fait dans sa langue natale.
Difficile en effet d'utiliser des figures de rhétorique
ou de faire de l'humour dans une langue rattachée à une culture
complètement différente. Or ces qualités sont celles d'un
leader et assurent une position de pouvoir.116
116Lauring, Jakob, et al., (2012), «
Multicultural organizations : Common language and group cohesiveness », in
Organizational Behaviour and Human Resource Management
66
CONCLUSION
En somme la culture qu'elle soit locale, nationale, ou
d'entreprise est difficilement saisissable :
Celle-ci se présente sous de nombreuses couches qu'il
faut retirer progressivement afin d'en saisir toutes les subtilités,
c'est la théorie de « l'oignon culturel » de Fons Trompenaars
et Charles Hampden- Turner. La première couche extérieure
représente les produits visibles des cultures, que ce soit les
gratte-ciels de Manhattan ou les artefacts observable de la culture
d'entreprise comme un logo ou une manière de s'habiller ; les valeurs et
les normes quant à elles font partie des couches les plus «
profondes » de l'oignon et sont de fait beaucoup moins facilement
identifiables.117
Ce sont justement ces normes culturelles et linguistiques qui
font toute la complexité des relations interculturelles : En ce sens
lorsque la diversité culturelle n'est pas considérée en
amont de la réunion de deux entreprises le phénomène de
fusions et acquisitions d'entreprises devient une véritable bombe
à retardement. Quand les mots peuvent devenir des armes, le langage
devient un outil de domination redoutable, c'est pourquoi il est
nécessaire de sensibiliser les parties prenantes de chaque entreprise
aux subtilités du management de la diversité et à la
communication interculturelle.
Pour ce faire elles peuvent faire appel à des
consultants spécialisés ou plus simplement les managers peuvent
encourager les interactions entre les différents groupes et les inciter
à créer, partager et transmettre des connaissances118
(cf.Knowledge Mangement) ce qui facilitera les échanges et diminuera le
phénomène d'ethnocentrisme.
117 Trompenaars, Alfons, et al., (1998), Riding the waves of
culture: understanding cultural diversity in global business. 2nd ed. New
York : McGraw Hill, p. 6-7
118 Lauring, Jakob, et al., (2011), « Multicultural
organizations: common language, knowledge sharing and performance », in
Personnel Review
Mars Marketing de par sa position d'exécutant par
rapport à un donneur d'ordres se place de facto dans une position de
soumission par rapport à 1&1, l'utilisation de l'allemand comme
langue de travail s'impose donc tout naturellement sans qu'aucune autre
alternative ne soit considérée. De telles prérogatives de
la part du donneur d'ordres invitent les sous-traitants à s'adapter et
à orienter leur politique de recrutement dans leur sens.
Il est cependant préférable de faire appel
à des traducteurs dont la langue de travail est la langue maternelle
afin qu'ils puissent prendre en compte toutes les subtilités et
spécificité linguistiques, techniques et culturelles de la langue
source et de la langue cible.119
67
119 European Commission, Traduction et interpretation,
Directorate-General for Translation
68
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sous-traitance.html?uT7WvwGPzyqXDLiH.99, consulté le 13/08/2014 19
:10 :13
74
ANNEXES
Annexe 1 : Exemple de présentation produit que
1&1 envoie à Mars Marketing.
Chaque pack a un nom différent qui change selon les
années. Aujourd'hui par exemple le pack classique n'existe plus, on
parle de pack « basic ». Ces changements ainsi que le manque
d'informations posent un problème de dénomination
75
Annexe 2 : Exemple de reporting à remplir pour
1&1... en espagnol.
Annexe 3 : Instructions de 1&1 en français
approximatif (cf "début du procession")