1) Le thème du changement
Ce thème du changement tend à démontrer
que le salarié, dans sa manière de voir et de vivre les choses,
possède une aversion naturelle dans le cadre d'une F&A mais aussi
dans tout autre type de restructurations, de bouleversements (exemple, interne)
qui toucherait à son organisation, à son environnement de
travail, c'est-à-dire à sa « bulle », son
« confort ».
Voici sous forme de tableau l'analyse de ce
thème :
Point de vue des interviewés
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Phrases significatives
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v Les salariés sont les derniers à
être mis au courant de l'opération
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- « nous avons informé un jour avant
l'annonce officielle dans la presse par mon manager ».
- « très peu de temps avant l'annonce
officielle même si des bruits de couloirs circulaient à ce
sujet »
- « une communication interne a été
faite par les dirigeants après l'annonce officielle. Très peu
était au courant. Seulement une dizaine avant l'annonce »
- « il y a eu du bruit et des rumeurs avant
l'annonce officielle. A partir de là, ils se sont sentis obligés
de communiquer l'info de manière officielle pour limiter les
dégâts »
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v Premiers effets ressentis, premières
réaction
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- « inquiétude ressentie après
l'annonce »
- « nous étions cédés par
Veolia donc un peu inquiète car nous étions internationale et
nous devenions France donc au début j'avais une aversion mais
l'inquiétude fut limitée car l'acquéreur était
quand même EDF qui a une grosse capacité d'absorption. Par contre,
mes collègues et mon équipe partageaient cette inquiétude
car l'entreprise se séparait en deux parties distinctes »
- « on s'y attendait car cela devait se faire
précédemment mais l'accord ne fut pas trouvé. La surprise,
c'est que c'est arrivé au moment même où l'on ne
s'attendait pas à ça »
- « Le changement a été subi. On
l'accepte même s'ilest subi de manière
générale »
- « en tant qu'agence CNAV, nous sommes sous tutelle
de l'Etat. Les décisions politiques sont énormes pour nous quand
une décision politique est prise car c'est un chamboule-tout.Même
si on a un statut privé, nous sommes sous le joug d'une organisation qui
est publique. Ils descendent la décision de réforme à
notre niveau et on doit se débrouiller »
- « Oui il y a eu une aversion chez les salariés
mais aussi chez les dirigeants et les cadres supérieurs car on se sent
bien là où on est et comment on l'est. On a l'impression de
maitriser la situation alors que ça n'est pas le cas en
réalité. »
- « cette situation peut conduire à une
démotivation et une chute de la productivité voire pire pousser
les employés à quitter la société. A la fin, c'est
l'entreprise elle-même qui risque de pâtir de cette
situation »
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v Ambiance globale qui change (morose)
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- « les collègues discutaient autour de la
machine à café en parlant des possibles
changements »
- « il y a pas mal de stress et de frustration car
mes collègues ne comprennent pas pourquoi il n'y a pas plus
d'information. Moi je comprends leur point de vue »
- « l'ambiance était assez mauvaise car on
passait d'une boîte prospère et assez familiale avec pas mal
d'avantages à un éclatement que ce soit en termes d'ambiance mais
aussi avec des emplois délocalisés sur plusieurs sites. »
- « les salariés étaient
déçus et résignés. L'environnement familial
qui régnait avant le rachat a complétement disparu. Cette
nouvelle société a cassée les liens de proximité.
On est passé à une structure éclatée froide et
distante. »
- « personnellement, j'ai eu un collègue de
55 ans qui craignait pour son avenir était sous médicament. Ses
mains tremblaient à cause du stress. Humainement, les gens craquaient et
prenaient sur eux.
Moi, étant assez jeune à l'époque j'avais
moins d'appréhension car je pouvais rebondir ailleurs mais les anciens
l'ont particulièrement mal vécu »
- « Cadre supérieur ou employé, chacun
subissait le changement comme imposé »
- « aujourd'hui, je suis plutôt dans le
négatif car on est sur des postes qui sont centralisés. Les
équipes de plus en plus sont délocalisés dans le meilleur
de cas ailleurs en France ou sinon c'est dans d'autres pays. »
- « cela fait 1 an que je suis en parallèle
à la recherche d'un emploi afin de quitter la société. Le
problème est que je suis au sein de l'entreprise depuis 10 ans
maintenant et je rencontre des difficultés pour changer »
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v Impact perçu commenégatif sur les
postes de travail
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- « l'ampleur de l'acquisition de Synthélabo
qui faisait deux fois Sanofi a impacté profondément les
méthodes de travail »
- « au niveau des postes, il y a eu pas mal de
conséquences, des promotions ont été offertes pour
certains, mais pour d'autres rien du tout »
- « dans mon service, j'ai vu 3 managers en mois 6
mois, dont un qui est resté 3 semaines seulement. Il y avait une grosse
instabilité, il était difficile de travailler dans ces
conditions. Beaucoup de changements car les périmètres
évoluaient sans cesse »
- « ils ont rationnalisé les activités
et sectorisé l'information. Tout le monde n'a plus accès aux
mêmes infos selon le poste et le département »
- « officiellement le poste n'est pas amoindri mais
adapté aux nouveaux standards de la nouvelle entité mais en
réalité chaque poste a été segmenté avec une
tâche particulière. On ne fait qu'une seul tâche. Par
exemple, uniquement de la création de comptes clients, que des commandes
ou que de l'enregistrement de tarifsalors qu'avant, chacun collaboré, on
allait chercher l'info chez les différents protagonistes alors
qu'aujourd'hui c'est plus le cas.
On est cantonné qu'à une fonction
précise. »
- « depuis la fusion entre l'ANPE et l'Assedic, on a
pour pas mal vu notre poste changé. A l'époque de la fusion, nous
devions nous familiariser avec de nouveaux outils et logiciels. Et ça
n'était pas forcément évident pour nous. Pour certains,
leur fonction changeait drastiquement. On avait l'impression que tout cela a
été fait à la va-vite par l'Etat. »
- « notre charge de travail a
considérablement augmentée au Pôle Emploi.
L'épuisement se sentait chez les collègues que ce soit avec le
suivi des chômeurs, dans les indemnisations ou la prise en charge de
l'accueil... On trinquait carrément ».
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v Au niveau organisationnel
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- « cette acquisition étant énorme,
elle n'a pas été facilement digérée comme pour les
précédentes. Nous sommes passé d'environ 40 000
à 200 000 employés donc ça devenait une dimension
complétement différente et Sanofi ne semblait pas préparer
à cela malgré son expérience de rachats
réussis ».
- « on a eu la mise en place de nouveaux projet
à l'été 2012. La société française a
été séparée en 3 entités : une
société de production. Le site français a fermé
depuis ; délocalisé en Europe de l'Est. Ensuite, une
société de ventes et une société de services. Pour
cette dernière, le Front office a été
délocalisé en mars 2014 et le Back office risque de suivre le
même chemin d'ici la fin de l'année.
Le siège a été transporté au
Pays-Bas pour des raisons économiques car il y a un taux d'imposition
plus faible.
Notre entrepôt vient également d'être
scindé en 3 parties. Les machines sont parties en Suisse, les produits
en Belgique et la partie Gestion est resté en France. A ce rythme, on a
l'impression qu'il ne restera plus grand chose de la société
telle que nous l'avions connue »
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v La prise en compte de la culture
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- « Les fusions des agences CNAV (environ 130 en
Île-De-France) est une bonne chose, ça marche chez certains mais
ça ne veut pas dire que chez nous cela fonctionnera car il y a
malgré tout une culture régionale forte et les réactions
ne sont pas forcément les même.
Le modèle fonctionne mais la recette ne sera pas la
même pour que cela réussisse. Nous n'avons pas les même
process, pas la même communication donc un travail d'adaptation doit se
faire. De plus en Ile-de-France, il y a dans la même région des
départements extrêmement riches (92, 75 en partie,..) et des
pauvres avec le 93, 94, 77 et cela créé un décalage dans
les réactions de la part des responsables et de leur management.
La culture est importante dans le ressenti des choses. Quand
l'annonce des fusions a été faite par le directeur aux agences
d'Ile-de-France, il y a eu autant d'avis que d'agences car on n'a pas la
même typologie de dossiers ni de comportement. »
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