1.1.2. Orientation quant au
rôle de la contribution des ressources pétrolières
Compte tenu de l'instabilité du
prélèvement pétrolier et aussi de la durée de vie
limitée de la rente pétrolière, il conviendrait de
renforcer fortement les prélèvements non pétroliers afin
de réduire la dépendance des ressources vis-à-vis d'une
recette instable et dont la pérennité n'est pas assurée
à long terme. Il s'agit là d'une action qu'il est possible de
qualifier de « composante de la transition
fiscale ». Cette composante est complémentaire à
la transition fiscale traditionnelle qui consiste à substituer des
recettes de fiscalité interne aux recettes tarifaires. Un renforcement
important des recettes publiques non pétrolières nécessite
un changement radical de la politique fiscale. Plutôt que de
différer les efforts dans les périodes de cours pétroliers
favorables, il s'agirait de s'inscrire dans un horizon de long terme en tenant
compte des contraintes qui vont apparaître avec l'épuisement des
ressources pétrolières. Il s'agirait donc de mettre en oeuvre une
politique de mobilisation de recettes publiques non pétrolières
qui soit active en permanence, y compris dans les périodes de cycles
pétroliers favorables. Ainsi que cela est démontré plus
haut, une telle politique est techniquement possible, car un large espace de
recettes est disponible.
Afin de développer cet espace, il conviendrait de
manière prioritaire de poursuivre des réformes et actions visant
à renforcer l'efficacité des administrations fiscales et
douanières. Un tel renforcement serait à engager dans les
meilleurs délais afin d'éviter de courir le risque à
l'avenir d'un rétrécissement de l'espace budgétaire
consécutif à un déclin des recettes publiques globales
assises sur les recettes mobilisées à l'occasion de l'extraction
des produits pétroliers et/ou miniers. Il serait alors possible de
mettre en place les instruments budgétaires afin que ces ressources
soient pour une part gérées de manières contra cycliques
tandis qu'une autre part de ces ressources seraient affectées soit
à l'épargne, soit à des dépenses qui permettrait
d'affronter plus facilement l'après pétrole.
1.1.3. L'hypothèse
du revenu permanent pour un pays pétrolier
L'analyse de Barnett et Ossowski (2003) offre la perspective
d'une optimisation intertemporelle. En effet, les travaux de Friedman (1957)
sur le revenu permanent des ménages, Barnett et Ossowski (2003) montrent
que le programme de maximisation, de la consommation publique, dans un horizon
infini peut s'insérer dans le cadre friedmanien de maximisation de la
consommation du ménage dans un horizon infini. Pour les pays
pétroliers, l'hypothèse du revenu permanent signifie que les
dépenses publiques devraient être égales aux revenus non
pétroliers augmentés du rendement sur la valeur présente
nette de tous les futurs revenus pétroliers (Omgba, 2010).
Leigh et Olters (2006) étendent cette analyse
théorique en tenant compte des habitudes de consommation. Dans le
modèle, les dépenses publiques représentent la
consommation dont les ménages tirent de l'utilité. Dans ce cadre,
si l'Etat venait à proposer par exemple une réduction des
dépenses publiques de manière abrupte, cela pourrait
s'avérer socialement néfaste et politiquement infaisable. Les
habitudes de consommation sont difficiles à changer. Avec l'introduction
des habitudes, le changement dans la consommation se fait de manière
graduelle. Dans le modèle de Leigh et Olters (2006), le gouvernement
(planificateur social) a pour objectif de déterminer le niveau de
dépenses soutenables dans le temps. Son programme consiste à
maximiser sa fonction de bien-être qui dépend des dépenses
publiques et des habitudes. La gestion des ressources pétrolières
sous l'hypothèse du revenu permanent est devenue la politique
prônée par divers analystes, notamment ceux du FMI, comme solution
à la volatilité et à l'épuisement du
pétrole. Mais peu d'études ont tenté d'évaluer
jusque-là l'impact de l'adoption d'une telle politique sur les
performances économiques du pays concerné.
Omgba (2010) a ainsi évalué les impacts
différenciés de la gestion actuelle du déclin de la
production par rapport à une hypothèse du revenu permanent pour
un pays pétrolier, le Cameroun, en utilisant un modèle
d'équilibre général dynamique. Les résultats
trouvés apparaissent contrastes s'il est vraisemblable que le
déclin de la production pétrolière affecte
négativement les différents agents et institutions
économiques du Cameroun, les changements structurels intervenus depuis
près d'une vingtaine d'années semblent rendre ce déclin
pétrolier moins dommageable que prévu pour l'ensemble de
l'économie camerounaise. En effet, de la crise des années 80, le
Cameroun a engagé des réformes dans l'organisation de son
économie.
L'étude Omgba (2010) montre que les structures
économiques semblent être à mesure d'éviter un
après-pétrole désastreux au Cameroun. Ce même auteur
défend l'hypothèse selon laquelle, dans l'analyse du sentier de
développement dans notre pays, les études devraient se focaliser
sur l'impact de la mauvaise qualité des institutions camerounaises sur
ses performances économiques. Des réformes institutionnelles
telles la lutte contre la corruption, l'assainissement du climat des
investissements, apparaissent nécessaires afin d'attirer des capitaux
capables de booster la croissance économique au-delà du trend
observé au cours de ces dernières années.
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