2. HISTOIRE AGRAIRE DU CANTON DE QUININDE
Pour mieux appréhender les dynamiques de ce canton,
intéressons-nous à son histoire agraire, ce qui va permettre
d'avoir une meilleure vision globale des systèmes agraires actuels, des
tendances en termes de migration des populations, des différentes
typologies de producteurs et donc des problématiques actuelles des
exploitations familiales.
2.1. LA PREMIERE IMMIGRATION MASSIVE DU CANTON QUININDE
(1800 - 1914)
2.1.1.LA COLONISATION SPONTANEE ET SES PREMIERS RESEAUX DE
COMMUNICATION
Avant 1800, le canton de Quininde était formée
d'une forêt vierge où il régnait un climat tropicale avec
une grande diversité d'espèces arboricoles et animaux sauvages.
De ce que l'on sait, il n'y avait pas de communautés indigènes
implantées dans cette région. A partir de l'arrivée des
premiers colons, d'origine afro-équatorienne, il y a eu une modification
de cet écosystème, ce qui a provoqué une
déforestation progressive du paysage.
Ce canton s'est vu colonisé de manière
spontanée par de nombreuses entreprises de caoutchouc à partir de
1800, provoquant une arrivée massive de colons venant des côtes de
l'Océan Pacifique par le fleuve Esmeraldas et par la Colombie, au nord
du canton. Il n'y a pas eu de colonisation par la terre du fait que les seules
voies praticables à l'époque étaient maritimes, celles du
fleuve Esmeraldas ainsi que ses bras de rivières dont les deux
principaux sont les rivières Blanco et Quininde.
A partir de 1812, commence réellement l'exploitation
intensive du caoutchouc. Les colons s'implantèrent définitivement
avec leur familles le long des rivières où ils ont
commencé à prendre possession de grandes terres qui
dépassaient facilement les 200 ha.
Figure 6: Colonisation spontanée du canton de
Quininde (étude SIPAE, 2009)
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De cette première colonisation spontanée, donc
sans l'aide de l'état, sans titre de propriété, sans
réglementation, il faut ajouter une migration importante de colombiens
entre 1900 et 1903 où s'est produit la guerre des « Milles jour
». Cette population noire s'est réfugiée dans le nord de la
province d'Esmeraldas pour s'installer ensuite le long du fleuve Esmeraldas
ainsi que dans les zones voisines.
Remarque : la plus grande ville qui a été
construite à cette époque, est la ville d'Esmeraldas, au
confluent du fleuve Esmeraldas et donc de l'Océan Pacifique, point
stratégique pour commercer avec l'extérieur et entrer dans le
canton de Quininde.
2.1.2.LES PREMIERS MODES DE PRODUCTION
Pour accéder à une superficie cultivable, il
était nécessaire de couper les arbres et de déforester les
berges des rivières. Ce fut donc la première activité des
colons à l'aide d'outils comme la hache ou la machette. Les arbres
coupés servaient, comme encore aujourd'hui, à construire les
habitats ainsi que des barques pour naviguer sur les rivières.
Les premiers modes de production restaient du domaine de la
cueillette, de la chasse et de la pêche, suffisants pour assurer la
sécurité alimentaire des familles. Afin d'assurer la subsistance
de la famille, des parcelles étaient aussi utilisées pour planter
des cultures comme la banane, la banane plantain, le maïs, du riz, de
l'igname, des haricots, etc.
La première forme de culture de rente est
arrivée réellement avec l'exploitation de caoutchouc et de la
tagua à partir du milieu du 19ème siècle.
L'exploitation de caoutchouc s'est commercialisée sur les marchés
des Etats Unis et de l'Europe. Parfois il se vendait des « boules de
caoutchouc ») en échange de nourriture sur la province
d'Esmeraldas (nous reviendrons plus en détail sur ces échanges
informels). Toute la commercialisation se faisait par voie maritime.
En 1830, conjuguée à l'augmentation
démographique du canton, la demande en produits pour l'autoconsommation
est devenue une évidence. C'est à ce moment que certains
producteurs ont commencé l'élevage, une activité
d'importance et adaptée au mieux aux besoins sur place : l'isolement,
l'inexistence de voies terrestres, les fortes températures, les saisons
des pluies, sont tant de facteurs qui ont poussé à une
agriculture et un élevage local.
Toutefois, en cette seconde partie du 19ème
siècle, émergea deux nouvelles cultures de rente, celle du cacao
et du tabac ; nous savons qu'en 1854, il existait des haciendas situées
au nord du secteur de Viche ayant une superficie de 800 ha qui se consacrait
à l'élevage et à la plantation de cacao.
De plus, en 1896, l'Allemagne était en plein boom
industriel ; il y eu une motivation d'implanter leurs entreprises dans toute la
province de Quininde pour le commerce de la tagua.
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