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Consommation d'électricité et croissance économique en Côte d'Ivoire.

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par Mahena Gildas ANAGO
Ecole nationale supérieure de statistique et d'économie appliquée ENSEA-Abidjan - Elève ingénieur des travaux statistiques 2011
  

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3.2 Approches empiriques

L'analyse de la causalité entre la consommation d'énergie électrique et la croissance économique a fait l'objet de nombreuses publications dans la littérature économique. Cependant, les conclusions de ces études conduisent à des résultats antagonistes.

En effet, c'est à Kraft et Kraft (1978) que l'on doit les premières études sur les relations de causalité entre la demande d'énergie et le produit national brut. Dans le but de mettre en évidence l'existence d'un lien entre le PNB et la demande d'énergie aux USA, Kraft et Kraft partent d'une analyse sur la consommation d'énergie et le PNB des Etats Unis sur la période 1947-1974 pour parvenir à la conclusion qu'il existe une relation unidirectionnelle allant du produit national brut vers la demande d'énergie. Ainsi, les conclusions des travaux impliquent alors que toute action visant à promouvoir et redynamiser le secteur de l'énergie n'aurait aucune influence sur l'évolution du Produit National Brut. Cependant, les résultats des travaux de Kraft et Kraft ont fait l'objet de critique de la part d' Akarca et Long.

Pour Akarca et Long (1980), les résultats auxquels sont parvenues Kraft et Kraft sont biaisés dans la mesure où la période choisie pour les études est jugée instable car elle incluait le premier choc pétrolier. Ainsi, en écourtant la période d'étude de 1950 à 1968, ces auteurs montrent une absence de relation de causalité entre le PIB et la consommation d'énergie.

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Au même moment, Yu et Choi (1985) étudient l'existence de relation entre la consommation d'énergie et le PNB sur un panel de pays composé du Brésil, des USA, du Royaume Uni, de la Pologne et de la Corée du Sud. Ils parviennent à la conclusion qu'il n'existe aucune relation de causalité entre la consommation totale d'énergie et le PNB pour les USA, le Royaume Uni et la Pologne. Par ailleurs, ils détectent un lien causal allant du PNB sur la consommation d'énergie pour la Corée du Sud et le contraire pour les Philippines.

En Chine, Shiu et Lam (2004) ont eu recours au test de causalité de Granger pour mettre en évidence le lien causal entre la consommation d'électricité et le PIB réel sur la période 1971- 2000. Ils aboutissent au fait que la consommation d'électricité cause le PIB au sens de Granger. Ainsi, les initiatives et innovations dans le domaine de l'électricité contribuent à l'amélioration de l'activité économique.

En Turquie, Galip Altinay et al (2005), ont eu recours à deux tests à savoir le test de Dolado-lukepohl dans un VAR à niveau et celui de Granger selon la procédure de Toda-Yamamoto (1995) pour mettre en évidence les relations entre la consommation d'électricité et le PIB réel sur la période 1950-2000. Après estimation, les deux tests utilisés pour leur modélisation ont donné une preuve solide de la présence d'une causalité unidirectionnelle allant de la consommation d'électricité au revenu. Au vu de ces résultats, Galip Altinay et al encouragent des politiques visant à améliorer les services de fourniture d'électricité car elles sont une importance vitale pour une augmentation de la consommation d'électricité qui permettrait de soutenir la croissance économique.

Sur les îles Fidji, pays dépendant de l'énergie pour son développement, P. Narayan et Singh (2006) ont réalisé une étude sur les liens entre la consommation d'électricité et le Produit Intérieur Brut. Ces auteurs utilisent dans leurs analyses les nouvelles techniques de cointégration développée par Pesaran, Shin et al (2001) et la causalité de Granger. Les tests économétriques appliqués pour ce pays révèlent qu'il existe une relation de causalité de long terme allant de la consommation d'électricité vers le PIB. Narayan et Singh proposent d'engager des politiques visant à faciliter l'accès à

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l'électricité dans la mesure où les actions ayant pour but de conserver l'énergie auront un impact négatif sur la croissance économique.

Toujours dans cette même optique, Yoo et Kwak (2010) étudient la consommation d'électricité et le PIB réel sur un panel de sept pays de l'Amérique du Sud à savoir l'Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie, l'Equateur, le Pérou et le Venezuela sur la période 1975-2006. Yoo et Kwak parviennent à la conclusion qu'il existe une relation de causalité unidirectionnelle de la consommation d'électricité vers le PIB pour l'Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie et l'Equateur. Cela veut dire que toute action ou politique visant à améliorer les performances du secteur de l'énergie électrique affecte directement la croissance économique de ces pays. Pour le Venezuela par contre, les résultats montrent qu'il y a une causalité bidirectionnelle entre la consommation d'électricité et la croissance économique. Cela implique qu'une augmentation de la consommation d'électricité affecte directement la croissance économique et cette croissance économique stimule aussi la consommation d'électricité dans ce pays. Concernant le Pérou, les conclusions de l'étude de Yoo et Kwak indiquent une absence de lien de causalité entre la consommation d'électricité et la croissance économique.

D'autres techniques ont été utilisées pour mettre en évidence le lien entre la consommation d'électricité et la croissance économique. Au nombre de ces méthodes figure la méthode de cointégration de Pédroni.

La méthode de cointégration de Pedroni sur les données de Panel sera utilisée par Ali Arcaravci et Ilahn Orzturk (2009) pour rechercher l'existence d'une relation de long terme entre la consommation d'électricité et la croissance économique pour un panel de quinze pays en développement de l'Europe de l'est. Ces auteurs vont estimer un modèle à partir de la consommation d'électricité par tête et le produit intérieur par tête de ces pays sur la période 1990-2006. Ils aboutissent au fait qu'il n'existe pas de relation de long terme entre ces deux variables. De ce fait, les politiques de consommation d'énergie électrique n'ont aucun effet sur la production réelle dans le long terme pour ces pays.

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Dans une autre étude, Ali Arcaravci et Ilahn Orzturk (2011) ont utilisé une l'approche ARDL de Pesaran et al (2001) pour étudier la relation et le sens de causalité entre la consommation d'électricité et le PIB pour onze (11) pays du Moyen Orient et de l'Afrique du Nord de 1990 à 2006. Les résultats du test de Pesaran révèlent une absence de relation d'équilibre de long terme entre la consommation d'électricité et la croissance économique en Iran, au Maroc et en Syrie. De ce fait, les auteurs ont décidé de les éliminer de l'échantillon. Toutefois, l'étude a révélé l'existence de relation entre les niveaux de consommation d'électricité et de croissance économique pour l'Egypte, Israël, Oman et l'Arabie Saoudite. Le test de causalité montre l'existence d'une causalité de court terme allant de la croissance économique vers la consommation d'électricité en Israël. En Egypte et en Israël, le sens de la causalité va de la consommation d'électricité vers la croissance économique.

En Afrique, peu d'études se sont consacrées au lien entre le niveau de richesse d'un pays et sa consommation d'électricité (Jumbe, 2004). Cependant, il existe certains auteurs qui ont essayé de mettre en évidence ces relations soit sur des pays pris individuellement ou sur des groupes de pays. Tout comme dans le cas des pays industrialisés, les études sur les relations entre la consommation d'électricité et la croissance an Afrique indiquent une absence de consensus sur le sens de causalité.

Jumbe (2004) a abordé la question dans ces travaux sur le Malawi. Il a montré qu'il existe une relation de causalité unidirectionnelle du PIB vers la consommation d'électricité sur la période de 1970 à 1999 dans ce pays.

Wolde Rufael (2004) à la question de savoir les relations entre la consommation d'électricité et la croissance a utilisé les nouvelles techniques de Pesaran, Shin et Smith (2001) sur quinze pays africains. Wolde Rufael montre en utilisant le PIB comme variable explicative qu'il existe une relation de long terme pour quatre pays (Gabon, Côte d'Ivoire, Nigéria, et le Soudan). Par contre, lorsque la consommation d'électricité est utilisée comme variable endogène, il obtient une relation de cointégration pour quatre pays (Algérie, RDC, Ghana). Pour les onze autres pays de l'étude, les tests de cointégration indiquent une absence de cointégration quelque soit la variables utilisée comme endogène.

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Parmi ces rares études, on peut aussi énumérer celui de KANE (2009). Cet auteur analyse l'intensité énergétique du PIB dans la zone UEMOA en utilisant les données de panels hétérogènes non stationnaires et les tests de cointégration basés sur les données de panel. Il met en évidence un modèle économétrique en prenant en compte quatre (4) variables : l'investissement, la structure productive, le PIB par tête, le taux d'urbanisation. Les résultats de sa modélisation révèlent que l'intensité énergétique du PIB au sein de l'UEMOA dépend largement du niveau d'investissement, de la structure des économies et du taux d'urbanisation. Il montre également que la consommation d'énergie est dominée par le secteur industriel.

Au Nigéria, ce sont les travaux d'AKINLO (2009) qui ont été les premiers à s'intéresser à cette problématique. En effet, pour faire ressortir le lien entre la consommation d'électricité et la croissance du PIB, l'auteur décompose les séries sur la consommation d'électricité et le taux de croissance réelle en utilisant le filtre de Hodrick-Prescott. En appliquant ce filtre, il parvient à décomposer chaque série en sa composante saisonnière, cyclique et sa tendance. Les résultats des estimations montrent qu'il y a cointégration entre la tendance et les composantes cycliques des deux séries, ce qui semble suggérer que la causalité de Granger est probablement liée au cycle économique. L'auteur suggère donc d'investir davantage dans le secteur de l'électricité afin de réduire l'inefficacité dans la fourniture et dans l'utilisation de l'électricité pour stimuler la croissance économique au Nigéria.

Idrissa OUEDRAOGO (2010) utilise les techniques de cointégration aux bornes de Pesaran et al pour mettre en évidence la consommation d'électricité et la croissance économique au Burkina Faso sur la période 1968-2003. Il intègre dans sa modélisation certaines variables à savoir ; la formation Brute de Capital Fixe, le PIB et la consommation d'énergie électrique. Après application de la méthode de Pesaran, l'auteur aboutit au fait qu'il existe une relation de long terme bidirectionnelle entre la consommation d'énergie et l'investissement. Les travaux de Ouédraogo révèlent également l'existence d'une relation rétroactive positive entre les investissements et le Produit Intérieur Brut. Au regard de ce qui précède, l'auteur préconise que les

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politiques énergétiques doivent être mise en oeuvre de telle sorte que l'électricité ne génère aucun impact négatif sur l'activité économique.

Si les développements précédents nous ont permis de mettre en évidence l'évolution de la consommation d'électricité et la croissance économique, il n'en demeure pas moins que la problématique de l'accessibilité soit une question importante pour que le secteur de l'électricité puisse jouer un rôle déterminant dans la croissance économique. Ainsi, les effets de l'énergie électrique sur la croissance économique pourraient dépendre de son organisation, de la disponibilité du service et du niveau d'accès des populations au service. Il est donc impérieux de passer en revue l'historique et l'organisation du secteur de l'électricité en Côte d'Ivoire et d'analyser la consommation d'électricité en Côte d'Ivoire.

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CHAPITRE 2 : SITUATION DE L'ENERGIE ELECTRIQUE EN COTE D'IVOIRE : ETATS DES LIEUX

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Depuis les années 1990, la Côte d'Ivoire a adopté une série de réformes permettant de faire du secteur de l'électricité, un secteur clé pour son développement économique. Ces réformes avaient pour but d'améliorer la qualité des services afin de répondre à une demande en pleine expansion et d'assurer la rentabilité des investissements. A cet effet, de nombreuses stratégies ont été mises en oeuvre en vue d'une organisation et d'un développement harmonieux du secteur de l'électricité à travers un cadre institutionnel adéquat.

De ce fait, Il convient d'une part, d'analyser l'évolution de l'organisation du secteur de l'électricité en Côte d'Ivoire et d'autre part, de mesurer l'effet sur l'évolution de la consommation d'électricité et la croissance économique.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille