La dynamique de la petite et moyenne entreprise: moteur du développement économique du Katanga ( RDC).( Télécharger le fichier original )par Emile Christophe MOTA - NDONGO K Université de Lubumbashi RDC - Doctorat en sciences économiques 2000 |
LA DYNAMIQUE DE LA PETITE ET MOYENNE ENTREPREISE :MOTEUR DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUEDU KATANGAPAR Emile MOTA - NDONGO K Docteur en sciences économiques Université de Lubumbashi Katanga République démocratique du congo PLAN SOMMAIREChapitre I : Evolution de la Petite et Moyenne Entreprise et étude du milieu. Chapitre II : L'industrie du cuivre et autres activités associées Chapitre III : L'industrie manufacturière Chapitre IV : L'industrie agro-alimentaire Chapitre V : L'industrie de construction Chapitre VI : L'industrie du transport. INTRODUCTION GENERALE
Le développement économique du CONGO et du KATANGA, amorcé dès l'aube du XXème siècle par la découverte d'importants gisements cuprifères, l'implantation du chemin de fer, le dragage des rivières et du fleuve Congo, a connu depuis les années 1885, jusqu'à ce jour, un parcours très tumultueux. En effet, le CONGO dut faire face à la première guerre mondiale 1914-1918, à la crise économique mondiale des années 1930, à la seconde guerre mondiale 1940-1945, en ce qui concerne les années avant l'indépendance. A l'accession du Pays à l'indépendance, le CONGO qui était classé parmi les pays d'Afrique les plus industrialisés, subit les soubresauts de l'indépendance à savoir : - les turbulences politiques qui débouchèrent sur la sécession du KATANGA en juillet 1960 ;
Cette situation ne fut pas favorable à l'économie congolaise. Outre l'avènement du Nouveau Régime en 1965, une lueur d'espoir avait régné au Pays avec une certaine reprise de l'économie dévastée depuis 1964. Mais, malheureusement, cet effort fut anéanti en 1973-1974 avec la politique camouflée de Nationalisation, appelée "ZAIRIANISATION ET RADICALISATION". Le Pays dut faire face de nouveau à une impasse économique indescriptible. C'est à cette époque que l'économie congolaise (ex-zaïroise) amorça sa descente aux "enfers".
Notons par ailleurs qu'une certaine reprise s'était manifestée vers les années 1984, mais cet effort fut également anéanti par la vague de démocratisation des institutions déclenchée en avril 1990. Comparativement aux desiderata ci-haut énumérés, le PIB du CONGO avant 1960 était de l'ordre de 640,2(*), tandis que pendant la décennie allant de 1960 à 1970, il a évolué dans les proportions de 966,1(*). Par contre, pendant la décennie de 1970 à 1980, le PIB a évolué de 966,1(*) à 1.015,0(*). La dernière période de 1980 à 1995, qui était caractérisée par la vague des politiques de démocratisation en Afrique, a eu pour conséquence une perturbation de l'appareil économique du CONGO en général et du KATANGA en particulier. Déjà enclavé depuis 1975, avec la guerre d'ANGOLA et par la fermeture du Chemin de fer du BENGUELA, le KATANGA a été la Province la plus frappée par cette crise. L'instabilité monétaire, issue des différentes réformes monétaires qu'a connues le Congo depuis 1967, l'a plongé dans un marasme économique très accentué. La politique de zaïrianisation/rétrocession a porté à l'économie plus de problèmes que des solutions. Notons aussi que la part du PIB du KATANGA au PIB national était de l'ordre de 34,9% en 1970 et de 31,96 % en 1984(1)(*). Depuis 1990, la circulation de deux monnaies parallèles ayant une valeur faciale différente n'a pas facilité la tâche aux opérateurs économiques. Enfin, pour couronner davantage ce cataclysme monétaire, l'apparition du phénomène "Dollar" n'a fait qu'aggraver le comportement de l'économie congolaise. La croissance économique, apparue vers les années 1970 , a été anéantie par la crise pétrolière mondiale de 1973. Dans le domaine agricole, le CONGO qui fut classé parmi les grands exportateurs des produits tels que : le café, le caoutchouc, l'huile de palme, les agrumes etc., fut relégué au second plan, suite au "boom" industriel provoqué par l'industrie du cuivre. Mais cet effort, mal planifié, n'a pas profité au développement économique de la Province. L'intégration industrielle n'a pas été entretenue, mettant ainsi le CONGO dans une position de mono-exportation. Les pôles de développement tels que prônés par le Professeur Jean-Louis LACROIX,(2(*)) n'ont été que des slogans au profit d'une politique de développement sectoriel mal planifiée. De ce fait, l'apparition des îlots isolés et d'industries n'ayant aucune liaison interindustrielle, tant au niveau horizontal que vertical, eurent pour conséquence une fuite massive des capitaux vers l'extérieur. Le transfert des technologies pour lesquelles le CONGO et le KATANGA en particulier avait acquis une certaine expérience, s'est vu amenuisé par manque des capitaux pour leur maintenance. D'où la politique de transfert des technologies "Clés sur portes" qui a fait apparition dans l'industrie du KATANGA : de 30.000 tonnes de cuivre produites vers les années 1921 - 1922, l'industrie du cuivre atteint l'optimum de 475.000 tonnes en 1984 pour connaître actuellement une chute spectaculaire jusqu'à 33.990 tonnes à fin 1995.
Tous ces faits réunis démontrent à suffisance la mauvaise préparation de l'homme congolais aux affaires . Outre cet attribut, le manque d'option politique et la politique d'imitation, ont fait du CONGO un Pays des ressources primaires. Le CONGO n'a pas su intégrer son économie; ses potentialités économiques sont restées au niveau des études. Le monopole de l'Etat, depuis la nationalisation de grandes unités macro-économiques, a défié toutes les théories managériales des entreprises modernes, ayant pour objectif la maximisation des recettes et la performance, au profit des paramètres sociaux, n'ayant aucun impact sur le développement économique de la Province ni du Pays en général. La Petite et Moyenne Entreprise a évolué de manière organisée jusqu'en 1960. Constituée principalement de capitaux étrangers et animée par les entrepreneurs expatriés, elle a dû faire face aux tumultes qui ont caractérisé tous les pays africains, à l'aube et au lendemain des indépendances. Etant mal préparées à la transition, les populations autochtones s'en étaient prises aux propriétaires de ces Petites et Moyennes Entreprises, en représailles des périodes sombre de l'esclavage. Bon nombre d'entre-elles furent pillées ou abandonnées par leurs propriétaires. Les guerres de sécessions et les rébellions ont fragilisé sensiblement cette corporation. Par souci de pouvoir contrôler l'économie du pays, les pouvoirs publics de l'époque décidèrent en 1973 de zaïrianiser les quelques entreprises qui avaient survécu aux désastres des années 1960-1964. Ces dernières furent cédées aux entrepreneurs congolais. Ce fut le deuxième coup fatal qui a paralysé cette corporation, au profit des grandes unitées nationales pendant la même période. Dans ce travail, nous voulons d'abord faire un diagnostic de l'économie congolaise depuis la création de l'Etat Indépendant du Congo jusqu'à nos jours. Ensuite il s'agira essentiellement d'étudier les différents paramètres d'une bonne économie. La dynamique de la Petite et Moyenne Entreprise pour un développement économique de la Province a toujours été pour nous une démarche nécessaire mais non suffisante pour épauler l'industrie du cuivre ,qui s'essouffle au fil des années, par manque d'une intégration industrielle adéquate et une maîtrise des technologies modernes d'exploitation donnant satisfaction sur le marché et ayant des coûts de production compétitifs. Une industrie implantée au milieu du désert ne peut apporter à son environnement que les conséquences de sa propre contradiction. C'est pourquoi, une politique de développement ne se veut complète, globale et globalisante que si elle prévoit dans sa conception, des flux importants en amont et en aval. 01. PROBLEMATIQUESelon L. ALTHUSER, "la problématique est la définition du champ des connaissances théoriques dans lequel on pose le problème du lieu exact, de sa position et des concepts requis pour le poser". (3)(*) L'économie congolaise a connu, comme nous l'avons souligné dans l'introduction, un certain comportement que nous avions qualifié de tumultueux. En effet, la découverte des gisements de cuivre devrait procurer au Pays un certain degré de développement. Mais, cette découverte, par manque d'une planification concertée, globale et globalisante n'a pas, comme l'a développé le Professeur Nyembo Shabani dans sa thèse de doctorat (4) ; le NIGERIA, le GABON et la COTE-D'IVOIRE, contrairement aux autres Pays d'Afrique, ont enregistré une croissance économique soutenue et une intégration industrielle cohérente. Les objectifs du colonisateur belge à l'instar des autres colonisateurs français et britanniques ont été orientés plus vers une colonie d'exploitation, qu'à une colonie d'implantation connue sous d'autres cieux. La configuration géographique des voies de communication était orientée, selon STANLEY, vers l'Océan en passant par les Pays du sud et vers le lac TANGANIKA pour déboucher sur l'Océan Indien. Ce tracé avait pour objectif l'évacuation des produits miniers de la riche Province du KATANGA. Après l'indépendance, les pouvoirs publics congolais n'ont pas changé cette configuration pour provoquer un développement intégral du Pays. C'est ainsi que le Pays en général et la Province du KATANGA en particulier se sont dotés d'un amalgame d'industries et de Petites et Moyennes Entreprises, ayant très peu de liens d'interpénétration aussi bien en amont qu'en aval. Cet aspect de la question a mis le KATANGA dans une situation de petits îlots industriels n'ayant pas un minimum d'inter-complémentarité. Leurs intrants provenaient aussi bien de la métropole que des autres Petites et Moyennes Entreprises et les extrants servaient en partie l'industrie du cuivre qui devrait soutenir l'effort du développement du KATANGA et du CONGO, mais qui s'est limitée dans la création d'un noyau économique s'étendant sur l'Hinterland Minier à savoir : l'axe KASUMBALESA, LUBUMBASHI-LIKASI ET KOLWEZI, soit sur une superficie moyenne de 50 Kms de large et 350 Kms de long. Le reste de la Province a été délaissé, après 1960, au profit de cette industrie considérée comme source d'enrichissement, et solution aux problèmes de développement. C'est ainsi que les turbulences de l'industrie du cuivre se sont répercutées sur les Petites et Moyennes Entreprises. Se dénombrant à plus de 2600 avant l'indépendance, ces Petites et Moyennes Entreprises se chiffrent à plus ou moins 100 en 1995. Dès lors, nous nous posons les questions suivantes : * Pourquoi les Petites et Moyennes Entreprises qui, sous d'autres cieux, soutiennent le développement du pays, ont-elles disparu ou réduit leurs activités au Congo? * Pourquoi cette Petite et Moyenne Entreprise n'a-t-elle pas réussi à s'intégrer dans l'économie congolaise et évoluer comme ses consoeurs des autres pays d'Afrique? * Le Pouvoir Public a-t-il une responsabilité dans cette désarticulation de l'économie congolaise ? * La Petite et Moyenne Entreprise sera-t-elle une partie importante d'une constellation plus vaste de développement qui, dans son ensemble, augmenterait, de manière sensible, la production économique de la Province? * La Petite et Moyenne Entreprise est-elle plus sujette que d'autres , aux variations saisonnières peu souhaitables de la demande et de l'emploi ? * Variera-t-elle de façon opposée à quelques activités existantes de la Province qu'elle pourrait pourtant compléter ? * Comment réagira-t-elle aux "booms" et aux dépressions économiques ? * Quelles sont ses perspectives d'avenir dans le cadre d'un développement à long terme? * Est-elle fortement affectée par les conditions politiques internationales ou par les changements éventuels de la technologie ou les modifications vraisemblables des préférences des consommateurs ? * Ces facteurs apportent-ils des perspectives d'expansion favorables ou défavorables à la Petite et Moyenne Entreprise dans la Province ? C'est à cet ensemble d'interrogations que nous allons tenter de trouver des réponses. Pour ce faire, nous allons procéder par un diagnostic de la Petite et Moyenne Entreprise au KATANGA, depuis l'Etat Indépendant du CONGO en 1885 jusqu'à nos jours en passant par la période de l'Indépendance en 1960 . Nous chercherons à savoir pourquoi cette Petite et Moyenne Entreprise, au lieu d'être un contre poids à l'industrie du cuivre, s'est disloquée au même titre qu'elle pour se réfugier dans une économie informelle, dite "souterraine". Nous essayerons de proposer un modèle économique de Petites et Moyennes Entreprises afin qu'elles puissent constituer un facteur essentiel pour le développement et la croissance économique de la Province. L'industrie du cuivre s'essouffle et est en train de provoquer une décapitalisation et une délocalisation de l'activité économique. Seule la Petite et Moyenne Entreprise pourrait venir à la rescousse de ce développement économique, eu égard aux paramètres toujours croissants tels que : la pression démographique, le niveau du revenu, l'emploi, le niveau de l'activité, la croissance d'une nouvelle économie dite de "Débrouille" ou le système "D". Ainsi, nous n'entendons pas donner, dans ce travail , des recettes infaillibles aux problèmes que connaissent les Petites et Moyennes Entreprises, mais nous voulons avant tout susciter des réflexions, relever des doutes, faire éclater des contradictions suivant la belle expression de René DUMONT: "Nous sommes de ceux qui revendiquent le droit à l'erreur". (5)(*)
(*) En million de Zaïres de 1970 * 2 LACROIX J-L.,cité par Alfred EWING in Industrie en Afrique ,éd mouton, Paris ,I967. * (3)ALTHUSER., "Pour Marx", éd MASPERO, PARIS, 1975, p 85. (4)NYEMBO SHABANI.,"L'industrie du cuivre dans le monde et le progrès économique du copperbelt Africain, la Renaissance du livre,Bruxelles,1975,pp45-50 * (5)DUMONT, R.: "Développement et Socialisme, Ed. du Seuil, Paris 1964. |
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