CHAPITRE 4
INSECURITE FONCIERE A GAMBARA II, BURKINA ET JERUSALEM, ET
CARTOGRAPHIE DU FONCIER CADASTRAL
INTRODUCTION
L'impact de la
précarité foncière sur la pauvreté et sur le
renouvellement des ressources naturelles est une évidence. Aucune
politique de développement urbaine ne saurait faire l'économie
d'une intervention pour affirmer les droits du producteur sur le sol. La
sécurité foncière représente d'abord un enjeu
majeur de maintien de l'ordre public. L'insécurité
foncière quand à elle conduit à un processus de
dégradation des ressources. L'affaiblissement des régulations
administratives ou coutumières stimule l'accaparement rapide et
individualisé des ressources par crainte d'une confiscation de ces
mêmes ressources par d'autres acteurs (Teyssier et al., 2003).
Le présent chapitre se propose d'étudier l'incidence des
principaux modes d'accès à l'espace habité sur la
sécurisation des habitations et des terres des quartiers Gambara II,
Burkina et Jérusalem.
4.1
ESPACE DOMINE PAR LE DROIT COUTUMIER
Les principaux modes d'accès à l'espace
habité de notre zone d'étude sont la location et l'achat
respectivement pour les maisons et les terrains. De ces modes découle la
primeur du droit coutumier à Gambara II, Burkina et
Jérusalem. Comme dans la plupart des localités du
Nord-Cameroun, les chefs de quartiers occupent une place centrale dans la
gestion des terres. L'importance de ces chefs s'explique par le fait que ce
sont des quartiers qui viennent d'entamer leur processus d'urbanisation. La
politique de gestion de ce milieu péri-urbain est similaire à
celle qu'on retrouve dans les campagnes africaines. Elle repose sur le droit de
propriété collectif.
4.1.1
Droit de propriété collectif
Comme nous l'avons dit plus haut, la gestion foncière
des quartiers de notre zone d'étude se fait suivant le régime
foncier coutumier. Ce régime repose sur le clan ou la famille et le
droit de propriété collectif. Le droit collectif est
exercé partout par le même personnage, le chef de terre et pour le
cas de notre zone d'étude c'est le chef de quartier. Dans toutes les
coutumes foncières, le chef est le plus proche descendant du premier
occupant des lieux. En cette qualité, il est l'intermédiaire
entre les vivants, les parents morts et les puissances invisibles
co-propriétaires des terres occupées. Le chef administre le
patrimoine foncier de tout le groupe à son nom et pour son compte. Il
distribue les terres aux familles, aux ménages et aux individus selon
leurs besoins, et exécute les rites sacrificiels requis pour
l'installation d'un étranger ou pour le défrichement de nouvelles
terres ; cette obligation de consécration rituelle ou le fait de
sanctionner religieusement toutes les transactions foncières donne
d'ailleurs son vrai sens à l'institution de la chefferie de la terre
(Dialla, 2003).
Tout membre du groupe propriétaire collectif a un droit
d'usage et d'exploitation permanent. A son décès, ses
héritiers occupent et exploitent les terres de leur auteur sans une
nouvelle intervention du chef de terre. Ce qui est recherché dans le
régime foncier coutumier constitué par un ensemble de
règles non écrites, fortement hiérarchiques et
ancestrales, c'est beaucoup plus la sécurité et la
cohésion du groupe qu'une exploitation de la terre au sens purement
économique du terme. La terre demeure le principal lien entre les
membres de la communauté après celui du sang. La
communauté humaine est organisée en milieu rural autour de la
terre, en tant que support matériel de l'existence et
élément de l'origine commune. Dans la perception africaine, la
terre n'est pas une chose banale. Elle est sacrée et fait l'objet de
culte. En principe, elle ne se vend pas et est exploitée par la
communauté sous l'angle d'une économie de subsistance. D'une
manière générale, dans tous les pays d'Afrique
subsaharienne, le régime foncier coutumier a bien fonctionné
aussi longtemps que la pression démographique sur la terre était
minime (Dialla, 2003). Aujourd'hui à Gambara II, Burkina et
Jérusalem, du fait de l'absence des institutions
étatiques en charge de la gestion foncière, les chefs de
quartiers en sont les principaux et légitimes garants.
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