0. INTRODUCTION GENERALE
0.1. PROBLEMATIQUE
Enumérant les objectifs du millénaire pour le
développement, le professeur MUKOKO SAMBA (5-21 juillet 2004) cite en
premier lieu « Eliminer l'extrême pauvreté et la faim »
; et le SPORE (n°128/avril/2007) de stigmatiser « Manger à sa
faim est le premier besoin de l'homme. Pourtant, les malnutris sont de plus en
plus nombreux (850 millions selon la FAO) et le 3/4 d'entre eux sont
aujourd'hui des petits agriculteurs, producteurs d'aliments de base ».
Comme pour exprimer l'aspiration de tout agriculteur, SPORE
(n° 124/août 2006) note : « c'est pourtant simple : on veut
vendre dès la récolte, au prix de la période de soudure,
et être payé à l'avance,... ».
SPORE (op. cit) souligne que tout agriculteur aspire à
vendre les fruits de son travail à un prix correct et être
payé dans des délais qui lui permettent d'acheter les semences et
intrants pour la campagne suivante sans avoir à s'endetter. Cela reste
un idéal surtout pour les petits producteurs africains qui, après
avoir vécu sous tutelle des organismes de commercialisation
étatiques, se sont retrouvés exposer brutalement à la
libéralisation des marchés agricoles à partir des
années 1980.
Le secteur privé a alors été
amené, le plus souvent sans préparation, à prendre le
relais de l'Etat pour commercialiser les produits agricoles. Mais
l'insuffisance du crédit, liée à la faiblesse et à
l'inadaptation du système bancaire, ainsi que le manque de
capacité de stockage et l'absence d'outils de couverture des risques
liés à la volatilité des prix ont longtemps freiné
le développement des petites et moyennes entreprises agricoles.
Pour corroborer, la Division Provinciale de l'Agriculture du
Sud Kivu (2001-2005) révèle que dans le temps, la province du Sud
Kivu disposait des unités de transformation qui faisaient sa
fierté. Ces unités étaient constituées des rizeries
industrielles, des huileries, des usines d'égrenage de coton, de
production des huiles essentielles à partir des écalyptus, etc.
Aujourd'hui, à part la Pharmakina qui produit la quinine, la Bralima
(pour les boissons), les plantations Irabata et Lemera (pour le thé),
toutes les transformations des produits agricoles se font d'une manière
artisanale.
La relance de la coopération avec les institutions de
Bretton Woods, depuis 2001, à travers la mise en place des programmes
économiques suivis par les services du FMI et appuyés par la
Banque Mondiale et les autres partenaires au développement n'a pas
produit d'impacts visibles sur le secteur agricole.
En effet, la division provinciale de l'agriculture du Sud Kivu
(op. Cit.) note entre autres contraintes qui entravent la bonne marche du
secteur agricole au Sud Kivu :
- Le mauvais état des routes et plus
particulièrement les routes de desserte agricole ;
- Personnel de vulgarisation agricole insuffisant, sous
équipé et d'âge avancé ; - Pratiques culturales
inappropriées ;
2
- Problèmes fonciers dans le Kivu montagneux (les
territoires de Walungu, Kabare, Kalehe, et Idjwi) où en moyenne le
ménage agricole a moins de 30 ares de terrain ;
- Manque de main d'oeuvre agricole dans la partie dite le Kivu
forestier (Sud et Ouest de la province à savoir les territoires Mwenga,
Shabunda, Uvira et Fizi) ;
- Manque d'intrants notamment les matériels aratoires
(houes, machettes, haches,...), les semences performantes en quantité
nécessaire (cas de paddy, arachide, maïs, etc.), les produits
phytosanitaires, les engrais ;
- Les perturbations climatiques suite au déboisement
;
- L'érosion ;
- Les calamités (mosaïque africaine du manioc, le
cosmopolites sordidus pour le bananier) ;
- Le non entretien des infrastructures d'irrigation ;
- L'incapacité pour les paysans de faire atteindre
leurs productions aux centres de consommation ;
A ceci s'ajoute l'insécurité récurrente
en milieu rural du Sud Kivu et l'accès difficile au crédit.
La province du Sud Kivu, fait ressortir la Division
Provinciale de l'Agriculture du Sud Kivu (op. cit.) qu'en dépit de ses
énormes potentialités agro écologiques et des efforts de
travail consentis en moyenne par 519.636,2 ménages agricoles par an, n'a
pu réaliser qu'une production agricole moyenne de 3.457.727 tonnes par
an toutes cultures confondues. Ce qui fait une production agricole par
ménage agricole par an de 6,6 tonnes de produits agricoles toutes
cultures confondues (cultures vivrières, maraîchères et
fruits).
Cette situation a fait que la province du Sud Kivu fasse
recours à l'extérieur pour nourrir sa population. A titre
illustratif, citons la division provinciale du commerce extérieur du Sud
Kivu (2004), qui note « qu'au cours de l'année 2004, la province du
Sud Kivu a importé : 4.452 tonnes de Riz ; 3.933,88 tonnes de sucre ;
3.808,90 tonnes de farine de froment ; 1.387,35 tonnes d'huile
végétale ». Ces besoins en importation des produits
agricoles ne cesse d'accroître. En effet, La cellule d'Uvira de la
division provinciale du Commerce Extérieur au Sud Kivu (2006) a
enregistré l'importation de : 6.919,775 tonnes de Riz ; 10.953,900
tonnes de sucre ; 16.292,425 tonnes de farine de froment ; 2.472,057 tonnes
d'huile végétal ».
D'autres produits agricoles tels : la farine de manioc, la
farine de maïs, tomates, oignons font objet d'un important trafic
d'importations en provenance de pays voisins (le Rwanda et l'Ouganda) et de la
province voisine du Nord Kivu mais ne sont pas
documentés/enregistrés dans les statistiques des importations de
la province du Sud Kivu.
Notons par ailleurs, qu'en dépit de ce sombre visage
que présente le secteur agricole au Sud Kivu, il y a lieu de noter la
présence sur le terrain de divers acteurs investis dans la lutte contre
la pauvreté et la faim parmi lesquels figurent : le pouvoir public
(l'exécutif provincial), les ONGS locales et internationales ayant le
volet de crédit, les institutions financières d'épargnes
et de crédit.
3
Eu égard à ce qui précède, il y a
lieu de se poser les questions suivantes :
· Quel est l'apport réel de ces différents
acteurs financiers au secteur agricole au Sud Kivu en terme de crédit
agricole et subventions de l'Etat aux agriculteurs pour lutter contre la
pauvreté et la faim ?
· Comment peut-on financer efficacement le secteur
agricole au Sud Kivu ?
Pour répondre à ces questions, les
hypothèses ci-dessous ont guidé notre réflexion.
|