4.2 Les télécentres au
Sénégal : mort définitive de « la poule
aux oeufs d'or » ou amorce d'une nouvelle «
success story » ?
Les télécentres sont des lieux privés
spécialement aménagés avec une (ou plusieurs) cabine(s)
téléphonique(s) mise(s) à la disposition de la population
environnante. Mais ils peuvent être équipés parfois
d'autres technologies de l'information et de la communication comme le fax, la
photocopie, les micro-ordinateurs connectés ou non à Internet.
Chaque télécentre est généralement doté de
deux lignes équipées de taxaplus ou télétaxes qui
sont des sortes de compteurs permettant aux utilisateurs de contrôler le
nombre d'unités de la communication téléphonique
effectuée. Les télécentres privés communautaires
ont fait leur apparition au Sénégal en 1993 et dès lors
ils ont renforcé leur poids de façon considérable. Le
Sénégal comptait 5734 télécentres entre 1993 et
143
1998, 8200 télécentres entre 1998 et 2000 et
13000 télécentres entre 2000 et 2001. La Sonatel vend 50 Francs
CFA (0,08 euros) l'unité aux gérants qui doivent en plus payer
une taxe d'une valeur ajoutée de 20%. Ensuite, il revient à
chaque gérant de fixer la marge bénéficiaire
souhaitée. La plupart du temps, l'unité de communication est
vendue aux usagers entre 65 Francs CFA (0,10 euros) et 105 Francs CFA (0,16
euros). Les télécentres, dont plus de la moitié est
située à Dakar, ont contribué de manière
extrêmement importante à faciliter l'accès au
téléphone aux populations les plus démunies et habitant
dans les endroits les plus reculés du pays. Les spécialistes des
télécommunications de même que certains observateurs
avertis reconnaissent que les télécentres ont effectivement
largement contribué à banaliser l'usage du
téléphone sur tout le territoire national. Son expansion a
favorisé, selon Gaston Zongo (2000), le développement d'une
véritable culture du téléphone dans la
société sénégalaise, toutes catégories
sociales confondues. En outre, les télécentres ont
également permis à de nombreux jeunes de trouver directement ou
indirectement du travail. Au Sénégal, l'espace du
télécentre est valorisé au maximum par le gérant.
Aussi, il n'est pas rare d'y trouver la fourniture d'autres services, tels que
la vente de matériel de bureautique, la vente de produits
cosmétiques, de vêtements, de produits alimentaires, etc. En 2006,
on comptait plus de 16.000 télécentres.
Néanmoins, il faut aussi admettre avec Olivier Sagna
que l'on assiste aujourd'hui à la mort de la poule aux oeufs d'or avec
le développement à un rythme sans précédent de la
téléphonie mobile. Le succès rencontré par les
innovations majeures prises par les deux opérateurs de
téléphonie mobile de l'époque a contribué à
modifier de façon extrêmement profonde l'environnement des
télécommunications au Sénégal, entraînant
inéluctablement la fermeture de millier de télécentres
(15.000 entre 2005 et 2008) et par ricochet la perte de nombreux emplois. En
effet, dès lors que Sentel, en 2005, et Sonatel Mobiles, en 2006,
offraient désormais les possibilités d'acquérir des cartes
téléphoniques prépayées à des sommes
modiques (1000 FCFA, soit 1,52 euros) et aussi de partager des crédits
à des tiers, les usagers ont commencé à se
détourner des télécentres. Pour faire face à cette
situation, les exploitants de télécentres, regroupés au
sein de l'Union des exploitants des télécentres et des
télé-services du Sénégal (Unetts), comptent
moderniser ces dispositifs d'accès collectifs en les dotant de
matériels informatiques. Selon Monsieur Bassirou Cissé, le
secrétaire général de l'Unetts, ces équipements
permettront de mettre à la disposition des clients de nouveaux services
comme les démarches administratives en
144
ligne (l'e-gouvernance), les paiements des factures
d'électricité ou d'eau, les transferts d'argent, etc. Ce projet,
piloté par l'Agence Informatique de l'Etat, pourra aussi compter sur le
partenariat de l'ARTP, de la Banque mondiale et de Microsoft, entre autres
bailleurs de fonds.
|