1.2 L'enfant malade
1.2.1 Psychologie de la santé
Pour la psychologie de la santé, les variables psychiques,
sociales et biologiques sont
en interaction, il s'agit de les potentialiser. Par exemple, chez
les patients atteints du
SIDA, le soutien social agirait de façon positive sur leur
état de santé (atténuation des si-
27. On
gnes dépressifs et de morbidité) reconnaît
plusieurs types de soutiens sociaux: affectif,
émotionnel, cognitif et matériel. M. Baumann ajoute
celui d'affirmation et le soutien nor-
28
matif qui permet de trouver une place dans la
société .
L'école à l'hôpital se situe dans le cadre du
soutien social fort. Elle prend en compte maladie et handicap pour
donner la parole au malade, lui permettre de tracer les re-
flets de son vécu. C'est un moyen de situer l'enfant dans
sa maladie : un outil de mé-
*
diation et de remédiation pour dédramatiser la
douleur et l'angoisse , favoriser le ques-
tionnement. Exorciser le doute (coupable secret) permet de
dissiper le stress, de conjuguer
l'éducation et la santé. La parole
échangée (verbale ou écrite) dissipe le sentiment de
soli-
tude*29, l'impression de délaissement psychique
prélude à la dépression.
L'enfant malade est reçu pour des raisons variables en
pédiatrie jusqu'à l'âge de 16 ans.
En cas de traumatisme ou s'il est nécessaire de pratiquer
une opération, il sera admis en chirurgie
avec des adultes. Dans le premier cas, il s'agit
généralement de séjours de courte durée (4
jours),
dans le second, l'hospitalisation peut durer plusieurs mois. Il
est parfois nécessaire de réitérer les admissions.
1.2.2 L'enfant malade et l'hospitalisation
Le stress accompagne toute admission en établissement
hospitalier.
1° L'urgence caractérise le plus souvent cette
admission. Il s'agit d'une situa-
tion de détresse des parents et de l'enfant,
marqués par la douleur, la frayeur et l'in-
quiétude, aggravés par la nature impromptue de la
séparation. L'environnement s'im-
*
pose (bruits, odeurs, étrangeté) et amplifie
l'angoisse . Le souvenir d'un séjour antérieur dé-
clenche parfois l'hypersensibilité, le syndrome
d'angoisse de captivité ou ravive la hantise des examens subis.
L'admission est rarement prévue ou préparée.
2° Le séjour hospitalier peut entretenir
l'angoisse. L'enfant ne différencie pas la cause et l'effet, toute
douleur est pour lui d'origine exogène, qu'il s'agisse du mal qui le
ronge ou des effets engendrés par les soins qu'il reçoit. Il peut
se sentir maltrai-
30
té, puni, persécuté, en danger. Les
croyances (maladie-punition) et plus encore l'opéra-
tion chirurgicale activent les fantasmes de castration ou de
viol. L'entourage (famille, per-
27 Marchand G., L'essor de la psychologie de la
santé, Sciences Humaines, n° 145, janvier 2004, p. 14 -18.
28 Manderscheid J.C., Éducation à la
santé, cours du CNED, p. 114-116.
29 Pouchelle M.C., Guide de l'hospitalisation de
l'enfant, Apache, Antony, 2000, page 17. 3 0 On sait que les
sociétés «modernes» ne sont pas
immunisées contre les croyances (R. Boudon).
14
sonnel soignant, intervenant) informé peut
atténuer ce syndrome. La maladie est vécue comme si elle devait
durer, avec son cortège d'interdits et de privations.
31
Anna Freud et Thesis Bergmann distinguent trois attitudes chez
l'enfant malade
- L'enfant docile (en apparence), sans exigence,
indifférent, dépressif, vivant un
retrait émotionnel, de repli, sur son corps ou ses
fantasmes, il s'abandonne au destin.
- L'enfant courageux, compréhensif, il n'ose affronter la
situation. Le danger
écarté, il présente parfois des phases de
régression (difficulté à manger, dormir, apprendre).
- L'enfant difficile, exigeant, tyrannique, il est en quête
d'attention et d'amour.
*
Il extériorise son angoisse par des cris, il refuse le
traitement et toute consolation.
Cette réaction lui permet de maîtriser la
situation vécue. Son état s'améliorant, il devient docile
et accepte les soins. Pour chacun de ces enfants la mère est un grand
réconfort, lui permettant d'assumer la «violence
hospitalière» qui prend possession du corps et limite ses
libertés (motrice, alimentaire). La longueur du séjour permet
à l'enfant de s'habituer à l'univers ambiant, il finit par se
rapprocher du personnel et confie ses soucis. Le regain de confiance
déclenche une métamorphose de comportement, le passage à
la posture debout est significatif à cet égard.
3° La sortie est vécue comme une situation
idéalisée. L'enfant tourne le dos à l'hôpital,
à ses amis, à ce passé, n'envisageant que l'avenir
proche.
Les exceptions visant au désir de prolongation du
séjour caractérisent le cas où le rétablissement
physique, ne va pas de pair avec le bien être psychique.
4° Réactions typiques T. Bergmann observe pour
certaines affections des réactions conséquentes de la
séparation (angoisse du désir de la mère,
désespoir, refus des soins, révolte ou docilité
superficielle) et du type de maladie :
a) Le malade orthopédique accepte limitations et
contraintes.
Les équipements médicaux par leur caractère
concret peuvent avoir une action apaisante. Le groupe des patients soumis aux
mêmes limitations rassure, ainsi que l'espoir de recouvrer une meilleure
autonomie. La contrainte reste néanmoins le facteur déclenchant
des régressions notamment de l'expression verbale.
b) Le malade cardiaque déprime, limite toutes
relations, dissimule sa peine, le patient se ménage en tout :
émotion, mouvement, débit de parole. Cette maladie
«invisible» le prive de moyens supplétifs pour fixer sa
frayeur. Cette souffrance intérieure « mystérieuse »,
difficile à définir ne se partage pas avec l'entourage.
3 1 Freud A., Bergman Th., Les enfants
malades, Privat, Toulouse, 1976, 202 p.
c)
15
L'enfant arthritique est disposé à
subir la douleur de ses membres. La présence de sa mère suffit
à l'apaisement, mais une contrariété avive la
souffrance.
d) L'enfant en danger de mort ou qui ressent une
aggravation de son état a le sentiment de s'écarter de la
normalité. C'est un récepteur attentif et performant de
l'environnement des humains. Il est capable de lire, et d'interpréter
les sons, gestes et tensions, il repère les absences et les
incohérences, étalonne la gravité de son cas selon
l'évolution des comportements. La diminution de ses forces physiques et
la réduction de sa mobilité le rendent pleinement conscient de
son état. En pareille circonstance, l'enseignant ne doit pas
atténuer les repères de vie et de normalité qu'il offre
à ses élèves. Aussi longtemps que possible, l'enfant doit
pouvoir s'identifier au groupe, être associé à toute
activité.
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