EDC ( Electricity Developpment Corporation ) et la relance du pool énergétique camerounais: enjeux et perspectives( Télécharger le fichier original )par Jean- Louis NDZOUDOM Institut de formation pour le développement Yaoundé - Diplôme d'études professionnelles approfondies niveau 2 2011 |
B. Les causes structurellesDeux raisons au moins expliquent les causes structurelles du déficit d'énergies électriques au Cameroun ; La première est due au fait qu'AESS n'investit pas comme le prévoit le cahier de charge adossé au contrat de concession. La seconde est liée à l'organe de régulation qui ne joue pas effectivement son rôle. 1. La réticence d'AES Sonel à investir conformément à son cahier de chargeLe réseau électrique qu'exploite AES-SONEL comprend le réseau interconnecté Nord qui dessert la partie septentrionale du Cameroun, le réseau interconnecté Sud est un réseau autonome qui fournit de l'électricité à l'Est du pays. La production d'électricité est assurée principalement par des centrales hydroélectriques et des centrales thermiques. Le tableau qui suit présente l'inventaire des moyens de productions d'électricité d'AES-SONEL. Tableau 2 : Aperçu de l'offre d'énergie aujourd'hui
Sources : AES 2010 Comme nous pouvons le constater dans le tableau ci-dessus, neuf ans après la reprise par AES Sonel de la production, du transport et de la distribution de l'énergie électrique au Cameroun, celui-ci n'a pu apporter que 232,8 MW en puissance installée sur le réseau électrique. Ceci uniquement en thermique. Quand on sait que le kilowatt produit en thermique revient à environ 45F.CFA, on peut être sûr que ce n'est pas la solution à moindre coût au déficit d'énergie. De plus cette quantité est de loin inférieure à la demande qui croit à environ 5% par an. Même la modulation27(*) proposée à l'agence de régulation pour échapper aux sanctions ne resoud pas le problème. 2. Une régulation qui tarde à s'imposerLa reforme du secteur de l'énergie notamment, par la loi N°98/022 du 24/12/98 a conduit les autorités camerounaises à libéraliser le secteur électrique en 1998. Un contrat de concession a ainsi été signé entre le gouvernement camerounais et le groupe Applied Energy System (AES-Corps) donnant naissance à une nouvelle société en charge de la production, du transport et de la distribution de l'électricité au Cameroun ; AES SONEL. La même loi consacre la création de l'Agence d'Électrification Rurale (AER) et l'Agence de Régulation du Secteur de l'Électricité (ARSEL). Au regard de la loi, l'ARSEL joue le rôle de régulation, de contrôle et de suivi des activités des exploitants et des opérateurs du secteur de l'électricité28(*). En particulier, elle est chargée de : § Veiller aux intérêts des consommateurs et assurer la protection de leurs droits pour ce qui est du prix, de la fourniture et de la qualité de l'énergie électrique ; § Mettre en oeuvre, suivre et contrôler le système tarifaire établi, dans le respect des méthodes et procédures fixées par l'administration chargée de l'électricité ; § Veiller au respect, par les opérateurs du secteur, des conditions d'exécution des contrats de concession, des licences et des autorisations. § Suivre l'application des standards et des normes par les opérateurs du secteur de l'électricité. § Veiller à l'application des sanctions prévues par la loi. Pour ne citer que ces quelques obligations dévolues à l'ARSEL. Par contre les articles 6429(*), 6530(*), 6631(*) et 6732(*) donnent à l'ARSEL des moyens juridiques pour veiller à une saine émulation, à la discipline des opérateurs et assurer le développement du secteur. L'article 44, alinéa (1) précise le cadre de l'exercice de ses missions. Mais à côté de tout cela, l'on a du mal à expliquer la complaisance observé vis-à-vis de l'opérateur principal qu'est l'AESS et qui frise même la complicité. Le dernier acte en date, est l'augmentation unilatérale du prix du KW par AESS en violation de la loi. Voir Article 50 alinéa (2)33(*) et (3)34(*). L'autre fait majeur est le contrôle à ce jour par AESS des ouvrages de régulation. Selon un article publié par l'ARSEL intitulé : « L'Agence de Régulation du Secteur de l'Électricité en symbiose avec la Politique des grandes ambitions du Président de la République pour le développement sectoriel de l'électricité au Cameroun », la révision du contrat de concession, suite à l'évaluation par l'ARSEL des trois premières années (première période de gestion) d'AES-SONEL, a conduit à la signature subséquente des avenants. Avenants dont l'un des aménagements majeurs est : le retrait des ouvrages de régularisation pour une meilleure transparence. Ceci malgré l'arrivée d'EDC qui est le gestionnaire du patrimoine de l'État dans le secteur de l'électricité. AESS et l'ARSEL donnent l'impression de jouer au chat et à la souris. Car le premier reproche à l'État de ne pas respecter ses engagements contractuels notamment en ce qui concerne l'augmentation du prix de l'électricité. D'ailleurs, ceci justifie le communiqué d'AESS aux consommateurs, paru dans le Cameroun Tribune du mercredi 27/10/2010. AESS annonce à ses clients la répercussion prochaine probable sur leurs factures, du montant restant dû à la hausse des tarifs qui aurait du intervenir en 2008. Par ailleurs, Dans le contrat de concession entre AES-SONEL et le gouvernement camerounais, une clause stipulait que cette société devait procéder à trois augmentations du prix de l'électricité afin de lui permettre de rentabiliser ses investissements. Le taux d'augmentation a été de 5% entre 2001 et 2002, puis de 7,5% par an jusqu'à 2004. Alors que, comme nous l'avons souligné plus haut dans cette étude, la qualité de l'électricité fournit par AESS est contestable et ne respecte pas les normes. Les consommateurs se plaignent des coupures intempestives et les sous/surtensions qui endommagent les appareils électriques. Il revient donc à l'ARSEL de faire respecter par AESS les normes internationales en matière de qualité de service et les objectifs fixés dans le contrat de cette société avec l'Etat. Fort de tout cela, l'on pense aujourd'hui que l'attentisme du régulateur a aussi contribué à amplifier la crise énergétique qui sévit au Cameroun. Le phénomène de la crise énergétique prendra de plus en plus de l'ampleur si rien n'est fait dans le court, moyen et long terme. Ceci se justifie par ses manifestations au quotidien. La section suivante présentera ses manifestations et ses conséquences tant au niveau du secteur public qu'au niveau du secteur industrielle. * 27 Mécanisme qui consiste à augmenter la productibilité énergétique et la puissance minimale garantie, en limitant les volumes inutilement déversés durant les hautes eaux et en renforçant les débits d'étiage. Ceci pour faire face à la demande en heures de pointe. * 28 Article 42, alinéa 2 de la loi N°98/022 du 24/12/98 régissant le secteur de l'électricité. * 29 Article 64 : sont considérées comme infractions au sens de la présente loi : -l'exercice sans titre des activités dans le secteur de l'électricité ; -la violation des obligations édictées par l'un des régimes prévus à l'article 11 ci-dessus ; -le défaut de versement des redevances dues à l'Agence de Régulation du Secteur de l'Électricité ; -le non respect des standards et normes définies par les textes d'application. * 30 Article 65 : (1) Sans préjudice des prérogatives reconnues au Ministère public et aux officiers de police judiciaire à compétence générale, les agents assermentés commis spécialement par l'agence, sont chargés de la recherche, de la constatation et des poursuites en répression des infractions commises en matière d'électricité ; ils prêtent serment devant le tribunal compétent, à la requête de l'agence, suivant des modalités fixés par décret. * 31 Article 66 : (1) en cas d'infraction dûment constatée, sans préjudice des sanctions pénales pouvant être appliquées conformément à la législation en vigueur, et sous réserve d'une mise en demeure préalable, les opérateurs soumis à la présente loi sont passibles de l'une des sanctions administratives suivantes : * 32 Article 67 : en cas d'atteinte grave et immédiate aux lois et règlements régissant le secteur de l'électricité, l'Agence peut, après avoir entendu les parties en cause, ordonner des mesures conservatoires an vue d'assurer la continuité du service public de l'électricité. * 33 Article 50, alinéa 2 : les contrats de concession, les licences et autorisations fixent les règles et conditions de modification périodique des tarifs. En tout état de cause, les règles de modifications des tarifs font l'objet d'une révision tous les cinq ans ou, exceptionnellement, avant l'expiration de cette période, en cas de changement important dans les conditions d'exploitation, ou en raison d'événements modifiant substantiellement l'environnement économique, financier ou technique dans lequel les contrats de concession ou les licences ont été établis. * 34 Article 50, alinéa 3 : dans tous les cas, les révisions des tarifs sont effectués par l'agence sur la base de principe propre à permettre à l'opérateur une rentabilité raisonnable dans les conditions normales d'activités. |
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