CHAPITRE I : PROBLEMATIQUE,
OBJECTIFS ET HYPOTHESE
SECTION 1 : PROBLEMATIQUE
Dans les pays développés d'Europe, du Japon et
des Etats Unis d'Amérique, le secteur privé joue un rôle
important dans le processus de développement et fournit les principaux
moyens pour assurer une croissance équilibrée des
différents secteurs de l'économie nationale. Ces nations ont
réussi à initier et développer des mécanismes de
suivi/évaluation et des stratégies pour pérenniser les
acquis des ONG locales de développement (PNUD, 1999).
Ainsi les années 70 sont marquées par la
bipolarisation du monde Est-Ouest. Après la victoire du Vietnam en 1975,
le conflit en Angola, en Palestine et autres, voient certaines ONG
européennes jouer un rôle de diplomatie informelle et de
médiation, intervenant souvent parallèlement à des
mouvements de solidarité et à des gouvernements. Aux Philippines,
au Chili et en Afrique du Sud, par leur soutien à des acteurs locaux,
elles ont jouées un rôle non négligeable dans le soutient
aux populations. Durant les années 80 connaissent, on
voit une croissance spectaculaire du poids des ONG et de leur reconnaissance.
Elles représentent pour les agences gouvernementales de
coopération européennes des agents privilégiés de
sensibilisation du public, en particulier des écoles, à la
problématique Nord-Sud.
Au milieu des années 80, en parallèle à
la remise en question des modèles nationaux de développement, la
Banque Mondiale découvre que les ONG sont des institutions plus proches
des pauvres, moins chères, moins corrompues et plus efficaces que les
canaux gouvernementaux traditionnels. Les ONG du Nord canalisent ainsi leurs
moyens financiers vers les institutions locales dans le Sud qui connaissent
à leur tour une multiplication impressionnante mais restent très
dépendante de cette aide extérieure (BM, 2000).
Depuis les indépendances, le développement
socio-économique de la plupart des pays de l'Afrique a été
considéré comme prioritaire, parce que la mise en oeuvre des
programmes centralisés a montré ses limites. En outre, la crise
économique des années 1980 qui a augmenté la
paupérisation des populations a montré qu'en plus des efforts de
l'Etat pour assurer un développement socio-économique
équilibré et durable, d'autres acteurs locaux tels que les
organisations non gouvernementales, peuvent aussi agir dans la
définition et la mise en oeuvre de l'action économique.
Au-delà de leur implication dans le processus de développement,
ces organisations contribuent à la promotion du dialogue entre le Nord
et le Sud (OCDE, 1999).
L'émergence des ONG locales de développement en
tant que nouvelle forme d'action organisée constitue une
réalité concrète par rapport aux structures de
solidarité clanique, aux coopératives, aux communautés
religieuses et aux pouvoirs publics. Du coup, les ONG locales de
développement sont devenues en Afrique, un instrument de
médiation entre l'Etat et la population à la base; un passage
obligé pour que la démocratie et la bonne gouvernance fassent
jour et fonctionnent bien. Elles occupent une position stratégique,
celle de monopole de médiation entre l'Etat et la population.
L'étude du rapport entre l'Etat et les ONG locales de
développement peut être un indicateur des tensions, d'une crise de
légitimité ou du degré d'autonomie (OCDE, 2000).
Les ONG sont une association dont le but est de favoriser
auprès des groupes sociaux les conditions d'accès à un
processus de développement. Les ONG sont des institutions totalement
privées qui, dans le cadre d'une convention avec le gouvernement, et /ou
avec les institutions internationales exécutent des opérations de
développement dans une zone restreinte (Diallo, 2010).
Ainsi nous pouvons distinguer plusieurs catégories dont
la première est constituée des ONG de bienfaisance, de
charité dont le programme sectoriel a peu d'impact sur la croissance
globale des économies et le développement. La deuxième
catégorie d'ONG se substitue aux sociétés nationales afin
de libéraliser l'économie et favoriser l'initiative
privée. Ces deux catégories insistent sur la notion de gestion de
la fonction du développement. Les ONG peuvent être classées
en trois catégories notamment:
§ Les ONG de base qui sont généralement des
groupements de paysans, pêcheurs, éleveurs et artisans. Ceux-ci
définissent eux-mêmes leurs objectifs et fonctionnent uniquement
sur des ressources locales ;
§ Les ONG de services qui fournissent des services aux
communautés locales pour les aider à mobiliser les fonds
nécessaires à leurs activités. Elles entretiennent des
relations de travail avec l'Etat, les autorités locales, les bailleurs
de fonds, les ONG étrangères et disposent
généralement de personnel qualifié et restreint ;
§ Les ONG d'appui dont les services sont centrées
sur les besoins des groupes de base, bénéficiaires potentiels de
leur appui. Dans un pays donné, elles peuvent être des ONG
étrangères ou des collectifs d'ONG locales de service ou encore
des ONG spécialisées. Elles disposent d'un personnel
qualifié suffisant, d'agents sur le terrain dans plusieurs pays et des
budgets conséquents (Diouf, 1998).
Dans le domaine de la mise en place et de la
réhabilitation des infrastructures socioéconomiques de base
telles que les écoles, les dispensaires, les routes et ponts, etc., les
activités exécutées par les ONG permettent d'assurer la
conservation du patrimoine et de faciliter l'accès des populations aux
services sociaux de base. Grâce à ces structures,
l'amélioration des conditions de travail et de vie se renforce. Toutes
ces infrastructures permettent de désenclaver des localités,
d'aider et favoriser la circulation des biens et des personnes, ainsi que
d'établir une meilleure communication entre des populations voisines
(BM, 1999).
L'évaluation tente de traduire le plus ou moins grand
degré de réussite de la politique publique à partir d'un
certain nombre de critères : Un critère de cohérence
qui permet de juger de l'adéquation des différents niveaux
d'objectifs du programme entre eux et de l'adéquation des moyens mis en
oeuvre ; Un critère de pertinence qui
vérifie l'adéquation des objectifs aux enjeux du programme ;
Une analyse de l'efficacité revient à se poser la question de la
conformité des `'effets propres'' de la politique au regard des
objectifs fixés.
La question qui reste une source de préoccupations
constantes demeure celle de la pérennité au niveau de ces ONG qui
sont devenues des éléments incontournables du
développement local. Parmi les questions qui ont été
posées dans les discussions figurent celle de savoir dans quelle mesure
la coopération technique et financière renforce les
capacités existantes ou les dissipe ? L'adaptation ou
l'adaptabilité de l'assistance technique à l'environnement auquel
elle est appliquée, les raisons qui font que les actions
exécutés par ces ONG avec succès l'appui des
expatriés et puissent survivre après leur départ. De
nombreuses initiatives créatives ont été mises en oeuvre
dans le domaine du développement en Afrique, mais ont rarement pu
être intégrées avec succès dans des programmes
nationaux visant la continuité (Diallo, 2010).
En effet, la plupart de ces expériences n'ont pas
survécu à l'enthousiasme des débuts, au tarissement du
financement initial qui a été souvent fourni par
l'extérieur ou au départ de leurs initiateurs. L'absence de
politique nationale spécifique et de ligne budgétaire propre pour
la généralisation des réformes conduit à une
incohérence des actions menées par les diverses institutions
(PNUD, 1999).
Malgré les progrès réalisés
grâce aux diverses réformes entreprises, il est important de
constater des faiblesses dans les pratiques nationales à assurer la
pérennisation de ces réformes et innovations. Ces défis et
contraintes constituent des facteurs qui abaissent la qualité des
actions des projets de développement (Guylaine, 2000, cité par
Diallo, 2010).
Ces faiblesses se retrouvent aux niveaux plus hauts comme aux
niveaux plus bas des systèmes de gestion. Elles résulteraient en
outre d'une vision stratégique, d'une répartition inefficace des
ressources, de la médiocrité des processus de gestion
financière et de la fragilité des systèmes de collecte et
d'analyse des données sur les résultats du système et les
pratiques en cours au niveau des ONG locales de développement
(Ibid.).
En effet, dans la plupart des cas, la conception des ONG
locales de développement et les politiques reliées à leur
implantation sont souvent excessivement centralisées, donc ne sont pas
en mesure de répondre correctement aux besoins locaux ; le fait que
les informations ne soient pas systématiquement collectées et
analysées gêne le processus de conception et de programmation
effective des réformes et des innovations (BAD 2006).
Au Burkina Faso, par exemple la participation active des
paysans a été le gage de la pérennisation des espaces
aménagés. Constitués en groupements fonciers, les paysans
proposent un périmètre aménager et déposent une
caution symbolique d'engagement auprès de l'Etat. Ce travail commence,
avec les paysans, par la construction de diguettes en terre, en suivant les
courbes de niveau (Unicef, 1999).
Les organisations non gouvernementales ont connu, en l'espace
d'une génération, une croissance rapide en nombre, avec peu de
ressources. Elles interviennent dans de très nombreux secteurs soit
à leur initiative, soit à la demande d'organisations
internationales ou de coopération bilatérales (SNRP, 2007).
Pour combattre la pauvreté et la misère en
développant une très grande variété
d'actions (financement de programmes de développement,
d'éducation, constructions...). Cependant la reconnaissance qui est
accordée aux ONG ne saurait masquer qu'après la période
faste qu'elles viennent de connaître, elles ont à consolider,
voire redéfinir leur identité (Ibid.).
Après le 3 Avril 1984, l'Etat s'est
désengagé en créant un environnement juridique et
économique favorable à l'éclosion des initiatives
privées. Une place de choix fut accordée au secteur privé,
aux ONG et à la société civile dans le processus de
développement. En reconnaissance du rôle crucial que les ONG ont
prie dans le secteur informel de l'économie guinéenne et
l'importance de disposer d'une politique d'intervention claire pour garantir un
environnement institutionnel sûr et sain, que le Gouvernement de la
République de Guinée a déclenchée sa
stratégie nationale d'agrément des ONG en 1990 (Doumbouya, 2001).
L'histoire du milieu associatif Guinéen est
marquée par la montée en puissance d'associations de base, qui
ont évolué vers des structures coopératives, associatives
ou des groupements d'intérêt économique et de structures
d'appui ou de services, dites ONG, agissant dans l'intérêt de ces
associations de base. Le désengagement progressif de l'Etat, et les
conséquences en matière de baisse du recrutement des
fonctionnaires, ont été, dans les années 90, un autre
facteur d'extension et d'évolution des ONG (CNOSCG, 2002).
D'un côté, des services entiers de
développement, jusque là assurés par l'Etat, devenaient
des domaines possibles d'action non gouvernementale; d'un autre
côté, un certain nombre d'élites, ne pouvant plus
progresser via la fonction publique, voyaient dans les ONG une façon
d'agir pour le développement, voire dans certains cas un tremplin pour
une carrière publique ou professionnelle. Toute cette évolution a
été regardée par les pouvoirs publics guinéens avec
attention, mais aussi avec méfiance. Cette méfiance tenait au
fait que la mouvance non gouvernementale était considérée
a priori comme une opposition au pouvoir. Toute son action visant à
mobiliser les ruraux et plus récemment les populations des quartiers
urbains, apparaissait comme une entreprise d'attraction de l'opinion vers une
opposition politique, dangereuse pour le pouvoir en place.
Dès lors, les ONG guinéennes ont tardé
à être reconnues, et à être dotées d'un statut
facilitant leurs interventions, à l'instar des ONG de la sous
région et internationales qui avaient bien plus de facilités pour
se faire délivrer toutes autorisations nécessaires, et
accessoirement la détaxation systématique de leurs achats et
importations. Les différentes mutations socioéconomiques
intervenues en Guinée, ont placé ces ONG au centre des questions
liées au développement socioéconomique participatif. Le
pays, connaît des déficits vivriers importants, les produits de
subsistance ne répondant pas aux besoins de consommation d'une
population croissante (FAO, 1997).
Les disponibilités alimentaires varient selon les
périodes de l'année. Les populations ne sont pas toujours en
mesure d'acheter des biens alimentaires du fait de la faiblesse de leurs
revenus et de l'expansion de la pauvreté chez la majorité. Les
ressources disponibles sont mal utilisées en raison du recours à
des technologies de production archaïques. L'avènement des ONG, des
projets de développement au niveau national et local, obéit
à une logique de partenariat entre l'État et les
communautés, est une initiative qui participe à la mise en place
d'une certaine dynamique (EIBEP 2002-2003).
Les disponibilités alimentaires varient selon les
périodes de l'année. Les populations ne sont pas toujours en
mesure d'acheter des biens alimentaires du fait de la faiblesse de leurs
revenus et de l'expansion de la pauvreté chez la majorité. Les
ressources disponibles sont mal utilisées en raison du recours à
des technologies de production archaïques. Leurs résultats actuels
pourraient être renforcés si, d'une part, certaines
mentalités sont surmontées et, d'autre part, si les
communautés, premiers bénéficiaires, sont effectivement
associées à la conception, à la mise en oeuvre et au suivi
des activités. La réussite de la pérennisation en
dépend. Mieux, le recours ou la dépendance exclusive en vers les
partenaires peut entraîner une faible appropriation du projet par
l'administration dans le cadre de la pérennisation de nombreux acquis
(Ibid. 2).
La grande majorité des ONG ont été
crées à partir de 1990. Le taux d'augmentation des groupes
associatifs depuis 1990 à nos jours est important. Toutes les
associations de développement local partagent les mêmes objectifs
principaux à savoir : la promotion du développement de la
localité d'implantation.
Dans la préfecture de Kankan, les ONG jouent un
rôle considérable dans le développement comme les petits
métiers artisanaux, l'éducation, la santé,
l'alphabétisation, la protection de l'environnement, la protection des
enfants et des femmes et la réalisation d'infrastructures. Mais leurs
acquis sont souvent sous-estimés, ou tout simplement méconnus.
Les données montrent que la proportion des ONG existantes par rapport
à la population totale de la préfecture est minime. Les
données indiquent que les ONG constituent un peu moins de 5% de
proportion couvrant la préfecture. (SERACO, 1995).
Les moyens dont disposent les Organisations non
gouvernementales locales de Kankan proviennent de deux sources : Les
moyens propres de l'association constituée du potentiel humain et de la
mobilisation des ressources à la base et, les efforts
déployés par le gouvernement Guinéen, les ONG locales de
développement de la place mènent des activités dans des
localités, ou elles sont peu ou pas connues en tant qu'acteur au
développement. C'est dans ce cadre que cette étude vise à
comprendre les problèmes auxquels les ONG locales de
développement sont confrontées dans la pérennisation de
leurs actions dans la Préfecture de Kankan. Pour saisir cette situation,
quelques questions émergent, comme entre autres :
· Quelles sont les opportunités dont disposent les
ONG dans le cadre du développement local ?
· Quels sont leurs moyens et méthodes de mise en
oeuvre permettant aux communautés bénéficiaires de rendre
pérennes les acquis?
· Comment ces communautés apprécient-elles
ces acquis et se positionnent-elles dans le circuit du développement
local?
De ce qui précède, il est opportun
d'étudier la façon dont les populations utilisent/gèrent
pour les générations futures les acquis mis à leurs
disposition à travers les interventions des ONG dans le cadre du
développement local à travers le renforcement de leurs
capacités à la gestion, l'équité et la bonne
gouvernance locale. La pérennisation des acquis constitue un
réel problème. Nombreuses sont les réalisations des ONG
locales de développement qui disparaissent dès après le
départ ou le retrait du bailleur de fonds. Les acquis des ONG et
projets de développement sont loin d'être pérennisés
ce qui plonge la majorité de la population dans une situation critique
des conditions de vie. Cela malgré les efforts d'assistance, de
sensibilisation, de formation menée dans ces dernières
années au niveau de la zone abritant les ONG locales (MARP
réalisée en Décembre 2002).
Toute fois, les ONG évoluant dans notre zone
d'étude ont du mal à assurer un maintien durable des objectifs
du projet après le retrait de la coopération ou des bailleurs. En
dépit des difficultés qu'elles connaissent dans la
perpétuation des acquis. Elles ne contribuent pas, de manière
positive, à la réalisation d'objectifs de développement de
la base par manque de stratégies. Il est intéressant de
comprendre les mécanismes, les facteurs
internes et externes qui déterminent le non pérennisation des
acquis des ONG locales en Guinée. Nous avons choisis le cas de Kankan,
où d'après des observations faites sur le terrain ; on
s'aperçoit que certaines ONG ont arrêté leurs
activités ou ont connu un ralentissement de leurs activités avec
l'arrêt du financement extérieur ou après le retrait des
bailleurs de fonds (SERACCO 2008).
Les cas les plus frappants dans la Préfecture de
Kankan sont entre autres les ONG AGAFEM, INADER, CENAFODE, l'Association
BATE SABATI... qui ont exécuté des nombreuses actions qui ne sont
presque plus visibles ou moins visibles sur le terrain. Il apparaît que
le retrait du bailleur de fonds ou la réduction de son intervention pose
le problème crucial des mécanismes de pérennisation des
acquis des organisations de développement à la base (Archives
OSC, 2010).
De là, une question de recherche émerge `'
Quelles sont les logiques sociales qui déterminent la non
pérennisation des acquis des ONG locales de développement dans
la Préfecture de Kankan ?''
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