La participation des collectivités territoriales décentralisées à la protection de l'environnement au Cameroun, en Belgique et en France.( Télécharger le fichier original )par Guy Laurent KOUAM TEAM Université de Limoges (France) - Master en droit international et comparé de l'environnement 0000 |
PARTIE II :ANALYSE DES STRATÉGIES ET DES MOYENS UTILISÉSAU CAMEROUN, EN BELGIQUE ET EN FRANCE PAR LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES EN MATIÈRE D'ENVIRONNEMENTAux fins d'une meilleure protection de l'environnement, ont vu le jour dans les trois pays, au cours de ces dernières années, de nombreux textes juridiques instaurant soit de nouvelles normes, de nouvelles procédures, de nouveaux instruments soit encore de nouveaux pouvoirs aux différents acteurs dans le domaine de l'environnement. Se sont également développés dans le domaine de nouvelles pratiques et de recettes d'une ingéniosité originale appelant un « New Deal environnemental ».Le constat que l'empilement d'administrations ayant différentes attributions, sollicitées dans le cadre des politiques environnementales, nous amène à constater que l'autorité centrale dans les 3 pays garde un pouvoir incontournable en la matière dans la mesure où il détient l'essentiel des instruments de nature réglementaire et économique. Cet état de choses ne paralyse pas totalement le potentiel légal et le capital politique et administratif dont disposent les collectivités territoriales de nos 3 pays en termes de stratégies et de moyens pour jouer un rôle déterminant afin d'assurer une protection efficace de leur territoire. Nous allons analyser la pertinence des politiques environnementales des collectivités locales de nos trois pays, tout en faisant des propositions ( Chapitre 2).Mais avant cela nous verrons de manière non exhaustive les stratégies mises en place par ces collectivités et les moyens dont elles disposent pour accomplir leur mission de sauvegarde de l'environnement (Chapitre 1). CHAPITRE I :LES STRATÉGIES ET LES MOYENS DE PROTECTION LOCALE DE L'ENVIRONNEMENT AU CAMEROUN, EN BELGIQUE ET EN France.Nous commencerons par voir les stratégies que ces collectivités adoptent pour assurer le maintien et l'amélioration de l'environnement (Section 1), ensuite nous verrons les moyens mis en oeuvre (Section 2). SECTION 1 : Les Stratégies de protection de l'environnementA l'observation, les collectivités locales de ces 3 pays utilisent relativement les différentes possibilités dont elles disposent pour protéger l'environnement. Ces possibilités peuvent aller des outils coercitifs aux outils non coercitifs en passant par l'outil économique. &.1. : Les outils coercitifs de gestion environnementale comme outils utilisés largement dans les 3 systèmes Ces possibilités peuvent aller du cadre réglementaire à la justice environnementale. I- Le cadre réglementaire environnementale: Dispositif largement utilisé dans les collectivités des trois paysLe cadre réglementaire établit des instruments et des normes qui s'expriment qui fixent des objectifs, des procédures et des outils d'application en matière de protection de l'environnement. En Belgique comme au Cameroun et en France, l'intervention du pouvoir central permet très souvent soit de gérer un domaine sensible, soit d'encadrer légalement l'action des collectivités121(*), sans pour autant annihiler l'action réglementaire de ces dernières. I.1 L'édiction de normes environnementales par ces collectivités locales S'agissant des normes, les 3 pays offrent, dans le respect de leurs compétences, la possibilité à leurs collectivités territoriales décentralisées de gérer par l'édiction de règlements les questions environnementales locales. Ces règlements peuvent d'ailleurs être assortis d'amendes administratives. En Belgique dans la région wallonne par exemple, en matière de gestion d'eaux usées, le conseil communal est tenu d'édicter un règlement communal qui complète les obligations d'évacuation des eaux usées dérivant du règlement général d'assainissement, et ce relativement à la fixation de la rémunération et des modalités à appliquer pour tout travail de raccordement à l'égout . Seuls ces derniers aspects peuvent donc être réglementés par le biais de ce règlement communal. En vertu du décret du 5 juin 2008 relatif à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions et les mesures de réparation en matière d'environnement122(*), les communes peuvent en effet dorénavant prévoir de sanctionner, par le biais d'amendes administratives communales, le non-respect des comportements qu'elles auront repris dans un règlement communal. Le type de comportements susceptibles d'être repris par une commune dans un règlement communal a néanmoins été circonscrit à certaines catégories d'infractions. Pour permettre aux communes wallonnes de mieux exercer leurs attributs réglementaires en matière d'environnement, l'Union des Villes et des Communes de Wallonie leurs propose des modèles d'arrêtés en la matière. En France, les communes disposent également grandement de leurs pouvoirs réglementaires pour agir sur l'environnement. C'est ainsi qu'en matière de bruit, à titre d'illustration, dans les zones agglomérées le maire exerce la réglementation des bruits de chantiers123(*). Le maire peut également sous certaines conditions, par arrêté, définir les conditions de limitation du bruit sur sa commune. Les pouvoirs de police municipale lui permettent aussi d'intervenir afin de prévenir les atteintes à la sécurité et la salubrité publiques124(*). La communauté d'agglomération peut exercer les compétences en matière « de lutte contre les nuisances sonores »125(*), tandis qu'elle est au nombre des compétences obligatoires pour la communauté urbaine126(*). Au Cameroun, au vu des textes relatifs à la décentralisation, les collectivités territoriales disposeront d'un fort potentiel réglementaire sur les questions environnementales. Toutes choses dont disposaient déjà les communes dans certains domaines. En effet, La loi relative à l'urbanisme attribue au maire des compétences en la matière. Dans l'article 119 de cette loi il est mentionné que : « Le Maire est chargé du pouvoir de police municipale en matière d'urbanisme et de l'exécution des actes y relatifs en relation avec les autorités administratives compétentes, en vue d'assurer notamment, la salubrité publique et le respect des règles d'urbanisme ». I.2. Les outils réglementaires de planification environnementale par ces collectivités territoriales Les documents de planification environnementaux sont présents dans les collectivités des 3 pays.
En France, il existe une diversité de documents comme instruments de planification environnementale susceptible d'être utilisés par les collectivités territoriales. Ces plans peuvent être élaborés par ses collectivités dans de multiples domaines et expriment leurs objectifs, la procédure et les moyens mis en oeuvre pour atteindre ces objectifs. Au vu du code de l'environnement, dont la majorité des documents de planification tirent leur source légale, on peut considérer la France comme un pays pionnier en matière de planification environnementale locale. Ces documents de planification peuvent prendre selon les cas les noms de plan, de schémas ou même de programme. On a par exemple les Schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux, les Schémas d'aménagement et de gestion des eaux, les Plans régionaux pour la qualité de l'air, les Plans de protection de l'atmosphère, les Plans de déplacements urbains. Le rôle des collectivités locales est, dans ces domaines, essentiel, le Conseil régional peut exercer des compétences en matière de planification de gestion des déchets industriels, tandis que le département peut exercer les mêmes compétences en matière de déchets ménagers. Dans le cadre de l'urbanisme, le maire français dispose ainsi de compétences dans le cadre de la planification (SCOT, PLU) où il peut faire usage de ces pouvoirs environnementaux. Pour traduire le caractère volontariste de la France dans la responsabilisation de ces collectivités territoriales en matière des grands enjeux environnementaux actuels, il faut se référer au Grenelle 2 et son Plan climat énergie territorial. Par ailleurs, avec les transferts de compétences opérés en 1983 vers les communes en matière de plan d'occupation des sols et de permis de construire, ces dernières ont bénéficié à l'époque d'un degré supplémentaire de pouvoir réglementaire en matière de politique d'implantation industrielle, dans le sens d'une politique de protection renforcée de l'environnement. Le Professeur Michel PRIEUR127(*) souligne à ce sujet que « Désormais l'implantation territoriale des établissements polluants relève donc exclusivement du POS et dépend de ce fait des communes. Le préfet qui est resté compétent pour les installations classées, est lié par ces choix de localisation. Il sera obligé, en application du POS, de refuser une installation classée située dans une zone où elles ont été interdites par la commune. » . Le PLU, créé par la loi du 13 décembre 2000 a remplacé le POS et renforce la dimension environnementale de la politique réglementaire locale128(*).
En Belgique, même s'ils aussi nombreux qu'en France, les instruments de planification locaux intégrant l'environnement sont fortement adossés sur les plans régionaux. C'est ainsi qu'il existe par exemple, en région flamande un Plan d'action environnemental129(*).En région bruxelloise, il existe également plusieurs plans concernant certains domaines environnementaux tels les plans déchets, le plan de déplacements IRIS, le plan Bruit, le plan Air climat. En région wallonne, le système de la planification locale est une pratique qui bénéficie d'un encadrement légal soutenue de l'autorité centrale. C'est ainsi qu'a été inséré dans le Décret du 21 avril 1994130(*) , un article 18bis permettant au Conseil communal d'établir un plan communal d'environnement et de développement de la nature. Ce plan vise les actions et les objectifs à atteindre dans les domaines « des déchets, des eaux de surface et souterraines, des eaux usées, de la pollution acoustique, de l'air et du sol, de la préservation et du développement de la nature, de la salubrité publique en général et de la sensibilisation de la population sur ces différents sujets »131(*). On a également d'autres documents de planification locaux intégrant ou traitant des secteurs de l'environnement. Ils peuvent être soient transversaux, soient simplement sectoriels. On peut citer à titre d'exemple les plans tels que : Le Plan Communal de Développement de la Nature132(*) et le Plan Communal de Mobilité133(*). Au Cameroun, des possibilités sont ouvertes sur le plan législatif et également sur le plan réglementaire. En effet, les collectivités locales sont autorisées à établir divers plans de développement ou d'aménagement134(*). Il s'agit entre autres des « plans directeurs d'urbanisme », des « plans d'occupation des sols », des « plans de secteurs » et des « plans sommaires d'urbanisme ». Les collectivités territoriales camerounaises se dotent progressivement de ces différents plans qui, selon la loi devrait intégrer les dimensions environnementales. En se référant à la loi camerounaise135(*), le promoteur ou le maître d'ouvrage de tout projet d'aménagement qui risque, en raison de sa dimension, de sa nature ou des incidences des activités qui y sont exercées sur le milieu naturel, de porter atteinte à l'environnement est tenu de réaliser, une étude d'impact permettant d'évaluer les incidences directes ou indirectes dudit projet ou plan sur l'équilibre écologique de la zone d'implantation ou de toute autre région, le cadre et la qualité de vie des populations et des incidences sur l'environnement en général. C'est ainsi que la communauté urbaine de Yaoundé s'est doté en 2008 d'un « Plan directeur d'urbanisme »136(*). Il est en cours d'élaboration dans la même municipalité, un plan de secteur et un plan sommaire d'urbanisme137(*). La communauté urbaine de Douala prépare également pour fin 2011 plusieurs documents de planification avec une composante environnementale. Il s'agit des plans d'occupation du sol, des schémas directeurs d'aménagement de la ville et les plans de déplacement et de mobilité de la ville.. * 121- En France, en matière d'installations classées, la loi du 19 juillet 1976 permet à L'Etat à travers ses services déconcentrés de contrôler l'implantation territoriale des installations polluantes et dangereuses. * 122- Le décret du 5 juin 2008 a été intégré au sein du Code de l'environnement en ses articles D.138 et suivants * 123- Le décret du 5 juin 2008 a été intégré au sein du Code de l'environnement en ses articles D.138 et suivants * 124- Article L2212-2-2° du Code Général des collectivités territoriales. (CGCT) * 125- Article L5216-5-II-4° du Code Général des collectivités territoriales. (CGCT) * 126- Article L 5215-20-6°-c du Code Général des collectivités territoriales. (CGCT) * 127- PRIEUR, Michel. Droit de l'environnement(2000), Précis Droit public Science politique, Dalloz. P.746 * 128- DE BEIR, JEAN ; DESCHANET, Elisabeth ; FODHA, Mouez op. Cité p.8 * 129 Le « Plan flamand de politique de l'environnement 2003-2007 », a été adopté par le gouvernement flamand le 19 septembre 2003 et expose dans ses grandes lignes la politique environnementale qui doit être menée par la Région flamande, les provinces et les autorités locales. Le plan a été prolongé jusqu'en 2010. * 130- Décret du 21 avril 1994 du Conseil régional wallon relatif à la planification en matière d'environnement dans le cadre du développement durable. * 131- NICOLAS, Stéphane. Op cité. P. * 132-Région wallonne, Direction Générale des Ressources Naturelles et de l'Environnement. http://mrw.wallonie.be/dgrne/dnf/PCDN/ * 133 - Ministère wallon de l'Equipement et des Transports. http://mobilite.wallonie.be/pcm/index. * 134 - Section II de la loi régissant l'urbanisme au Cameroun, et L'article 2 du décret n 2008/0736/PM du 23 avril 2008. * 135- ARTICLE 17 (1) de la loi cadre portant gestion de l'environnement au Cameroun. * 136- Ce plan a été approuvé le 12 septembre 2008 par le pouvoir central. * 137- Ces informations ont été recueillies auprès de Monsieur André ESSAGA de l' « atelier d'urbanisme » de la cellule de développement urbain de la communauté urbaine de Yaoundé au cours d'un entretien dans ses services le 09 aout 2010. |
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