III. L'ETAT DE LA GESTION DES ORDURES MENAGERES A
N'DJAMENA : ACTEURS, TERRITOIRES, MOYENS ET TECHNIQUES
Dans cette partie, nous faisons le point sur la gestion
actuelle des ordures ménagères à N'Djaména. Il
s'agit d'en identifier les acteurs et de montrer avec quels moyens et quelles
techniques ceux -ci réalisent l'assainissement de leurs territoires.
C'est peut-être à travers une telle description que l'on
comprendra le mieux la gestion des ordures ménagères à
N'Djaména
Gestion des ordures ménagères à
N'Djaména
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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et peut-être la notion de G.O.M tout court (que
l'étude tente d'ailleurs de saisir depuis le début de cette
réflexion).
Les principaux acteurs de la G.O.M à N'Djaména
sont les ménages, les C.A, les entrepreneurs privés et la mairie.
Ces acteurs interviennent dans la G.O.M avec des moyens et des techniques plus
ou moins différents sur des territoires dont les frontières sont
plus ou moins étanches.
3.1. Les ménages
Les ménages sont rarement identifiés comme
acteurs de la G.O.M. Pourtant c'est bien des ordures produites par les
ménages qu'il est question. On a pu observer d'une part que les taux de
génération des ordures ménagères varient selon le
type d'habitation des ménages et d'autre part « un fort taux de
sable et de cendre dans la composition des ordures ménagères
(BCEOM, 2000 : 87). C'est ce qui a conduit à distinguer, dans les
statistiques ci-dessous présentée des variables telles que le
type d'habitation des ménages (traditionnel ancien, traditionnel
intermédiaire, traditionnel récent, résidentiel) et les
ordures avec sable ou sans sable. Il apparaît dans ce tableau que la
moyenne de génération journalière des ordures
ménagères par habitant exprimée en kilogramme est plus
élevée dans les ménages des quartiers résidentiels
que dans ceux des quartiers d'habitation traditionnelle.
Tableau 1 : Taux de génération des
ordures à N'Djaména selon le type d'habitation
Source : BCEOM
2000
Type d'habitation
|
Taux de génération par KG/HB/J
|
|
Avec sable
|
Sans sable
|
Traditionnel ancien
|
0,83
|
0,48
|
Traditionnel intermédiaire
|
0,96
|
0,48
|
Traditionnel récent
|
0,60
|
0,36
|
Résidentiel
|
1,63
|
1,08
|
Mais si les études citent si peu les ménages
comme acteurs de la gestion des ordures, cela signifie-t-il qu'en
réalité ils n'interviennent pas ou interviennent très peu
dans la gestion
Gestion des ordures ménagères à
N'Djaména
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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de celles qu'ils produisent ? En fait, la
préférence des chercheurs va vers des acteurs
institutionnellement macroscopiques tels que la mairie, les C.A et les ONGs de
développement urbain qui financent les projets d'assainissement de la
ville. Or l'intervention ou la part d'action des ménages dans la G.O.M
si souvent occultée est d'une évidence très banale en
réalité. C'est d'ailleurs cette discrimination qui
justifie l'intérêt que nous portons à l'étude des
représentations et pratiques relatives aux espaces et ordures par les
populations que constituent les ménages de N'Djaména.
Nous avons pu observer qu'il existe deux formes de G.O.M
réalisée par les ménages à N'Djaména.
3.1.1. Du balayage des espaces privés a
l'élimination par brûlage des ordures ménagères
Une première forme de G.O.M où on retrouve les
ménages est ce que nous appelons gestion autonome des ordures
ménagères. Nous qualifions cette gestion d'autonome
parce qu'elle est réalisée uniquement par les ménages qui
en définissent les étapes et s'en dotent les moyens. Quels sont
ces étapes et les moyens qui permettent de les réaliser ?
Il s'agit premièrement du nettoyage des chambres, de la
cour et de la devanture des concessions ; bref des espaces que les individus
définissent comme espaces privés ou du moins dont
l'assainissement relève de leur responsabilité. Les
ménages utilisent en majorité des balais traditionnels faits de
bottes d'herbes d'une espèce donnée. Ce balayage a pour
conséquence le décapage régulier du sol. Le sable est
presque entièrement emporté dans les autres ordures que les
ménages ramassage par cette technique. Ce sable a un taux très
important dans les ordures à N'Djaména. D'où la
séparation des ordures avec sable des ordures sans sable (voir le
tableau ci-dessus). Mais on rencontre également des ménages
utilisant des balaies fabriquées industriellement. Nous
considérons ce nettoyage comme étant la première
étape de la G.O.M par les ménages.
Les ordures ramassées sont entassées - dans une
deuxième étape - à un coin de la concession ou de la
devanture de celle-ci, formant ainsi de petites décharges anarchiques
communément appelées « poubelles ». Ce traitement des
ordures ménagères est plus courant dans les zones
périphériques de N'Djaména. Mais on le retrouve dans tous
les quartiers de la ville.
Gestion des ordures ménagères à
N'Djaména
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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Enfin, les ménages réalisent la dernière
étape de cette G.O.M en mettant sporadiquement le feu à ces
« poubelles ». Le sable, les cailloux, la cendre, le charbon... qui
résultent de cette incinération sont utilisés pour
remblayés les zones dépressives et divers petits trous des
concessions ou des rues. Ce qui est une forme de valorisation des ordures qui
fait déboucher la G.O.M sur une certaine gestion des espaces qui sont
par nature très propices aux inondations. Cette forme
d'élimination des ordures ménagères est typique de ce qui
est pratiqué dans les campagnes avec la seule nuance que les usages
faits des résidus des décharges brûlées servent plus
couramment à enrichir les sols dans les zones rurales.
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