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La faute de l'Administration en matière foncière au Cameroun

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par Ariane Lidwine NKOA NZIDJA
université de Yaoundé II - Diplôme d'études approfondies en droit privé 2008
  

Disponible en mode multipage

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REPUBLIC OF CAMEROON

Peace - Work - Fatherland

MINISTRY OF HIGHER

EDUCATION

UNIVERSITY OF YAOUNDE II SOA

Faculty of Law and

Political sciences

REPUBLIQUE DU CAMEROUN

Paix- Travail - Patrie

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT

SUPERIEUR

UNIVERSITE DE YAOUNDE II SOA

Faculté des Sciences

Juridiques et Politiques

DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE FONDAMENTAL

(Option Droit Civil)

LA FAUTE DE L'ADMINISTRATION EN MATIERE FONCIERE AU CAMEROUN

Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies (DEA) en Droit Privé.

Par :

Mlle. NKOA NZIDJA Ariane Lidwine

Maîtrise en Droit Privé Fondamental

Sous la direction du :

Pr. Alexandre Dieudonné TJOUEN

Ancien Avocat au Barreau de Paris

Maître de Conférences à l'Université de Yaoundé II

Avocat au Barreau du Cameroun

+Année académique 2006-2008

AVERTISSEMENT

La Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l'Université de Yaoundé II Soa n'entend donner ni improbation, ni approbation aux opinions émises dans les mémoires ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

DEDICACE

A mes chers parents, Monsieur et Madame NKOA TANGA,

Pour l'inestimable oeuvre d'éducation, puissiez-vous trouver à travers ce modeste ouvrage, les prémices d'un travail sans cesse accompli par vous, avec amour et sacrifice.

LISTE DES ABREVIATIONS

Al. : Alinéa

Art. : Article

Bull. : Bulletin des Arrêts de la Cour Suprême du Cameroun

C. / : Contre

C. civ. : Code civil

CE : Conseil d'Etat Français

Concl. : Conclusion

CS/CA : Cour Suprême/ Chambre administrative

D. : Dalloz

Ed. : Edition

GAJA : Grands Arrêts de la Jurisprudence Administrative

Infra : Ci-dessous

L.G.D.J. : Librairie Générale de Droit et de Jurisprudence

MINDAF : Ministère des Domaines et des affaires Foncières

MINUH : Ministère de l'Urbanisme et de l'Habitat

Op.cit. : OEuvre déjà citée

Ord. : Ordonnance

P. : Page

PUA : Presse Universitaire d'Afrique

PUF : Presse Universitaire de France

Rec. : Recueil LEBON

R.R.P.P : Encyclopédie Dalloz, Répertoire de la Responsabilité de la Puissance Publique

S. : Sirey

Suppl. : Supplément

TC : Tribunal des Conflits

TGI : Tribunal de Grande Instance

UY : Université de Yaoundé

V. : Voir

SOMMAIRE

Introduction générale

Titre I. La détermination de la faute administrative en matière foncière

Chapitre I. La particularité de la faute administrative en matière foncière

Section I. Les caractéristiques de la faute administrative

Section II.  L'identification des structures administratives mises en causes dans la faute en matière foncière

Chapitre II. Les manifestations de la faute administrative en matière foncière

Section I. La faute commise pendant l'acquisition de la propriété immobilière

Section II. La faute administrative commise lors de la cession de propriété.

Titre II. Les conséquences et la sanction de la faute administrative

Chapitre I. Les conséquences de la faute et la responsabilité de l'administration

Section I.  Les conséquences dommageables de la faute administrative en matière foncière

Section II.  La responsabilité administrative du fait de ses actes fautifs en matière foncière

Chapitre II La réparation du préjudice subi par la victime de la faute administrative

Section I. La réparation du préjudice subi par voie administrative

Section II. La réparation par voie juridictionnelle

Conclusion générale

RESUME

Le contentieux issu de la question foncière est au coeur d'une actualité brûlante au Cameroun. La détermination des pouvoirs publics dans l'assainissement d'un environnement frelaté, et la lutte acharnée contre les titres fonciers irrégulièrement délivrés ne fait plus l'ombre d'hésitation.

Les pouvoirs publics camerounais se sont lancés dans une série d'annulations et de retraits de titres fonciers irrégulièrement délivrés. La doctrine, par la voix d'Aloys MPESSA, a parlé de l' « explosion judiciaire du titre foncier » ; selon nous, il s'agit plutôt de l'« explosion administrative des titres fonciers irrégulièrement délivrés ».

L'avènement de la réforme foncière opérée par le décret n°2005/481 du 16 décembre 2005 qui vise la sécurisation des droits fonciers, nécessite que l'on s'attarde sur la part de responsabilité de l'administration en charge des affaires foncières dans l'incivisme qui a cours en matière foncière. Cette insécurité découle du constat de la complexité des procédures, du laxisme et de l'inertie des agents publics, bref, des fautes commises par les organes et services concernés, étant entendu que l'ordre actuel des valeurs semble inversé, et que précisément, le respect de la règle est devenu l'exception, et sa violation, la règle.

Face à cette « gabegie administrative » dans l'administration du foncier, on assiste à une réponse étatique dictée par l'élargissement de l'assiette répressive contre les fonctionnaires indélicats, coupables ou complices d'atteintes à la propriété foncière.

L'enjeu étant de restaurer et de garantir la sécurité du titre foncier.

ABSTRACT

The dispute stemming from the land issue is in the heart of an ardent current event in Cameroon. The determination of authorities in the purification of an adulterated environment, and the fight been incensed against the land titles irregularly delivered does not make any more the shade of hesitance.

The Cameroonian authorities dashed into a series of cancellations and withdrawals of land titles irregularly delivered. The doctrine, by the voice of Aloys MPESSA, spoke about the «judicial explosion of the land title» ; According to us, it involves rather about the «administrative explosion of the land titles irregularly delivered» .

The advent of reform land operated by the decree n°2005 / 481 of december 16th, 2005 which aims at the reassurance of the land rights, requires that we linger over the part of responsibility of the administration in charge of the land administration in the incivism which is current in land issue. This insecurity ensues from the report of the complexity of the procedures, from the laxness and from the slowness of the civil servants, brief, the faults committed by organs and concerned services, being understood that the current order of the values seems inverted, and that exactly, the respect for the rule became the exception, and its violation, the rule.

In front of this «muddle administrative» in the administration of the land, we attend a state answer dictated by the extension of the repressive plate against the tactless, guilty civil servants or the accomplices of infringements to the landed property.

The stake being to restore and to guarantee the security of the land title.

INTRODUCTION GENERALE

Le droit foncier, en tant que droit de la terre ou droit sur les terres, continue toujours à préoccuper l'attention des pouvoirs publics. L'avènement du décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005 à la suite de l'importante réforme de 1974 et 1976 est révélateur de cet état de choses. L'opinion publique camerounaise semble être consciente des enjeux qui entourent la gestion de la terre au Cameroun.1(*) L'unanimité de ce point de vue en doctrine ne fait l'ombre d'aucun doute. Déjà, Monsieur KOUASSIGAN, fort à propos soulignait la place prépondérante de la terre en Afrique noire. De la sorte, la terre dans les sociétés négro- africaines constitue un bien, car elle est non seulement source de vie, mais encore, un intermédiaire entre l'homme et les divinités. Egalement, Monsieur Robinson TCHAPMEGNI affirme : « après l'agriculture et le pétrole, la terre constitue en Afrique subsaharienne en général, et au Cameroun en particulier, l'une des principales richesses dont disposent les populations pour améliorer leurs conditions de vie en l'absence d'un tissu économique et industriel viable. »2(*), en conséquence « toutes les institutions juridiques traditionnelles portent la marque de l'attachement des noirs à la terre. ».3(*) Analyser la matière foncière entendue comme le domaine des règles juridiques qui définissent et traitent des droits des citoyens, notamment, les droits d'accès, d'exploitation, de contrôle ou de cession de la propriété privée immobilière serait d'une importance capitale.

L'Etat est le  « gardien de toutes les terres camerounaises », et à ce titre, il peut « intervenir en vue d'en assurer un usage rationnel ou pour tenir compte des impératifs de la défense ou des options économiques de la Nation ». Cette implication de l'Etat, et partant de l'administration en matière foncière, n'est pas toujours paisible. La recrudescence des litiges fonciers en zones urbaine et rurale l'illustre bien. L'importance et la prépondérance des services administratifs dans la gestion foncière invite à marquer un temps d'arrêt pour définir le terme administration.

L'administration est une expression, qui seule peut recouvrir une variété de significations. Ce vocable étymologiquement désigne la gestion d'un patrimoine, l'exercice d'une fonction ou la charge d'un établissement. Mais en y ajoutant un caractère fonctionnel, l'administration se définit comme un ensemble de moyens et d'agents destinés à maintenir un certain ordre de choses et à accomplir certaines tâches de gestion.

Par ailleurs, si l'on se situe dans le champ du droit, le terme administration recouvre une diversité de définitions. Selon le Professeur François-Xavier MBOME, le vocable administration désignera : « d'un point de vue fonctionnel ou matériel, c'est-à-dire en considération de la nature interne des actes au moyen desquels une activité s'accomplit, l'administration apparaît comme une activité.

D'un point de vue organique, c'est-à-dire en considération de l'organe qui exerce une activité donnée, l'administration désigne les organes exerçant les tâches d'administration.

L'administration peut aussi désigner l'ensemble des organes par lesquels les autorités publiques conduisent et exécutent les tâches publiques »4(*).

De manière synthétique, qu'elle soit fonctionnelle ou organique, l'administration consiste dans les personnes et les choses que le gouvernement, l'Etat emploie. En tant que pouvoir agissant de l'Etat, son action doit être conforme aux lois, ce qui est une gageure : le pouvoir brille par son absence totale de légalité là où il devrait être présent ! On assiste en matière foncière à une juxtaposition de forfaits administratifs, et c'est fort à propos que le décret de 2005 institue la répression de l'indélicatesse des agents administratifs qui engagent leur responsabilité en cas de faute. La faute, encore et toujours elle ! Monsieur RADE s'écriait déjà sur « l'impossible divorce entre la faute et la responsabilité ».5(*)

La faute de manière générale, est une des notions juridiques qui continue toujours à faire parler d'elle, et intervient dans toutes les sphères du droit. PLANIOL la définit comme un manquement à une obligation préexistante. De manière laconique, la faute est un comportement défectueux qui se caractérise par l'anormalité. La faute irradie toute la vie sociale, elle est immanente à l'action humaine. Philippe LE TOURNEAU dans ce registre déclare : « la notion de faute est tellement consubstantielle à notre civilisation qu'il est difficile de l'évacuer : si vous la chassez par la porte, voici qu'elle rentre par la fenêtre ! ».6(*)

Le Code civil, en son article 1382 dispose expressément que : « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Pour certains auteurs, ce texte constitue « l'une des règles d'équité qui pourraient à elles seules, résumer le droit tout entier »7(*). La vie en société oblige en effet à un minimum de consensus social ; aussi apparaît-il juste que, celui qui commet une faute qui préjudicie aux intérêts d'un tiers, en assume les conséquences. Si ce principe est un truisme en ce qui concerne les personnes privées, l'homme pris individuellement, cela n'est pas le cas en ce qui concerne l'administration. Certes l'Etat vit à travers ses organes que sont les personnes, mais sa responsabilité qui « est presque toujours une responsabilité du fait d'autrui »8(*), obéit à un régime particulier.

De l'irresponsabilité originaire de l'Etat, en ce qu'il représente la puissance publique, à une responsabilité «sui generis » consacrée dans l'arrêt BLANCO9(*), dans la mesure où la responsabilité de l'Etat « ne peut être  régie par les principes qui sont établis dans le code civil pour les rapports de particuliers à particuliers [...]. Elle a ses règles spéciales qui varient selon les besoins de service, et la nécessité de concilier les droits de l'Etat avec les droits privés ». Ces droits privés revêtent généralement l'habit des droits de l'homme, et dont un, non moins le plus important qu'est le droit de propriété. La propriété  au sens de l'article 544 est le droit reconnu aux citoyens de jouir, d'user et disposer de leur bien, notamment immeuble de la manière la plus absolue, en respect avec les lois, sans qu'aucune restriction légale ou judiciaire ne puisse y être apportée. Compte tenu du caractère fondamental de la propriété et même de l'aspiration à la possession de chaque homme, il est normal que les éléments concernant cette réalisation, c'est-à-dire les règles de propriété constituent un des piliers des systèmes juridiques de telle sorte que tout empiétement administratif soit réprimé.

Ainsi, comme le déclarait Claude EMERI : «  la puissance publique est responsable de ses actes. C'est acquis. Mais sur quelles bases ? Dans quels cas ? Devant quelles juridictions ? Selon quelles règles ? Avec quelles conséquences ? »10(*), pour insister sur la complexité qui entoure la nature de cette responsabilité ; et Pascale BERTONI qui ajoute que «  la jurisprudence récente a fait évoluer le principe de la responsabilité de la puissance publique, en réduisant à la portion congrue, les poches de quasi-irresponsabilités qui y subsistent cependant »11(*) pour recentrer le débat, la réparation des dommages causés aux personnes par l'action fautive de l'administration n'est pas évidente.

En conséquence, si le principe de la responsabilité administrative est acquis, la question pertinente que l'on se pose est celle selon laquelle, face aux violations de la propriété privée immobilière, comment l'Etat répare-t-il ses fautes ? C'est un truisme que les autorités administratives, et les services en charge de la chose foncière préjudicient aux intérêts des particuliers qui ont des droits ou des prétentions sur des terrains. Quels sont la place et l'intérêt de la faute dans la mise en oeuvre de la responsabilité administrative en matière foncière? Mais encore, quelle est la part de responsabilité des autorités administratives dans les litiges fonciers du fait de leur faute ? Pour aller plus loin, on peut se demander quelle est l'étendue du régime du droit privé s'appliquant à l'administration malgré les principes de l'arrêt Blanco, et même si, lorsque la juridiction administrative est saisie, se demander si les solutions qu'elle applique ne se fondent pas sur le droit civil ?

Notre réflexion n'a pas la prétention d'analyser le régime juridique de la responsabilité administrative, mais surtout, de montrer comment les fautes administratives peuvent porter atteinte aux biens des citoyens.

Ce travail d'analyse revêt un double intérêt. Le premier, qui est d'ordre scientifique, réside dans l'effectivité des garanties juridiques de la propriété immobilière en droit foncier camerounais. Il s'agit en fait de vérifier l'état des droits et l'Etat du droit en matière de protection de la propriété foncière face aux abus administratifs. Le second, social cette fois-ci, apparaît dans la mesure où il s'agit de montrer aux populations, aux victimes de forfaits administratifs, que personne n'est au-dessus de la loi ; quiconque commet une faute qui lèse un tiers, fût-t-il une autorité administrative, doit en répondre. Il est question en fait de décrier la gestion lacunaire des acteurs publics dans la chaîne foncière au Cameroun, et montrer aux populations comment l'Etat répare les fautes commises par ses agents en matière foncière ;

L'analyse ne se situe plus au niveau de la prévention des abus, mais plutôt dans celui de la thérapie.

Dans nos travaux, nous n'avons pas la prétention de faire une énumération exhaustive des fautes commises par les acteurs étatiques dans tous les domaines fonciers, mais plutôt de relever les manquements causés par ces autorités dans les litiges qui mettent en cause la propriété privée notamment les biens immeubles des particuliers. Entrent alors dans cette catégorie les fautes commises pendant la procédure d'immatriculation et pendant la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Deux techniques, la dogmatique et la casuistique, doublée d'enquêtes informelles sur le terrain permettent de rendre compte de l'état des lieux du contentieux foncier qui met en prise l'Etat et les particuliers. Explorer ces pistes revient tout d'abord à déterminer, et donc identifier la faute administrative en matière foncière (Titre I), quitte à envisager ensuite, les conséquences et la sanction de cette faute. (Titre II).

TITRE 1 : LA DETERMINATION DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE

La recrudescence des litiges fonciers en zones urbaine ou rurale semble montrer que la gestion qui est l'oeuvre de l'Etat, en vertu de l'article 1 de l'ordonnance 74/1, est lacunaire. De brillantes études ont été faites sur la faute et la fraude des particuliers dans les opérations foncières ; dans cette analyse, il ne s'agit point de revenir sur cet aspect, mais plutôt de s'appesantir sur la part de responsabilité de l'administration en charge de la matière foncière au Cameroun, dans le contentieux foncier.

En effet, il appert que le contexte social, politique et économique est marqué par la revalorisation du foncier. Et comme le déclare fort à propos Monsieur P. MATHIEU, « L'Etat fait de la terre, aujourd'hui plus qu'hier, un véritable levier de développement »12(*), et à cet effet la gestion du foncier doit briller par l'efficacité.

En conséquence, il s'agit d'insister sur l'intérêt et la notion de faute administrative dans les litiges fonciers. Ce titre s'oriente dans la détermination de cette faute. Déterminer une chose, selon le Dictionnaire Universel, c'est caractériser, préciser la valeur ou la signification de cette chose, et spécialement son sens, et ceci en dégageant sa spécificité. A cet effet, déterminer la faute administrative en matière foncière conduit nécessairement à relever ses caractéristiques ou attributs, ses applications ou expressions concrètes, le tout dans le souci d'établir son régime. Il est donc judicieux de présenter ces déterminants de manière détaillée si l'on veut appréhender la nature et les contours de cette faute car le foncier est source d'enjeux indéniables. Cela amène à examiner dans ce titre premier, d'une part la particularité de la faute administrative (chapitre 1), et d'autre part, les manifestations de cette faute en matière foncière (chapitre2).

Chapitre 1 : LA PARTICULARITE DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE

La faute, de manière générale, s'entend comme le manquement aux règles, à la loi. Un fait ou un acte sera fautif lorsqu'il y aurait un caractère d'anormalité. Malgré cette généralité, la faute de l'administration, par contre ne rentre pas dans les canons des définitions privatistes, car en effet, la faute envisagée par l'article 1382 du code civil, qui est délictuelle ou quasi- délictuelle, ne correspond pas à la faute administrative. En plus, cet état de choses est dû, non seulement a ce que l'administration est une personne abstraite, qui n'a pas de matérialité, mais encore, c'est à travers des agents, des personnes, des organes ou des autorités qu'elle agit. La particularité de la faute administrative en matière foncière réside donc, d'une part dans ses traits caractéristiques distincts de la faute civile (section1) et d'autre part à travers les auteurs de cette faute, notamment l'administration en charge de la matière foncière (section2).13(*)

A. Section1 : Les Caractéristiques de la faute administrative

L'on ne saurait relever les traits caractéristiques de la faute administrative, sans avoir au préalable montrer le distinguo entre la faute civile et la faute administrative. Il convient d'opérer la distinction de la faute administrative de la faute civile (§1), puis alors analyser la singularité de la faute administrative (§ 2).

§ 1 : La faute civile et la faute administrative

Il s'agit à ce niveau de montrer que la faute administrative est différente de la faute civile. Pour mieux le faire, il est important d'exposer les définitions et contours de la faute civile, afin de mieux rendre compte de la notion, pour faire sortir la ligne de démarcation avec la faute administrative. Il y'a lieu à cet effet d'envisager la notion de faute en droit civil (A) et la typologie de fautes opérée en doctrine (B).

A - La notion de faute

Longtemps, il a paru suffisant de fonder la responsabilité de l'auteur d'un dommage sur la faute commise par lui. Le texte de base, c'est-à-dire l'article 1382 du code civil répondait à cette idée : « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Toutefois, en raison du silence du Code civil et l'absence de définitions légales du vocable faute, le mérite revient aux auteurs d'avoir essayé de conceptualiser les significations de la faute et tenter de faire sinon pas un catalogue, mais à tout le moins, ressortir les acceptions que recouvre la notion.

Parmi la kyrielle de définitions, l'on peut citer la plus célèbre qui est celle de PLANIOL pour qui «  la faute est un manquement à une obligation préexistante », définition qui n'a toujours pas fait l'unanimité en doctrine.14(*) La faiblesse souvent relevée de cette définition est qu'elle répond à la question par la question de savoir en quoi consiste l'obligation préexistante, qui elle aussi en soulève une autre, on assiste alors à un véritable cercle vicieux qui n'en finit point. En outre Gérard Cornu dans son Vocabulaire juridique donne une définition plus ou moins complète de la faute. Ainsi, le substantif faute découle de l'expression latine « fallita » qui est l'action de faillir, qui elle-même vient du verbe « fallere » qui signifie tromper, échapper à, faire défaut. La faute serait alors « un acte illicite supposant la réunion d'un élément matériel : le fait originaire ; d'un élément d'illicéité : la violation d'un devoir, la transgression d'un droit, et d'un élément moral le discernement de l'auteur du fait ».15(*) De cette définition, l'on retient que la faute est la combinaison d'un élément matériel, lequel peut consister en un fait positif ou une abstention ; d'un élément d'illicéité, qui consiste en la violation d'un devoir en matière contractuelle par exemple, ou de la transgression d'une loi ; et enfin d'un élément moral, l'imputabilité qui est l'aptitude à rendre compte de ses actes, à discerner ses actions.

Dans un autre registre, la faute est analysée en rapport à une appréciation soit in abstracto, soit in concerto. Ainsi, selon une appréciation « in abstracto », c'est-à-dire sans tenir compte des particularités et réalités d'une situation, indépendamment de données concrètes et individuelles, juger une action fautive reviendrait à la comparer à un prototype de références qui est celui du « bon père de famille ».16(*)

De ce fait, la faute serait tout comportement regrettable, mais statistiquement inévitable de la part du bon père de famille. Il s'agit donc de maladresse sans gravité, d'erreur vénielle sans incidences notoires et profondes.

Dans une autre approche, la faute, de manière « in concreto », c'est-à-dire, en fonction des différences propres à chaque individu, serait tout acte, tout comportement qui s'écarte largement du normal, et qui dénote chez son auteur l'intention de nuire à autrui. La faute est alors intentionnelle, et son auteur recherche un but précis, notamment causer un dommage à autrui ; à ce niveau, c'est l'attitude de la personne fautive qui est prise en considération.

B - La typologie de fautes en droit civil

Il est difficile de rendre compte des types de fautes en matière civile. A tout le moins, on peut essayer de prendre en compte soit l'origine de la faute, soit le degré de gravité et donc les conséquences de cette faute, soit la volonté de son auteur.

S'agissant de l'origine, une faute peut être, soit délictuelle, soit contractuelle. La faute délictuelle ou quasi délictuelle est celle-là qui trouve son origine dans le fait illicite et dommageable. Les articles 1382 et 1383 du Code civil donnent à suffisance la définition de cette catégorie de faute. Ainsi, l'article 1382 dispose que « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer », puis, à sa suite, l'article 1383 qui dispose que « chacun est responsable du dommage qu'il a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

En outre, la faute contractuelle quant à elle, est celle-là qui est commise par une des parties au contrat. Elle s'analyse comme les manquements aux obligations contractuelles, la violation de ces obligations. Ce peut être, soit l'inexécution de ses obligations, soit l'exécution fautive donc détournée de son but initial.

Pour ce qui est de la volonté de l'auteur de la faute, il s'agit de distinguer la faute intentionnelle de la faute non intentionnelle. C'est aussi examiner la question de la bonne ou de la mauvaise foi de l'auteur de la faute. Laconiquement, l'intention c'est le dessein délibéré, c'est l'acte de la volonté par lequel on se fixe un but, c'est le but lui-même. Le Lexique des Termes Juridiques la définit comme « la conscience éclairée et la volonté libre de transgresser les prescriptions »17(*). On distingue alors le dol de la faute simple ; le dol s'entend comme une faute intentionnelle comportant la mauvaise foi de la part de son auteur, généralement, il s'agit du débiteur d'une obligation contractuelle. Le lexique des termes juridiques en donne une définition suffisante18(*).

Peu importe le domaine dans lequel on se situe, ce peut être en matière délictuelle ou contractuelle, la faute peut être intentionnelle ou non intentionnelle, volontaire ou involontaire, le tout réside dans le but que recherchait l'auteur de cette faute. Après qu'une faute ait été commise, la préoccupation réside dans les conséquences dommageables de cette faute et le degré de gravité dans sa commission. Cela consiste à prendre en compte le degré de gravité, dans la commission de la faute et, dans les conséquences de la faute.

Le degré de gravité dans la commission d'une faute permet de distinguer la faute lourde, la faute légère et la faute très légère. Cette distinction trouve son origine dans l'Ancien droit et repose sur l'idée de gradation des fautes19(*). En matière contractuelle, la faute lourde parce que grave, équivaut au dol et engage le débiteur de l'obligation ; elle est tirée de l'adage « culpa lata dolo aequiparatur ». La faute très légère est celle-là « dont le débiteur ne répond que si le contrat a été passé dans son intérêt exclusif », distincte de la faute légère, dont le débiteur répond lorsque le contrat a été conclu dans l'intérêt des deux contractants20(*).

En matière délictuelle par contre, le degré de gravité va s'analyser dans les conséquences dommageables de l'acte fautif. Ainsi, une faute sera lourde ou grave si elle porte préjudice à la victime. Une faute légère sera celle-là sans incidences notoires. Dans tous les cas, il s'agit de prendre en compte les intérêts de la victime, pour mieux réparer le dommage que lui cause l'auteur de la faute.

Au vu de ce qui précède, il nous parait plausible d'affirmer qu'il n'existe pas véritablement de typologie de fautes en matière civile ; il faut alors chercher pêle-mêle, dans tel aspect, les éléments de convergence ou de divergence, pour essayer de catégoriser la faute. Mais, s'il est une certitude, c'est bien la séparation nette de la faute civile de la faute administrative qui elle obéit à des règles particulières

§ 2 : La singularité de la faute administrative

Comme sus évoqué, la faute administrative se distingue de la faute ordinaire commise par une personne. Cet état de chose est dû non seulement à l'auteur de la faute, en ce que l'administration s'entend, comme une pluralité de personnes juridiques étant toutes des personnes morales qui n'agissent qu'à travers leurs organes qui sont des personnes physiques. La faute administrative serait alors la faute commise par un agent, une autorité ou un service administratif. Cette faute est indissociable de l'idée du service qui constitue sa principale caractéristique21(*). C'est à la jurisprudence PELLETIER que la notion de «faute rattachée au service» tire son origine. Il est loisible d'analyser la faute de service qui se distingue de la faute personnelle de l'agent (A), mais encore aller au-delà de cette distinction pour mieux rendre compte de la notion de faute administrative, et ceci à travers la prise en compte du degré de gravité de la faute dans la qualification de faute administrative (B).

A - Le rattachement au service : la qualification de faute de service ou de faute personnelle

Le rattachement de la faute au service comme critère de distinction de la faute administrative soulève la question de la dualité faute personnelle - faute de service qui a longtemps intéressé la doctrine, et a eu un retentissement en jurisprudence depuis l'arrêt PELLETIER22(*).

Dès lors, pour rendre compte de la notion de faute de service, il sied de ressortir la ligne de démarcation qui existe entre elle, et la faute personnelle. Il s'agit donc de relever les notions et les contours de la faute personnelle d'une part (1), et de la faute de service d'autre part (2).

1 - Notion et contours de la faute personnelle

La définition et la recherche des critères de la faute personnelle ont été l'oeuvre de la doctrine face à l'absence de formule de portée générale de la jurisprudence.

C'est sous l'impulsion de E. LAFERRIERE dans ses conclusions dans l'affaire Laumonier-Carriol23(*) que la faute personnelle a pu être systématisée. Ainsi, il y a faute personnelle « si l'acte dommageable révèle l'homme avec ses faiblesses, ses passions, ses imprudences ». De ce qui précède, l'on peut dégager deux traits susceptibles de révéler la faute personnelle : l'intention malveillante et la gravité de la faute. Mais cette approche s'est effacée peu à peu, devant le rapport, de la faute au service, et du comportement de cet agent et du service. Dans tous les cas, la faute personnelle est celle-là qui peut être sanctionnée par le juge judiciaire sans que ce dernier n'apprécie le fonctionnement du service public.

Une faute sera alors qualifiée de personnelle, soit parce qu'elle a été commise par l'agent en dehors de l'exercice de ses fonctions, soit parce que, alors même que l'agent est en fonction, elle révèle un comportement incompatible avec le service.

En ce qui concerne la faute sans rapport avec le service, l'acte révèle l'homme à titre privé ; il est totalement étranger au service. Il s'agit alors de fautes intentionnelles ou délits intentionnels de droit commun, notamment d'un accident de la circulation provoqué par un agent utilisant sa voiture personnelle en dehors de toute mission de service ; il en est aussi le cas, dans les hypothèses où, la fonction, n'a que très indirectement fourni les moyens de l'acte dommageable ; à titre d'exemple, l'utilisation d'armes fournies par le service dans des opérations purement personnelles, notamment, le vol, le meurtre commis au cours d'une altercation privée.

Ensuite, quant à ce qui est de la faute non dépourvue de lien avec le service, ce sont généralement des fautes commises à l'occasion de l'accomplissement du service, à l'instar d'une volonté d'enrichissement personnel qui entraîne le pillage d'un logement exproprié, d'un dommage provoqué par un agent qui s'est enivré pendant son service, de brutalités ou de violences physiques envers un usager, de propos grossiers, injurieux ou diffamatoires. Bref il y a faute personnelle lorsque le but personnel recherché entache l'acte ou l'agissement de l'agent administratif ; cela est d'ordre purement psychologique, d'une vengeance, de l'intention de nuire, d'une animosité personnelle envers un individu.

En tout état de cause, la faute personnelle est celle-là qui est dépourvue de tout lien avec le service, c'est-à-dire, a été commise hors du temps et du lieu de service, et est révélatrice d'un comportement incompatible avec la qualité d'agent administratif.

2- La faute de service

La faute de service, entendue comme un acte dommageable commis par un agent public à l'occasion de l'exécution du service, et dont la réparation incombe à l'administration, a longtemps constitué la clef de voûte du régime de la responsabilité de l'administration, son fondement et sa condition première. Elle demeure une des notions majeures des systèmes développés par les jurisprudences Blanco & Pelletier en tant qu'elle est une technique spécifique d'engagement de la responsabilité administrative. En doctrine, la faute de service peut avoir un prolongement technique à savoir la faute du service. Aussi, selon le Lexique des termes juridiques, en droit administratif on distingue deux catégories de fautes : « la faute du service public [ ] désignant tout défaut de fonctionnement des services publics de nature à engager la responsabilité pécuniaire de l'administration à l'égard des administrés » et la « faute de service [...] désignant toute faute qui n'ayant pas le caractère de faute personnelle, ne peut engager la responsabilité civile de son auteur que ce soit envers l'administration ou envers les administrés ».

Au regard de la définition donnée par E. Laferriere, selon laquelle, il y a faute de service seulement « si l'acte dommageable est impersonnel, s'il révèle un administrateur plus ou moins sujet à erreur », la faute de service grosso modo est celle-là qui est commise par un agent en temps et en lieu de service, et qui ne peut être détachée de ses fonctions.

La faute de service dans son analyse aura deux caractères fondamentaux : c'est une faute anonyme, c'est une faute directe.

Faute anonyme d'une part parce qu'il y a dépersonnalisation de l'agent qui l'a commise. L'individualisation de l'agent est sans intérêt car sans effets juridiques. C'est le service seul qui est mis en cause. Cela ne veut pas dire que c'est le service qui commet une faute, étant une personne morale, il ne peut agir lui-même, mais seulement à travers ses organes. Claude Gour dit à ce propos que « la faute de service sera toujours la faute d'un homme mais la personnalité de ce dernier est gommée dans le contentieux... »24(*).

D'autre part, la faute de service est une faute directe dans la mesure où la victime, l'administré lésé n'a pas besoin d'identifier l'auteur physique de la faute ; il suffit d'invoquer le fait objectif du fonctionnement défectueux du service qui est à l'origine du dommage. L'imputabilité du dommage à l'administration est directe contrairement aux mécanismes d'imputation de la faute des articles 1382 et suivant du Code civil qui obéissent à des règles particulières.

A tout le moins, tout acte juridique, ou tout agissement matériel de l'administration sont susceptibles de s'analyser en faute de service. Tout réside dans l'anormalité de l'action administrative. La faute de service apparaît comme une violation des lois et des règles du service, ou comme un manquement aux obligations de service. L'idée sous-tendue ici est celle selon laquelle la puissance publique n'est liée ni à la faute de l'agent, ni à la faute de la personne morale répondante, mais au fait du service qui a un caractère fautif par référence à ce que l'administré était en droit d'attendre. Selon le Professeur Duez on distingue alors trois hypothèses de faute de service.

Il y a faute de service :

· lorsque le service a mal fonctionné25(*)

· lorsque le service n'a pas fonctionné du tout

· quand le service a fonctionné tardivement.

Néanmoins, tout resterait simple si ce critère de distinction faute personnelle - faute de service est purement objectif et matériel, que s'il est affaire de temps ou de lieu de service ou au contraire de vie privée. Mais cela n'est pas toujours aisé, car tout agent de l'administration reste simultanément un homme, une personne privée dans l'exercice de ses fonctions. Et comme le disait Monsieur Gour, « l'homme et l'administrateur ne se laissent pas aisément séparer dans la réalité ; pendant l'exercice de ses fonctions, il reste une personne privée avec ses faiblesses, ses passions et simultanément, hors du service sa profession peut faciliter la commission de faute à l'aide des moyens fournis par le service »26(*). Ce sont donc des situations d'enchevêtrement qui complexifient la distinction nette faute personnelle et faute de service, et comme le déclare le Professeur GUIMDO, « cette distinction est d'application difficultueuse. ».

B - L'implication du degré de gravité dans la faute

Comme en matière civile, en matière administrative, le degré de gravité de la faute est pris en compte pour qualifier une faute administrative. L'analyse de la gravité du manquement, ou du dysfonctionnement permet de distinguer l'erreur de la faute simple en premier lieu, et en second lieu, de qualifier un manquement administratif eu égard à une situation particulière, de faute lourde .

1 - L'erreur et la faute simple

La doctrine classique considère l'erreur comme une sorte de faute non qualifiée du fait de l'absence de conséquences dommageables graves. L'erreur est alors une action regrettable, une maladresse, une méprise, une appréciation inexacte d'un fait ou d'un acte. Toutefois, en droit administratif, on distingue l'erreur simple de l'erreur manifeste qui permet de sanctionner l'action ou l'inaction administrative particulièrement flagrante. Dans l'arrêt Dame CHACHUAT,27(*) le juge déclare expressément que « le fait incriminé est le résultat d'une simple erreur et n'à pas le caractère d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'administration ». Constitue alors une erreur simple l'omission de mentions facultatives sur un acte sans incidences graves sur l'administré. L'erreur manifeste quant à elle se caractérise par un excès de pouvoir ou une violation grave des obligations du service. L'erreur manifeste engage la responsabilité administrative eu égard à la gravité du manquement qui entache le fait ou l'acte administratif fautif. Elle s'apparente à une faute inexcusable parce qu'elle est grossière et lourde. C'est la méconnaissance scandaleuse d'une règle, d'une loi. L'erreur manifeste se distingue de la faute simple et s'apparente plus à la faute lourde.

2 -La qualification de faute lourde

La qualification de faute lourde, en fonction de sa gravité a eu dans l'histoire de la responsabilité administrative un rôle important dans la mise en oeuvre de la responsabilité de la puissance publique. Le critère de la faute lourde a paru pendant longtemps un des instruments techniques d'identification de la faute personnelle de l'agent, distincte de la faute de service28(*). La faute lourde selon le vocabulaire juridique de Gérard Cornu est « un comportement qui s'écarte largement du comportement qu'aurait eu dans les mêmes circonstances le `bon père de famille; comportement qui dénote chez son auteur soit l'extrême sottise, soit l'incurie, soit une grande insouciance eu égard des dangers que l'on crée ».

En droit administratif, le recours à la notion de faute lourde pour établir une quelconque responsabilité est due à l'initiative des tribunaux judiciaires. C'est le Répertoire Dalloz29(*) qui en présente le premier essai de systématisation doctrinale en droit administratif. ROMIEU dans ses conclusions dans l'affaire Tomaso Greco en précise la portée30(*).

De ce fait, la faute lourde serait alors une « faute qualifiée  », « une faute caractérisée » distincte de la faute simple, dans la mesure où elle se définit par une accumulation de fautes légères31(*), par sa prévisibilité, et ici, on prend en compte l'intention de l'agent32(*) ou encore par la gravité du dommage.

En ce qui concerne la fonction de la faute lourde ou faute qualifiée, elle remplit une fonction positive ; elle est un moyen de limitation de l'irresponsabilité de la puissance publique et par conséquent un instrument d'extension dans le processus d'évolution de la responsabilité administrative.

Mais depuis qu'il est quasiment admis un principe général de responsabilité de la puissance publique, l'exigence de faute lourde a changé de signification ; elle est devenue un moyen de limitation de la responsabilité administrative33(*).

De fait, il est difficile de tirer un système rigoureux d'identification de la faute lourde en jurisprudence, car la faute lourde déclarée, ne présente aucune spécificité par rapport à la faute simple, et ceci parce que, les éléments de définition des deux notions sont rigoureusement identiques.

A tout le moins, la spécificité de la faute lourde peut découler du caractère intentionnel, ou du caractère essentiel de l'obligation violée. C'est alors au regard des conséquences de la violation qu'on appréciera la faute lourde. La doctrine administrative insiste sur le fait que la notion de faute lourde varie selon les activités considérées. A cet égard, selon Claude Gour34(*), la faute lourde sera qualifiée tantôt par rapport à la nature régalienne de l'activité en cause, elle s'apparente alors à celle de la voie de fait ; tantôt la faute lourde s'explique par les difficultés de service.

De ce qui précède, on constate qu'il est difficile de systématiser les critères distinctifs de la faute lourde. Cela est dû à la conjugaison et au chevauchement des différents éléments des fautes lourde et simple. Il reste alors que la distinction perd de sa vigueur au même titre que la distinction sus faite à propos de la faute personnelle et de la faute de service, et on tombe ainsi dans des situations de cumul de responsabilités de l'administration et de l'agent.

Néanmoins, malgré cette complexification dans l'analyse des caractéristiques de la faute administrative, il reste que en matière foncière, il y a bien faute administrative, eu égard aux auteurs de cette faute, qui constituent les acteurs intervenant dans la chaîne foncière qu'il convient d'analyser dans la section subséquente.

B. Section 2 : L'identification des structures ADMINISTRATIVES mises en cause dans la FAUTE EN MATIERE FONCIERE

L'implication des structures administratives dans la gestion de la matière foncière découle à ne point douter de l'article premier alinéa 2 de l'ordonnance 74/1 du 06 juillet 1974 aux termes duquel : « l'Etat est le gardien de toutes les terres. Il peut à ce titre intervenir en vue d'en assurer un usage rationnel ou pour tenir compte des impératifs de la défense ou des options économiques de la nation ». Il appartient à l'Etat de mettre en place des politiques de répartition, gestion et contrôle des affaires foncières. A cet effet, il a été crée un ministère en charge de la chose foncière notamment le Ministère des Affaires Foncières et Domaniales (MINDAF) crée par décret n°2004/320 du 08 Décembre 2004 portant organisation du gouvernement et complété par le décret n°2005/17 du 27 mai 2005 portant organisation du Ministère des domaines et des affaires foncières. Ainsi, conformément aux dispositions desdits textes, il a été conçu des structures spécialisées à savoir une direction des affaires foncières et une sous direction du domaine national. A ce titre, il serait judicieux d'analyser de manière profonde le rôle précis de ces administrations qui se subdivisent en acteurs principaux (§1) et acteurs secondaires (§2).

§ 1 : Les intervenants administratifs directement mis en cause

Lorsqu'on envisage l'analyse des services principaux ou structures ad hoc intervenant en matière foncière, il s'agit de relever les structures administratives et para administratives qui s'occupent des procédures afférentes à la matière foncière dans l'acquisition et la cession de propriété par les particuliers pendant la procédure d'immatriculation et d'expropriation35(*). Il convient d'analyser l'organisation, le fonctionnement et les missions dévolues aux commissions consultatives, à la conservation foncière, à la commission d'évaluation (B). En plus de ces structures, il faut voir en complément, le rôle des autorités administratives proprement dites à l'instar du préfet, du sous-préfet, et du chef de district qui sont les chefs de circonscriptions administratives(A).

A- Les Chefs d'unités administratives

Il s'agit principalement du Gouverneur, du Préfet, du Sous-Préfet ou du Chef de district.

1- Le rôle du Gouverneur ou du préfet en matière foncière

Selon que l'opération foncière aura lieu dans le ressort territorial du département ou de la province, le Préfet ou le Gouverneur sera compétent.

Le rôle du Gouverneur est issu de l'article 20 nouveau du décret n°2005/481 qui dispose que : «les oppositions  ou demandes d'inscription de droits non levés à l'expiration du délai prévu à l'article 18 alinéa 2 ci-dessus, sont soumises au Gouverneur territorialement compétent pour règlement après avis de la commission consultative.

(2)[...] Le Gouverneur peut par arrêté selon le cas, autoriser le conservateur foncier :

-soit à immatriculer le terrain au nom du requérant, avec inscription des droits le cas échéant ;

-soit à faire exclure avant l'immatriculation, la parcelle contestée ;

-soit enfin à rejeter la demande d'immatriculation,

(3) La décision du Gouverneur est susceptible de recours hiérarchique devant le Ministre chargé des affaires foncières [...] ».

Le Préfet, représentant du pouvoir exécutif dans le département, chef de la circonscription administrative, incarne l'Etat, il est gardien des terres du département. C'est lui qui nomme les membres de la commission consultative à l'occasion des procédures d'immatriculation36(*). De même, pour ce qui est de la procédure d'expropriation, notamment en ce qui concerne l'expropriation au niveau départemental37(*). C'est le préfet qui préside la commission de constat et d'évaluation du projet d'expropriation.

2- L'implication du Sous-préfet ou du Chef de district

Conformément à l'article 12 nouveau du décret de 2005, la demande d'immatriculation « est déposée auprès du Chef de district ou du Sous-préfet du lieu d situation de l'immeuble ». Il leur appartient respectivement dans le ressort territorial de leur circonscription administrative, de diligenter les procédures d'immatriculation. La main mise du Sous-préfet ou du Chef de district en matière foncière s'est faite grandissante, et rentre dans un souci de déconcentrer la gestion des affaires foncières. C'est auprès de leurs services, qu'est déposé le dossier de demande d'immatriculation. C'est la première autorité administrative saisie en cas d'immatriculation. Egalement, c'est le sous-préfet ou le Chef de district qui préside de la commission consultative, le maillon incontournable des descentes sur le terrain pour le constat de mise en valeur et le règlement des litiges relatifs à l'immatriculation.

B- Les structures administratives ad-hoc

Les structures administratives ad-hoc englobent, et les services para administratifs en ce qu'ils sont composés d'autorités administratives au sens propre du terme, et les services administratifs spécialisés notamment la conservation foncière.

1- La commission consultative

Prévue par le décret n°76/166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine national, et l'article 16 de l'ordonnance 74-1 du 06 Juillet 1974, la commission consultative, chargée de régler les litiges fonciers concomitants ou antérieurs au constat de mise en valeur, est constituée d'autorités administratives et des représentants des autorités traditionnelles ainsi qu'il suit :« Le Sous-préfet ou le Chef de district, président ;

-un représentant du service des domaines, secrétaire ;

-un représentant du service du cadastre

-un représentant du service de l'urbanisme, si le projet est urbain ;

-un représentant du ministre dont la compétence à un rapport avec le projet

-le chef et deux notables du village ou de la collectivité où se trouve le terrain ».38(*)

En conséquence, au terme de l'article 17 du décret 76/165, « les oppositions ou les demandes d'inscription formées antérieurement à la date du constat d'occupation sont examinés par la commission consultative au moment du constat ». Les oppositions à immatriculation s'entendent comme toute contestation par une personne autre que l'auteur de l'immatriculation ; les demandes d'inscription quant à elles sont les prétentions d'un tiers, relatives à l'existence des droits réels ou une charge susceptible de figurer sur le titre foncier. En droit camerounais, il existe un débat sur la nature et valeur juridique des commissions consultatives en terme d'organe administratif ou d'organe juridictionnel. Mais comme l'a souligné Monsieur Christophe YOSSA, la commission consultative est « un organe administratif fonctionnant comme une juridiction en matière foncière »39(*). Avis que nous partageons partiellement dans la mesure où la commission est véritablement un organe administratif parce que composé d'autorités administratives, d'agents et fonctionnaires du service administratif, mais mitigé sur la fonction juridictionnelle ; nous penchons plutôt pour un rôle conciliateur, car elle n'émet que des avis qui ne lient pas l'autorité décisionnaire.

2-- La commission d'évaluation

Prévue par l'article 4 de l'ordonnance 74-2 du 06 juillet 1974, la commission d'évaluation est composée comme suit :

« Président :

- le préfet du département intéressé ou son représentant

- le représentant départemental des domaines qui assure le secrétariat.

Membres : - un géomètre du cadastre

- un technicien de construction

- un technicien d'agriculture ».

Composition modifiée par le décret n°87/1872. Dorénavant, et ceci en ce qui concerne la commission au niveau départemental, elle sera composée comme suit :

- du préfet ou son représentant, président ;

- du responsable du service départemental des domaines, secrétaire ;

- du responsable du service départemental du cadastre, membre

- du responsable du service local de l'urbanisme et de l'habitat ;

- du responsable compétent des mines et de l'énergie ;

- du responsable du service départemental de l'agriculture ;

- du représentant du service départemental des routes ;

- du représentant du service ou de l'organisme demandeur ;

- le ou les députés concernés, membres ;

- la ou les autorités traditionnelles concernées.

Une fois composée, la commission a pour mission, choisir et faire borner les terrains concernés aux frais du bénéficiaire, d'identifier leurs titulaires et propriétaires, de constater les droits et d'évaluer les biens mis en cause, de faire les panneaux indiquant le périmètre de l'opération et surtout, le plus important, d'opérer l'enquête d'utilité publique du projet. Bref, la commission est chargée de contrôler, vérifier, effectuer toutes les opérations préalables à l'expropriation.

3- La conservation foncière

Instituée par les dispositions des articles 100 et 102 du décret n°2005/178 du 27 mai 2005 portant organisation du ministère des domaines et des affaires foncières, la conservation foncière est l'un des services rattachés à la délégation départementale des domaines et des affaires foncières40(*).

Le service de la conservation foncière se situe dans le ressort territorial de chaque département au Cameroun, et est placé sous l'autorité d'un conservateur. Le conservateur foncier est un agent public assermenté chargé de :

«  - l'application du régime foncier et domanial

- l'immatriculation des terrains

- la transformation des divers actes en titres fonciers

- la tenue et la conservation du titre foncier et des dossiers des titres fonciers

- la communication des informations relatives aux droits inscrits dans le livre foncier [....] ».

De manière générale, la conservation foncière est responsable de l'entretien des livres fonciers, registres, dossiers, répertoires ainsi que tous documents déposés dans ses services. Ainsi, en matière d'immatriculation, il appartient au conservateur foncier de certifier, d'authentifier les livrets fonciers en y apposant sa signature et le timbre faisant foi de sa validité ; et même de délivrer le titre foncier lorsqu'aucune irrégularité n'entache la procédure.41(*) Il doit donc à cet effet procéder au contrôle des actes ayant servi à la constitution du dossier d'immatriculation.

En outre, c'est au service de la conservation foncière que sont adressées les oppositions et les demandes d'inscription des droits non examinés concomitamment au constat de mise en valeur. Ainsi, toutes revendications postérieure et ultérieure au constat, sont déposées à la conservation foncière pour purge, et ceci dans un registre spécial42(*). Au vu de ce qui précède, envisager les intervenants directs aux procédures foncières nous a permis de montrer leur rôle respectif de chaque structure. Mais comme il existe d'autres organes administratifs qui interviennent dans leurs sphères de compétences en matière foncière. Il serait intéressant de les étudier, pour rendre compte sinon pas totalement, mais, à tout le moins, de manière suffisante, l'intervention de l'administration en droit foncier.

§ 2 : L'implication des structures déconcentrées et de tutelle.

Il s'agit principalement ici des services centraux et déconcentrés du ministère des affaires foncières, notamment des délégations départementales et provinciales. En tant qu'autorité de tutelle, l'on ne saurait omettre le rôle du Ministre des domaines lui-même, qui lui lorsqu'il est saisi d'un recours hiérarchique, prend une décision susceptible de léser les intérêts des tiers notamment pendant les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, d'attribution de concession provisoire, et du retrait du titre foncier irrégulièrement délivré. S'agissant des structures déconcentrées, il serait judicieux de les envisager de manière précise.

A- La délégation départementale des domaines et des affaires foncières

Aux termes des dispositions de l'article 100 du décret n°2005/78 organisant le MINDAF, la délégation départementale est l'un des services déconcentrés du Ministère des Domaines ; elle est placée sous l'autorité d'un délégué départemental et a pour rôle la coordination des activités des services inférieurs, telles les Délégations d'arrondissement, et la gestion des activités et programmes de son département. La délégation fonctionne à travers des services à l'instar du service départemental des domaines, du service des affaires foncières, du service départemental du cadastre, des bureaux du courrier, du service départemental de la recette et de la conservation foncière43(*).

1 - Le service départemental des affaires foncières

Prévu par l'article 105 du décret suscité, le service départemental des affaires foncières est dirigé par un chef de service qui coordonne les activités de la structure. Activités constituées pour l'essentiel :

« - du suivi des Activités relatives à la gestion du régime foncier dans le département

- de l'instruction des procédures de gestion du domaine national

- du contrôle et du suivi de l'effectivité de l'affichage des avis réglementaires à publier

- de la participation à l'examen des litiges fonciers ».

2 - Le service départemental des domaines

Envisagé par l'article 103 du décret du 17 mai 2005, le service départemental des domaines en principe coordonne les activités relatives à la gestion du régime domanial, et donc des modalités de gestion des terres appartenant à l'Etat. Cet article dispose que : « [....] le service départemental des domaines est chargé :

- du suivi des activités relatives à la gestion du régime domanial ;

- du suivi et de l'instruction des procédures de constitution, de gestion et de protection du domaine privé de l'état et du domaine public ;

- du suivi du fonctionnement des commissions d'arrondissement, de gestion du domaine public, du domaine privé de l'Etat et de l'expropriation pour cause d'utilité publique[...] ».

3 - Le service départemental du cadastre

Le cadastre, d'une manière générale, est une structure technique du MINDAF qui renferme la documentation cartographique et la documentation « littérale » ayant trait à l'identification des propriétaires, et la délimitation des propriétés. Il est chargé, de regrouper et rassembler les informations et données liées au recensement, à la définition, au suivi et à la situation de la propriété foncière et de tout ce qui s'y rattache44(*).

Le service départemental du cadastre pour sa part a pour mission : 

« -Du contrôle et du visa des plans et procès-verbaux de délimitation et de bornage

-de l'établissement des programmes annuels des travaux topographiques et cadastraux

- de la participation aux travaux des commissions convoquées en matière de gestion du domaine national, du domaine public, du domaine privé de l'Etat ou des expropriations pour cause d'utilité publique

- du suivi et de la liaison entre le cadastre et le livre foncier ainsi que l'exécution des actes administratifs, des actes notariés et des jugements définitifs en matière foncière [...] ».

Ainsi en est-il de la constitution et de l'organisation des principaux services de la délégation départementale en charge de la chose foncière dans le ressort territorial du département. Mais il faut encore analyser l'organisation et le fonctionnement d'autres services déconcentrés du MINDAF, à savoir la Délégation Provinciale des Domaines et des Affaires Foncières, qui  à priori, semble avoir le même système de fonctionnement de la délégation départementale.

B - La Délégation provinciale des domaines et des affaires foncières

Conformément aux dispositions des articles 92 à 99 du décret n°2005/178, les délégations provinciales des domaines et des affaires foncières constituent l'un des services déconcentres du MINDAF. La délégation provinciale fonctionne à travers les services qui lui sont rattachés, et a, à sa tête, un délégué provincial, arbitre et chef de cette structure. La délégation provinciale a pour rôle la coordination des activités tant au niveau provincial qu'au niveau départemental, d'arrondissement et de district.

Subdivisée en services, avec chacun, sa part et sa sphère de compétence, la délégation comprend :

· un service des recettes chargé principalement du recouvrement des créances et dettes émises à l'occasion des opérations foncières, domaniales, cadastrales et autres ;45(*)

· un service du patrimoine, chargé pour l'essentiel du contrôle, de la conservation, de la gestion et de la restauration des bâtiments constitutifs du patrimoine national de la communauté46(*) et des biens de l'Etat.

· un service administratif et financier, chargé comme son nom l'indique, des opérations ayant un aspect administratif, c'est-à-dire liées à la direction, la gestion des affaires publiques du service; et un aspect financier, notamment la préparation et l'exécution du budget.

· un service du courrier,

· des services du domaine, des affaires foncière et cadastrale dont il est loisible d'examiner de manière détaillée. S'agissant du service provincial des domaines, coiffée à sa tête par un chef de service, il a pour mission principale la gestion des domaines privé et public de l'Etat ; le suivi et la conduite des opérations d'expropriation pour cause d'utilité publique, de la gestion du domaine national dans sa deuxième dépendance et bien d'autres.

En ce qui concerne le service provincial des affaires foncières, son mode d'organisation est similaire à celui du service des domaines précédemment étudié. Il est chargé, pour sa part, des procédures de gestion du domaine national de la première dépendance, c'est-à-dire des terres occupées ou exploitées ; ainsi que du contrôle des procédures instruites par les commissions consultatives pendant la procédure d'obtention du titre foncier. Ce contrôle se traduit par l'apposition du visa, indiquant que les procédures ont été conformes et régulières. Mais encore, le service des Affaires Foncières intervient dans la préparation des avis de clôture de bornage et egalement, dans les formalités de publicité et de publication des opérations foncières.

Quant au service provincial du cadastre, il est énoncé par l'article 98 du même décret ; cette structure a pour rôle: «  le contrôle et le visa des plans et procès verbaux de délimitation de bornage » car comme on l'a susmentionné, le cadastre est la structure technique qui élabore les plans de délimitation des terrains et des propriétés. Il intervient aussi dans le suivi et l'établissement des registres cadastraux, la délivrance des extraits des documents cadastraux à l'instar des plans de localisation des terrains.

D'une manière générale, le service provincial cadastral a pour principale mission l'identification, la détermination des espaces terrestres et l'élaboration de plans de localisation, tant dans le ressort de la province, que dans le contrôle et la coordination de ces activités dans les départements, arrondissements ou districts.

En définitive, pour conclure ce chapitre sur la particularité de la faute administrative en matière foncière, il convient de rappeler le fil d'Ariane conducteur de notre réflexion. Il a été question de montrer la singularité de cette faute à travers ses caractéristiques et les personnes administratives impliquées dans la commission de cette faute.

La faute administrative devrait être alors une faute de service commise par l'un quelconque des agents ou fonctionnaires de l'administration. Certes, on a pu relever que cette exigence n'est plus rigoureuse au vu des imbrications de la vie privée et du service en la personne de l'agent, mais tout moins, c'est la constance à établir. Parce que la propriété immobilière doit être protégée des piétinements administratifs, la faute personnelle de l'agent, ou des services pourra ainsi être réparée par le juge.

CHAPITRE 2 : LES MANIFESTATIONS DE LA FAUTE EN MATIERE FONCIERE

Le foncier de manière générale, s'entend comme le droit de la terre ou les droits sur les terres. Il s'agit donc des règles qui harmonisent les procédures relatives à la propriété immobilière des personnes physique ou morale, à l'exclusion de l'Etat et des collectivités publiques, qui eux sont régies par les règles domaniales. Si l'intervention et le rôle de l'Etat ne sont plus à démontrer, cependant, il ne fait aucun doute que cette gestion peut être lacunaire, au même titre que l'action de l'homme, car l'administration est une entité abstraite qui ne vit que par l'intermédiaire des personnes physiques ou morales. Après avoir analysé plus haut, la particularité de la faute administrative en terme de reconnaissance des caractéristiques inhérentes de cette faute, il sied dans le même souci d'identification de la faute administrative, de relever les manifestations de ces fautes, c'est-à-dire l'expression concrète des manquements administratifs qui portent atteinte à la propriété immobilière des individus. Il est question pour nous de faire de la casuistique pour mieux rendre compte des dysfonctionnements observés pendant les principales procédures inhérentes à la propriété immobilière notamment pendant l'acquisition (section 1). Une fois acquise, la terre devient une propriété, et constitue un bien, faisant partie du patrimoine d'un individu. Par conséquent, elle est susceptible de rentrer dans le commerce, d'être aliénée, et changer ainsi de propriétaire. Il paraît donc important de relever les hypothèses de cession qui fait intervenir les organes administratifs, et par conséquent, les fautes par eux commises (section2).

Section 1 : La faute commise pendant l'acquisition de la propriété immobilière

L'objectif principal dans ce registre, est de déceler non pas entièrement, mais au cas par cas, les potentiels et différents incidents qui surviennent pendant les phases d'acquisition de la propriété foncière, et causés par les services de l'administration foncière. Au Cameroun, aux termes de l'article 1 alinéa 1 du décret n°76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, « le titre foncier est la certification officielle de la propriété immobilière », c'est la preuve unique du droit de propriété sur l'ensemble du territoire camerounais. Mais encore faut-il savoir, quelles terres sont susceptibles d'appropriation et quels sont les modes d'obtention du titre foncier.

Conformément à la législation camerounaise, seules les terres du domaine national entendu comme, l'ensemble des terres qui n'ont fait l'objet d'une appropriation ni au profit des individus, ni au bénéfice des personnes morales de droit public, ou qui ne font pas partie du domaine public ou du domaine privé de l'Etat47(*). De manière laconique, le domaine national est l'ensemble des terres camerounaises non encore immatriculées, seules les terres appartenant à cette catégorie peuvent être acquises par les particuliers, personnes physiques ou morales. S'agissant des terres faisant déjà l'objet d'un droit de propriété, il s'agit en fait de parcelles de terrains immatriculés au bénéfice de personnes privées. Cette catégorie de terres conformément à l'alinéa 2 de l'article 14 ne font pas partie du domaine national48(*).

Il apparaît nécessaire à cet effet, d'analyser les fautes administratives commises au cours de ces procédures, à savoir, pendant l'immatriculation des terres de la première dépendance (§1), et de la deuxième dépendance du domaine national (§ 2).

§1 : L'immatriculation des terres de la première dépendance du domaine national.

En droit foncier camerounais, la procédure d'immatriculation directe est le mode principal d'acquisition des terres de la première dépendance du domaine national. Ces terres sont classées en : « terrains d'habitation, terres de culture, de plantation, de pâturage et de parcours dont l'occupation traduit par une emprise évidente de l'homme sur la terre et une mise en valeur probante »49(*) . A tout prendre, il s'agit d'analyser les fautes commises lors des procédures en vue de l'obtention du titre foncier (A) et pendant l'établissement du titre foncier (B).

A- Les dysfonctionnements des services administratifs au cours des phases préalables à l'immatriculation.

La procédure d'obtention du titre foncier, et donc d'immatriculation des terres de la première dépendance, notamment les terres occupées ou exploitées se réalisent à travers différentes étapes. C'est au cours de ces différentes phases préalables à l'établissement du titre foncier que des fautes  peuvent être commises.

Suivant les dispositions du décret 76|165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et complété par le décret n°2005|431 du 16 Décembre 2005, toute personne physique ou morale de nationalité camerounaise réunissant et remplissant les conditions, est autorisée à solliciter l'obtention du titre foncier en constituant un dossier administratif, qui révèle son identité et la description de l'immeuble à immatriculer. Ainsi, on peut lire à l'article 11du décret n°2005/481 que « toute personne habilitée à solliciter l'obtention du titre foncier sur une dépendance du domaine national doit constituer un dossier comprenant :

- une demande en quatre (4) exemplaires dont l'original est timbrée, indiquant ses noms et prénoms, sa filiation [....]

- la description de l'immeuble (situation, superficie, nature de l'occupation ou de l'exploitation estimation de sa valeur, indication des charges qui le grève ».

De la sorte, une fois le dossier constitué, il est « déposé auprès du Chef du district ou du Sous-préfet du lieu de situation de l'immeuble », dispose l'article 12 du même texte. Et dès réception du dossier, et dans les soixante douze (72) jours, le Sous-préfet du lieu de situation de l'immeuble « délivre sans aucune formalité préalable un récépissé à l'adresse y indiqué, puis le transmet dans les huit (8) jours à la délégation départementale des affaires foncières ». A la lecture de cet article, on voit apparaître la première intervention des autorités administratives dans la chaîne foncière. Obligations sont donc faites, soit au sous-préfet, soit au chef de district, cela dépendra de la circonscription administrative de localisation du terrain. Comme obligation, on a l'exigence de recevoir le dossier et délivrer un récépissé, puis le transmettre à la délégation et ceci, sous respect de certains délais. De ce fait, le Sous-préfet qui refuse de recevoir le dossier d'une personne remplissant les conditions requises à l'article 11 suscité commet une faute. De même, la non transmission du dossier aux autres services concernés pour suite de procédure révèle la faute du Sous-préfet. Mais encore, le non respect des délais et les lenteurs dans la réception, délivrance, ou transmission du dossier sont constitutifs de faute administrative. L'on ne saurait omettre l'immixtion d'un Sous-préfet ou d'un chef de district territorialement incompétent dans la procédure. L'autorité administrative qui reçoit et transmet le dossier, doit donc s'assurer de sa compétence territoriale, car l'incompétence en droit administratif est l'une des causes du contentieux de l'excès de pouvoir qui entache l'action administrative. Mais encore, et c'est le plus grave, il peut arriver que l'administration reçoive de fausses pièces de dossier ou même fasse fabriquer des pièces pour le dossier, étant ainsi de connivence avec le requérant de mauvaise foi. Ce fut le cas dans l'affaire Bilounga Pascaline contre Etat du cameroun.50(*)

En outre, après réception et transmission du dossier par le Sous-préfet et ou le Chef de district, le Délégué départemental des affaires foncières fait publier un extrait de la demande afin que nul n'en ignore51(*). Il lui est donc fait obligation d'information de la demande d'immatriculation. De ce fait, le Délégué départemental qui omet la publication d'une demande commet une faute car la publication a pour but d'informer le public afin que la procédure d'immatriculation se fasse au grand jour, sans contradictions ou oppositions postérieures qui entachent la régularité du titre foncier.

Par la suite,  « sur proposition du chef de service départemental des affaires foncières, le Sous-préfet ou le Chef de district territorialement compétent, [....] fixe par décision, la date de constat d'occupation ou d'exploitation ». Le constat d'occupation ou d'exploitation du terrain est la phase par laquelle la commission consultative vérifie que le terrain à immatriculer a été exploité ou occupé par le demandeur, et ceci avant la date du 05 août 1974. La mise en valeur confère alors qualité et aptitude au demandeur à l'immatriculation. Aussi, au cours de la descente de la commission pour vérifier la mise en valeur, plusieurs fautes peuvent survenir. C'est notamment la constitution illégale de la commission consultative en violation de l'article 12 du décret 76/166, comme ce fut le cas dans les affaires BEYISSA Adolphe Mazarin contre Etat du Cameroun (MINUH) et Succession NDONGO NTSAMA Bonaventure contre Etat du Cameroun (MINUH) dans lesquelles était remise en cause la participation active et frauduleuse de fonctionnaires territorialement incompétents notamment celle des géomètres. 52(*)

Une fois, la commission consultative formée, il peut même arriver qu'elle ne descende pas sur le terrain pour effectuer le constat de mise en valeur rendant par là la procédure d'immatriculation impossible.

D'autre part, lorsque la commission descend sur le terrain « en cas d'occupation et d'exploitation effective, (elle) fait immédiatement procéder au bornage de l'immeuble par un géomètre assermenté, en présence des riverains »53(*). De ce fait, l'absence des riverains à l'opération de bornage entache la validité de l'opération, car l'exigence de la présence des riverains est une formalité substantielle54(*) et l'absence d'un seul peut entraîner la nullité de l'avis de la commission consultative qui, en cas de contestation doit entendre les témoins et statuer en toute impartialité.55(*)

De même, le fait pour la commission de n'entendre qu'une partie, violant ainsi le principe du contradictoire est constitutif de faute administrative. La Chambre Administrative condamna un tel manque d'impartialité dans l'affaire NJOH Philibert et KOUKA KOUM57(*).

Il en est aussi le cas, lorsque la commission refuse de tenir compte des oppositions soulevées au cours de la procédure, et par conséquent ne motive pas ses décisions de rejet d'opposition58(*). Les conséquences logiques de cette partialité de la commission sont que, les procès verbaux établis seront déclarés complaisants. Dans la célèbre affaire POHOKAM Suzanne contre Etat du Cameroun, la Chambre Administrative sanctionne la négligence commise par l'administration en ces termes : « Attendu que non seulement dans le procès verbal de la commission consultative qui a servi de base à la décision attaquée, ni les personnes entendues, ni les conclusions de la commission ne se préoccupent de rechercher ceux qui occupent ou exploitent le domaine litigieux , conformément aux exigences de la loi, mais encore la décision du Ministre de Urbanisme et de l'Habitat allègue de « la simple mise en valeur » sans qu'il soit démontré que cette expression équivaille à l'occupation ou à l'exploitation. Autrement dit, l'administration n'a pas donné aux faits, la qualification juridique requise par la loi »59(*).

Il convient également de relever que les principales oppositions faites pendant la procédure sont relatives à la contestation des mises en valeur effectuées par le demandeur à l'immatriculation. En effet, la mise en valeur de l'immeuble dont l'immatriculation est demandée, doit être l'oeuvre du requérrant et non celle d'un tiers60(*). Cette mise en valeur doit être effective et matérialisée par des cultures, constructions, plantations et autres ouvrages. En outre, cette occupation ou exploitation doit être paisible, continue, utile non équivoque et antérieure à la date du 05 août 1974, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance 74/1 du 06 juillet 197461(*).

Une fois que les oppositions ont été levées et le constat d'occupation effectué, il est effectué le bornage de l'immeuble par un géomètre assermentée du cadastre, et selon les termes de l'alinéa 8 de l'article 13 du décret de 2005 « a peine de nullité, aucun bornage d'immatriculation ne peut être effectué par le géomètre seul-». Il est important de le noter, l'opération de bornage permet de déterminer les limites du terrain, de calculer les dimensions afin de dresser un plan de l'immeuble. Mais il est surprenant de constater que pendant le bornage du terrain, en présence des membres de la commission, l'administration fait immatriculer au profit d'un demandeur une superficie supérieure à celle qu'il avait demandée soit par empiétement sur l'immeuble d'autrui62(*), soit par violation des parcelles relevant du domaine public de l'Etat, or l'on sait que les domaines public et privé de l'Etat sont insusceptibles d'appropriation privée. En plus, il est encore plus scandaleux d'assister au double bornage d'un même terrain. Ainsi dans l'affaire Noumsi Jean Bosco, la faute de l'administration consistait au fait pour celle-ci de « borner deux fois les mêmes terrains en violation du principe « bornage sur bornage  ne vaut» à savoir le bornage du 26 avril 1984 sur la demande du sieur NOUMSI déposée le 04 Décembre 1981 et le bornage du 11 septembre 1989 suite à la demande d'immatriculation de veuve Chache déposée seulement le 13 avril 1989 [...]»63(*).

Il peut arriver aussi que le bornage soit effectué par un géomètre non assermenté du cadastre ; la Chambre Administrative de la Cour Suprême est souvent saisie des recours en contestation de la qualité du géomètre ayant effectué le bornage d'un terrain.

A la clôture du bornage qui constitue la fin du constat d'occupation ou d'exploitation, passé les délais réglementaires, le Délégué départemental des affaires foncières transmet au Délégué provincial, le dossier complet pour vérification, contrôle, publication et visa du dossier et suite de la procédure. L'obligation de diligence faite à ces autorités est déterminante, car en droit administratif, les délais sont de rigueur. L'absence de publication dans le bulletin des avis domaniaux est une inaction fautive ; à la fin de ces différentes formalités le dossier est acheminé auprès du conservateur foncier pour l'établissement du titre foncier.

B - Les dysfonctionnements liés aux formalités d'établissement et de délivrance du titre foncier

Il est question à ce niveau, de relever les manquements et forfaits administratifs accomplis durant l'établissement et la délivrance du titre de propriété. En effet, si les formalités préalables à l'obtention du titre foncier ont pour but de régler tous les litiges relatifs à la qualité du requérant et à l'étendue du terrain, il est nécessaire que ces litiges aient été résolus pour garantir l'intangibilité, l'inattaquabilité et le caractère définitif du titre foncier après son établissement. Il appartient donc au conservateur foncier, de faire preuve de vigilance, avant tout établissement du titre foncier au vu des conséquences lourdes et définitives qu'il emporte. Il s'agit alors d'analyser la nature de la faute du conservateur (1). Parce que c'est lui le gardien et dépositaire des registres et livrets fonciers, il a l'obligation d'y apporter des soins tel un « bon père de famille », et veiller à la communication des informations relatives aux oppositions formées et droits inscrits dans ces registres. Egalement, il doit veiller à la régularité des transformations des divers actes en titres fonciers. Il serait dès lors judicieux d'analyser la panoplie de fautes commises par le conservateur foncier en violation de ses obligations (2).

1- La nature des manquements du conservateur foncier

Dans ce registre, figure tout fait, tout acte, toute abstention du conservateur ne constituant pas des fautes ; il existe des critères distinctifs de la simple erreur, d'omissions et de la faute en terme d'irrégularités profondes. De la sorte, avant d'envisager l'expression de la faute, il est important d'opérer un tri.

A cet effet, à la lecture de l'article 39 du décret n°2005/481, il est énoncé de manière précise que, certains faits sont insusceptibles de rentrer dans la catégorie de fautes. Il en est ainsi des omissions, erreurs, imprudences, simples faits commis par le conservateur dans le titre de propriété, ou des inscriptions qui peuvent être rectifiées ou corrigées.

De façon identique, les irrégularités provenant de son propre fait, ou du fait d'autrui notamment, de ses collaborateurs ou de ses prédécesseurs, dans les documents et registres sous leur responsabilité, le conservateur peut les rectifier, à la condition qu'elles n'aient pas d'incidence sur les droits des tiers. Auquel cas, il devra demander autorisation au Premier Ministre et approbation du Président de la République. S'il agit en méconnaissance de ces prescriptions, il commet alors une faute susceptible de mettre en oeuvre sa responsabilité.

2- Les faits susceptibles d'être considérés comme fautes du conservateur.

Déduction faite de l'alinéa 3 de l'article 2 du décret n°2005/481, la faute administrative s'analyserait comme : « toute irrégularité commise au cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des authentiques produits [...] ». Ainsi, le conservateur foncier, en tant que garant de la conformité des pièces versées au dossier, peut voir sa responsabilité établie, lorsqu'il accepte des fausses pièces, et procède à l'établissement du titre foncier ; mêmement, en cas de disparition ou de substitution des pièces du dossier déposé auprès de ses services.

Par ailleurs, conformément aux dispositions de l'article 31 du décret de 2005, « avant de procéder à toute transformation des actes en titre foncier, le conservateur doit vérifier sous sa responsabilité, les pièces déposées et s'assurer en outre :

- de l'identité et de la capacité des parties ;

- de la disponibilité de l'immeuble. »

Il s'agit en fait des hypothèses d'obtention de titres fonciers par transformation de divers actes matérialisant l'emprise et l'occupation des terres avant la mise en place du système de l'immatriculation, ou pour des situations légales ayant acquis des effets définitifs, et permettant aux individus d'avoir des droits sur les terres.64(*)

De manière laconique, le constat tiré est celui suivant lequel, lors de l'établissement ou la délivrance du titre foncier, le conservateur foncier fait preuve de manquement lorsqu'il ne procède pas aux vérification et contrôle obligatoires. Ce fut le cas dans l'affaire Chambre de Commerce contre Etat du Cameroun et succession Paul Monthe dans laquelle le jugement rendu énonce : « attendu qu'il résulte de ce texte que l'administration a commis des fautes dans la délivrance du titre foncier litigieux, notamment le fait de l'avoir délivré à une personne décédée depuis 10 ans... »65(*) Dans cette perspective, et dans une autre espèce relative à la transformation d'un jugement définitif en titre foncier, le conservateur foncier avait agit en marge de la réglementation en vigueur. En effet, dans l'affaire du Canton Bassa à Douala, deux titres fonciers ont été successivement délivrés à un même individu, le sieur Matip benjamin en application d'un vieil arrêt de la Cour d'appel du littoral, en date du 23 juin 1968 reconnaissant à l'intéressé des droits sur un terrain situé à Matom à Douala. Le premier titre foncier établi le 06 septembre 2005 porte sur une superficie de 346 ha ; le second porte quant à lui, sur une superficie de 651 ; ces deux titres fonciers ont été irrégulièrement délivrés car la transformation était invalide. Pour que la transformation d'un jugement en titre foncier soit valide, elle doit être effectuée non seulement dans des délais précis, mieux encore, elle devrait obéir à des modalités précises. Pour ce qui est des délais, la demande de transformation doit être introduite dans un délai de 10 ans à compter du 05 août 1974 pour les terrains situés en zone urbaine, et de 15 ans pour les terrains en zone rurale. Le non respect desdits délais emporte déchéance de toute demande. La transformation opérée dans cette cause a été faite le 20 juin 2007, soit près de 33 ans passés les délais. Quant aux modalités de la transformation, il est clairement affirmé à l'article 5 du décret n°76/165, modifié et complété par le décret de 2005 que : « si l'immeuble n'est pas borné, le conservateur requiert son bornage au frais du propriétaire. Le bornage est effectué en présence des voisins, par un géomètre assermenté du cadastre ». Cette formalité substantielle permet de délimiter le terrain à immatriculer afin qu'il n'y ait pas empiétement sur le terrain d'autrui ; or en l'espèce, il y'a eu grossissement dans les parcelles à immatriculer ; en conséquence, la transformation qui a abouti à l'établissement des titres fonciers était forcément irrégulière.

S'il est ainsi montré les nombreuses irrégularités administratives qui entourent et entachent les opérations d'acquisition ou d'obtention des parcelles de la première dépendance du domaine national, c'est-à-dire les terres occupées ou exploitées, il reste encore à analyser celles qui entourent les opérations d'acquisition des terres de la deuxième dépendance, c'est-à-dire, les terres libres de toute occupation (§2).

§ 2 : La faute administrative lors de l'acquisition des terres libres de toute occupation effective

L'appropriation des parcelles de terrain de la deuxième dépendance du domaine national, entendue comme les terres libres de toute occupation effective, est réglementée par le décret 76-166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine national. Aux termes de l'article premier de ce texte, « les dépendances non occupées ou non exploitées du domaine national sont attribuées par voie de concession provisoire ». La concession consiste alors « en un octroi en jouissance au profit du concessionnaire, assorti d'une promesse de vente sous condition suspensive de la réalisation de la mise en valeur dans un délai déterminé ».66(*)

De même les alinéa 3 et 4 de l'article 11 du décret N°2005/481 du 16 décembre 2005 disposent que :

 « al.3 : les demandes portant sur les terres libre de toute occupation ou de toute exploitation sont irrecevables. Elles son instruites selon la procédure de concession.

al.4 : suivent également la procédure de concession, les demandes portant sur des mises en valeur réalisées après le 05 août 1974[...] ». Il s'agit d'un contrat par lequel l'Etat autorise soit une personne privée, soit une personne morale,67(*) moyennant la réalisation d'un projet précis, et dans un délai déterminé, l'occupation ou l'exploitation de parcelles de terres libres relevant de la deuxième dépendance du domaine national. Au terme de ce délai, la concession provisoire peut être transformée soit en bail, soit en concession définitive qui opère transfert de propriété et donne droit à l'obtention du titre foncier. Parce que la concession est une procédure qui est conduite en deux phases, il s'agira d'étudier tour à tour les fautes commises au stade de la concession provisoire (A), et dans la concession définitive (B).

A- Les dysfonctionnements administratifs au cours de l'octroi des concessions provisoires

La concession provisoire est un contrat particulier qui lie le concessionnaire personne privée à l'administration, personne publique. Ce contrat est entouré d'un formalisme qui entoure tant la qualité de concessionnaire, que la durée de la concession, et même les obligations afférentes au concessionnaire. Dans un souci de mieux rendre compte la procédure, il sied avant que d'énumérer les différentes fautes commises par l'administration (2), d'exposer sommairement le formalisme procédural qui entoure cette transaction immobilière (1).

1- Le formalisme procédural relatif à la concession provisoire

Comme il a été susmentionné, la concession provisoire est une procédure assez complexe. A la différence de l'immatriculation directe, elle obéit à des règles particulières. Ainsi, toute personne physique ou morale qui désire mettre en valeur une dépendance du domaine national libre de toute occupation ou exploitation constitue une demande en trois exemplaires sur des formulaires spéciaux qu'elle adresse au service départemental du lieu de situation de l'immeuble. En plus de l'indication de son identité, son statut matrimonial, et toutes les informations à caractère privé permettant de l'identifier, le demandeur en concession doit aussi fournir des informations sur le terrain sollicité, notamment, un croquis détaillé et le programme de mise en valeur faisant ressortir les différentes étapes qu'il réalisera. S'agissant de la mise en valeur du terrain concerné, objectif essentiel du contrat de concession, le demandeur doit démontrer de manière suffisante la crédibilité de son projet qui devra se concrétiser plus tard par une occupation ou exploitation effective, et la conformité au cahier de charges tenu par la commission chargée d'examiner et d'émettre un avis sur le projet. En effet, c'est à la commission consultative qu'il appartient de mener à bien la procédure, par l'émission d'avis, d'observation et de recommandation, en plus de l'examen le cas échéant des litiges survenus et le constat de la mise en valeur.

De ce fait, dès que la demande est adressée au service départemental des domaines du lieu de situation de l'immeuble, objet de la concession, ce service après délivrance d'un récépissé au requérant, et recueillement des avis utiles des différents services techniques administratifs concernés par le projet, transmet le dossier à la commission consultative sous la diligence du Préfet. Le dossier instruit est alors transmis par les soins du Préfet aux services du Ministre en charge des affaires foncières conformément aux articles 1 alinéa 2, 31 et 32 du décret n°2005/178 du 27 mai portant organisation du Ministère des Domaines et des Affaires Foncières68(*), soit aux services de la Présidence de la République pour ce qui est des concessions des terrains de plus de 50 hectares.

L'envoi en jouissance des terrains au titre de concession provisoire prend naturellement fin à l'expiration du délai et se matérialise soit par la concession définitive , soit par un échec, et ceci lorsqu'on est en présence d'incidents divers, à l'instar du non respect des obligations imposées au concessionnaire dans le cahier de charges, par l'abandon volontaire-la concession étant un contrat- et s'il advient que l'une des parties désiste, le contrat prend fin, par suite du décès du bénéficiaire ou par l'aliénation frauduleuse du terrain sans l'autorisation de l'autorité concédante.

Tout ceci pour dire que la concession provisoire est une opération assez complexe qui prend forme et s'achève dans le respect des règles bien définies. Après avoir sommairement étudié ces règles, il sied alors d'analyser les différentes fautes susceptibles d'être commises au cours de cette procédure.

2- Les irrégularités commises par le concédant administratif

Elles sont diverses et ne peuvent pas être énumérées de manière exhaustive. Tout au moins, l'on peut relever à ce titre l'attribution d'un terrain déjà immatriculé en concession. Il est en effet paradoxal que des terrains faisant l'objet de titres fonciers soient octroyés en concession provisoire ou définitive. La concession ne concerne que les terres libres de toute occupation, et donc constituant la deuxième dépendance du domaine national, tandis que l'immatriculation directe concerne les terres occupées ou exploitées, et ceci après constat de mise en valeur effective. Ce fut le cas dans l'affaire OUAFFO contre BELINGA KYE,69(*) qui illustrera notre argumentaire.

Dans cette espèce, le sieur OUAFFO propriétaire terrien , s'opposait en l'envoi en concession de son terrain qu'il occupait, au profit sieur BELINGA KYE par décision ministérielle n°195/YOB/MINUH/D113 du 23 avril 1998. La Chambre Administrative décide à bon droit que «  le terrain litigieux qui était licitement occupé par le sieur OUAFFO ne pouvait plus faire l'objet d'une concession au profit de sieur BELINGA KYE ».

Il en est de même dans l'affaire BONGO Henri Aimé contre Etat du Cameroun (MINDAF) dans laquelle un terrain, bien d'une succession, donc, bien indivis a été curieusement immatriculé par voie de concession alors que le partage successoral n'était pas encore fait, et surtout en violation des articles 11 et suivants du décret 76/165, et l'article 1 du décret n°76/166 du 27 avril 1976 qui disposent que la concession ne concerne que les terrains libres de toute occupation.70(*)

En outre, on peut assister à des situations inverses, où des terrains déjà attribués en concession provisoire ou définitive, réussissent encore à faire l'objet d'une immatriculation. Ce fut le cas dans la célèbre affaire « Gare routière de Kousseri » dans laquelle un individu a réussi avec l'aide d'autorités administratives, à faire immatriculer des terres faisant déjà l'objet de concession définitive71(*).

Comment comprendre le rôle de la commission consultative chargée de conduire les opérations d'attribution de concession, de même que les services des concessions qui parviennent à faire attribuer des terrains déjà appropriés en concession provisoire ! Il s'agit à ne point douter de la négligence, du laxisme et même de la fraude des services administratifs en complicité avec les bénéficiaires non qualifiés. Ce fut le cas dans l'affaire EKEME Henri contre Epoux FENGYEP72(*).

Par ailleurs, la faute administrative s'observe au niveau de la compétence de l'autorité concédante. En effet, on l'a sus évoqué, l'attribution des concessions provisoires varie en fonction de l'étendue du terrain, et est ainsi liée à l'autorité concédante. Il est alors curieux de constater l'attribution de concession de plus de 50 hectares par arrêté ministériel en violation de l'article 8 du décret 76/166. Ce fut le cas dans l'affaire « Cameron Agricultural farmer association » contre le canton Bakoko du Wouri. Dans cette espèce, le MINUH a ordonné l'immatriculation de plus de 2000 hectares de terrain au profit des communautés Japoma, Mbanga, Yassa, Ngodi, Yatchiba, Gwang et Yansoki constituant tout le canton Bakoko, et ceci, suivant les lettres N°1447/Y.16.3/MINUH/D220/A du 09 avril 1992 et N°4998/Y.12/MINUH/D220/A du 06 novembre 1992, l'incompétence du Ministre étant manifeste, pour avoir agi en lieu et place du Président de la République, qui est seul habilité par décret, à attribuer les concessions de plus de 50 hectares, conformément à l'article 7 du décret 76/166 aux termes duquel : « les concessions de moins 50 hectares sont attribuées par arrêté ministériel du ministre en charge des domaines celles de plus de 50 hectares par décret présidentiel »73(*)

B - Les fautes issues de l'attribution des concessions définitives

La concession définitive est l'aboutissement normal de la concession provisoire. Il s'agit au fond de la transformation de la concession provisoire en concession définitive qui opère envoi en propriété du terrain concédé au bénéficiaire de l'opération, conformément à l'article 2 de l'ordonnance 74-1. du 06 juillet 1974.

1- Les données préalables à la transformation.

Avant toute transformation, la commission consultative qui a émit l'avis favorable d'attribution de concession provisoire, doit procéder à des opérations de vérification du respect des obligations contenues dans le cahier de charges. A l'expiration du délai normal de concession provisoire qui est de cinq ans, la commission doit statuer avant toute transformation, sur le respect des obligations imposées au concessionnaire ; de même, la vérification de la qualité du concessionnaire, car, ce dernier peut vendre frauduleusement le terrain à l'insu des autorités ou même il peut arriver que le concessionnaire soit décédé.

Ce n'est qu'après vérification et contrôle du constat de mise en valeur qui se traduit par la réalisation du projet envisagé que la commission peut établir un procès verbal adressé au Préfet dans lequel elle propose :

· soit la prorogation de la durée de la concession, si la mise en valeur n'a pas été totalement réalisée,

· soit l'attribution définitive, si le cahier de charges a été respecté par le concessionnaire ;

· soit la déchéance, s'il est arrivé des incidents au cours de la concession provisoire notamment : l'abandon ou le désistement volontaire, le décès du concessionnaire, ceci lorsque l'héritier n'aura pas demandé le transfert des droits, ou même la faillite de la personne morale  et l'aliénation frauduleuse de terrain par le concessionnaire.

· Soit l'octroi d'un bail emphytéotique, pour les étrangers ayant mis le terrain en valeur. Le bail emphytéotique est un bail de longue durée, pouvant atteindre 99 ans, portant sur un immeuble et conférant au preneur un droit réel, il s'agit en fait d'un droit de location compris dans la fourchette 18 à 99 ans.

2 - Les manquements administratifs constatés

Comme il a été sus indiqué, la transformation de la concession provisoire en concession définitive passe au préalable par le contrôle, et les vérifications avant toute transformation. Il apparaît alors difficilement concevable que certaines irrégularités soient commises ; mais il n'en est pas toujours le cas. En effet, la faute administrative peut résider dans la qualité et l'aptitude du bénéficiaire de la concession définitive. Ainsi en est-il de l'attribution de concession définitive à un concessionnaire autre que celui qui a réalisé la mise en valeur, c'est l'hypothèse de l'octroi d'une concession à un non exploitant. Egalement, l'attribution de concession définitive à une personne morale ou physique de nationalité étrangère. Or, on sait que la personne de nationalité étrangère ne peut prétendre qu'au bail emphytéotique.

En outre, s'agissant de la mise en valeur du terrain concédé et partant du respect des obligations contenues dans le cahier de charges, il apparaît et ceci à notre grand désarroi que certaines personnes réussissent à se faire attribuer des terrains en concession définitive alors même qu'aucun constat n'a été opéré, et en cas de constat, en l'absence de réalisation effective du projet ayant fait l'objet de la concession74(*). Certains services déconcentrés du MINDAF en charge de l'attribution des concessions définitives ne font pas montre de sérieux, d'impartialité et préfèrent de ce fait sacrifier leur obligation de service au favoritisme, au népotisme, à l'enrichissement personnel et indu, bref, se livrer à la corruption, ce qui constitue des manquements graves. Ainsi, si par ces démonstrations, il ne fait plus aucun doute que des dysfonctionnements administratifs entachent les procédures d'acquisition des terres soit par immatriculation directe, soit par concession ; pour une appréhension efficiente de la matière, il serait intéressant d'envisager la défaillance de l'encadrement administratif dans les procédures de cession des terres car, comme on le sait, les immeubles constituent des biens susceptibles de transactions. Il s'agit alors d'analyser les fautes commises lors des opérations de transfert de propriété.

Section 2 : LA faute administrative commise lors de la cession de propriété

Analyser la faute administrative au cours des procédures de cession de propriété, revient à étudier les défaillances des autorités administratives lors transfert de propriété relatives aux parcelles de terrains déjà immatriculés. Il s'agit des hypothèses des terrains déjà appropriés, et pouvant faire l'objet, soit de transactions immobilières entre particuliers privés, soit de transactions avec l'Etat ; les premières ont trait aux cessions volontaires à titre gratuit ou onéreux entre propriétaires et acquéreurs (§1), et les secondes s'inscrivent dans une logique particulière de cession forcée, qu'est la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique. (§2)

§1 : La faute administrative lors des opérations de cession volontaire de propriété entre particuliers.

Il peut paraître paradoxal d'analyser dans ce registre la faute administrative car en fait ces opérations concernent des personnes privées, d'autant plus que les terres, objet de ces transactions sont la propriété privée immobilière des particuliers qui ont le droit d'en jouir, d'en user et d'en disposer de la manière la plus absolue ; toutefois, il n'en est rien, car l'Etat en tant que régulateur de la vie sociale, encadre certaines opérations notamment celles relatives à la propriété immobilière du fait de son importance capitale, ne dit-on pas « res mobilis, res vilis ».

Il est question à ce niveau, d'appréhender l'implication défaillante et fautive de l'administration, dans les opérations portant morcellement ou fusion, bref démembrement et donc mutation du titre foncier (B). Mais avant d'y arriver, il sied d'analyser le rôle particulier du notaire dans les opérations foncières (A) au vu de la complexité de son statut d'agent ou fonctionnaire de l'administration.

A - Le nécessaire implication du notaire dans les opérations de cessions foncières

En matière de transactions immobilières que sont les cessions d'immeubles, l'exigence de formalisme prévue par l'article 8 de l'ordonnance 74/1 du 06 Juillet 1974 est acquise. Aux termes de cet article « les actes constitutifs, translatifs ou extinctifs de droits réels immobiliers doivent à peine de nullité, être établis en la forme notariée. »

Il appartient au notaire seul, saisi par les parties, de dresser des actes de cession à titre gratuit, ou à titre onéreux de parcelles de terrains. Si la cession a été faite sous-seing privé, elle peut être validée par devant notaire. A défaut de cela, toute cession passée sous-seing privé sans intervention du notaire est annulée.75(*)

Prévue et organisée par le décret n°60/172 du 20 septembre 1960, modifié et complété par celui n°95/034 du 24 février 1995, la profession de notaire et le statut y afférent, sont définis en droit camerounais ; de même, les actes pris par ces notaires, sont régis par la loi de 1961, et interviennent dans des conditions précises en respect des formalités relatives à leur compétence.

Ce peut être la compétence territoriale ou ''ratione loci'', car le notaire n'agit que dans une sphère géographique bien déterminée. De ce fait, tout notaire qui outre passe son ressort territorial, et établit des actes translatifs de propriété, viole les dispositions légales et commet une faute.75(*) De même, conformément aux dispositions de l'article 23 du décret N°2005/481, seul    le notaire ayant établit l'acte de vente  est habilité à adresser au conservateur foncier du lieu de situation de l'immeuble, une demande pour mutation ou morcellement de la parcelle de terrain. Mais il peut arrivé que le notaire ayant établit l'acte de vente, soit distinct et différent, de celui qui adresse la demande de morcellement, ou de mutation au conservateur.

Par ailleurs, il est des cas où, le notaire, par affinité avec les requérants et le conservateur constitue, et fait établir des titres authentiques en l'absence de plan de l'immeuble, ou d'acte notarié servant de base, et de preuve de la vente ou même de cession à titre gratuit de l'immeuble.

A la suite de ces énumérations, il est plausible d'affirmer que, l'action fautive du notaire entache la régularité des actes, et peut porter atteinte aux droits des tiers. Ce formalisme rentre dans un souci de protéger les intérêts des parties par l'arbitrage d'une personne neutre à statut particulier, car en effet, le notaire n'appartient pas à la catégorie d'agent, de fonctionnaire ou d'autorité administrative76(*) proprement dite. Il reste alors à analyser les actions fautives des services administratifs intervenant dans le processus de cession d'immeuble.

B- La faute administrative en cas de démembrement d'immeuble

Les hypothèses de démembrement ou mutation sont relatives, soit à des opérations portant mutation de la totalité de la parcelle du terrain cédé, soit sur une portion seulement du terrain, soit sur opérations réalisent la fusion de terrains distincts mais contigus. Ces opérations peuvent résulter d'échanges, de cessions à titre onéreux ou gratuit, entre vifs ou, entre vifs et morts ; ici nous sommes dans les hypothèses de succession et de partage successoral. Dans tous les cas, le transfert de propriété résulte d'une cession de terrain par une personne au bénéfice d'une autre.

Après l'exigence de formalisme qui entoure la conclusion des actes relatifs à tout transfert de propriété, exigence liée au rôle et aux obligations du notaire, il est question d'envisager les fautes commises par l'administration lors du partage ou de la fusion des terrains. Selon l'article 37 nouveau du décret 2005, « si la délivrance du titre foncier est consécutive à une vente, le conservateur foncier doit, avant de demander le morcellement ou opérer la mutation ou la fusion, s'assurer que :

-la transformation a été effectuée dans le respect des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance No 74/1[...] ;

-L'immeuble est situé dans le rayon de sa compétence, et qu'il est celui visé dans l'acte translatif du droit ;

-Le plan annexé à l'acte a été dûment visé par le Chef du service départemental du cadastre du lieu de situation de l'immeuble ;

L'acte est régulier du point de vue de sa forme extérieure eu égard à la réglementation en matière d'enregistrement »

A la lecture de cet article assez explicite, on comprend que le conservateur foncier doit effectuer des opérations de contrôle et de vérification des actes et pièces déposés avant toute décision.

Il parait alors surprenant de constater que le morcellement d'un titre foncier soit effectué sans que le plan de bornage n'ait été accompli. En effet, aux termes de l'article 2 du décret de 1979, « à l'intérieur du périmètre urbain, un terrain ne peut faire l'objet de transaction par parcelle qu'après lotissement approuvé ». De la sorte, le terrain préalablement loti, fera l'objet d'un morcellement par les services du cadastre territorialement compétents, qui interviennent de manière gratuite, et établissent des procès verbaux, et des plans de bornage. En réalité, sur le terrain, on assiste à des spéculations foncières, au rançonnement des services cadastraux. Ce fut le cas dans la spectaculaire affaire Djine Daniel C/ Etat du Cameroun77(*)

Parce que la procédure de morcellement échappe aux formalités de publicité et aux procédures de tenue des palabres, il arrive que certaines incohérences s'infiltrent. Ainsi, dans les procès verbaux, on peut lire des noms des individus qui n'étaient même pas parties prenantes au contrat de cession. C'est le cas par exemple de l'administrateur d'une succession ou le tuteur d'un mineur qui parvient à faire inscrire son nom en lieu et place des personnes qu'il représente, et reussit à se faire délivrer des titres fonciers. Cela est dû à l'acceptation de réquisition d'immatriculation ou de mutation par le conservateur foncier, sans verification préalable, réquisitions qui émanent d'individus qui n'ont pas qualité pour prétendre à de telles transformations.

Il en est de même lorsque le conservateur foncier opère la mutation d'un titre foncier au profit d'un requérant alors même que la procédure d'opposition n'a pas eu lieu, et même si elle a eu lieu, lorsqu'elle n'est pas encore close ; ceci en contradiction avec les pièces déposées par le requérant qui n'établissent pas son droit de propriété, ou une quelconque revendication. Par ailleurs, lorsque le démembrement ou remembrement concerne la fusion d'immeubles et donc l'établissement d'un seul et même titre foncier, la loi exige comme condition, la contiguïté des immeubles c'est-à-dire, une proximité immédiate de ces immeubles. On assiste parfois malheureusement à la fusion d'immeubles éloignés, et cela pose problème, lorsqu'il faut dresser un plan de situation de l'immeuble.

En tout état de cause, les négligences, ou fautes commises par l'administration en charge de la question foncière, préjudicient aux intérêts des tiers ou entachent la régularité des actes établis, et pourront faire l'objet de contestation. Certes, dans ce registre, il s'agit généralement de fautes et fraudes commises par les requérants eux-mêmes qui sont le plus souvent de mauvaise foi et veulent aliéner leurs terrains à plusieurs personnes à la fois.

§2 : Les manquements administratifs au cours de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique

Selon l'article 544 du Code Civil, nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et ceci moyennant une juste et préalable indemnité. L'expropriation pour cause utilité publique constitue alors une atteinte au caractère absolu du droit de propriété et se définit comme « une opération administrative par laquelle l'Etat oblige un particulier à lui céder la propriété d'un immeuble dans un but d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnisation »78(*). Parce que l'expropriation est une « opération attentatoire à la propriété privée »79(*), elle est prévue aussi bien que par les textes nationaux qu'internationaux. En ce qui concerne les textes internationaux, il s'agit des articles 7 et 17 de la Déclaration des Droits de l'Homme de 1789, de l'article 1er du protocole additionnel de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.80(*) Pour ce qui est de la législation nationale, on relève dans le préambule de la constitution Camerounaise, certaines dispositions relatives à cette procédure, ainsi que certains textes spéciaux, notamment l'ordonnance 74/3 du 06 juillet 1974, modifiée et complétée par la loi n°85 - 09 du 04 juillet 1985 et le décret n°87/1873 du 16 décembre 1987. Cet important arsenal juridique n'empêche cependant pas des irrégularités dans la procédure d'expropriation et des atteintes graves au droit de propriété. Comme le déclarait fort opportunément un auteur, l'expropriation est « le domaine par excellence de l'illégalité, notamment du détournement de pouvoir, de l'incompétence et du vice de forme »81(*). Il s'agit en consequence, de rendre compte des fautes commises par l'administration tout aussi bien lors des formalités préalables à l'expropriation (A) qu'après le transfert de propriété (B).

A- Les fautes commises lors des formalités préalables à l'expropriation

L'expropriation est une procédure instruite en plusieurs phases préalables à la cession de propriété, notamment du déclenchement de la procédure, suivi par une enquête préalable.

1- L'illégalité de l'action administrative lors du déclenchement de la procédure

Aux termes de l'article 2 du décret n°87/1872 du 16 décembre 1987, la procédure d'expropriation est déclenchée à la demande de tout département ministériel ; elle est constituée d'un dossier préliminaire qui revèle de manière détaillée l'objet de l'opération, les terrains concernés et les moyens financiers prévus pour l'instruction de l'opération82(*).

Ledit dossier d'expropriation est déposé chez le Ministre chargé des domaines qui apprécie le bien fondé du projet, et prend un arrêté déclarant l'utilité publique. Seul le Ministre des domaines est compétent pour apprécier les dossiers d'expropriation. Il apparaît en conséquence que les expropriations à l'initiative des Préfets ou de toute autre autorité sont illégales. De même, le texte déclaratif d'utilité publique est un arrêté, ainsi, toute circulaire, instruction ou note de service déclarant d'utilité publique un projet n'obéissent pas aux formes, et sont constitutifs de vices de forme. Ainsi est- il paradoxal d'assister à des expropriations sur simple circulaire préfectorale. Cette exigence de formalisme s'inscrit dans une logique de protection du droit de propriété, car en effet, l'expropriation est une opération lourde de conséquence sur le patrimoine des personnes privées. Par ailleurs, un arrêté ministériel déclarant d'utilité publique un projet sans avoir au préalable vérifier la conformité et la régularité des pièces versées au dossier, constitue une action fautive de l'autorité administrative.

C'est sur la base de la régularité et de la conformité des pièces versées au dossier que découle la pertinence du projet, et par conséquent l'opportunité ou non de l'utilité publique. La déclaration d'utilité publique en elle-même, est lourde de conséquence d'autant plus qu'il n'existe aucune définition légale. Ainsi sur quelle base le Ministre appréciera-t-il l'utilité publique ou non d'un projet ? Il parait évident que cette déclaration peut servir de base à des desseins personnels, et comme le disait M. Tchientcheu Njiako, « l'expropriation est une occasion pour certaines personnalités du monde des affaires ou de la politique, d'acquérir à vil prix des parcelles de terres arrachées, au nom de l'intérêt général, à des paisibles citoyens pour une poignée de francs CFA d'indemnisation ».

Le constat clair qui résulte des affaires FOUDA MBALLA Maurice et ONO NGAFOR Albert, est celui selon lequel, l'expropriation est l'occasion des manifestations des abus administratifs. Dans la première espèce, le juge administratif déclare expressément que « sont d'utilité publique les opérations destinées aux besoins de l'ensemble de la population d'une collectivité territoriale ou tendant à réaliser un objet d'utilité publique ». Subséquemment la construction d'une cité, d'un club et d'un terrain de sport ne sert que l'intérêt de quelques particuliers et « dès lors, ces travaux ne présentent pas le caractère d'utilité générale pouvant justifier une déclaration d'utilité publique »83(*).

Dans la seconde espèce, l'Assemblée Plénière de la Cour Suprême déclare que, l'arrêté préfectoral pris à l'encontre du sieur Albert ONO NGAFOR, en démolition du collège dont il est propriétaire, est illégal, car il a été pris « pour donner satisfaction à un tiers, dans l'arbitrage d'un litige foncier au détriment du sieur ONO NGAFOR ; cet acte constituant un détournement de pouvoir »84(*).

2- La faute administrative au cours de l'enquête préalable

Les enquêtes préalables sont des recherches ordonnées par le Ministre des domaine par arrêté, et elles ont pour but d'informer la population et de s'informer sur l'opération ; elles sont menées par la commission de constat et d'évaluation, publiquement et contradictoirement, en présence des propriétaires des fonds concernés, des populations et des notabilités du lieu afin que toutes les prétentions, observations ou droits des tiers sur les immeubles à exproprier soient pris en compte. Cette exigence de publicité a pour objectif de délimiter le terrain, recueillir l'avis des personnes occupant ou exploitant le terrain, des propriétaires dudit terrain ; il s `agit de les identifier, de quantifier leur mise en valeur. De ce constat, toutes les enquêtes non publiques, obscures, sans publicité préalable, ou même l'absence d'enquête avant toute expropriation sont constitutives de faute.

En outre, selon M. Tchientcheu Njiako, on distingue deux types d'enquêtes, la première étant l'enquête préalable et la seconde, l'enquête parcellaire. L'enquête préalable a pour objet d'inventorier, non seulement les droits des propriétaires, mais aussi les droits de tout autre nature. En clair, elle permet d'identifier les personnes et victimes de l'expropriation à projeter. L'enquête parcellaire, pour sa part, intervient dans la détermination de la nature juridique du terrain ; elle permet d'évaluer le terrain, de le faire borner s'il ne l'est pas encore.

Si l'enquête préalable est relative aux personnes victimes de l'expropriation, on peut affirmer que l'enquête parcellaire concerne le terrain, objet de l'expropriation. En tout état de cause, ces enquêtes permettent de lever les équivoques et dresser l'état de lieux, afin que la procédure soit exempte de vices. Contrairement à ces exigences, l'administration se laisse aller à certains manquements, spécialement des sous-évaluations ou surélévations des biens, des omissions pures et simples, ou des ajouts fictifs des noms de propriétaires, des immixtions intempestives d'autorités incompétentes dans le but de favoriser des personnes qui leur sont proches comme dans l'affaire TESSA. Dans cette espèce, le sieur TESSA, commis d'administration au service départemental des domaines de Bamboutos, a au cours de la phase des enquêtes, et ceci dans le procès verbal identifiant les titulaires et propriétaires des terrains, inséré frauduleusement le nom de son père dans la liste des victimes de l'expropriation, pour lui faire allouer l'indemnisation85(*).

De ce qui précède, c'est une certitude que les irrégularités administratives entachent la procédure d'expropriation. Elles sont relatives à l'arrêté de déclaration, à l'opportunité ou non de l'utilité publique, et au déroulement de l'enquête préalable ou parcellaire. Il tient présentement de systématiser les dysfonctionnements administratifs, après le transfert de propriété (B).

B - Les dysfonctionnements administratifs à l'issue du transfert de propriété

L'expropriation pour cause d'utilité publique a pour but la dépossession d'un bien immeuble, et le transfert de propriété d'un patrimoine à un autre. La condition essentielle étant l'indemnisation juste et préalable, et la pertinence de l'utilité publique du projet. La faute administrative réside alors d'une part dans l'absence d'indemnisation (1) et d'autre part, dans la non utilisation des terrains expropriés constatant la caducité et l'obsolescence de cet arrêté d'utilité publique (2).

1 - L'absence d'indemnisation préalable

En principe, avant tout transfert de propriété entre le propriétaire du bien immeuble et le bénéficiaire de l'expropriation, il est fait exigence d'une indemnisation juste et préalable.

L'indemnisation juste est relative à la réparation intégrale et totale du préjudice subi par le propriétaire évincé. Ainsi doit-on prendre en compte lors de l'évaluation des mises en valeur ou des terrains nus, des données concrètes et essentielles qui permettent une meilleure réparation du préjudice subi par la victime.

En outre, prévue par l'alinéa 2 de l'article 4 de la loi 85/009 du 04 juillet 1985, l'indemnisation préalable signifie que le bénéficiaire de l'expropriation ne peut prendre possession d'un bien sans avoir au préalable payé l'indemnité à la victime ; certes la même loi met en place une dérogation à l'indemnisation préalable dans  certains cas  non énumérés. Dans tous les cas, l'indemnisation préalable est une condition de l'expropriation et non la conséquence car déjà, avant tout déclenchement de procédure, il est fait obligation à l'administration désireuse de l'expropriation de joindre dans le dossier de demande « une fiche dégageant les caractéristiques principales des équipements à réaliser et précisant notamment[...] la disponibilité des crédits d'indemnisation avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous autres moyens d'indemnisation ». Constitue une faute, l'absence d'indemnisation préalable par l'administration. Comment expliquer alors les nombreuses requêtes des victimes de l'expropriation non encore indemnisées. En effet, à défaut d'indemnisation préalable, et même parfois d'absence totale d'indemnisation qui constitue une atteinte au droit de propriété ; car l'indemnisation réalise en quelque sorte un rétablissement de l'équilibre dans le patrimoine de l'exproprié.

La faute réside dans la dépossession injuste, et l'absence de contrepartie particulièrement dans l'indemnité allouée. Dans l'opération d'expropriation, l'administration, et spécifiquement le département ministériel en charge des domaines et des affaires foncières est indexée au vu du rôle qu'elle joue dans les règlements des contestations faites par les expropriés.

Que l'expropriation soit à la demande de l'Etat, ou de toute personne morale de droit public, il appartient aux services centraux du MINDAF, ainsi qu'aux services déconcentrés de gérer et trancher les contestations relatives aux indemnités, tant dans leur montant que dans leur nature86(*).

La faute administrative réside également dans les irrégularités au cours des modalités d'indemnisation. « Le goût et l'odeur de l'argent » entraînent inéluctablement à des déviances administratives ; il faut le dire, fusse-t-il de manière aussi triviale, l'ajout de noms fictifs dans la liste des expropriés, l'insertion des personnes non encore nées, ou déjà décédées dans les procès verbaux aux fins d'allocation d'indemnité constituent à ne point douter, des forfaits administratifs.

2 - La non utilisation des terrains expropriés dans les délais

Cette non utilisation des biens immeubles expropriés, caractérise en conséquence l'inutilité et l'inopportunité de l'opération en contradiction même avec l'utilité projetée. Pourtant, il est requis pour les demandeurs à l'expropriation, des précisions détaillées des différentes phases de la procédure, afin de ne pas verser dans des opérations vaines, mais néanmoins, porteuses de conséquences graves sur le patrimoine des citoyens.

L'article 13 du décret de 1987 dispose que « l'arrêté de déclaration d'utilité publique devient caduque si, dans un délai de 2 (deux) ans à compter de la date de sa notification au service ou organisme bénéficiaire, il n'est pas suivi d'expropriation », l'expropriation doit être effective, c'est-à-dire, les terrains expropriés ont reçu la destination prévue. Par conséquent, passé ce délai, si l'expropriation a été effectuée, et le terrain cédé n'a pas reçu l'affectation destinée, il s'agit d'une expropriation abusive.

Par ailleurs, la question de la non utilisation dans les délais soulève l'épineux problème de la rétrocession de l'immeuble exproprié. En effet en droit français, le Code de l'expropriation, notamment en son article L12-6 prévoit expressément que « si les immeubles expropries n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue, ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans. Il s'agit en fait d'une cession à un prix nouveau, correspondant à la valeur du bien, au moment de sa restitution »87(*).

En droit camerounais, aucune disposition législative ne prévoit l'hypothèse de rétrocession. C'est à la jurisprudence notamment dans l'affaire Dame veuve ONGONO Régine88(*) que pour la première fois, l'hypothèse de rétrocession d'immeuble a été posée ; ce fut le cas également dans l'affaire DZOU ESSOMBA Charles.

Ce n'est qu'en 1995, que l'hypothèse d'une rétrocession administrative prononcée par le juge apparaît dans la célèbre affaire SOCIETE RENAULT du Cameroun.89(*) Dans l'espèce, le juge administratif déclare : « attendu qu'aux termes de l'article 13 du décret N°87/1872 du 16 Décembre 1987 portant application de la loi N°85/9 du 04 juillet 1985 [...], l'arrêté de déclaration d'utilité  publique devient caduc si, dans un délai de deux ans à compter de la date de notification, il n'est pas suivi d'une expropriation effective, sa validité ne peut être prorogée qu'une seule fois par arrêté du ministre chargé des domaines pour une durée n'excédant pas un an.

Qu'en l'espèce, le décret N°76/301/PM du 06 septembre 1976 portant expropriation du titre foncier N°186 du Nyong & Sanaga n'était valable que jusqu'au 05 Septembre 1979 au plus tard.

Or, jusqu'à ce jour, en dehors des 6000 mètres carrés du marché du Mfoundi, le reste du terrain, soit près de 27000 mètres carrés, n'a pas fait l'objet d'une expropriation effective, et par conséquent, le décret attaqué qui en même temps déclare d'utilité publique et exproprie, est caduque en ce qui concerne cette contenance superficielle qui doit de ce fait, revenir au propriétaire initial. ».

Tout récemment, le juge administratif a annulé l'arrêté n°0000.74/Y.14.4/ MINDAF/D100 du 30 mai 2005 dans l'affaire EFFA Paul Marcel, pour absence d'utilité publique dans le projet de « sécurisation de l'itinéraire présidentiel »90(*)

Au vu des revirements jurisprudentiels intervenus en matière d'expropriation, Monsieur ABA'A OYONO, dans ses observations dans l'affaire Société Renault déclare que : « Voilà en tout état de cause, une décision de justice supplémentaire qui bouscule les directives d'un texte du législateur, et qui conforte le juge administratif dans sa position de protecteur des droits des administrés face à un droit du contentieux qui fait toujours la part belle à l'administration, question de préserver le droit de propriété à valeur constitutionnelle ».

En guise de conclusion à ce chapitre relatif aux manifestations de la faute administrative en matière foncière, les développements s'intégraient dans une analyse les actions vicieuses et perverses des autorités administratives, des dysfonctionnements des services administratifs dans les opérations relatives à l'acquisition et la cession de la propriété immobilière. Il s'agissait notamment des fautes commises lors de l'immatriculation directe, au cours de l'immatriculation indirecte, pendant l'immatriculation dérivée, et enfin lors de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Le fil directeur de notre réflexion demeure lié à l'exposé des diverses défaillances ou de variétés des dysfonctionnements administratifs lors de ces procédures, manquements qui portent atteinte à la propriété privée immobilière, véritable droit de l'homme.

CONCLUSION AU TITRE I

Pour clore ce titre I, relatif à l'identification ou à la détermination de la faute administrative en matière foncière, deux idées centrales ont constitué le leitmotiv de notre étude.

D'une part, l'appréhension de la faute dans sa particularité notamment dans ses caractéristiques et à travers ses auteurs.

D'autre part, l'analyse détaillée de la panoplie d'actions ou abstentions constitutives de forfaits administratifs en matière foncière a été au coeur de la réflexion.

Ceci est nécessaire dans la logique où, on veut comprendre comment l'Etat, protège et garantit les personnes privées, des violations faites sur leur propriété immobilière par ses organes. Le préalable nécessaire passe par la détermination de ce qui pourrait préjudicier aux intérêts de ces personnes.

De ce fait, si l'on parodie l'article 1382 du code civil, fondateur de la responsabilité civile, pour la transposer dans un registre administratif, on dira : «  tout fait quelconque de l'administration qui cause à autrui un dommage, sur sa propriété privée immobilière, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ». Toute victime d'un dommage, doit se faire réparer le préjudice par elle subie, fusse-t- il commis par l'administration, et donc l'Etat.

TITRE II: LES CONSEQUENCES ET LA SANCTION DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE

La terre, le foncier sont sources de multiples enjeux. Des études faites par d' imminents juristes, sociologues et géographes montrent à suffisance l'importance, et la valeur de la terre. Monsieur Kouassigan dans son ouvrage l'Homme et la terre, dénote avec beaucoup de profusion les rapports que les individus attachent à leur terre. Qu'on soit seulement détenteur, possesseur ou propriétaire, l'homme magnifie le bien immobilier et éprouve un sentiment de puissance, de plénitude sur le bien immeuble qu'il détient. C'est donc un truisme que la terre revêt une valeur indéniable.

Comme il est clair que pouvoir revient à l'Etat de réglementer l'acquisition, la gestion de la propriété foncière, conformément à l'intérêt général, et en mettant en vigueur les lois y afférentes ; lorsque cette intervention est émaillée d'illégalité et d'irrégularité, on tombe dans le domaine des atteintes, des restrictions.

Dans les développements précédents, il a été question d'identifier la faute administrative en matière foncière notamment, dans ses caractéristiques et ses manifestations, et ceci, en terme de reconnaissance de cette faute, d'identification de ses attributs, et conséquemment, l'analyse de ses effets est opportune.

Ces effets s'articulent autour des conséquences, ou dommages, causés aux victimes à la suite des forfaits administratifs, et subséquemment, la mise en oeuvre de la responsabilité de l'administration fautive (chapitre 1). L'apaisement du dommage éprouvé par la victime réside alors dans la réparation du préjudice subi. (Chapitre 2).

Chapitre 1 : LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE ET LA RESPONSABILITE DE L'ADMINISTTRATION

Lorsqu'on envisage les conséquences d'une action, il s'agit au fond d'analyser les suites logiques entraînées par le fait qui est en cause. Parce que la faute est un manquement, une inexécution, bref un fait qui se caractérise par l'anormalité, il est question de déceler les suites fâcheuses, les dégâts, que la faute administrative entraîne en matière foncière notamment dans l'immatriculation et l'expropriation.

La faute administrative s'appréhende en fait comme une atteinte au droit de propriété. Certes les articles 545 et suivants du Code Civil prévoient automatiquement des restrictions légales au droit de propriété, et face aux évolutions sociales, on assiste au phénomène de « socialisation progressive du droit de propriété ». Cet état de choses conduit à admettre que certaines restrictions puissent y être faites, mais lorsque ces atteintes résultent de l'inexécution des obligations dévolues à l'administration en charge de la matière foncière, on assiste véritablement à la dérive du droit de propriété, qu'il soit acquis ou simplement sujet à prétentions. En conséquence, la victime du dommage causé par la faute administrative dispose de voies, afin que l'administration fautive réponde de ses actes.

La responsabilité de la personne publique est retenue au titre d'une attitude fautive qui ne peut pas lui être imputée, mais dont elle doit répondre, avec ou sans le véritable coupable, à savoir l'agent fautif individualisé.

Néanmoins, pour que soit engagée la responsabilité administrative, le demandeur doit établir qu'il a subi un préjudice. Cela est logique, car il est normal que les particuliers qui retirent avantages des activités des services publics, en subissent les inconvénients, dès lors qu'ils ne sont pas excessifs.

Dans cette perspective, nous identifierons d'abord les conséquences de la faute en terme de dommages causés sur le droit de propriété (section 1), puis, les mécanismes de mise en jeu de la responsabilité de l'administration fautive (section 2).

Section1 : Les conséquences dommageables de la faute administrative en matière foncière

La procédure d'immatriculation constitue, la voie par laquelle une personne privée accède, pleinement et juridiquement, à la propriété d'un bien immeuble. Il s'agit en fait de faire asseoir ses prétentions sur l'immeuble, en dégageant le bien en question de l'emprise de la collectivité. Une fois un bien acquis, il est susceptible de rentrer dans le commerce, de passer d'une main à une autre.

L'expropriation pour cause d'utilité publique, quant à elle, est la dépossession légitime et légale du bien privé au profit de l'Etat, de la collectivité. Cette restriction apportée au droit de propriété s'inscrit dans la logique de socialisation du droit de propriété en ce qu'il aura une utilité collective.

Cependant, on constate que ces procédures instruites par les autorités administratives s'accompagnent d'impairs qui lèsent les personnes privées. L'action administrative brille par une absence totale de légalité, là où elle devrait être présente, et occasionne ainsi des dommages à la propriété privée. Relever les détériorations au droit de propriété, implique alors d'examiner tour à tour, les incidences de la faute administrative, d'une part dans la procédure d'immatriculation, (§ 1) et d'autre part, dans la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique (§ 2).

§1 : Les conséquences d'une immatriculation fautive du chef de l'administration

Comme susmentionné, l'immatriculation est le mode légal d'accession à la propriété, le titre foncier en étant la certification officielle, conformément à l'article 1er du décret 76-165. Elle est, selon Monsieur Aloys MPESSA « le mécanisme juridique principal par lequel la majorité des camerounais accède à la propriété privée foncière ».91(*)

Cela dénote clairement l'ampleur de la procédure à accomplir, et la valeur du titre juridique obtenu. Emaillée d'irrégularités, la procédure d'immatriculation entraînera à ne point douter, des dommages matériels, en termes de dégâts ou restrictions du droit de propriété(A), mais également, et surtout, une fragilisation du titre foncier obtenu en contradiction totale avec les caractères définitif, intangible et inattaquable qui l'entourent (B).

A- Les conséquences matérielles de la faute dans l'immatriculation

Les problèmes d'accaparement, de légitimité, de maîtrise, d'exploitation et de partage équitable des terres ont toujours été source de conflits, de rapport de forces entre les différents acteurs en présence, notamment l'Etat d'une part, et les personnes privées d'autre part. Dans ce contexte, le système de l'immatriculation s'installe dans la législation camerounaise, pour permettre à un individu qui veut tirer meilleur parti de sa terre, d'en asseoir sa propriété, de la délimiter et d'en fixer de manière irrévocable son droit, en le consacrant dans un acte public.

Un éminent juriste affirmait déjà que, « le droit de propriété est un droit légitime, qui répond aux efforts de l'homme pour l'amélioration de son sort et du sort de sa famille, qui assure sa liberté, et constitue la condition première du meilleur rendement économique, ainsi que le gage de la paix sociale. La terre par elle seule, constitue alors  un instrument d'exploitation économique et de mobilisation de crédit »92(*). En effet, à travers la procédure d'immatriculation, il s'agit pour les particuliers d'assurer la garantie des droits sur un immeuble, car, comme l'écrit AMBIALLET Charles, «l'immatriculation est la liquidation complète du passé juridique d'un immeuble et l'avènement de celui-ci à une vie nouvelle, dont l'histoire sera écrite sous la partie relative à l'inscription [...]».93(*)

Par ces dispositions, la doctrine magnifie la propriété immobilière, et relève en conséquence, l'importance de la procédure d'immatriculation, en tant que garantie de la propriété privée immobilière. Tout cela signifie que, la propriété immobilière constitue un pilier majeur dans le processus de développement de l'individu.

De ce fait, la matière foncière qui englobe, l'ensemble des règles gouvernant l'accession à la propriété foncière par les personnes privées, recouvre des enjeux indéniables. Lors d'une immatriculation, il ne s'agit pas seulement de dégager des prétentions collectives pour asseoir des prétentions individuelles ; cela va plus loin, l'instinct de possession est profondément enraciné dans la nature de l'homme, le droit à une propriété immobilière stable correspond à un besoin universel et permanent chez l'individu. La propriété immobilière s'impose comme condition de l'indépendance et de la liberté de l'homme. Par l'immatriculation, l'homme recherche un prolongement et un approfondissement de sa personnalité; celui qui n'a rien en propre dépend des autres, n'a rien en garantie pour son futur, et celui de ses descendants.

Au cours d'une procédure d'immatriculation, la faute de l'administration lèse une partie, en empêchant la réalisation ou l'expression d'un quelconque droit sur une parcelle de terrain à immatriculer. Par ce fait, au-delà de la simple éviction de prétention à l'immatriculation, il s'agit d'examiner en profondeur la valeur de l'action que la partie lésée chercherait à accomplir. Les attentes, les espoirs, les chances, les opportunités que le titre de propriété recherché pouvait accomplir dans la vie des individus. L'accession à la propriété privée est donc source de multiples enjeux qui peuvent ne pas être atteints à cause de la faute administrative. Il peut s'agir, d'enjeux d'ordre économique, en ce sens que avoir accès à une propriété foncière revient à consolider son assise économique, à renforcer son train de vie quotidien, à assurer sa sécurité journalière, car la terre est génératrice de richesses matérielles. La faute administrative réalisera un manque à gagner pour le requérant évincé, une perte éprouvé dans l'éviction de ses prétentions.

D'autre part, ce peut être des enjeux d'ordre social dans la mesure où l'accès à la propriété foncière revient à constituer un patrimoine qui confère une certaine garantie de fiabilité et de reconnaissance sociale. N'est-il pas vrai que l'influence sociale d'un homme dépend de ses avoirs notamment immobiliers ?

En clair, on ne saurait, ne pas insister sur la constatation que des restrictions flagrantes opérées par les autorités administratives, lors de la procédure d'immatriculation évincent le requérant fondé à l'immatriculation, et l'empêchent de ce fait de consolider son droit de propriété sur un bien immeuble.

B - La fragilisation de la force probante du titre foncier

L'immatriculation a pour objet de placer un immeuble « sous l'empire du régime des livrets fonciers »94(*). Elle se concrétise par la remise d'un titre foncier qui aux termes de l'article 1 du décret 76/165, « est la certification officielle de la propriété immobilière ». Le titre foncier constitue donc l'acte de naissance du droit de propriété immobilière. Ainsi, s'il est entaché de vice, le processus de maturation, la vie de ce droit de propriété ne pourrait qu'en être affectée.

Acte délivré par une autorité administrative compétente, et constituant la seule preuve de la propriété foncière,  le titre foncier est inattaquable, intangible, définitif. De ce fait, le titre foncier est requis non seulement  « ad probationem », c'est-à-dire pour faire la preuve qu'on est propriétaire de l'immeuble, mais aussi, et surtout « ad validitatem », c'est-à-dire, pour consolider son droit de propriété et le rendre opposable à toutes autres prétentions concurrentes.

De ce point de vue, la nature juridique de cet acte est incontestable et lourde de conséquences. Néanmoins, cette force probante du titre foncier est conditionnée par une immatriculation dénuée d'irrégularités, étant entendu que toute irrégularité sape les bases et fondements de cet acte conformément à l'article 2 du décret suscité.

A la lecture de ce texte, il est énoncé de manière claire et ferme que : « 

1. toute personne dont les droits ont été lésés par suite d'une immatriculation, n'a pas d'autres recours sur l'immeuble, mais seulement en cas de dol, une action personnelle en dommages-interets contre l'auteur du dol.

2. l'action est portée devant la juridiction civile du lieu de situation de l'immeuble.

3. toutes fois, le ministre chargé des affaires foncières peut , en cas de faute de l'administration, résultant notamment d'une irrégularité commise au cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes authentiques produits, procéder au retrait du titre foncier irrégulièrement délivré ».

La faute de l'administration constitue l'une des causes profondes de dénégation, de contestation du titre foncier. L'alinéa 3 de ce texte jalonne ainsi la remise en cause des caractères définitifs, intangibles et inattaquables liés au titre foncier.

Le titre foncier est considéré comme définitif, dans la mesure où le titre foncier clôture une procédure minutieuse, entourée de publicité, par conséquent, ne peut plus être remis en question. Ainsi, le professeur TJOUEN relève que « le titre foncier est définitif, car il marque la fin de la procédure d'immatriculation. Son obtention est aux termes de l'article 123 du décret du 21 Juillet 1932, « le point de départ des droits réels et charges foncières existant sur l'immeuble au moment de l'immatriculation». On n'attend plus rien d'autre pour être déclaré propriétaire de l'immeuble [...], on n'a plus le droit de le mettre en cause » ;

Inattaquable, car le titre foncier met fin à toutes prétentions concurrentes et aucune action portant sur ce document ne peut être recevable, en clair, cela signifie que dès lors qu'il est délivré, aucun recours n'est plus admissible, « la seule forme de contestation qui soit admise est, en cas de dol, l'action personnelle en dommages et intérêts contre l'auteur du dol, ouverte à toute personne dont les droits ont été lésés »;

Intangible, parce qu'on ne peut ni retrancher ni ajouter des mentions au titre foncier établi. C'est un acte absolu, qui fait foi de la preuve de la propriété. Selon Monsieur Jean-Marie NYAMA, « cela veut dire qu'en principe, on ne peut plus, ni ajouter, ni retrancher les mentions qu'il contient », l'auteur ajoute : « cela signifie aussi que la force probante que la loi attache à l'immatriculation et aux énonciations portées sur le titre au moment même de l'immatriculation est absolue ». Cette figure est illustrée par les propos du professeur TJOUEN lorsqu'il déclare : « il s'agit ici de savoir si on est encore libre de « toucher», c'est-à-dire d'ajouter ou de retrancher certaines mentions déjà portées sur le titre foncier puisqu'il peut y avoir des erreurs humaines ou des fautes intentionnelles. Le législateur a répondu par la négative pour affirmer davantage l'absolutisme de la force probante du titre foncier ».

Le système de l'immatriculation s'accompagne à ne point douter d'effets très énergiques en dotant une base incontestable au titre foncier établi. Et Monsieur AMBIALLET ajoute que « (...) tous les titres antérieurs à l'immatriculation sont annulés pour faire place au titre foncier qui porte en lui la preuve du droit du propriétaire. Il ne s'agit plus après l'immatriculation, de chercher, ni même de savoir, comment celui-ci a pu, antérieurement acquérir son droit. Est-ce par voie de succession, de donation, de vente ? Peu importe. Il tient désormais son droit d'immatriculation. L'immatriculation purge les droits antérieurs qui ne seraient pas mentionnés au titre foncier (...) ».95(*)

La faute de l'administration constitue alors une exception à cet absolutisme, car à elle seule, elle entraîne le retrait du titre foncier. C'est dire qu'elle constitue une dérogation exceptionnelle à la force probante et aux valeurs irréfragables du titre foncier. La faute fragilise le pesant d'or du précieux « sésame » qu'est le titre foncier, détruit les bases et les fondements de l'édifice institutionnel, en ouvrant des brèches à la contestation de l'acte juridique irrégulièrement délivré, lui retire ainsi sa force inébranlable sans laquelle le régime foncier de l'immatriculation serait sans garantie et sans assiette.

§ 2 : Les conséquences de la faute administrative dans la procédure d'expropriation.

L'expropriation pour cause d'utilité publique est une procédure qui permet à l'administration, agissant dans un but d'utilité publique, de contraindre un particulier à lui céder la propriété d'un immeuble moyennant le versement d'une juste et préalable indemnité. Certes de nombreux textes affirment l'absolutisme du droit de propriété, mais en réalité, la vie sociale exige un minimum de sacrifice de la part des propriétaires. En effet, la socialisation progressive du droit de propriété conduit à admettre que certaines restrictions puissent y être faites. Néanmoins, ces restrictions ne doivent pas s'accompagner d'illégalités car, cela aboutit à des dépossessions illégitimes (A). Si pouvoir a été donné à l'administration, et partant à l'Etat, d'acquérir de manière « autoritaire » les biens des particuliers, cette administration doit assumer toutes les obligations qui sont les siennes, et appliquer sa propre réglementation, c'est-à-dire se sentir obliger par les normes qu'elle a elle-même édictées. Ainsi, si au travers de l'expropriation pour cause d'utilité publique, l'administration verse dans des irrégularités, et par quelques contournements étrangers à l'exigence d'utilité publique, on est alors gravement exposé à l'insécurité juridique (B).

A - La dépossession illégitime du droit de propriété

« Toute opération d'expropriation se justifie par le fait que le transfert administratif autoritaire de la propriété privée vers la propriété publique est guidé par la réalisation d'un ouvrage d'intérêt général »97(*). Il est clairement admis que la procédure d'expropriation donne droit à une dépossession simplifiée de l'immeuble d'un particulier au profit de l'Etat. Par l'octroi d'une indemnité compensatrice, l'administration expropriatrice accorde par là, ce qu'elle a pris par l'autre. Le schéma est donc simple : l'expropriation aboutit à un transfert pur et simple d'un bien immobilier du patrimoine des particuliers dans celui de l'administration. Néanmoins, lorsque cette dépossession est conduite en méconnaissance des règles légales, il s'agit alors d'une dépossession illégitime, d'une privation du droit de propriété en contradiction totale avec l'absolutisme de la propriété.

La privation, ou dépossession illégitime, se définit comme une violation flagrante et profonde des attributs du droit de propriété. Comme l'affirme l'article 545 du Code civil, nul ne peut être contraint à céder sa propriété si ce n'est pour cause d'utilité publique. S'il est avéré qu'une expropriation a été faite pour cause d'utilité privée ou aux fins personnelles, il s'agit là d'une atteinte grave au sacro-saint principe de l'inviolabilité du droit de propriété, droit fondamental de l'homme.

Cette dépossession illégitime s'analyse comme une voie de fait entendue selon André de LAUBADAIRE  « lorsque dans l'accomplissement d'une activité matérielle d'exécution, l'administration commet une irrégularité grossière, portant atteinte au droit de propriété ou à une liberté publique »98(*). Le fait de priver un propriétaire, s'analyse comme une violation manifeste de la propriété immobilière de manière unilatérale, en méconnaissance totale des règles. La faute administrative, entendue comme des dysfonctionnements administratifs au cours de la procédure d'expropriation réalise par ce fait une restriction au droit de propriété.

B - L'insécurité juridique résultant de l'atteinte au droit de propriété

La sécurité juridique, laconiquement se définit en tant qu'un principe de droit qui permet aux particuliers, aux justiciables de pouvoir compter sur une minimale stabilité des règles de droit et des situations juridiques. L'Etat incarne le droit, et partant l'administration qui en est le prolongement l'incarne aussi. Les personnes physiques, qui représentent et agissent au nom et pour le compte de l'Etat, constituent l'arsenal administratif au service des particuliers. Or, il faut que l'administration se conforme aux lois. Et comme l'affirme si bien PANCKOUCKE,  le chef d'oeuvre de l'administration ou plutôt sa véritable perfection, consiste à respecter les libertés publiques et droits des citoyens, en même temps qu'elle assure l'autorité souveraine en se soumettant au droit. Ces services doivent être exempts d'illégalités, de contrariétés juridiques, incompatibles avec l'ordre établi. L'ordre établi, qui présuppose un minimum de sécurité juridique, oblige en effet qu' au sein d'une société, il existe des facteurs qui permettent et favorisent une gestion impartiale, transparente des affaires publiques par la production d'un ensemble de règles acceptées. Ces règles constituent une autorité légitime, et ont pour but de promouvoir et de renforcer les valeurs sociales partagées par les individus et les administrations. Tous doivent se sentir obligés par la norme. Le désordre juridique, et donc l'insécurité juridique proviennent du fait que la norme soit ballottée par certains, en l'occurrence l'administration qui en est l'incarnation et le prolongement.

Dans la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'insécurité juridique découle du fait qu'il ne s'agisse plus d'une expropriation pour cause d'utilité publique, mais aux fins personnelles. En effet, lorsqu'elle est entachée de fautes administratives, constitutives d'un contournement de l'exigence d'utilité publique et de ses corollaires, l'expropriation pour cause d'utilité publique est génératrice d'une insécurité juridique. Les propriétaires privés, dépossédés de leurs biens immeubles, sans aucun fondement légal, ni même en respect des règles et procédures, sont victimes d'atteintes graves et flagrantes à leurs droits de propriété ; Si les particuliers ne peuvent plus se placer à l'ombre de la protection du droit, au motif que l'administration qui en est la représentation concrète préjudicie à leurs droit et liberté fondamentaux, il s'agit bien là d'une situation constitutive d'insécurité juridique. En tout état de cause, l'administration foncière, qui s'est rendue coupable d'actions fautives, dommageables à la propriété foncière, encourt au même titre que les administrés, la mise en oeuvre de sa responsabilité. Nul n'est au-dessus de la loi, l'Etat de droit exige que l'administration soit elle-même soumise à ses lois, lorsqu'elle brille par son action ou inaction fautive. Il s'agit alors d'envisager le régime de la mise en oeuvre de la responsabilité administrative en matière foncière.

Section 2 : La responsabilité administrative du fait de ses actes fautifs en matière foncière

L'acceptation du principe de responsabilité administrative marque un point dans l'histoire du droit administratif : de l'irresponsabilité originelle consacrée par les textes au profit d'une responsabilité, publique, personnelle de l'agent, l'articulation mérite de marquer un temps d'arrêt. La puissance publique a toujours été considérée de manière originaire, comme la marque et l'attribut de l'ordre administratif, le souverain étant alors « celui qui n'a pas besoin d'avoir raison pour valider ses actes », n'est soumis à aucun contrôle et n'a aucun compte à rendre à personne. De là découle l'irresponsabilité de l'Etat-puissance publique, et partant de l'administration, qui en est la représentation juridique.

De ce dénis de responsabilité à l'idée d'une possible mise en oeuvre de la responsabilité, au motif que « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration »99(*), les bases de la soumission de l'administration au droit et du contrôle de l'action administrative sont posés. Comme il est admis une responsabilité de l'administration en présence des agissements fautifs des personnes physiques qui la représente, il s'agit en conséquence, d'appréhender tour à tour l'étendue (A) et l'effectivité de la responsabilité de l'administration en matière foncière (B) car en effet pouvoir à été donné à l'Etat de réglementer l'acquisition, la gestion et la cession de la propriété foncière en droit camerounais. Quelle est donc l'étendue de la responsabilité administrative en présence de défaillance ? Le système consacré en droit camerounais remplit-il les exigences démocratiques et réalise-t-il un équilibre entre les prérogatives de puissance publique et le droit de propriété cher aux civilistes? Tel est le questionnement qui nous guidera tout au long de l'analyse subséquente.

§ 1: L'étendue de la responsabilité administrative en matière foncière.

Il est impérieux dans ce développement d'appréhender d'une part les cas d'ouverture de la responsabilité administrative en matière foncière, ceci dans un souci de mieux rendre compte de la soumission de l'administration du droit (A). D'autre part, à la suite de cette analyse, il s'agira alors dans un autre registre d'envisager la question du partage des responsabilités entre l'agent administratif personnellement responsable, et la personne administrative au nom de laquelle il agit. En d'autres termes, il est question du partage des responsabilités et l'imputation de la faute commise (B).

A- Les cas d'ouverture de la responsabilité administrative

En matière foncière, il a été démontré dans les précédents développements, que l'administration notamment les services centraux et déconcentrés du MINDAF, les autorités administratives ayant reçu délégation expresse de la loi, et certains fonctionnaires de l'Etat sont impliqués dans le processus de gestion de la question foncière. Nous l'avons relevé, la matière foncière de manière laconique renvoie à toutes les questions relatives à l'acquisition, l'accession, le transfert, la cession de la propriété foncière. Il s'agit en fait de toutes les opérations qui ont trait à la gestion de la terre en tant que bien immeuble.

La responsabilité de ces autorités administratives est mise en oeuvre, en présence de violations graves aux obligations de service, qui préjudicient ainsi au bon fonctionnement du service public. En droit administratif, la protection la plus efficace accordée aux administrés pour lutter contre les illégalités, est le recours pour excès de pouvoir. C'est un moyen par lequel le requérant soumet au juge de l'annulation d'un acte administratif qui lui fait grief. Il s'agit alors de relever les cas d'ouverture à savoir : l'incompétence, le détournement de pouvoir, le vice de forme, et conséquemment, les diverses formes d'illégalités qui entachent l'action administrative

1- L'incompétence

La compétence se définit traditionnellement, comme, l'aptitude légale d'une autorité ou d'un agent à prendre certains actes. Ainsi, tout acte pris ou ordonné en dehors des limites de cette compétence, est entaché de vice d'incompétence. En pratique, ce moyen se dédouble généralement, il peut s'agir de l'usurpation de pouvoir ou de fonction, qui est la situation dans laquelle un acte est pris soit par une personne étrangère , soit par une autorité administrative en violation grossière des règles les plus élémentaires de répartition des compétences. C'est le cas par exemple du Sous-préfet du département du Mfoundi qui est Président d'une commission consultative dans le département de la Lekié. Dans cette hypothèse, on considère que l'irrégularité est tellement grave, qu'elle fait de l'acte, un acte juridique inexistant exposant par le même fait l'autorité administrative qui s'en est rendue coupable. L'incompétence de l'autorité décisionnelle est marquée par une rigidité excessive. L'acte entaché d'incompétence est simplement considéré comme nul et non avenu.

L'incompétence, il faudrait la définir, est l'inaptitude juridique ne permettant pas à un individu d'émettre un acte administratif. A titre d'exemple, le Ministre des affaires foncières serait incompétent pour émettre un titre foncier faute d'habilitation par les textes en vigueur. Cette prérogative est plutôt dévolue au conservateur, selon la réglementation foncière. Autre exemple, le Directeur des affaires foncières ne saurait prendre une décision de règlement de litiges fonciers, faute d'habilitation, par le biais de l'intérim ou d'une délégation de signature. En définitive, l'incompétence devrait être comprise par opposition à la compétence qui est « synonyme d'une aptitude juridique, de préférence un texte écrit en vigueur conféré à l'autorité administrative afin d'émettre au nom d'une collectivité publique , telle l'Etat, une collectivité locale, un établissement public, voire un organisme privé gérant un service public, les actes administratifs sur un territoire et pour un temps donné ».

2 - Le détournement de pouvoir.

Tandis que l'incompétence participe de ce qu'on appelle la légalité externe, au même titre que le vice de forme, le détournement de pouvoir quant à lui rentre dans la légalité interne. Il y a détournement de pouvoir lorsqu'une autorité administrative ou un agent, use de ses pouvoirs dans un but autre que celui pour lequel ils lui ont été conférés. C'est le domaine d'élection de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, opérée aux fins particulières et étrangères à l'intérêt commun. Deux hypothèses peuvent se présenter :

L'autorité administrative utilise ses pouvoirs dans un intérêt particulier ; le mobile de l'administration est étranger à tout intérêt public : c'est le cas d'un conservateur foncier qui refuse de délivrer un titre foncier en présence d'une procédure régulièrement adoptée, et ce, dans un but de vengeance personnelle contre le requérant à l'immatriculation.

En outre, l'autorité administrative utilise ses pouvoirs dans un but d'intérêt général autre que celui qu'elle pouvait légitimement poursuivre ; les pouvoirs sont attribués aux agents publics dans un but d'intérêt général bien déterminé ; il ne leur appartient pas, même dans un but d'intérêt général, de le transgresser. Le détournement de pouvoir serait dès lors comparable à l'abus de droit en matière civile, puisque le titulaire d'un droit utilise ses prérogatives de propriétaire, non pour jouir de tous les usages conférés sur sa chose, mais dans le seul dessein de nuire aux tiers. Le détournement symbolise « la poursuite d'un but contraire à l'intérêt général qui est de ce fait, assimilable à un mauvais usage du pouvoir discrétionnaire auquel le juge ne manquera pas d'opposer sa censure ». L'illustration du détournement de pouvoir est donnée dans l'affaire SADOU YAYA contre Etat du Cameroun. Les faits de la cause méritent d'être rapportés.

Par requête datée du 26 avril 2002 enregistrée au greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême le même jour, sous le numéro 618, sieur SADOU YAYA commerçant domicilié à YAGOUA dans la province de l'Extrême Nord, agissant en qualité d'administrateur de la succession de feu SADOU BOUBA, a saisi le président de ladite Chambre d'un recours tendant à l'annulation de l'arrêté n° 00046/y.7/MINUH/D310 en date du 23 février 2001 du ministre de l'urbanisme et de l'habitat autorisant le retrait du titre foncier n° 920/ MAYO DANAY.

Au soutien de son recours, le requérant reproche à l'arrêt querellé de manquer de bases légales et de motivation, surtout que l'administration a , selon lui, commis des fautes au cours de la procédure d'immatriculation qui date de vingt huit (28) ans.

Dans ses répliques datées du 31 octobre 2002, le représentant de l'Etat s'est remis à la sagesse des membres de la Cour, non sans avoir prétendu que le terrain litigieux était la propriété de la commune urbaine de YAGOUA.

La Cour, après avoir relevé que le maire de la commune de YAGOUA n'a pas pu rapporter la preuve que le terrain litigieux appartient au domaine privé de l'Etat, celui-ci n'ayant produit au dossier ni le procès verbal de délibération du conseil municipal, ni le titre de propriété de l'Etat du Cameroun y afférent, a annulé l'arrêté litigieux, faute de bases légales.

On ne saurait expliquer autrement que par le détournement, le fait pour un Ministre de retirer un titre foncier sans explications, sans autre motivation. Il s'agit en réalité d'une sanction déguisée, par la mise en oeuvre d'un pouvoir discrétionnaire qui a été heureusement sanctionné par le juge administratif camerounais.

3- Le vice de forme

Le vice de forme est le fait pour l'autorité administrative de n'avoir pas respectée un ensemble de règles de forme et de procédure qui auraient dû accompagner l'édiction de l'acte. Règles de procédures primordiales car elles apportent aux particuliers des garanties dans la sauvegarde de leurs droits.

Selon un auteur, « si l'ordonnance du 26 août 1972 prévoit que le vice de forme est constitutif d'excès de pouvoir, il reste à préciser les modalités formelles qu'est tenue de respecter l'autorité administrative lorsqu'elle édicte un acte, sous peine de voir son action entachée d'illégalité ». Cela signifie qu'un texte a prévu un certain formalisme que doit respecter l'administration avant sa prise de décision. C'est sans doute le cas en matière d'immatriculation, puisque le titre foncier ne peut être émis qu'après le constat d'occupation ou d'exploitation de la commission consultative. Faute pour le conservateur de vérifier l'accomplissement de cette diligence, un titre foncier émis dans ces conditions serait entaché d'excès de pouvoir pour vice de forme.

Dans l'affaire NGASSO Robert contre Etat du Cameroun, le juge administratif camerounais avait déclaré que le ministre de l'urbanisme et de l'habitat avait excédé ses pouvoirs en prenant une décision de règlement du litige foncier dans cette cause, qui consistait au payement d'une indemnisation compensatrice de 500.000 francs CFA à l'une des parties, alors qu'une expertise avait été menée et qui évaluait le préjudice souffert à 1.596.410 francs, expertise qui n'avait pas été prise en compte par la décision ministérielle querellée.

A la suite de cette décision, il y a lieu de définir le vice de forme comme le fait pour l'autorité administrative de n'avoir pas respecté les formalités qui conditionnent la prise d'une décision. Ces formalités peuvent être d'origine textuelle ou de création jurisprudentielle comme dans l'affaire NGASSO Robert. Il faudrait sans doute préciser à ce stade d'analyse que tout vice de forme n'emporte pas annulation d'un acte administratif. La doctrine fait une distinction entre les formalités facultatives et les formalités obligatoires. Seules ces dernières, dont la violation constatée, devraient être constitutives d'excès de pouvoir.

Qu'elles soient substantielles, accessoires, les formalités sont requises car elles protègent les administrés et leur inobservation aura une influence déterminante sur le contenu de la décision.

b - L'imputabilité de la faute dans la mise en oeuvre de la responsabilité administrative

La responsabilité administrative est mise en oeuvre qu'en présence d'une faute commise par un agent administratif. Selon qu'il s'agira d'une faute personnelle ou d'une faute de service, l'administration couvrira les conséquences des fautes qui leur sont imputables, et qui se trouvent directement à l'origine du dommage.

De manière pratique, il s'agit d'identifier la personne responsable du dommage causé au particulier à la suite d'une action ou inaction fautive ? De l'administration, en tant que personne publique, ou de l'agent, fonctionnaire ou autorité administrative, qui est responsable du dommage causé ?

C'est une constatation d'évidence de dire qu'en vertu des textes de lois, de la jurisprudence et de la doctrine, lorsqu'on est en présence d'une faute personnelle, il y va de la responsabilité personnelle de l'agent administratif fautif (A) ; quand il s'agit d'une faute de service, cela ressort de la responsabilité administrative (B). Que dire alors lorsqu'on est en présence des cas de cumul de fautes personnelles liées au service qui à ne point douter complexifient la distinction, en enchevêtrant les responsabilités personnelle et de service (C).

1 - La faute personnelle et la responsabilité personnelle de l'agent administratif.

Le système hérité de l'arrêt Pelletier voudrait que, lorsqu'on est face à une faute personnelle de l'agent administratif, notamment une faute commise en dehors de l'exercice de ses fonctions, soit parce qu'elle révèle un comportement incompatible avec l'exercice - notamment un abus de fonction, une volonté d'enrichissement personnel, le rançonnement et le monnayage des prestations de service public qui sont légion en matière foncière - cette faute permet de limiter considérablement la responsabilité administrative à la responsabilité personnelles des agents.

Il appartient donc à l'agent administratif, au fonctionnaire ou à l'autorité administrative de répondre personnellement de ses actes lorsque ces derniers n'ont aucun lien avec leur fonction, et d'autant plus que s'il y a lien avec le service, ces actes procèdent d'un excès de comportement qui ressortit au registre de la responsabilité civile délictuelle ou quasi délictuelle, et tombe dans le coup des articles 1382 et suivants du Code civil.

L'agent administratif coupable verra ainsi sa responsabilité engagée devant le juge judiciaire qui est garant de la protection des droits et libertés fondamentales des personnes privées.

Ainsi, en matière foncière, notamment en matière d'immatriculation ou d'expropriation, lorsqu'il est avéré qu'un fonctionnaire du MINDAF, qu'un Sous-préfet ou que le Ministre des affaires foncières lui-même, abusant de leurs prérogatives de puissance publique, préjudicient gravement aux intérêts des particuliers au cours de l'une quelconque de ces procédures, en méconnaissance des prescriptions légales, ces derniers peuvent voir leur responsabilité personnelle engagée, et ceci sous le régime des règles de droit privé, civile ou pénale, car la victime peut poursuivre le responsable. En aucun cas, les tribunaux judiciaires saisis d'une faute personnelle ne peuvent condamner l'administration. Ils ne peuvent se prononcer qu'à l'égard du fonctionnaire mis en cause car, la faute personnelle révèle un comportement incompatible et anormal, différent de celui que l'on est en droit d'attendre d'un agent public.

2 - La faute de service et la responsabilité de l'Etat

La spécificité du régime de la responsabilité administrative est de s'opérer lorsque  « le service public n'a pas fonctionné. Le service public a mal fonctionné. Le service public a fonctionné tardivement ». Dans tous les cas, dès lors qu'on est en présence d'un service public dommageable aux intérêts des administrés, il y va de la responsabilité administrative. La faute de service a alors une double conséquence : elle est un système de protection de l'agent public ; elle est la condition de la responsabilité de l'administration.

Faute de service comme système de protection de l'agent public, dans la mesure où, elle est une technique de substitution de la responsabilité personnelle de l'agent, car, elle fait échec à la faute personnelle. Mais encore, et surtout, elle est une technique de garantie de la séparation du dommage subi par l'administré.

Faute de service comme condition de mise en oeuvre de la responsabilité administrative, car, ce n'est qu'en présence d'une faute de service, que l'administration en tant que personne répondante intervient. La faute de service entraîne la poursuite de l'administration foncière devant la juridiction administrative en vertu des règles de responsabilité de droit administratif.

La préoccupation lancinante qui est celle d'un privatiste est celle de savoir, si au cours de l'instance, le juge administratif peut-il se prévaloir des principes de réparation civiliste, dans un souci d'équité et de protection de la victime ?

3 - La complexité de la distinction et enchevêtrement des responsabilités

Le critère posé par la jurisprudence Pelletier, est celui selon lequel le droit administratif de la responsabilité est applicable en cas de faute de service, et que seul le Code Civil et les lois pénales, régissent la réparation des dommages causés aux particuliers par les fautes personnelles des agents publics. Les difficultés d'application de ce critère apparaissent, car la dichotomie faute service -faute personnelle instituée par le Tribunal de Conflit ignore les situations d'enchevêtrement et de cumul de fautes.

Tout resterait simple si le critère de distinction entre faute personnelle et faute de service est purement matériel et objectif, s'il n'était affaire de temps et de lieux du service, ou au contraire de la vie privée. Mais à l'instar du Dr Jekyll, tout agent de l'administration reste simultanément, une personne privée pendant l'exercice de ses fonctions, et inversement, hors de cet exercice, sa profession peut faciliter la commission de faute qui au premier abord, apparaissent ne relever que de sa vie personnelle. L'homme et l'administration ne se laissent pas aisément séparer dans la réalité. Ainsi, une faute commise pendant le service et sur les lieux de service peut être qualifiée de personnelle, si elle révèle un comportement incompatible avec l'état de fonctionnaire.

Symétriquement, il n'est pas davantage exclu qu'une faute commise matériellement hors du service ne soit dépourvue de lien avec le service, notamment si elle est commise en utilisant les moyens fournis par le service.

En outre, il peut arriver que le préjudice causé à l'administré soit la conjonction de deux faits fautifs, dont l'un peut être qualifié de faute de service, et l'autre de faute personnelle. Il s'agit là des situations de cumul de deux faits fautifs. La question qui se pose est alors celle de savoir de l'agent ou du service, qui est définitivement responsable ?

D'autre part, on assiste également à des situations dans lesquelles, un même fait s'analyse à la fois en faute personnelle et en faute de service : il s'agit de l'hypothèse où, en un même fait, se trouve une dualité de faute personnelle et de service. Qui répond alors du préjudice subi par l'administré ?

Ainsi, les théories de l'enchevêtrement, du cumul de deux faits fautifs ou de deux fautes en un même fait, révèlent plus l'impasse, que ne constitue la séparation des responsabilités introduites par la jurisprudence  Pelletier . Fort à propos, les jurisprudences Anguet100(*) et Epoux Lemonnier101(*) apportent des solutions précises en droit français. Qu'en est il alors de la réalité du régime de la responsabilité administrative en droit camerounais ?

§ 2 : La réalité de la responsabilité administrative en matière foncière au Cameroun

La question de la réalité, voire de l'effectivité de la responsabilité administrative en matière foncière au Cameroun soulève beaucoup d'ambiguïtés. Il s'agit en fait de s'interroger sur le rôle de la justice administrative et civile dans l'appréciation de la faute administrative, mais encore, et surtout, d'analyser la réaction de l'administration en présence d'une faute imputable à ses agents en charge de la question foncière. En clair, il est question dans ces développements d'analyser l'appréciation concurrente de la faute administrative par l'administration et sa justice. L'Etat de droit, qui a pour corollaire la soumission de l'administration au droit oblige en effet que l'autorité administrative, donc l'Etat, s'en tienne au dispositif élaboré, et se sente obligé par les normes édictées.

A- La réaction administrative face à la faute commise

Il s'agit dans ce registre d'examiner les mesures administratives en oeuvre en présence d'une faute commise par un agent des services du MINDAF.

Au cours des tournées et descentes sur le terrain dans les services déconcentrés de son ministère, Monsieur Pascal ANONG ADIBEME, Ministre des domaines et des affaires foncières, a clairement affirmé qu'il s'agissait « de renforcer la passerelle de confiance entre la hiérarchie et le personnel en le soutenant dans la transparence, dans la gestion des affaires publiques ».102(*) Cette affirmation s'illustre dans un contexte marqué par l'assainissement de la gestion foncière, afin de contrer les conduites de ses collaborateurs, plus proches de l'usager, à poser des actes contraires à l'étique professionnelle et la réglementation en vigueur.

Le responsable de ce département ministériel décrie des comportements déviants de certains responsables notamment « les cas de corruption, de trafic d'influence, d'établissement complaisant des titres fonciers établis sur des immeubles de très grandes superficies au profit d'individus fortement nantis ». A cet égard, les services centraux et déconcentrés du MINDAF doivent faire amende honorable et placer l'intérêt de la chose publique avant leurs propres intérêts, car le « moment est venu de restaurer la crédibilité du MINDAF. Les services du Ministère des domaines et des affaires foncières doivent montrer l'exemple dans leur relation quotidienne avec les usagers ; ils doivent être présents au front de lutte contre la corruption, et combattre sans cesse l'inertie et le laxisme ».103(*)

Dans cette perspective, face aux incartades de certains fonctionnaires du MINDAF, la réaction des supérieurs hiérarchiques ne s'est pas faite attendre.

Ainsi, dans la province de l'Ouest, département du Ndé, le conservateur foncier de ce département a été suspendu de ses fonctions par le Gouverneur pour faute lourde consistant à la  « désinvolture déconcertante du Sieur Kengne envers ses supérieurs hiérarchiques, refus d'assister aux réunions de coordination, attrait pour les billets de banque lors des opérations foncières ».

En effet, l'écart de comportement du conservateur au cours des opérations foncières est observé lorsque ce dernier réussit l'exploit inédit de délivrer un titre foncier à un proche d'un natif du terroir condamné, et dont les biens ont été confisqués, pour détournement de deniers publics. Le conservateur foncier mis en cause a délivré un titre foncier en marge de la réglementation en vigueur. En outre l'autre grief qui lui est fait, est sa propension à dissimuler les frais des bulletins des avis domaniaux et frais de timbres.

Dans une autre espèce, mettant en cause un délégué départemental des affaires foncières, notamment celui de la Mefou et Akono, le Ministre des domaines a relevé de ses fonctions le Sieur Essama Pierre pour indélicatesse avérée consistant: « au rançonnement des usagers, au monnayage de ses services ; concrètement, il a retenu 140 dossiers d'immatriculation abusivement en exigeant des sommes exorbitantes aux requérants ». Outre ces cas d'abus de pouvoir, de rétention de dossiers, et d'escroquerie organisée, le Sieur Essama s'est rendu coupable de dégradation des rapports de services car, instigateur de rixes spectaculaires avec ses proches collaborateurs, notamment, le conservateur foncier dont il voulait se substituer dans la décharge d'un titre foncier, attribution qui ne lui est pas due.

Ces illustrations de réactions administratives aux indélicatesses des fonctionnaires en services au MINDAF s'inscrivent dans un souci de montrer qu'au Cameroun, l'heure n'est plus au laxisme, à l'inertie dans la gestion de la chose publique. Dans cette orientation, une cellule de lutte anti-corruption a été mise sur pied, dont l'objet est de déceler les trafics qui ont cours au sein des services.

En effet, conformément à l'organigramme du MINDAF, il est stipulé que : «  l'inspection générale est chargée du contrôle interne et de l'évaluation du fonctionnement des services du ministères, des projets et établissements sous tutelle(...), de la mise en oeuvre de la stratégie de lutte contre la corruption au sein du ministère, en liaison avec la cellule ministérielle de lutte contre la corruption ». Dans la cadre de leurs missions, les inspecteurs et chef de cellule anti-corruption peuvent «demander par écrit des informations, explications ou documents aux responsables des services contrôlés qui sont tenus de répondre dans les délais impartis ; disposer à titre ponctuel du personnel nécessaire relevant d'autres services du ministère ; requérir la force publique, en cas de nécessité après avis conforme du Ministre et conformément à la loi, en vue de leur prêter main-forte ou constater les atteintes à la fortune publique ».

C'est peu dire, que d'affirmer que la lutte contre la corruption est une priorité au MINDAF, quand on sait que la corruption en matière de gestion des domaines et des affaires foncières, va au-delà de la simple acceptation populaire, pour embrasser le faux en écritures publiques, le fait de demander à l'usager de verser des commissions fortuites, la rétention sans raison des dossiers et l'aliénation des recettes domaniales, foncières ou cadastrales.

B- La réaction juridictionnelle face à la faute administrative

Le contentieux foncier relève doublement, et de la juridiction de l'ordre judiciaire, et de juridiction administrative. Dans ce registre, nous insisterons profondément sur l'attitude de la justice administrative face à la faute administrative en matière foncière.

Près de 85% du contentieux administratif est relatif aux litiges fonciers104(*) mettant en conflit l'administration, et les particuliers, requérants aux procès. L'accès à la justice ne fait plus aucun doute en matière foncière. La question de fond qui persiste, est celle de savoir comment l'Etat envisage la responsabilité des services administratifs en matière foncière, et conséquemment, quelle protection il accorde au droit de propriété acquis ou en devenir. La kyrielle de recours introduite au sein de la formation administrative de la Cour suprême, montre à suffisance que la faute de l'administration n'est plus impunie. Au contraire, la responsabilité administrative est ainsi mise en jeu avec toutes les conséquences qui peuvent en découler.

Ainsi, dans les espèces mettant en cause MBALLA Dieudonné105(*), MVENG NDY née MENDOUNGA Marguerite106(*), BILOUNGA Pascaline,107(*) la Chambre Administrative de la Cour Suprême reconnaît certains faits, comme constitutifs de fautes de l'administration au cours de certaines opérations foncières qui ont lésés les requérants.

Il en est de même dans les affaires WAHA Emmanuel, BEYISSA Adolphe, POHOKAM Suzanne, succession BEWOU DEFFO Christophe, NJOH Philibert108(*), dans lesquelles le juge administratif reconnaît des dysfonctionnements et manquements dans l'activité des services centraux et déconcentrés du ministère des domaines, ancien ministère de l'urbanisme dans l'établissement et la délivrance du titre foncier.

Plus récemment, il a été rendu au sein de la chambre administrative, les décisions suivantes extirpant la faute administrative: affaire BONG Henri Aimé relativement à la concession provisoire et l'annulation de titres fonciers irrégulièrement délivrés109(*) affaire NJOOH Michel Pierrot relativement à une décision ministérielle ordonnant le retrait d'un titre foncier110(*), affaire BISSO Joseph et dame ZEH111(*) pour complicité de l'administration dans une immatriculation frauduleuse comme ce fut le cas dans les affaires OHANDJA Séverin112(*) et YONGO Marc.113(*) Par ailleurs, en ce qui concerne le contentieux de l'expropriation, les célèbres affaires dame veuve Ongono Régine, Sté Renault Cameroun, DZOU ESSOMBA sont des illustrations des recours intentés contre la faute administrative devant la Cour Suprême. De même, les affaires EMAH Basile et autres114(*) et EFFA Paul Marcel115(*) dans laquelle la faute administrative a été décriée au cours d'opérations d'expropriation pour cause d'utilité publique.

Toute cette énumération casuistique, vise à montrer que si l'on se base sur le champ des décisions rendues par la Chambre Administrative de la Cour suprême statuant en matière foncière, il ne fait aucun doute que la responsabilité de l'administration des domaines est avérée. L'on se rend compte par cette série d'annulations que le juge administratif procède de ce fait un rappel à l'ordre aux structures administratives chargées du foncier, afin de mieux encadrer l'administration dans son action et de consolider ainsi l'Etat de droit au Cameroun.

Mais, il faudrait dépasser cet aspect purement formel, pour s'appesantir sur la responsabilité véritable des services des domaines en terme de réparation du préjudice subi par les particuliers et même, au titre d'une responsabilité sanctionnatrice.

Quelle incidence la faute administrative aura dans la protection du droit de propriété des particuliers en droit camerounais. Nous osons croire qu'avec l'avènement de la loi n°2006/016 du 29 décembre 2006, fixant l'organisation et le fonctionnement de la Cour Suprême, notamment en son article 9116(*) qui institue au sein de la Chambre Administrative, une Section du contentieux des affaires foncières et domaniales, une protection éfficiente sera accordée au droit de propriété face aux empiétements administratifs, et qu'une réparation intégrale aura cours lors des espèces mettant en scène le contentieux foncier.

CONCLUSION

Parvenu au terme de notre analyse sur les conséquences de la faute, et la mise en oeuvre de la responsabilité administrative, force est de procéder à un double constat.

Le premier découle de l'idée force selon laquelle la terre est source de richesses inestimables au Cameroun, et par conséquent, la gestion qu'en fait les services administratifs des domaines et affaires foncières doit se consolider dans un environnement non frelaté au risque de générer de véritables dommages aux personnes privées. Le foncier mobilise en effet des enjeux importants que sont la cohésion sociale, la paix et l'avenir des familles.

Le second constat a trait à l'effectivité de la responsabilité administrative en matière foncière. Il ne fait aucun doute que la gestion administrative de la chose foncière est scrutée de près ou de loin. Le Ministère de tutelle qu'est le MINDAF met en oeuvre un important arsenal de mesures tendant au contrôle des services en charge de l'administration foncière, la mise sur pied d'une cellule anti-corruption au sein du ministère en dit long sur les intentions des responsables de ce département ministériel. Cela laisse augurer que l'inertie, le laxisme et l'indélicatesse ne resteront plus impunis. Mais que dire alors de la réparation du préjudice subi par les victimes au cours de ces opérations foncières ?

Chapitre 2 : La réparation du préjudice subi par la victime de la faute administrative.

Une valeur sociale protégée est-elle transgressée quelque part, qu'immédiatement, doit-on procéder à l'application de la sanction prévue à cet effet. La sanction se définit comme une mesure répressive prise par une autorité en vue d'infliger une peine ou une récompense à l'auteur d'un acte. Il s'agit en fait des conséquences juridiques du non respect d'une règle de droit, d'un usage ou de l'ordre établi. En présence d'une faute, la sanction renvoie à la punition, au blâme, aux pénalités encourues du fait de la commission de la faute.

En matière de contentieux administratif, il n'existe véritablement pas de sanctions répressives à l'encontre de l'administration. Lorsqu'une faute est commise, on procède au rattachement au service, si cela est avérée, la responsabilité administrative est une responsabilité réparatrice et non sanctionnatrice. C'est lorsque l'auteur du préjudice est identifié que l'on peut procéder soit à une responsabilité disciplinaire, soit à une responsabilité civile ou pénale.

Cela étant, le constat clair qui découle de ces allégations, est celui suivant lequel, lorsque l'administration est mise en cause dans un litige, la sanction véritable que l'on appliquera aura un caractère réparateur ; il s'agira de replacer la victime dans un même et semblable état avant la survenance du préjudice.

Dans le prolongement de ce constat, il s'agira dans notre analyse d'examiner les mesures réparatrices des dommages causés aux particuliers par la faute administrative en matière foncière. Tout d'abord la réparation qu'en fait l'administration elle-même, en vertu du principe de l'administration active (section 1), ensuite la réparation par voie juridictionnelle du préjudice subi en matière foncière (section 2).

C. Section 1 : La réparation du préjudice subi par voie administrative.

La réparation se définit comme le dédommagement d'un préjudice par la personne qui en est responsable, et ceci, soit par le rétablissement de la situation antérieure, soit par le versement d'une somme d'argent au titre de dommages-intérêts. En droit administratif, en vertu des principes du recours gracieux préalable et celui de l'administration active, la demande en réparation du préjudice subi par les individus est d'abord adressée à l'administration avec laquelle on est en litige. En matière foncière, le recours est adressé au Ministre des domaines et des affaires foncières qui conformément à la législation, prend des mesures contre l'illégalité de l'action administrative. De ce fait, il est judicieux d'énumérer ces mesures, étant entendu que l'immatriculation et l'expropriation sont deux procédures bien distinctes, et ceci dans un souci de mieux rendre compte de l'état des lieux de la réparation des fautes commises dans l'immatriculation(§1), et dans l'expropriation (§2).

§ 1 : Les mesures administratives palliatives de l'immatriculation fautive

En matière foncière, notamment au cours de l'immatriculation, la faute administrative qui préjudicie aux intérêts des particuliers est réparée aux travers de plusieurs procédés : soit la décision entachée de faute faisant grief est annulée par l'autorité statutairement habiletée, soit la décision entachée est redressée. L'hypothèse de redressement n'intervient que lorsque l'acte ne fait pas grief aux particuliers. Dès lors qu'elle cause un dommage aux requérants, elle doit être retirée. Parce que l'immatriculation et l'expropriation sont deux procédures bien distinctes, il s'agit, dans un souci de mieux rendre compte de l'état des lieux, d'examiner tour à tour les mesures administratives réparatrices des fautes commises au cours de ces procédures qui attentent au droit de propriété.

A- L'anéantissement du titre foncier

Au regard des caractéristiques du titre foncier à savoir qu'il est réputé  définitif, intangible et inattaquable, la possibilité de l'anéantir apparaît comme une sanction lourde. La réforme du 16 décembre 2005 prévoit deux causes d'anéantissement du titre foncier : cela peut survenir à la suite du retrait, ou de l'annulation ministérielle du titre de propriété.

1- Le retrait ministériel des titres fonciers irrégulièrement délivrés

Aux termes de l'article 2 du décret n°2005/481 du 16 décembre 2005, « (1) toute personne dont les droits ont été lésés par suite d'une immatriculation n'a pas de recours sur l'immeuble, mais seulement en cas de dol, une action personnelle en dommages- intérêts contre l'auteur du dol [...].

(3) Toutefois, le Ministre chargé des affaires foncières, peut ,en cas de faute de l'administration, résultant notamment d'une irrégularité commise au cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes authentiques, procéder au retrait du titre foncier irrégulièrement délivré ;

(5) Le retrait du titre foncier prévu à l'alinéa 3 du présent article, ne peut sauf cas de fraude du bénéficiaire, intervenir que dans le délai du recours contentieux ».

A la lecture de ce texte, il découle que le titre foncier ne peut être retiré que dans deux hypothèses : la faute de l'administration et la fraude du bénéficiaire. S'agissant de cette dernière, on peut dire laconiquement que la fraude est une action faite de mauvaise foi dans le but de tromper, ou encore une falsification punie par la loi en application de la règle « fraus omnia corrumpit ».

Le retrait du titre foncier est exercé par le ministre des domaines à l'initiative, soit de l'administration elle-même, soit par le biais d'un tiers lésé par une immatriculation fautive. Ainsi, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision faisant grief, en l'occurrence l'établissement d'un titre foncier entaché de faute administrative, le requérant peut introduire sa demande tendant au retrait du titre irrégulièrement délivré. Ce fut le cas avec l'arrêté n°00030/Y II/MINDAF/D130 du 10 octobre 2007 portant retrait du titre foncier n°34883/Wouri irrégulièrement délivré. La possibilité ainsi offerte au Ministre en charge des questions foncières de procéder au retrait des titres fonciers irrégulièrement délivrés traduit la détermination des pouvoirs publics à traquer tous les titres fonciers entachés de fraude et d'illégalité. Mais elle constitue en même temps un danger pour le droit de propriété, notamment en ce qui concerne ses caractères inattaquable, intangible et définitif qui fondent sa force probante. Cette possibilité de remettre en cause le titre de propriété laissée entre les mains de l'administration réputée "juge et partie" de la question foncière au Cameroun, mais dont la propension à piétiner les droits fondamentaux et libertés individuelles, pourrait embarrasser plus d'une personne. Cela pourrait constituer un recul dans la garantie accordée à la protection de la propriété dont le juge est réputé gardien dans les systèmes juridiques modernes. La soupape de sécurité viendrait de ce que le juge administratif reste compétent pour s'assurer de la soumission de l'administration au droit.

2 - L'annulation ministérielle du titre foncier irrégulièrement délivré

L'annulation ministérielle du titre foncier est prévue par les alinéas 6 et 7 du même article 2 du décret de 2005 aux termes desquels il est disposé  que: 

« al.6 : un titre foncier est nul d'ordre public dans les cas suivants :

-lorsque plusieurs titres fonciers sont délivrés sur un même terrain ; dans ce cas, ils sont tous déclarés nuls de plein droit, et les procédures sont réexaminées pour déterminer le légitime propriétaire. Un nouveau titre foncier est alors établi au profit de celui-ci ;

-lorsque le titre foncier est délivré arbitrairement sans suivi d'une quelconque procédure ; ou obtenu par une procédure autre que celle prévue à cet effet ;

-lorsque le titre foncier est établi en totalité ou en partie sur une dépendance du domaine public ;

-lorsque le titre foncier est établi en totalité ou en partie sur une parcelle du domaine privé de l'Etat, d'une collectivité publique ou d'un organisme public, en violation de la réglementation ;

(7) La nullité du titre foncier prévue à l'alinéa 6 ci-dessus est constatée par arrêté du Ministre chargé des affaires foncières susceptible de recours devant les juridictions administratives compétentes. »

Cette annulation d'ordre public du titre foncier vise à sanctionner la méconnaissance flagrante de l'arsenal juridique en matière foncière ; on constate en effet que les causes d'annulations sont relatives aux règles et formalités substantielles à accomplir avant tout établissement du titre foncier.

B - Les conséquences de l'anéantissement administratif du titre foncier

Le titre foncier est un acte administratif créant des droits au profit de son bénéficiaire. Dès lors qu'il est établi, le titulaire d'un titre foncier, parce que sûr de la plénitude de ces droits sur le bien immeuble, peut effectuer plusieurs opérations, notamment la cession, le morcellement, la vente du bien immeuble individualisé.

Le retrait administratif du titre foncier pour faute de l'administration, en même temps qu'il rétablit la légalité, est simultanément source d'insécurité juridique. Rétablissement de la légalité dans la mesure où l'administration qui est « le pouvoir agissant de l'Etat doit être soumise à l'ensembles des normes  juridiques »117(*)et par conséquent, toute violation administrative de la légalité doit être réparée de manière autonome.

Incertitude juridique, car comme on le dit communément, « on ne sait plus à quel saint se vouer » : si l'assurance de la propriété est remise en jeu par le titre foncier irrégulièrement délivré, on se pose nécessairement des questions lorsque l'on veut entrer en affaire avec le propriétaire du titre foncier. Mais encore, lorsque le titre foncier a été l'objet de morcellement, les propriétaires de bonne foi qui ont acquis la parcelle de terrain sont injustement dépossédés de leur titre de propriété.

Ainsi, dans l'affaire de la MAGZI 118(*) près de 163 titres fonciers ont été retirés et annulés par le Ministre des domaines, dans lesquels 14 titres fonciers expropriés et indemnisés ont donné lieu à 149 morcellements. Quel est le sort des propriétaires de bonne ou de mauvaise foi de ces 149 titres fonciers, qui à cause du désordre organisé des services fonciers, notamment du département du Mfoundi, ont pu établir des titres fonciers sur le domaine privé de l'Etat.

En clair, cela veut dire que le titre foncier ne procure plus à son propriétaire, le statut de véritable et seul détenteur. Par ailleurs, suivants les dispositions de l'alinéa 4 de l'article 2 du décret de 2005, « le retrait du titre foncier délivré entraîne la mutation sans frais dudit titre au nom du propriétaire initial, s'il s'agit d'un immeuble immatriculé. L'immeuble est remis au même et semblable état où il se trouvait avant la délivrance du titres s'il s'agit d'un immeuble non immatriculé ». C'est établi que le retrait du titre foncier aura un effet d'engrenage, qui assurément aura des effets pervers dans la chaîne de cession d'une portion de propriété.

§2 : La réparation administrative d'une expropriation fautive

La procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique est une procédure attentatoire au droit de propriété. L'administration lorsqu'elle est saisie dispose de moyens pour réparer l'atteinte infligée au propriétaire. Dans ce cadre, il s'agit d'énoncer les mesures palliatives de la faute qui permettent aux propriétaires de rentrer dans son droit (A), réparation qui somme toute, demeure insuffisante, aussi sied-t-il à notre droit de s'inspirer des solutions venues des droits étrangers (B).

A- Les mesures palliatives d'une expropriation fautive

Eu égard au caractère inviolable et sacré du droit de propriété, dont nul ne peut être privé, si ce n'est par nécessité publique, en présence de manquements administratifs au cours de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'administration en charge des domaines devrait éponger les vices de procédure, et redresser les actes faisant griefs aux propriétaires. Au cas contraire, on tomberait sous le coup d'une dépossession illégitime qui cause préjudice aux individus. Ce préjudice injustement éprouvé par l'exproprié prend racine dans le détournement de pouvoir, l'excès de pouvoir dans la déclaration d'utilité, la non utilisation des terrains expropriés et l'absence de rétrocession administrative de la propriété injustement cédée ; mais encore, et c'est la plus grave, l'absence d'indemnisation, la sous-évaluation du préjudice subi qui sont l'oeuvre des organes administratifs, ne permettent pas aux expropriés de bénéficier des mesures compensatrices à l'expropriation.

Ces dysfonctionnements administratifs opérés au cours de l'expropriation entraînent la voie de fait ou l'emprise immobilière. La voie de fait présuppose une action matérielle de l'administration commise au mépris du droit de propriété et en marge de tout fondement législatif ou réglementaire. L'acte perd son caractère administratif et s'inscrit dans une logique d'abus administratifs, d'atteinte grave à la propriété des particuliers. En conséquence, tout acte juridique lié à la procédure d'expropriation dès lors qu'il est vicié par la faute de l'administration, doit être déclaré caduque c'est-à-dire sans effets juridiques ou même annulé lorsque l'opération projetée n'a aucun fondement.

En droit français, pour pallier les spoliations illégales des expropriés, il est prévu une phase administrative et une phase judiciaire au cours de la procédure d'expropriation : l'autorité administrative est chargée des formalités de transfert de propriété et le juge judiciaire fixe l'indemnité. En outre, par respect pour l'Etat de droit, le propriétaire illégalement dépouillé de son bien peut le récupérer, au travers de la rétrocession, ou à défaut, il peut lui être versé une indemnité complémentaire pour le préjudice subi par la dépossession.

B- Le plaidoyer pour une consécration législative de la rétrocession

La rétrocession du bien illégalement exproprié est absente dans les textes camerounais relatifs à l'expropriation, et n'a été envisagée pour la première fois que dans la célèbre affaire Société Renault du Cameroun119(*). Sa paternité est issue du code de l'expropriation français notamment en son article L.12-6 et l'article 54 de l'ordonnance de 1958 sur l'expropriation. Ces articles prévoient que : « si les immeubles expropriés n'ont pas reçu, dans le délai de cinq ans, la destination prévue, ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droits peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans ». Selon Madame LEMASURIER, « cette procédure s'analyse non pas comme une résolution, mais comme une nouvelle cession à un prix nouveau correspondant à la valeur du bien, appréciée au moment de sa restitution »120(*).

En tout état de cause, la procédure de rétrocession vise à sanctionner les carences, les manquements de l'expropriant. L'illégalité de l'action administrative est un domaine qui atteint son paroxysme dans le contentieux de l'expropriation, comme nous le révèle la célèbre affaire de la MAGZI. Les faits de la cause méritent d'être retracés. Par arrêté n°780/A/MINUH du 21 janvier 1986, l'Etat camerounais déclarait d'utilité publique des parcelles de terrains sises à MVAN et NSAM d'une superficie globale de 316 hectares et portant extension de la zone industrielle de Yaoundé-Sud. Par un autre décret n°85/1714 du 09 décembre 1985, ces terrains ont été incorporés dans le domaine privé de l'Etat et mis à la disposition de la Mission d'Aménagement et de Gestion des Zones Industrielles (MAGZI). Cette structure ayant pour rôle, la promotion d'un développement harmonieux en zone urbaine, par la captation d'investisseurs aux fins de mener des activités industrielles. Au cours de la procédure d'expropriation, après enquêtes publiques et contradictoires, les expropriés ont reçu une indemnité compensatrice à la suite de leur dépossession et du transfert de propriété. Malheureusement, la MAGZI a eu maille à partir avec des occupants irréguliers, titulaires de titres fonciers sur ces parcelles de terrains déclarés d'utilité publique. Il appert que certains services de l'administration foncière ont procédé aux rétrocessions fictives des terrains expropriés, et n'ont pas retirés les titres fonciers, qui après l'expropriation, ont fait l'objet de morcellement et de vente. Par voie d'arrêté, le Ministre des affaires foncières a retiré 163 titres fonciers établis en violation de la réglementation, sur des parcelles de terrains déclarées d'utilité publique  sans qu'aucune rétrocession ne soit intervenue.

Section 2 : La réparation par voie juridictionnelle

Le contentieux foncier se démarque par l'intervention de deux ordres de juridictions : l'ordre judiciaire et l'ordre administratif. En effet parce qu'il met en prise l'Etat et les particuliers, le contentieux foncier est traité, et devant le juge administratif, et devant le juge judiciaire. Etant entendu que l'étude porte sur la faute de l'administration en matière foncière, il y'a lieu d'apprécier les réponses juridictionnelles à la faute administrative. Il sied à cet effet d'analyser la réparation octroyée par le juge administratif d'une part (§1), et d'autre part, celle octroyée par le juge judiciaire (§2).

§1 : La réparation du préjudice par le juge administratif

Le juge administratif en droit camerounais, en attendant l'application effective de la loi n° 2006/016 du 29 Décembre 2006, est la Cour Suprême qui dispose d'une formation administrative, et d'une Assemblée plénière.

Ainsi, tout dommage résultant d'une activité administrative, est porté devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême; en cas d'insatisfaction, le requérant intente un recours devant l'Assemblée Plénière de l'auguste cour. Suivant la pratique du contentieux administratif, le juge administratif ne peut lui-même redresser la situation litigieuse, sauf dans des cas précis.121(*) Il ne lui appartient pas de prendre une décision à la place de l'administration ; il ne peut que prononcer les mesures suivantes : soit annuler la décision administrative faisant grief au requérant, soit attribuer une indemnité en argent mais généralement, il s'agit de franc symbolique.

Tout au moins, en ce qui concerne le contentieux foncier, il est notoire qu'en cas de faute administrative, le juge administratif procède à l'annulation de la décision ou de l'acte faisant grief au propriétaire foncier ou à tout requérant. L'annulation juridictionnelle se distingue du retrait administratif dans ces conséquences. Il est alors impérieux d'étudier cette sanction juridictionnelle qu'est l'annulation dans son régime et ses conséquences.

A - L'annulation des actes faisant grief

Qu'il s'agisse du titre foncier irrégulièrement délivré ou d'un arrêté de déclaration d'utilité publique, le juge administratif camerounais est compétent pour annuler tout acte administratif accompli en marge de la réglementation. La faute administrative constitue une illégalité au sens d'une attitude de l'agent, qui par négligence ou malveillance, en violation des obligations légales de la fonction ou du devoir de ne causer aucun dommage à autrui.

L'hypothèse de l'annulation d'un titre foncier n'intervient qu'après le recours gracieux préalable introduit auprès du Ministre tendant au retrait du titre foncier. Ce n'est qu'après refus exprès de ce retrait que le requérant est en droit d'introduire son action près au greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême, et ceci, en respect des délais de rigueur. De manière concrète, le requérant a un délai de 60 jours à compter de la décision de rejet du recours gracieux adressé au Ministre.

Le titre foncier étant un acte administratif créateur de droit au profit de son bénéficiaire, lorsqu'il est avéré qu'au cours de son obtention, des dysfonctionnements administratifs se sont produits, la règle est que le juge l'annule. L'annulation constitue en droit la sanction la plus grave car l'acte disparaît de l'ordonnancement, et est réputé n'avoir jamais existé.

Le juge administratif camerounais a eu l'occasion dans plusieurs espèces, de faire application d'une telle mesure. Ainsi, dans l'affaire Effa Paul Marcel, le juge a prononcé l'annulation de l'arrêté n°000074/yo14.4/MINDAF/D100 du 30 mai 2005 du Ministre des domaines et des affaires foncières  pour détournement du caractère d'utilité publique. Pareillement dans une espèce relative à une immatriculation fautive, le juge dans l'affaire NDJESSE Justin a ordonné l'annulation de la décision administrative et le retrait du titre foncier n°7609/Lekié.

L'analyse des décisions rendues par cette chambre indique que le juge administratif ne manque pas de faire usage de cette sanction. La quantité et la qualité des décisions rendues par l'auguste chambre en la matière réussissent à persuader de l'utilisation de cette sanction. L'on déplore seulement le fait que la Chambre déboute généralement les requérants des prétentions ayant trait à l'octroi de dommages intérêts en complément de l'annulation du titre foncier litigieux.

B- Les conséquences de l'annulation juridictionnelle

En droit positif camerounais, indépendamment du caractère administrativiste, ou civiliste, l'annulation d'un acte le fait disparaître de l'ordonnancement juridique, et ceci, de manière rétroactive.

En matière foncière, notamment au cours de l'immatriculation, lorsqu'un titre foncier est annulé par une décision du juge administratif, on considère qu'il n'a jamais existé et la procédure qui a eu cours n'est plus valide. Les parties requérantes disposent de la faculté de recommencer une nouvelle procédure d'obtention du titre foncier, qui cette fois-ci, sera protectrice de leurs droits et du droit applicable.

Une fois le titre foncier annulé par le juge administratif, l'administration est tenue de le retirer et de procéder à une nouvelle immatriculation. Si le morcellement ou toute autre procédure ont été effectués sur ledit titre foncier, elles seront toutes annulées car l'annulation a un effet erga omnès. Tous les actes passés sous le fondement d'un acte juridique annulé perdent leur validité, et encourent la même sanction qu'est l'annulation. Les effets de l'annulation s'étendent aussi dans le temps. L'annulation tient pour l'avenir comme pour le passé. L'acte est supposé n'avoir jamais existé. Tout se passe alors comme si on est en présence d'un vide. On suppose que l'acte n'a jamais existé, et par conséquent ne peut avoir de suite. Tous les effets qu'il a pu produire sont anéantis rétroactivement.

§2 : L'intervention du juge judiciaire dans la réparation du préjudice en matière foncière

Le juge judiciaire, civil ou répressif pourrait intervenir dans la réparation du préjudice subi en matière foncière, car il est communément admis qu'il est le gardien de la propriété privée et des libertés fondamentales. A ce titre, toutes les fois où la propriété immobilière aura subi un empiètement administratif, la réparation aura lieu devant cet ordre juridictionnel. Il s'agira principalement des litiges relatifs à l'indemnisation dans la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique en vertu de la position constante de la Cour Suprême suivant laquelle : « les litiges nés de l'expropriation n'entrent pas dans le domaine du contentieux administratif et échappent donc à la compétence de la chambre administrative de la Cour Suprême122(*) Au préalable, il faudrait signaler que des contestations relatives à la procédure d'expropriation peuvent être soulevées devant le juge administratif car, il est le juge de l'excès de pouvoir, et en conséquence, toutes les fois où l'autorité expropriante aura utilisé les pouvoirs qui sont les siens dans un but autre, dans un cadre autre que l'utilité, l'action sera ouverte devant le juge administratif. Par ailleurs, en matière d'immatriculation, il est admis que le juge judiciaire ne peut prononcer aucune mesure sur l'immeuble à immatriculer. Il est seulement compétent lorsqu'il faut statuer sur une demande en dommages et intérêts en cas d'immatriculation dolosive. Il appartient aux commissions consultatives de trancher tous litiges relatifs à l'immatriculation. Toute précision faite, il importe alors d'envisager le rôle respectif du juge civil et du juge pénal dans la répression des atteintes à la propriété foncière causées par l'administration.

A- Le juge civil, juge des dommages et intérêts

Aux termes de l'article 12 de la loi n°85/09 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique : « En cas de contestation sur le montant des indemnités, l'exproprié adresse sa réclamation à l'administration chargée des domaines (...). S'il n'obtient pas satisfaction, il saisit dans un délai d'un mois, à compter de la date de notification de la décision contestée, le tribunal judiciaire compétent du lieu de situation de l'immeuble (...) ». A la lecture de ce texte, on sous entend que la contestation peut être relative à une absence d'indemnisation, une sous-évaluation du préjudice, aux ajouts des bénéficiaires fictifs venant réduire le montant de l'indemnité à allouer aux expropriés. Ainsi, le juge civil peut confirmer, réduire ou augmenter le montant de l'indemnité suivant les modalités d'évaluation textuelles. Dans la célèbre affaire FOE GORGON, le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé, abondant dans le sens du requérant qui contestait l'indemnité, lui a attribué une indemnité supplémentaire en réparation intégrale du préjudice subi.123(*)

B- Les condamnations pénales à l'encontre de l'agent administratif fautif

Conformément aux dispositions de l'article 9 de l'ordonnance de 1972 : alinéa 3, « les tribunaux de droit commun connaissent, conformément au droit privé, de toute autre action ou litige même s'il met en cause les personnes morales énumérés au paragraphe 1 ; la responsabilité de ladite personne morale étant à l'égard des tiers, substituée de plein droit à celle de son agent, auteur des dommages causés, même dans l'exercice de ses fonctions. » Alinéa 4 « Ils connaissent en outre des emprises et voies de fait administratives et ordonnent toute mesure pour qu'il y soit mis fin (...) »

Cette assertion réaffirme l'opinion du Professeur Devolvé pour qui,  « la responsabilité administrative est presque toujours une responsabilité du fait d'autrui ».124(*) Une fois qu'un agent de l'administration s'est personnellement rendu coupable d'action qui porte atteinte au droit de propriété, sa responsabilité pénale sera engagée. En vertu de l'article 8 de l'ordonnance 74-1 du 6 juillet 1974 dispose que :  « 1°Les actes constitutifs, translatifs ou extinctifs de droits réels immobiliers doivent à peine de nullité, être établis en la forme notariée [...]. En outre, les vendeurs, les bailleurs, ainsi que les notaires et greffiers notaires, auteurs desdits actes sont passibles d'une amende de 25 000F à 100 000F et d'un emprisonnement de 15 jours à 3ans ou d'une de ces deux peines seulement (...). 3° Les notaires ou greffiers notaires qui prêtent leur concours aux personnes susvisés ou qui passent des actes sur les immeubles situés en dehors du ressort territorial de leur étude (...) ; ».

Pareillement, l'alinéa 8 de l'article 2 du décret de 2005 dispose que : « les agents publics reconnus auteurs ou complices des actes irréguliers ayant entraînés le retrait ou la constatation de nullité d'un titre foncier, sont sanctionnés conformément aux dispositions de l'article 2 de la loi n°80/22 du 14 juillet 1980 portant répression des atteintes à la propriété foncière et domaniale ». En vertu de ce texte : « Sont passibles d'une amende de 50 000 à 200 000F et d'un emprisonnement de 2 mois à 3 ans, ou de l'une de ces deux peines seulement :

a- Ceux qui exploitent ou se maintiennent sur un terrain appartenant à autrui [...] b- Les agents de l'Etat convaincus de complicité dans les transactions foncières de nature à favoriser l'occupation irrégulière de la propriété d'autrui. » Par cet arsenal répressif, on comprend que certains fonctionnaires et commis de l'administration en charge de la matière foncière se retrouvent forcés à passer des séjours dans des maisons d'arrêt.

Pour clore ce chapitre relatif à la réparation du préjudice subi par les usagers des services en charge des affaires foncières, l'on peut dire de manière précise que depuis la grande reforme opérée en 2005, cette réparation est constante, mais reste insuffisante.

conclusion generale

En guise de conclusion à nos travaux relatifs à la faute de l'administration en matière foncière, nous ne faisons pas un aveu, mais un voeu, la réparation du préjudice subi par les individus du fait de la faute administrative en droit camerounais est perfectible. C'est un constat, le droit de propriété n'est pas intégralement réparé en cas de piétinements administratifs.

Tout au début de notre travail, nous avons essayé de mettre en relief la part de responsabilité des autorités et services administratifs en charge de la matière foncière, et ceci dans l'optique de vérifier l'état des droits et l'Etat de droit au Cameroun.

Ce travail s'articulait préalablement autour de la détermination de la faute administrative en matière foncière, à travers les caractéristiques et les manifestations de cette faute, et ceci dans un souci de préciser ces définitions et contours. Englobe alors notre examen la faute administrative commise au cours des procédures d'immatriculation d'une part, et d'autre part commise lors des cessions de propriété, suivant qu'il s'agisse d'une cession volontaire ou d'une cession forcée. Nous n'avons eu à aucun moment la prétention de faire un inventaire exhaustif des déterminants de cette faute , tout au moins, s'agissait-il des plus apparents, des plus sensibles susceptibles d'engendrer des conséquences, conséquences dont il a été ensuite question.

En effet, nous avons présenté les conséquences des dysfonctionnements administratifs dans la vie des usagers des services fonciers, tant sur le plan matériel et donc économique, que moral et affectif. Comme le déclare à propos un auteur, «  la propriété et partant l'instinct de possession est profondément enraciné dans la nature des hommes ; le droit à une propriété, stable semble correspondre à un besoin universel et permanent ». En conséquence, les manquements administratifs au cours de l'acquisition et de la cession de propriété préjudicient aux intérêts des particuliers. Cet état de chose permet en tout état de cause, la mise en oeuvre de la responsabilité administrative. Responsabilité à régime spécial, car somme toute, l'étendue et l'effectivité de cette responsabilité obéissent à un régime juridique précis. La faculté de mettre en oeuvre la responsabilité de l'administration s'inscrit dans une logique de promotion de l'Etat de droit qui recouvre fondamentalement deux exigences :

- l'exigence d'un corps de règles générales, impersonnelles connues et publiées, existant préalablement à tout conflit et susceptible d'être invoquées par tout acteur social, qu'il soit ou non en conflit.

- L'obligation pour l'autorité instituante, essentiellement l'Etat, de se tenir au dispositif ainsi élaboré, et de se sentir obligé par les normes qu'elle a édicté.

En présence d'une faute administrative, la personne qui en est victime, a le droit de demander réparation à l'auteur du forfait, en l'occurrence l'Etat. Or comme il n'existe véritablement pas de répression à l'encontre de l'administration, comment contraindrait-on le pouvoir agissant de l'Etat? Cette sanction penchera alors pour un caractère plus réparateur. Cette réparation est l'oeuvre, et de l'administration, et du juge. Parce qu'il lui appartient en premier de trancher une réclamation qui met en prise les particuliers, on dit qu'elle est en même temps juge et partie, et on doute alors des garanties accordées aux administrés. Fort heureusement, le juge administratif, comme le juge judiciaire peuvent intervenir dans cette réparation, l'un pour appliquer la soumission de l'administration au droit, et l'autre pour garantir la protection des droits et libertés des individus.

De ce fait, en matière foncière, la réforme opérée par le décret n°2005/481 du 16 décembre 2005 vient garantir les individus contre les forfaits opérés par les agents de l'administration au cours de l'immatriculation.

Cette réforme, louable en ce qu'elle élargit textuellement la répression des atteintes aux agents de l'Etat, reste insuffisante. Insuffisante dans la mesure où elle ne prévoit que la répression de la faute commise lors des procédures d'immatriculation, elle aurait pu aller plus loin, et englober toutes les fautes commises par les structures et fonctionnaires administratifs impliqués dans des opérations foncières . Mais encore le régime de la faute est inconnu. S'agit-il de la faute de service ou de la faute personnelle de l'agent, encore que cette distinction doctrinale est malaisée du fait de l'imbrication du service et de la vie privée de l'agent fautif.

En plus, la faute est un concept assez fuyant : s'agit-il de l'illégalité de l'action administrative ou de l'anormalité dans son action. Pour dire ainsi que le régime de la responsabilité administrative en matière foncière n'est pas d'une évidence première.

Par ailleurs, en ce qui concerne l'aspect pratique de la recherche, il s'agit profondément de s'interroger sur l'efficacité des services du Ministère des domaines dans l'appréciation et la réparation d'une faute imputable à leurs organes quand on sait que l'environnement foncier camerounais est frelaté et se démarque par l'inertie, le laxisme, la corruption, les abus de pouvoirs et bien d'autres maux. La mise en place d'une cellule anti-corruption au MINDAF laisse occulter que tout ne sera plus comme avant ; l'assainissement de la gestion foncière est un impératif pour la cohésion sociale, la sécurité juridique et la crédibilité du dispositif réglementaire.

Dans cette perspective, pour enrayer l'illégalité administrative, le combat doit se faire sous un double plan. D'abord en amont, au niveau des administrations en charge de la matière foncière, il faudrait qu'il y ait une redéfinition de la notion de service public. La bonne gouvernance oblige en effet que les commis de l'Etat redécouvrent la notion de service public et les valeurs qui lui sont associées notamment, l'honnêteté, la distinction des sphères privée et publique, le droit accompli et le service rendu.

Ensuite en aval, au niveau des usagers, des citoyens qui doivent être associés à l'organisation fonctionnelle du service public. Cela entraîne une sensibilisation des usagers qui prennent conscience de leurs droits.

L'ignorance constitue au fond la première atteinte du droit de propriété. Enlever l'ornière de yeux de l'usager, c'est le remettre dans la course, et partant le faire participer dans le processus de développement, dont la terre constitue un des piliers au Cameroun.

ANNEXES

Annexe 1- Exemplaire du questionnaire utilisé au cours des enquêtes.

Annexe 2- Extraits du Bulletin d'information Domaines Infos

QUESTIONNAIRE AU COURS DES ENQUETES

1) Qu'entend-on par faute administrative en matière foncière ?

2) Comment se manifeste-t-elle en matière foncière ?

3) Quelle est la reaction des services du MINDAF face à une faute commise par un de ses organes ?

4) Quelles garanties l'administration foncière accorde aux victimes des fautes administratives ?

5) Comment éviter la faute en matière foncière ?

INDEX ALPHABETIQUE

A

Abus d'autorité, 13, 64, 87, 90, 94

Abus de pouvoir, 13, 64, 87, 90, 94

Acquisition, 5, 28, 38, 48,, 56, 69, 72, 85

Acte administratif, 24, 85, 89

Administration, 5,15, 21, 39, 45, 50, 59, 66, 83, 90,

Affaire foncière, 6, 13, 30, 39, 40, 58, 77, 86, 94

Annulation, 6, 58, 85, 89,

Autorité administrative, 13, 28, 42, 58, 63, 77, 85, 90

B

Bornage, 35, 43, 49, 60

C

Cadastre, 29, 31, 44, 60

Cameroun, 9,31, 45,53, 61, 87, 95

Commission consultative, 18, 30,45, 51, 64, 85,

Commission d'évaluation, 18, 23, 29, 37, 42,51, 64, 85, 92

Compétence, 29, 36, 42, 53, 86,

Concession, 28, 48, 55,

Conséquences, 5, 11, 24, 44, 67, 78,

Conservation foncière, 27, 33

Contentieux, 13, 22, 42, 61, 69

Corruption, 94,

Cour suprême, 64, 96

D

Degré de gravité, 17, 23

Délégation départementale, 31, 41

Délégation provinciale, 35

Dépossession, 66, 74, 81

Détournement, 62, 86, 94

Dol, 18, 78

Domaine national 27, 35, 41, 53

Domaine privé de l'Etat, 35, 87

Dommages, 12, 20, 72, 79, 91

Droit de propriété, 12, 39, 60, 69, 75,80, 96

E

Emprise, 40, 47, 74

Enquête préalable, 62, 65

Erreur, 17, 24, 43, 46

Expropriation pour cause d'utilité publique, 13, 27,36, 57, 69, 74, 80, 86

F

Faute, 5, 20,26, 37, 46, 49, 57, 64, 70,,80, 89, 96

Fraude, 53

G

Gouverneur, 94

I

Illégalités, 82, 85

Immatriculation, 13, 27, 40, 47, 50, 56, 60, 78, 86, 94, 97,

Immeuble, 12, 28, 41, 51, 61, 72, 80, 85

Incidences, 17, 19, 24, 74

Indemnisation, 61, 67, 88

Infraction, 18

Irrégularités, 46, 49, 52, 55, 62, 67, 75, 80

J

Juge administratif, 20, 37, 57, 64, 75, 85,, 96,

Juge civil, 20, 37, 57, 64, 75, 85, 91,

Juge judiciaire, 20, 37, 57, 64, 69, 75, 85, , 91, 97

Juge pénal, 20, 24, 37, 57, 64, 75, 85, 90,

L

Litige foncier, 64, 88

M

Manquements administratifs, 38, 55, 61

Matière foncière, 5, 15, 30, 40, 45, 60, 70, 79, 84,90, 96

Ministère, 6, 27, 31, 33, 51, 93, 94, 95, 96,

Ministre, 28, 29, 30, 51, 54, 63, 64, 68, 78, 85, 87, 88, 90, 93, 94, 95

Mise en valeur, 29, 32, 40, 42, 43, 44, 49, 51, 52, 55, 64

Morcellement, 57, 58, 59, 60

Mutation, 57, 58, 59, 60

N

Notaire, 57,59

Nullité, 43, 57

O

Opposition, 44, 60, 86

Ordre public, 58

P

Préfet 29, 41,51, 55, 85, 90

Préjudice, 6, 19, 66, 71, 88, 92,

Procédure d'expropriation, 13, 27, 36, 45, 50, 65, 74, 75, 80, 86

Procédure d'immatriculation, 13, 27, 36, 52, 74, 80, 87

Propriété, 5, 12, 27, 35, 39, 46, 50, 61, 70, 75, 80, 85

Puissance publique, 11, 12, 22, 24, 25, 83, 84, 90

R

Recours gracieux, 100, 110

Réforme, 9, 101, 117

Réparation, 6, 12, 21, 25, 66, 72, 91, 97

Répression, 10,

Responsabilité, 1, 15, 20, 25, 46, 71, 83, 90, 96,

Retrait du titre foncier, 33, 78, 87

Rétrocession, 68

S

Sanction, 5, 13, 88

Sécurité juridique, 82

Services administratifs, 10, 29, 40

T

Titre foncier définitif, 6, 30, 40, 50, 60, 68, 79, 80 - inattaquable, 6, 30, 50, 57 , 68, 75, - intangible, 6, 30, 40, 57, 68, 75, 80

Tribunal, 20, 43, 91

V

Vente, 49, 58, 79 Violation, 16, 24, 42, 53, 58, 85, 89

Voie de fait, 26, 81

BIBLIOGRAPHIE

I- LEGISLATION

· LOI n°80/22 du 14 juillet 1980, portant répression des atteintes à la propriété foncière et domaniale au Cameroun

· LOI n°85/9 du 04 juillet 1985, modifiant et complétant certaines dispositions de l'ordonnance n°74/3 du 06 juillet 1974, relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation au Cameroun

· Ordonnance n°74/1 du 06 juillet 1974, fixant le régime foncier au Cameroun

· Ordonnance n°74/2 du 06 juillet 1974, fixant le régime domanial au Cameroun

· Ordonnance n°74/3 du 06 juillet 1974, relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

· Décret n°76/165 du 27 avril 1976, fixant les conditions d'obtention du titre foncier au Cameroun

· Décret n°76/166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine national

· Décret n°76/167 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine privé de l'Etat

· Décret n°79/017 du 13 Janvier 1979, relatif aux transactions immobilières privées au Cameroun

· Décret n°84-311 du 22 Mai 1984, portant modalités d'application de la loi n°80- 22 du 14 Juillet 1980

· Décret n°2005/178 du 27 mai 2005, portant organisation du Ministère des Domaines et des Affaires Foncières (MINDAF)

· Décret n°2005/481 du 16 décembre 2005, modifiant et complétant certaines dispositions du secret n°76/ 165 du 27 avril 1976, fixant les conditions d'obtention du titre foncier

II- OUVRAGES

1- DEBBASCH (Ch.), Institutions et Droit administratifs / l'action et le contrôle de l'administration, éd. PUF, Paris, coll. Thémis Droit, 687 p.

2- KAMTO (M.), Droit administratif processuel du cameroun. (Que faire en cas de litiges avec l'administration), éd. PUC, coll. sciences juridiques et politiques, 1990.

3- KOUASSIGAN (G.A.), L'homme et la terre : droits fonciers coutumiers et droit de propriété en Afrique Occidentale, ORSTOM, éd. Berger- Levrault, Paris, 1966.

4- MANDESSI BELL (E.), Droit foncier au Cameroun, aspects théorique et pratique, ouvrage dactylographié, 1985, Tome1, 335 p.

5- MELONE (S.), La parenté et la terre dans la stratégie de développement, l'expérience camerounaise, étude critique, éd, Klincksiek Paris, 1972, 191 p.

6- NYAMA (J.-M.), Régime foncier et domanialité publique au Cameroun, éd. Presses de L'UCAC, Yaoundé, 2001, 481 p.

7- OWONA (J.), Droit administratif spécial de la République du Cameroun, éd. EDICEF, Yaoundé, 1985, 256 p.

8- STRUILLOU (J.-F.), Protection de la propriété privée immobilière et prérogatives de puissance publique, éd. L'Harmattan, Paris, France 1996, 523 p.

9- TCHIENTCHEU NJIAKO (A.) :

n Droits fonciers urbains au Cameroun, éd. PUA, Yaoundé 2003, 546p.

n Droits réels et domaine national au Cameroun, éd. PUA,

Yaoundé, 2005, 486p.

10- TERRE (F.), SIMLER (PH), & LEQUETTE (Y.), Droit civil, les obligations, éd. Dalloz 9e Paris, 2005.

11- TJOUEN (A.-D.), Droits domaniaux et techniques foncières en droit camerounais, (étude d'une réforme législative), éd. Economica, Paris, 1982, 204 p.

III- THESES ET MEMOIRES

A- THESES :

1. GASSE Victor, Le droit foncier outremer et son évolution depuis l'indépendance, Thèse de doctorat en droit, Université d'Aix Marseille, 1968.

2. KALA Benoît, Terre et pouvoir sur les plateaux Bamiléké de l'Ouest Cameroun, (prolégomènes à une étude critique de l'étatisation et de l'appropriation privée de la terre au Cameroun), Thèse de doctorat en sociologie, Institut Catholique de Paris, 1995

3. MPESSA Aloys, Essai sur la notion de régime juridique des biens domaniaux au Cameroun, Thèse de doctorat en droit, Université de Paris I - Panthéon Sorbonne, 29 juin 1998, t.1et 2.

4. POUGOUE Paul -Gérard, La famille et la terre : Essai de contribution à la systématisation du droit privé au Cameroun, Thèse de doctorat d'État, Université de Bordeaux I, juin 1977.

B- MEMOIRES

1- ABESSOLO (J-C.), La maîtrise des problèmes fonciers et domaniaux au Cameroun, mémoire de maîtrise en droit privé, Université de Yaoundé 1985-1986.

2- BATJE BATJE (C.G.), Les nouvelles administrations foncières et domaniales face au public, Université de Yaoundé 1977-1978.

3- MENZEKO KAGHO (C.), Le contentieux foncier, mémoire de DEA, Université de Yaoundé II, Soa 2002-2003.

4- NGNANGA EDINGUELE Thomas, La protection de la propriété privée par le juge judiciaire au Cameroun, mémoire de fin de formation, ENAM, 1996

5- NGONO (M.), L'expropriation pour cause d'utilité publique en droit camerounais, Université de Yaoundé 1987-1988.

6- NYETAM (PH.), Les litiges fonciers en droit camerounais, mémoire en droit privé, Université de Yaoundé, 1989-1990.

7- OWONA MANY (G.B.), L'état actuel du contentieux de l'immatriculation en droit camerounais, mémoire de DEA, Université de Yaoundé II Soa, 2003- 2004

8- SANDJI (R.), La répression des atteintes à la propriété domaniale (domaine public, domaine privé de l'Etat, domaine national), mémoire de maîtrise en droit, Université de Yaoundé, 1991.

9- SOMBOU (B.), Le juge et la protection de la propriété privée immobilière en droit camerounais, mémoire de maîtrise en droit privé, Université de Yaoundé, 1991

10- TCHAPMEGNI Robinson, L'occupation sans droit d'un immeuble en droit positif camerounais, mémoire de maîtrise, Université de Ngaoundéré, 2001.

- La détribalisation du régime foncier camerounais, mémoire de DUDF 3e cycle, droits fondamentaux, Université de Nantes, 2003.

IV- ARTICLES DE DOCTRINE

1- ABA'A OYONO (J.C.), « Expropriation pour cause d'utilité publique », in Juridis périodique, n° 32 octobre-novembre-decembre 1997, pp 29-38.

2- BILLONG Simon Pierre, « Le contentieux de l'annulation du titre foncier devant le juge administratif », communication lors de la conférence sur le foncier sur le thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo, 18 nov. 2005, disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf.

3- DRAGO (R.), « Responsabilité (principes généraux de la) », in Répertoire de la responsabilité de la puissance publique (RRPP), Dalloz, septembre 1999 7pp.

4- DUBOIS (J.P.), « Faute des agents et responsabilité administrative » in RRPP, Dalloz, janvier2003, 12pp.

5- ENCYCLOPEDIE DALLOZ : Répertoire de la responsabilité de la puissance publique, Dalloz, Paris, cop.2003, pagination multiple.

6- FANSI Paul Marcelin, « La situation juridique des occupations du domaine national», conférence sur le foncier, thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005, disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf.

7- GOUR (C.), « Faute de service » in Répertoire de la responsabilité de la puissance publique (RRPP). Dalloz.

8- LEMASURIER (J.), « la cacophonie juridique du contentieux de l'expropriation » in Mélanges en hommage à Roland DRAGO, l'unité du droit, Economica, 1996, 503pp, pp427-445.

9- MANDESSI BELL Evelyn, « Radioscopie d'un système foncier africain: l'exemple du Cameroun cinquante ans après ». Penant, mai-juin 1987, p. 286.

10- MBUNJA (Y.), « La protection de la propriété immobilière privée par le juge civil », conférence sur le foncier, thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005, disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problématique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf. )

11- MPESSA (A.), « Le titre foncier devant le juge administratif camerounais » in Juridis périodique N°59 juillet- août - septembre 2001, pp.77-90.

12- NDZUENKEU (A), « L'efficacité de la répression des atteintes à la propriété foncière et domaniale », conférence sur le foncier, thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005, disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf.)

13- OWONA (J.),  « l'expropriation pour cause d'utilité publique », Chapitre XVI, Tome V de l'encyclopédie juridique de l'Afrique, N.E.A.

14- PAULIAT Hélène, « Le droit de propriété devant le conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l'homme », Revue de droit public, 1995, p. 1445.

15- PETTITI Christophe, « La réparation des atteintes au droit de propriété : l'application de l'article 41 de la C.E.D.H. » in La protection du droit de propriété par la Cour européenne des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant, 2005.

16- POUGOUE (P.-G.), « Le régime foncier de l'immatriculation », Encyclopédie juridique de l'Afrique, Abidjan, t.5, Les nouvelles éditions africaines, 1982.

17- PROUZET (M.), l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, RCD N°1 1972, pp.27-33.

18- RADE (C.), « L'impossible divorce de la faute et de la responsabilité civile », in recueil Dalloz 1998, 32e cahier, chron. pp.301-305.

19- ROBERGE (D.), « La protection des droits fonciers, facteur-clé du développement durable. L'exemple du Québec », article mis en ligne sur : http://www.topoepfl.ch/Mocours/siteweb/FG/ROBERGE.pdf.

20- ROCHEGUDE (A.), « Fonciers et décentralisation : réconcilier la légalité et la légitimité des pouvoirs domaniaux et fonciers », in bulletin de liaison du LAJP N°26 septembre 2001.

21- TAGOUEMEKONG Honoré, « Le contentieux d'annulation du titre foncier », conférence sur le foncier. Thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005, disponible sur le site web (www.environnement- propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf.

22- TCHAPMEGNI Robinson :

· « La logique foncière environnementale de l'État camerounais », in Les ressources foncières. Droits de propriété, Économie et environnement,  VIe conférence internationale Aix en Provence, Université Paul Cézanne, 26, 27, 28 juin 2006, sous la direction de Max FALQUE, Henri LAMOTTE, Jean François SAGLIO, Bruylant, 2007, pp.545-559.

· « L'actualité de la question foncière en Afrique », conférence sur le foncier, thème : La problématique de la propriété foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov.2005, disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf).

· « La réforme de la propriété foncière au Cameroun », communication présentée au cours du Géo congrès 2007 tenu à Québec du 03 au 05 octobre 2007, disponible sur le site web ( www.quebec2007.ca).

· « La situation de la propriété foncière au Cameroun : obstacles, conséquences et perspectives », communication présentée à la session de la commission du groupe du travail de la fédération internationale des géomètres à Québec, le 02 octobre 2007, disponible sur le site web ( www.quebec2007.ca)

· « L'organisation juridique de la propriété foncière au Cameroun », in EBERHARD Christoph, Law, land use and environment: Afro-Indian dialogues - Enjeux fonciers et environnementaux : Dialogues Afro indiens,  Institut Français de Pondichéry, (Collection sciences sociales, n° 13), 2008, pp.219-232.

23- TIXIER (G.), « les limites de la compétence de l'autorité judiciaire en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique » in recueil Dalloz, 195-, 28e cahier, chron. XX, pp103-108.

VI- LEXIQUES- OUVRAGES METHODOLOGIQUES

A- Lexiques :

a. Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 11 éd. 1998, 567 p.

b. Vocabulaire Juridique, CORNU (G.), Association Henry CAPITANT, Paris, PUF, Quadrige, 4éd. 2003, 951pp

c. Dictionnaire Universel, 4éd. Hachette, Edicef 2002.

B- Ouvrage méthodologique :

- Beaud (M.), L'art de la thèse, Paris, La découverte, 2001, 200pp.

Table des matieres

Pages

AVERTISSEMENT...............................................................................I

DEDICACE.........................................................................................II

REMERCIEMENTS..............................................................................III

LISTE DES ABREVIATIONS..................................................................IV

SOMMAIRE.........................................................................................V

RESUME..............................................................................................VI

ABSTRACT..........................................................................................VII

INTRODUCTION GENERALE...................................................................1

TITRE 1 : LA DETERMINATION DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE 6

CHAPITRE 1: LA PARTICULARITE DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE..............................................................................7

SECTION1 : LES CARACTÉRISTIQUES DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE 7

Paragraphe 1 : La faute civile et la faute administrative 8

A - La notion de faute 8

B - La typologie de fautes en droit civil 9

Paragraphe 2 : La singularité de la faute administrative 11

A - Le rattachement au service : la qualification de faute de service ou de faute personnelle 11

1 - Notion et contours de la faute personnelle 12

2 - La faute de service 13

B - L'implication du degré de gravité dans la faute 15

1 - L'erreur et la faute simple 15

2 -La qualification de faute lourde 16

SECTION 2 : L'IDENTIFICATION DES STRUCTURES ADMINISTRATIVES MISES EN CAUSE DANS LA FAUTE EN MATIERE FONCIERE 18

Paragraphe 1 : Les intervenants administratifs directement mis en cause 19

A- Les chefs d'unités administratives 19

1- Le rôle du Gouverneur ou du préfet en matière foncière 19

2- L'implication du Sous-préfet ou du Chef de district 20

B- Les structures administratives ad-hoc 20

1- La commission consultative 21

2-- La commission d'évaluation 22

3- La conservation foncière 23

Paragraphe 2 : L'implication des structures déconcentrées et de tutelle. 24

A- La délégation départementale des domaines et des affaires foncières 24

1 - Le service départemental des affaires foncières 24

2 - Le service départemental des domaines 25

3 - Le service départemental du cadastre 25

B - La Délégation provinciale des domaines et des affaires foncières 26

SECTION 1 : LA FAUTE COMMISE PENDANT L'ACQUISITION DE LA PROPRIÉTÉ IMMOBILIÈRE 29

Paragraphe 1 : L'immatriculation des terres de la première dépendance du domaine national. 30

A- Les dysfonctionnements des services administratifs au cours des phases préalables à l'immatriculation. 31

B - Les dysfonctionnements liés aux formalités d'établissement et de délivrance du titre foncier 35

1- La nature des manquements du conservateur foncier 36

2- Les faits susceptibles d'être considérés comme fautes du conservateur. 36

Paragraphe 2 : La faute administrative lors de l'acquisition des terres libre de toute occupation effective 38

A- Les dysfonctionnements administratifs au cours de l'octroi des concessions provisoires 39

1- Le formalisme procédural relatif à la concession provisoire 40

2- Les irrégularités commises par le concédant administratif 41

B - Les fautes issues de l'attribution des concessions définitives 43

1- Les données préalables à la transformation. 43

2 - Les manquements administratifs constatés 44

SECTION 2 : LA FAUTE ADMINISTRATIVE COMMISE LORS DE LA CESSION DE PROPRIÉTÉ 45

Paragraphe 1 : La faute administrative lors des opérations de cession volontaire de propriété entre particuliers. 45

A - Le nécessaire implication du notaire dans les opérations de cessions foncières 46

B- La faute administrative en cas de démembrement d'immeuble 47

Paragraphe 2: Les manquements administratifs au cours de la procedure d'expropriation pour cause d'utilité publique .................................................50

A- Les fautes commises lors des formalités préalables à l'expropriation 50

1- L'illégalité de l'action administrative lors du déclenchement de la procédure 51

2- La faute administrative au cours de l'enquête préalable 52

B - Les dysfonctionnements administratifs à l'issue du transfert de propriété 53

1 - L'absence d'indemnisation préalable 54

2 - La non utilisation des terrains expropriés dans les délais 55

CONCLUSION AU TITRE I 58

TITRE II: LES CONSEQUENCES ET LA SANCTION DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE 59

CHAPITRE 1 : LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE ET LA RESPONSABILITE DE L'ADMINISTTRATION 60

SECTION1 : LES CONSÉQUENCES DOMMAGEABLES DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIÈRE FONCIÈRE 61

Paragraphe 1 : Les conséquences d'une immatriculation fautive du chef de l'administration 61

A- Les conséquences matérielles de la faute dans l'immatriculation 62

B - La fragilisation de la force probante du titre foncier 64

Paragraphe 2 : Les conséquences de la faute administrative dans la procédure d'expropriation. 66

A - La dépossession illégitime du droit de propriété 67

B - L'insécurité juridique résultant de l'atteinte au droit de propriété 68

SECTION 2 : LA RESPONSABILITÉ ADMINISTRATIVE DU FAIT DE SES ACTES FAUTIFS EN MATIÈRE FONCIÈRE 69

Paragraphe 2: L'etendue de la responsabilité administrative en matiere fonciere.............................................................................70

A- Les cas d'ouverture de la responsabilité administrative 70

1- L'incompétence 70

2 - Le détournement de pouvoir. 71

B - L'imputabilité de la faute dans la mise en oeuvre de la responsabilité administrative 74

1 - La faute personnelle et la responsabilité personnelle de l'agent administratif. 74

2 - La faute de service et la responsabilité de l'Etat 75

3 - La complexité de la distinction et enchevêtrement des responsabilités 76

Paragraphe 2 : La réalité de la responsabilité administrative en matière foncière au Cameroun 77

A- La réaction administrative face à la faute commise 77

B- La réaction juridictionnelle face à la faute administrative 80

CHAPITRE 2 : LA RÉPARATION DU PRÉJUDICE SUBI PAR LA VICTIME DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE. 83

SECTION 1 : LA RÉPARATION DU PRÉJUDICE SUBI PAR VOIE ADMINISTRATIVE. 84

Paragraphe 1 : Les mesures administratives palliatives de l'immatriculation fautive 84

A- L'anéantissement du titre foncier 84

1- Le retrait ministériel des titres fonciers irrégulièrement délivrés 85

2 - L'annulation ministérielle du titre foncier irrégulièrement délivré 86

B - Les conséquences de l'anéantissement administratif du titre foncier 87

Paragraphe2 : La réparation administrative d'une expropriation fautive 88

A- Les mesures palliatives d'une expropriation fautive 88

B- Le plaidoyer pour une consécration législative de la rétrocession 89

SECTION 2 : LA RÉPARATION PAR VOIE JURIDICTIONNELLE 90

Paragraphe 1 : La réparation du préjudice par le juge administratif 90

A - L'annulation des actes faisant grief 91

B- Les conséquences de l'annulation juridictionnelle 92

Paragraphe 2 : L'intervention du juge judiciaire dans la réparation du préjudice en matière foncière 93

A- Le juge civil, juge des dommages et intérêts 93

B- Les condamnations pénales à l'encontre de l'agent administratif fautif 94

CONCLUSION GENERALE....................................................................96

* 1 Comme le disait un élu local de l'Etat camerounais, « la plupart des conflits ont pour origine la terre ; ils [les conflits] sont légions, sanglants, et mortels ».

* 2 Robinson TCHAPMEGNI, « La réforme de la propriété foncière au Cameroun », communication présentée au cours du Géo congrès 2007 tenu à Québec du 03 au 05 octobre 2007, disponible sur le site web ( www.quebec2007.ca). p.20

* 3 Guy Adjeté KOUASSIGAN, L'homme et la terre, éd. Berger-Levrault, 1966, p.8

* 4 François- Xavier MBOME, Mémentos de droit administratif, 1éd. Ydé, Cameroun, 1970, p.2

* 5 Christophe RADE, « l'impossible divorce de la faute et de la responsabilité civile » in recueil Dalloz 1998, 32 cahier. Chronique, pp302-305.

* 6 P. LE TOURNEAU, Responsabilité (en général) in Encyclopédie Dalloz 2001, p.11

* 7 H&L MAZEAUD, Traité théorique et pratique de la responsabilité civile délictuelle et contractuelle, préface H Capitant, tome 1.6éd.Montchrestien, p.16

* 8 P. Devolvé, La responsabilité du fait d'autrui en Droit Administratif, in Mélanges Marty, 1978, p.407

* 9 TC, 08 février 1973, Dalloz 1873.3.17, concl. David

* 10 Claude EMERI, De la responsabilité de l'administration à l'égard de ses collaborateurs, LGDJ. Paris, 1966, p.2

* 11 Pascale BERTONI, L'évolution du droit de la responsabilité : limitation ou préservation de la souveraineté, in les petites affiches 24 Décembre 1993 n°154 p.11

* 12 Paul MATHIEU, « La sécurisation foncière, entre compromis et conflits », Cahiers Africains n°23-24, Paris, L'Harmattan 1996, p.28.

* 13 Les articles 1382 et suivants du Code civil qui constituent les textes de base de la responsabilité civile délictuelle, énoncent de manière expresse que la faute est la condition de mise en oeuvre de la responsabilité, soit du fait personnel, soit du fait d'autrui, ou des choses que l'on a sous sa garde, mais ne donnent malheureusement pas la définition de la notion de faute. Le mérite revient donc certains auteurs français d'avoir essayé de conceptualiser les significations de la faute.

* 14 La faiblesse souvent relevée de cette définition est qu'elle répond à la question par la question. Il s'agit de savoir en quoi constitue l'obligation préexistante, qui elle aussi soulève une autre ; V. FLOUR, AUBERT & SAVAUX, Les Obligations, le fait juridique 2001 ,9e ed. Armand Colin n°98 : « on tourne en rond : encore faut-il avoir défini cette obligation préexistante ».

* 15 Gérard Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 4e ed QUADRIGE|PUF pp 388 à 390

* 16 Le standard du bon père de famille reflète en doctrine le modèle de l'homme « droit et sûr de ses actes » selon Gény ; un homme « prudent et diligent » selon Capitant & Colin ;  « honnête et adroit » d'après Ripert et Boulanger, « prudent et avisé » selon H et L Mazeaud. De même, dans la Common Law, le prototype du bon père de famille serait comparable au modèle du «  reasonnable man »

* 17 V. Lexique des termes juridiques 11e éd. Dalloz, p. 300

* 18 Le dol s'entend en matière civile comme toute « manoeuvre frauduleuse ayant pour objet de tromper l'une des parties à un acte juridique en vu d'obtenir son consentement » ; en droit pénal, le dol est l' « attitude psychologique du délinquant consistant de sa part à avoir voulu commettre l'infraction » ; en fait le tout réside dans l'intention de l'auteur de la faute.

* 19 V. F. Terré, Ph. Simler &Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, 9e éd. Dalloz, Paris pp 559 à 565.

* 20 V. Terré, Simler, Lequette, op. cit.

* 21 V. supra

* 22 En 1873, l 'autorité militaire a fait saisir, en vertu des pouvoirs qu'elle exerce en état de siège, le premier numéro d'un journal dont la publication avait été entreprise par le sieur Pelletier. Ce dernier porta l'action devant le tribunal de Senlis, juridiction de l'ordre judiciaire, pour faire déclarer arbitraire et illégale, nulle et de nul effet la décision administrative ; et donc, la restitution des exemplaires du journal saisi, et la condamnation des défendeurs notamment, le Général LADMIRAULT, commandant de l'état de siège, le Préfet du département M.Choppin et M.Leudot, Commissaire de police, à payer des dommages intérêts s'élevant à 2000F Français.

Le Tribunal de Conflit décida que l'interdiction et la saisie du journal appartenant au sieur Pelletier, et ordonnées par le Général LADMIRAULT, constituent une mesure préventive de haute police, et parce que la demande de Pelletier se fonde exclusivement sur cet acte de haute police administrative, et qu'en dehors de cet acte, il n'impute aux défendeurs, aucun fait personnel de nature à engager leur responsabilité personnelle et particulière, le Tribunal de Senlis étant incompétent pour connaître la demande de sieur Pelletier.

TC 30 juillet1873, PELLETIER, Rec.1er suppl.117, concl. David D.1873.3.5.

* 23 T C 05 Mai 1877, Rec. p. 437

* 24 V. Claude GOUR, faute de service in Répertoire de la Responsabilité de la Puissance Publique ( RRPP), Dalloz, Paris, p.18 .

* 25CS/CA, jugement n°45 du 27 mai 1982, DZIETHAM Pierre c/ Etat du Cameroun: dans l'espèce, la voie publique défectueuse a causé un dommage au sieur Dzietham, inédit ;

Également, CS/CA, jugement n°13 du 23 novembre 1989, ENYENGUE DIPOKO Bernard c/ Etat du Cameroun, inédit.

* 26 Claude GOUR op. cit.

* 27 CE 05 février 1935 Rec. p 160

* 28 V. la dualité faute de service - faute personnelle de l'agent, responsabilité administrative p.

* 29 Jur. Gen. V° Responsabilité, suppl. n°15, 1895, n°396

* 30 CE 10 février 1905, Rec. 139, concl. ROMIEU, D.P. 1906, 381 ; S.1905.3.113, note HAURIOU. Dans cette espèce, suite à la panique causée par un taureau s'étant échappé, et sa poursuite par la foule, un coup de feu fut tiré et blessa le sieur Tomaso Gréco à l'intérieur de sa maison. Ce dernier demanda réparation à l'Etat au motif que le service de police a été défaillant et commis une faute en n'assurant pas l'ordre. L'Etat du droit, et donc le Conseil d'état n'accordaient à l'époque aucune réparation au requérant car « l'Etat n'est pas, en tant que puissance publique, et notamment en ce qui touche les mesures de police, responsable de la négligence de ses agents ». Le commissaire de gouvernement ROMIEU proposa alors d'étendre à ce service-la police-le principe selon lequel la puissance publique doit être déclarée pécuniairement responsable des fautes de service commises par ses agents, et ceci,  s'il existe une faute caractérisée de service , notamment la faute lourde.

* 31 C.E 12 février 1947 Minvielle Rec., p.428

* 32 C.E 20 juin 1973, Commune de Châteauneuf-sur-Loire, Rec. p.428

* 33 V. Claude Gour, La faute de service in Encyclopédie Dalloz Répertoire de la Responsabilité de la puissance publique (RRPP) p.29 para 310. V. J-F Couzinet : La notion de faute lourde administrative R.D.P. 1977. 283 Jeanne Lemasurier note sous C.E 21 Décembre 1962 Dame HUSSON D. 1963. 588

* 34 Claude Gour, op. cit.

* 35 V. infra. Chapitre2 Les manifestations de la faute dans l'immatriculation et l'expropriation pour cause d'utilité publique.

* 36 Que ce soit dans la procédure d'immatriculation directe, c'est-à-dire l'immatriculation des terres exploitées ou occupées, des terres de la 1ere dépendance ou même dans l'immatriculation indirecte, notamment à travers la procédure de concession qui est l'acquisition des terres de la 2ème dépendance, c'est le Préfet, chef de département du lieu de situation de l'immeuble qui prend un arrêté fixant composition de la commission consultative.

* 37 Conformément aux dispositions du décret n°87/1872 du 16 Décembre 1987, modifiant et complétant la loi n°85/09 du 04 juillet 1985, la commission de constat et évaluation de l'expropriation s'étend sur trois niveaux : départemental, provincial et national. De ce fait, aux niveaux provincial et national, ce sont respectivement, les gouverneurs ou leurs représentants, et le ministre chargé des domaines ou son représentant qui officient en qualité de président de ladite commission. Il reste alors que c'est seulement au niveau départemental que le préfet sera compétent en qualité de président de la commission de constat et évaluation.

* 38 S'agissant du représentant du ministre, son intervention apparaît lorsqu'il s'agit d'une concession donc l'immatriculation des terres libres de toute occupation et qui ne s'acquièrent que par attribution de concession provisoire lorsqu'un projet existe.

* 39 Christophe YOSSA, les commissions consultatives dans le régime foncier camerounais, mémoire de licence en droit, UY 1976-1977 P.19

* 40 V. infra organisation et fonctionnement de la délégation

* 41 Art.35 nouveau du décret n°2005/481 du 16 décembre 2005 : « chaque cas d'immatriculation donne lieu à l'établissement par le conservateur foncier d'un titre foncier [...] »

* 42 Art. 17 à 19 du décret précité.

* 43 Le service de la conservation foncière a fait l'objet d'un examen particulier au vu de l'importance et du rôle accru du conservateur foncier dans les opérations foncières à la suite des décrets de 2005, notamment, le décret n°2007/178 du 27 mai 2005 et celui n°2005/481 du 16 décembre 2005.

* 44 Droits fonciers urbains au Cameroun, Tientcheu Njiako André pp42 et ss. Monsieur Tientcheu dans cet ouvrage fait une étude approfondie et détaillée sur le cadastre au Cameroun, en y rappelant l'historique et l'origine, la typologie du cadastre, de même que de l'élaboration et la réalisation du cadastre au Cameroun.

* 45 Lire art 94 du décret du 27 mai 2005

* 46 De manière détaillée, v.dispositions de l'article 96 du décret.

* 47 Alexandre- Dieudonné TJOUEN, Droits Domaniaux et Techniques Foncières en Droit Camerounais : étude d'une reforme législative paris, Economica, 1982

* 48 L'article 14 alinéa2  dispose: « ne sont pas incluses dans le domaine national, les terres faisant l'objet d'un droit de propriété telle que défini à l'article 2 ci-dessus ». De cette énonciation, à la lecture de l'article 2, « font l'objet d'un droit de propriété privée, les énumérées ci-après :

a) les terres immatriculées ;

b) les freeholds lands ;

c) les terres acquises sous le régime de la transcription ;

d) les concessions domaniales définitives ;

e) les terres consignées au registre du Grundbuch »

* 49 Cf. article 15 de l'ord.74-1, selon lequel : «les dépendances du domaine national sont classées en 2 catégories :

1. les terrains d'habitations, les terres de cultures, de plantation, de pâturage, et de parcours dont l'occupation se traduit par une emprise évidente de l'homme sur la terre et une mise en valeur probante.

2. les terres libres de toute occupation effective. »

* 50 CS/CA, jugement. n°64 du 30 août 1990, inédit.

* 51 Cf. article 13 alinéa 1 du décret 2005 « dès réception du dossier, le délégué départemental des affaires foncières fait publier dans les quinze (15) jours, par le chef service départemental des affaires foncières, un extrait de la demande par voie d'affichage dans les locaux du service de la sous-préfecture, du district, de la mairie, et de la chefferie du village concerné »

* 52 CS/CA jugement n°29 du 25 mars 1982 BEYISSA Adolphe Mazarin c/ Etat du Cameroun , « Attendu que la commission consultative a statué le 11 Novembre 1977 avait dépassé le nombre de représentants de la collectivité en ajoutant le chef supérieur, membre non prévu par le texte [...] que par conséquent cette commission a été illégalement constituée.

De même CS/CA jugement n°08/2001-2002 du 27 décembre 2001 inédit.

* 53 Alinéa 6 article 13 nouveau du décret 2005 du 16 décembre 2005

* 54 CS/CA jugement n°74 du 28 septembre 2000, succession MBEUWOU c/ Etat du Cameroun, inédit ; Également, CS/CA, jugement n°61/99-2000 du 27 juillet 2000, affaire DEFFO Christophe c/ Etat du Cameroun. Le jugement est ainsi motivé : « Attendu que dans l'espèce, le bornage opéré le 21 mars 1997 a été occulté à l'opposant DEFFO Christophe déjà en instance devant le tribunal des référés de Bafoussam en arrêt des travaux, Dame SIMO ayant par des constructions effectuées à la hâte, empiété les limites naturelles du terrain [...]. Que cette machination et dissimulation ont eu pour incidence d'induire la commission en erreur commentant ainsi une faute... » 

* 55 Constitue une faute administrative, le fait pour la commission de ne pas tenir compte des oppositions soulevées au cours de la procédure dans l'affaire DJINOU TCHALE c/ Etat du Cameroun.

56 CS/CA jugement n°25 du 30 décembre 1999 NJOH Philibert et Ekoka Koum contre Etat, CS/CA, jugement n°78 du 31 juillet 1997

* 57 CS/CA jugement n°25 du 30 décembre 1999 NJOH Philibert et Ekoka Koum c/ Etat du Cameroun, inédit

* 58CS/CA jugement n°15 du 25 janvier 2001 succession Mbarga Raphaël contre Etat du Cameroun, inédit.

* 59 CS/CA jugement n°60/99-2000 du 29 juin 2000, recours n°738/99-2000 du 09 mars 1998, affaire POHOKAM Suzanne contre Etat du Cameroun, inédit ;

* 60 CS/ CA Jugement n°94/04-05 du 27 Avril 2005, recours n°1160/99-00 du 07 juillet 2000, affaire Fonkoua Michel contre Etat du Cameroun, inédit ;

* 61 CS/CA jugement n°01/99-2000 du 09 novembre 1999, affaire NGONDI Chantal Salomé contre Etat du Cameroun (MINUH) et Dame veuve Effila née Menye Elisabeth, inédit ;

* 62 CS/CA jugement n°40 du 30 mai 1990, Mballa Dieudonné contre Etat du Cameroun, inédit ;

CS/CA jugement n°30 du 26 mars 1992, affaire Mveng Ndy née Mendouga Marguerite contre Etat du Cameroun, inédit ;

* 63 CS/CA jugement n°34/04-05 du 29 Décembre 2004, affaire Noumsi Jean Bosco contre Etat du Cameroun

* 64 L'artiche 3 du décret n°76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier dispose que : « la demande de transformation en titre foncier (concerne) :

- des actes d'acquisition des terrains inscrits au grundbuch,

- des actes d'acquisition des terrains selon les règles de la transcription,

- des arrêtés d'attribution définitive d'une concession domaniale,

- des livrets fonciers, ou des certificate of occupancy,

- des jugements définitifs, constitutifs, ou translatifs de droits réels,

- des conventions entre africains passés sous le régime du décret du 29 septembre 1920, abrogé par la loi du 27 juin 1961 relative aux actes notariés,

- des actes d'acquisition des freeholds land. »

* 65 CS/CA jugement n°94/2005 du 14 juin 2006 Chambre de Commerce, d'Industrie et des Mines du Cameroun (CCIM) c/ Etat du Cameroun et succession Paul Monthe, représenté par Honoré Monthe.

* 66 Droits réels et domaine national au Cameroun, André Tientcheu Njiako op.cit. p.197

* 67 La concession, il faut le relever, est octroyée à des personnes physiques pour des besoins individuels à l'exemple de construction d'une maison, contrairement à l'opinion communément admise selon laquelle elle n'est accordée que pour des projets de développement ou lorsqu'il s'agit d'une activité à but lucratif ou associatif. En effet, au cours des enquêtes menées sur le terrain, nous avons eu un entretien avec Mme Essengue, chef du service des concessions au Mindaf, qui nous affirmé que les terrains de la deuxième dépendance étaient octroyés aux particuliers dans le but de s'installer et d'y construire des maisons d'habitation. Le développement communautaire passe bien par le développement individuel !

* 68 A la lecture de ces articles, on note que c'est désormais le MINDAF qui est chargé d'instruire les procédures

de concession à l'exclusion du ministère de l'urbanisme et de l'habitat qui était compétent.

Art 1 alinéa 2 « Le Ministre des domaines et des affaires foncières est chargé de l'élaboration, de la mise en oeuvre et de l'évaluation de la politique du gouvernement en matière domaniale, foncière et cadastrale.

A ce titre, il est responsable [...] de la gestion du domaine national et des propositions d'affectation... »

Section III De la sous direction du domaine national.

Article 31 (1) : Placée sous autorité d'un Sous-directeur, la sous direction du domaine national est chargée de veiller à la régularité des procédures d'attribution des concessions et de baux diligentés par les services déconcentrés.

Article 32 : Placé sous l'autorité d'un Chef de service, le service des concessions est chargé :

- des demandes de concessions provisoires ;

- de la tenue à jour du fichier national des concessions ;

- du contrôle des recouvrements des créances y afférentes ;

- du contrôle du respect des cahiers de charges par les concessionnaires. »

Section III De la sous-direction du domaine national.

Article 31 (1) : Placée sous autorité d'un Sous-directeur, la sous direction du domaine national est chargée de veiller à la régularité des procédures d'attribution des concessions et de baux diligentés par les services déconcentrés.

Article 32 Placé sous l'autorité d'un Chef de service, le service des concessions est chargé :

- des demandes de concessions provisoires ;

- de la tenue à jour du fichier national des concessions ;

- du contrôle des recouvrements des créances y afférentes ;

- du contrôle du respect des cahiers de charges par les concessionnaires. »

* 69 CS/CA jugement n°09/2000-2001 du 30 novembre 2000, sur le recours n° 750/2000-2001 du 06 octobre 1998, Affaire OUAFFO contre Etat du Cameroun (MINUH) et BELINGA KYE Benoît Frederik.

* 70 CS/CA, jugement n°38/2005-2006 du 18 janvier 2006 affaire BONGO Henri Aimé contre Etat du Cameroun (MINDAF), inédit.

* 71 V. Tientcheu Njiako Droits réels et domaine national, p.198 sur l'affaire de la gare routière de Kousseri.

* 72 CS/CA, jugement n°10/2000-2001 du 30 novembre 2000(recours n°937/2000-2001),

affaire EKEME Henri c/ Etat du Cameroun (MINUH) et époux FENGYEP. V. à ce propos les notes du Docteur Tientcheu Njiako dans l'ouvrage op. Cit. pp.203 à 204

* 73 CS/CA jugement n°13/2002-2003 du 31 octobre 2002(sur le recours N°1059/2001-2003 du 13 septembre 2000 affaire Cameron Agricultural Farmer association  c/ Etat du Cameroun (MINUH).

* 74 Cela est du à la partialité et à la connivence de l'administration. Dans ce registre, il arrive que la concession définitive soit octroyée à des personnes morales en faillite.

* Dans l'affaire Dibongué Emmanuel c/ Bita Armand, le juge administratif affirme de manière claire que : « l'arrêt d'une Cour d'appel qui , en violation flagrante des dispositions légales non équivoques et d'ordre public [...] déclare valable une vente sous-seing privé d'un terrain conclut entre deux partie[s...] », encourt une annulation.

CS/AP arrêt n°42/CC du 24 janvier 1991, affaire DIBONGUE Emmanuel C/ BITA Armand, in juridis infos n°7 septembre 1991, p.31 obs. Jean-Marie NYAMA.

* 75 CS/CA, jugement n° 68 /2000-2001 du 2007 (recours n°1044/2000-2001 du 17 avril 2000, affaire Madame MINYEM née DINPIAN Dorine C/ Etat du Cameroun (MINUH) inédit, dans laquelle le notaire instrumentaire domicilié à Yaoundé ne pouvait pas connaître la vente d'un terrain situé à Kribi. ; v. André Tchientcheu Njiako op. cit. p. 227

* 76 Pour d'amples informations sur le statut particulier du notaire et son rôle dans les transactions foncières, lire « le notaire dans la législation foncière au Cameroun » Siméon Ombiono, mémoire de licence, université de Yaoundé 1975

* 77 CS/CA jugement n°43/2000-2001du 30 août 2001(recours n° 1102/2000-2001 du 16 août 2000), affaire NDJINE Daniel C/ Etat du Cameroun (MINUH), dans laquelle en contrepartie des opérations de lotissement effectuées par le sieur Ndjine à la collectivité BANGUE, ce dernier a reçu en contrepartie un pot de vin pour service rendu.

* 78 André de Laubadaire, Traité de droit administratif,  LGDJ, Paris, 1970 p.221 ; Joseph OWONA Droit administratif spécial de la République du Cameroun, EDICEF, Paris, 1975, 256 p.p. André Tchientcheu Njiako, Droits fonciers urbains au Cameroun, PUA, Yaoundé 2003 p383

* 79 Jeanne Lemasurier, «  La cacophonie juridique du contentieux de l'expropriation » in Mélanges en hommage à Roland Drago ; l'unité du droit, p.428

* 80 « Toute personne, physique ou morale a droit au respect de ses biens, nul ne peut être privé de sa propriété, que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux de droit international » art 1 du protocole additionnel. V. SUDRE (F), La protection du droit de propriété par la cour européenne des droits de l'homme ; D.S 1.8 38 chr. 71

* 81 Jeanne Lemasurier op. cit.

* 82 « Tout département ministériel désireux d'entreprendre une opération d'utilité opération d'utilité publique saisit le ministre chargé des domaines d'un dossier préliminaire en deux exemplaires comprenant :

- une demande assortie d'une note explicative indiquant l'objet de l'opération art 2, décret N°187-1872 du 16 décembre 1987

- une fiche dégageant les caractéristiques principales des équipements à réaliser et précisant notamment :

a) la superficie approximative du terrain sollicité dûment justifié

b) l'appréciation sommaire du coût du projet y compris l'indemnisation

c) la date approximative de démarrage des travaux

d) la disponibilité des crédits d'indemnisation avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous autre moyen d'indemnisation »

* 83 CS/CA, arrêt n°160/CS/CA du 08 juin 1970, affaire FOUDA MBALLA Maurice c/ Etat fédéral du Cameroun, obs. François-Xavier MBOUYOM, in Recueil des Grands Arrêts de la Jurisprudence Administrative de la Cour Suprême du Cameroun 1970 à 1975, Ydé, éd KENKOSSON, 1975, PP329-334

* 84 CS/AP arrêt du 16 août 1990, in Juridis périodique n°46 avril-mai-juin 2001 pp39-45, note Célestin keutcha Tchapnga

* 85 TGI Dschang, chambre criminelle, jugement n°38/CRIM du 28 juillet 1986, .inédit. V. André Tchientcheu Njiako, op. cit. p 413

* 86 V. art 8 à 12 de la loi N°85/009

* 87 Jeanne Lemasurier op. cit. p.431

* 88 CS/CA jugement n°12/CS/CA/83-84 du 26 mai 1984, Dame veuve ONGONO Régine c/ Etat du cameroun. Pareillement, CS/CA jugement n°70/85-86 du 29 mai 1986, note Jean-Calvin ABA'A OYONO ; André Tchientcheu Njiako op. cit. Pp 439 à 441

* 89 CS/CA n°544/94-95 du 09 novembre 1994, affaire Société Renault du Cameroun c/ Etat du Cameroun, note J-C ABA'A OYONO, Juridis Périodique n°32, octobre- novembre-décembre 1997, pp. 29.

* 90 CS/CA, Jugement n°85/2005-2006 du 14 juin 2006, recours n°25/2005-2006 du 02 novembre 2005, affaire EFFA Paul Marcel c/ Etat du Cameroun (MINDAF).

* 91 Aloys MPESSA : « Le titre foncier devant le juge administratif camerounais » in JCP n°59 juillet-aout-septembre 2004. III- Doctrine et études, p.78.

* 92 V. ALoys MPESSA, op. cit.

* 93 V. Charles AMBIALLET, Les effets de la force probante de l'inscription sur le livre foncier marocain, Paris, Domat- Montchrestien, 1934, pp42-43

* 94 Victor Gasse, Régimes fonciers africains et malgaches : évolutions depuis l'indépendance, LGDJ Paris 1971 p.52

* 95 96 V. Charles AMBIALLET,  op. cit.

* 97 Jean Calvin ABA'A OYONO « Expropriation pour cause d'utilité publique, note affaire société Renault in JCP n°32 octobre-novembre-décembre 1997, pp.29-30

* 98 André de Laubadaire, J.C Venezia et Y. Gaudemet, Traité de droit administratif, tome 1, 10 éd. LGDJ 1988, p.302

* 99 Art 15, Déclaration de droits de l'homme, et du citoyen du 26 août 1789

* 100 CE 03 Février 1911, Anguet, Rec-Cep.146, S. 1911.3.137, note M. Hauriou

* 101 CE 26 Juillet 1918, Epoux Lemonnier, Rec-Cep.761, concl. Blum, D. 1918, 3. 9

* 102 V. Domaines Infos, le mensuel des affaires domaniales et foncières, p. 3 n°018 novembre-décembre 2007

* 103 Domaine info, op. cit.

* 104 Opinion émise par Mr Jean-Marie BEDENGUE, chef de la division des affaires juridiques au MINDAF au cours du débat télévisé Le Droit en Clair, transmis à la CRTV, le jeudi 29 Mai 2005.

* 105 CS/CA, jugement n°40 du 31 Mai 1990, MBALLA Dieudonné c/ Etat du Cameroun, inédit.

* 106 CS/CA, jugement n° 30 du 26 mars 1992, MVENG NDY née MENDOUGA Marguerite c/ Etat du Cameroun, inédit.

* 107 CS/CA, jugement n° 64 du 30 août 1996, BILOUNGA Pascaline c/ Etat du Cameroun, inédit.

* 108 Toutes ces affaires ont été mentionnées dans la première partie de notre travail. V. chapitre 2 les manifestations de la faute.

* 109 CS/CA, jugement n°38/ 205-2006 du 18 janvier 2006, BONGO Henri Aimé c/ Etat du Cameroun (MINDAF)

* 110 CS/CA, jugement n°52/06-07 du 28 février 2007 suivant le recours n° 1785/03-04 du 20 octobre 2003, NJOOH Michel Pierrot c/ Etat du Cameroun

* 111 CS/CA jugement n°23/2005-2006 du 14 décembre 2005, affaire BISSO Joseph et dame ZEH ZO'O NAOMIE c/ Etat du Cameroun (MINDAF)

* 112 CS/CA jugement n°44/04-05 du 02 février 2005 (suivant le recours n°786/97-98 du 26 décembre 1997, OHANDJA Séverin c/ Etat du Cameroun

* 113 CS/CA jugement n°76/04-05 du 27 avril 2005, YONGO Marc c/ Etat du Cameroun & DELANGUE KOLOKO Michel, intervenant volontaire.

* 114 CS/CA, jugement n° 24 2001-2002 du 28 février 2002, (suivant le recours n°1072/ 2001-2002, EMAH Basile et autres c/ Etat du Cameroun (MINUH) & MBIA MBIA et autres (intervenants volontaires).

* 115 CS/CA jugement n° 85/ 2005-2006 du 14 juin 2006 (suivant le recours n° 25/205-2006 du 02 novembre 2005, EFFA Paul Marcel c/ Etat du Cameroun (MINDAF)

* 116 Article 9 de la loi n°2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la cours suprême.

« 1. La chambre administrative comprend :

- une section du contentieux de la fonction publique

- une section du contentieux des affaires foncières et domaniales

- une section du contentieux des contrats administratifs

- une section du contentieux de l'annulation et des questions diverses

2 Chaque section connaît des appels et des pouvoirs en cassation relatifs aux matières qui relèvent de sa compétence. »

* 117 V. Maurice KAMTO, Droit Administratif Processuel du Cameroun, Que faire en cas de litige avec l'administration, coll. Sciences juridiques et politiques, ed PUC 1990, p7

* 118 V. Domaines Infos, le mensuel des affaires domaniales et foncières, n°020- mars 2008, p.p. 4-6

* 119«  Attendu que[...]  jusqu'à ce jour, en dehors des 6000m² du marché de Mfoundi, le reste de terrain, soit près de 27 000m² n'a pas fait l'objet d'une expropriation effective, et par conséquent le décret attaqué qui en même temps déclare cause d'utilité publique et exproprie, est caduque en ce qui concerne cette contenance superficielle qui doit de ce fait, redevenir au propriétaire initial », lire J-C ABA'A OYONO, art. précité.

* 120 Jeanne LEMASURIER, « la cacophonie juridique du contentieux de l'expropriation », L'unité du droit, mélanges en hommage à Roland DRAGO, p.431.

* 121 « Le juge administratif peut lui-même redresser la situation dans deux cas seulement :

- en matière fiscale

- en matière électorale », v. Maurice Kamto, Droit administratif processuel de la République du Cameroun op.cit.

* 122CS/CA, jugement n°59/ du 29 Juin 1969, affaire FANKWÉ John c/ Etat du Cameroun (MINUH) in Lex Lata n°020, novembre 1995, p.16, v. André Tchientcheu NJIAKO, Droits fonciers urbains au Cameroun, p. 466 op. cit.

* 123 TGI de Yaoundé, jugement n°263 du 04 Avril 1984, Tchientcheu NJIAKO op. cit p.467

* 124 P. Devolvé, La responsabilité du fait d'autrui en droit administratif, in mélanges Marly, 1978, p 407.






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