REPUBLIC OF CAMEROON
Peace - Work - Fatherland
MINISTRY OF HIGHER
EDUCATION
UNIVERSITY OF YAOUNDE II SOA
Faculty of Law and
Political sciences
REPUBLIQUE DU CAMEROUN
Paix- Travail - Patrie
MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR
UNIVERSITE DE YAOUNDE II SOA
Faculté des Sciences
Juridiques et Politiques
DEPARTEMENT DE DROIT PRIVE FONDAMENTAL
(Option Droit Civil)
LA FAUTE DE L'ADMINISTRATION EN
MATIERE FONCIERE AU CAMEROUN
Mémoire présenté et soutenu
publiquement en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes Approfondies
(DEA) en Droit Privé.
Par :
Mlle. NKOA NZIDJA Ariane
Lidwine
Maîtrise
en Droit Privé Fondamental
Sous la direction
du :
Pr. Alexandre Dieudonné
TJOUEN
Ancien Avocat
au Barreau de Paris
Maître de Conférences
à l'Université de Yaoundé II
Avocat au Barreau du
Cameroun
+Année académique 2006-2008
AVERTISSEMENT
La Faculté des Sciences Juridiques et
Politiques de l'Université de Yaoundé II Soa n'entend donner ni
improbation, ni approbation aux opinions émises dans les
mémoires ; ces opinions doivent être
considérées comme propres à leurs auteurs.
DEDICACE
A mes chers parents, Monsieur et Madame
NKOA TANGA,
Pour l'inestimable oeuvre d'éducation, puissiez-vous
trouver à travers ce modeste ouvrage, les prémices d'un travail
sans cesse accompli par vous, avec amour et sacrifice.
LISTE DES ABREVIATIONS
Al. : Alinéa
Art. : Article
Bull. : Bulletin des Arrêts
de la Cour Suprême du Cameroun
C. / : Contre
C. civ. : Code civil
CE : Conseil d'Etat
Français
Concl. : Conclusion
CS/CA : Cour Suprême/ Chambre
administrative
D. : Dalloz
Ed. : Edition
GAJA : Grands Arrêts de la
Jurisprudence Administrative
Infra : Ci-dessous
L.G.D.J. : Librairie
Générale de Droit et de Jurisprudence
MINDAF : Ministère des Domaines
et des affaires Foncières
MINUH : Ministère de
l'Urbanisme et de l'Habitat
Op.cit. : OEuvre
déjà citée
Ord. : Ordonnance
P. : Page
PUA : Presse Universitaire
d'Afrique
PUF : Presse Universitaire
de France
Rec. : Recueil LEBON
R.R.P.P : Encyclopédie
Dalloz, Répertoire de la Responsabilité de la Puissance
Publique
S. : Sirey
Suppl. : Supplément
TC : Tribunal des
Conflits
TGI : Tribunal de Grande
Instance
UY : Université de
Yaoundé
V. : Voir
SOMMAIRE
Introduction générale
Titre I. La détermination de la faute
administrative en matière foncière
Chapitre I. La particularité de la faute
administrative en matière foncière
Section I. Les caractéristiques de la faute
administrative
Section II. L'identification des structures
administratives mises en causes dans la faute en matière
foncière
Chapitre II. Les manifestations de la faute
administrative en matière foncière
Section I. La faute commise pendant l'acquisition de la
propriété immobilière
Section II. La faute administrative commise lors de la cession
de propriété.
Titre II. Les conséquences et la sanction de
la faute administrative
Chapitre I. Les conséquences de la faute et la
responsabilité de l'administration
Section I. Les conséquences dommageables de la faute
administrative en matière foncière
Section II. La responsabilité administrative du
fait de ses actes fautifs en matière foncière
Chapitre II La réparation du préjudice
subi par la victime de la faute
administrative
Section I. La réparation du préjudice subi par
voie administrative
Section II. La réparation par voie juridictionnelle
Conclusion générale
RESUME
Le contentieux issu de la question foncière est au
coeur d'une actualité brûlante au Cameroun. La
détermination des pouvoirs publics dans l'assainissement d'un
environnement frelaté, et la lutte acharnée contre les titres
fonciers irrégulièrement délivrés ne fait plus
l'ombre d'hésitation.
Les pouvoirs publics camerounais se sont lancés dans
une série d'annulations et de retraits de titres fonciers
irrégulièrement délivrés. La doctrine, par la voix
d'Aloys MPESSA, a parlé de l' « explosion judiciaire
du titre foncier » ; selon nous, il s'agit plutôt de
l'« explosion administrative des titres fonciers
irrégulièrement délivrés ».
L'avènement de la réforme foncière
opérée par le décret n°2005/481 du 16 décembre
2005 qui vise la sécurisation des droits fonciers, nécessite que
l'on s'attarde sur la part de responsabilité de l'administration en
charge des affaires foncières dans l'incivisme qui a cours en
matière foncière. Cette insécurité découle
du constat de la complexité des procédures, du laxisme et de
l'inertie des agents publics, bref, des fautes commises par les organes et
services concernés, étant entendu que l'ordre actuel des valeurs
semble inversé, et que précisément, le respect de la
règle est devenu l'exception, et sa violation, la règle.
Face à cette « gabegie
administrative » dans l'administration du foncier, on assiste
à une réponse étatique dictée par
l'élargissement de l'assiette répressive contre les
fonctionnaires indélicats, coupables ou complices d'atteintes à
la propriété foncière.
L'enjeu étant de restaurer et de garantir la
sécurité du titre foncier.
ABSTRACT
The dispute stemming from the land issue is in the heart of an
ardent current event in Cameroon. The determination of authorities in the
purification of an adulterated environment, and the fight been incensed against
the land titles irregularly delivered does not make any more the shade of
hesitance.
The Cameroonian authorities dashed into a series of
cancellations and withdrawals of land titles irregularly delivered. The
doctrine, by the voice of Aloys MPESSA, spoke about the «judicial
explosion of the land title» ; According to us, it involves rather
about the «administrative explosion of the land titles irregularly
delivered» .
The advent of reform land operated by the decree
n°2005 / 481 of december 16th, 2005 which aims at the reassurance of the
land rights, requires that we linger over the part of responsibility of the
administration in charge of the land administration in the incivism which is
current in land issue. This insecurity ensues from the report of the complexity
of the procedures, from the laxness and from the slowness of the civil
servants, brief, the faults committed by organs and concerned services, being
understood that the current order of the values seems inverted, and that
exactly, the respect for the rule became the exception, and its violation, the
rule.
In front of this «muddle administrative»
in the administration of the land, we attend a state answer dictated by the
extension of the repressive plate against the tactless, guilty civil servants
or the accomplices of infringements to the landed property.
The stake being to restore and to guarantee
the security of the land title.
INTRODUCTION GENERALE
Le droit foncier, en tant que droit de la terre
ou droit sur les terres, continue toujours à préoccuper
l'attention des pouvoirs publics. L'avènement du décret n°
2005/481 du 16 décembre 2005 à la suite de l'importante
réforme de 1974 et 1976 est révélateur de cet état
de choses. L'opinion publique camerounaise semble être consciente des
enjeux qui entourent la gestion de la terre au Cameroun.1(*) L'unanimité de ce point
de vue en doctrine ne fait l'ombre d'aucun doute. Déjà, Monsieur
KOUASSIGAN, fort à propos soulignait la place
prépondérante de la terre en Afrique noire. De la sorte, la terre
dans les sociétés négro- africaines constitue un bien, car
elle est non seulement source de vie, mais encore, un intermédiaire
entre l'homme et les divinités. Egalement, Monsieur Robinson TCHAPMEGNI
affirme : « après l'agriculture et le pétrole,
la terre constitue en Afrique subsaharienne en général, et au
Cameroun en particulier, l'une des principales richesses dont disposent les
populations pour améliorer leurs conditions de vie en l'absence d'un
tissu économique et industriel viable. »2(*), en conséquence
« toutes les institutions juridiques traditionnelles portent la
marque de l'attachement des noirs à la terre. ».3(*) Analyser la matière
foncière entendue comme le domaine des règles juridiques qui
définissent et traitent des droits des citoyens, notamment, les droits
d'accès, d'exploitation, de contrôle ou de cession de la
propriété privée immobilière serait d'une
importance capitale.
L'Etat est le « gardien de toutes
les terres camerounaises », et à ce titre, il peut
« intervenir en vue d'en assurer un usage rationnel ou pour tenir
compte des impératifs de la défense ou des options
économiques de la Nation ». Cette implication de l'Etat,
et partant de l'administration en matière foncière, n'est pas
toujours paisible. La recrudescence des litiges fonciers en zones urbaine et
rurale l'illustre bien. L'importance et la prépondérance des
services administratifs dans la gestion foncière invite à
marquer un temps d'arrêt pour définir le terme administration.
L'administration est une expression, qui seule peut
recouvrir une variété de significations. Ce vocable
étymologiquement désigne la gestion d'un patrimoine, l'exercice
d'une fonction ou la charge d'un établissement. Mais en y ajoutant un
caractère fonctionnel, l'administration se définit comme un
ensemble de moyens et d'agents destinés à maintenir un certain
ordre de choses et à accomplir certaines tâches de gestion.
Par ailleurs, si l'on se situe dans le champ du droit, le
terme administration recouvre une diversité de définitions. Selon
le Professeur François-Xavier MBOME, le vocable administration
désignera : « d'un point de vue fonctionnel ou
matériel, c'est-à-dire en considération de la nature
interne des actes au moyen desquels une activité s'accomplit,
l'administration apparaît comme une activité.
D'un point de vue organique, c'est-à-dire en
considération de l'organe qui exerce une activité donnée,
l'administration désigne les organes exerçant les tâches
d'administration.
L'administration peut aussi désigner l'ensemble des
organes par lesquels les autorités publiques conduisent et
exécutent les tâches publiques »4(*).
De manière synthétique, qu'elle soit
fonctionnelle ou organique, l'administration consiste dans les personnes et les
choses que le gouvernement, l'Etat emploie. En tant que pouvoir agissant de
l'Etat, son action doit être conforme aux lois, ce qui est une
gageure : le pouvoir brille par son absence totale de
légalité là où il devrait être
présent ! On assiste en matière foncière à une
juxtaposition de forfaits administratifs, et c'est fort à propos que le
décret de 2005 institue la répression de l'indélicatesse
des agents administratifs qui engagent leur responsabilité en cas de
faute. La faute, encore et toujours elle ! Monsieur RADE s'écriait
déjà sur « l'impossible divorce entre la faute et
la responsabilité ».5(*)
La faute de manière
générale, est une des notions juridiques qui continue toujours
à faire parler d'elle, et intervient dans toutes les sphères du
droit. PLANIOL la définit comme un manquement à une obligation
préexistante. De manière laconique, la faute est un comportement
défectueux qui se caractérise par l'anormalité. La faute
irradie toute la vie sociale, elle est immanente à l'action humaine.
Philippe LE TOURNEAU dans ce registre déclare : « la
notion de faute est tellement consubstantielle à notre civilisation
qu'il est difficile de l'évacuer : si vous la chassez par la porte,
voici qu'elle rentre par la fenêtre ! ».6(*)
Le Code civil, en son article 1382 dispose expressément
que : « tout fait quelconque de l'homme qui cause à
autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé
à le réparer ». Pour certains auteurs, ce texte
constitue « l'une des règles d'équité
qui pourraient à elles seules, résumer le droit tout
entier »7(*).
La vie en société oblige en effet à un minimum de
consensus social ; aussi apparaît-il juste que, celui qui commet une
faute qui préjudicie aux intérêts d'un tiers, en assume les
conséquences. Si ce principe est un truisme en ce qui concerne les
personnes privées, l'homme pris individuellement, cela n'est pas le cas
en ce qui concerne l'administration. Certes l'Etat vit à travers ses
organes que sont les personnes, mais sa responsabilité
qui « est presque toujours une responsabilité du fait
d'autrui »8(*), obéit à un régime
particulier.
De l'irresponsabilité originaire de l'Etat, en ce
qu'il représente la puissance publique, à une
responsabilité «sui generis »
consacrée dans l'arrêt BLANCO9(*), dans la mesure où la responsabilité de
l'Etat « ne peut être régie par les principes
qui sont établis dans le code civil pour les rapports de particuliers
à particuliers [...]. Elle a ses règles spéciales qui
varient selon les besoins de service, et la nécessité de
concilier les droits de l'Etat avec les droits privés ».
Ces droits privés revêtent généralement l'habit des
droits de l'homme, et dont un, non moins le plus important qu'est le droit de
propriété. La propriété au sens de l'article
544 est le droit reconnu aux citoyens de jouir, d'user et disposer de leur
bien, notamment immeuble de la manière la plus absolue, en respect avec
les lois, sans qu'aucune restriction légale ou judiciaire ne puisse y
être apportée. Compte tenu du caractère fondamental de la
propriété et même de l'aspiration à la possession de
chaque homme, il est normal que les éléments concernant cette
réalisation, c'est-à-dire les règles de
propriété constituent un des piliers des systèmes
juridiques de telle sorte que tout empiétement administratif soit
réprimé.
Ainsi, comme le déclarait Claude
EMERI : « la puissance publique est responsable de ses
actes. C'est acquis. Mais sur quelles bases ? Dans quels cas ? Devant
quelles juridictions ? Selon quelles règles ? Avec quelles
conséquences ? »10(*), pour insister sur la complexité qui entoure
la nature de cette responsabilité ; et Pascale BERTONI qui ajoute
que « la jurisprudence récente a fait évoluer le
principe de la responsabilité de la puissance publique, en
réduisant à la portion congrue, les poches de
quasi-irresponsabilités qui y subsistent
cependant »11(*) pour recentrer le débat, la réparation
des dommages causés aux personnes par l'action fautive de
l'administration n'est pas évidente.
En conséquence, si le principe de la
responsabilité administrative est acquis, la question pertinente que
l'on se pose est celle selon laquelle, face aux violations de la
propriété privée immobilière, comment l'Etat
répare-t-il ses fautes ? C'est un truisme que les
autorités administratives, et les services en charge de la chose
foncière préjudicient aux intérêts des particuliers
qui ont des droits ou des prétentions sur des terrains. Quels sont la
place et l'intérêt de la faute dans la mise en oeuvre de la
responsabilité administrative en matière foncière? Mais
encore, quelle est la part de responsabilité des autorités
administratives dans les litiges fonciers du fait de leur faute ? Pour
aller plus loin, on peut se demander quelle est l'étendue du
régime du droit privé s'appliquant à l'administration
malgré les principes de l'arrêt Blanco, et même si, lorsque
la juridiction administrative est saisie, se demander si les solutions qu'elle
applique ne se fondent pas sur le droit civil ?
Notre réflexion n'a pas la
prétention d'analyser le régime juridique de la
responsabilité administrative, mais surtout, de montrer comment les
fautes administratives peuvent porter atteinte aux biens des citoyens.
Ce travail d'analyse revêt un double
intérêt. Le premier, qui est d'ordre scientifique, réside
dans l'effectivité des garanties juridiques de la
propriété immobilière en droit foncier camerounais. Il
s'agit en fait de vérifier l'état des droits et l'Etat du droit
en matière de protection de la propriété foncière
face aux abus administratifs. Le second, social cette fois-ci, apparaît
dans la mesure où il s'agit de montrer aux populations, aux victimes de
forfaits administratifs, que personne n'est au-dessus de la loi ;
quiconque commet une faute qui lèse un tiers, fût-t-il une
autorité administrative, doit en répondre. Il est question en
fait de décrier la gestion lacunaire des acteurs publics dans la
chaîne foncière au Cameroun, et montrer aux populations comment
l'Etat répare les fautes commises par ses agents en matière
foncière ;
L'analyse ne se situe plus au niveau de la prévention
des abus, mais plutôt dans celui de la thérapie.
Dans nos travaux, nous n'avons pas la
prétention de faire une énumération exhaustive des fautes
commises par les acteurs étatiques dans tous les domaines fonciers, mais
plutôt de relever les manquements causés par ces autorités
dans les litiges qui mettent en cause la propriété privée
notamment les biens immeubles des particuliers. Entrent alors dans cette
catégorie les fautes commises pendant la procédure
d'immatriculation et pendant la procédure d'expropriation pour cause
d'utilité publique.
Deux techniques, la dogmatique et la casuistique,
doublée d'enquêtes informelles sur le terrain permettent de
rendre compte de l'état des lieux du contentieux foncier qui met en
prise l'Etat et les particuliers. Explorer ces pistes revient tout d'abord
à déterminer, et donc identifier la faute administrative en
matière foncière (Titre I), quitte à envisager ensuite,
les conséquences et la sanction de cette faute. (Titre II).
TITRE 1 : LA DETERMINATION DE LA FAUTE
ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE
La recrudescence des litiges fonciers en zones urbaine ou
rurale semble montrer que la gestion qui est l'oeuvre de l'Etat, en vertu de
l'article 1 de l'ordonnance 74/1, est lacunaire. De brillantes études
ont été faites sur la faute et la fraude des particuliers dans
les opérations foncières ; dans cette analyse, il ne s'agit
point de revenir sur cet aspect, mais plutôt de s'appesantir sur la part
de responsabilité de l'administration en charge de la matière
foncière au Cameroun, dans le contentieux foncier.
En effet, il appert que le contexte social, politique
et économique est marqué par la revalorisation du foncier. Et
comme le déclare fort à propos Monsieur P. MATHIEU,
« L'Etat fait de la terre, aujourd'hui plus qu'hier, un
véritable levier de développement »12(*), et à cet effet la
gestion du foncier doit briller par l'efficacité.
En conséquence, il s'agit d'insister sur
l'intérêt et la notion de faute administrative dans les litiges
fonciers. Ce titre s'oriente dans la détermination de cette faute.
Déterminer une chose, selon le Dictionnaire Universel, c'est
caractériser, préciser la valeur ou la signification de cette
chose, et spécialement son sens, et ceci en dégageant sa
spécificité. A cet effet, déterminer la faute
administrative en matière foncière conduit nécessairement
à relever ses caractéristiques ou attributs, ses applications ou
expressions concrètes, le tout dans le souci d'établir son
régime. Il est donc judicieux de présenter ces
déterminants de manière détaillée si l'on veut
appréhender la nature et les contours de cette faute car le foncier est
source d'enjeux indéniables. Cela amène à examiner dans ce
titre premier, d'une part la particularité de la faute administrative
(chapitre 1), et d'autre part, les manifestations de cette faute en
matière foncière (chapitre2).
Chapitre 1 : LA PARTICULARITE DE LA FAUTE
ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE
La faute, de manière générale, s'entend
comme le manquement aux règles, à la loi. Un fait ou un acte sera
fautif lorsqu'il y aurait un caractère d'anormalité.
Malgré cette généralité, la faute de
l'administration, par contre ne rentre pas dans les canons des
définitions privatistes, car en effet, la faute envisagée par
l'article 1382 du code civil, qui est délictuelle ou quasi-
délictuelle, ne correspond pas à la faute administrative. En
plus, cet état de choses est dû, non seulement a ce que
l'administration est une personne abstraite, qui n'a pas de
matérialité, mais encore, c'est à travers des agents, des
personnes, des organes ou des autorités qu'elle agit. La
particularité de la faute administrative en matière
foncière réside donc, d'une part dans ses traits
caractéristiques distincts de la faute civile (section1) et d'autre part
à travers les auteurs de cette faute, notamment l'administration en
charge de la matière foncière (section2).13(*)
A.
Section1 : Les Caractéristiques de la faute administrative
L'on ne saurait relever les traits caractéristiques de
la faute administrative, sans avoir au préalable montrer le
distinguo entre la faute civile et la faute administrative. Il
convient d'opérer la distinction de la faute administrative de la faute
civile (§1), puis alors analyser la singularité de la faute
administrative (§ 2).
§ 1 : La faute civile et la faute
administrative
Il s'agit à ce niveau de montrer que la faute
administrative est différente de la faute civile. Pour mieux le faire,
il est important d'exposer les définitions et contours de la faute
civile, afin de mieux rendre compte de la notion, pour faire sortir la ligne de
démarcation avec la faute administrative. Il y'a lieu à cet
effet d'envisager la notion de faute en droit civil (A) et la typologie de
fautes opérée en doctrine (B).
A - La notion de faute
Longtemps, il a paru suffisant de fonder la
responsabilité de l'auteur d'un dommage sur la faute commise par lui. Le
texte de base, c'est-à-dire l'article 1382 du code civil
répondait à cette idée : « tout
fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui
par la faute duquel il est arrivé à le
réparer ». Toutefois, en raison du silence du Code civil
et l'absence de définitions légales du vocable faute, le
mérite revient aux auteurs d'avoir essayé de conceptualiser les
significations de la faute et tenter de faire sinon pas un catalogue, mais
à tout le moins, ressortir les acceptions que recouvre la notion.
Parmi la kyrielle de définitions, l'on peut citer la
plus célèbre qui est celle de PLANIOL pour qui «
la faute est un manquement à une obligation
préexistante », définition qui n'a toujours pas
fait l'unanimité en doctrine.14(*) La faiblesse souvent relevée de cette
définition est qu'elle répond à la question par la
question de savoir en quoi consiste l'obligation préexistante, qui elle
aussi en soulève une autre, on assiste alors à un
véritable cercle vicieux qui n'en finit point. En outre Gérard
Cornu dans son Vocabulaire juridique donne une définition plus ou
moins complète de la faute. Ainsi, le substantif faute
découle de l'expression latine « fallita »
qui est l'action de faillir, qui elle-même vient du verbe
« fallere » qui signifie tromper, échapper
à, faire défaut. La faute serait alors « un acte
illicite supposant la réunion d'un élément
matériel : le fait originaire ; d'un élément
d'illicéité : la violation d'un devoir, la transgression
d'un droit, et d'un élément moral le discernement de l'auteur du
fait ».15(*) De cette définition, l'on retient que la faute
est la combinaison d'un élément matériel, lequel peut
consister en un fait positif ou une abstention ; d'un
élément d'illicéité, qui consiste en la violation
d'un devoir en matière contractuelle par exemple, ou de la transgression
d'une loi ; et enfin d'un élément moral,
l'imputabilité qui est l'aptitude à rendre compte de ses actes,
à discerner ses actions.
Dans un autre registre, la faute est analysée en
rapport à une appréciation soit in abstracto, soit
in concerto. Ainsi, selon une appréciation « in
abstracto », c'est-à-dire sans tenir compte des
particularités et réalités d'une situation,
indépendamment de données concrètes et individuelles,
juger une action fautive reviendrait à la comparer à un prototype
de références qui est celui du « bon père de
famille ».16(*)
De ce fait, la faute serait tout comportement regrettable,
mais statistiquement inévitable de la part du bon père de
famille. Il s'agit donc de maladresse sans gravité, d'erreur
vénielle sans incidences notoires et profondes.
Dans une autre approche, la faute, de manière
« in concreto », c'est-à-dire, en fonction
des différences propres à chaque individu, serait tout acte, tout
comportement qui s'écarte largement du normal, et qui dénote chez
son auteur l'intention de nuire à autrui. La faute est alors
intentionnelle, et son auteur recherche un but précis, notamment causer
un dommage à autrui ; à ce niveau, c'est l'attitude de la
personne fautive qui est prise en considération.
B - La typologie de
fautes en droit civil
Il est difficile de rendre compte des types de fautes en
matière civile. A tout le moins, on peut essayer de prendre en compte
soit l'origine de la faute, soit le degré de gravité et donc les
conséquences de cette faute, soit la volonté de son auteur.
S'agissant de l'origine, une faute peut être, soit
délictuelle, soit contractuelle. La faute délictuelle ou quasi
délictuelle est celle-là qui trouve son origine dans le fait
illicite et dommageable. Les articles 1382 et 1383
du Code civil donnent à suffisance la définition de
cette catégorie de faute. Ainsi, l'article 1382 dispose que
« tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un
dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le
réparer », puis, à sa suite, l'article 1383 qui
dispose que « chacun est responsable du dommage qu'il a
causé, non seulement par son fait, mais encore par sa négligence
ou par son imprudence. »
En outre, la faute contractuelle quant à elle, est
celle-là qui est commise par une des parties au contrat. Elle s'analyse
comme les manquements aux obligations contractuelles, la violation de ces
obligations. Ce peut être, soit l'inexécution de ses obligations,
soit l'exécution fautive donc détournée de son but
initial.
Pour ce qui est de la volonté de l'auteur de la faute,
il s'agit de distinguer la faute intentionnelle de la faute non intentionnelle.
C'est aussi examiner la question de la bonne ou de la mauvaise foi de l'auteur
de la faute. Laconiquement, l'intention c'est le dessein
délibéré, c'est l'acte de la volonté par lequel on
se fixe un but, c'est le but lui-même. Le Lexique des Termes
Juridiques la définit comme « la conscience
éclairée et la volonté libre de transgresser les
prescriptions »17(*). On distingue alors le dol de la faute simple ;
le dol s'entend comme une faute intentionnelle comportant la mauvaise foi de la
part de son auteur, généralement, il s'agit du débiteur
d'une obligation contractuelle. Le lexique des termes juridiques en donne une
définition suffisante18(*).
Peu importe le domaine dans lequel on se situe, ce peut
être en matière délictuelle ou contractuelle, la faute peut
être intentionnelle ou non intentionnelle, volontaire ou involontaire, le
tout réside dans le but que recherchait l'auteur de cette faute.
Après qu'une faute ait été commise, la
préoccupation réside dans les conséquences dommageables de
cette faute et le degré de gravité dans sa commission. Cela
consiste à prendre en compte le degré de gravité, dans la
commission de la faute et, dans les conséquences de la faute.
Le degré de gravité dans la commission d'une
faute permet de distinguer la faute lourde, la faute légère et
la faute très légère. Cette distinction trouve son origine
dans l'Ancien droit et repose sur l'idée de gradation des
fautes19(*). En
matière contractuelle, la faute lourde parce que grave, équivaut
au dol et engage le débiteur de l'obligation ; elle est
tirée de l'adage « culpa lata dolo
aequiparatur ». La faute très légère est
celle-là « dont le débiteur ne répond que si
le contrat a été passé dans son intérêt
exclusif », distincte de la faute légère, dont le
débiteur répond lorsque le contrat a été conclu
dans l'intérêt des deux contractants20(*).
En matière délictuelle par contre, le
degré de gravité va s'analyser dans les conséquences
dommageables de l'acte fautif. Ainsi, une faute sera lourde ou grave si elle
porte préjudice à la victime. Une faute légère sera
celle-là sans incidences notoires. Dans tous les cas, il s'agit de
prendre en compte les intérêts de la victime, pour mieux
réparer le dommage que lui cause l'auteur de la faute.
Au vu de ce qui précède, il nous parait
plausible d'affirmer qu'il n'existe pas véritablement de typologie de
fautes en matière civile ; il faut alors chercher
pêle-mêle, dans tel aspect, les éléments de
convergence ou de divergence, pour essayer de catégoriser la faute.
Mais, s'il est une certitude, c'est bien la séparation nette de la faute
civile de la faute administrative qui elle obéit à des
règles particulières
§ 2 : La singularité de la faute
administrative
Comme sus évoqué, la faute administrative se
distingue de la faute ordinaire commise par une personne. Cet état de
chose est dû non seulement à l'auteur de la faute, en ce que
l'administration s'entend, comme une pluralité de personnes juridiques
étant toutes des personnes morales qui n'agissent qu'à travers
leurs organes qui sont des personnes physiques. La faute administrative serait
alors la faute commise par un agent, une autorité ou un service
administratif. Cette faute est indissociable de l'idée du service qui
constitue sa principale caractéristique21(*). C'est à la jurisprudence PELLETIER
que la notion de «faute rattachée au service» tire
son origine. Il est loisible d'analyser la faute de service qui se distingue de
la faute personnelle de l'agent (A), mais encore aller au-delà de cette
distinction pour mieux rendre compte de la notion de faute administrative, et
ceci à travers la prise en compte du degré de gravité de
la faute dans la qualification de faute administrative (B).
A - Le rattachement au
service : la qualification de faute de service ou de faute personnelle
Le rattachement de la faute au service comme critère de
distinction de la faute administrative soulève la question de la
dualité faute personnelle - faute de service qui a longtemps
intéressé la doctrine, et a eu un retentissement en jurisprudence
depuis l'arrêt PELLETIER22(*).
Dès lors, pour rendre compte de la notion de faute de
service, il sied de ressortir la ligne de démarcation qui existe entre
elle, et la faute personnelle. Il s'agit donc de relever les notions et les
contours de la faute personnelle d'une part (1), et de la faute de service
d'autre part (2).
1 - Notion et contours de
la faute personnelle
La définition et la recherche des critères de la
faute personnelle ont été l'oeuvre de la doctrine face à
l'absence de formule de portée générale de la
jurisprudence.
C'est sous l'impulsion de E. LAFERRIERE dans ses conclusions
dans l'affaire Laumonier-Carriol23(*) que la faute personnelle a pu
être systématisée. Ainsi, il y a faute personnelle
« si l'acte dommageable révèle l'homme avec ses
faiblesses, ses passions, ses imprudences ». De ce qui
précède, l'on peut dégager deux traits susceptibles de
révéler la faute personnelle : l'intention malveillante et
la gravité de la faute. Mais cette approche s'est effacée peu
à peu, devant le rapport, de la faute au service, et du comportement de
cet agent et du service. Dans tous les cas, la faute personnelle est
celle-là qui peut être sanctionnée par le juge judiciaire
sans que ce dernier n'apprécie le fonctionnement du service public.
Une faute sera alors qualifiée de personnelle, soit
parce qu'elle a été commise par l'agent en dehors de l'exercice
de ses fonctions, soit parce que, alors même que l'agent est en fonction,
elle révèle un comportement incompatible avec le service.
En ce qui concerne la faute sans rapport avec le service,
l'acte révèle l'homme à titre privé ; il est
totalement étranger au service. Il s'agit alors de fautes
intentionnelles ou délits intentionnels de droit commun, notamment d'un
accident de la circulation provoqué par un agent utilisant sa voiture
personnelle en dehors de toute mission de service ; il en est aussi le
cas, dans les hypothèses où, la fonction, n'a que très
indirectement fourni les moyens de l'acte dommageable ; à titre
d'exemple, l'utilisation d'armes fournies par le service dans des
opérations purement personnelles, notamment, le vol, le meurtre commis
au cours d'une altercation privée.
Ensuite, quant à ce qui est de la faute non
dépourvue de lien avec le service, ce sont généralement
des fautes commises à l'occasion de l'accomplissement du service,
à l'instar d'une volonté d'enrichissement personnel qui
entraîne le pillage d'un logement exproprié, d'un dommage
provoqué par un agent qui s'est enivré pendant son service, de
brutalités ou de violences physiques envers un usager, de propos
grossiers, injurieux ou diffamatoires. Bref il y a faute personnelle lorsque le
but personnel recherché entache l'acte ou l'agissement de l'agent
administratif ; cela est d'ordre purement psychologique, d'une vengeance,
de l'intention de nuire, d'une animosité personnelle envers un
individu.
En tout état de cause, la faute personnelle est
celle-là qui est dépourvue de tout lien avec le service,
c'est-à-dire, a été commise hors du temps et du lieu de
service, et est révélatrice d'un comportement incompatible avec
la qualité d'agent administratif.
2- La faute de
service
La faute de service, entendue comme un acte dommageable
commis par un agent public à l'occasion de l'exécution du
service, et dont la réparation incombe à l'administration, a
longtemps constitué la clef de voûte du régime de la
responsabilité de l'administration, son fondement et sa condition
première. Elle demeure une des notions majeures des systèmes
développés par les jurisprudences Blanco &
Pelletier en tant qu'elle est une technique spécifique
d'engagement de la responsabilité administrative. En doctrine, la faute
de service peut avoir un prolongement technique à savoir la faute du
service. Aussi, selon le Lexique des termes juridiques, en droit
administratif on distingue deux catégories de fautes :
« la faute du service public [ ] désignant tout
défaut de fonctionnement des services publics de nature à engager
la responsabilité pécuniaire de l'administration à
l'égard des administrés » et la
« faute de service [...] désignant toute faute qui n'ayant
pas le caractère de faute personnelle, ne peut engager la
responsabilité civile de son auteur que ce soit envers l'administration
ou envers les administrés ».
Au regard de la définition donnée par E.
Laferriere, selon laquelle, il y a faute de service seulement
« si l'acte dommageable est impersonnel, s'il
révèle un administrateur plus ou moins sujet à
erreur », la faute de service grosso modo est
celle-là qui est commise par un agent en temps et en lieu de service, et
qui ne peut être détachée de ses fonctions.
La faute de service dans son analyse aura deux
caractères fondamentaux : c'est une faute anonyme, c'est une faute
directe.
Faute anonyme d'une part parce qu'il y a
dépersonnalisation de l'agent qui l'a commise. L'individualisation de
l'agent est sans intérêt car sans effets juridiques. C'est le
service seul qui est mis en cause. Cela ne veut pas dire que c'est le service
qui commet une faute, étant une personne morale, il ne peut agir
lui-même, mais seulement à travers ses organes. Claude Gour dit
à ce propos que « la faute de service sera toujours la
faute d'un homme mais la personnalité de ce dernier
est gommée dans le contentieux... »24(*).
D'autre part, la faute de service est une faute directe dans
la mesure où la victime, l'administré lésé n'a pas
besoin d'identifier l'auteur physique de la faute ; il suffit d'invoquer
le fait objectif du fonctionnement défectueux du service qui est
à l'origine du dommage. L'imputabilité du dommage à
l'administration est directe contrairement aux mécanismes d'imputation
de la faute des articles 1382 et suivant du Code civil qui
obéissent à des règles particulières.
A tout le moins, tout acte juridique, ou tout agissement
matériel de l'administration sont susceptibles de s'analyser en faute de
service. Tout réside dans l'anormalité de l'action
administrative. La faute de service apparaît comme une violation des lois
et des règles du service, ou comme un manquement aux obligations de
service. L'idée sous-tendue ici est celle selon laquelle la puissance
publique n'est liée ni à la faute de l'agent, ni à la
faute de la personne morale répondante, mais au fait du service qui a un
caractère fautif par référence à ce que
l'administré était en droit d'attendre. Selon le Professeur Duez
on distingue alors trois hypothèses de faute de service.
Il y a faute de service :
· lorsque le service a mal fonctionné25(*)
· lorsque le service n'a pas fonctionné du tout
· quand le service a fonctionné tardivement.
Néanmoins, tout resterait simple si ce critère
de distinction faute personnelle - faute de service est purement objectif et
matériel, que s'il est affaire de temps ou de lieu de service ou au
contraire de vie privée. Mais cela n'est pas toujours aisé, car
tout agent de l'administration reste simultanément un homme, une
personne privée dans l'exercice de ses fonctions. Et comme le disait
Monsieur Gour, « l'homme et l'administrateur ne se laissent pas
aisément séparer dans la réalité ; pendant
l'exercice de ses fonctions, il reste une personne privée avec ses
faiblesses, ses passions et simultanément, hors du service sa profession
peut faciliter la commission de faute à l'aide des moyens fournis par le
service »26(*). Ce sont donc des situations d'enchevêtrement
qui complexifient la distinction nette faute personnelle et faute de service,
et comme le déclare le Professeur GUIMDO, « cette
distinction est d'application difficultueuse. ».
B - L'implication du
degré de gravité dans la faute
Comme en matière civile, en matière administrative,
le degré de gravité de la faute est pris en compte pour qualifier
une faute administrative. L'analyse de la gravité du manquement, ou du
dysfonctionnement permet de distinguer l'erreur de la faute simple en premier
lieu, et en second lieu, de qualifier un manquement administratif eu
égard à une situation particulière, de faute lourde .
1 - L'erreur et la faute
simple
La doctrine classique considère l'erreur comme une
sorte de faute non qualifiée du fait de l'absence de conséquences
dommageables graves. L'erreur est alors une action regrettable, une maladresse,
une méprise, une appréciation inexacte d'un fait ou d'un acte.
Toutefois, en droit administratif, on distingue l'erreur simple de l'erreur
manifeste qui permet de sanctionner l'action ou l'inaction administrative
particulièrement flagrante. Dans l'arrêt Dame CHACHUAT,27(*) le juge déclare
expressément que « le fait incriminé est le
résultat d'une simple erreur et n'à pas le caractère
d'une faute de nature à engager la responsabilité de
l'administration ». Constitue alors une erreur simple l'omission
de mentions facultatives sur un acte sans incidences graves sur
l'administré. L'erreur manifeste quant à elle se
caractérise par un excès de pouvoir ou une violation grave des
obligations du service. L'erreur manifeste engage la responsabilité
administrative eu égard à la gravité du manquement qui
entache le fait ou l'acte administratif fautif. Elle s'apparente à une
faute inexcusable parce qu'elle est grossière et lourde. C'est la
méconnaissance scandaleuse d'une règle, d'une loi. L'erreur
manifeste se distingue de la faute simple et s'apparente plus à la faute
lourde.
2 -La qualification de
faute lourde
La qualification de faute lourde, en fonction de sa
gravité a eu dans l'histoire de la responsabilité administrative
un rôle important dans la mise en oeuvre de la responsabilité de
la puissance publique. Le critère de la faute lourde a paru pendant
longtemps un des instruments techniques d'identification de la faute
personnelle de l'agent, distincte de la faute de service28(*). La faute lourde selon le
vocabulaire juridique de Gérard Cornu est « un
comportement qui s'écarte largement du comportement qu'aurait eu dans
les mêmes circonstances le `bon père de famille; comportement qui
dénote chez son auteur soit l'extrême sottise, soit l'incurie,
soit une grande insouciance eu égard des dangers que l'on
crée ».
En droit administratif, le recours à la notion de faute
lourde pour établir une quelconque responsabilité est due
à l'initiative des tribunaux judiciaires. C'est le Répertoire
Dalloz29(*) qui en
présente le premier essai de systématisation doctrinale en droit
administratif. ROMIEU dans ses conclusions dans l'affaire Tomaso
Greco en précise la portée30(*).
De ce fait, la faute lourde serait alors une
« faute qualifiée », « une
faute caractérisée » distincte de la faute simple,
dans la mesure où elle se définit par une accumulation de fautes
légères31(*), par sa prévisibilité, et ici, on prend
en compte l'intention de l'agent32(*) ou encore par la gravité du dommage.
En ce qui concerne la fonction de la faute lourde ou faute
qualifiée, elle remplit une fonction positive ; elle est un moyen
de limitation de l'irresponsabilité de la puissance publique et par
conséquent un instrument d'extension dans le processus
d'évolution de la responsabilité administrative.
Mais depuis qu'il est quasiment admis un principe
général de responsabilité de la puissance publique,
l'exigence de faute lourde a changé de signification ; elle est
devenue un moyen de limitation de la responsabilité
administrative33(*).
De fait, il est difficile de tirer un système
rigoureux d'identification de la faute lourde en jurisprudence, car la faute
lourde déclarée, ne présente aucune
spécificité par rapport à la faute simple, et ceci parce
que, les éléments de définition des deux notions sont
rigoureusement identiques.
A tout le moins, la spécificité de la faute
lourde peut découler du caractère intentionnel, ou du
caractère essentiel de l'obligation violée. C'est alors au regard
des conséquences de la violation qu'on appréciera la faute
lourde. La doctrine administrative insiste sur le fait que la notion de faute
lourde varie selon les activités considérées. A cet
égard, selon Claude Gour34(*), la faute lourde sera qualifiée tantôt
par rapport à la nature régalienne de l'activité en cause,
elle s'apparente alors à celle de la voie de fait ; tantôt la
faute lourde s'explique par les difficultés de service.
De ce qui précède, on constate qu'il est
difficile de systématiser les critères distinctifs de la faute
lourde. Cela est dû à la conjugaison et au chevauchement des
différents éléments des fautes lourde et simple. Il reste
alors que la distinction perd de sa vigueur au même titre que la
distinction sus faite à propos de la faute personnelle et de la faute de
service, et on tombe ainsi dans des situations de cumul de
responsabilités de l'administration et de l'agent.
Néanmoins, malgré
cette complexification dans l'analyse des caractéristiques de la faute
administrative, il reste que en matière foncière, il y a bien
faute administrative, eu égard aux auteurs de cette faute, qui
constituent les acteurs intervenant dans la chaîne foncière qu'il
convient d'analyser dans la section subséquente.
B. Section 2 : L'identification des structures ADMINISTRATIVES
mises en cause dans la FAUTE EN MATIERE FONCIERE
L'implication des structures administratives dans la gestion
de la matière foncière découle à ne point douter de
l'article premier alinéa 2 de l'ordonnance 74/1 du 06 juillet 1974 aux
termes duquel : « l'Etat est le gardien de toutes les
terres. Il peut à ce titre intervenir en vue d'en assurer un usage
rationnel ou pour tenir compte des impératifs de la défense ou
des options économiques de la nation ». Il appartient
à l'Etat de mettre en place des politiques de répartition,
gestion et contrôle des affaires foncières. A cet effet, il a
été crée un ministère en charge de la chose
foncière notamment le Ministère des Affaires Foncières et
Domaniales (MINDAF) crée par décret n°2004/320 du 08
Décembre 2004 portant organisation du gouvernement et
complété par le décret n°2005/17 du 27 mai 2005
portant organisation du Ministère des domaines et des affaires
foncières. Ainsi, conformément aux dispositions desdits textes,
il a été conçu des structures spécialisées
à savoir une direction des affaires foncières et une sous
direction du domaine national. A ce titre, il serait judicieux d'analyser de
manière profonde le rôle précis de ces administrations qui
se subdivisent en acteurs principaux (§1) et acteurs secondaires
(§2).
§ 1 : Les intervenants administratifs directement
mis en cause
Lorsqu'on envisage l'analyse des services principaux ou
structures ad hoc intervenant en matière foncière, il
s'agit de relever les structures administratives et para administratives qui
s'occupent des procédures afférentes à la matière
foncière dans l'acquisition et la cession de propriété
par les particuliers pendant la procédure d'immatriculation et
d'expropriation35(*). Il
convient d'analyser l'organisation, le fonctionnement et les missions
dévolues aux commissions consultatives, à la conservation
foncière, à la commission d'évaluation (B). En plus de ces
structures, il faut voir en complément, le rôle des
autorités administratives proprement dites à l'instar du
préfet, du sous-préfet, et du chef de district qui sont les chefs
de circonscriptions administratives(A).
A- Les Chefs
d'unités administratives
Il s'agit principalement du Gouverneur, du Préfet, du
Sous-Préfet ou du Chef de district.
1- Le rôle du
Gouverneur ou du préfet en matière foncière
Selon que l'opération foncière aura lieu dans le
ressort territorial du département ou de la province, le Préfet
ou le Gouverneur sera compétent.
Le rôle du Gouverneur est issu de l'article 20
nouveau du décret n°2005/481 qui dispose
que : «les oppositions ou demandes
d'inscription de droits non levés à l'expiration du délai
prévu à l'article 18 alinéa 2 ci-dessus, sont soumises au
Gouverneur territorialement compétent pour règlement
après avis de la commission consultative.
(2)[...] Le Gouverneur peut par arrêté selon le
cas, autoriser le conservateur foncier :
-soit à immatriculer le terrain au nom du
requérant, avec inscription des droits le cas
échéant ;
-soit à faire exclure avant l'immatriculation, la
parcelle contestée ;
-soit enfin à rejeter la demande
d'immatriculation,
(3) La décision du Gouverneur est susceptible de
recours hiérarchique devant le Ministre chargé des affaires
foncières [...] ».
Le Préfet, représentant du pouvoir
exécutif dans le département, chef de la circonscription
administrative, incarne l'Etat, il est gardien des terres du
département. C'est lui qui nomme les membres de la commission
consultative à l'occasion des procédures
d'immatriculation36(*). De
même, pour ce qui est de la procédure d'expropriation, notamment
en ce qui concerne l'expropriation au niveau départemental37(*). C'est le préfet qui
préside la commission de constat et d'évaluation du projet
d'expropriation.
2- L'implication du
Sous-préfet ou du Chef de district
Conformément à l'article 12 nouveau du
décret de 2005, la demande d'immatriculation « est
déposée auprès du Chef de district ou du
Sous-préfet du lieu d situation de l'immeuble ». Il leur
appartient respectivement dans le ressort territorial de leur circonscription
administrative, de diligenter les procédures d'immatriculation.
La main mise du Sous-préfet ou du Chef de district en
matière foncière s'est faite grandissante, et rentre dans un
souci de déconcentrer la gestion des affaires foncières. C'est
auprès de leurs services, qu'est déposé le dossier de
demande d'immatriculation. C'est la première autorité
administrative saisie en cas d'immatriculation. Egalement, c'est le
sous-préfet ou le Chef de district qui préside de la commission
consultative, le maillon incontournable des descentes sur le terrain pour le
constat de mise en valeur et le règlement des litiges relatifs à
l'immatriculation.
B- Les structures
administratives ad-hoc
Les structures administratives ad-hoc englobent, et les
services para administratifs en ce qu'ils sont composés
d'autorités administratives au sens propre du terme, et les services
administratifs spécialisés notamment la conservation
foncière.
1- La commission
consultative
Prévue par le décret n°76/166 du 27 avril
1976 fixant les modalités de gestion du domaine national, et l'article
16 de l'ordonnance 74-1 du 06 Juillet 1974, la commission consultative,
chargée de régler les litiges fonciers concomitants ou
antérieurs au constat de mise en valeur, est constituée
d'autorités administratives et des représentants des
autorités traditionnelles ainsi qu'il suit :« Le
Sous-préfet ou le Chef de district, président ;
-un représentant du service des domaines,
secrétaire ;
-un représentant du service du cadastre
-un représentant du service de l'urbanisme, si le
projet est urbain ;
-un représentant du ministre dont la
compétence à un rapport avec le projet
-le chef et deux notables du village ou de la
collectivité où se trouve le terrain ».38(*)
En conséquence, au terme de l'article 17 du
décret 76/165, « les oppositions ou les demandes
d'inscription formées antérieurement à la date du constat
d'occupation sont examinés par la commission consultative au moment du
constat ». Les oppositions à immatriculation s'entendent
comme toute contestation par une personne autre que l'auteur de
l'immatriculation ; les demandes d'inscription quant à elles sont
les prétentions d'un tiers, relatives à l'existence des droits
réels ou une charge susceptible de figurer sur le titre foncier.
En droit camerounais, il existe un débat sur la nature et valeur
juridique des commissions consultatives en terme d'organe administratif ou
d'organe juridictionnel. Mais comme l'a souligné Monsieur Christophe
YOSSA, la commission consultative est « un organe administratif
fonctionnant comme une juridiction en matière
foncière »39(*). Avis que nous
partageons partiellement dans la mesure où la commission est
véritablement un organe administratif parce que composé
d'autorités administratives, d'agents et fonctionnaires du service
administratif, mais mitigé sur la fonction juridictionnelle ; nous
penchons plutôt pour un rôle conciliateur, car elle n'émet
que des avis qui ne lient pas l'autorité décisionnaire.
2-- La commission
d'évaluation
Prévue par l'article 4 de l'ordonnance 74-2 du 06
juillet 1974, la commission d'évaluation est composée comme
suit :
« Président :
- le préfet du département
intéressé ou son représentant
- le représentant départemental des domaines
qui assure le secrétariat.
Membres : - un géomètre
du cadastre
- un technicien de
construction
- un technicien d'agriculture ».
Composition modifiée par le décret
n°87/1872. Dorénavant, et ceci en ce qui concerne la commission au
niveau départemental, elle sera composée comme suit :
- du préfet ou son représentant,
président ;
- du responsable du service départemental des domaines,
secrétaire ;
- du responsable du service départemental du cadastre,
membre
- du responsable du service local de l'urbanisme et de
l'habitat ;
- du responsable compétent des mines et de
l'énergie ;
- du responsable du service départemental de
l'agriculture ;
- du représentant du service départemental des
routes ;
- du représentant du service ou de l'organisme
demandeur ;
- le ou les députés concernés,
membres ;
- la ou les autorités traditionnelles
concernées.
Une fois composée, la commission a pour mission,
choisir et faire borner les terrains concernés aux frais du
bénéficiaire, d'identifier leurs titulaires et
propriétaires, de constater les droits et d'évaluer les biens mis
en cause, de faire les panneaux indiquant le périmètre de
l'opération et surtout, le plus important, d'opérer
l'enquête d'utilité publique du projet. Bref, la commission est
chargée de contrôler, vérifier, effectuer toutes les
opérations préalables à l'expropriation.
3- La conservation
foncière
Instituée par les dispositions des articles 100 et 102
du décret n°2005/178 du 27 mai 2005 portant organisation du
ministère des domaines et des affaires foncières, la conservation
foncière est l'un des services rattachés à la
délégation départementale des domaines et des affaires
foncières40(*).
Le service de la conservation foncière se situe dans le
ressort territorial de chaque département au Cameroun, et est
placé sous l'autorité d'un conservateur. Le conservateur foncier
est un agent public assermenté chargé de :
« - l'application du régime foncier et
domanial
- l'immatriculation des terrains
- la transformation des divers actes en titres
fonciers
- la tenue et la conservation du titre foncier et des
dossiers des titres fonciers
- la communication des informations relatives aux droits
inscrits dans le livre foncier [....] ».
De manière générale, la conservation
foncière est responsable de l'entretien des livres fonciers, registres,
dossiers, répertoires ainsi que tous documents déposés
dans ses services. Ainsi, en matière d'immatriculation, il appartient au
conservateur foncier de certifier, d'authentifier les livrets fonciers en y
apposant sa signature et le timbre faisant foi de sa validité ; et
même de délivrer le titre foncier lorsqu'aucune
irrégularité n'entache la procédure.41(*) Il doit donc à cet
effet procéder au contrôle des actes ayant servi à la
constitution du dossier d'immatriculation.
En outre, c'est au service de la conservation foncière
que sont adressées les oppositions et les demandes d'inscription des
droits non examinés concomitamment au constat de mise en valeur. Ainsi,
toutes revendications postérieure et ultérieure au constat, sont
déposées à la conservation foncière pour purge, et
ceci dans un registre spécial42(*). Au vu de ce
qui précède, envisager les intervenants directs aux
procédures foncières nous a permis de montrer leur rôle
respectif de chaque structure. Mais comme il existe d'autres organes
administratifs qui interviennent dans leurs sphères de
compétences en matière foncière. Il serait
intéressant de les étudier, pour rendre compte sinon pas
totalement, mais, à tout le moins, de manière suffisante,
l'intervention de l'administration en droit foncier.
§ 2 : L'implication des structures
déconcentrées et de tutelle.
Il s'agit principalement ici des services centraux et
déconcentrés du ministère des affaires foncières,
notamment des délégations départementales et provinciales.
En tant qu'autorité de tutelle, l'on ne saurait
omettre le rôle du Ministre des domaines lui-même, qui lui
lorsqu'il est saisi d'un recours hiérarchique, prend une décision
susceptible de léser les intérêts des tiers notamment
pendant les procédures d'expropriation pour cause d'utilité
publique, d'attribution de concession provisoire, et du retrait du titre
foncier irrégulièrement délivré. S'agissant des
structures déconcentrées, il serait judicieux de les envisager de
manière précise.
A- La
délégation départementale des domaines et des affaires
foncières
Aux termes des dispositions de l'article 100 du décret
n°2005/78 organisant le MINDAF, la délégation
départementale est l'un des services déconcentrés du
Ministère des Domaines ; elle est placée sous
l'autorité d'un délégué départemental et a
pour rôle la coordination des activités des services
inférieurs, telles les Délégations d'arrondissement, et la
gestion des activités et programmes de son département. La
délégation fonctionne à travers des services à
l'instar du service départemental des domaines, du service des affaires
foncières, du service départemental du cadastre, des bureaux du
courrier, du service départemental de la recette et de la conservation
foncière43(*).
1 - Le service
départemental des affaires foncières
Prévu par l'article 105 du décret
suscité, le service départemental des affaires foncières
est dirigé par un chef de service qui coordonne les activités de
la structure. Activités constituées pour l'essentiel :
« - du suivi des Activités relatives
à la gestion du régime foncier dans le département
- de l'instruction des procédures de gestion du
domaine national
- du contrôle et du suivi de l'effectivité de
l'affichage des avis réglementaires à publier
- de la participation à l'examen des litiges
fonciers ».
2 - Le service
départemental des domaines
Envisagé par l'article 103 du décret du 17 mai
2005, le service départemental des domaines en principe coordonne les
activités relatives à la gestion du régime domanial, et
donc des modalités de gestion des terres appartenant à l'Etat.
Cet article dispose que : « [....] le service
départemental des domaines est chargé :
- du suivi des activités relatives à la
gestion du régime domanial ;
- du suivi et de l'instruction des procédures de
constitution, de gestion et de protection du domaine privé de
l'état et du domaine public ;
- du suivi du fonctionnement des commissions
d'arrondissement, de gestion du domaine public, du domaine privé de
l'Etat et de l'expropriation pour cause d'utilité
publique[...] ».
3 - Le service
départemental du cadastre
Le cadastre, d'une manière générale, est
une structure technique du MINDAF qui renferme la documentation cartographique
et la documentation
« littérale » ayant trait à
l'identification des propriétaires, et la délimitation des
propriétés. Il est chargé, de regrouper et rassembler les
informations et données liées au recensement, à la
définition, au suivi et à la situation de la
propriété foncière et de tout ce qui s'y
rattache44(*).
Le service départemental du cadastre pour sa part a
pour mission :
« -Du contrôle et du visa des
plans et procès-verbaux de délimitation et de
bornage
-de l'établissement des programmes annuels des
travaux topographiques et cadastraux
- de la participation aux travaux des commissions
convoquées en matière de gestion du domaine national, du domaine
public, du domaine privé de l'Etat ou des expropriations pour cause
d'utilité publique
- du suivi et de la liaison entre le cadastre et le livre
foncier ainsi que l'exécution des actes administratifs, des actes
notariés et des jugements définitifs en matière
foncière [...] ».
Ainsi en est-il de la constitution et de l'organisation des
principaux services de la délégation départementale en
charge de la chose foncière dans le ressort territorial du
département. Mais il faut encore analyser l'organisation et le
fonctionnement d'autres services déconcentrés du MINDAF, à
savoir la Délégation Provinciale des Domaines et des Affaires
Foncières, qui à priori, semble avoir le même
système de fonctionnement de la délégation
départementale.
B - La
Délégation provinciale des domaines et des affaires
foncières
Conformément aux dispositions des articles 92 à
99 du décret n°2005/178, les délégations provinciales
des domaines et des affaires foncières constituent l'un des services
déconcentres du MINDAF. La délégation provinciale
fonctionne à travers les services qui lui sont rattachés, et a,
à sa tête, un délégué provincial, arbitre et
chef de cette structure. La délégation provinciale a pour
rôle la coordination des activités tant au niveau provincial qu'au
niveau départemental, d'arrondissement et de district.
Subdivisée en services, avec chacun, sa part et sa
sphère de compétence, la délégation
comprend :
· un service des recettes chargé principalement du
recouvrement des créances et dettes émises à l'occasion
des opérations foncières, domaniales, cadastrales et
autres ;45(*)
· un service du patrimoine, chargé pour
l'essentiel du contrôle, de la conservation, de la gestion et de la
restauration des bâtiments constitutifs du patrimoine national de la
communauté46(*) et
des biens de l'Etat.
· un service administratif et financier, chargé
comme son nom l'indique, des opérations ayant un aspect administratif,
c'est-à-dire liées à la direction, la gestion des
affaires publiques du service; et un aspect financier, notamment la
préparation et l'exécution du budget.
· un service du courrier,
· des services du domaine, des affaires foncière
et cadastrale dont il est loisible d'examiner de manière
détaillée. S'agissant du service provincial des domaines,
coiffée à sa tête par un chef de service, il a pour
mission principale la gestion des domaines privé et public de
l'Etat ; le suivi et la conduite des opérations d'expropriation
pour cause d'utilité publique, de la gestion du domaine national dans sa
deuxième dépendance et bien d'autres.
En ce qui concerne le service provincial des affaires
foncières, son mode d'organisation est similaire à celui du
service des domaines précédemment étudié. Il est
chargé, pour sa part, des procédures de gestion du domaine
national de la première dépendance, c'est-à-dire des
terres occupées ou exploitées ; ainsi que du contrôle
des procédures instruites par les commissions consultatives pendant la
procédure d'obtention du titre foncier. Ce contrôle se traduit par
l'apposition du visa, indiquant que les procédures ont été
conformes et régulières. Mais encore, le service des Affaires
Foncières intervient dans la préparation des avis de
clôture de bornage et egalement, dans les formalités de
publicité et de publication des opérations foncières.
Quant au service provincial du cadastre, il est
énoncé par l'article 98 du même décret ; cette
structure a pour rôle: « le contrôle et le
visa des plans et procès verbaux de délimitation de
bornage » car comme on l'a susmentionné, le cadastre est
la structure technique qui élabore les plans de délimitation des
terrains et des propriétés. Il intervient aussi dans le suivi et
l'établissement des registres cadastraux, la délivrance des
extraits des documents cadastraux à l'instar des plans de localisation
des terrains.
D'une manière générale, le service
provincial cadastral a pour principale mission l'identification, la
détermination des espaces terrestres et l'élaboration de plans de
localisation, tant dans le ressort de la province, que dans le contrôle
et la coordination de ces activités dans les départements,
arrondissements ou districts.
En définitive, pour conclure ce chapitre sur la
particularité de la faute administrative en matière
foncière, il convient de rappeler le fil d'Ariane conducteur de notre
réflexion. Il a été question de montrer la
singularité de cette faute à travers ses caractéristiques
et les personnes administratives impliquées dans la commission de cette
faute.
La faute administrative devrait être alors une faute de
service commise par l'un quelconque des agents ou fonctionnaires de
l'administration. Certes, on a pu relever que cette exigence n'est plus
rigoureuse au vu des imbrications de la vie privée et du service en la
personne de l'agent, mais tout moins, c'est la constance à
établir. Parce que la propriété immobilière doit
être protégée des piétinements administratifs, la
faute personnelle de l'agent, ou des services pourra ainsi être
réparée par le juge.
CHAPITRE 2 : LES MANIFESTATIONS DE LA FAUTE EN
MATIERE FONCIERE
Le foncier de manière générale, s'entend
comme le droit de la terre ou les droits sur les terres. Il s'agit donc des
règles qui harmonisent les procédures relatives à la
propriété immobilière des personnes physique ou morale,
à l'exclusion de l'Etat et des collectivités publiques, qui eux
sont régies par les règles domaniales. Si l'intervention et le
rôle de l'Etat ne sont plus à démontrer, cependant, il ne
fait aucun doute que cette gestion peut être lacunaire, au même
titre que l'action de l'homme, car l'administration est une entité
abstraite qui ne vit que par l'intermédiaire des personnes physiques ou
morales. Après avoir analysé plus haut, la particularité
de la faute administrative en terme de reconnaissance des
caractéristiques inhérentes de cette faute, il sied dans le
même souci d'identification de la faute administrative, de relever les
manifestations de ces fautes, c'est-à-dire l'expression concrète
des manquements administratifs qui portent atteinte à la
propriété immobilière des individus. Il est question pour
nous de faire de la casuistique pour mieux rendre compte des dysfonctionnements
observés pendant les principales procédures inhérentes
à la propriété immobilière notamment pendant
l'acquisition (section 1). Une fois acquise, la terre devient une
propriété, et constitue un bien, faisant partie du patrimoine
d'un individu. Par conséquent, elle est susceptible de rentrer dans le
commerce, d'être aliénée, et changer ainsi de
propriétaire. Il paraît donc important de relever les
hypothèses de cession qui fait intervenir les organes administratifs,
et par conséquent, les fautes par eux commises (section2).
Section 1 : La faute
commise pendant l'acquisition de la propriété
immobilière
L'objectif principal dans ce registre, est de déceler
non pas entièrement, mais au cas par cas, les potentiels et
différents incidents qui surviennent pendant les phases d'acquisition
de la propriété foncière, et causés par les
services de l'administration foncière. Au Cameroun, aux termes de
l'article 1 alinéa 1 du décret n°76-165 du 27 avril 1976
fixant les conditions d'obtention du titre foncier, « le titre
foncier est la certification officielle de la propriété
immobilière », c'est la preuve unique du droit de
propriété sur l'ensemble du territoire camerounais. Mais encore
faut-il savoir, quelles terres sont susceptibles d'appropriation et quels sont
les modes d'obtention du titre foncier.
Conformément à la législation
camerounaise, seules les terres du domaine national entendu comme, l'ensemble
des terres qui n'ont fait l'objet d'une appropriation ni au profit des
individus, ni au bénéfice des personnes morales de droit public,
ou qui ne font pas partie du domaine public ou du domaine privé de
l'Etat47(*). De
manière laconique, le domaine national est l'ensemble des terres
camerounaises non encore immatriculées, seules les terres appartenant
à cette catégorie peuvent être acquises par les
particuliers, personnes physiques ou morales. S'agissant des terres faisant
déjà l'objet d'un droit de propriété, il s'agit en
fait de parcelles de terrains immatriculés au bénéfice de
personnes privées. Cette catégorie de terres conformément
à l'alinéa 2 de l'article 14 ne font pas partie du domaine
national48(*).
Il apparaît nécessaire à cet effet,
d'analyser les fautes administratives commises au cours de ces
procédures, à savoir, pendant l'immatriculation des terres de la
première dépendance (§1), et de la deuxième
dépendance du domaine national (§ 2).
§1 : L'immatriculation des terres de la
première dépendance du domaine national.
En droit foncier camerounais, la procédure
d'immatriculation directe est le mode principal d'acquisition des terres de la
première dépendance du domaine national. Ces terres sont
classées en : « terrains d'habitation, terres de
culture, de plantation, de pâturage et de parcours dont l'occupation
traduit par une emprise évidente de l'homme sur la terre et une mise en
valeur probante »49(*) . A tout prendre, il s'agit d'analyser les
fautes commises lors des procédures en vue de l'obtention du titre
foncier (A) et pendant l'établissement du titre foncier (B).
A- Les dysfonctionnements
des services administratifs au cours des phases préalables à
l'immatriculation.
La procédure d'obtention du titre foncier, et donc
d'immatriculation des terres de la première dépendance, notamment
les terres occupées ou exploitées se réalisent à
travers différentes étapes. C'est au cours de ces
différentes phases préalables à l'établissement du
titre foncier que des fautes peuvent être commises.
Suivant les dispositions du décret 76|165 du
27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier,
modifié et complété par le décret n°2005|431
du 16 Décembre 2005, toute personne physique ou morale de
nationalité camerounaise réunissant et remplissant les
conditions, est autorisée à solliciter l'obtention du titre
foncier en constituant un dossier administratif, qui révèle son
identité et la description de l'immeuble à immatriculer. Ainsi,
on peut lire à l'article 11du décret n°2005/481 que
« toute personne habilitée à solliciter l'obtention
du titre foncier sur une dépendance du domaine national doit constituer
un dossier comprenant :
- une demande en quatre (4) exemplaires dont l'original
est timbrée, indiquant ses noms et prénoms, sa filiation
[....]
- la description de l'immeuble (situation, superficie,
nature de l'occupation ou de l'exploitation estimation de sa valeur, indication
des charges qui le grève ».
De la sorte, une fois le dossier constitué, il est
« déposé auprès du Chef du district ou du
Sous-préfet du lieu de situation de l'immeuble », dispose
l'article 12 du même texte. Et dès réception du dossier, et
dans les soixante douze (72) jours, le Sous-préfet du lieu de situation
de l'immeuble « délivre sans aucune formalité
préalable un récépissé à l'adresse y
indiqué, puis le transmet dans les huit (8) jours à la
délégation départementale des affaires
foncières ». A la lecture de cet article, on voit
apparaître la première intervention des autorités
administratives dans la chaîne foncière. Obligations sont donc
faites, soit au sous-préfet, soit au chef de district, cela
dépendra de la circonscription administrative de localisation du
terrain. Comme obligation, on a l'exigence de recevoir le dossier et
délivrer un récépissé, puis le transmettre à
la délégation et ceci, sous respect de certains délais. De
ce fait, le Sous-préfet qui refuse de recevoir le dossier d'une personne
remplissant les conditions requises à l'article 11 suscité commet
une faute. De même, la non transmission du dossier aux autres services
concernés pour suite de procédure révèle la faute
du Sous-préfet. Mais encore, le non respect des délais et les
lenteurs dans la réception, délivrance, ou transmission du
dossier sont constitutifs de faute administrative. L'on ne saurait omettre
l'immixtion d'un Sous-préfet ou d'un chef de district territorialement
incompétent dans la procédure. L'autorité administrative
qui reçoit et transmet le dossier, doit donc s'assurer de sa
compétence territoriale, car l'incompétence en droit
administratif est l'une des causes du contentieux de l'excès de pouvoir
qui entache l'action administrative. Mais encore, et c'est le plus grave, il
peut arriver que l'administration reçoive de fausses pièces de
dossier ou même fasse fabriquer des pièces pour le dossier,
étant ainsi de connivence avec le requérant de mauvaise foi. Ce
fut le cas dans l'affaire Bilounga Pascaline contre Etat du
cameroun.50(*)
En outre, après réception et transmission du
dossier par le Sous-préfet et ou le Chef de district, le
Délégué départemental des affaires foncières
fait publier un extrait de la demande afin que nul n'en ignore51(*). Il lui est donc fait
obligation d'information de la demande d'immatriculation. De ce fait, le
Délégué départemental qui omet la publication d'une
demande commet une faute car la publication a pour but d'informer le public
afin que la procédure d'immatriculation se fasse au grand jour, sans
contradictions ou oppositions postérieures qui entachent la
régularité du titre foncier.
Par la suite, « sur proposition du chef de
service départemental des affaires foncières, le
Sous-préfet ou le Chef de district territorialement compétent,
[....] fixe par décision, la date de constat d'occupation ou
d'exploitation ». Le constat d'occupation ou d'exploitation du
terrain est la phase par laquelle la commission consultative vérifie que
le terrain à immatriculer a été exploité ou
occupé par le demandeur, et ceci avant la date du 05 août 1974. La
mise en valeur confère alors qualité et aptitude au demandeur
à l'immatriculation. Aussi, au cours de la descente de la commission
pour vérifier la mise en valeur, plusieurs fautes peuvent survenir.
C'est notamment la constitution illégale de la commission consultative
en violation de l'article 12 du décret 76/166, comme ce fut le cas dans
les affaires BEYISSA Adolphe Mazarin contre Etat du Cameroun (MINUH)
et Succession NDONGO NTSAMA Bonaventure contre Etat du Cameroun
(MINUH) dans lesquelles était remise en cause la participation
active et frauduleuse de fonctionnaires territorialement incompétents
notamment celle des géomètres. 52(*)
Une fois, la commission consultative formée, il peut
même arriver qu'elle ne descende pas sur le terrain pour effectuer le
constat de mise en valeur rendant par là la procédure
d'immatriculation impossible.
D'autre part, lorsque la commission descend sur le terrain
« en cas d'occupation et d'exploitation effective, (elle) fait
immédiatement procéder au bornage de l'immeuble par un
géomètre assermenté, en présence des
riverains »53(*). De ce fait, l'absence des riverains à
l'opération de bornage entache la validité de l'opération,
car l'exigence de la présence des riverains est une formalité
substantielle54(*) et
l'absence d'un seul peut entraîner la nullité de l'avis de la
commission consultative qui, en cas de contestation doit entendre les
témoins et statuer en toute impartialité.55(*)
De même, le fait pour la commission de n'entendre qu'une
partie, violant ainsi le principe du contradictoire est constitutif de faute
administrative. La Chambre Administrative condamna un tel manque
d'impartialité dans l'affaire NJOH Philibert et KOUKA
KOUM57(*).
Il en est aussi le cas, lorsque la commission refuse de tenir
compte des oppositions soulevées au cours de la procédure, et par
conséquent ne motive pas ses décisions de rejet
d'opposition58(*). Les
conséquences logiques de cette partialité de la commission sont
que, les procès verbaux établis seront déclarés
complaisants. Dans la célèbre affaire POHOKAM
Suzanne contre Etat du Cameroun, la Chambre
Administrative sanctionne la négligence commise par l'administration en
ces termes : « Attendu que non seulement dans le
procès verbal de la commission consultative qui a servi de base à
la décision attaquée, ni les personnes entendues, ni les
conclusions de la commission ne se préoccupent de rechercher ceux qui
occupent ou exploitent le domaine litigieux , conformément aux exigences
de la loi, mais encore la décision du Ministre de Urbanisme et de
l'Habitat allègue de « la simple mise en valeur »
sans qu'il soit démontré que cette expression équivaille
à l'occupation ou à l'exploitation. Autrement dit,
l'administration n'a pas donné aux faits, la qualification juridique
requise par la loi »59(*).
Il convient également de relever que les principales
oppositions faites pendant la procédure sont relatives à la
contestation des mises en valeur effectuées par le demandeur à
l'immatriculation. En effet, la mise en valeur de l'immeuble dont
l'immatriculation est demandée, doit être l'oeuvre du
requérrant et non celle d'un tiers60(*). Cette mise en valeur doit être effective et
matérialisée par des cultures, constructions, plantations et
autres ouvrages. En outre, cette occupation ou exploitation doit être
paisible, continue, utile non équivoque et antérieure à la
date du 05 août 1974, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance
74/1 du 06 juillet 197461(*).
Une fois que les oppositions ont été
levées et le constat d'occupation effectué, il est
effectué le bornage de l'immeuble par un géomètre
assermentée du cadastre, et selon les termes de l'alinéa 8 de
l'article 13 du décret de 2005 « a peine de
nullité, aucun bornage d'immatriculation ne peut être
effectué par le géomètre seul-». Il est
important de le noter, l'opération de bornage permet de
déterminer les limites du terrain, de calculer les dimensions afin de
dresser un plan de l'immeuble. Mais il est surprenant de constater que pendant
le bornage du terrain, en présence des membres de la commission,
l'administration fait immatriculer au profit d'un demandeur une superficie
supérieure à celle qu'il avait demandée soit par
empiétement sur l'immeuble d'autrui62(*), soit par violation des parcelles relevant du domaine
public de l'Etat, or l'on sait que les domaines public et privé de
l'Etat sont insusceptibles d'appropriation privée. En plus, il est
encore plus scandaleux d'assister au double bornage d'un même terrain.
Ainsi dans l'affaire Noumsi Jean Bosco, la faute de
l'administration consistait au fait pour celle-ci de « borner
deux fois les mêmes terrains en violation du principe « bornage
sur bornage ne vaut» à savoir le bornage du 26 avril 1984 sur
la demande du sieur NOUMSI déposée le 04 Décembre 1981 et
le bornage du 11 septembre 1989 suite à la demande d'immatriculation de
veuve Chache déposée seulement le 13 avril
1989 [...]»63(*).
Il peut arriver aussi que le bornage soit effectué
par un géomètre non assermenté du cadastre ; la
Chambre Administrative de la Cour Suprême est souvent saisie des
recours en contestation de la qualité du géomètre ayant
effectué le bornage d'un terrain.
A la clôture du bornage qui constitue la fin du constat
d'occupation ou d'exploitation, passé les délais
réglementaires, le Délégué départemental des
affaires foncières transmet au Délégué provincial,
le dossier complet pour vérification, contrôle, publication et
visa du dossier et suite de la procédure. L'obligation de diligence
faite à ces autorités est déterminante, car en droit
administratif, les délais sont de rigueur. L'absence de publication dans
le bulletin des avis domaniaux est une inaction fautive ; à la fin
de ces différentes formalités le dossier est acheminé
auprès du conservateur foncier pour l'établissement du titre
foncier.
B - Les dysfonctionnements
liés aux formalités d'établissement et de
délivrance du titre foncier
Il est question à ce niveau, de relever les
manquements et forfaits administratifs accomplis durant
l'établissement et la délivrance du titre de
propriété. En effet, si les formalités préalables
à l'obtention du titre foncier ont pour but de régler tous les
litiges relatifs à la qualité du requérant et à
l'étendue du terrain, il est nécessaire que ces litiges aient
été résolus pour garantir l'intangibilité,
l'inattaquabilité et le caractère définitif du titre
foncier après son établissement. Il appartient donc au
conservateur foncier, de faire preuve de vigilance, avant tout
établissement du titre foncier au vu des conséquences lourdes et
définitives qu'il emporte. Il s'agit alors d'analyser la nature de la
faute du conservateur (1). Parce que c'est lui le gardien et dépositaire
des registres et livrets fonciers, il a l'obligation d'y apporter des soins tel
un « bon père de famille », et veiller à la
communication des informations relatives aux oppositions formées et
droits inscrits dans ces registres. Egalement, il doit veiller à la
régularité des transformations des divers actes en titres
fonciers. Il serait dès lors judicieux d'analyser la panoplie de fautes
commises par le conservateur foncier en violation de ses obligations (2).
1- La nature des
manquements du conservateur foncier
Dans ce registre, figure tout fait, tout acte, toute
abstention du conservateur ne constituant pas des fautes ; il existe des
critères distinctifs de la simple erreur, d'omissions et de la faute en
terme d'irrégularités profondes. De la sorte, avant d'envisager
l'expression de la faute, il est important d'opérer un tri.
A cet effet, à la lecture de l'article 39 du
décret n°2005/481, il est énoncé de manière
précise que, certains faits sont insusceptibles de rentrer dans la
catégorie de fautes. Il en est ainsi des omissions, erreurs,
imprudences, simples faits commis par le conservateur dans le titre de
propriété, ou des inscriptions qui peuvent être
rectifiées ou corrigées.
De façon identique, les
irrégularités provenant de son propre fait, ou du fait d'autrui
notamment, de ses collaborateurs ou de ses prédécesseurs, dans
les documents et registres sous leur responsabilité, le conservateur
peut les rectifier, à la condition qu'elles n'aient pas d'incidence sur
les droits des tiers. Auquel cas, il devra demander autorisation au Premier
Ministre et approbation du Président de la République. S'il agit
en méconnaissance de ces prescriptions, il commet alors une faute
susceptible de mettre en oeuvre sa responsabilité.
2- Les faits susceptibles
d'être considérés comme fautes du conservateur.
Déduction faite de l'alinéa 3 de l'article 2 du
décret n°2005/481, la faute administrative s'analyserait
comme : « toute irrégularité commise au
cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des
authentiques produits [...] ». Ainsi, le conservateur foncier,
en tant que garant de la conformité des pièces versées au
dossier, peut voir sa responsabilité établie, lorsqu'il accepte
des fausses pièces, et procède à l'établissement
du titre foncier ; mêmement, en cas de disparition ou de
substitution des pièces du dossier déposé auprès
de ses services.
Par ailleurs, conformément aux dispositions de
l'article 31 du décret de 2005, « avant de procéder
à toute transformation des actes en titre foncier, le conservateur doit
vérifier sous sa responsabilité, les pièces
déposées et s'assurer en outre :
- de l'identité et de la capacité des
parties ;
- de la disponibilité de
l'immeuble. »
Il s'agit en fait des hypothèses d'obtention de titres
fonciers par transformation de divers actes matérialisant l'emprise et
l'occupation des terres avant la mise en place du système de
l'immatriculation, ou pour des situations légales ayant acquis des
effets définitifs, et permettant aux individus d'avoir des droits sur
les terres.64(*)
De manière laconique, le constat tiré est
celui suivant lequel, lors de l'établissement ou la délivrance du
titre foncier, le conservateur foncier fait preuve de manquement lorsqu'il ne
procède pas aux vérification et contrôle obligatoires. Ce
fut le cas dans l'affaire Chambre de Commerce contre Etat
du Cameroun et succession Paul Monthe dans laquelle le
jugement rendu énonce : « attendu qu'il
résulte de ce texte que l'administration a commis des fautes dans la
délivrance du titre foncier litigieux, notamment le fait de l'avoir
délivré à une personne décédée depuis
10 ans... »65(*)
Dans cette perspective, et dans une autre espèce
relative à la transformation d'un jugement définitif en titre
foncier, le conservateur foncier avait agit en marge de la
réglementation en vigueur. En effet, dans l'affaire du Canton
Bassa à Douala, deux titres fonciers ont été
successivement délivrés à un même individu, le sieur
Matip benjamin en application d'un vieil arrêt de la Cour d'appel du
littoral, en date du 23 juin 1968 reconnaissant à
l'intéressé des droits sur un terrain situé à Matom
à Douala. Le premier titre foncier établi le 06 septembre 2005
porte sur une superficie de 346 ha ; le second porte quant à lui,
sur une superficie de 651 ; ces deux titres fonciers ont été
irrégulièrement délivrés car la transformation
était invalide. Pour que la transformation d'un jugement en titre
foncier soit valide, elle doit être effectuée non seulement dans
des délais précis, mieux encore, elle devrait obéir
à des modalités précises. Pour ce qui est des
délais, la demande de transformation doit être introduite dans un
délai de 10 ans à compter du 05 août 1974 pour les terrains
situés en zone urbaine, et de 15 ans pour les terrains en zone rurale.
Le non respect desdits délais emporte déchéance de toute
demande. La transformation opérée dans cette cause a
été faite le 20 juin 2007, soit près de 33 ans
passés les délais. Quant aux modalités de la
transformation, il est clairement affirmé à l'article 5 du
décret n°76/165, modifié et complété par le
décret de 2005 que : « si l'immeuble n'est pas
borné, le conservateur requiert son bornage au frais du
propriétaire. Le bornage est effectué en présence des
voisins, par un géomètre assermenté du
cadastre ». Cette formalité substantielle permet de
délimiter le terrain à immatriculer afin qu'il n'y ait pas
empiétement sur le terrain d'autrui ; or en l'espèce, il y'a
eu grossissement dans les parcelles à immatriculer ; en
conséquence, la transformation qui a abouti à
l'établissement des titres fonciers était forcément
irrégulière.
S'il est ainsi montré les nombreuses
irrégularités administratives qui entourent et entachent les
opérations d'acquisition ou d'obtention des parcelles de la
première dépendance du domaine national, c'est-à-dire les
terres occupées ou exploitées, il reste encore à analyser
celles qui entourent les opérations d'acquisition des terres de la
deuxième dépendance, c'est-à-dire, les terres libres de
toute occupation (§2).
§ 2 : La faute
administrative lors de l'acquisition des terres libres de toute occupation
effective
L'appropriation des parcelles de terrain de la deuxième
dépendance du domaine national, entendue comme les terres libres de
toute occupation effective, est réglementée par le décret
76-166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine
national. Aux termes de l'article premier de ce texte, « les
dépendances non occupées ou non exploitées du domaine
national sont attribuées par voie de concession
provisoire ». La concession consiste alors « en un
octroi en jouissance au profit du concessionnaire, assorti d'une promesse de
vente sous condition suspensive de la réalisation de la mise en valeur
dans un délai déterminé ».66(*)
De même les alinéa 3 et 4 de l'article 11 du
décret N°2005/481 du 16 décembre 2005 disposent
que :
« al.3 : les demandes portant sur les
terres libre de toute occupation ou de toute exploitation sont irrecevables.
Elles son instruites selon la procédure de concession.
al.4 : suivent également la procédure de
concession, les demandes portant sur des mises en valeur
réalisées après le 05 août
1974[...] ».
Il s'agit d'un contrat par lequel l'Etat autorise
soit une personne privée, soit une personne morale,67(*) moyennant la
réalisation d'un projet précis, et dans un délai
déterminé, l'occupation ou l'exploitation de parcelles de terres
libres relevant de la deuxième dépendance du domaine national.
Au terme de ce délai, la concession provisoire peut être
transformée soit en bail, soit en concession définitive qui
opère transfert de propriété et donne droit à
l'obtention du titre foncier. Parce que la concession est une procédure
qui est conduite en deux phases, il s'agira d'étudier tour à
tour les fautes commises au stade de la concession provisoire (A), et dans la
concession définitive (B).
A- Les dysfonctionnements
administratifs au cours de l'octroi des concessions provisoires
La concession provisoire est un contrat particulier qui lie le
concessionnaire personne privée à l'administration, personne
publique. Ce contrat est entouré d'un formalisme qui entoure tant la
qualité de concessionnaire, que la durée de la concession, et
même les obligations afférentes au concessionnaire. Dans un souci
de mieux rendre compte la procédure, il sied avant que
d'énumérer les différentes fautes commises par
l'administration (2), d'exposer sommairement le formalisme procédural
qui entoure cette transaction immobilière (1).
1- Le formalisme
procédural relatif à la concession provisoire
Comme il a été susmentionné, la concession
provisoire est une procédure assez complexe. A la différence de
l'immatriculation directe, elle obéit à des règles
particulières. Ainsi, toute personne physique ou morale qui
désire mettre en valeur une dépendance du domaine national libre
de toute occupation ou exploitation constitue une demande en trois exemplaires
sur des formulaires spéciaux qu'elle adresse au service
départemental du lieu de situation de l'immeuble. En plus de
l'indication de son identité, son statut matrimonial, et toutes les
informations à caractère privé permettant de l'identifier,
le demandeur en concession doit aussi fournir des informations sur le terrain
sollicité, notamment, un croquis détaillé et le programme
de mise en valeur faisant ressortir les différentes étapes qu'il
réalisera. S'agissant de la mise en valeur du terrain concerné,
objectif essentiel du contrat de concession, le demandeur doit démontrer
de manière suffisante la crédibilité de son projet qui
devra se concrétiser plus tard par une occupation ou exploitation
effective, et la conformité au cahier de charges tenu par la commission
chargée d'examiner et d'émettre un avis sur le projet. En effet,
c'est à la commission consultative qu'il appartient de mener à
bien la procédure, par l'émission d'avis, d'observation et de
recommandation, en plus de l'examen le cas échéant des litiges
survenus et le constat de la mise en valeur.
De ce fait, dès que la demande est adressée au
service départemental des domaines du lieu de situation de l'immeuble,
objet de la concession, ce service après délivrance d'un
récépissé au requérant, et recueillement des avis
utiles des différents services techniques administratifs
concernés par le projet, transmet le dossier à la commission
consultative sous la diligence du Préfet. Le dossier instruit est alors
transmis par les soins du Préfet aux services du Ministre en charge des
affaires foncières conformément aux articles 1 alinéa 2,
31 et 32 du décret n°2005/178 du 27 mai portant organisation du
Ministère des Domaines et des Affaires Foncières68(*), soit aux services de la
Présidence de la République pour ce qui est des concessions des
terrains de plus de 50 hectares.
L'envoi en jouissance des terrains au titre de concession
provisoire prend naturellement fin à l'expiration du délai et se
matérialise soit par la concession définitive , soit par un
échec, et ceci lorsqu'on est en présence d'incidents divers,
à l'instar du non respect des obligations imposées au
concessionnaire dans le cahier de charges, par l'abandon volontaire-la
concession étant un contrat- et s'il advient que l'une des parties
désiste, le contrat prend fin, par suite du décès du
bénéficiaire ou par l'aliénation frauduleuse du terrain
sans l'autorisation de l'autorité concédante.
Tout ceci pour dire que la concession provisoire est une
opération assez complexe qui prend forme et s'achève dans le
respect des règles bien définies. Après avoir sommairement
étudié ces règles, il sied alors d'analyser les
différentes fautes susceptibles d'être commises au cours de cette
procédure.
2- Les
irrégularités commises par le concédant
administratif
Elles sont diverses et ne peuvent pas être
énumérées de manière exhaustive. Tout au moins,
l'on peut relever à ce titre l'attribution d'un terrain
déjà immatriculé en concession. Il est en effet paradoxal
que des terrains faisant l'objet de titres fonciers soient octroyés en
concession provisoire ou définitive. La concession ne concerne que les
terres libres de toute occupation, et donc constituant la deuxième
dépendance du domaine national, tandis que l'immatriculation directe
concerne les terres occupées ou exploitées, et ceci après
constat de mise en valeur effective. Ce fut le cas dans l'affaire
OUAFFO contre BELINGA KYE,69(*) qui illustrera notre argumentaire.
Dans cette espèce, le sieur OUAFFO propriétaire
terrien , s'opposait en l'envoi en concession de son terrain qu'il occupait,
au profit sieur BELINGA KYE par décision ministérielle
n°195/YOB/MINUH/D113 du 23 avril 1998. La Chambre Administrative
décide à bon droit que « le terrain litigieux qui
était licitement occupé par le sieur OUAFFO ne pouvait plus faire
l'objet d'une concession au profit de sieur BELINGA KYE ».
Il en est de même dans l'affaire BONGO Henri
Aimé contre Etat du Cameroun (MINDAF) dans
laquelle un terrain, bien d'une succession, donc, bien indivis a
été curieusement immatriculé par voie de concession alors
que le partage successoral n'était pas encore fait, et surtout en
violation des articles 11 et suivants du décret 76/165, et l'article 1
du décret n°76/166 du 27 avril 1976 qui disposent que la concession
ne concerne que les terrains libres de toute occupation.70(*)
En outre, on peut assister à des situations
inverses, où des terrains déjà attribués en
concession provisoire ou définitive, réussissent encore à
faire l'objet d'une immatriculation. Ce fut le cas dans la
célèbre affaire « Gare
routière de Kousseri » dans laquelle un individu a
réussi avec l'aide d'autorités administratives, à faire
immatriculer des terres faisant déjà l'objet de concession
définitive71(*).
Comment comprendre le rôle de la commission consultative
chargée de conduire les opérations d'attribution de concession,
de même que les services des concessions qui parviennent à faire
attribuer des terrains déjà appropriés en concession
provisoire ! Il s'agit à ne point douter de la négligence,
du laxisme et même de la fraude des services administratifs en
complicité avec les bénéficiaires non qualifiés. Ce
fut le cas dans l'affaire EKEME Henri contre Epoux FENGYEP72(*).
Par ailleurs, la faute administrative s'observe au niveau de
la compétence de l'autorité concédante. En effet, on l'a
sus évoqué, l'attribution des concessions provisoires varie en
fonction de l'étendue du terrain, et est ainsi liée à
l'autorité concédante. Il est alors curieux de constater
l'attribution de concession de plus de 50 hectares par arrêté
ministériel en violation de l'article 8 du décret 76/166. Ce fut
le cas dans l'affaire « Cameron Agricultural farmer
association » contre le canton Bakoko du Wouri. Dans
cette espèce, le MINUH a ordonné l'immatriculation de plus de
2000 hectares de terrain au profit des communautés Japoma, Mbanga,
Yassa, Ngodi, Yatchiba, Gwang et Yansoki constituant tout le canton
Bakoko, et ceci, suivant les lettres N°1447/Y.16.3/MINUH/D220/A du 09
avril 1992 et N°4998/Y.12/MINUH/D220/A du 06 novembre 1992,
l'incompétence du Ministre étant manifeste, pour avoir agi en
lieu et place du Président de la République, qui est seul
habilité par décret, à attribuer les concessions de plus
de 50 hectares, conformément à l'article 7 du décret
76/166 aux termes duquel : « les concessions de moins
50 hectares sont attribuées par arrêté ministériel
du ministre en charge des domaines celles de plus de 50 hectares par
décret présidentiel »73(*)
B - Les fautes issues de
l'attribution des concessions définitives
La concession définitive est l'aboutissement normal de
la concession provisoire. Il s'agit au fond de la transformation de la
concession provisoire en concession définitive qui opère envoi en
propriété du terrain concédé au
bénéficiaire de l'opération, conformément à
l'article 2 de l'ordonnance 74-1. du 06 juillet 1974.
1- Les données
préalables à la transformation.
Avant toute transformation, la commission
consultative qui a émit l'avis favorable d'attribution de concession
provisoire, doit procéder à des opérations de
vérification du respect des obligations contenues dans le cahier de
charges. A l'expiration du délai normal de concession provisoire qui est
de cinq ans, la commission doit statuer avant toute transformation, sur le
respect des obligations imposées au concessionnaire ; de
même, la vérification de la qualité du concessionnaire,
car, ce dernier peut vendre frauduleusement le terrain à l'insu des
autorités ou même il peut arriver que le concessionnaire soit
décédé.
Ce n'est qu'après vérification et contrôle
du constat de mise en valeur qui se traduit par la réalisation du projet
envisagé que la commission peut établir un procès verbal
adressé au Préfet dans lequel elle propose :
· soit la prorogation de la durée de la
concession, si la mise en valeur n'a pas été totalement
réalisée,
· soit l'attribution définitive, si le cahier de
charges a été respecté par le concessionnaire ;
· soit la déchéance, s'il est arrivé
des incidents au cours de la concession provisoire notamment : l'abandon
ou le désistement volontaire, le décès du concessionnaire,
ceci lorsque l'héritier n'aura pas demandé le transfert des
droits, ou même la faillite de la personne morale et
l'aliénation frauduleuse de terrain par le concessionnaire.
· Soit l'octroi d'un bail emphytéotique, pour les
étrangers ayant mis le terrain en valeur. Le bail emphytéotique
est un bail de longue durée, pouvant atteindre 99 ans, portant sur un
immeuble et conférant au preneur un droit réel, il s'agit en fait
d'un droit de location compris dans la fourchette 18 à 99 ans.
2 - Les manquements
administratifs constatés
Comme il a été sus indiqué, la
transformation de la concession provisoire en concession définitive
passe au préalable par le contrôle, et les vérifications
avant toute transformation. Il apparaît alors difficilement concevable
que certaines irrégularités soient commises ; mais il n'en
est pas toujours le cas. En effet, la faute administrative peut résider
dans la qualité et l'aptitude du bénéficiaire de la
concession définitive. Ainsi en est-il de l'attribution de concession
définitive à un concessionnaire autre que celui qui a
réalisé la mise en valeur, c'est l'hypothèse de l'octroi
d'une concession à un non exploitant. Egalement, l'attribution de
concession définitive à une personne morale ou physique de
nationalité étrangère. Or, on sait que la personne de
nationalité étrangère ne peut prétendre qu'au bail
emphytéotique.
En outre, s'agissant de la mise en valeur du terrain
concédé et partant du respect des obligations contenues dans le
cahier de charges, il apparaît et ceci à notre grand
désarroi que certaines personnes réussissent à se faire
attribuer des terrains en concession définitive alors même
qu'aucun constat n'a été opéré, et en cas de
constat, en l'absence de réalisation effective du projet ayant fait
l'objet de la concession74(*). Certains services
déconcentrés du MINDAF en charge de l'attribution des
concessions définitives ne font pas montre de sérieux,
d'impartialité et préfèrent de ce fait sacrifier leur
obligation de service au favoritisme, au népotisme, à
l'enrichissement personnel et indu, bref, se livrer à la corruption, ce
qui constitue des manquements graves.
Ainsi, si
par ces démonstrations, il ne fait plus aucun doute que des
dysfonctionnements administratifs entachent les procédures d'acquisition
des terres soit par immatriculation directe, soit par concession ; pour
une appréhension efficiente de la matière, il serait
intéressant d'envisager la défaillance de l'encadrement
administratif dans les procédures de cession des terres car, comme on le
sait, les immeubles constituent des biens susceptibles de transactions. Il
s'agit alors d'analyser les fautes commises lors des opérations de
transfert de propriété.
Section 2 : LA faute
administrative commise lors de la cession de propriété
Analyser la faute administrative au cours des
procédures de cession de propriété, revient à
étudier les défaillances des autorités administratives
lors transfert de propriété relatives aux parcelles de terrains
déjà immatriculés. Il s'agit des hypothèses des
terrains déjà appropriés, et pouvant faire l'objet, soit
de transactions immobilières entre particuliers privés, soit de
transactions avec l'Etat ; les premières ont trait aux cessions
volontaires à titre gratuit ou onéreux entre
propriétaires et acquéreurs (§1), et les secondes
s'inscrivent dans une logique particulière de cession forcée,
qu'est la procédure d'expropriation pour cause d'utilité
publique. (§2)
§1 : La faute administrative lors des
opérations de cession volontaire de propriété entre
particuliers.
Il peut paraître paradoxal d'analyser dans ce registre
la faute administrative car en fait ces opérations concernent des
personnes privées, d'autant plus que les terres, objet de ces
transactions sont la propriété privée immobilière
des particuliers qui ont le droit d'en jouir, d'en user et d'en disposer de la
manière la plus absolue ; toutefois, il n'en est rien, car l'Etat
en tant que régulateur de la vie sociale, encadre certaines
opérations notamment celles relatives à la
propriété immobilière du fait de son importance capitale,
ne dit-on pas « res mobilis, res vilis ».
Il est question à ce niveau, d'appréhender
l'implication défaillante et fautive de l'administration, dans les
opérations portant morcellement ou fusion, bref démembrement et
donc mutation du titre foncier (B). Mais avant d'y arriver, il sied d'analyser
le rôle particulier du notaire dans les opérations
foncières (A) au vu de la complexité de son statut d'agent ou
fonctionnaire de l'administration.
A - Le nécessaire
implication du notaire dans les opérations de cessions
foncières
En matière de transactions immobilières que sont
les cessions d'immeubles, l'exigence de formalisme prévue par l'article
8 de l'ordonnance 74/1 du 06 Juillet 1974 est acquise. Aux termes de cet
article « les actes constitutifs, translatifs ou extinctifs de
droits réels immobiliers doivent à peine de nullité,
être établis en la forme notariée. »
Il appartient au notaire seul, saisi par les parties, de
dresser des actes de cession à titre gratuit, ou à titre
onéreux de parcelles de terrains. Si la cession a été
faite sous-seing privé, elle peut être validée par devant
notaire. A défaut de cela, toute cession passée sous-seing
privé sans intervention du notaire est annulée.75(*)
Prévue et organisée par le décret
n°60/172 du 20 septembre 1960, modifié et complété
par celui n°95/034 du 24 février 1995, la profession de notaire et
le statut y afférent, sont définis en droit camerounais ;
de même, les actes pris par ces notaires, sont régis par la loi
de 1961, et interviennent dans des conditions précises en respect des
formalités relatives à leur compétence.
Ce peut être la compétence territoriale ou
''ratione loci'', car le notaire n'agit que dans une sphère
géographique bien déterminée. De ce fait, tout notaire
qui outre passe son ressort territorial, et établit des actes
translatifs de propriété, viole les dispositions légales
et commet une faute.75(*)
De même, conformément aux dispositions de l'article 23 du
décret N°2005/481, seul le notaire ayant
établit l'acte de vente est habilité à adresser au
conservateur foncier du lieu de situation de l'immeuble, une demande pour
mutation ou morcellement de la parcelle de terrain. Mais il peut arrivé
que le notaire ayant établit l'acte de vente, soit distinct et
différent, de celui qui adresse la demande de morcellement, ou de
mutation au conservateur.
Par ailleurs, il est des cas où, le notaire, par
affinité avec les requérants et le conservateur constitue, et
fait établir des titres authentiques en l'absence de plan de l'immeuble,
ou d'acte notarié servant de base, et de preuve de la vente ou
même de cession à titre gratuit de l'immeuble.
A la suite de ces énumérations, il est plausible
d'affirmer que, l'action fautive du notaire entache la régularité
des actes, et peut porter atteinte aux droits des tiers. Ce formalisme rentre
dans un souci de protéger les intérêts des parties par
l'arbitrage d'une personne neutre à statut particulier, car en effet,
le notaire n'appartient pas à la catégorie d'agent, de
fonctionnaire ou d'autorité administrative76(*) proprement dite. Il reste
alors à analyser les actions fautives des services administratifs
intervenant dans le processus de cession d'immeuble.
B- La faute administrative
en cas de démembrement d'immeuble
Les hypothèses de démembrement ou
mutation sont relatives, soit à des opérations portant mutation
de la totalité de la parcelle du terrain cédé, soit sur
une portion seulement du terrain, soit sur opérations réalisent
la fusion de terrains distincts mais contigus. Ces opérations peuvent
résulter d'échanges, de cessions à titre onéreux ou
gratuit, entre vifs ou, entre vifs et morts ; ici nous sommes dans les
hypothèses de succession et de partage successoral. Dans tous les cas,
le transfert de propriété résulte d'une cession de terrain
par une personne au bénéfice d'une autre.
Après l'exigence de formalisme qui entoure la
conclusion des actes relatifs à tout transfert de
propriété, exigence liée au rôle et aux obligations
du notaire, il est question d'envisager les fautes commises par
l'administration lors du partage ou de la fusion des terrains.
Selon l'article 37 nouveau du décret 2005, « si la
délivrance du titre foncier est consécutive à une vente,
le conservateur foncier doit, avant de demander le morcellement ou
opérer la mutation ou la fusion, s'assurer que :
-la transformation a été
effectuée dans le respect des dispositions de l'article 8 de
l'ordonnance No 74/1[...] ;
-L'immeuble est situé dans le rayon de sa
compétence, et qu'il est celui visé dans l'acte translatif du
droit ;
-Le plan annexé à l'acte a
été dûment visé par le Chef du service
départemental du cadastre du lieu de situation de
l'immeuble ;
L'acte est régulier du point de vue de sa forme
extérieure eu égard à la réglementation en
matière d'enregistrement »
A la lecture de cet article assez explicite, on comprend
que le conservateur foncier doit effectuer des opérations de
contrôle et de vérification des actes et pièces
déposés avant toute décision.
Il parait alors surprenant de constater que le morcellement
d'un titre foncier soit effectué sans que le plan de bornage n'ait
été accompli. En effet, aux termes de l'article 2 du
décret de 1979, « à l'intérieur du
périmètre urbain, un terrain ne peut faire l'objet de transaction
par parcelle qu'après lotissement approuvé ». De
la sorte, le terrain préalablement loti, fera l'objet d'un morcellement
par les services du cadastre territorialement compétents, qui
interviennent de manière gratuite, et établissent des
procès verbaux, et des plans de bornage. En réalité, sur
le terrain, on assiste à des spéculations foncières, au
rançonnement des services cadastraux. Ce fut le cas dans la
spectaculaire affaire Djine Daniel C/ Etat du
Cameroun77(*)
Parce que la procédure de morcellement échappe
aux formalités de publicité et aux procédures de tenue des
palabres, il arrive que certaines incohérences s'infiltrent. Ainsi, dans
les procès verbaux, on peut lire des noms des individus qui
n'étaient même pas parties prenantes au contrat de cession. C'est
le cas par exemple de l'administrateur d'une succession ou le tuteur d'un
mineur qui parvient à faire inscrire son nom en lieu et place des
personnes qu'il représente, et reussit à se faire délivrer
des titres fonciers. Cela est dû à l'acceptation de
réquisition d'immatriculation ou de mutation par le conservateur
foncier, sans verification préalable, réquisitions qui
émanent d'individus qui n'ont pas qualité pour
prétendre à de telles transformations.
Il en est de même lorsque le conservateur foncier
opère la mutation d'un titre foncier au profit d'un requérant
alors même que la procédure d'opposition n'a pas eu lieu, et
même si elle a eu lieu, lorsqu'elle n'est pas encore close ; ceci en
contradiction avec les pièces déposées par le
requérant qui n'établissent pas son droit de
propriété, ou une quelconque revendication. Par ailleurs, lorsque
le démembrement ou remembrement concerne la fusion d'immeubles et donc
l'établissement d'un seul et même titre foncier, la loi exige
comme condition, la contiguïté des immeubles c'est-à-dire,
une proximité immédiate de ces immeubles. On assiste parfois
malheureusement à la fusion d'immeubles éloignés, et cela
pose problème, lorsqu'il faut dresser un plan de situation de
l'immeuble.
En tout état de cause, les négligences, ou fautes
commises par l'administration en charge de la question foncière,
préjudicient aux intérêts des tiers ou entachent la
régularité des actes établis, et pourront faire l'objet de
contestation. Certes, dans ce registre, il s'agit généralement
de fautes et fraudes commises par les requérants eux-mêmes qui
sont le plus souvent de mauvaise foi et veulent aliéner leurs terrains
à plusieurs personnes à la fois.
§2 : Les manquements administratifs au cours de la procédure d'expropriation pour
cause d'utilité publique
Selon l'article 544 du Code Civil, nul ne peut être
contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause
d'utilité publique, et ceci moyennant une juste et préalable
indemnité. L'expropriation pour cause utilité publique constitue
alors une atteinte au caractère absolu du droit de
propriété et se définit comme « une
opération administrative par laquelle l'Etat oblige un particulier
à lui céder la propriété d'un immeuble dans un but
d'utilité publique et moyennant une juste et préalable
indemnisation »78(*). Parce que l'expropriation est une
« opération attentatoire à la
propriété privée »79(*), elle est prévue aussi
bien que par les textes nationaux qu'internationaux. En ce qui concerne les
textes internationaux, il s'agit des articles 7 et 17 de la Déclaration
des Droits de l'Homme de 1789, de l'article 1er du protocole
additionnel de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales.80(*) Pour ce qui est de la législation nationale,
on relève dans le préambule de la constitution Camerounaise,
certaines dispositions relatives à cette procédure, ainsi que
certains textes spéciaux, notamment l'ordonnance 74/3 du 06 juillet
1974, modifiée et complétée par la loi n°85 - 09 du
04 juillet 1985 et le décret n°87/1873 du 16 décembre 1987.
Cet important arsenal juridique n'empêche cependant pas des
irrégularités dans la procédure d'expropriation et des
atteintes graves au droit de propriété. Comme le déclarait
fort opportunément un auteur, l'expropriation est « le
domaine par excellence de l'illégalité, notamment du
détournement de pouvoir, de l'incompétence et du vice de
forme »81(*). Il s'agit en consequence, de rendre compte des
fautes commises par l'administration tout aussi bien lors des
formalités préalables à l'expropriation (A)
qu'après le transfert de propriété (B).
A- Les fautes commises
lors des formalités préalables à l'expropriation
L'expropriation est une procédure instruite en
plusieurs phases préalables à la cession de
propriété, notamment du déclenchement de la
procédure, suivi par une enquête préalable.
1-
L'illégalité de l'action administrative lors du
déclenchement de la procédure
Aux termes de l'article 2 du décret n°87/1872 du
16 décembre 1987, la procédure d'expropriation est
déclenchée à la demande de tout département
ministériel ; elle est constituée d'un dossier
préliminaire qui revèle de manière détaillée
l'objet de l'opération, les terrains concernés et les moyens
financiers prévus pour l'instruction de l'opération82(*).
Ledit dossier d'expropriation est déposé chez le
Ministre chargé des domaines qui apprécie le bien fondé du
projet, et prend un arrêté déclarant l'utilité
publique. Seul le Ministre des domaines est compétent pour
apprécier les dossiers d'expropriation. Il apparaît en
conséquence que les expropriations à l'initiative des
Préfets ou de toute autre autorité sont illégales. De
même, le texte déclaratif d'utilité publique est un
arrêté, ainsi, toute circulaire, instruction ou note de service
déclarant d'utilité publique un projet n'obéissent pas aux
formes, et sont constitutifs de vices de forme. Ainsi est- il paradoxal
d'assister à des expropriations sur simple circulaire
préfectorale. Cette exigence de formalisme s'inscrit dans une logique de
protection du droit de propriété, car en effet, l'expropriation
est une opération lourde de conséquence sur le patrimoine des
personnes privées. Par ailleurs, un arrêté
ministériel déclarant d'utilité publique un projet sans
avoir au préalable vérifier la conformité et la
régularité des pièces versées au dossier, constitue
une action fautive de l'autorité administrative.
C'est sur la base de la régularité et de la
conformité des pièces versées au dossier que
découle la pertinence du projet, et par conséquent
l'opportunité ou non de l'utilité publique. La déclaration
d'utilité publique en elle-même, est lourde de conséquence
d'autant plus qu'il n'existe aucune définition légale. Ainsi sur
quelle base le Ministre appréciera-t-il l'utilité publique ou non
d'un projet ? Il parait évident que cette déclaration peut
servir de base à des desseins personnels, et comme le disait M.
Tchientcheu Njiako, « l'expropriation est une occasion pour
certaines personnalités du monde des affaires ou de la politique,
d'acquérir à vil prix des parcelles de terres arrachées,
au nom de l'intérêt général, à des paisibles
citoyens pour une poignée de francs CFA
d'indemnisation ».
Le constat clair qui résulte des affaires FOUDA
MBALLA Maurice et ONO NGAFOR Albert, est celui selon
lequel, l'expropriation est l'occasion des manifestations des abus
administratifs. Dans la première espèce, le juge administratif
déclare expressément que « sont d'utilité
publique les opérations destinées aux besoins de l'ensemble de
la population d'une collectivité territoriale ou tendant à
réaliser un objet d'utilité publique ».
Subséquemment la construction d'une cité, d'un club et d'un
terrain de sport ne sert que l'intérêt de quelques particuliers et
« dès lors, ces travaux ne présentent pas le
caractère d'utilité générale pouvant justifier une
déclaration d'utilité publique »83(*).
Dans la seconde espèce, l'Assemblée
Plénière de la Cour Suprême déclare que,
l'arrêté préfectoral pris à l'encontre du sieur
Albert ONO NGAFOR, en démolition du collège dont il est
propriétaire, est illégal, car il a été pris
« pour donner satisfaction à un tiers, dans l'arbitrage
d'un litige foncier au détriment du sieur ONO NGAFOR ; cet acte
constituant un détournement de pouvoir »84(*).
2- La faute administrative
au cours de l'enquête préalable
Les enquêtes préalables sont des recherches
ordonnées par le Ministre des domaine par arrêté, et elles
ont pour but d'informer la population et de s'informer sur
l'opération ; elles sont menées par la commission de constat
et d'évaluation, publiquement et contradictoirement, en présence
des propriétaires des fonds concernés, des populations et des
notabilités du lieu afin que toutes les prétentions, observations
ou droits des tiers sur les immeubles à exproprier soient pris en
compte. Cette exigence de publicité a pour objectif de délimiter
le terrain, recueillir l'avis des personnes occupant ou exploitant le terrain,
des propriétaires dudit terrain ; il s `agit de les
identifier, de quantifier leur mise en valeur. De ce constat, toutes les
enquêtes non publiques, obscures, sans publicité préalable,
ou même l'absence d'enquête avant toute expropriation sont
constitutives de faute.
En outre, selon M. Tchientcheu Njiako, on distingue
deux types d'enquêtes, la première étant l'enquête
préalable et la seconde, l'enquête parcellaire. L'enquête
préalable a pour objet d'inventorier, non seulement les droits des
propriétaires, mais aussi les droits de tout autre nature. En clair,
elle permet d'identifier les personnes et victimes de l'expropriation à
projeter. L'enquête parcellaire, pour sa part, intervient dans la
détermination de la nature juridique du terrain ; elle permet
d'évaluer le terrain, de le faire borner s'il ne l'est pas encore.
Si l'enquête préalable est relative aux personnes
victimes de l'expropriation, on peut affirmer que l'enquête parcellaire
concerne le terrain, objet de l'expropriation. En tout état de cause,
ces enquêtes permettent de lever les équivoques et dresser
l'état de lieux, afin que la procédure soit exempte de vices.
Contrairement à ces exigences, l'administration se laisse aller à
certains manquements, spécialement des sous-évaluations ou
surélévations des biens, des omissions pures et simples, ou des
ajouts fictifs des noms de propriétaires, des immixtions intempestives
d'autorités incompétentes dans le but de favoriser des personnes
qui leur sont proches comme dans l'affaire TESSA. Dans cette
espèce, le sieur TESSA, commis d'administration au service
départemental des domaines de Bamboutos, a au cours de la phase des
enquêtes, et ceci dans le procès verbal identifiant les titulaires
et propriétaires des terrains, inséré frauduleusement le
nom de son père dans la liste des victimes de l'expropriation, pour lui
faire allouer l'indemnisation85(*).
De ce qui précède, c'est une certitude que les
irrégularités administratives entachent la procédure
d'expropriation. Elles sont relatives à l'arrêté de
déclaration, à l'opportunité ou non de l'utilité
publique, et au déroulement de l'enquête préalable ou
parcellaire. Il tient présentement de systématiser les
dysfonctionnements administratifs, après le transfert de
propriété (B).
B - Les dysfonctionnements
administratifs à l'issue du transfert de propriété
L'expropriation pour cause d'utilité publique a pour
but la dépossession d'un bien immeuble, et le transfert de
propriété d'un patrimoine à un autre. La condition
essentielle étant l'indemnisation juste et préalable, et la
pertinence de l'utilité publique du projet. La faute administrative
réside alors d'une part dans l'absence d'indemnisation (1) et d'autre
part, dans la non utilisation des terrains expropriés constatant la
caducité et l'obsolescence de cet arrêté d'utilité
publique (2).
1 - L'absence
d'indemnisation préalable
En principe, avant tout transfert de propriété
entre le propriétaire du bien immeuble et le bénéficiaire
de l'expropriation, il est fait exigence d'une indemnisation juste et
préalable.
L'indemnisation juste est relative à la
réparation intégrale et totale du préjudice subi par le
propriétaire évincé. Ainsi doit-on prendre en compte lors
de l'évaluation des mises en valeur ou des terrains nus, des
données concrètes et essentielles qui permettent une meilleure
réparation du préjudice subi par la victime.
En outre, prévue par l'alinéa 2 de l'article 4
de la loi 85/009 du 04 juillet 1985, l'indemnisation préalable signifie
que le bénéficiaire de l'expropriation ne peut prendre possession
d'un bien sans avoir au préalable payé l'indemnité
à la victime ; certes la même loi met en place une
dérogation à l'indemnisation préalable dans certains
cas non énumérés. Dans tous les cas, l'indemnisation
préalable est une condition de l'expropriation et non la
conséquence car déjà, avant tout déclenchement de
procédure, il est fait obligation à l'administration
désireuse de l'expropriation de joindre dans le dossier de demande
« une fiche dégageant les caractéristiques
principales des équipements à réaliser et précisant
notamment[...] la disponibilité des crédits d'indemnisation avec
indication de l'imputation budgétaire ou de tous autres moyens
d'indemnisation ». Constitue une faute, l'absence
d'indemnisation préalable par l'administration. Comment expliquer alors
les nombreuses requêtes des victimes de l'expropriation non encore
indemnisées. En effet, à défaut d'indemnisation
préalable, et même parfois d'absence totale d'indemnisation qui
constitue une atteinte au droit de propriété ; car
l'indemnisation réalise en quelque sorte un rétablissement de
l'équilibre dans le patrimoine de l'exproprié.
La faute réside dans la dépossession injuste, et
l'absence de contrepartie particulièrement dans l'indemnité
allouée. Dans l'opération d'expropriation, l'administration, et
spécifiquement le département ministériel en charge des
domaines et des affaires foncières est indexée au vu du
rôle qu'elle joue dans les règlements des contestations faites par
les expropriés.
Que l'expropriation soit à la demande de l'Etat, ou de
toute personne morale de droit public, il appartient aux services centraux du
MINDAF, ainsi qu'aux services déconcentrés de
gérer et trancher les contestations relatives aux indemnités,
tant dans leur montant que dans leur nature86(*).
La faute administrative réside également dans
les irrégularités au cours des modalités d'indemnisation.
« Le goût et l'odeur de l'argent » entraînent
inéluctablement à des déviances administratives ; il
faut le dire, fusse-t-il de manière aussi triviale, l'ajout de noms
fictifs dans la liste des expropriés, l'insertion des personnes non
encore nées, ou déjà décédées dans
les procès verbaux aux fins d'allocation d'indemnité constituent
à ne point douter, des forfaits administratifs.
2 - La non utilisation des
terrains expropriés dans les délais
Cette non utilisation des biens immeubles expropriés,
caractérise en conséquence l'inutilité et
l'inopportunité de l'opération en contradiction même avec
l'utilité projetée. Pourtant, il est requis pour les demandeurs
à l'expropriation, des précisions détaillées des
différentes phases de la procédure, afin de ne pas verser dans
des opérations vaines, mais néanmoins, porteuses de
conséquences graves sur le patrimoine des citoyens.
L'article 13 du décret de 1987 dispose que
« l'arrêté de déclaration d'utilité
publique devient caduque si, dans un délai de 2 (deux) ans à
compter de la date de sa notification au service ou organisme
bénéficiaire, il n'est pas suivi
d'expropriation », l'expropriation doit être effective,
c'est-à-dire, les terrains expropriés ont reçu la
destination prévue. Par conséquent, passé ce délai,
si l'expropriation a été effectuée, et le terrain
cédé n'a pas reçu l'affectation destinée, il s'agit
d'une expropriation abusive.
Par ailleurs, la question de la non utilisation dans les
délais soulève l'épineux problème de la
rétrocession de l'immeuble exproprié. En effet en droit
français, le Code de l'expropriation, notamment en son article L12-6
prévoit expressément que « si les immeubles expropries
n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination
prévue, ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens
propriétaires peuvent en demander la rétrocession pendant un
délai de trente ans. Il s'agit en fait d'une cession à un prix
nouveau, correspondant à la valeur du bien, au moment de sa
restitution »87(*).
En droit camerounais, aucune disposition législative ne
prévoit l'hypothèse de rétrocession. C'est à la
jurisprudence notamment dans l'affaire Dame veuve ONGONO
Régine88(*) que pour la première fois, l'hypothèse
de rétrocession d'immeuble a été posée ; ce
fut le cas également dans l'affaire DZOU ESSOMBA
Charles.
Ce n'est qu'en 1995, que l'hypothèse d'une
rétrocession administrative prononcée par le juge apparaît
dans la célèbre affaire SOCIETE RENAULT du
Cameroun.89(*)
Dans l'espèce, le juge administratif déclare :
« attendu qu'aux termes de l'article 13 du décret
N°87/1872 du 16 Décembre 1987 portant application de la loi
N°85/9 du 04 juillet 1985 [...], l'arrêté de
déclaration d'utilité publique devient caduc si, dans un
délai de deux ans à compter de la date de notification, il
n'est pas suivi d'une expropriation effective, sa validité ne peut
être prorogée qu'une seule fois par arrêté du
ministre chargé des domaines pour une durée n'excédant pas
un an.
Qu'en l'espèce, le décret
N°76/301/PM du 06 septembre 1976 portant expropriation du titre foncier
N°186 du Nyong & Sanaga n'était valable que jusqu'au 05
Septembre 1979 au plus tard.
Or, jusqu'à ce jour, en dehors des 6000
mètres carrés du marché du Mfoundi, le reste du terrain,
soit près de 27000 mètres carrés, n'a pas fait l'objet
d'une expropriation effective, et par conséquent, le décret
attaqué qui en même temps déclare d'utilité publique
et exproprie, est caduque en ce qui concerne cette contenance superficielle
qui doit de ce fait, revenir au propriétaire
initial. ».
Tout récemment, le juge administratif a annulé
l'arrêté n°0000.74/Y.14.4/ MINDAF/D100 du 30 mai 2005 dans
l'affaire EFFA Paul Marcel, pour absence d'utilité
publique dans le projet de « sécurisation de
l'itinéraire présidentiel »90(*)
Au vu des revirements jurisprudentiels intervenus en
matière d'expropriation, Monsieur ABA'A OYONO, dans ses observations
dans l'affaire Société Renault déclare
que : « Voilà en tout état de cause, une
décision de justice supplémentaire qui bouscule les directives
d'un texte du législateur, et qui conforte le juge administratif dans sa
position de protecteur des droits des administrés face à un droit
du contentieux qui fait toujours la part belle à l'administration,
question de préserver le droit de propriété à
valeur constitutionnelle ».
En guise de conclusion à ce chapitre relatif aux
manifestations de la faute administrative en matière foncière,
les développements s'intégraient dans une analyse les actions
vicieuses et perverses des autorités administratives, des
dysfonctionnements des services administratifs dans les opérations
relatives à l'acquisition et la cession de la propriété
immobilière. Il s'agissait notamment des fautes commises
lors de l'immatriculation directe, au cours de l'immatriculation indirecte,
pendant l'immatriculation dérivée, et enfin lors de
l'expropriation pour cause d'utilité publique. Le fil directeur de notre
réflexion demeure lié à l'exposé des diverses
défaillances ou de variétés des dysfonctionnements
administratifs lors de ces procédures, manquements qui portent atteinte
à la propriété privée immobilière,
véritable droit de l'homme.
CONCLUSION AU TITRE I
Pour clore ce titre I, relatif à l'identification ou
à la détermination de la faute administrative en matière
foncière, deux idées centrales ont constitué le leitmotiv
de notre étude.
D'une part, l'appréhension de la faute dans sa
particularité notamment dans ses caractéristiques et à
travers ses auteurs.
D'autre part, l'analyse détaillée de la panoplie
d'actions ou abstentions constitutives de forfaits administratifs en
matière foncière a été au coeur de la
réflexion.
Ceci est nécessaire dans la logique où, on veut
comprendre comment l'Etat, protège et garantit les personnes
privées, des violations faites sur leur propriété
immobilière par ses organes. Le préalable nécessaire
passe par la détermination de ce qui pourrait préjudicier aux
intérêts de ces personnes.
De ce fait, si l'on parodie l'article 1382 du code civil,
fondateur de la responsabilité civile, pour la transposer dans un
registre administratif, on dira : « tout fait
quelconque de l'administration qui cause à autrui un dommage, sur sa
propriété privée immobilière, oblige celui par la
faute duquel il est arrivé, à le réparer ».
Toute victime d'un dommage, doit se faire réparer le préjudice
par elle subie, fusse-t- il commis par l'administration, et donc l'Etat.
TITRE II: LES CONSEQUENCES ET LA SANCTION DE LA FAUTE
ADMINISTRATIVE
La terre, le foncier sont sources de multiples enjeux. Des
études faites par d' imminents juristes, sociologues et
géographes montrent à suffisance l'importance, et la valeur de
la terre. Monsieur Kouassigan dans son ouvrage l'Homme et la terre,
dénote avec beaucoup de profusion les rapports que les individus
attachent à leur terre. Qu'on soit seulement détenteur,
possesseur ou propriétaire, l'homme magnifie le bien immobilier et
éprouve un sentiment de puissance, de plénitude sur le bien
immeuble qu'il détient. C'est donc un truisme que la terre revêt
une valeur indéniable.
Comme il est clair que pouvoir revient à l'Etat de
réglementer l'acquisition, la gestion de la propriété
foncière, conformément à l'intérêt
général, et en mettant en vigueur les lois y
afférentes ; lorsque cette intervention est émaillée
d'illégalité et d'irrégularité, on tombe dans le
domaine des atteintes, des restrictions.
Dans les développements précédents, il a
été question d'identifier la faute administrative en
matière foncière notamment, dans ses caractéristiques et
ses manifestations, et ceci, en terme de reconnaissance de cette faute,
d'identification de ses attributs, et conséquemment, l'analyse de ses
effets est opportune.
Ces effets s'articulent autour des conséquences, ou
dommages, causés aux victimes à la suite des forfaits
administratifs, et subséquemment, la mise en oeuvre de la
responsabilité de l'administration fautive (chapitre 1). L'apaisement du
dommage éprouvé par la victime réside alors dans la
réparation du préjudice subi. (Chapitre 2).
Chapitre 1 : LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE ET LA
RESPONSABILITE DE L'ADMINISTTRATION
Lorsqu'on envisage les conséquences d'une action, il
s'agit au fond d'analyser les suites logiques entraînées par le
fait qui est en cause. Parce que la faute est un manquement, une
inexécution, bref un fait qui se caractérise par
l'anormalité, il est question de déceler les suites
fâcheuses, les dégâts, que la faute administrative
entraîne en matière foncière notamment dans
l'immatriculation et l'expropriation.
La faute administrative s'appréhende en fait comme une
atteinte au droit de propriété. Certes les articles 545 et
suivants du Code Civil prévoient automatiquement des restrictions
légales au droit de propriété, et face aux
évolutions sociales, on assiste au phénomène de
« socialisation progressive du droit de
propriété ». Cet état de choses conduit
à admettre que certaines restrictions puissent y être faites, mais
lorsque ces atteintes résultent de l'inexécution des obligations
dévolues à l'administration en charge de la matière
foncière, on assiste véritablement à la dérive du
droit de propriété, qu'il soit acquis ou simplement sujet
à prétentions. En conséquence, la victime du dommage
causé par la faute administrative dispose de voies, afin que
l'administration fautive réponde de ses actes.
La responsabilité de la personne publique est retenue
au titre d'une attitude fautive qui ne peut pas lui être imputée,
mais dont elle doit répondre, avec ou sans le véritable
coupable, à savoir l'agent fautif individualisé.
Néanmoins, pour que soit engagée la
responsabilité administrative, le demandeur doit établir qu'il a
subi un préjudice. Cela est logique, car il est normal que les
particuliers qui retirent avantages des activités des services publics,
en subissent les inconvénients, dès lors qu'ils ne sont pas
excessifs.
Dans cette perspective, nous identifierons d'abord les
conséquences de la faute en terme de dommages causés sur le droit
de propriété (section 1), puis, les mécanismes de mise en
jeu de la responsabilité de l'administration fautive (section 2).
Section1 : Les conséquences dommageables
de la faute administrative en matière foncière
La procédure d'immatriculation constitue, la voie par
laquelle une personne privée accède, pleinement et juridiquement,
à la propriété d'un bien immeuble. Il s'agit en fait de
faire asseoir ses prétentions sur l'immeuble, en dégageant le
bien en question de l'emprise de la collectivité. Une fois un bien
acquis, il est susceptible de rentrer dans le commerce, de passer d'une main
à une autre.
L'expropriation pour cause d'utilité publique,
quant à elle, est la dépossession légitime et
légale du bien privé au profit de l'Etat, de la
collectivité. Cette restriction apportée au droit de
propriété s'inscrit dans la logique de socialisation du droit de
propriété en ce qu'il aura une utilité collective.
Cependant, on constate que ces procédures instruites
par les autorités administratives s'accompagnent d'impairs qui
lèsent les personnes privées. L'action administrative brille par
une absence totale de légalité, là où elle devrait
être présente, et occasionne ainsi des dommages à la
propriété privée. Relever les détériorations
au droit de propriété, implique alors d'examiner tour à
tour, les incidences de la faute administrative, d'une part dans la
procédure d'immatriculation, (§ 1) et d'autre part, dans la
procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique (§
2).
§1 : Les conséquences d'une immatriculation
fautive du chef de l'administration
Comme susmentionné, l'immatriculation est le mode
légal d'accession à la propriété, le titre foncier
en étant la certification officielle, conformément à
l'article 1er du décret 76-165. Elle est, selon Monsieur
Aloys MPESSA « le mécanisme juridique principal par lequel
la majorité des camerounais accède à la
propriété privée
foncière ».91(*)
Cela dénote clairement l'ampleur de la procédure
à accomplir, et la valeur du titre juridique obtenu. Emaillée
d'irrégularités, la procédure d'immatriculation
entraînera à ne point douter, des dommages matériels, en
termes de dégâts ou restrictions du droit de
propriété(A), mais également, et surtout, une
fragilisation du titre foncier obtenu en contradiction totale avec les
caractères définitif, intangible et inattaquable qui l'entourent
(B).
A- Les conséquences
matérielles de la faute dans l'immatriculation
Les problèmes d'accaparement, de
légitimité, de maîtrise, d'exploitation et de partage
équitable des terres ont toujours été source de conflits,
de rapport de forces entre les différents acteurs en présence,
notamment l'Etat d'une part, et les personnes privées d'autre part. Dans
ce contexte, le système de l'immatriculation s'installe dans la
législation camerounaise, pour permettre à un individu qui veut
tirer meilleur parti de sa terre, d'en asseoir sa propriété, de
la délimiter et d'en fixer de manière irrévocable son
droit, en le consacrant dans un acte public.
Un éminent juriste affirmait déjà que,
« le droit de propriété est un droit
légitime, qui répond aux efforts de l'homme pour
l'amélioration de son sort et du sort de sa famille, qui assure sa
liberté, et constitue la condition première du meilleur
rendement économique, ainsi que le gage de la paix sociale. La terre
par elle seule, constitue alors un instrument d'exploitation
économique et de mobilisation de crédit »92(*). En effet, à travers la
procédure d'immatriculation, il s'agit pour les particuliers d'assurer
la garantie des droits sur un immeuble, car, comme l'écrit AMBIALLET
Charles, «l'immatriculation est la liquidation complète du
passé juridique d'un immeuble et l'avènement de celui-ci à
une vie nouvelle, dont l'histoire sera écrite sous la partie relative
à l'inscription [...]».93(*)
Par ces dispositions, la doctrine magnifie la
propriété immobilière, et relève en
conséquence, l'importance de la procédure d'immatriculation, en
tant que garantie de la propriété privée
immobilière. Tout cela signifie que, la propriété
immobilière constitue un pilier majeur dans le processus de
développement de l'individu.
De ce fait, la matière foncière qui englobe,
l'ensemble des règles gouvernant l'accession à la
propriété foncière par les personnes privées,
recouvre des enjeux indéniables. Lors d'une immatriculation, il ne
s'agit pas seulement de dégager des prétentions collectives pour
asseoir des prétentions individuelles ; cela va plus loin,
l'instinct de possession est profondément enraciné dans la nature
de l'homme, le droit à une propriété immobilière
stable correspond à un besoin universel et permanent chez l'individu. La
propriété immobilière s'impose comme condition de
l'indépendance et de la liberté de l'homme. Par
l'immatriculation, l'homme recherche un prolongement et un approfondissement de
sa personnalité; celui qui n'a rien en propre dépend des autres,
n'a rien en garantie pour son futur, et celui de ses descendants.
Au cours d'une procédure d'immatriculation, la faute
de l'administration lèse une partie, en empêchant la
réalisation ou l'expression d'un quelconque droit sur une parcelle de
terrain à immatriculer. Par ce fait, au-delà de la simple
éviction de prétention à l'immatriculation, il s'agit
d'examiner en profondeur la valeur de l'action que la partie
lésée chercherait à accomplir. Les attentes, les espoirs,
les chances, les opportunités que le titre de propriété
recherché pouvait accomplir dans la vie des individus. L'accession
à la propriété privée est donc source de multiples
enjeux qui peuvent ne pas être atteints à cause de la faute
administrative. Il peut s'agir, d'enjeux d'ordre économique, en ce sens
que avoir accès à une propriété foncière
revient à consolider son assise économique, à renforcer
son train de vie quotidien, à assurer sa sécurité
journalière, car la terre est génératrice de richesses
matérielles. La faute administrative réalisera un manque à
gagner pour le requérant évincé, une perte
éprouvé dans l'éviction de ses prétentions.
D'autre part, ce peut être des enjeux d'ordre social
dans la mesure où l'accès à la propriété
foncière revient à constituer un patrimoine qui confère
une certaine garantie de fiabilité et de reconnaissance sociale.
N'est-il pas vrai que l'influence sociale d'un homme dépend de ses
avoirs notamment immobiliers ?
En clair, on ne saurait, ne pas insister sur la constatation
que des restrictions flagrantes opérées par les autorités
administratives, lors de la procédure d'immatriculation évincent
le requérant fondé à l'immatriculation, et
l'empêchent de ce fait de consolider son droit de propriété
sur un bien immeuble.
B - La fragilisation de la
force probante du titre foncier
L'immatriculation a pour objet de placer un immeuble
« sous l'empire du régime des livrets
fonciers »94(*). Elle se concrétise par la remise d'un titre
foncier qui aux termes de l'article 1 du décret 76/165,
« est la certification officielle de la propriété
immobilière ». Le titre foncier constitue donc l'acte de
naissance du droit de propriété immobilière. Ainsi, s'il
est entaché de vice, le processus de maturation, la vie de ce droit de
propriété ne pourrait qu'en être affectée.
Acte délivré par une autorité
administrative compétente, et constituant la seule preuve de la
propriété foncière, le titre foncier est
inattaquable, intangible, définitif. De ce fait, le titre foncier est
requis non seulement « ad probationem »,
c'est-à-dire pour faire la preuve qu'on est propriétaire de
l'immeuble, mais aussi, et surtout « ad
validitatem », c'est-à-dire, pour consolider son droit de
propriété et le rendre opposable à toutes autres
prétentions concurrentes.
De ce point de vue, la nature juridique de cet acte est
incontestable et lourde de conséquences. Néanmoins, cette force
probante du titre foncier est conditionnée par une immatriculation
dénuée d'irrégularités, étant entendu que
toute irrégularité sape les bases et fondements de cet acte
conformément à l'article 2 du décret suscité.
A la lecture de ce texte, il est énoncé de
manière claire et ferme que : «
1. toute personne dont les droits ont été
lésés par suite d'une immatriculation, n'a pas d'autres recours
sur l'immeuble, mais seulement en cas de dol, une action personnelle en
dommages-interets contre l'auteur du dol.
2. l'action est portée devant la juridiction civile
du lieu de situation de l'immeuble.
3. toutes fois, le ministre chargé des affaires
foncières peut , en cas de faute de l'administration, résultant
notamment d'une irrégularité commise au cours de la
procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes authentiques
produits, procéder au retrait du titre foncier
irrégulièrement délivré ».
La faute de l'administration constitue l'une des causes
profondes de dénégation, de contestation du titre foncier.
L'alinéa 3 de ce texte jalonne ainsi la remise en cause des
caractères définitifs, intangibles et inattaquables liés
au titre foncier.
Le titre foncier est considéré comme
définitif, dans la mesure où le titre foncier clôture une
procédure minutieuse, entourée de publicité, par
conséquent, ne peut plus être remis en question. Ainsi, le
professeur TJOUEN relève que « le titre foncier est
définitif, car il marque la fin de la procédure
d'immatriculation. Son obtention est aux termes de l'article 123 du
décret du 21 Juillet 1932, « le point de départ des droits
réels et charges foncières existant sur l'immeuble au moment de
l'immatriculation». On n'attend plus rien d'autre pour être
déclaré propriétaire de l'immeuble [...], on n'a plus le
droit de le mettre en cause » ;
Inattaquable, car le titre foncier met fin à toutes
prétentions concurrentes et aucune action portant sur ce document ne
peut être recevable, en clair, cela signifie que dès lors qu'il
est délivré, aucun recours n'est plus admissible, « la
seule forme de contestation qui soit admise est, en cas de dol, l'action
personnelle en dommages et intérêts contre l'auteur du dol,
ouverte à toute personne dont les droits ont été
lésés »;
Intangible, parce qu'on ne peut ni retrancher ni ajouter des
mentions au titre foncier établi. C'est un acte absolu, qui fait foi de
la preuve de la propriété. Selon Monsieur Jean-Marie NYAMA,
« cela veut dire qu'en principe, on ne peut plus, ni ajouter, ni
retrancher les mentions qu'il contient », l'auteur ajoute :
« cela signifie aussi que la force probante que la loi attache
à l'immatriculation et aux énonciations portées sur le
titre au moment même de l'immatriculation est absolue ». Cette
figure est illustrée par les propos du professeur TJOUEN lorsqu'il
déclare : « il s'agit ici de savoir si on est encore libre de
« toucher», c'est-à-dire d'ajouter ou de retrancher certaines
mentions déjà portées sur le titre foncier puisqu'il peut
y avoir des erreurs humaines ou des fautes intentionnelles. Le
législateur a répondu par la négative pour affirmer
davantage l'absolutisme de la force probante du titre
foncier ».
Le système de l'immatriculation s'accompagne à
ne point douter d'effets très énergiques en dotant une base
incontestable au titre foncier établi. Et Monsieur AMBIALLET ajoute que
« (...) tous les titres antérieurs à l'immatriculation
sont annulés pour faire place au titre foncier qui porte en lui la
preuve du droit du propriétaire. Il ne s'agit plus après
l'immatriculation, de chercher, ni même de savoir, comment celui-ci a pu,
antérieurement acquérir son droit. Est-ce par voie de
succession, de donation, de vente ? Peu importe. Il tient désormais
son droit d'immatriculation. L'immatriculation purge les droits
antérieurs qui ne seraient pas mentionnés au titre foncier
(...) ».95(*)
La faute de l'administration constitue alors une exception
à cet absolutisme, car à elle seule, elle entraîne le
retrait du titre foncier. C'est dire qu'elle constitue une dérogation
exceptionnelle à la force probante et aux valeurs irréfragables
du titre foncier. La faute fragilise le pesant d'or du précieux
« sésame » qu'est le titre foncier, détruit
les bases et les fondements de l'édifice institutionnel, en ouvrant des
brèches à la contestation de l'acte juridique
irrégulièrement délivré, lui retire ainsi sa force
inébranlable sans laquelle le régime foncier de l'immatriculation
serait sans garantie et sans assiette.
§ 2 : Les conséquences de la faute
administrative dans la procédure d'expropriation.
L'expropriation pour cause d'utilité publique est une
procédure qui permet à l'administration, agissant dans un but
d'utilité publique, de contraindre un particulier à lui
céder la propriété d'un immeuble moyennant le versement
d'une juste et préalable indemnité. Certes de nombreux textes
affirment l'absolutisme du droit de propriété, mais en
réalité, la vie sociale exige un minimum de sacrifice de la
part des propriétaires. En effet, la socialisation progressive du droit
de propriété conduit à admettre que certaines restrictions
puissent y être faites. Néanmoins, ces restrictions ne doivent pas
s'accompagner d'illégalités car, cela aboutit à des
dépossessions illégitimes (A). Si pouvoir a été
donné à l'administration, et partant à l'Etat,
d'acquérir de manière « autoritaire » les
biens des particuliers, cette administration doit assumer toutes les
obligations qui sont les siennes, et appliquer sa propre réglementation,
c'est-à-dire se sentir obliger par les normes qu'elle a elle-même
édictées. Ainsi, si au travers de l'expropriation pour cause
d'utilité publique, l'administration verse dans des
irrégularités, et par quelques contournements étrangers
à l'exigence d'utilité publique, on est alors gravement
exposé à l'insécurité juridique (B).
A - La dépossession
illégitime du droit de propriété
« Toute opération d'expropriation se
justifie par le fait que le transfert administratif autoritaire de la
propriété privée vers la propriété publique
est guidé par la réalisation d'un ouvrage d'intérêt
général »97(*). Il est clairement admis que la procédure
d'expropriation donne droit à une dépossession simplifiée
de l'immeuble d'un particulier au profit de l'Etat. Par l'octroi d'une
indemnité compensatrice, l'administration expropriatrice accorde par
là, ce qu'elle a pris par l'autre. Le schéma est donc
simple : l'expropriation aboutit à un transfert pur et simple d'un
bien immobilier du patrimoine des particuliers dans celui de l'administration.
Néanmoins, lorsque cette
dépossession est conduite en méconnaissance des règles
légales, il s'agit alors d'une dépossession illégitime,
d'une privation du droit de propriété en contradiction totale
avec l'absolutisme de la propriété.
La privation, ou dépossession illégitime, se
définit comme une violation flagrante et profonde des attributs du droit
de propriété. Comme l'affirme l'article 545 du Code civil, nul ne
peut être contraint à céder sa propriété si
ce n'est pour cause d'utilité publique. S'il est avéré
qu'une expropriation a été faite pour cause d'utilité
privée ou aux fins personnelles, il s'agit là d'une atteinte
grave au sacro-saint principe de l'inviolabilité du droit de
propriété, droit fondamental de l'homme.
Cette dépossession illégitime s'analyse comme
une voie de fait entendue selon André de LAUBADAIRE
« lorsque dans l'accomplissement d'une activité
matérielle d'exécution, l'administration commet une
irrégularité grossière, portant atteinte au droit de
propriété ou à une liberté
publique »98(*).
Le fait de priver un propriétaire, s'analyse comme une violation
manifeste de la propriété immobilière de manière
unilatérale, en méconnaissance totale des règles. La
faute administrative, entendue comme des dysfonctionnements administratifs au
cours de la procédure d'expropriation réalise par ce fait une
restriction au droit de propriété.
B -
L'insécurité juridique résultant de l'atteinte au droit de
propriété
La sécurité juridique, laconiquement
se définit en tant qu'un principe de droit qui permet aux particuliers,
aux justiciables de pouvoir compter sur une minimale stabilité des
règles de droit et des situations juridiques. L'Etat incarne le droit,
et partant l'administration qui en est le prolongement l'incarne aussi. Les
personnes physiques, qui représentent et agissent au nom et pour le
compte de l'Etat, constituent l'arsenal administratif au service des
particuliers. Or, il faut que l'administration se conforme aux lois. Et comme
l'affirme si bien PANCKOUCKE, le chef d'oeuvre de l'administration ou
plutôt sa véritable perfection, consiste à respecter les
libertés publiques et droits des citoyens, en même temps qu'elle
assure l'autorité souveraine en se soumettant au droit. Ces services
doivent être exempts d'illégalités, de
contrariétés juridiques, incompatibles avec l'ordre
établi. L'ordre établi, qui présuppose un minimum de
sécurité juridique, oblige en effet qu' au sein d'une
société, il existe des facteurs qui permettent et favorisent une
gestion impartiale, transparente des affaires publiques par la production d'un
ensemble de règles acceptées. Ces règles constituent une
autorité légitime, et ont pour but de promouvoir et de renforcer
les valeurs sociales partagées par les individus et les administrations.
Tous doivent se sentir obligés par la norme. Le désordre
juridique, et donc l'insécurité juridique proviennent du fait que
la norme soit ballottée par certains, en l'occurrence l'administration
qui en est l'incarnation et le prolongement.
Dans la procédure d'expropriation pour cause
d'utilité publique, l'insécurité juridique découle
du fait qu'il ne s'agisse plus d'une expropriation pour cause d'utilité
publique, mais aux fins personnelles. En effet, lorsqu'elle est entachée
de fautes administratives, constitutives d'un contournement de l'exigence
d'utilité publique et de ses corollaires, l'expropriation pour cause
d'utilité publique est génératrice d'une
insécurité juridique. Les propriétaires privés,
dépossédés de leurs biens immeubles, sans aucun fondement
légal, ni même en respect des règles et procédures,
sont victimes d'atteintes graves et flagrantes à leurs droits de
propriété ; Si les particuliers ne peuvent plus se placer
à l'ombre de la protection du droit, au motif que l'administration qui
en est la représentation concrète préjudicie à
leurs droit et liberté fondamentaux, il s'agit bien là d'une
situation constitutive d'insécurité juridique. En tout
état de cause, l'administration foncière, qui s'est rendue
coupable d'actions fautives, dommageables à la propriété
foncière, encourt au même titre que les administrés, la
mise en oeuvre de sa responsabilité. Nul n'est au-dessus de la loi,
l'Etat de droit exige que l'administration soit elle-même soumise
à ses lois, lorsqu'elle brille par son action ou inaction fautive. Il
s'agit alors d'envisager le régime de la mise en oeuvre de la
responsabilité administrative en matière foncière.
Section 2 : La responsabilité administrative du
fait de ses actes fautifs en matière foncière
L'acceptation du principe de responsabilité
administrative marque un point dans l'histoire du droit administratif : de
l'irresponsabilité originelle consacrée par les textes au profit
d'une responsabilité, publique, personnelle de l'agent, l'articulation
mérite de marquer un temps d'arrêt. La puissance publique a
toujours été considérée de manière
originaire, comme la marque et l'attribut de l'ordre administratif, le
souverain étant alors « celui qui n'a pas besoin d'avoir
raison pour valider ses actes », n'est soumis à aucun
contrôle et n'a aucun compte à rendre à personne. De
là découle l'irresponsabilité de l'Etat-puissance
publique, et partant de l'administration, qui en est la représentation
juridique.
De ce dénis de responsabilité à
l'idée d'une possible mise en oeuvre de la responsabilité, au
motif que « la société a le droit de demander
compte à tout agent public de son
administration »99(*), les bases de la soumission de l'administration au
droit et du contrôle de l'action administrative sont posés. Comme
il est admis une responsabilité de l'administration en présence
des agissements fautifs des personnes physiques qui la représente, il
s'agit en conséquence, d'appréhender tour à tour
l'étendue (A) et l'effectivité de la responsabilité de
l'administration en matière foncière (B) car en effet pouvoir
à été donné à l'Etat de réglementer
l'acquisition, la gestion et la cession de la propriété
foncière en droit camerounais. Quelle est donc l'étendue de la
responsabilité administrative en présence de
défaillance ? Le système consacré en droit
camerounais remplit-il les exigences démocratiques et
réalise-t-il un équilibre entre les prérogatives de
puissance publique et le droit de propriété cher aux civilistes?
Tel est le questionnement qui nous guidera tout au
long de l'analyse subséquente.
§ 1: L'étendue de la responsabilité
administrative en matière foncière.
Il est impérieux dans ce développement
d'appréhender d'une part les cas d'ouverture de la responsabilité
administrative en matière foncière, ceci dans un souci de mieux
rendre compte de la soumission de l'administration du droit (A). D'autre part,
à la suite de cette analyse, il s'agira alors dans un autre registre
d'envisager la question du partage des responsabilités entre l'agent
administratif personnellement responsable, et la personne administrative au nom
de laquelle il agit. En d'autres termes, il est question du partage des
responsabilités et l'imputation de la faute commise (B).
A- Les cas d'ouverture de
la responsabilité administrative
En matière foncière, il a été
démontré dans les précédents
développements, que l'administration notamment les services centraux et
déconcentrés du MINDAF, les autorités administratives
ayant reçu délégation expresse de la loi, et certains
fonctionnaires de l'Etat sont impliqués dans le processus de gestion de
la question foncière. Nous l'avons relevé, la matière
foncière de manière laconique renvoie à toutes les
questions relatives à l'acquisition, l'accession, le transfert, la
cession de la propriété foncière. Il s'agit en fait de
toutes les opérations qui ont trait à la gestion de la terre en
tant que bien immeuble.
La responsabilité de ces autorités
administratives est mise en oeuvre, en présence de violations graves aux
obligations de service, qui préjudicient ainsi au bon fonctionnement du
service public. En droit administratif, la protection la plus efficace
accordée aux administrés pour lutter contre les
illégalités, est le recours pour excès de pouvoir. C'est
un moyen par lequel le requérant soumet au juge de l'annulation d'un
acte administratif qui lui fait grief. Il s'agit alors de relever les cas
d'ouverture à savoir : l'incompétence, le
détournement de pouvoir, le vice de forme, et conséquemment, les
diverses formes d'illégalités qui entachent l'action
administrative
1-
L'incompétence
La compétence se définit traditionnellement,
comme, l'aptitude légale d'une autorité ou d'un agent à
prendre certains actes. Ainsi, tout acte pris ou ordonné en dehors des
limites de cette compétence, est entaché de vice
d'incompétence. En pratique, ce moyen se dédouble
généralement, il peut s'agir de l'usurpation de pouvoir ou de
fonction, qui est la situation dans laquelle un acte est pris soit par une
personne étrangère , soit par une autorité administrative
en violation grossière des règles les plus
élémentaires de répartition des compétences. C'est
le cas par exemple du Sous-préfet du département du Mfoundi qui
est Président d'une commission consultative dans le département
de la Lekié. Dans cette hypothèse, on considère que
l'irrégularité est tellement grave, qu'elle fait de l'acte, un
acte juridique inexistant exposant par le même fait l'autorité
administrative qui s'en est rendue coupable. L'incompétence de
l'autorité décisionnelle est marquée par une
rigidité excessive. L'acte entaché d'incompétence est
simplement considéré comme nul et non avenu.
L'incompétence, il faudrait la définir, est
l'inaptitude juridique ne permettant pas à un individu d'émettre
un acte administratif. A titre d'exemple, le Ministre des affaires
foncières serait incompétent pour émettre un titre foncier
faute d'habilitation par les textes en vigueur. Cette prérogative est
plutôt dévolue au conservateur, selon la réglementation
foncière. Autre exemple, le Directeur des affaires foncières ne
saurait prendre une décision de règlement de litiges fonciers,
faute d'habilitation, par le biais de l'intérim ou d'une
délégation de signature. En définitive,
l'incompétence devrait être comprise par opposition à la
compétence qui est « synonyme d'une aptitude juridique, de
préférence un texte écrit en vigueur conféré
à l'autorité administrative afin d'émettre au nom d'une
collectivité publique , telle l'Etat, une collectivité
locale, un établissement public, voire un organisme privé
gérant un service public, les actes administratifs sur un territoire et
pour un temps donné ».
2 - Le détournement
de pouvoir.
Tandis que l'incompétence participe de ce qu'on appelle
la légalité externe, au même titre que le vice de forme, le
détournement de pouvoir quant à lui rentre dans la
légalité interne. Il y a détournement de pouvoir
lorsqu'une autorité administrative ou un agent, use de ses pouvoirs dans
un but autre que celui pour lequel ils lui ont été
conférés. C'est le domaine d'élection de la
procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique,
opérée aux fins particulières et étrangères
à l'intérêt commun. Deux hypothèses peuvent se
présenter :
L'autorité administrative utilise ses pouvoirs dans un
intérêt particulier ; le mobile de l'administration est
étranger à tout intérêt public : c'est le cas
d'un conservateur foncier qui refuse de délivrer un titre foncier en
présence d'une procédure régulièrement
adoptée, et ce, dans un but de vengeance personnelle contre le
requérant à l'immatriculation.
En outre, l'autorité administrative utilise ses
pouvoirs dans un but d'intérêt général autre que
celui qu'elle pouvait légitimement poursuivre ; les pouvoirs sont
attribués aux agents publics dans un but d'intérêt
général bien déterminé ; il ne leur appartient
pas, même dans un but d'intérêt général, de le
transgresser. Le détournement de pouvoir serait dès lors
comparable à l'abus de droit en matière civile, puisque le
titulaire d'un droit utilise ses prérogatives de propriétaire,
non pour jouir de tous les usages conférés sur sa chose, mais
dans le seul dessein de nuire aux tiers. Le détournement symbolise
« la poursuite d'un but contraire à
l'intérêt général qui est de ce fait, assimilable
à un mauvais usage du pouvoir discrétionnaire auquel le juge ne
manquera pas d'opposer sa censure ». L'illustration du
détournement de pouvoir est donnée dans l'affaire SADOU
YAYA contre Etat du Cameroun. Les faits de la cause méritent
d'être rapportés.
Par requête datée du 26 avril 2002
enregistrée au greffe de la Chambre Administrative de la Cour
Suprême le même jour, sous le numéro 618, sieur SADOU YAYA
commerçant domicilié à YAGOUA dans la province de
l'Extrême Nord, agissant en qualité d'administrateur de la
succession de feu SADOU BOUBA, a saisi le président de ladite Chambre
d'un recours tendant à l'annulation de l'arrêté n°
00046/y.7/MINUH/D310 en date du 23 février 2001 du ministre de
l'urbanisme et de l'habitat autorisant le retrait du titre foncier n° 920/
MAYO DANAY.
Au soutien de son recours, le requérant reproche
à l'arrêt querellé de manquer de bases légales et de
motivation, surtout que l'administration a , selon lui, commis des fautes au
cours de la procédure d'immatriculation qui date de vingt huit (28)
ans.
Dans ses répliques datées du 31 octobre 2002,
le représentant de l'Etat s'est remis à la sagesse des membres de
la Cour, non sans avoir prétendu que le terrain litigieux était
la propriété de la commune urbaine de YAGOUA.
La Cour, après avoir relevé que le maire de la
commune de YAGOUA n'a pas pu rapporter la preuve que le terrain litigieux
appartient au domaine privé de l'Etat, celui-ci n'ayant produit au
dossier ni le procès verbal de délibération du conseil
municipal, ni le titre de propriété de l'Etat du Cameroun y
afférent, a annulé l'arrêté litigieux, faute de
bases légales.
On ne saurait expliquer autrement que par le
détournement, le fait pour un Ministre de retirer un titre foncier sans
explications, sans autre motivation. Il s'agit en réalité d'une
sanction déguisée, par la mise en oeuvre d'un pouvoir
discrétionnaire qui a été heureusement sanctionné
par le juge administratif camerounais.
3- Le vice de
forme
Le vice de forme est le fait pour l'autorité
administrative de n'avoir pas respectée un ensemble de règles de
forme et de procédure qui auraient dû accompagner
l'édiction de l'acte. Règles de procédures primordiales
car elles apportent aux particuliers des garanties dans la sauvegarde de leurs
droits.
Selon un auteur, « si l'ordonnance du 26 août
1972 prévoit que le vice de forme est constitutif d'excès de
pouvoir, il reste à préciser les modalités formelles
qu'est tenue de respecter l'autorité administrative lorsqu'elle
édicte un acte, sous peine de voir son action entachée
d'illégalité ». Cela signifie qu'un texte a
prévu un certain formalisme que doit respecter l'administration avant sa
prise de décision. C'est sans doute le cas en matière
d'immatriculation, puisque le titre foncier ne peut être émis
qu'après le constat d'occupation ou d'exploitation de la commission
consultative. Faute pour le conservateur de vérifier l'accomplissement
de cette diligence, un titre foncier émis dans ces conditions serait
entaché d'excès de pouvoir pour vice de forme.
Dans l'affaire NGASSO Robert contre Etat du
Cameroun, le juge administratif camerounais avait
déclaré que le ministre de l'urbanisme et de l'habitat avait
excédé ses pouvoirs en prenant une décision de
règlement du litige foncier dans cette cause, qui consistait au payement
d'une indemnisation compensatrice de 500.000 francs CFA à l'une des
parties, alors qu'une expertise avait été menée et qui
évaluait le préjudice souffert à 1.596.410 francs,
expertise qui n'avait pas été prise en compte par la
décision ministérielle querellée.
A la suite de cette décision, il y a lieu de
définir le vice de forme comme le fait pour l'autorité
administrative de n'avoir pas respecté les formalités qui
conditionnent la prise d'une décision. Ces formalités peuvent
être d'origine textuelle ou de création jurisprudentielle comme
dans l'affaire NGASSO Robert. Il faudrait sans doute
préciser à ce stade d'analyse que tout vice de forme n'emporte
pas annulation d'un acte administratif. La doctrine fait une distinction entre
les formalités facultatives et les formalités obligatoires.
Seules ces dernières, dont la violation constatée, devraient
être constitutives d'excès de pouvoir.
Qu'elles soient substantielles, accessoires, les
formalités sont requises car elles protègent les
administrés et leur inobservation aura une influence déterminante
sur le contenu de la décision.
b - L'imputabilité
de la faute dans la mise en oeuvre de la responsabilité
administrative
La responsabilité administrative est mise en oeuvre
qu'en présence d'une faute commise par un agent administratif. Selon
qu'il s'agira d'une faute personnelle ou d'une faute de service,
l'administration couvrira les conséquences des fautes qui leur sont
imputables, et qui se trouvent directement à l'origine du dommage.
De manière pratique, il s'agit d'identifier la personne
responsable du dommage causé au particulier à la suite d'une
action ou inaction fautive ? De l'administration, en tant que personne
publique, ou de l'agent, fonctionnaire ou autorité administrative, qui
est responsable du dommage causé ?
C'est une constatation d'évidence de dire qu'en vertu
des textes de lois, de la jurisprudence et de la doctrine, lorsqu'on est en
présence d'une faute personnelle, il y va de la responsabilité
personnelle de l'agent administratif fautif (A) ; quand il s'agit d'une
faute de service, cela ressort de la responsabilité administrative (B).
Que dire alors lorsqu'on est en présence des cas de cumul de fautes
personnelles liées au service qui à ne point douter complexifient
la distinction, en enchevêtrant les responsabilités personnelle
et de service (C).
1 - La faute personnelle
et la responsabilité personnelle de l'agent administratif.
Le système hérité de
l'arrêt Pelletier voudrait que, lorsqu'on est face
à une faute personnelle de l'agent administratif, notamment une faute
commise en dehors de l'exercice de ses fonctions, soit parce qu'elle
révèle un comportement incompatible avec l'exercice - notamment
un abus de fonction, une volonté d'enrichissement personnel, le
rançonnement et le monnayage des prestations de service public qui sont
légion en matière foncière - cette faute permet de limiter
considérablement la responsabilité administrative à la
responsabilité personnelles des agents.
Il appartient donc à l'agent administratif, au
fonctionnaire ou à l'autorité administrative de répondre
personnellement de ses actes lorsque ces derniers n'ont aucun lien avec leur
fonction, et d'autant plus que s'il y a lien avec le service, ces actes
procèdent d'un excès de comportement qui ressortit au registre de
la responsabilité civile délictuelle ou quasi délictuelle,
et tombe dans le coup des articles 1382 et suivants du Code civil.
L'agent administratif coupable verra ainsi sa
responsabilité engagée devant le juge judiciaire qui est garant
de la protection des droits et libertés fondamentales des personnes
privées.
Ainsi, en matière foncière, notamment en
matière d'immatriculation ou d'expropriation, lorsqu'il est
avéré qu'un fonctionnaire du MINDAF, qu'un Sous-préfet ou
que le Ministre des affaires foncières lui-même, abusant de leurs
prérogatives de puissance publique, préjudicient gravement aux
intérêts des particuliers au cours de l'une quelconque de ces
procédures, en méconnaissance des prescriptions légales,
ces derniers peuvent voir leur responsabilité personnelle
engagée, et ceci sous le régime des règles de droit
privé, civile ou pénale, car la victime peut poursuivre le
responsable. En aucun cas, les tribunaux judiciaires saisis d'une faute
personnelle ne peuvent condamner l'administration. Ils ne peuvent se prononcer
qu'à l'égard du fonctionnaire mis en cause car, la faute
personnelle révèle un comportement incompatible et anormal,
différent de celui que l'on est en droit d'attendre d'un agent
public.
2 - La faute de service et
la responsabilité de l'Etat
La spécificité du régime de la
responsabilité administrative est de s'opérer lorsque
« le service public n'a pas fonctionné. Le service public
a mal fonctionné. Le service public a fonctionné
tardivement ». Dans tous les cas, dès lors qu'on est en
présence d'un service public dommageable aux intérêts des
administrés, il y va de la responsabilité administrative. La
faute de service a alors une double conséquence : elle est un
système de protection de l'agent public ; elle est la condition de
la responsabilité de l'administration.
Faute de service comme système de protection de
l'agent public, dans la mesure où, elle est une technique de
substitution de la responsabilité personnelle de l'agent, car, elle fait
échec à la faute personnelle. Mais encore, et surtout, elle est
une technique de garantie de la séparation du dommage subi par
l'administré.
Faute de service comme condition de mise en oeuvre de la
responsabilité administrative, car, ce n'est qu'en présence
d'une faute de service, que l'administration en tant que personne
répondante intervient. La faute de service entraîne la poursuite
de l'administration foncière devant la juridiction administrative en
vertu des règles de responsabilité de droit administratif.
La préoccupation lancinante qui est celle d'un
privatiste est celle de savoir, si au cours de l'instance, le juge
administratif peut-il se prévaloir des principes de réparation
civiliste, dans un souci d'équité et de protection de la
victime ?
3 - La complexité
de la distinction et enchevêtrement des
responsabilités
Le critère posé par la jurisprudence
Pelletier, est celui selon lequel le droit administratif de la
responsabilité est applicable en cas de faute de service, et que seul le
Code Civil et les lois pénales, régissent la réparation
des dommages causés aux particuliers par les fautes personnelles des
agents publics. Les difficultés d'application de ce critère
apparaissent, car la dichotomie faute service -faute personnelle
instituée par le Tribunal de Conflit ignore les situations
d'enchevêtrement et de cumul de fautes.
Tout resterait simple si le critère de distinction
entre faute personnelle et faute de service est purement matériel et
objectif, s'il n'était affaire de temps et de lieux du service, ou au
contraire de la vie privée. Mais à l'instar du Dr Jekyll, tout
agent de l'administration reste simultanément, une personne
privée pendant l'exercice de ses fonctions, et inversement, hors de cet
exercice, sa profession peut faciliter la commission de faute qui au premier
abord, apparaissent ne relever que de sa vie personnelle. L'homme et
l'administration ne se laissent pas aisément séparer dans la
réalité. Ainsi, une faute commise pendant le service et sur les
lieux de service peut être qualifiée de personnelle, si elle
révèle un comportement incompatible avec l'état de
fonctionnaire.
Symétriquement, il n'est pas davantage exclu qu'une
faute commise matériellement hors du service ne soit dépourvue de
lien avec le service, notamment si elle est commise en utilisant les moyens
fournis par le service.
En outre, il peut arriver que le préjudice causé
à l'administré soit la conjonction de deux faits fautifs, dont
l'un peut être qualifié de faute de service, et l'autre de faute
personnelle. Il s'agit là des situations de cumul de deux faits fautifs.
La question qui se pose est alors celle de savoir de l'agent ou du service, qui
est définitivement responsable ?
D'autre part, on assiste également à des
situations dans lesquelles, un même fait s'analyse à la fois en
faute personnelle et en faute de service : il s'agit de l'hypothèse
où, en un même fait, se trouve une dualité de faute
personnelle et de service. Qui répond alors du préjudice subi par
l'administré ?
Ainsi, les théories de l'enchevêtrement, du cumul
de deux faits fautifs ou de deux fautes en un même fait,
révèlent plus l'impasse, que ne constitue la
séparation des responsabilités introduites par la
jurisprudence Pelletier . Fort à
propos, les jurisprudences Anguet100(*) et Epoux
Lemonnier101(*)
apportent des solutions précises en droit français.
Qu'en est il alors de la réalité du régime de
la responsabilité administrative en droit camerounais ?
§ 2 : La réalité de la
responsabilité administrative en matière foncière au
Cameroun
La question de la réalité, voire de
l'effectivité de la responsabilité administrative en
matière foncière au Cameroun soulève beaucoup
d'ambiguïtés.
Il s'agit en fait de s'interroger sur le rôle de la justice
administrative et civile dans l'appréciation de la faute administrative,
mais encore, et surtout, d'analyser la réaction de l'administration en
présence d'une faute imputable à ses agents en charge de la
question foncière. En clair, il est question dans ces
développements d'analyser l'appréciation concurrente de la faute
administrative par l'administration et sa justice. L'Etat de droit, qui a pour
corollaire la soumission de l'administration au droit oblige en effet que
l'autorité administrative, donc l'Etat, s'en tienne au dispositif
élaboré, et se sente obligé par les normes
édictées.
A- La réaction
administrative face à la faute commise
Il s'agit dans ce registre d'examiner les mesures
administratives en oeuvre en présence d'une faute commise par un agent
des services du MINDAF.
Au cours des tournées et descentes sur le terrain dans
les services déconcentrés de son ministère, Monsieur
Pascal ANONG ADIBEME, Ministre des domaines et des affaires foncières, a
clairement affirmé qu'il s'agissait « de renforcer la
passerelle de confiance entre la hiérarchie et le personnel en le
soutenant dans la transparence, dans la gestion des affaires
publiques ».102(*) Cette affirmation s'illustre dans un
contexte marqué par l'assainissement de la gestion foncière, afin
de contrer les conduites de ses collaborateurs, plus proches de l'usager,
à poser des actes contraires à l'étique professionnelle
et la réglementation en vigueur.
Le responsable de ce département ministériel
décrie des comportements déviants de certains responsables
notamment « les cas de corruption, de trafic d'influence,
d'établissement complaisant des titres fonciers établis sur des
immeubles de très grandes superficies au profit d'individus fortement
nantis ». A cet égard, les services centraux et
déconcentrés du MINDAF doivent faire amende honorable et placer
l'intérêt de la chose publique avant leurs propres
intérêts, car le « moment est venu de restaurer la
crédibilité du MINDAF. Les services du Ministère des
domaines et des affaires foncières doivent montrer l'exemple dans leur
relation quotidienne avec les usagers ; ils doivent être
présents au front de lutte contre la corruption, et combattre sans cesse
l'inertie et le laxisme ».103(*)
Dans cette perspective, face aux incartades de certains
fonctionnaires du MINDAF, la réaction des supérieurs
hiérarchiques ne s'est pas faite attendre.
Ainsi, dans la province de l'Ouest, département du
Ndé, le conservateur foncier de ce département a
été suspendu de ses fonctions par le Gouverneur pour faute lourde
consistant à la « désinvolture
déconcertante du Sieur Kengne envers ses supérieurs
hiérarchiques, refus d'assister aux réunions de coordination,
attrait pour les billets de banque lors des opérations
foncières ».
En effet, l'écart de comportement du conservateur au
cours des opérations foncières est observé lorsque ce
dernier réussit l'exploit inédit de délivrer un titre
foncier à un proche d'un natif du terroir condamné, et dont les
biens ont été confisqués, pour détournement de
deniers publics. Le conservateur foncier mis en cause a délivré
un titre foncier en marge de la réglementation en vigueur. En outre
l'autre grief qui lui est fait, est sa propension à dissimuler les frais
des bulletins des avis domaniaux et frais de timbres.
Dans une autre espèce, mettant en cause un
délégué départemental des affaires
foncières, notamment celui de la Mefou et Akono, le Ministre des
domaines a relevé de ses fonctions le Sieur Essama Pierre pour
indélicatesse avérée consistant: « au
rançonnement des usagers, au monnayage de ses services ;
concrètement, il a retenu 140 dossiers d'immatriculation abusivement en
exigeant des sommes exorbitantes aux requérants ». Outre
ces cas d'abus de pouvoir, de rétention de dossiers, et d'escroquerie
organisée, le Sieur Essama s'est rendu coupable de dégradation
des rapports de services car, instigateur de rixes spectaculaires avec ses
proches collaborateurs, notamment, le conservateur foncier dont il voulait se
substituer dans la décharge d'un titre foncier, attribution qui ne lui
est pas due.
Ces illustrations de réactions administratives aux
indélicatesses des fonctionnaires en services au MINDAF s'inscrivent
dans un souci de montrer qu'au Cameroun, l'heure n'est plus au laxisme,
à l'inertie dans la gestion de la chose publique. Dans cette
orientation, une cellule de lutte anti-corruption a été mise sur
pied, dont l'objet est de déceler les trafics qui ont cours au sein des
services.
En effet, conformément à l'organigramme du
MINDAF, il est stipulé que : « l'inspection
générale est chargée du contrôle interne et de
l'évaluation du fonctionnement des services du ministères, des
projets et établissements sous tutelle(...), de la mise en oeuvre de la
stratégie de lutte contre la corruption au sein du ministère, en
liaison avec la cellule ministérielle de lutte contre la
corruption ». Dans la cadre de leurs missions, les inspecteurs et
chef de cellule anti-corruption peuvent «demander par écrit des
informations, explications ou documents aux responsables des services
contrôlés qui sont tenus de répondre dans les délais
impartis ; disposer à titre ponctuel du personnel
nécessaire relevant d'autres services du ministère ;
requérir la force publique, en cas de nécessité
après avis conforme du Ministre et conformément à la loi,
en vue de leur prêter main-forte ou constater les atteintes à la
fortune publique ».
C'est peu dire, que d'affirmer que la lutte contre la
corruption est une priorité au MINDAF, quand on sait que la corruption
en matière de gestion des domaines et des affaires foncières, va
au-delà de la simple acceptation populaire, pour embrasser le faux en
écritures publiques, le fait de demander à l'usager de verser des
commissions fortuites, la rétention sans raison des dossiers et
l'aliénation des recettes domaniales, foncières ou
cadastrales.
B- La réaction
juridictionnelle face à la faute administrative
Le contentieux foncier relève doublement, et de la
juridiction de l'ordre judiciaire, et de juridiction administrative. Dans ce
registre, nous insisterons profondément sur l'attitude de la justice
administrative face à la faute administrative en matière
foncière.
Près de 85% du contentieux administratif est relatif
aux litiges fonciers104(*) mettant en conflit l'administration, et les
particuliers, requérants aux procès. L'accès à la
justice ne fait plus aucun doute en matière foncière. La question
de fond qui persiste, est celle de savoir comment l'Etat envisage la
responsabilité des services administratifs en matière
foncière, et conséquemment, quelle protection il accorde au droit
de propriété acquis ou en devenir. La kyrielle de recours
introduite au sein de la formation administrative de la Cour suprême,
montre à suffisance que la faute de l'administration n'est plus impunie.
Au contraire, la responsabilité administrative est ainsi mise en jeu
avec toutes les conséquences qui peuvent en découler.
Ainsi, dans les espèces mettant en cause MBALLA
Dieudonné105(*),
MVENG NDY née MENDOUNGA Marguerite106(*), BILOUNGA Pascaline,107(*) la Chambre Administrative de
la Cour Suprême reconnaît certains faits, comme constitutifs de
fautes de l'administration au cours de certaines opérations
foncières qui ont lésés les requérants.
Il en est de même dans les affaires WAHA Emmanuel,
BEYISSA Adolphe, POHOKAM Suzanne, succession BEWOU DEFFO Christophe, NJOH
Philibert108(*), dans
lesquelles le juge administratif reconnaît des dysfonctionnements et
manquements dans l'activité des services centraux et
déconcentrés du ministère des domaines, ancien
ministère de l'urbanisme dans l'établissement et la
délivrance du titre foncier.
Plus récemment, il a été rendu au sein de
la chambre administrative, les décisions suivantes extirpant la faute
administrative: affaire BONG Henri Aimé relativement
à la concession provisoire et l'annulation de titres fonciers
irrégulièrement délivrés109(*) affaire NJOOH
Michel Pierrot relativement à une décision
ministérielle ordonnant le retrait d'un titre foncier110(*), affaire BISSO
Joseph et dame ZEH111(*) pour complicité de l'administration
dans une immatriculation frauduleuse comme ce fut le cas dans
les affaires OHANDJA Séverin112(*) et YONGO Marc.113(*)
Par
ailleurs, en ce qui concerne le contentieux de l'expropriation, les
célèbres affaires dame veuve Ongono Régine,
Sté Renault Cameroun, DZOU ESSOMBA sont des illustrations des
recours intentés contre la faute administrative devant la Cour
Suprême. De même, les affaires EMAH Basile
et autres114(*) et EFFA
Paul Marcel115(*) dans laquelle la faute administrative a
été décriée au cours d'opérations
d'expropriation pour cause d'utilité publique.
Toute cette énumération casuistique, vise
à montrer que si l'on se base sur le champ des décisions rendues
par la Chambre Administrative de la Cour suprême statuant en
matière foncière, il ne fait aucun doute que la
responsabilité de l'administration des domaines est
avérée. L'on se rend compte par cette série d'annulations
que le juge administratif procède de ce fait un rappel à
l'ordre aux structures administratives chargées du foncier,
afin de mieux encadrer l'administration dans son action et de consolider
ainsi l'Etat de droit au Cameroun.
Mais, il faudrait dépasser cet aspect purement formel,
pour s'appesantir sur la responsabilité véritable des services
des domaines en terme de réparation du préjudice subi par les
particuliers et même, au titre d'une responsabilité
sanctionnatrice.
Quelle incidence la faute administrative aura dans la
protection du droit de propriété des particuliers en droit
camerounais. Nous osons croire qu'avec l'avènement de la loi
n°2006/016 du 29 décembre 2006, fixant l'organisation et le
fonctionnement de la Cour Suprême, notamment en son article 9116(*) qui institue au sein de la
Chambre Administrative, une Section du contentieux des affaires
foncières et domaniales, une protection éfficiente sera
accordée au droit de propriété face aux
empiétements administratifs, et qu'une réparation
intégrale aura cours lors des espèces mettant en scène le
contentieux foncier.
CONCLUSION
Parvenu au terme de notre analyse sur les conséquences
de la faute, et la mise en oeuvre de la responsabilité administrative,
force est de procéder à un double constat.
Le premier découle de l'idée force selon
laquelle la terre est source de richesses inestimables au Cameroun, et par
conséquent, la gestion qu'en fait les services administratifs des
domaines et affaires foncières doit se consolider dans un environnement
non frelaté au risque de générer de véritables
dommages aux personnes privées. Le foncier mobilise en effet des enjeux
importants que sont la cohésion sociale, la paix et l'avenir des
familles.
Le second constat a trait à l'effectivité de la
responsabilité administrative en matière foncière. Il ne
fait aucun doute que la gestion administrative de la chose foncière est
scrutée de près ou de loin. Le Ministère de tutelle qu'est
le MINDAF met en oeuvre un important arsenal de mesures tendant au
contrôle des services en charge de l'administration foncière, la
mise sur pied d'une cellule anti-corruption au sein du ministère en dit
long sur les intentions des responsables de ce département
ministériel. Cela laisse augurer que l'inertie, le laxisme et
l'indélicatesse ne resteront plus impunis. Mais que dire alors de la
réparation du préjudice subi par les victimes au cours de ces
opérations foncières ?
Chapitre 2 : La réparation du préjudice subi
par la victime de la faute administrative.
Une valeur sociale protégée est-elle
transgressée quelque part, qu'immédiatement, doit-on
procéder à l'application de la sanction prévue à
cet effet. La sanction se définit comme une mesure répressive
prise par une autorité en vue d'infliger une peine ou une
récompense à l'auteur d'un acte. Il s'agit en fait des
conséquences juridiques du non respect d'une règle de droit, d'un
usage ou de l'ordre établi. En présence d'une faute, la sanction
renvoie à la punition, au blâme, aux pénalités
encourues du fait de la commission de la faute.
En matière de contentieux administratif, il n'existe
véritablement pas de sanctions répressives à l'encontre de
l'administration. Lorsqu'une faute est commise, on procède au
rattachement au service, si cela est avérée, la
responsabilité administrative est une responsabilité
réparatrice et non sanctionnatrice. C'est lorsque l'auteur du
préjudice est identifié que l'on peut procéder soit
à une responsabilité disciplinaire, soit à une
responsabilité civile ou pénale.
Cela étant, le constat clair qui découle de ces
allégations, est celui suivant lequel, lorsque l'administration est mise
en cause dans un litige, la sanction véritable que l'on appliquera aura
un caractère réparateur ; il s'agira de replacer la victime
dans un même et semblable état avant la survenance du
préjudice.
Dans le prolongement de ce constat, il s'agira dans notre
analyse d'examiner les mesures réparatrices des dommages causés
aux particuliers par la faute administrative en matière foncière.
Tout d'abord la réparation qu'en fait l'administration elle-même,
en vertu du principe de l'administration active (section 1), ensuite la
réparation par voie juridictionnelle du préjudice subi en
matière foncière (section 2).
C.
Section 1 : La réparation du préjudice subi par voie
administrative.
La réparation se définit comme le
dédommagement d'un préjudice par la personne qui en est
responsable, et ceci, soit par le rétablissement de la situation
antérieure, soit par le versement d'une somme d'argent au titre de
dommages-intérêts. En droit administratif, en vertu des principes
du recours gracieux préalable et celui de l'administration active, la
demande en réparation du préjudice subi par les individus est
d'abord adressée à l'administration avec laquelle on est en
litige. En matière foncière, le recours est adressé au
Ministre des domaines et des affaires foncières qui conformément
à la législation, prend des mesures contre
l'illégalité de l'action administrative. De ce fait, il est
judicieux d'énumérer ces mesures, étant entendu que
l'immatriculation et l'expropriation sont deux procédures bien
distinctes, et ceci dans un souci de mieux rendre compte de l'état des
lieux de la réparation des fautes commises dans
l'immatriculation(§1), et dans l'expropriation (§2).
§ 1 : Les mesures administratives palliatives de
l'immatriculation fautive
En matière foncière, notamment au cours de
l'immatriculation, la faute administrative qui préjudicie aux
intérêts des particuliers est réparée aux travers de
plusieurs procédés : soit la décision entachée
de faute faisant grief est annulée par l'autorité statutairement
habiletée, soit la décision entachée est redressée.
L'hypothèse de redressement n'intervient que lorsque l'acte ne fait pas
grief aux particuliers. Dès lors qu'elle cause un dommage aux
requérants, elle doit être retirée. Parce que
l'immatriculation et l'expropriation sont deux procédures bien
distinctes, il s'agit, dans un souci de mieux rendre compte de l'état
des lieux, d'examiner tour à tour les mesures administratives
réparatrices des fautes commises au cours de ces procédures qui
attentent au droit de propriété.
A-
L'anéantissement du titre foncier
Au regard des caractéristiques du titre foncier à
savoir qu'il est réputé définitif, intangible et
inattaquable, la possibilité de l'anéantir apparaît
comme une sanction lourde. La réforme du 16 décembre 2005
prévoit deux causes d'anéantissement du titre foncier : cela
peut survenir à la suite du retrait, ou de l'annulation
ministérielle du titre de propriété.
1- Le retrait
ministériel des titres fonciers irrégulièrement
délivrés
Aux termes de l'article 2 du décret n°2005/481 du
16 décembre 2005, « (1) toute personne dont les droits ont
été lésés par suite d'une immatriculation n'a pas
de recours sur l'immeuble, mais seulement en cas de dol, une action personnelle
en dommages- intérêts contre l'auteur du dol [...].
(3) Toutefois, le Ministre chargé des affaires
foncières, peut ,en cas de faute de l'administration, résultant
notamment d'une irrégularité commise au cours de la
procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes
authentiques, procéder au retrait du titre foncier
irrégulièrement délivré ;
(5) Le retrait du titre foncier prévu à
l'alinéa 3 du présent article, ne peut sauf cas de fraude du
bénéficiaire, intervenir que dans le délai du recours
contentieux ».
A la lecture de ce texte, il découle que le titre foncier
ne peut être retiré que dans deux hypothèses : la
faute de l'administration et la fraude du bénéficiaire.
S'agissant de cette dernière, on peut dire laconiquement que la fraude
est une action faite de mauvaise foi dans le but de tromper, ou encore une
falsification punie par la loi en application de la règle
« fraus omnia corrumpit ».
Le retrait du titre foncier est exercé par le ministre des
domaines à l'initiative, soit de l'administration elle-même,
soit par le biais d'un tiers lésé par une immatriculation
fautive. Ainsi, dans un délai de deux mois à compter de la
notification de la décision faisant grief, en l'occurrence
l'établissement d'un titre foncier entaché de faute
administrative, le requérant peut introduire sa demande tendant au
retrait du titre irrégulièrement délivré. Ce fut le
cas avec l'arrêté n°00030/Y II/MINDAF/D130 du 10 octobre
2007 portant retrait du titre foncier n°34883/Wouri
irrégulièrement délivré. La possibilité
ainsi offerte au Ministre en charge des questions foncières de
procéder au retrait des titres fonciers irrégulièrement
délivrés traduit la détermination des pouvoirs publics
à traquer tous les titres fonciers entachés de fraude et
d'illégalité. Mais elle constitue en même temps un danger
pour le droit de propriété, notamment en ce qui concerne ses
caractères inattaquable, intangible et définitif qui fondent sa
force probante. Cette possibilité de remettre en cause le titre de
propriété laissée entre les mains de l'administration
réputée "juge et partie" de la question foncière au
Cameroun, mais dont la propension à piétiner les droits
fondamentaux et libertés individuelles, pourrait embarrasser plus d'une
personne. Cela pourrait constituer un recul dans la garantie accordée
à la protection de la propriété dont le juge est
réputé gardien dans les systèmes juridiques modernes. La
soupape de sécurité viendrait de ce que le juge administratif
reste compétent pour s'assurer de la soumission de l'administration au
droit.
2 - L'annulation
ministérielle du titre foncier irrégulièrement
délivré
L'annulation ministérielle du titre foncier est
prévue par les alinéas 6 et 7 du même article 2 du
décret de 2005 aux termes desquels il est disposé
que:
« al.6 : un titre foncier est nul d'ordre
public dans les cas suivants :
-lorsque plusieurs titres fonciers sont
délivrés sur un même terrain ; dans ce cas, ils sont
tous déclarés nuls de plein droit, et les procédures sont
réexaminées pour déterminer le légitime
propriétaire. Un nouveau titre foncier est alors établi au
profit de celui-ci ;
-lorsque le titre foncier est délivré
arbitrairement sans suivi d'une quelconque procédure ; ou obtenu
par une procédure autre que celle prévue à cet
effet ;
-lorsque le titre foncier est établi en
totalité ou en partie sur une dépendance du domaine
public ;
-lorsque le titre foncier est établi en
totalité ou en partie sur une parcelle du domaine privé de
l'Etat, d'une collectivité publique ou d'un organisme public, en
violation de la réglementation ;
(7) La nullité du titre foncier prévue à
l'alinéa 6 ci-dessus est constatée par arrêté du
Ministre chargé des affaires foncières susceptible de recours
devant les juridictions administratives compétentes. »
Cette annulation d'ordre public du titre foncier vise à
sanctionner la méconnaissance flagrante de l'arsenal juridique en
matière foncière ; on constate en effet que les causes
d'annulations sont relatives aux règles et formalités
substantielles à accomplir avant tout établissement du titre
foncier.
B - Les
conséquences de l'anéantissement administratif du titre
foncier
Le titre foncier est un acte administratif créant des
droits au profit de son bénéficiaire. Dès lors qu'il est
établi, le titulaire d'un titre foncier, parce que sûr de la
plénitude de ces droits sur le bien immeuble, peut effectuer plusieurs
opérations, notamment la cession, le morcellement, la vente du bien
immeuble individualisé.
Le retrait administratif du titre foncier pour faute de
l'administration, en même temps qu'il rétablit la
légalité, est simultanément source
d'insécurité juridique. Rétablissement de la
légalité dans la mesure où l'administration qui est
« le pouvoir agissant de l'Etat doit être soumise à
l'ensembles des normes juridiques »117(*)et par conséquent,
toute violation administrative de la légalité doit être
réparée de manière autonome.
Incertitude juridique, car comme on le dit communément,
« on ne sait plus à quel saint se
vouer » : si l'assurance de la propriété est
remise en jeu par le titre foncier irrégulièrement
délivré, on se pose nécessairement des questions lorsque
l'on veut entrer en affaire avec le propriétaire du titre foncier. Mais
encore, lorsque le titre foncier a été l'objet de morcellement,
les propriétaires de bonne foi qui ont acquis la parcelle de terrain
sont injustement dépossédés de leur titre de
propriété.
Ainsi, dans l'affaire de la MAGZI 118(*) près de 163 titres
fonciers ont été retirés et annulés par le Ministre
des domaines, dans lesquels 14 titres fonciers expropriés et
indemnisés ont donné lieu à 149 morcellements. Quel est
le sort des propriétaires de bonne ou de mauvaise foi de ces 149 titres
fonciers, qui à cause du désordre organisé des services
fonciers, notamment du département du Mfoundi, ont pu établir des
titres fonciers sur le domaine privé de l'Etat.
En clair, cela veut dire que le titre foncier ne procure plus
à son propriétaire, le statut de véritable et seul
détenteur. Par ailleurs, suivants les dispositions de l'alinéa 4
de l'article 2 du décret de 2005, « le retrait du titre
foncier délivré entraîne la mutation sans frais dudit titre
au nom du propriétaire initial, s'il s'agit d'un immeuble
immatriculé. L'immeuble est remis au même et semblable état
où il se trouvait avant la délivrance du titres s'il s'agit d'un
immeuble non immatriculé ». C'est établi que le
retrait du titre foncier aura un effet d'engrenage, qui assurément aura
des effets pervers dans la chaîne de cession d'une portion de
propriété.
§2 : La réparation administrative d'une
expropriation fautive
La procédure d'expropriation pour cause
d'utilité publique est une procédure attentatoire au droit de
propriété. L'administration lorsqu'elle est saisie dispose de
moyens pour réparer l'atteinte infligée au propriétaire.
Dans ce cadre, il s'agit d'énoncer les mesures palliatives de la faute
qui permettent aux propriétaires de rentrer dans son droit (A),
réparation qui somme toute, demeure insuffisante, aussi sied-t-il
à notre droit de s'inspirer des solutions venues des droits
étrangers (B).
A- Les mesures palliatives
d'une expropriation fautive
Eu égard au caractère inviolable et sacré
du droit de propriété, dont nul ne peut être privé,
si ce n'est par nécessité publique, en présence de
manquements administratifs au cours de la procédure d'expropriation pour
cause d'utilité publique, l'administration en charge des domaines
devrait éponger les vices de procédure, et redresser les actes
faisant griefs aux propriétaires. Au cas contraire, on tomberait sous
le coup d'une dépossession illégitime qui cause préjudice
aux individus. Ce préjudice injustement éprouvé par
l'exproprié prend racine dans le détournement de pouvoir,
l'excès de pouvoir dans la déclaration d'utilité, la non
utilisation des terrains expropriés et l'absence de rétrocession
administrative de la propriété injustement
cédée ; mais encore, et c'est la plus grave, l'absence
d'indemnisation, la sous-évaluation du préjudice subi qui sont
l'oeuvre des organes administratifs, ne permettent pas aux expropriés de
bénéficier des mesures compensatrices à
l'expropriation.
Ces dysfonctionnements administratifs opérés au
cours de l'expropriation entraînent la voie de fait ou l'emprise
immobilière. La voie de fait présuppose une action
matérielle de l'administration commise au mépris du droit de
propriété et en marge de tout fondement législatif ou
réglementaire. L'acte perd son caractère administratif et
s'inscrit dans une logique d'abus administratifs, d'atteinte grave à la
propriété des particuliers. En conséquence, tout acte
juridique lié à la procédure d'expropriation dès
lors qu'il est vicié par la faute de l'administration, doit être
déclaré caduque c'est-à-dire sans effets juridiques ou
même annulé lorsque l'opération projetée n'a aucun
fondement.
En droit français, pour pallier les spoliations
illégales des expropriés, il est prévu une phase
administrative et une phase judiciaire au cours de la procédure
d'expropriation : l'autorité administrative est chargée des
formalités de transfert de propriété et le juge judiciaire
fixe l'indemnité. En outre, par respect pour l'Etat de droit, le
propriétaire illégalement dépouillé de son bien
peut le récupérer, au travers de la rétrocession, ou
à défaut, il peut lui être versé une
indemnité complémentaire pour le préjudice subi par la
dépossession.
B- Le plaidoyer pour
une consécration législative de la rétrocession
La rétrocession du bien illégalement
exproprié est absente dans les textes camerounais relatifs à
l'expropriation, et n'a été envisagée pour la
première fois que dans la célèbre affaire
Société Renault du Cameroun119(*). Sa paternité est
issue du code de l'expropriation français notamment en son article
L.12-6 et l'article 54 de l'ordonnance de 1958 sur l'expropriation. Ces
articles prévoient que : « si les immeubles
expropriés n'ont pas reçu, dans le délai de cinq ans, la
destination prévue, ou ont cessé de recevoir cette destination,
les anciens propriétaires ou leurs ayants droits peuvent en demander la
rétrocession pendant un délai de trente ans ».
Selon Madame LEMASURIER, « cette procédure s'analyse
non pas comme une résolution, mais comme une nouvelle cession à
un prix nouveau correspondant à la valeur du bien,
appréciée au moment de sa restitution »120(*).
En tout état de cause, la procédure de
rétrocession vise à sanctionner les carences, les manquements de
l'expropriant. L'illégalité de l'action administrative est un
domaine qui atteint son paroxysme dans le contentieux de l'expropriation, comme
nous le révèle la célèbre affaire de la
MAGZI. Les faits de la cause méritent d'être
retracés. Par arrêté n°780/A/MINUH du 21 janvier 1986,
l'Etat camerounais déclarait d'utilité publique des parcelles de
terrains sises à MVAN et NSAM d'une superficie globale de 316 hectares
et portant extension de la zone industrielle de Yaoundé-Sud. Par un
autre décret n°85/1714 du 09 décembre 1985, ces terrains ont
été incorporés dans le domaine privé de l'Etat et
mis à la disposition de la Mission d'Aménagement et de Gestion
des Zones Industrielles (MAGZI). Cette structure ayant pour rôle, la
promotion d'un développement harmonieux en zone urbaine, par la
captation d'investisseurs aux fins de mener des activités
industrielles. Au cours de la procédure d'expropriation,
après enquêtes publiques et contradictoires, les
expropriés ont reçu une indemnité compensatrice à
la suite de leur dépossession et du transfert de
propriété. Malheureusement, la MAGZI a eu maille à
partir avec des occupants irréguliers, titulaires de titres fonciers
sur ces parcelles de terrains déclarés d'utilité publique.
Il appert que certains services de l'administration foncière ont
procédé aux rétrocessions fictives des terrains
expropriés, et n'ont pas retirés les titres fonciers, qui
après l'expropriation, ont fait l'objet de morcellement et de vente.
Par voie d'arrêté, le Ministre des affaires foncières a
retiré 163 titres fonciers établis en violation de la
réglementation, sur des parcelles de terrains déclarées
d'utilité publique sans qu'aucune rétrocession ne soit
intervenue.
Section 2 : La réparation par voie juridictionnelle
Le contentieux foncier se démarque par l'intervention
de deux ordres de juridictions : l'ordre judiciaire et l'ordre
administratif. En effet parce qu'il met en prise l'Etat et les particuliers, le
contentieux foncier est traité, et devant le juge administratif, et
devant le juge judiciaire. Etant entendu que l'étude porte sur la faute
de l'administration en matière foncière, il y'a lieu
d'apprécier les réponses juridictionnelles à la faute
administrative. Il sied à cet effet d'analyser la réparation
octroyée par le juge administratif d'une part (§1), et d'autre
part, celle octroyée par le juge judiciaire (§2).
§1 : La réparation du préjudice par le juge
administratif
Le juge administratif en droit camerounais, en attendant
l'application effective de la loi n° 2006/016 du 29 Décembre 2006,
est la Cour Suprême qui dispose d'une formation administrative, et d'une
Assemblée plénière.
Ainsi, tout dommage résultant d'une activité
administrative, est porté devant la Chambre Administrative de la Cour
Suprême; en cas d'insatisfaction, le requérant intente un recours
devant l'Assemblée Plénière de l'auguste cour. Suivant la
pratique du contentieux administratif, le juge administratif ne peut
lui-même redresser la situation litigieuse, sauf dans des cas
précis.121(*) Il
ne lui appartient pas de prendre une décision à la place de
l'administration ; il ne peut que prononcer les mesures suivantes :
soit annuler la décision administrative faisant grief au
requérant, soit attribuer une indemnité en argent mais
généralement, il s'agit de franc symbolique.
Tout au moins, en ce qui concerne le contentieux foncier, il
est notoire qu'en cas de faute administrative, le juge administratif
procède à l'annulation de la décision ou de l'acte faisant
grief au propriétaire foncier ou à tout requérant.
L'annulation juridictionnelle se distingue du retrait administratif dans ces
conséquences. Il est alors impérieux d'étudier cette
sanction juridictionnelle qu'est l'annulation dans son régime et ses
conséquences.
A - L'annulation des actes faisant grief
Qu'il s'agisse du titre foncier irrégulièrement
délivré ou d'un arrêté de déclaration
d'utilité publique, le juge administratif camerounais est
compétent pour annuler tout acte administratif accompli en marge de la
réglementation. La faute administrative constitue une
illégalité au sens d'une attitude de l'agent, qui par
négligence ou malveillance, en violation des obligations légales
de la fonction ou du devoir de ne causer aucun dommage à autrui.
L'hypothèse de l'annulation d'un titre foncier
n'intervient qu'après le recours gracieux préalable introduit
auprès du Ministre tendant au retrait du titre foncier. Ce n'est
qu'après refus exprès de ce retrait que le requérant est
en droit d'introduire son action près au greffe de la Chambre
Administrative de la Cour Suprême, et ceci, en respect des délais
de rigueur. De manière concrète, le requérant a un
délai de 60 jours à compter de la décision de rejet du
recours gracieux adressé au Ministre.
Le titre foncier étant un acte administratif
créateur de droit au profit de son bénéficiaire, lorsqu'il
est avéré qu'au cours de son obtention, des dysfonctionnements
administratifs se sont produits, la règle est que le juge l'annule.
L'annulation constitue en droit la sanction la plus grave car l'acte
disparaît de l'ordonnancement, et est réputé n'avoir jamais
existé.
Le juge administratif camerounais a eu l'occasion dans
plusieurs espèces, de faire application d'une telle mesure. Ainsi, dans
l'affaire Effa Paul Marcel, le juge a prononcé
l'annulation de l'arrêté n°000074/yo14.4/MINDAF/D100 du 30
mai 2005 du Ministre des domaines et des affaires foncières pour
détournement du caractère d'utilité publique. Pareillement
dans une espèce relative à une immatriculation fautive, le juge
dans l'affaire NDJESSE Justin a ordonné l'annulation de
la décision administrative et le retrait du titre foncier
n°7609/Lekié.
L'analyse des décisions rendues par cette chambre
indique que le juge administratif ne manque pas de faire usage de cette
sanction. La quantité et la qualité des décisions rendues
par l'auguste chambre en la matière réussissent à
persuader de l'utilisation de cette sanction. L'on déplore seulement le
fait que la Chambre déboute généralement les
requérants des prétentions ayant trait à l'octroi de
dommages intérêts en complément de l'annulation du titre
foncier litigieux.
B- Les conséquences de l'annulation
juridictionnelle
En droit positif camerounais, indépendamment du
caractère administrativiste, ou civiliste, l'annulation d'un acte le
fait disparaître de l'ordonnancement juridique, et ceci, de
manière rétroactive.
En matière foncière, notamment au cours de
l'immatriculation, lorsqu'un titre foncier est annulé par une
décision du juge administratif, on considère qu'il n'a jamais
existé et la procédure qui a eu cours n'est plus valide. Les
parties requérantes disposent de la faculté de recommencer une
nouvelle procédure d'obtention du titre foncier, qui cette fois-ci, sera
protectrice de leurs droits et du droit applicable.
Une fois le titre foncier annulé par le juge
administratif, l'administration est tenue de le retirer et de procéder
à une nouvelle immatriculation. Si le morcellement ou toute autre
procédure ont été effectués sur ledit titre
foncier, elles seront toutes annulées car l'annulation a un effet
erga omnès. Tous les actes passés sous le fondement d'un
acte juridique annulé perdent leur validité, et encourent la
même sanction qu'est l'annulation. Les effets de l'annulation
s'étendent aussi dans le temps. L'annulation tient pour l'avenir comme
pour le passé. L'acte est supposé n'avoir jamais existé.
Tout se passe alors comme si on est en présence d'un vide. On suppose
que l'acte n'a jamais existé, et par conséquent ne peut avoir de
suite. Tous les effets qu'il a pu produire sont anéantis
rétroactivement.
§2 : L'intervention du juge judiciaire dans la
réparation du préjudice en matière foncière
Le juge judiciaire, civil ou répressif pourrait
intervenir dans la réparation du préjudice subi en matière
foncière, car il est communément admis qu'il est le gardien de la
propriété privée et des libertés fondamentales. A
ce titre, toutes les fois où la propriété
immobilière aura subi un empiètement administratif, la
réparation aura lieu devant cet ordre juridictionnel. Il s'agira
principalement des litiges relatifs à l'indemnisation dans la
procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique en vertu
de la position constante de la Cour Suprême suivant
laquelle : « les litiges nés de l'expropriation
n'entrent pas dans le domaine du contentieux administratif et échappent
donc à la compétence de la chambre administrative de la Cour
Suprême.»122(*)
Au préalable, il faudrait signaler que des
contestations relatives à la procédure d'expropriation peuvent
être soulevées devant le juge administratif car, il est le juge de
l'excès de pouvoir, et en conséquence, toutes les fois où
l'autorité expropriante aura utilisé les pouvoirs qui sont les
siens dans un but autre, dans un cadre autre que l'utilité, l'action
sera ouverte devant le juge administratif. Par ailleurs, en matière
d'immatriculation, il est admis que le juge judiciaire ne peut prononcer aucune
mesure sur l'immeuble à immatriculer. Il est seulement compétent
lorsqu'il faut statuer sur une demande en dommages et intérêts en
cas d'immatriculation dolosive. Il appartient aux commissions consultatives de
trancher tous litiges relatifs à l'immatriculation.
Toute précision faite, il importe alors d'envisager le rôle
respectif du juge civil et du juge pénal dans la répression des
atteintes à la propriété foncière causées
par l'administration.
A- Le juge civil, juge des dommages et
intérêts
Aux termes de l'article 12 de la loi n°85/09 du 04
juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité
publique : « En cas de contestation sur le montant des
indemnités, l'exproprié adresse sa réclamation à
l'administration chargée des domaines (...). S'il n'obtient pas
satisfaction, il saisit dans un délai d'un mois, à compter de la
date de notification de la décision contestée, le tribunal
judiciaire compétent du lieu de situation de l'immeuble (...)
». A la lecture de ce texte, on sous entend que la contestation peut
être relative à une absence d'indemnisation, une
sous-évaluation du préjudice, aux ajouts des
bénéficiaires fictifs venant réduire le montant de
l'indemnité à allouer aux expropriés. Ainsi, le juge civil
peut confirmer, réduire ou augmenter le montant de l'indemnité
suivant les modalités d'évaluation textuelles. Dans la
célèbre affaire FOE GORGON, le Tribunal de
Grande Instance de Yaoundé, abondant dans le sens du requérant
qui contestait l'indemnité, lui a attribué une indemnité
supplémentaire en réparation intégrale du préjudice
subi.123(*)
B- Les condamnations pénales à l'encontre de
l'agent administratif fautif
Conformément aux dispositions de l'article 9 de
l'ordonnance de 1972 : alinéa 3, « les tribunaux de droit
commun connaissent, conformément au droit privé, de toute autre
action ou litige même s'il met en cause les personnes morales
énumérés au paragraphe 1 ; la responsabilité
de ladite personne morale étant à l'égard des tiers,
substituée de plein droit à celle de son agent, auteur des
dommages causés, même dans l'exercice de ses
fonctions. » Alinéa 4 « Ils connaissent en outre des
emprises et voies de fait administratives et ordonnent toute mesure pour qu'il
y soit mis fin (...) »
Cette assertion réaffirme l'opinion du Professeur
Devolvé pour qui, « la responsabilité
administrative est presque toujours une responsabilité du fait
d'autrui ».124(*) Une fois qu'un agent de
l'administration s'est personnellement rendu coupable d'action qui porte
atteinte au droit de propriété, sa responsabilité
pénale sera engagée. En vertu de
l'article 8 de l'ordonnance 74-1 du 6 juillet 1974 dispose que :
« 1°Les actes constitutifs, translatifs
ou extinctifs de droits réels immobiliers doivent à
peine de nullité, être établis en la forme notariée
[...].
En outre, les vendeurs, les bailleurs, ainsi
que les notaires et greffiers notaires, auteurs desdits actes sont passibles
d'une amende de 25 000F à 100 000F et d'un emprisonnement de
15 jours à 3ans ou d'une de ces deux peines seulement (...).
3° Les notaires ou
greffiers notaires qui prêtent leur concours aux personnes
susvisés ou qui passent des actes sur les immeubles situés en
dehors du ressort territorial de leur
étude (...) ; ».
Pareillement, l'alinéa 8 de l'article 2 du
décret de 2005 dispose que : « les agents publics
reconnus auteurs ou complices des actes irréguliers ayant
entraînés le retrait ou la constatation de nullité d'un
titre foncier, sont sanctionnés conformément aux dispositions de
l'article 2 de la loi n°80/22 du 14 juillet 1980 portant répression
des atteintes à la propriété foncière et
domaniale ». En vertu de ce texte : « Sont passibles
d'une amende de 50 000 à 200 000F et d'un emprisonnement de 2 mois
à 3 ans, ou de l'une de ces deux peines seulement :
a- Ceux qui exploitent ou se maintiennent sur un
terrain appartenant à autrui [...] b- Les agents
de l'Etat convaincus de complicité dans les transactions
foncières de nature à favoriser l'occupation
irrégulière de la propriété
d'autrui. » Par cet
arsenal répressif, on comprend que certains fonctionnaires et commis de
l'administration en charge de la matière foncière se retrouvent
forcés à passer des séjours dans des maisons
d'arrêt.
Pour clore ce chapitre relatif à la réparation
du préjudice subi par les usagers des services en charge des affaires
foncières, l'on peut dire de manière précise que depuis la
grande reforme opérée en 2005, cette réparation est
constante, mais reste insuffisante.
conclusion generale
En guise de conclusion à nos travaux relatifs à
la faute de l'administration en matière foncière, nous ne faisons
pas un aveu, mais un voeu, la réparation du préjudice subi par
les individus du fait de la faute administrative en droit camerounais est
perfectible. C'est un constat, le droit de propriété n'est pas
intégralement réparé en cas de piétinements
administratifs.
Tout au début de notre travail, nous avons
essayé de mettre en relief la part de responsabilité des
autorités et services administratifs en charge de la matière
foncière, et ceci dans l'optique de vérifier l'état des
droits et l'Etat de droit au Cameroun.
Ce travail s'articulait préalablement autour de la
détermination de la faute administrative en matière
foncière, à travers les caractéristiques et les
manifestations de cette faute, et ceci dans un souci de préciser ces
définitions et contours. Englobe alors notre examen la faute
administrative commise au cours des procédures d'immatriculation d'une
part, et d'autre part commise lors des cessions de propriété,
suivant qu'il s'agisse d'une cession volontaire ou d'une cession forcée.
Nous n'avons eu à aucun moment la prétention de faire un
inventaire exhaustif des déterminants de cette faute , tout au moins,
s'agissait-il des plus apparents, des plus sensibles susceptibles d'engendrer
des conséquences, conséquences dont il a été
ensuite question.
En effet, nous avons présenté les
conséquences des dysfonctionnements administratifs dans la vie des
usagers des services fonciers, tant sur le plan matériel et donc
économique, que moral et affectif. Comme le déclare à
propos un auteur, « la propriété et partant
l'instinct de possession est profondément enraciné dans la nature
des hommes ; le droit à une propriété, stable semble
correspondre à un besoin universel et permanent ».
En conséquence, les manquements
administratifs au cours de l'acquisition et de la cession de
propriété préjudicient aux intérêts des
particuliers. Cet état de chose permet en tout état de cause, la
mise en oeuvre de la responsabilité administrative.
Responsabilité à régime spécial, car somme toute,
l'étendue et l'effectivité de cette responsabilité
obéissent à un régime juridique précis. La
faculté de mettre en oeuvre la responsabilité de l'administration
s'inscrit dans une logique de promotion de l'Etat de droit qui recouvre
fondamentalement deux exigences :
- l'exigence d'un corps de règles
générales, impersonnelles connues et publiées, existant
préalablement à tout conflit et susceptible d'être
invoquées par tout acteur social, qu'il soit ou non en conflit.
- L'obligation pour l'autorité instituante,
essentiellement l'Etat, de se tenir au dispositif ainsi élaboré,
et de se sentir obligé par les normes qu'elle a édicté.
En présence d'une faute administrative, la personne qui
en est victime, a le droit de demander réparation à l'auteur du
forfait, en l'occurrence l'Etat. Or comme il n'existe véritablement pas
de répression à l'encontre de l'administration, comment
contraindrait-on le pouvoir agissant de l'Etat? Cette sanction penchera alors
pour un caractère plus réparateur. Cette réparation est
l'oeuvre, et de l'administration, et du juge. Parce qu'il lui appartient en
premier de trancher une réclamation qui met en prise les particuliers,
on dit qu'elle est en même temps juge et partie, et on doute alors des
garanties accordées aux administrés. Fort heureusement, le juge
administratif, comme le juge judiciaire peuvent intervenir dans cette
réparation, l'un pour appliquer la soumission de l'administration au
droit, et l'autre pour garantir la protection des droits et libertés des
individus.
De ce fait, en matière foncière, la
réforme opérée par le décret n°2005/481 du 16
décembre 2005 vient garantir les individus contre les forfaits
opérés par les agents de l'administration au cours de
l'immatriculation.
Cette réforme, louable en ce qu'elle élargit
textuellement la répression des atteintes aux agents de l'Etat, reste
insuffisante. Insuffisante dans la mesure où elle ne prévoit que
la répression de la faute commise lors des procédures
d'immatriculation, elle aurait pu aller plus loin, et englober toutes les
fautes commises par les structures et fonctionnaires administratifs
impliqués dans des opérations foncières . Mais encore le
régime de la faute est inconnu. S'agit-il de la faute de service ou de
la faute personnelle de l'agent, encore que cette distinction doctrinale est
malaisée du fait de l'imbrication du service et de la vie privée
de l'agent fautif.
En plus, la faute est un concept assez fuyant : s'agit-il
de l'illégalité de l'action administrative ou de
l'anormalité dans son action. Pour dire ainsi que le régime de la
responsabilité administrative en matière foncière n'est
pas d'une évidence première.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'aspect pratique de la
recherche, il s'agit profondément de s'interroger sur
l'efficacité des services du Ministère des domaines dans
l'appréciation et la réparation d'une faute imputable à
leurs organes quand on sait que l'environnement foncier camerounais est
frelaté et se démarque par l'inertie, le laxisme, la corruption,
les abus de pouvoirs et bien d'autres maux. La mise en place d'une cellule
anti-corruption au MINDAF laisse occulter que tout ne sera plus comme
avant ; l'assainissement de la gestion foncière est un
impératif pour la cohésion sociale, la sécurité
juridique et la crédibilité du dispositif
réglementaire.
Dans cette perspective, pour enrayer
l'illégalité administrative, le combat doit se faire sous un
double plan. D'abord en amont, au niveau des administrations en charge de la
matière foncière, il faudrait qu'il y ait une redéfinition
de la notion de service public. La bonne gouvernance oblige en effet que les
commis de l'Etat redécouvrent la notion de service public et les valeurs
qui lui sont associées notamment, l'honnêteté, la
distinction des sphères privée et publique, le droit accompli et
le service rendu.
Ensuite en aval, au niveau des usagers, des citoyens qui
doivent être associés à l'organisation fonctionnelle du
service public. Cela entraîne une sensibilisation des usagers qui
prennent conscience de leurs droits.
L'ignorance constitue au fond la première atteinte du
droit de propriété. Enlever l'ornière de yeux de l'usager,
c'est le remettre dans la course, et partant le faire participer dans le
processus de développement, dont la terre constitue un des piliers au
Cameroun.
ANNEXES
Annexe 1- Exemplaire du questionnaire utilisé
au cours des enquêtes.
Annexe 2- Extraits du Bulletin d'information Domaines
Infos
QUESTIONNAIRE AU COURS DES ENQUETES
1) Qu'entend-on par faute administrative en matière
foncière ?
2) Comment se manifeste-t-elle en matière
foncière ?
3) Quelle est la reaction des services du MINDAF face à
une faute commise par un de ses organes ?
4) Quelles garanties l'administration foncière accorde aux
victimes des fautes administratives ?
5) Comment éviter la faute en matière
foncière ?
INDEX ALPHABETIQUE
A
Abus d'autorité, 13, 64, 87, 90, 94
Abus de pouvoir, 13, 64, 87, 90, 94
Acquisition, 5, 28, 38, 48,, 56, 69, 72, 85
Acte administratif, 24, 85, 89
Administration, 5,15, 21, 39, 45, 50, 59, 66, 83, 90,
Affaire foncière, 6, 13, 30, 39, 40, 58, 77, 86, 94
Annulation, 6, 58, 85, 89,
Autorité administrative, 13, 28, 42, 58, 63, 77, 85,
90
B
Bornage, 35, 43, 49, 60
C
Cadastre, 29, 31, 44, 60
Cameroun, 9,31, 45,53, 61, 87, 95
Commission consultative, 18, 30,45, 51, 64, 85,
Commission d'évaluation, 18, 23, 29, 37, 42,51, 64, 85,
92
Compétence, 29, 36, 42, 53, 86,
Concession, 28, 48, 55,
Conséquences, 5, 11, 24, 44, 67, 78,
Conservation foncière, 27, 33
Contentieux, 13, 22, 42, 61, 69
Corruption, 94,
Cour suprême, 64, 96
D
Degré de gravité, 17, 23
Délégation départementale, 31, 41
Délégation provinciale, 35
Dépossession, 66, 74, 81
Détournement, 62, 86, 94
Dol, 18, 78
Domaine national 27, 35, 41, 53
Domaine privé de l'Etat, 35, 87
Dommages, 12, 20, 72, 79, 91
Droit de propriété, 12, 39, 60, 69, 75,80, 96
E
Emprise, 40, 47, 74
Enquête préalable, 62, 65
Erreur, 17, 24, 43, 46
Expropriation pour cause d'utilité publique, 13, 27,36,
57, 69, 74, 80, 86
F
Faute, 5, 20,26, 37, 46, 49, 57, 64, 70,,80, 89, 96
Fraude, 53
G
Gouverneur, 94
I
Illégalités, 82, 85
Immatriculation, 13, 27, 40, 47, 50, 56, 60, 78, 86, 94,
97,
Immeuble, 12, 28, 41, 51, 61, 72, 80, 85
Incidences, 17, 19, 24, 74
Indemnisation, 61, 67, 88
Infraction, 18
Irrégularités, 46, 49, 52, 55, 62, 67, 75, 80
J
Juge administratif, 20, 37, 57, 64, 75, 85,, 96,
Juge civil, 20, 37, 57, 64, 75, 85, 91,
Juge judiciaire, 20, 37, 57, 64, 69, 75, 85, , 91, 97
Juge pénal, 20, 24, 37, 57, 64, 75, 85, 90,
L
Litige foncier, 64, 88
M
Manquements administratifs, 38, 55, 61
Matière foncière, 5, 15, 30, 40, 45, 60, 70, 79,
84,90, 96
Ministère, 6, 27, 31, 33, 51, 93, 94, 95, 96,
Ministre, 28, 29, 30, 51, 54, 63, 64, 68, 78, 85, 87, 88, 90,
93, 94, 95
Mise en valeur, 29, 32, 40, 42, 43, 44, 49, 51, 52, 55, 64
Morcellement, 57, 58, 59, 60
Mutation, 57, 58, 59, 60
N
Notaire, 57,59
Nullité, 43, 57
O
Opposition, 44, 60, 86
Ordre public, 58
P
Préfet 29, 41,51, 55, 85, 90
Préjudice, 6, 19, 66, 71, 88, 92,
Procédure d'expropriation, 13, 27, 36, 45, 50, 65, 74,
75, 80, 86
Procédure d'immatriculation, 13, 27, 36, 52, 74, 80,
87
Propriété, 5, 12, 27, 35, 39, 46, 50, 61, 70,
75, 80, 85
Puissance publique, 11, 12, 22, 24, 25, 83, 84, 90
R
Recours gracieux, 100, 110
Réforme, 9, 101, 117
Réparation, 6, 12, 21, 25, 66, 72, 91, 97
Répression, 10,
Responsabilité, 1, 15, 20, 25, 46, 71, 83, 90, 96,
Retrait du titre foncier, 33, 78, 87
Rétrocession, 68
S
Sanction, 5, 13, 88
Sécurité juridique, 82
Services administratifs, 10, 29, 40
T
Titre foncier définitif, 6, 30, 40, 50, 60, 68, 79, 80
- inattaquable, 6, 30, 50, 57 , 68, 75,
- intangible, 6, 30, 40, 57, 68, 75, 80
Tribunal, 20, 43, 91
V
Vente, 49, 58, 79 Violation, 16, 24, 42, 53,
58, 85, 89
Voie de fait, 26, 81
BIBLIOGRAPHIE
I- LEGISLATION
· LOI n°80/22 du 14 juillet 1980, portant
répression des atteintes à la propriété
foncière et domaniale au Cameroun
· LOI n°85/9 du 04 juillet 1985, modifiant et
complétant certaines dispositions de l'ordonnance n°74/3 du 06
juillet 1974, relative à l'expropriation pour cause d'utilité
publique et aux modalités d'indemnisation au Cameroun
· Ordonnance n°74/1 du 06 juillet 1974, fixant le
régime foncier au Cameroun
· Ordonnance n°74/2 du 06 juillet 1974, fixant le
régime domanial au Cameroun
· Ordonnance n°74/3 du 06 juillet 1974, relative
à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité
publique et aux modalités d'indemnisation
· Décret n°76/165 du 27 avril 1976, fixant
les conditions d'obtention du titre foncier au Cameroun
· Décret n°76/166 du 27 avril 1976 fixant
les modalités de gestion du domaine national
· Décret n°76/167 du 27 avril 1976 fixant
les modalités de gestion du domaine privé de l'Etat
· Décret n°79/017 du 13 Janvier 1979, relatif
aux transactions immobilières privées au Cameroun
· Décret n°84-311 du 22 Mai 1984, portant
modalités d'application de la loi n°80- 22 du 14 Juillet 1980
· Décret n°2005/178 du 27 mai 2005, portant
organisation du Ministère des Domaines et des Affaires Foncières
(MINDAF)
· Décret n°2005/481 du 16 décembre
2005, modifiant et complétant certaines dispositions du secret
n°76/ 165 du 27 avril 1976, fixant les conditions d'obtention du titre
foncier
II- OUVRAGES
1- DEBBASCH (Ch.), Institutions et Droit administratifs /
l'action et le contrôle de l'administration, éd. PUF,
Paris, coll. Thémis Droit, 687 p.
2- KAMTO (M.), Droit administratif processuel du cameroun.
(Que faire en cas de litiges avec l'administration), éd. PUC, coll.
sciences juridiques et politiques, 1990.
3- KOUASSIGAN (G.A.), L'homme et la terre : droits
fonciers coutumiers et droit de propriété en Afrique
Occidentale, ORSTOM, éd. Berger- Levrault, Paris, 1966.
4- MANDESSI BELL (E.), Droit foncier au Cameroun, aspects
théorique et pratique, ouvrage dactylographié, 1985, Tome1, 335
p.
5- MELONE (S.), La parenté et la terre dans la
stratégie de développement, l'expérience camerounaise,
étude critique, éd, Klincksiek Paris, 1972, 191 p.
6- NYAMA (J.-M.), Régime foncier et domanialité
publique au Cameroun, éd. Presses de L'UCAC, Yaoundé, 2001, 481
p.
7- OWONA (J.), Droit administratif spécial de la
République du Cameroun, éd. EDICEF, Yaoundé, 1985, 256
p.
8- STRUILLOU (J.-F.), Protection de la propriété
privée immobilière et prérogatives de puissance publique,
éd. L'Harmattan, Paris, France 1996, 523 p.
9- TCHIENTCHEU NJIAKO (A.) :
n Droits fonciers urbains au Cameroun, éd. PUA,
Yaoundé 2003, 546p.
n Droits réels et domaine national au Cameroun, éd.
PUA,
Yaoundé, 2005,
486p.
10- TERRE (F.), SIMLER (PH), & LEQUETTE (Y.), Droit civil,
les obligations, éd. Dalloz 9e Paris, 2005.
11- TJOUEN (A.-D.), Droits domaniaux et techniques
foncières en droit camerounais, (étude d'une réforme
législative), éd. Economica, Paris, 1982, 204 p.
III- THESES ET MEMOIRES
A- THESES :
1. GASSE Victor, Le droit foncier outremer et son
évolution depuis l'indépendance, Thèse de doctorat en
droit, Université d'Aix Marseille, 1968.
2. KALA Benoît, Terre et pouvoir sur les plateaux
Bamiléké de l'Ouest Cameroun, (prolégomènes
à une étude critique de l'étatisation et de
l'appropriation privée de la terre au Cameroun), Thèse de
doctorat en sociologie, Institut Catholique de Paris, 1995
3. MPESSA Aloys, Essai sur la notion de régime
juridique des biens domaniaux au Cameroun, Thèse de doctorat en
droit, Université de Paris I - Panthéon Sorbonne, 29 juin 1998,
t.1et 2.
4. POUGOUE Paul -Gérard, La famille et la
terre : Essai de contribution à la systématisation du
droit privé au Cameroun, Thèse de doctorat d'État,
Université de Bordeaux I, juin 1977.
B- MEMOIRES
1- ABESSOLO (J-C.), La maîtrise des problèmes
fonciers et domaniaux au Cameroun, mémoire de maîtrise en droit
privé, Université de Yaoundé 1985-1986.
2- BATJE BATJE (C.G.), Les nouvelles administrations
foncières et domaniales face au public, Université de
Yaoundé 1977-1978.
3- MENZEKO KAGHO (C.), Le contentieux foncier, mémoire
de DEA, Université de Yaoundé II, Soa 2002-2003.
4- NGNANGA EDINGUELE Thomas, La protection de la
propriété privée par le juge judiciaire au Cameroun,
mémoire de fin de formation, ENAM, 1996
5- NGONO (M.), L'expropriation pour cause d'utilité
publique en droit camerounais, Université de Yaoundé
1987-1988.
6- NYETAM (PH.), Les litiges fonciers en droit camerounais,
mémoire en droit privé, Université de Yaoundé,
1989-1990.
7- OWONA MANY (G.B.), L'état actuel du contentieux de
l'immatriculation en droit camerounais, mémoire de DEA,
Université de Yaoundé II Soa, 2003- 2004
8- SANDJI (R.), La répression des atteintes à la
propriété domaniale (domaine public, domaine privé de
l'Etat, domaine national), mémoire de maîtrise en droit,
Université de Yaoundé, 1991.
9- SOMBOU (B.), Le juge et la protection de la
propriété privée immobilière en droit camerounais,
mémoire de maîtrise en droit privé, Université de
Yaoundé, 1991
10- TCHAPMEGNI Robinson, L'occupation sans droit d'un immeuble
en droit positif camerounais, mémoire de maîtrise,
Université de Ngaoundéré, 2001.
- La détribalisation du régime foncier
camerounais, mémoire de DUDF 3e cycle, droits fondamentaux,
Université de Nantes, 2003.
IV- ARTICLES DE DOCTRINE
1- ABA'A OYONO (J.C.), « Expropriation pour cause
d'utilité publique », in Juridis périodique, n° 32
octobre-novembre-decembre 1997, pp 29-38.
2- BILLONG Simon Pierre, « Le contentieux de
l'annulation du titre foncier devant le juge administratif »,
communication lors de la conférence sur le foncier sur le
thème : La problématique de la propriété
foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo, 18 nov. 2005,
disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais
/documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au
cameroun.pdf.
3- DRAGO (R.), « Responsabilité (principes
généraux de la) », in Répertoire de la
responsabilité de la puissance publique (RRPP), Dalloz, septembre 1999
7pp.
4- DUBOIS (J.P.), « Faute des agents et
responsabilité administrative » in RRPP, Dalloz, janvier2003,
12pp.
5- ENCYCLOPEDIE DALLOZ : Répertoire de la
responsabilité de la puissance publique, Dalloz, Paris, cop.2003,
pagination multiple.
6- FANSI Paul Marcelin, « La situation juridique
des occupations du domaine national», conférence sur le foncier,
thème : La problématique de la propriété
foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005,
disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais
/documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au
cameroun.pdf.
7- GOUR (C.), « Faute de service » in
Répertoire de la responsabilité de la puissance publique (RRPP).
Dalloz.
8- LEMASURIER (J.), « la cacophonie juridique du
contentieux de l'expropriation » in Mélanges en hommage
à Roland DRAGO, l'unité du droit, Economica, 1996, 503pp,
pp427-445.
9- MANDESSI BELL Evelyn, « Radioscopie d'un
système foncier africain: l'exemple du Cameroun cinquante ans
après ». Penant, mai-juin 1987, p. 286.
10- MBUNJA (Y.), « La protection de la
propriété immobilière privée par le juge
civil », conférence sur le foncier, thème : La
problématique de la propriété foncière au Cameroun,
hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005, disponible sur le site web
(www.environnement-propriete.org. /francais /documentation /doc/ la
problématique de la propriete_fonciere_au cameroun.pdf. )
11- MPESSA (A.), « Le titre foncier devant le juge
administratif camerounais » in Juridis périodique N°59
juillet- août - septembre 2001, pp.77-90.
12- NDZUENKEU (A), « L'efficacité de la
répression des atteintes à la propriété
foncière et domaniale », conférence sur le foncier,
thème : La problématique de la propriété
foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005,
disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais
/documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au
cameroun.pdf.)
13- OWONA (J.), « l'expropriation pour
cause d'utilité publique », Chapitre XVI, Tome V de
l'encyclopédie juridique de l'Afrique, N.E.A.
14- PAULIAT Hélène, « Le droit de
propriété devant le conseil constitutionnel et la Cour
européenne des droits de l'homme », Revue de droit
public, 1995, p. 1445.
15- PETTITI Christophe, « La réparation des
atteintes au droit de propriété : l'application de l'article
41 de la C.E.D.H. » in La protection du droit de propriété
par la Cour européenne des droits de l'homme, Bruxelles, Bruylant,
2005.
16- POUGOUE (P.-G.), « Le régime foncier de
l'immatriculation », Encyclopédie juridique de l'Afrique,
Abidjan, t.5, Les nouvelles éditions africaines, 1982.
17- PROUZET (M.), l'expropriation pour cause d'utilité
publique au Cameroun, RCD N°1 1972, pp.27-33.
18- RADE (C.), « L'impossible divorce de la faute et
de la responsabilité civile », in recueil Dalloz 1998,
32e cahier, chron. pp.301-305.
19- ROBERGE (D.), « La protection des droits
fonciers, facteur-clé du développement durable. L'exemple du
Québec », article mis en ligne sur :
http://www.topoepfl.ch/Mocours/siteweb/FG/ROBERGE.pdf.
20- ROCHEGUDE (A.), « Fonciers et
décentralisation : réconcilier la légalité et
la légitimité des pouvoirs domaniaux et fonciers », in
bulletin de liaison du LAJP N°26 septembre 2001.
21- TAGOUEMEKONG Honoré, « Le contentieux
d'annulation du titre foncier », conférence sur le foncier.
Thème : La problématique de la propriété
foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov. 2005,
disponible sur le site web (www.environnement- propriete.org. /francais
/documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au
cameroun.pdf.
22- TCHAPMEGNI Robinson :
· « La logique foncière
environnementale de l'État camerounais », in Les ressources
foncières. Droits de propriété, Économie et
environnement, VIe conférence internationale Aix en Provence,
Université Paul Cézanne, 26, 27, 28 juin 2006, sous la direction
de Max FALQUE, Henri LAMOTTE, Jean François SAGLIO, Bruylant, 2007,
pp.545-559.
· « L'actualité de la question
foncière en Afrique », conférence sur le foncier,
thème : La problématique de la propriété
foncière au Cameroun, hôtel de ville de Mbalmayo 18 nov.2005,
disponible sur le site web (www.environnement-propriete.org. /francais
/documentation /doc/ la problematique de la propriete_fonciere_au
cameroun.pdf).
· « La réforme de la
propriété foncière au Cameroun », communication
présentée au cours du Géo congrès 2007 tenu
à Québec du 03 au 05 octobre 2007, disponible sur le site web (
www.quebec2007.ca).
· « La situation de la propriété
foncière au Cameroun : obstacles, conséquences et
perspectives », communication présentée à la
session de la commission du groupe du travail de la fédération
internationale des géomètres à Québec, le 02
octobre 2007, disponible sur le site web (
www.quebec2007.ca)
· « L'organisation juridique de la
propriété foncière au Cameroun », in EBERHARD
Christoph, Law, land use and environment: Afro-Indian dialogues - Enjeux
fonciers et environnementaux : Dialogues Afro indiens, Institut
Français de Pondichéry, (Collection sciences sociales, n°
13), 2008, pp.219-232.
23- TIXIER (G.), « les limites de la
compétence de l'autorité judiciaire en matière
d'expropriation pour cause d'utilité publique » in recueil
Dalloz, 195-, 28e cahier, chron. XX, pp103-108.
VI- LEXIQUES- OUVRAGES
METHODOLOGIQUES
A- Lexiques :
a. Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 11 éd.
1998, 567 p.
b. Vocabulaire Juridique, CORNU (G.), Association Henry
CAPITANT, Paris, PUF, Quadrige, 4éd. 2003, 951pp
c. Dictionnaire Universel, 4éd. Hachette, Edicef
2002.
B- Ouvrage méthodologique :
- Beaud (M.), L'art de la thèse, Paris, La
découverte, 2001, 200pp.
Table des matieres
Pages
AVERTISSEMENT...............................................................................I
DEDICACE.........................................................................................II
REMERCIEMENTS..............................................................................III
LISTE DES
ABREVIATIONS..................................................................IV
SOMMAIRE.........................................................................................V
RESUME..............................................................................................VI
ABSTRACT..........................................................................................VII
INTRODUCTION
GENERALE...................................................................1
TITRE 1 : LA DETERMINATION DE
LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIERE FONCIERE
6
CHAPITRE 1: LA PARTICULARITE DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE
EN MATIERE
FONCIERE..............................................................................7
SECTION1 : LES
CARACTÉRISTIQUES DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE
7
Paragraphe 1 : La faute civile et
la faute administrative
8
A - La notion de faute
8
B - La typologie de fautes en droit
civil
9
Paragraphe 2 : La singularité
de la faute administrative
11
A - Le rattachement au service : la
qualification de faute de service ou de faute personnelle
11
1 - Notion et contours de la faute
personnelle
12
2 - La faute de service
13
B - L'implication du degré de
gravité dans la faute
15
1 - L'erreur et la faute simple
15
2 -La qualification de faute lourde
16
SECTION 2 : L'IDENTIFICATION DES
STRUCTURES ADMINISTRATIVES MISES EN CAUSE DANS LA FAUTE EN MATIERE
FONCIERE
18
Paragraphe 1 : Les intervenants
administratifs directement mis en cause
19
A- Les chefs d'unités
administratives
19
1- Le rôle du Gouverneur ou du
préfet en matière foncière
19
2- L'implication du
Sous-préfet ou du Chef de district
20
B- Les structures administratives
ad-hoc
20
1- La commission consultative
21
2-- La commission d'évaluation
22
3- La conservation foncière
23
Paragraphe 2 : L'implication des
structures déconcentrées et de tutelle.
24
A- La délégation
départementale des domaines et des affaires foncières
24
1 - Le service départemental des
affaires foncières
24
2 - Le service départemental des
domaines
25
3 - Le service départemental du
cadastre
25
B - La Délégation
provinciale des domaines et des affaires foncières
26
SECTION 1 : LA FAUTE COMMISE PENDANT
L'ACQUISITION DE LA PROPRIÉTÉ IMMOBILIÈRE
29
Paragraphe 1 : L'immatriculation des
terres de la première dépendance du domaine national.
30
A- Les dysfonctionnements des services
administratifs au cours des phases préalables à
l'immatriculation.
31
B - Les dysfonctionnements liés aux
formalités d'établissement et de délivrance du titre
foncier
35
1- La nature des manquements du
conservateur foncier
36
2- Les faits susceptibles d'être
considérés comme fautes du conservateur.
36
Paragraphe 2 : La faute
administrative lors de l'acquisition des terres libre de toute occupation
effective
38
A- Les dysfonctionnements administratifs
au cours de l'octroi des concessions provisoires
39
1- Le formalisme procédural
relatif à la concession provisoire
40
2- Les irrégularités
commises par le concédant administratif
41
B - Les fautes issues de l'attribution des
concessions définitives
43
1- Les données préalables
à la transformation.
43
2 - Les manquements administratifs
constatés
44
SECTION 2 : LA FAUTE ADMINISTRATIVE
COMMISE LORS DE LA CESSION DE PROPRIÉTÉ
45
Paragraphe 1 : La faute
administrative lors des opérations de cession volontaire de
propriété entre particuliers.
45
A - Le nécessaire implication du
notaire dans les opérations de cessions foncières
46
B- La faute administrative en cas de
démembrement d'immeuble
47
Paragraphe 2: Les manquements administratifs au cours
de la procedure d'expropriation pour cause d'utilité publique
.................................................50
A- Les fautes commises lors des
formalités préalables à l'expropriation
50
1- L'illégalité de l'action
administrative lors du déclenchement de la procédure
51
2- La faute administrative au cours de
l'enquête préalable
52
B - Les dysfonctionnements administratifs
à l'issue du transfert de propriété
53
1 - L'absence d'indemnisation
préalable
54
2 - La non utilisation des terrains
expropriés dans les délais
55
CONCLUSION AU TITRE I
58
TITRE II: LES CONSEQUENCES ET LA SANCTION
DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE
59
CHAPITRE 1 : LES CONSEQUENCES DE LA FAUTE
ET LA RESPONSABILITE DE L'ADMINISTTRATION
60
SECTION1 : LES
CONSÉQUENCES DOMMAGEABLES DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE EN MATIÈRE
FONCIÈRE
61
Paragraphe 1 : Les conséquences
d'une immatriculation fautive du chef de l'administration
61
A- Les conséquences
matérielles de la faute dans l'immatriculation
62
B - La fragilisation de la force probante
du titre foncier
64
Paragraphe 2 : Les conséquences
de la faute administrative dans la procédure d'expropriation.
66
A - La dépossession
illégitime du droit de propriété
67
B - L'insécurité juridique
résultant de l'atteinte au droit de propriété
68
SECTION 2 : LA RESPONSABILITÉ
ADMINISTRATIVE DU FAIT DE SES ACTES FAUTIFS EN MATIÈRE
FONCIÈRE
69
Paragraphe 2: L'etendue de la
responsabilité administrative en matiere
fonciere.............................................................................70
A- Les cas d'ouverture de la
responsabilité administrative
70
1- L'incompétence
70
2 - Le détournement de pouvoir.
71
B - L'imputabilité de la faute dans
la mise en oeuvre de la responsabilité administrative
74
1 - La faute personnelle et la
responsabilité personnelle de l'agent administratif.
74
2 - La faute de service et la
responsabilité de l'Etat
75
3 - La complexité de la distinction
et enchevêtrement des responsabilités
76
Paragraphe 2 : La
réalité de la responsabilité administrative en
matière foncière au Cameroun
77
A- La réaction administrative face
à la faute commise
77
B- La réaction juridictionnelle
face à la faute administrative
80
CHAPITRE 2 : LA RÉPARATION DU
PRÉJUDICE SUBI PAR LA VICTIME DE LA FAUTE ADMINISTRATIVE.
83
SECTION 1 : LA RÉPARATION DU
PRÉJUDICE SUBI PAR VOIE ADMINISTRATIVE.
84
Paragraphe 1 : Les mesures
administratives palliatives de l'immatriculation fautive
84
A- L'anéantissement du titre
foncier
84
1- Le retrait ministériel des titres
fonciers irrégulièrement délivrés
85
2 - L'annulation ministérielle du
titre foncier irrégulièrement délivré
86
B - Les conséquences de
l'anéantissement administratif du titre foncier
87
Paragraphe2 : La réparation
administrative d'une expropriation fautive
88
A- Les mesures palliatives d'une
expropriation fautive
88
B- Le plaidoyer pour une
consécration législative de la rétrocession
89
SECTION 2 : LA RÉPARATION PAR
VOIE JURIDICTIONNELLE
90
Paragraphe 1 : La réparation du
préjudice par le juge administratif
90
A - L'annulation des actes faisant
grief
91
B- Les conséquences de l'annulation
juridictionnelle
92
Paragraphe 2 : L'intervention du juge
judiciaire dans la réparation du préjudice en matière
foncière
93
A- Le juge civil, juge des dommages et
intérêts
93
B- Les condamnations pénales
à l'encontre de l'agent administratif fautif
94
CONCLUSION
GENERALE....................................................................96
* 1 Comme le disait un
élu local de l'Etat camerounais, « la plupart des
conflits ont pour origine la terre ; ils [les conflits] sont
légions, sanglants, et mortels ».
* 2 Robinson TCHAPMEGNI,
« La réforme de la propriété
foncière au Cameroun », communication
présentée au cours du Géo congrès 2007 tenu
à Québec du 03 au 05 octobre 2007, disponible sur le site web (
www.quebec2007.ca).
p.20
* 3 Guy Adjeté
KOUASSIGAN, L'homme et la terre, éd. Berger-Levrault, 1966,
p.8
* 4 François- Xavier
MBOME, Mémentos de droit administratif, 1éd. Ydé,
Cameroun, 1970, p.2
* 5 Christophe RADE,
« l'impossible divorce de la faute et de la responsabilité
civile » in recueil Dalloz 1998, 32 cahier. Chronique,
pp302-305.
* 6 P. LE TOURNEAU,
Responsabilité (en général) in
Encyclopédie Dalloz 2001, p.11
* 7 H&L MAZEAUD,
Traité théorique et pratique de la responsabilité
civile délictuelle et contractuelle, préface H Capitant,
tome 1.6éd.Montchrestien, p.16
* 8 P. Devolvé, La
responsabilité du fait d'autrui en Droit Administratif, in
Mélanges Marty, 1978, p.407
* 9 TC, 08 février 1973,
Dalloz 1873.3.17, concl. David
* 10 Claude EMERI, De la
responsabilité de l'administration à l'égard de ses
collaborateurs, LGDJ. Paris, 1966, p.2
* 11 Pascale BERTONI,
L'évolution du droit de la responsabilité : limitation ou
préservation de la souveraineté, in les petites affiches 24
Décembre 1993 n°154 p.11
* 12 Paul
MATHIEU, « La sécurisation foncière, entre
compromis et conflits », Cahiers Africains n°23-24, Paris,
L'Harmattan 1996, p.28.
* 13 Les articles 1382 et
suivants du Code civil qui constituent les textes de base de la
responsabilité civile délictuelle, énoncent de
manière expresse que la faute est la condition de mise en oeuvre de la
responsabilité, soit du fait personnel, soit du fait d'autrui, ou des
choses que l'on a sous sa garde, mais ne donnent malheureusement pas la
définition de la notion de faute. Le mérite revient donc certains
auteurs français d'avoir essayé de conceptualiser les
significations de la faute.
* 14 La faiblesse souvent
relevée de cette définition est qu'elle répond à la
question par la question. Il s'agit de savoir en quoi constitue l'obligation
préexistante, qui elle aussi soulève une autre ; V. FLOUR,
AUBERT & SAVAUX, Les Obligations, le fait juridique 2001
,9e ed. Armand Colin n°98 : « on tourne en
rond : encore faut-il avoir défini cette obligation
préexistante ».
* 15 Gérard Cornu,
Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 4e ed
QUADRIGE|PUF pp 388 à 390
* 16 Le standard du bon
père de famille reflète en doctrine le modèle de l'homme
« droit et sûr de ses actes » selon
Gény ; un homme « prudent et
diligent » selon Capitant & Colin ;
« honnête et adroit » d'après Ripert
et Boulanger, « prudent et avisé » selon H
et L Mazeaud. De même, dans la Common Law, le prototype du bon
père de famille serait comparable au modèle
du « reasonnable man »
* 17 V. Lexique des termes
juridiques 11e éd. Dalloz, p. 300
* 18 Le dol s'entend en
matière civile comme toute « manoeuvre frauduleuse
ayant pour objet de tromper l'une des parties à un acte juridique en vu
d'obtenir son consentement » ; en droit pénal, le
dol est l' « attitude psychologique du délinquant
consistant de sa part à avoir voulu commettre
l'infraction » ; en fait le tout réside dans
l'intention de l'auteur de la faute.
* 19 V. F. Terré, Ph.
Simler &Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, 9e
éd. Dalloz, Paris pp 559 à 565.
* 20 V. Terré, Simler,
Lequette, op. cit.
* 21 V. supra
* 22 En 1873, l
'autorité militaire a fait saisir, en vertu des pouvoirs qu'elle exerce
en état de siège, le premier numéro d'un journal dont la
publication avait été entreprise par le sieur Pelletier. Ce
dernier porta l'action devant le tribunal de Senlis, juridiction de l'ordre
judiciaire, pour faire déclarer arbitraire et illégale, nulle et
de nul effet la décision administrative ; et donc, la restitution
des exemplaires du journal saisi, et la condamnation des défendeurs
notamment, le Général LADMIRAULT, commandant de l'état de
siège, le Préfet du département M.Choppin et M.Leudot,
Commissaire de police, à payer des dommages intérêts
s'élevant à 2000F Français.
Le Tribunal de Conflit décida que l'interdiction et la
saisie du journal appartenant au sieur Pelletier, et ordonnées par le
Général LADMIRAULT, constituent une mesure préventive de
haute police, et parce que la demande de Pelletier se fonde exclusivement sur
cet acte de haute police administrative, et qu'en dehors de cet acte, il
n'impute aux défendeurs, aucun fait personnel de nature à engager
leur responsabilité personnelle et particulière, le Tribunal de
Senlis étant incompétent pour connaître la demande de
sieur Pelletier.
TC 30 juillet1873, PELLETIER, Rec.1er suppl.117,
concl. David D.1873.3.5.
* 23 T C 05 Mai 1877, Rec. p.
437
* 24 V. Claude GOUR, faute
de service in Répertoire de la Responsabilité de la Puissance
Publique ( RRPP), Dalloz, Paris, p.18 .
* 25CS/CA, jugement n°45
du 27 mai 1982, DZIETHAM Pierre c/ Etat du Cameroun: dans l'espèce, la
voie publique défectueuse a causé un dommage au sieur Dzietham,
inédit ;
Également, CS/CA, jugement n°13 du 23 novembre 1989,
ENYENGUE DIPOKO Bernard c/ Etat du Cameroun, inédit.
* 26 Claude GOUR op. cit.
* 27 CE 05 février 1935
Rec. p 160
* 28 V. la dualité
faute de service - faute personnelle de l'agent, responsabilité
administrative p.
* 29 Jur. Gen. V°
Responsabilité, suppl. n°15, 1895, n°396
* 30 CE 10 février
1905, Rec. 139, concl. ROMIEU, D.P. 1906, 381 ; S.1905.3.113, note
HAURIOU. Dans cette espèce, suite à la panique causée par
un taureau s'étant échappé, et sa poursuite par la foule,
un coup de feu fut tiré et blessa le sieur Tomaso Gréco à
l'intérieur de sa maison. Ce dernier demanda réparation à
l'Etat au motif que le service de police a été défaillant
et commis une faute en n'assurant pas l'ordre. L'Etat du droit, et donc le
Conseil d'état n'accordaient à l'époque aucune
réparation au requérant car « l'Etat n'est pas, en
tant que puissance publique, et notamment en ce qui touche les mesures de
police, responsable de la négligence de ses agents ». Le
commissaire de gouvernement ROMIEU proposa alors d'étendre à ce
service-la police-le principe selon lequel la puissance publique doit
être déclarée pécuniairement responsable des fautes
de service commises par ses agents, et ceci, s'il existe une faute
caractérisée de service , notamment la faute lourde.
* 31 C.E 12 février 1947
Minvielle Rec., p.428
* 32 C.E 20 juin 1973, Commune
de Châteauneuf-sur-Loire, Rec. p.428
* 33 V. Claude Gour, La
faute de service in Encyclopédie Dalloz Répertoire de la
Responsabilité de la puissance publique (RRPP) p.29 para 310. V.
J-F Couzinet : La notion de faute lourde administrative R.D.P. 1977. 283
Jeanne Lemasurier note sous C.E 21 Décembre 1962 Dame HUSSON D. 1963.
588
* 34 Claude Gour, op. cit.
* 35 V. infra. Chapitre2 Les
manifestations de la faute dans l'immatriculation et l'expropriation pour cause
d'utilité publique.
* 36 Que ce soit dans la
procédure d'immatriculation directe, c'est-à-dire
l'immatriculation des terres exploitées ou occupées, des terres
de la 1ere dépendance ou même dans l'immatriculation indirecte,
notamment à travers la procédure de concession qui est
l'acquisition des terres de la 2ème dépendance, c'est
le Préfet, chef de département du lieu de situation de l'immeuble
qui prend un arrêté fixant composition de la commission
consultative.
* 37 Conformément aux
dispositions du décret n°87/1872 du 16 Décembre 1987,
modifiant et complétant la loi n°85/09 du 04 juillet 1985, la
commission de constat et évaluation de l'expropriation s'étend
sur trois niveaux : départemental, provincial et national. De ce
fait, aux niveaux provincial et national, ce sont respectivement, les
gouverneurs ou leurs représentants, et le ministre chargé des
domaines ou son représentant qui officient en qualité de
président de ladite commission. Il reste alors que c'est seulement au
niveau départemental que le préfet sera compétent en
qualité de président de la commission de constat et
évaluation.
* 38 S'agissant du
représentant du ministre, son intervention apparaît lorsqu'il
s'agit d'une concession donc l'immatriculation des terres libres de toute
occupation et qui ne s'acquièrent que par attribution de concession
provisoire lorsqu'un projet existe.
* 39 Christophe YOSSA, les
commissions consultatives dans le régime foncier camerounais,
mémoire de licence en droit, UY 1976-1977 P.19
* 40 V. infra organisation et
fonctionnement de la délégation
* 41 Art.35 nouveau du
décret n°2005/481 du 16 décembre
2005 : « chaque cas d'immatriculation donne lieu
à l'établissement par le conservateur foncier d'un titre foncier
[...] »
* 42 Art. 17 à 19 du
décret précité.
* 43 Le service de la
conservation foncière a fait l'objet d'un examen particulier au vu de
l'importance et du rôle accru du conservateur foncier dans les
opérations foncières à la suite des décrets de
2005, notamment, le décret n°2007/178 du 27 mai 2005 et celui
n°2005/481 du 16 décembre 2005.
* 44 Droits fonciers urbains
au Cameroun, Tientcheu Njiako André pp42 et ss. Monsieur Tientcheu
dans cet ouvrage fait une étude approfondie et détaillée
sur le cadastre au Cameroun, en y rappelant l'historique et l'origine, la
typologie du cadastre, de même que de l'élaboration et la
réalisation du cadastre au Cameroun.
* 45 Lire art 94 du
décret du 27 mai 2005
* 46 De manière
détaillée, v.dispositions de l'article 96 du décret.
* 47 Alexandre-
Dieudonné TJOUEN, Droits Domaniaux et Techniques Foncières en
Droit Camerounais : étude d'une reforme législative
paris, Economica, 1982
* 48 L'article 14
alinéa2 dispose: « ne sont pas incluses dans le
domaine national, les terres faisant l'objet d'un droit de
propriété telle que défini à l'article 2
ci-dessus ». De cette énonciation, à la lecture de
l'article 2, « font l'objet d'un droit de propriété
privée, les énumérées
ci-après :
a) les terres immatriculées ;
b) les freeholds lands ;
c) les terres acquises sous le régime de la
transcription ;
d) les concessions domaniales
définitives ;
e) les terres consignées au registre du
Grundbuch »
* 49 Cf. article 15 de
l'ord.74-1, selon lequel : «les dépendances du domaine
national sont classées en 2 catégories :
1. les terrains d'habitations, les terres de cultures, de
plantation, de pâturage, et de parcours dont l'occupation se traduit par
une emprise évidente de l'homme sur la terre et une mise en valeur
probante.
2. les terres libres de toute occupation
effective. »
* 50 CS/CA, jugement. n°64
du 30 août 1990, inédit.
* 51 Cf. article 13
alinéa 1 du décret 2005 « dès
réception du dossier, le délégué
départemental des affaires foncières fait publier dans les quinze
(15) jours, par le chef service départemental des affaires
foncières, un extrait de la demande par voie d'affichage dans les locaux
du service de la sous-préfecture, du district, de la mairie, et de la
chefferie du village concerné »
* 52 CS/CA jugement n°29
du 25 mars 1982 BEYISSA Adolphe Mazarin c/ Etat du Cameroun ,
« Attendu que la commission consultative a statué le 11
Novembre 1977 avait dépassé le nombre de représentants de
la collectivité en ajoutant le chef supérieur, membre non
prévu par le texte [...] que par conséquent cette commission a
été illégalement constituée.
De même CS/CA jugement n°08/2001-2002 du 27
décembre 2001 inédit.
* 53 Alinéa 6 article 13
nouveau du décret 2005 du 16 décembre 2005
* 54 CS/CA jugement n°74
du 28 septembre 2000, succession MBEUWOU c/ Etat du Cameroun,
inédit ; Également, CS/CA, jugement n°61/99-2000 du 27
juillet 2000, affaire DEFFO Christophe c/ Etat du Cameroun. Le jugement est
ainsi motivé : « Attendu que dans l'espèce, le
bornage opéré le 21 mars 1997 a été occulté
à l'opposant DEFFO Christophe déjà en instance devant le
tribunal des référés de Bafoussam en arrêt des
travaux, Dame SIMO ayant par des constructions effectuées à la
hâte, empiété les limites naturelles du terrain [...]. Que
cette machination et dissimulation ont eu pour incidence d'induire la
commission en erreur commentant ainsi une faute... »
* 55 Constitue une faute
administrative, le fait pour la commission de ne pas tenir compte des
oppositions soulevées au cours de la procédure dans l'affaire
DJINOU TCHALE c/ Etat du Cameroun.
56 CS/CA jugement n°25 du 30 décembre 1999
NJOH Philibert et Ekoka Koum contre Etat, CS/CA, jugement n°78 du 31
juillet 1997
* 57 CS/CA jugement n°25
du 30 décembre 1999 NJOH Philibert et Ekoka Koum c/ Etat du Cameroun,
inédit
* 58CS/CA jugement n°15 du
25 janvier 2001 succession Mbarga Raphaël contre Etat du Cameroun,
inédit.
* 59 CS/CA jugement
n°60/99-2000 du 29 juin 2000, recours n°738/99-2000 du 09 mars
1998, affaire POHOKAM Suzanne contre Etat du Cameroun, inédit ;
* 60 CS/ CA Jugement
n°94/04-05 du 27 Avril 2005, recours n°1160/99-00 du 07 juillet
2000, affaire Fonkoua Michel contre Etat du Cameroun, inédit ;
* 61 CS/CA jugement
n°01/99-2000 du 09 novembre 1999, affaire NGONDI Chantal Salomé
contre Etat du Cameroun (MINUH) et Dame veuve Effila née Menye
Elisabeth, inédit ;
* 62 CS/CA jugement n°40
du 30 mai 1990, Mballa Dieudonné contre Etat du Cameroun,
inédit ;
CS/CA jugement n°30 du 26 mars 1992, affaire Mveng Ndy
née Mendouga Marguerite contre Etat du Cameroun, inédit ;
* 63 CS/CA jugement
n°34/04-05 du 29 Décembre 2004, affaire Noumsi Jean Bosco contre
Etat du Cameroun
* 64 L'artiche 3 du
décret n°76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention
du titre foncier dispose que : « la demande de
transformation en titre foncier (concerne) :
- des actes d'acquisition des terrains inscrits au
grundbuch,
- des actes d'acquisition des terrains selon les
règles de la transcription,
- des arrêtés d'attribution définitive
d'une concession domaniale,
- des livrets fonciers, ou des certificate of
occupancy,
- des jugements définitifs, constitutifs, ou
translatifs de droits réels,
- des conventions entre africains passés sous le
régime du décret du 29 septembre 1920, abrogé par la loi
du 27 juin 1961 relative aux actes notariés,
- des actes d'acquisition des freeholds
land. »
* 65 CS/CA jugement
n°94/2005 du 14 juin 2006 Chambre de Commerce, d'Industrie et des Mines du
Cameroun (CCIM) c/ Etat du Cameroun et succession Paul Monthe,
représenté par Honoré Monthe.
* 66 Droits réels et
domaine national au Cameroun, André Tientcheu Njiako
op.cit. p.197
* 67 La concession, il faut le
relever, est octroyée à des personnes physiques pour des besoins
individuels à l'exemple de construction d'une maison, contrairement
à l'opinion communément admise selon laquelle elle n'est
accordée que pour des projets de développement ou lorsqu'il
s'agit d'une activité à but lucratif ou associatif. En effet, au
cours des enquêtes menées sur le terrain, nous avons eu un
entretien avec Mme Essengue, chef du service des concessions au Mindaf, qui
nous affirmé que les terrains de la deuxième dépendance
étaient octroyés aux particuliers dans le but de s'installer et
d'y construire des maisons d'habitation. Le développement communautaire
passe bien par le développement individuel !
* 68 A la lecture de ces
articles, on note que c'est désormais le MINDAF qui est chargé
d'instruire les procédures
de concession à l'exclusion du ministère de
l'urbanisme et de l'habitat qui était compétent.
Art 1 alinéa 2 « Le Ministre des domaines et
des affaires foncières est chargé de l'élaboration, de la
mise en oeuvre et de l'évaluation de la politique du gouvernement en
matière domaniale, foncière et cadastrale.
A ce titre, il est responsable [...] de la gestion du domaine
national et des propositions d'affectation... »
Section III De la sous direction du domaine national.
Article 31 (1) : Placée sous autorité d'un
Sous-directeur, la sous direction du domaine national est chargée de
veiller à la régularité des procédures
d'attribution des concessions et de baux diligentés par les services
déconcentrés.
Article 32 : Placé sous l'autorité d'un Chef
de service, le service des concessions est chargé :
- des demandes de concessions provisoires ;
- de la tenue à jour du fichier national des
concessions ;
- du contrôle des recouvrements des créances y
afférentes ;
- du contrôle du respect des cahiers de charges par les
concessionnaires. »
Section III De la sous-direction du domaine national.
Article 31 (1) : Placée sous autorité d'un
Sous-directeur, la sous direction du domaine national est chargée de
veiller à la régularité des procédures
d'attribution des concessions et de baux diligentés par les services
déconcentrés.
Article 32 Placé sous l'autorité d'un Chef de
service, le service des concessions est chargé :
- des demandes de concessions provisoires ;
- de la tenue à jour du fichier national des
concessions ;
- du contrôle des recouvrements des créances y
afférentes ;
- du contrôle du respect des cahiers de charges par les
concessionnaires. »
* 69 CS/CA jugement
n°09/2000-2001 du 30 novembre 2000, sur le recours n° 750/2000-2001
du 06 octobre 1998, Affaire OUAFFO contre Etat du Cameroun (MINUH) et BELINGA
KYE Benoît Frederik.
* 70 CS/CA, jugement
n°38/2005-2006 du 18 janvier 2006 affaire BONGO Henri Aimé contre
Etat du Cameroun (MINDAF), inédit.
* 71 V. Tientcheu Njiako
Droits réels et domaine national, p.198 sur l'affaire de la gare
routière de Kousseri.
* 72 CS/CA, jugement
n°10/2000-2001 du 30 novembre 2000(recours n°937/2000-2001),
affaire EKEME Henri c/ Etat du Cameroun (MINUH) et
époux FENGYEP. V. à ce propos les notes du Docteur Tientcheu
Njiako dans l'ouvrage op. Cit. pp.203 à 204
* 73 CS/CA jugement
n°13/2002-2003 du 31 octobre 2002(sur le recours N°1059/2001-2003 du
13 septembre 2000 affaire Cameron Agricultural Farmer association c/ Etat
du Cameroun (MINUH).
* 74 Cela est du à la
partialité et à la connivence de l'administration. Dans ce
registre, il arrive que la concession définitive soit octroyée
à des personnes morales en faillite.
* Dans l'affaire Dibongué Emmanuel
c/ Bita Armand, le juge administratif affirme de manière claire
que : « l'arrêt d'une Cour d'appel qui , en
violation flagrante des dispositions légales non équivoques et
d'ordre public [...] déclare valable une vente sous-seing privé
d'un terrain conclut entre deux partie[s...] », encourt une
annulation.
CS/AP arrêt n°42/CC du 24 janvier 1991, affaire
DIBONGUE Emmanuel C/ BITA Armand, in juridis infos n°7 septembre 1991,
p.31 obs. Jean-Marie NYAMA.
* 75 CS/CA, jugement n° 68
/2000-2001 du 2007 (recours n°1044/2000-2001 du 17 avril 2000, affaire
Madame MINYEM née DINPIAN Dorine C/ Etat du Cameroun (MINUH)
inédit, dans laquelle le notaire instrumentaire domicilié
à Yaoundé ne pouvait pas connaître la vente d'un terrain
situé à Kribi. ; v. André Tchientcheu Njiako op.
cit. p. 227
* 76 Pour d'amples informations
sur le statut particulier du notaire et son rôle dans les transactions
foncières, lire « le notaire dans la législation
foncière au Cameroun » Siméon Ombiono,
mémoire de licence, université de Yaoundé 1975
* 77 CS/CA jugement
n°43/2000-2001du 30 août 2001(recours n° 1102/2000-2001 du 16
août 2000), affaire NDJINE Daniel C/ Etat du Cameroun (MINUH), dans
laquelle en contrepartie des opérations de lotissement effectuées
par le sieur Ndjine à la collectivité BANGUE, ce dernier a
reçu en contrepartie un pot de vin pour service rendu.
* 78 André de Laubadaire,
Traité de droit administratif, LGDJ, Paris, 1970
p.221 ; Joseph OWONA Droit administratif spécial de la
République du Cameroun, EDICEF, Paris, 1975, 256 p.p. André
Tchientcheu Njiako, Droits fonciers urbains au Cameroun, PUA,
Yaoundé 2003 p383
* 79 Jeanne Lemasurier, «
La cacophonie juridique du contentieux de l'expropriation »
in Mélanges en hommage à Roland Drago ; l'unité du
droit, p.428
* 80 « Toute personne,
physique ou morale a droit au respect de ses biens, nul ne peut être
privé de sa propriété, que pour cause d'utilité
publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes
généraux de droit international » art 1 du
protocole additionnel. V. SUDRE (F), La protection du droit de
propriété par la cour européenne des droits de
l'homme ; D.S 1.8 38 chr. 71
* 81 Jeanne Lemasurier op. cit.
* 82 « Tout
département ministériel désireux d'entreprendre une
opération d'utilité opération d'utilité publique
saisit le ministre chargé des domaines d'un dossier préliminaire
en deux exemplaires comprenant :
- une demande assortie d'une note explicative indiquant
l'objet de l'opération art 2, décret N°187-1872 du 16
décembre 1987
- une fiche dégageant les caractéristiques
principales des équipements à réaliser et précisant
notamment :
a) la superficie approximative du terrain sollicité
dûment justifié
b) l'appréciation sommaire du coût du projet y
compris l'indemnisation
c) la date approximative de démarrage des
travaux
d) la disponibilité des crédits d'indemnisation
avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous autre moyen
d'indemnisation »
* 83 CS/CA, arrêt
n°160/CS/CA du 08 juin 1970, affaire FOUDA MBALLA Maurice c/ Etat
fédéral du Cameroun, obs. François-Xavier MBOUYOM, in
Recueil des Grands Arrêts de la Jurisprudence Administrative de la Cour
Suprême du Cameroun 1970 à 1975, Ydé, éd KENKOSSON,
1975, PP329-334
* 84 CS/AP arrêt du 16
août 1990, in Juridis périodique n°46 avril-mai-juin 2001
pp39-45, note Célestin keutcha Tchapnga
* 85 TGI Dschang, chambre
criminelle, jugement n°38/CRIM du 28 juillet 1986, .inédit. V.
André Tchientcheu Njiako, op. cit. p 413
* 86 V. art 8 à 12 de
la loi N°85/009
* 87 Jeanne Lemasurier op. cit.
p.431
* 88 CS/CA jugement
n°12/CS/CA/83-84 du 26 mai 1984, Dame veuve ONGONO Régine c/ Etat
du cameroun. Pareillement, CS/CA jugement n°70/85-86 du 29 mai 1986, note
Jean-Calvin ABA'A OYONO ; André Tchientcheu Njiako op. cit. Pp
439 à 441
* 89 CS/CA n°544/94-95 du
09 novembre 1994, affaire Société Renault du Cameroun c/ Etat du
Cameroun, note J-C ABA'A OYONO, Juridis Périodique n°32,
octobre- novembre-décembre 1997, pp. 29.
* 90 CS/CA, Jugement
n°85/2005-2006 du 14 juin 2006, recours n°25/2005-2006 du 02
novembre 2005, affaire EFFA Paul Marcel c/ Etat du Cameroun (MINDAF).
* 91 Aloys MPESSA :
« Le titre foncier devant le juge administratif
camerounais » in JCP n°59 juillet-aout-septembre 2004. III-
Doctrine et études, p.78.
* 92 V. ALoys MPESSA, op.
cit.
* 93 V. Charles
AMBIALLET, Les effets de la force probante de l'inscription sur le
livre foncier marocain, Paris, Domat- Montchrestien, 1934, pp42-43
* 94 Victor Gasse,
Régimes fonciers africains et malgaches : évolutions
depuis l'indépendance, LGDJ Paris 1971 p.52
* 95 96 V. Charles
AMBIALLET, op. cit.
* 97 Jean Calvin ABA'A OYONO
« Expropriation pour cause d'utilité publique, note affaire
société Renault in JCP n°32 octobre-novembre-décembre
1997, pp.29-30
* 98 André de
Laubadaire, J.C Venezia et Y. Gaudemet, Traité de droit
administratif, tome 1, 10 éd. LGDJ 1988, p.302
* 99 Art 15, Déclaration
de droits de l'homme, et du citoyen du 26 août 1789
* 100 CE 03 Février
1911, Anguet, Rec-Cep.146, S. 1911.3.137, note M. Hauriou
* 101 CE 26 Juillet 1918,
Epoux Lemonnier, Rec-Cep.761, concl. Blum, D. 1918, 3. 9
* 102 V. Domaines Infos, le
mensuel des affaires domaniales et foncières, p. 3 n°018
novembre-décembre 2007
* 103 Domaine info, op.
cit.
* 104 Opinion émise par
Mr Jean-Marie BEDENGUE, chef de la division des affaires juridiques au MINDAF
au cours du débat télévisé Le Droit en Clair,
transmis à la CRTV, le jeudi 29 Mai 2005.
* 105 CS/CA, jugement
n°40 du 31 Mai 1990, MBALLA Dieudonné c/ Etat du Cameroun,
inédit.
* 106 CS/CA, jugement n°
30 du 26 mars 1992, MVENG NDY née MENDOUGA Marguerite c/ Etat du
Cameroun, inédit.
* 107 CS/CA, jugement n°
64 du 30 août 1996, BILOUNGA Pascaline c/ Etat du Cameroun,
inédit.
* 108 Toutes ces affaires ont
été mentionnées dans la première partie de notre
travail. V. chapitre 2 les manifestations de la faute.
* 109 CS/CA, jugement
n°38/ 205-2006 du 18 janvier 2006, BONGO Henri Aimé c/ Etat du
Cameroun (MINDAF)
* 110 CS/CA, jugement
n°52/06-07 du 28 février 2007 suivant le recours n° 1785/03-04
du 20 octobre 2003, NJOOH Michel Pierrot c/ Etat du Cameroun
* 111 CS/CA jugement
n°23/2005-2006 du 14 décembre 2005, affaire BISSO Joseph et dame
ZEH ZO'O NAOMIE c/ Etat du Cameroun (MINDAF)
* 112 CS/CA jugement
n°44/04-05 du 02 février 2005 (suivant le recours n°786/97-98
du 26 décembre 1997, OHANDJA Séverin c/ Etat du Cameroun
* 113 CS/CA jugement
n°76/04-05 du 27 avril 2005, YONGO Marc c/ Etat du Cameroun & DELANGUE
KOLOKO Michel, intervenant volontaire.
* 114 CS/CA, jugement n°
24 2001-2002 du 28 février 2002, (suivant le recours n°1072/
2001-2002, EMAH Basile et autres c/ Etat du Cameroun (MINUH) & MBIA MBIA et
autres (intervenants volontaires).
* 115 CS/CA jugement n°
85/ 2005-2006 du 14 juin 2006 (suivant le recours n° 25/205-2006 du 02
novembre 2005, EFFA Paul Marcel c/ Etat du Cameroun (MINDAF)
* 116 Article 9 de la loi
n°2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le
fonctionnement de la cours suprême.
« 1. La chambre administrative
comprend :
- une section du contentieux de la fonction publique
- une section du contentieux des affaires foncières et
domaniales
- une section du contentieux des contrats
administratifs
- une section du contentieux de l'annulation et des questions
diverses
2 Chaque section connaît des appels et des pouvoirs en
cassation relatifs aux matières qui relèvent de sa
compétence. »
* 117 V. Maurice KAMTO,
Droit Administratif Processuel du Cameroun, Que faire en cas de litige
avec l'administration, coll. Sciences juridiques et politiques, ed PUC 1990,
p7
* 118 V. Domaines Infos, le
mensuel des affaires domaniales et foncières, n°020- mars 2008,
p.p. 4-6
* 119« Attendu
que[...] jusqu'à ce jour, en dehors des 6000m² du
marché de Mfoundi, le reste de terrain, soit près de
27 000m² n'a pas fait l'objet d'une expropriation effective, et par
conséquent le décret attaqué qui en même temps
déclare cause d'utilité publique et exproprie, est caduque en ce
qui concerne cette contenance superficielle qui doit de ce fait, redevenir au
propriétaire initial », lire J-C ABA'A OYONO, art.
précité.
* 120 Jeanne LEMASURIER,
« la cacophonie juridique du contentieux de
l'expropriation », L'unité du droit, mélanges en
hommage à Roland DRAGO, p.431.
* 121 « Le juge
administratif peut lui-même redresser la situation dans deux cas
seulement :
- en matière fiscale
- en matière électorale », v.
Maurice Kamto, Droit administratif processuel de la République du
Cameroun op.cit.
* 122CS/CA, jugement
n°59/ du 29 Juin 1969, affaire FANKWÉ John c/ Etat du Cameroun
(MINUH) in Lex Lata n°020, novembre 1995, p.16, v. André
Tchientcheu NJIAKO, Droits fonciers urbains au Cameroun, p. 466 op. cit.
* 123 TGI de Yaoundé,
jugement n°263 du 04 Avril 1984, Tchientcheu NJIAKO op. cit p.467
* 124 P. Devolvé, La
responsabilité du fait d'autrui en droit administratif, in
mélanges Marly, 1978, p 407.
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