Contribution à l'étude des origines de la poésie mallarméenne( Télécharger le fichier original )par Mohamed Dr Sellam Université de Bordeaux - Doctorat 1981 |
VIILe réalisme exotique dans la poésie baudelairienne.Le pessimisme sombre qui s'exhale spontanément de la poésie baudelairienne,la puanteur fétide et cadavérique,mêlée à de continuelles jérémiades d'un coeur sous l'empire du désespoir et du déchirement : tout cela avait entraîné forcément Mallarmé dans un vaste univers,plein de pensées et d 'image fantastiques,oû il se baignait avec ivresse... Baudelaire,par son oeuvre peu commune, qui exprime un érotisme vertigineux,allié à la haine et au mépris vengeur d'un monde vil et malsain,exalte et exulte le futur géniteur d'«Igitur » : Mais,hélas ;Ici-bas est maître :sa hantise Vient m'écoeurer parfois jusqu'en cet abri sûr, Et le vomissement impur de la Bêtise Me force à me boucher le nez devant l'azur. Cet écoeurement,cette haine profonde de la Bêtise et de tout ce qui est mesquin et bas,sont nés chez Mallarmé,à la suite de la lecture de l'oeuvre baudelairienne.. La métamorphose de l'esprit mallarméen,apparaît d'emblée au niveau du choix des termes poétiques,de leur usage méthodique et de leur exploitation rigoureuse,en vue de l'expression des sentiments ,non pas fictifs ou factices,mais nés dans le coeur même du poéte... Donc son évolution,de disciple ardent,émule d'un maître chevronné et vétéran éminent de la pensée humaine, s'est cristallisé autour du désir de rejoindre le maître jusqu'au faîte de la perfection artistique.24(*). Constatant que la conception d'une nouvelle forme poétique était devenue effectivement une réalité concrète,grâce au génie surnaturel de Baudelaire,Mallarmé s'est évertué ingénieusement à vouloir coûte que coûte aller plus loin que le Maître... Il avait alors déployé d'immenses efforts pour sortir du sillage du maître et concevoir une méthode plus personnelle et réellement appropriée à la nature de son esprit... Ainsi,après avoir longtemps suivi les pas de Baudelaire,Mallarmé était parvenu,au prix de rudes labeurs,à se rendre compte qu'il n'était pas loin de se rapprocher de l'originalité,bien que ses productions,si minimes fussent-elles,aient été encore tributaires de la pensée du Maître ; ; ; La nature est un temple oû de vivants piliers....Ce sonnet qui avait de prime abord séduit l'esprit de Mallarmé,ne lui a jamais suggéré l'idée d'une nouvelle stratégie poétique,mais cependant,par sa vision étrange,par la pensée exprimée,Mallarmé sentait peu à peu renaître en lui un éclair,une sorte d'illumination vaguement prophétique,mêlée à une force suprême,irrésistible,qui le poussa malgré lui à fouiller hardiment dans la contexture de ce sonnet un simple indice,susceptible de le mettre sur la voie d'une nouvelle réalisation poétique. Il avait beau chercher,examiner méticuleusemernt chaque parcelle d'idées,péser chaque vers,jauger chaque césure,pénètrer plus à fond dans le sens de chaque expression,mais en vain,..Rien ne s'estompait avec clarté dans les horizons de sa pensée ý,au contraire,plus il se sentait comme stimulé par une volonté inflexible,plus il s'apercevait avec regret que ses multiples soins n'aboutissaient en fait à rien,sinon à le rendre davantage malade et désespéré.. mais un jour,après avoir achevé la mise au point d'un poéme,il se rendit compte que la tactique ,l'inspiration,la chaîne des significations,le choix expressif des termes,employés cette fois dans ce fragment ,ne ressemblaient en rien à ceux employés par le Maître et comme pour s'assurer davantage de cette trouvaille ingénieuse,il se pencha sur son poéme,qu'il se mit à déchiffrer avec une munitie impeccable,un pointillisme extrême,comme s'il n'en avait pas été l'auteur et une fois de plus,il remarqua avec stupeur que le poéme ou plut$ot le morceau qui est sous ses yeux et entre ses mains,était entièrement élaboré d'une manière tout à fait originale, et ne s'identifiant en aucune manière à la tecnique baudelairienne,ni non plus à celle qui était plus particulièrement en usage parmi less poétes contemporains.. * 24 -C'est en effet au niveau de l'art que Mallarmé pouvait prétendre avoir égalé son Maître. |
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