chapitre 5 les recommandations
Comment faire pour faire respecter cette réglementation
qui est supposée lutter contre la violence, du moins physique, en milieu
scolaire ? A-t-on bien fait de sortir seulement des circulaires prohibant
les punitions corporelles sans étudier au préalable les causes
profondes qui amènent les enseignants à user de ces
pratiques ? Nos recommandations vont à l'endroit des
autorités éducatives, des enseignants, des élèves
et des parents d'élèves.
5.1- Recommandations à l'endroit des
autorités éducatives
« La violence reste un problème courant
caché de la vue du public et presque totalement absent de l'ordre du
jour politique » nous alertaient les experts qui ont
préparé le document pour la 15ème
Réunion du Comité Africain d'Experts sur les Droits et le Bien-
être de L'Enfant (CAEDBE) le 15-19 Mars 2010 à Addis Abéba
(« La Violence contre les Enfants en Afrique Défis et
Priorités d'Action », 15-19 Mars 2010). Mais la violence
devait et doit constituer une priorité pour l'autorité
éducative.
Les autorités éducatives doivent
procéder d'abord à une recension des raisons qui poussent
à pratiquer les PC pour savoir comment orienter leurs campagnes de
sensibilisation. Puisqu'il ne s'agit pas de prohiber mais il va s'agir surtout
de convaincre les acteurs sur les raisons qui motivent cette prohibition. Lors
de nos enquêtes, un enseignant déclarait qu'il pratique les PC
parce que « nous, Africains, avons été
éduqués comme cela ».
Nous pensons, selon les propos que nous avons eu à
recueillir, que les enseignants ne sont pas suffisamment informés des
raisons qui motivent la suppression des PC en milieu scolaire. Un enseignant se
lamentait en ces termes : « cette interdiction rend les
élèves paresseux, ils n'apprennent plus, ils ne respectent plus
les maîtres, plus de discipline, ils viennent (au cours) quand ça
leur plaît ». Il revient donc aux autorités
éducatives de s'impliquer plus dans l'explication de cette mesure aux
enseignants.
Ensuite, le problème de la formation des enseignants
se trouve une fois encore posé. Toute réforme scolaire doit
impliquer les enseignants au premier chef puisqu'ils sont les premiers qui
décideront si oui ou non la réforme aura lieu. Selon
Amouzou-Glikpa (2009), les maîtres constituent :
« L'agent d'exécution et de
réalisation des politiques scolaires. [...] La tâche
confiée aux enseignants est celle de l'accomplissement ou de la
réalisation de la mission de socialisation. Les résultats de leur
action pédagogique devant correspondre aux objectifs poursuivis par
l'Etat, le mode de formation à donner aux enseignants est de la
même importance que celui des élèves» (Amouzou-Glikpa,
2009 :4)
En même temps qu'on prescrit dans la réforme
l'usage des méthodes actives, on assiste au fait que les enseignants ne
soient pas formés à cette méthode. Nous avions, dans nos
recherches, découvert une certaine relation entre l'usage de la
pédagogie traditionnelle et la pratique des PC. Cela voudra dire qu'on
doit se soucier beaucoup plus de la formation des enseignants pour les amener
à une meilleure compréhension de la législation scolaire.
Dans nos investigations, 55% seulement des enseignants ont affirmé
qu'ils ont reçu une formation professionnelle. Et cette formation se
résume seulement à la formation initiale.
Enfin, le problème des effectifs pléthoriques
n'est pas sans impact sur l'usage des punitions corporelles. Nous en voulons
pour preuve des enseignants qui disaient que dans une classe où il ya
plus de cent (100) élèves où cinquante (50) sont en train
de bavarder, vingt (20) sont en train de dormir dans leur coin et seulement un
dixième (1/10) suit le cours, comment ne pas utiliser le bâton. Il
suffit de donner quelques coups à cinq (5) élèves pour que
les autres se réveillent. Un enseignant lors de nos investigations nous
confiait : « dans une classe où il y a du bruit, il
suffit de frapper quelques élèves pour que les autres se
taisent ». Et cette phrase s'inscrit dans l'impossibilité de
l'enseignant à imposer le silence dans une classe de plus de 100
élèves. C'est dans cette optique que la réduction des
effectifs par classe pourra contribuer à éviter à certains
endroits l'usage des PC. Pour Sarr (2010), la surcharge des classes avec des
effectifs pléthoriques amène souvent les enseignants à
recourir aux châtiments corporels pour discipliner les
élèves et à faire face à la violence entre
élèves. Au Sénégal, précise-t-il, les
enseignants avancent que c'est le seul moyen de maintenir la discipline dans
des classes pléthoriques et que c'est un moyen qui a fait ses preuves.
C'est ce qui ressort de l'enquête menée dans les écoles au
Sénégal. C'est que pendant longtemps en Afrique, l'on a mis
l'accent sur la dimension quantitative (nombre d'enfants inscrits)
plutôt que sur la qualité.
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