II 2 2 PROGRAMME DE LIBERALISATION DES MARCHES de 1995
à 2002
La période après-guerre est marquée par
la reprise et l'élargissement du processus de libéralisation de
l'économie entrepris sous le PAS au début des années 1990.
Les mesures prises par le nouveau gouvernement visent principalement à
stimuler les activités du secteur privé, promouvoir les
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exportations, améliorer la compétitivité
internationale. Au mois de mars 1995, le gouvernement a opté pour une
libéralisation des prix du café à l'exportation et a
supprimé les mesures de stabilisation, et il a opté pour un taux
de change de la monnaie librement déterminé par le marché
et des taux d'intérêt déterminés en partie par le
marché et en partie par le taux de réescompte. Il s'est
engagé également à réduire son rôle dans les
entreprises parastatales, à renforcer sa gestion budgétaire et
à réorienter vers le développement des secteurs sociaux et
agricoles ses dépenses budgétaires affectées dans un
premier temps pour rétablir et maintenir la sécurité au
Rwanda.
II 2 .2.2 Evolution sectorielle et perspectives
Le PIB réel du Rwanda a baissé de 52% sur la
période 1990-1994. En 1994, il perd 49% de sa valeur en 1993 et il n'a
repris que 25% entre 1994 et 1995. Selon les prévisions, il augmenta
encore de 24% en 1996 et mais, en 1997, il n'atteignit que 70% de son niveau de
1990 et, en 1998, il ne le recouvra que 92% (en termes réels). Entre
1996 et 1998, son taux de croissance annuel fluctuera autour de 15% par an. La
croissance provient principalement du secteur secondaire (entre 23 et 28% par
an), tandis que la croissance du secteur primaire oscillait entre 10 et 12% et
que le secteur tertiaire, après une croissance attendue de 14,4% se
stabilisa avec une croissance de 12,4%57.
II .2 .2.2.1 Evolution du secteur
agricole
Le secteur agricole en particulier ne recouvre que deux tiers
de son niveau de 1993 et ne couvre pas les besoins du pays. Selon la Banque
Mondiale, une aide alimentaire est donc nécessaire58
Or, la situation alimentaire diffère d'une
région à l'autre et l'insécurité alimentaire des
ménages résulte davantage de la rupture des réseaux
d'offre de semences et
57 CHATHELINE A, Evolution économique du
Rwanda en 1996-1997, The World bank, 1999 P 2
58 Idem, P3
59 Idem P5
60 Ibidem
53
de travail rémunéré plutôt que d'un
manque et d'une perte de semences. L'insécurité alimentaire
touche différemment les régions plus ou moins marquées par
la guerre et les déplacements de population ainsi que certains groupes
de la population (veuves, orphelins, enfants non accompagnés mais aussi
paysans ayant accueilli des populations déplacées ou ayant
été pillées par celles-ci, ou encore des personnes trop
éloignées des centres de distribution de l'aide humanitaire).
Les prix varient d'une région à l'autre, ou
même d'une sous région à l'autre. Les fortes hausses de
prix des céréales et des haricots reflètent une situation
de rareté temporaire mais non permanente des semences indigènes
adaptées devant provenir d'autres régions.
Le Rwanda doit faire face au problème structurel de son
agriculture. Selon le gouvernement rwandais, la situation catastrophique de
l'agriculture résulte du morcellement excessif des terres et des bas
rendements dus principalement à la surexploitation des terres arables
depuis les années 80. Les populations rurales ne peuvent donc plus
générer suffisamment de surplus pour investir dans des
améliorations quantitatives et qualitatives. En 1996 le gouvernement
envisage une réforme du secteur agricole grâce à
l'utilisation des semences sélectionnées, de fertilisants
organiques et minérales, de produits phytosanitaires et d'outils
appropriés59. L'objectif est une croissance de 11,5% par an.
Pour atteindre ces objectifs et pour rendre efficaces les mesures
nécessaires pour augmenter la productivité, le gouvernement
rwandais envisage une réforme de la législation foncière
et également peut-être même des réformes radicales
comme une villagisation de la population et/ou une redistribution des
terres60.
II .2 .2.2.2 Secteur secondaire
Le gouvernement rwandais fonde la reprise économique du
pays sur la relance et le développement du secteur secondaire. Mais les
taux de croissance avoisinants
61 Idem P 7
54
25%/an semblent optimistes par rapport aux performances
antérieures du secteur (où les taux de croissance étaient
négatifs en 1991, 1993 et 1994 sauf en 1992)61.
Le développement du Rwanda repose sur celui du secteur
privé. Les mesures de libéralisation devraient permettre au
secteur privé de transformer une économie de production
tournée jusqu'à présent exclusivement vers le
marché intérieur en l'orientant vers l'exportation. Le jeu de la
libre concurrence sur les marchés internationaux devrait stimuler les
activités d'entreprises qui ont des avantages comparatifs dans la
région. Le Rwanda espère ainsi diversifier ses exportations,
augmenter leur volume, rétablir son équilibre extérieur,
réduire le rôle de l'Etat dans le secteur privé et
privatiser certaines entreprises publiques permettraient de réduire ses
dépenses budgétaires tandis que développer son secteur
privé lui permettrait d'augmenter sa base fiscale et d'assainir son
budget.
En outre, le développement du secteur privé
représente l'unique solution pour absorber les surplus de main-d'oeuvre
de l'agriculture engorgée, mais aussi pour absorber la nouvelle
main-d'oeuvre des "anciens" réfugiés qui rentrent au pays et des
futurs militaires démobilisés de l'armée qui devront
être réintégrés dans la vie civile. L'avenir du
Rwanda repose sur le développement du secteur des entreprises
privées, clé pour lever certaines contraintes structurelles du
pays.
Jusqu'à présent, le Rwanda a été
rendu fragile par la baisse de prix du café. Diversifier ses
exportations lui permet de diversifier ses risques, mais, à court terme,
le Rwanda reste dépendant de sa production de café. Or, le niveau
relativement bas des prix du café par rapport à celui des
cultures vivrières n'incitera pas les producteurs à reprendre
cette culture dont la qualité s'est détériorée
pendant la guerre, parce qu'elle a été laissée sans soins
parfois pendant plus d'un an.
Trouver des avantages comparatifs par rapport à
d'autres pays de la région relève de la gageure. Les coûts
de transport sont élevés pour ce petit pays enclavé,
éloigné des accès maritimes, et ils grèvent
lourdement les prix des biens intermédiaires importés. Le Rwanda
trouverait des avantages dans la production
62 Idem P 12
63 Idem 15
55
de biens à haute valeur ajoutée où les
coûts de transport seraient réduits. Les derniers changements sur
l'échiquier politique pourraient offrir de nouvelles perspectives pour
le Rwanda d'écouler sa production sur les marchés de ses pays
voisins.
L'Etat avait protégé le développement
d'une centaine d'entreprise dont la production visait à satisfaire avant
tout les besoins d'une demande intérieure, relativement limitée
par un pouvoir d'achat généralement faible, à l'exception
de celui des expatriés et des 10% les plus riches de la population
(commerçants et fonctionnaires). Les dévaluations successives et
la levée des mesures visant à protéger ce secteur ont
fragilisé ces entreprises face à la concurrence
extérieure, à la hausse relative du coût des
matières premières importées, tandis que la baisse du
pouvoir d'achat de l'ensemble de la population rendait le marché
intérieur plus étroit encore.
En 1995, seules 54 entreprises manufacturières sur 88
avaient repris leurs activités62. Aucune relance de ce
secteur ne se profile à court terme, à moins que les
investissements publics que la communauté internationale s'engage
à financer n'induisent une reprise de la demande intérieure. Mais
la relance et/ou la création de nouvelles entreprises orientées
vers l'exportation dépend avant tout d'une stabilité
sociopolitique du pays et de la région qui garantisse la
sécurité des investissements. Or, celle-ci ne semble pas
assurée pour le moment.
Par ailleurs, la communauté internationale ne semble
pas accorder une place prépondérante au développement du
secteur "production": le Programme d'Investissements Publics lui alloue 27,5 %
de l'ensemble de fonds du programme qui se répartissent en 6,7%
seulement pour le secteur de l'industrie, de l'artisanat et du commerce tandis
que 20,5% sont destinés au secteur rural, mais un quart des financements
manquaient lors de la conférence nationale63.
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