Chapitre 1 : LES CREDITS D'EXPLOITATION
De la même manière qu'une entreprise doit trouver
le moyen de satisfaire ses besoins de financement à long terme en
relation avec sa politique d'investissement, il lui faut répondre
à ses besoins de financement à court terme.
Pour ce faire, elle dispose d'un certain nombre d'outils lui
permettant, soit de réduire son besoin en fonds de roulement, soit
d'obtenir des crédits à court terme. Le court terme
désigne la durée où le prêt est requis ainsi que la
période sur laquelle est échelonné le remboursement. Les
prêts à court terme se font habituellement sous forme de
prêts d'exploitation à terme (moins d'un an) et de marges de
crédit renouvelables. Ils financent les activités quotidiennes de
l'entreprise, notamment les salaires des employés, et les achats de
stock et de fournitures. Celles-ci s'épuisent rapidement et les stocks
se vendent, ce qui crée la rotation des stocks. Les prêteurs
favorisent les entreprises qui affichent une saine gestion, un potentiel de
croissance stable et des projections de trésorerie fiables.
1.1. Approche des concepts
Que ce soit à la création ou pour des
nécessités de développement, l'entreprise a souvent des
besoins de financement.
Elle dispose d'un certain nombre de moyens pour
répondre à ses besoins de financement. Outre l'autofinancement,
le recours au crédit bancaire est la solution la plus couramment
utilisée.
Pour ce faire, nous tenterons de définir la notion de
crédit puis nous verrons ce qu'est une entreprise, avant
d'étudier les besoins de financement qu'elle rencontre.
1.1.1. Notion de crédit
Dans son acception la plus large, c'est à dire en
matière de finances, le crédit (du latin
« crederer » qui signifie faire confiance) est un
prêt accordé par un banquier ou par un fournisseur.
En comptabilité, le crédit représente la
partie d'un compte dans laquelle s'inscrivent les sommes payées par le
titulaire du compte et celles qui lui sont dues.
Pour les économistes, le crédit
est une opération qui consiste pour un prêteur
ou créancier à mettre à disposition d'un
emprunteur ou débiteur, une certaine somme d'argent
moyennant un engagement de remboursement à une date
déterminée à l'avance.
Le créancier qui met à disposition les fonds va
généralement exiger une rémunération :
l'intérêt. Son montant est exprimé par le taux
d'intérêt.
D'une manière générale on distingue
plusieurs types de crédits en fonction de leur durée :
· Le crédit à court terme (quelques jours
à 2 ans) : il comprend l'escompte, les crédits de caisse
(facilités de caisse, crédit de campagne, découvert
bancaire)...
· Le crédit à moyen terme : sur 5
à 7 ans, il s'applique à l'acquisition d'équipements
par les entreprises, au financement de la construction de logements.
· Le crédit à long terme : il
excède 5 à 7 ans, suivant les cas. Il est consenti contre
des garanties hypothécaires, des cautions ou des nantissements.
Par ailleurs, l'opération de crédit comprend les
crédits en espèces et les crédits par engagement. Dans le
cas des crédits en espèces, la banque met de l'argent à la
disposition du débiteur ou lui accorde une limite de crédit. En
échange, le débiteur paie un intérêt à la
banque. Dans le cas de crédits par engagement, la banque met sa
solvabilité à la disposition du client qui la
rémunère en lui versant une commission.
Le crédit fait l'objet d'une réglementation
assez stricte et d'un contrôle très suivi de la part des pouvoirs
publics. Selon le secteur auquel il est destiné, il peut être
soumis à des textes législatifs et réglementaires
spécifiques et administré par des établissements
spécialisés: crédit agricole, crédit immobilier
etc.
1.1.2. Définition d'une entreprise
Dans un sens économique, une entreprise est une
structure économique et sociale comprenant une ou plusieurs personnes
et travaillant de manière organisée pour fournir des biens ou
services à des clients dans un environnement concurrentiel
(marché) ou non concurrentiel (monopole).
En d'autres termes, il d'agit d'une unité
économique, juridiquement autonome, organisée pour produire des
biens ou services pour le marché.
Etymologiquement, le terme dérive de
« entreprendre » daté d'environ 1430-1440 avec le
sens de « prendre entre ses mains » ; il prit
l'acception actuelle de « prendre un risque, relever un défi,
oser un objectif ».
Les entreprises peuvent être classées selon
plusieurs critères :
· Par activité (entreprise commerciale,
industrielle, artisanale, agricole, de pêche...)
· Par secteur économique (primaire, secondaire,
tertiaire)
· Par taille et impact économique (exemple :
PME, groupe d'entreprises...)
· Par statut juridique (entreprises publiques
gérées par l'Etat et entreprises privées qui sont
individuelles ou sociétaires).
Par ailleurs, de par leur activité, les entreprises
sont confrontées à des besoins de financement.
1.1.3. Besoins de financement d'une
entreprise
Les besoins de financement correspondent à la situation
d'un agent économique dont les dépenses sont supérieures
à l'épargne.
Les besoins de financement ont deux sources : les
investissements et l'activité.
· Le cycle d'investissement concerne l'acquisition et
l'utilisation des immobilisations nécessaires à l'activité
de l'entreprise (machines, matériel informatique, matériel de
transport, bâtiments etc.). Ce cycle est plus long ; c'est pourquoi
on parle de financement à long terme. Le cycle démarre dès
la constitution de l'entreprise. Il en va de même chaque année,
l'entreprise devant réaliser des investissements de nature variée
correspondant à des objectifs multiples en vue d'assurer sa survie (par
le renouvellement et l'adaptation du matériel) et son
développement (par l'accroissement de ses installations).
Les fonds propres sont le plus souvent insuffisants pour
financer la totalité des investissements. L'entreprise doit donc
recourir à des sources de financement externes : les
investissements sont alors financés par des ressources
étrangères provenant le plus souvent d'établissements de
crédit.
· Indépendamment des investissements,
l'exploitation engendre des besoins financiers. En effet, dans la
majorité des entreprises, il existe un besoin structurel de financement
qui provient du cycle d'exploitation. Ce cycle se décompose en 5
étapes :
- étape 1 : achat de matières
premières, fournitures, marchandises aux fournisseurs
- étape 2 : stockage de matières
premières, produits ou marchandises
- étape 3 : production de biens et services
- étape 4 : stockage éventuel des
matières, produits ou marchandises
- étape 5 : ventes de produits finis ou
marchandises aux clients
En conséquence, les dépenses
précèdent les recettes. Dès lors, il n'est pas possible de
compter sur les recettes pour financer les dépenses. Les
dépenses correspondent alors à un besoin d'exploitation
encore appelé besoin en fonds de roulement résultant des
décalages provenant des opérations d'exploitation.
Le financement du cycle d'exploitation suppose que
l'entreprise dispose de ressources suffisantes pour assurer le financement
pendant une durée relativement courte : on parle alors de
financement à court terme.
De plus, l'exploitation génère des besoins de
financement à très court terme, temporaires ou immédiats
qui représentent pour l'entreprise des besoins de trésorerie. En
effet, faire face aux échéances exige des liquidités qui
ne sont pas toujours disponibles. En cas d'insuffisances, l'entreprise doit
s'en procurer à l'extérieur et des ajustements de court terme
sont nécessaires.
En somme, l'entreprise a donc des besoins de financement qui
peuvent être classés selon leurs échéances. On
distingue ainsi :
- un besoin de financement à long terme pour financer
les immobilisations ou leur renouvellement
- un besoin de financement à court terme pour financer
l'actif circulant ou le cycle d'exploitation
- un besoin de financement à très court terme ou
immédiat pour faire face aux imprévus quotidiens.
Pour satisfaire tous ces besoins, les entreprises disposent de
moyens de financement parmi lesquels on peut citer le crédit bancaire.
La section suivante est consacrée aux types de crédits à
court terme réservés aux entreprises.
1.2. Crédits à court terme
courants
Les crédits à court terme peuvent revêtir
plusieurs formes. Le choix de l'une ou de plusieurs d'entre elles est fonction
de la nature du ou des besoins exprimés par l'entreprise.
1.2.1. Facilité de caisse
La facilite de caisse, souple et très répandue,
est l'autorisation donnée par une banque à une entreprise,
d'avoir un compte courant débiteur pendant quelques jours par mois et
pour un montant maximum prédéterminé.
La facilité de caisse se justifie par les
décalages mensuels entre certains décaissements importants (par
exemple, la paie du personnel) à échéances fixes,
déphasés par rapport aux encaissements ayant lieu, soit à
d'autres échéances, soit régulièrement tout au long
du mois (ventes par exemple). La facilité de caisse est ainsi
accordée pour plusieurs mois, mais se caractérise par des
utilisations brèves et successives. La banque autorise donc l'entreprise
à rendre son compte débiteur « quelques jours par mois
» selon la formule consacrée. Pourquoi quelques jours seulement?
Le paiement des fournisseurs se fait
généralement à dates fixes. Il en est de même pour
les salaires et pour les cotisations sociales. De leur côté les
créances clients sont encaissées au fil de l'eau et, en tous cas,
pas aux mêmes dates. En demandant que le compte redevienne
périodiquement créditeur, la banque s'assure que la structure
financière est suffisante, c'est-à-dire que le fonds de roulement
(capitaux propres + dette à long et moyen terme) couvre les besoins en
fonds de roulement liées au cycle d'exploitation (stocks +
créances clients - dettes fournisseurs et sociales). Autrement dit, la
trésorerie, qui résulte de la différence entre fonds de
roulement et besoin en fonds de roulement, ne doit pas être durablement
négative.
Couvrant des décalages ponctuels et très
limités dans le temps entre dépenses et recettes, la
facilité de caisse peut être périodiquement reconduite
mais, comme tout crédit bancaire, doit faire l'objet d'un accord
préalable du banquier.
1.2.2. Découvert
On parle de découvert lorsque le compte est
débiteur pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois sans
interruption. Le clignotant bancaire passe de l'orange (facilité de
caisse) au rouge.
Néanmoins, lorsqu'une entrée de fonds
inhabituelle est attendue à une date précise (créance
client exceptionnelle ou cession d'un matériel par exemple) la banque
peut aider une entreprise, à condition de l'informer et lui demander son
accord au préalable pour un dépassement de découvert
autorisé.
Ce crédit, de durée plus longue que la
facilité de caisse (quelques semaines voire quelques mois) est
destiné à compléter le fonds de roulement de l'entreprise
temporairement insuffisant.
En aucun cas le compte ne peut se trouver débiteur en
permanence pour des durées excessivement longues. Pouvant craindre de
financer des pertes, en accordant ce crédit sans échéance
précise, le banquier se montrera exigeant pour octroyer une autorisation
de découvert : la situation de l'entreprise, l'ancienneté des
relations avec la banque, les garanties proposées sont autant
d'éléments qui seront examinés. Le banquier peut donner
son accord par écrit (pour une durée en principe d'un an) et,
dans ce cas, l'entreprise paie généralement une commission de
confirmation.
1.2.3. Escompte
Cette procédure, très ancienne, peut être
définie comme un moyen pour l'entreprise de se procurer
immédiatement la contre-valeur d'une créance à terme
détenue sur un de ses clients et matérialisée par un effet
de commerce : traite, lettre de change, billet à ordre...
L'escompte est donc l'opération par laquelle le
banquier met tout de suite à la disposition d'une entreprise le montant
d'une remise d'effets de commerce, sous déduction des agios
calculés en fonction du temps restant à courir jusqu'à
l'échéance desdits effets.
Avant d'accorder une autorisation d'escompte, le banquier
étudie la situation de son client (situation financière,
importance du chiffre d'affaires, délais de paiement consentis à
la clientèle, délais en vigueur dans la profession, type de
clientèle sur lequel son client tire des traites, nature de ces tirages,
garanties pouvant être obtenues, etc.).
Le banquier qui, par l'escompte, devient propriétaire
d'une traite, pourra exiger de son client (le tireur de la traite) qu'elle lui
soit remise "acceptée", c'est-à-dire que le tiré (le
client du client) ait porté sur la traite la mention manuscrite
"accepté" suivie de sa signature. L'acceptation rend le
tiré irréversiblement débiteur du paiement de cette
traite.
Bien souvent, le banquier n'escomptera que des effets de
commerce n'ayant pas plus de 90 jours à courir. Dans les remises que lui
fait son client, le banquier écarte les "signatures" qui ne lui
conviennent pas : refus d'escompter des traites sur des débiteurs pour
lesquels il a de mauvais renseignements, voire des incidents de paiements
antérieurs.
En cas d'impayé, le banquier escompteur peut se
retourner contre son remettant (son client) en le débitant ou poursuivre
le tiré (le client de son client). L'escompte est une formule de
financement lourde et peu souple.
1.2.4. Crédit de campagne
Ces crédits concernent les activités
saisonnières (soit approvisionnement massif puis fabrication et ventes
régulièrement étalées, soit approvisionnement et
fabrication réguliers puis ventes massives).
Le crédit de campagne peut être défini
comme un crédit accordé par une banque à une entreprise
pour une période donnée et affecté à une
opération déterminée du cycle de production. Ce concours
bancaire, permettant de combler des décalages importants de
trésorerie découlant du cycle d'exploitation, a une durée
longue (souvent 7 à 9 mois, quelque fois plus) et portent sur de gros
montants, eu égard à la surface financière de l'entreprise
bénéficiaire.
Il nécessite la présentation d'un plan de
trésorerie très précis faisant ressortir les besoins
mensuels de financement.
Pour le banquier il s'agit d'un crédit très
risqué car c'est la vente future (donc hypothétique) des
marchandises qui doit permettre la bonne fin du concours financier. Aussi,
celui-ci exigera une situation financière saine, très souvent le
nantissement du stock de marchandises, objet de la campagne, et d'autres
garanties complémentaires.
1..3. Autres formes de crédits à court
terme
En dehors des types de crédits cités
précédemment, il existe d'autres formes de crédits
à court terme.
1.3.1. Affacturage
L'affacturage est une technique de financement par laquelle
une entreprise cède la propriété de ses créances
clients à une autre entreprise (le "factor") en échange de
liquidités immédiates. Le factor devient alors le
propriétaire des créances cédées et assure le
recouvrement de celles-ci. En échange de ce service, le facteur se
rémunère en prélevant sur le montant des créances
une commission et des intérêts.
L'opération consiste donc pour le fournisseur à
céder au factor ses factures en échange de quoi ce dernier lui
consentira une avance sous déduction des intérêts et
commissions.
- Le vendeur accorde au factor l'exclusivité de
l'affacturage de toutes ses créances
- Le factor se charge de l'encaissement des
créances.
- En contrepartie, le factor avance au vendeur le montant des
créances cédées moyennant le paiement de commissions.
En cas d'impayés, le risque est assuré par le
factor qui ne peut se retourner contre le vendeur.
L'affacturage permet à l'entreprise de recouvrir son
chiffre d'affaires de manière anticipée, ce qui lui procure une
trésorerie plus large et diminue son endettement à court terme.
L'entreprise qui utilise ce mode financement se libère par la même
de la gestion des comptes clients relatifs aux créances
cédées et n'a plus à se prémunir du risque
d'impayés puisqu'elle n'est plus propriétaire de la
créance. Mais, d'une part cette méthode coûte plus
chère que le recours à l'escompte, et d'autre part, l'entreprise
perd le lien qui la lie à ses clients en déléguant la
gestion de ses crédits clients à un tiers.
1.3.2. Obligations cautionnées
Si le plus souvent la banque aide l'entreprise en mettant
à sa disposition des fonds sous forme de crédits de
trésorerie, elle peut aussi lui apporter son concours sous forme
d'engagements que l'on appelle des crédits par signature. La banque
prête alors simplement sa signature sans supporter de charge de
trésorerie.
L'étude faite par la banque doit être aussi
minutieuse que pour n'importe quel autre concours bancaire, car cet engagement
peut entraîner des décaissements importants.
En effet lorsqu'elles vendent des biens ou services à
leurs clients, les entreprises sont tenues de facturer à ces derniers la
taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et de la verser à l'État,
dans le courant du mois suivant la vente. La taxe sur la valeur ajoutée,
ainsi que les droits de douane, pèsent lourdement sur la
trésorerie de certaines entreprises, d'autant plus qu'ils ne sont
parfois récupérés sur la clientèle que beaucoup
plus tard, compte tenu des délais de règlement des clients.
Pour compenser ce décalage et alléger la
trésorerie des entreprises, l'administration fiscale accepte, sous
certaines conditions, un règlement différé de la T.V.A. et
des droits de douane qui lui sont dus. Le contribuable, c'est à dire
l'entreprise, doit alors souscrire un billet à l'ordre de
l'administration, par lequel il s'engage à payer les impôts dus
à une date déterminée.
Pour se prémunir contre les risques de
défaillance de l'entreprise, l'administration fiscale exige que ces
billets à ordre portent la caution d'une banque ou d'un organisme
spécialisé. Pour cette raison ces billets portent le nom
d'obligations cautionnées.
Les obligations cautionnées permettent aux entreprises
d'obtenir des crédits allant jusqu'à quatre mois et à un
taux d'intérêt très avantageux.
Toutefois, les crédits par signature présentent
des avantages et des inconvénients pour le banquier comme pour son
client.
· Pour le
banquier
- Avantages : Au moment de sa mise en place, un
crédit par signature évite toute sortie de fonds. Il évite
les contraintes en cas d'encadrement du crédit. Il permet la perception
de commissions sur l'autorisation voire sur l'utilisation. Enfin, le banquier
est subrogé dans les droits du créancier
bénéficiaire de l'engagement (avantage déterminant en cas
de cautions fiscales).
- Inconvénients : le risque est difficile à
évaluer. Le suivi des engagements est lourd à gérer. Il y
a souvent décalage des engagements dans le temps.
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