Femme ou fée? Mélior dans "Partonopeu de Blois"( Télécharger le fichier original )par Julie Grenon-Morin Université Sorbonne-nouvelle - Master 1 2010 |
II. Ses qualités de féériques et humaines1) Indices sur le merveilleuxUn rapprochement peut être établi entre Mélior et les divinités païennes ou encore les druidesses. En étudiant l'Histoire, les spécialistes ont remarqué que les dons des figures féminines sont toujours décrits de manière ambiguë, ce qui avait comme résultat de renforcer l'impression de merveilleux auprès des gens non éduqués. Les druidesses parachevaient leur enseignement auprès de personnes ayant elles-mêmes étudié, évidemment. De même, Mélior fait allusion à ses maîtres, bien qu'elle les dépasse par son talent. Du côté de Morgane et Viviane, dites les «fées de première génération», elles ont acquis leurs connaissances auprès du mythique enchanteur Merlin. Viviane, tout comme Mélior, dépassera son maître, car elle emprisonnera le mage à perpétuité, dans des endroits changeant selon la version du récit. Partonopeu de Blois ne raconte pas si Mélior engendre des filles, ni même des enfants tout simplement. Si elle avait une progéniture de sexe féminin, la fée lui enseignerait peut-être son savoir. À ce propos, C. Ferlampin-Acher constate ceci : Après la première génération, les femmes ayant acquis ce savoir originellement masculin, la magie s'apprendra désormais de mère en fille. (...) On aura dès lors l'impression que ce savoir s'hérite automatiquement, les références de l'apprentissage disparaissant35(*). Mélior fait donc partie de la première génération, car personne ne lui a transmis ses qualités de fée de manière automatique. De plus, il est exact qu'elle détient son pouvoir grâce aux hommes qui l'ont éduqué. Originaire de l'Orient, Mélior possède un avantage sur les autres fées des récits médiévaux. Cette zone géographique est, en effet, l'endroit d'origine de nombreux magiciens renommés.36(*) De plus, il faut être doté d'une grande intelligence, avoir accès aux écrits et à des maîtres de même que de se montrer curieux, une curiosité qui se rapproche même d'une cupiditas sciendi. En ce qui concerne Mélior, la fortune de son père lui permet d'avoir des enseignants et probablement aussi un accès aux manuscrits. Avec ce qu'elle dit sur elle-même et par ses actions, le lecteur voit que c'est une personne intelligente. Elle est, certes, très curieuse, et sa manière de «capturer» Partonopeu révèle qu'elle ne recule devant rien. Nous pouvons également dire que c'est une personne énergique, vu l'ardeur qu'elle mit dans ses études et qu'elle nomme elle-même du «zèle» : «Après apris espiremens, / Nigromance et encantemens37(*)». La fée mit aussi de l'ardeur à pratiquer ses sorts, isolée dans sa chambre. * 35 C. Ferlampin-Acher, op. cit., p. 142. * 36 Id. * 37 Partonopeu de Blois, op. cit., p. 314. |
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