Paragraphe 2 : Motivations des vendeurs
Si les motivations des acquereurs paraissent volontaristes,
celles des vendeurs le sont tres peu et ceux-ci sont plutOt animes de l'esprit
de tirer le meilleur parti des efforts accomplis anterieurement et de limiter
au maximum leers risques au niveau patrimonial. ca peut etre aussi le
decouragement et
le renoncement devant des difficultes de gestion, de tresorerie
ou de debouches, dues a une concurrence accrue ou a des efforts de recherche
infructueux. Mais surtout, les raisons profondement personnelles du chef
d'entreprise nous paraissent largement l'emporter sur les motivations d'ordre
economique.
En fait beaucoup d'entreprises sont gerees par leur fondateur
qui ne parvient pas a resoudre son probleme de succession. On touche la un
probleme crucial qui concerne le fonctionnement du pouvoir dans l'entreprise.
Les problemes de pouvoir et de
patrimoine sont intimement lies et conduisent le chef
d'entreprise a une veritable impasse dont it ne peut sortir que par la cession
de son entreprise. Au sein de la famille, it n'a pas ete possible de trouver un
manager competent. Les interets des descendants divergent. Le souci de la
diversification du patrimoine, la securite du placement immobilier, la facilite
de partage d'une fortune liquide, poussent le proprietaire a la solution la
plus simple qui est la cession.
C'est ainsi qu'on volt beaucoup d'entreprises parfaitement
rentables, constituant des centres d'activite a echelle humaine,
permettant l'epanouissement de leurs cadres dirigeants,
beneficiant d'une reelle souplesse de fonctionnement, degageant une valeur
ajoutee importante, dans l'impossibilite d'assurer leur developpement dans
l'independance pour des raisons de ce type. Elles sont alors absorbees dans le
cadre des grands groupes,
y perdent leur originalite, souvent leur efficacite economique et
leur rentabilite par defaut d'integration dans une structure trop lourde ou
trop rigide.
En resume, les raisons economiques predominent chez les groupes
engages dans des processus de concentrations industrielles : mettre un terme a
une concurrence ruineuse, faire face
a la menace des groupes strangers, realiser des economies de
production, assurer des diversifications.
Chez les petites ou moyennes entreprises a capitaux familiaux ou
personnels, lorsque les moyens financiers ne sont pas en cause, les raisons
humaines l'emportent largement. Aussi est-il legitime de s'interroger sur le
bien-fonds dune prise
de controle qui trouve bien souvent son origine dans de_s
comportements non economiques.
Paragraphe 3 : La prise de controle condition ou
consequence du developpement
economique ?
Le fait generateur de la cession d'entreprise nous parait plus
fondamentalement base sur le comportement du vendeur que sur les raisonnements
economiques de l'acquereur. La plupart du temps, les grands groupes sont
sollicites en permanence
Ipar les banquiers, les intermediaires qui leur
proposent des
"affaires a reprendre".
Le raisonnement economique justifiant la decision du groupe
acquereur est formule a la suite de cette offre. Plus rarement, les groupes se
livrent a une recherche systematique d'entreprises a absorber. C'est pourquoi
la prise de controle nous semble plus la consequence de la croissance
economique qu'une de ses conditions.
Bien au contraire, nous croyons dangereuse la constitution
d'ensembles enormes a structures trop rigides qui privilegient la solution des
problemes administratifs au detriment des initiatives et des creativites des
dirigeants. La souplesse d'adaptation a des situations economiques nouvelles
est au contraire un facteur de progres economique et d'amelioration du climat
social. Le dynamisme des equipes de production et de vente est favorise par une
dimension moyenne d'entreprise. Les grands groupes arrivent aux memes
conclusions et recherchent systematiquement une decentralisation en cellules a
dimension humaine qui fonctionne comme de veritables centres de profit. C'est
donc bien reconnaitre que la meilleure efficacite economique ne s'obtient pas
par des regroupements a outrance.
Les resultats des fusions et acquisitions sont mitiges.
Certaines enquetes font etat d'un taux de reussite inferieur a 45 %. Les
problemes huma4ns poses par ce type d'operation
sont si difficiles a resoudre que, faute de les surmonter, les
avantages economiques envisages disparaissent rapidement. Comment alors
concilier cette recherche d'un equilibre humain avec les avantages financiers
incontestables que confere la puissance de la fusion ?
La conjoncture economique actuelle, faite de changements
si brutaux, donnera l'avantage aux entreprises qui, tout en ayant
resolu leurs problemes de financement en capitaux propres, auront su conserver
des structures legeres dont la souplesse
d'intervention et d'adaptation garantira l'efficacite
economique.
Cependant, it faudrait comparer l'etude de Patrick NAVATTE (33)
sur les operations de fusion-absorption en France entre 1962 et 1974 a celle
effectuee dans le cadre de ce me-moire (de 1974 a nos jours). Nous chercherons
a voir comment la recherche de synergies liees aux regroupements a evolue au
cours de ces deux periodes grace a un environnement economique de plus ep plus
"turbulent".
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