La politique étrangère des Etats Unis d'Amérique vis-à -vis de la République Démocratique du Congo: de 1990 à 2006( Télécharger le fichier original )par Mahatma Julien Tazi K. Tien-a-be Université de Kinshasa - Diplome d'Etudes Supérieures en Relations Internationales 2009 |
§2. Présentation économique et pontentialité naturellesLa situation économique de ce pays qui a des potentialités énormes, capables d'assurer son développement rapide s'est dégradée de façon continue. Cette dégradation s'est fortement accentuée à partir de 1990, suite entre autres aux conflits sociopolitiques, à la situation de guerre et à une gestion macro-économique quasi-inexistante; ce qui a entraîné le retrait des principaux partenaires au développement. La RDC est l'un des pays les plus pauvres du monde avec un produit intérieur brut (PIB) récemment estimé à US $110 par habitant et par an (80(*)). Cette situation d'ensemble cache des disparités importantes entre provinces, allant d'US $32 dans les provinces du Bandundu et Orientale, à US $138 dans les provinces du Bas Congo et du Katanga jusqu'à US $323 a Kinshasa. L'indice de développement humain (IDH) était en 1999 de 0,429, à la fois en dessous de la moyenne pour l'Afrique subsaharienne (0,467) et en dessous de celle calculé pour les pays les moins avancés (0,442). Le pays est classé au 142ème rang sur les 162 pays retenus (81(*)). Ces mauvais indicateurs économiques contrastent avec les énormes potentialités humaines et les ressources naturelles abondantes du pays. La croissance économique a connu une évolution négative entre 1995 et 2000, régressant de -2,5 en 1995 à -14,37 en 2000. Entre 1990 et 1999 le PIB réel a baissé d'environ 52 % pendant que la population s'est accrue de près de 3,5 %, entraînant une baisse de la consommation des ménages de 23,0 % (82(*)) par rapport à son niveau de 1990 et conduisant ainsi à un niveau de pauvreté frappant près de 80 % de la population. La pauvreté est plus accentuée dans les ménages où la charge de famille est élevée, notamment ceux qui habitent les zones suburbaines (83(*)). La situation des finances publiques est caractérisée essentiellement par un déficit chronique du budget de l'État. D'où le recours répété à la planche à billets pour y faire face. Ceci conduit à l'aggravation de l'inflation dont le taux était de plus de 500 % en 2000, contribuant ainsi à la dégradation des conditions de vie des populations. Cependant, la politique monétaire du Gouvernement a permis de réduire la distorsion entre le taux de change officiel et celui du marché parallèle. La dette extérieure, estimée à environ US $13 milliards au 31 décembre 2000, avec un service accumulé de US $9 milliards, constitue un autre goulot d'étranglement pour l'économie du pays. Après quelques années de suspension suite à l'accumulation d'arriérés au niveau des partenaires bilatéraux et multilatéraux tels que le Fonds Monétaire International (FMI), la Banque mondiale (BM), la Banque Africaine de Développement (BAD), le Gouvernement a repris les discussions avec ces institutions dans le cadre du programme PPTE (84(*))
Au demeurant, la politique budgétaire - qui implique le maniement des prélèvements fiscaux, des dépenses publiques et du solde budgétaire - constitue la principale modalité d'intervention des pouvoirs publics pour l'accomplissement des fonctions d'allocation des ressources, de stabilisation macroéconomique et de redistribution des revenus au sens défini par Richard Musgrave (85(*)). A cet égard, autant le mode de financement des dépenses publiques influe sur la stabilité macroéconomique, autant il y a certaines dépenses de l'État qui agissent favorablement sur la croissance. Tel est le cas des interventions qui visent à fournir des biens publics : santé, éducation, sécurité, infrastructures, investissement en recherche et développement, etc. En République Démocratique du Congo, le débat sur la politique économique - lorsqu'il refait surface - se cantonne le plus souvent aux aspects et à la nécessité de la stabilisation macroéconomique. Le pays a connu, en effet, de nombreux épisodes d'inflation couplée à une dépréciation monétaire endémique et à des déficits budgétaires tout aussi chroniques. Il a tenté, dans les années 70 et 80, sans grand succès, de mener des programmes de stabilisation, qui, bien que comportant nominalement des mesures de réduction de la demande, se sont caractérisés principalement par des dévaluations à répétition (86(*)). Très récemment, à l'occasion du PIR et du PEG, deux programmes successifs de redressement économique exécutés sous l'oeil vigilant des institutions de Brettons Woods, la RDC a réussi à rompre le cercle vicieux de l'hyperinflation, de la dépréciation monétaire et du déclin prolongé du PIB réel (87(*)). Le débat sur la conduite de la politique économique au Congo n'est pas pour autant clos. Il est apparu, lors de revues successives menées par le FMI sur l'exécution du PEG, entre septembre 2002 et février 2006, que l'unicité des centres d'ordonnancement est loin d'être acquis, malgré la formalisation de la chaîne de la dépense publique. En outre, cherchant à contenir artificiellement l'expansion monétaire ainsi que les pressions sur les prix et le taux de change, la Banque Centrale a simplement couvert en devises certains dépassements budgétaires de l'Etat - une pratique fortement décriée par le FMI. Il subsiste ainsi de réels risques de dérapage du programme économique et, par conséquent, d'une remise en question du climat propice à la relance. (88(*)). L'examen de la situation socio-économique de la décennie 1990-2000 montre que la population congolaise vit largement en dessous du seuil de pauvreté dont le minimum est fixé à 1 $US par habitant et par jour. En effet, le PIB par habitant est parti de 250 $US par an en 1990 à 130 $US/hab./an en 1995 pour tomber à 123 $/hab./an en 1998, soit un taux moyen de régression de 1,8 % entre 1995 et 1998 (89(*)). Outre le PIB, l'indicateur PNB est également au rouge car il est passé de 247 $US/hab. en 1990 pour se situer à 110 $US en 1997. La même régression s'observe au niveau du taux de croissance annuelle qui est resté négatif durant presque toute la décennie. Les facteurs négatifs expliquant cette situation économique sont entre autres : les mesures de zaïrianisation en 1973, de radicalisation en 1974, les pillages de 1991 et 1993, la mauvaise gouvernance de la deuxième République engendrant l'instabilité politique caractérisée par une très longue transition démocratique, la guerre de 1997 et celle d'agression Rwando-Burundo- Ougandaise de 1998. A cela s'ajoute la suspension de l'aide et de l'investissement étranger pour le développement économique et social. Toutefois, il y a lieu de relever la contribution importante des ONG de développement par l'octroi des micros crédits aux initiatives locales de développement, sans oublier l'appui du Gouvernement de Salut Public aux Associations et ONG féminines. En résumé, nous pouvons penser que l'économie de la République démocratique du Congo serait l'une des économies les moins compétitives d'Afrique , la RDC faisant partie des pays les moins avancés (PMA), étant classé en 2006 parmi les dix pays les plus pauvres du monde. Sa structure économique est comparable à celle des autres pays de l'Afrique centrale, mais son économie est handicapée par une guerre civile larvée et un des niveaux de corruption les plus élevés de la planète (90(*)). La RDC, un des pays les plus vastes et les plus peuplés du continent africain, n'a pas le niveau de vie qui devrait correspondre à ses immenses ressources naturelles (minerais, bois précieux, produits agricoles, etc.). Les inégalités y sont très marquées. Environ 80 % de la population vivait en dessous du seuil de pauvreté fixé à 2 dollars par jour. Près de 44 % des femmes et environ 22 % des hommes n'ont aucun revenu. Les disparités régionales sont très fortes, avec un taux de chômage très élevé avoisinant les 40 % , des salaires et des prestations sociales dérisoires dans tout le pays.(91(*)) Elle occupe, en 2008, selon la Banque mondiale, la 178e position, c'est-à-dire la dernière place sur la liste des pays du monde considérés d'après leurs capacités à offrir de réelles facilités de faire des affaires (92(*)). Après une période de relatif dynamisme économique, la RDC a subi une sévère dépression entre le milieu des années 1980 et le milieu des années 2000, liée à une gestion marquée par la corruption, puis aux guerres civiles qui ont ravagé le pays. Avec une croissance de 8,2% en 2008 et de 2,7% en 2009, elle a ensuite été l'un des pays d'Afrique les plus touchés par la crise de 2008-2009 (93(*)).L'agriculture reste le principal secteur de l'économie, représentant 57,9 % du PIB en 1997, et occupait 66 % de la population active Malgré l'important potentiel du pays, la corruption s'est très tôt installée, sous le régime de Mobutu Sese Seko (1965-1997), avec une mainmise du pouvoir sur l'économie pour en détourner les profits dans le cadre d'un enrichissement personnel. La désorganisation du pays était telle qu'au début des années 1990, l'économie souterraine du Zaïre était estimée à trois fois le montant officiel du PIB (94(*)). L'histoire économique récente de la RDC est jalonnée de plusieurs tentatives d'assainissement et de redressement de l'économie. Confronté aux déséquilibres financiers, à la montée de l'endettement et à la stagnation de la production, le pays a été contraint, dans les années 1970 et 1980, à adopter les politiques de stabilisation et d'ajustement structurel recommandées par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (95(*)). Malgré la succession de plans économiques financés par les institutions internationales, depuis l'accession à l'indépendance, qui soutiennent le régime Mobutu, « allié de l'Occident » , l'inflation, le déficit budgétaire et la dette du pays, qualifiée par la suite de « dette odieuse » , n'ont fait que croître sous le régime de Mobutu. Au début des années 1990, face à la corruption endémique, la Banque mondiale et le FMI en vinrent à suspendre leur aide, et la plupart des interventions bilatérales furent arrêtées. La RDC fut incapable de faire face aux échéances de payement de la dette et les lignes de crédit du FMI furent arrêtées en février 1992, celles de la Banque mondiale en juillet 1993. Malgré l'introduction d'une nouvelle monnaie, le nouveau Zaïre (NZ), la gestion des devises resta anarchique, et l'inflation atteint 9 800 % en 1994, les prix en magasins changeant plusieurs fois par jour (96(*)). En mai 1997, l'AFDL, dirigée par Laurent-Désiré Kabila, prit le pouvoir et évinça le régime de Mobutu à l'issue de la Première guerre du Congo. Sous Kabila, le gouvernement et les entreprises publiques entamèrent un programme de reconstruction et tenta d'assainir la situation, alors que la RDC devait au Club de Paris 7 milliards d'euros. Le gouvernement commença par réformer le système d'imposition corrompu, les forces de police, et initia la remise en état du réseau routier laissé à l'abandon. Le Franc congolais fut réintroduit. (97(*)) En août 1998, la guerre éclata en RDC à la suite de désaccords entre Laurent Désiré Kabila et ses anciens alliés du Rwanda et de l'Ouganda. À cette époque, quelques progrès avaient été réalisés pour le rétablissement de l'économie du pays, mais les problèmes majeurs d'infrastructures de transport, de douane et d'imposition restaient pendants. Les finances publiques de l'État n'avaient pas été assainies et les relations avec le FMI et la Banque mondiale restaient conflictuelles. De nombreuses rentrées gouvernementales n'étaient toujours pas comptabilisées et non incluses dans les statistiques officielles. Les relations avec la Banque mondiale furent suspendues à la suite de l'impossibilité de finaliser un accord avec le Fond d'investissement de la Banque internationale pour la Reconstruction et le Développement (BIRD) pour la République démocratique du Congo. (98(*)) Le début de la deuxième guerre du Congo en août 1998 fut à l'origine du déclin de l'économie qui s'est poursuivi jusqu'au milieu des années 2000. Le territoire se retrouva divisé entre une zone gouvernementale et des zones rebelles, ce qui mit fin au commerce entre ces zones. Dans leur ensemble, les relations commerciales entre les différentes régions du pays restent faibles encore aujourd'hui.
Après une reprise de l'inflation en août 1998, le gouvernement commença à essayer de réguler les prix par des lois. Il reprit également le contrôle des exportations. Ensemble, ces mesures affectèrent grandement la continuation des activités liées au commerce extérieur. De plus, les succès restreints de la lutte contre l'inflation et la dépréciation de la monnaie furent anéantis dès le début de l'offensive rebelle dans l'est du pays. La guerre réduisit drastiquement les revenus du gouvernement et accrut la dette extérieure. Les acteurs du commerce extérieur se firent moins présents, cela étant lié aux incertitudes sur l'issue du conflit et à l'augmentation du contrôle et de la pression fiscale du gouvernement. L'écart important entre le taux officiel et celui pratiqué en rue pour la vente de francs congolais contre des dollars US força les commerçants à évaluer leurs biens importés au taux officiel pour acheter des devises locales. Les ressources de l'est du pays furent désormais exploitées par les forces rebelles ou les occupants étrangers. Le Rwanda devint par exemple exportateur de diamants et de coltan, bien que n'en disposant pas sur son territoire national. Les infrastructures défaillantes, un cadre légal incertain, la corruption, un manque d'ouverture économique et financière de la part du gouvernement, restent des freins à l'investissement et à la croissance économique. Le FMI et la Banque mondiale (99(*)) multiplient les collaborations avec le nouveau gouvernement en vue de restaurer des plans économiques cohérents, mais les réformes institutionnelles peinent à suivre. Face à la dépréciation de la monnaie, le gouvernement a pris des mesures drastiques en janvier 1999 : le dollar US fut banni des transactions commerciales courantes, position qui fut revue plus tard. Le gouvernement peine toujours à promouvoir les exportations, bien que l'impression de nouveaux billets ait repris. La croissance économique fut fortement négative en 2000 de par la difficulté de satisfaire les conditions fixées par les donateurs institutionnels, les faibles exportations et l'instabilité régnante. Les conditions économiques se sont améliorées depuis fin 2002, avec le retrait de la plupart des troupes d'occupation. Plusieurs missions du FMI et de la Banque mondiale sont intervenues pour mettre en place des plans de développement, et le gouvernement de transition a commencé la mise en oeuvre des premières réformes. Une grande part de l'économie du pays reste cependant hors des indicateurs du PIB, l'économie souterraine restant majoritaire. Avec une paix relative dans le pays depuis 2003, la RDC envisage d'augmenter ses exportations d'électricité vers le Zimbabwe et l'Afrique du Sud jusqu'à 500 mégawatts (essentiellement produite à partir du barrage d'Inga). La distribution d'électricité est actuellement confiée à une société zambienne. * 80 PNUD: Rapport National sur le Développement Humain 2000 en RDC, p.224. * 81 Rapport annuel de la Banque Centrale du Congo, Historique de la Situation Macro-économique de la RDC et Perspectives d'Avenir, Juin 2001. * 82 Troisième Conférence des Nations Unies sur les Pays Moins Avancés, Mémoire de la RDC. * 83 PNUD: Rapport national sur le Développement humain 2000, Gouvernance pour le développement humain en RDC. * 84 STRATÉGIE OMS, op.cit. * 85 MUSGRAVE, R. ET MUSGRAVE, P., Public Finance in Theory and Practice, New York, McGraw Hill, 2008, p.85 * 86 KABUYA KALALA et KIKASSA MWANALESSA , Stabilisation économique et financière au Zaïre : 1978-1980. Des dévaluations en cascade à la démonétisation, Kinshasa, Cepas, 1980, p.32 * 87 CLEMENT, J.A.P. (éd.), Post conflict Economics in Sub-Saharan Africa. Lessons from the Democratic Republic of the Congo, International Monetary Fund, Washington, D.C., 2004, p.56 * 88 KABUYA KALALA, F., La politique économique revisitée en RDC : pesanteurs d'hier et perspectives, éd. Economica, paris, 2000, p.120 * 89 Rapports PNUD, 2000, op.cit. * 90 MABI MULUMBA, Les dérivés d'une gestion prédatrice, le cas du Zaïre devenu République démocratique du Congo, éd. CRP, Kinshasa, 1998, p.40 * 91 BEZY, F., Problèmes structurels de l'économie congolaise, éd. L'Harmattan, Paris, 2008, p.63 * 92 RAPPORT de la banque mondiale, cité par l'OCDE, Perspectives économique en Afrique, 2005-2006 * 93 LUWANSANGU, P., « Bilan économique de la RDC 2001-2006 : est-ce la fin de la malédiction ? », in Journal Le Potentiel, n°3467, 6 juillet 2005, p.4 * 94 MUTUMBA LUKUSA, Déséquilibre macroéconomique et ajustement au Zaïre, PUK, Kin, 1997, p.65 * 95 KABUYA KALALA et KIKASSA MWANALESSA, op.cit., p.36 * 96 KODILA TEDIKA, « La stratégie de réduction de la pauvreté en RDC, où en sommes nous ?», in Journal Le Potentiel., n°4278, mardi 25 mars 2008 * 97 KABUYA KALALA, F. et TSHIUNZA MNIYE, «L'économie congolaise en 2000-2001: contraction, fractionnement et enlisement», in MARYSSE, S. et REYNTJENS, F. (dir.), L'Afrique des Grands lacs. Annuaire 2000-2001, L'Harmattan, Paris, 2001, pp369-387 * 98 KABUYA KALALA, F. et TSHIUNZA MNIYE, op.cit.p.387 * 99 Rapport Transparency International, l'indice de la corruption 2007 |
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