Section IV : Le costume et quelques accessoires du
Ku'ngang
Il a été question ici de présenter
morphologiquement et symboliquement ces accessoires en prenant en compte, dans
la mesure des possibilités, de la cosmogonie de cette
société secrète.
A- Le costume
L'élément caractéristique du masque
Ku'ngang ce sont les cheveux qui le constituent. Il est conçu
avec une loge, sorte de cagoule prévue pour recevoir la tête du
porteur. Tout autour de la loge, des tresses faites de vrais cheveux humains
pendent au moins jusqu'aux genoux du porteur. La forme de la partie faciale du
masque varie selon le costume et le réalisateur. Elle est tantôt
ovoïdale (Photo 8a) ou polygonale (Photo 8b). Ce qu'ils ont en commun ce
sont les trous aménagés au niveau de la bouche et des yeux pour
respirer et voir. N'ayant jamais porté ce masque, nous ne pouvons
certifier le confort du porteur. En effet, si on considère que la
plupart du temps, les porteurs tiennent d'une main le masque par le menton pour
le décoller du visage, on peut déduire qu'il n'est pas
évident de s'y sentir à l'aise. On peut lire sur la face de
certains masques, des expressions particulières de peur, de joie, de
détresse ou de fureur. La face est généralement
perlée (Photo 7b) ou cousue de cauris (Photo 6a, b et d) sur un morceau
d'étoffe rouge. Une couronne de cheveux plus ou moins accentuée,
faisant corps avec le masque, est à la base des cornes qui le
surmontent. Ces cornes dont le nombre varie d'un costume à un autre sont
recouvertes en partie de cauris cousus sur un morceau d'étoffe rouge.
Les cheveux qui pendent sont des longues tresses
minutieusement confectionnées. Chaque tresse est ceinturée
à intervalle irrégulier par des bouts d'étoffes parfois
scintillantes. Celles-ci assurent davantage la fermeté et
l'étanchéité de tresses. Ce costume parait aussi simple
que sa confection et le matériel utilisé.
B-La confection du costume
L'on a besoin de peu de chose pour réaliser ce costume.
Parmi les objets utilisés, on peut citer des cheveux, de la ficelle, des
cauris, des cornes d'antilope, de gazelle et ou de boeuf, l'aiguille, de la
paille pour tresser le masque facial, des pièces d'étoffe et un
pot de colle.
Le masque que l'on tresse dans la paille doit pouvoir
être facilement enfilé sur la tête. Il est ensuite recouvert
d'un tissu sur lequel les éléments seront cousus. Une fois ce
masque achevé, vient l'étape d'ajustement des cornes. Un tissu
est solidement cousu sur la base des cornes. Il permettra de coudre les cornes
sur le masque. Les tresses quant à elles sont faites
séparément. On prend trois ficelles de même longueur dont
on fait des mêlées. A Chaque mêlée, on insère
une touffe de cheveux de manière à obtenir une longue
continuité (voir photo9). Pour plus d'adhésion, les fils sont
encollés au fur et à mesure que l'on met des cheveux. Quand les
tresses sont achevées, on les tond tout le long pour les rendre plus
régulières. Enfin, on y coud par endroit des morceaux
d'étoffes rouges et blanches pour non seulement mieux retenir les
tresses, mais aussi pour décorer. Quand il y a suffisamment de tresses,
on serre les bouts de ficelle débordants pour les fixer sur la couronne
située sur la partie supérieure du masque. En ce qui concerne les
finitions, les cauris ou les perles sont cousus sur le tissu qui recouvre la
face et la base des cornes et le tour est joué.
A ce stade, notre masque reste un objet d'art inoffensif et
incapable d'une action quelconque. C'est après le rituel de sa
consécration qu'il ne sera plus permis aux non initiés de s'y
approcher. Il aura alors acquis le pouvoir qui fait de lui comme la plupart des
objets d'art bamiléké, un objet craint (PERROIS et NOTUE, 1997,
101)18.
En plus de ce costume, il existe d'autres objets qui
participent de l'univers du Ku'ngang, notamment des masques de bois et
des statues et dont l'observation nous a permis d'en tirer des signes
graphiques que nous avons utilisés pour la création picturale.
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a) forme ovoïdale à cauris
b) Formes rectangulaires à cauris et perlées
Photo 8 : masques cagoules
Ku'ngang
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Photo 9 : Le chef de clan tressant des cheveux
pour confectionner les masques
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La statue en elle-même est très réaliste
et représente une femme ; bien que le visage soit masculin.
Proportionnellement, la tête représente le tiers de la hauteur
totale qui est sensiblement égale à 30cm. Le tronc est moyen et
les jambes frêles. Le bras gauche est plié et la main
portée vers la hauteur de l'épaule. Dans celle-ci un trou est
aménagé et les doigts suggérés. Ce trou
reçoit selon les circonstances, une branche d'arbre de paix, une
flèche ou un couteau.
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