![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo1.png)
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Master Sciences du Territoire
Master 2 Recherche « Villes, Territoires et
Durabilité »
Dirigé par Olivier SOUBEYRAN
Mémoire soutenu par
Nathalie MOYON
Le 16 septembre 2010
Sous la direction de Sylvie DUVILLARD
Entre Convention Alpine, Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives locales,
quelles perspectives pour les politiques foncières
volontaristes dans les Alpes ?
Membre du jury :
Sylvie DUVILLARD,
Maître de Conférence à l'Université
Joseph Fourier, Grenoble 1
et à l'Université Pierre Mendes France, Grenoble
2
Paulette DUARTE,
Maître de Conférence à l'Université
Pierre Mendes France, Grenoble 2
Alexandre MIGNOTTE,
Directeur de CIPRA France, tuteur de stage
MOYON Nathalie
Master 2 recherche Sciences du territoire
« Villes, territoires et durabilité »
Novembre 2010
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo3.png)
INSTITUT DE GEOGRAPHIE ALPINE
Contrat de diffusion des mémoires
Entre
L'auteur du mémoire, Melle MOYON
Nathalie
Adresse : Grenoble
Intitulé du mémoire : Entre Convention Alpine,
Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives
locales, quelles perspectives pour les politiques foncières
volontaristes dans les Alpes ?
Et
L'université Joseph Fourier pour le
compte de l'Institut de Géographie Alpine ; ci-après
« l'Université ».
Article 1
Dans le respect des droits de propriété
intellectuelle, relativement à la protection des données à
caractère personnel, et soucieuse de donner davantage de reconnaissance
aux mémoires réalisés par les étudiants de l'IGA,
l'Université entend favoriser leur diffusion sur support papier et
support électronique.
Article 2
Le présent contrat n'a pas de caractère
exclusif. L'auteur se réserve le droit d'une diffusion concomitante de
son mémoire aux conditions de son choix.
Article 3
L'auteur autorise l'Université à diffuser ses
travaux dans les conditions suivantes :
|
OUI
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NON
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- CONSULTATION CONTROLEE SUR INTERNET
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|
- DIFFUSION INTERNET
SANS RESTRICTION D'ACCES
|
Article 4
La signature du présent contrat n'oblige en aucun cas
l'Université à diffuser le mémoire en ligne. Sa diffusion
reste soumise à l'accord du jury.
Article 5
L'auteur certifie que l'exemplaire du mémoire remis
à l'Université est conforme à la version officielle de son
travail remise à ses enseignants.
Article 6
L'auteur est responsable du contenu de son oeuvre. Il certifie
avoir obtenu toutes les autorisations écrites nécessaires
à la constitution de son mémoire. L'Université ne peut
être tenue responsable de toute représentation illégale de
documents et de tout délit de contrefaçon (plagiat).
L'Université se réserve le droit de suspendre la consultation
d'une oeuvre après avoir pris connaissance du caractère illicite
de son contenu.
ATTENTION: En cas de non dépôt du mémoire
en bibliothèque, le diplôme ne pourra pas être
délivré.
Fait à GRENOBLE, le 1ier novembre 2010
La direction L'auteur
NOTICE ANALYTIQUE
Observations du jury
A : Très bon mémoire
B : Bon mémoire mais avec des faiblesses sur
quelques aspects
C : Mémoire acceptable
présentant un intérêt particulier sur certains aspects
Précisions éventuelles sur les
faiblesses et les forces du mémoire :
Signature
|
FILIERE Master 2 Sciences du territoire ANNEE
UNIVERSITAIRE : 2009-2010
? IUP ? MASTER
AUTEUR
|
NOM
|
PRENOM
|
MOYON
|
NATHALIE
|
TITRE
|
Entre Convention Alpine, Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord et initiatives locales, quelles
perspectives pour les politiques foncières volontaristes dans les Alpes
?
|
UNIVERSITE JOSEPH FOURIER
Institut de géographie
alpine
|
Nom et prénom du directeur de mémoire
|
Stage sous convention :
organisme et lieu
|
Nom et prénom du
maître de stage
|
DUVILLARD Sylvie
|
CIPRA France
Grenoble
|
MIGNOTTE Alexandre
|
MOTS CLES
|
Foncier, Convention Alpine, DTA des Alpes du Nord, politique
foncière
|
TERRAIN D'ETUDE OU D'APPLICATION
|
Alpes du Nord
|
PERIODE DE
L' ETUDE
Mars 2010-Août 2010
|
EMPRISE GEOGRAPHIQUE DE L' ETUDE
latitude/longitude
ex. N.S.E.O.
|
|
RESUME
Puisque de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre une
politique foncière, pourquoi celle-ci semble-t-elle être une
action si difficile à mener pour les acteurs locaux ? Dans le contexte
alpin, les caractéristiques spécifiques des territoires jouent
peut-être un rôle particulier dans cette difficulté du
passage à l'action foncière, autrement dit, existe-t-il une
spécificité alpine en matière de gestion foncière?
L'hypothèse développée ici est la
suivante : l'outil de l'action publique ne conditionne pas
nécessairement l'efficacité de la politique foncière, mais
il révèle des discours produits par des cadres normatifs. C'est
donc la démarche mise en oeuvre localement, adaptée aux objectifs
de chaque territoire, qui détermine l'efficacité, voire
l'efficience, d'une politique foncière volontariste.
L'objectif de ce travail de recherche est de montrer de
quelles manières des outils existants (de planification,
réglementaires, fiscaux...) mettent en oeuvre des démarches
jugées efficaces, voire innovantes. In fine, nous envisagerons la
transposabilité de ces démarches, autrement dit, de mettre en
exergue les conditions de réussite d'une politique foncière
volontariste. Ce travail a ainsi identifié trois pistes de recherche :
la spécificité alpine, le rapport au droit et à la norme,
le hiatus entre procédures et bricolage foncier. Enfin, trois axes de
travail ont été poursuivis : l'analyse de deux cadres normatifs
de l'aménagement alpin -la Convention alpine et la Directive
Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord-, l'analyse et la diffusion
de bonnes pratiques en matière de gestion foncière, et enfin, la
recherche de définitions, de dispositifs et d'outils pour une gestion
foncière durable des territoires alpins.
RESUME Anglais
Although many tools exist to implement a land policy, it still
seems difficult for local actors to conduct it. In the alpine context, the
specific characteristics of areas may complicate the transition to a proactive
land policy : does there exist an alpine-type land management?
The hypothesis developed here assumes that the measures chosen
for a policy do not determine the effectiveness of land policy, but it reflects
state-of-minds from normative frameworks. A key to understand to which extent a
policy could be efficient has to be found in local configurations, unique for
each territory. Which tools (planning, regulatory, tax ...) are used to
implement policies considered as effective or innovative?
Finally, we will consider the transferability of these
policies, to highlight the conditions of success for a proactive land policy.
This report identifies three research hypothesizes : the specificity of alpine
territories, the relation to law and standards and the gap between property
procedures and the actor-tinkerer (practices).
Three working fields have been investigated: the analysis of
two regulatory frameworks of the Alpine planning - the Alpine Convention and
the Directive Territoriale d'Aménagement in the Northern Alps -
, the analyze and the dissemination of good practices of land management, and
the recension of definitions and tools for a sustainable land management of the
alpine area.
RESUME Allemand
Da viele Werkzeuge gibt, um ein Land Policy um zu
implementieren, warum scheint es zu einer schweren Aktion für die lokalen
Akteure zu erreichen? In der alpinen Kontext, die besondere Merkmalen der
Gebiete können eine besondere Rolle spielen : gibt es eine einzigartige
alpine Raumordnung?
Die Hypothese ist dass, das Werkzeug des staatlichen Handelns
kein automatische Einfluss auf die Effizienz der Bodennutzung Politik hat. Es
erklärt auch die Auslegung den normativen Rahmenbedingungen. Die
Berücksichtigung der lokalen Kontext mit seine eigenen Zielen , bestimmt
auch die Wirksamkeit und die Effizienz einer Land Policy .
Welche Werkzeuge (Planung, regulatorische, steuerliche ...)
verwendet werden, um Politik als wirksam oder als innovative umzusetzen? In wie
fern sind die analysierte Land Policy übertragbar?
Diese Arbeit besteht aus drei Bereichen der Forschung: die
Spezifität den Alpen, die besondere alpine Beziehung zum Gesetz und
Normen, die Kluft zwischen Theorie und Praxis in Property-Prozeduren.
Drei Linien werden verfolgt: die Analyse von zwei rechtliche
Rahmenbedingungen der Organisation Alpine - der Alpenkonvention und die
Richtlinie der Raumplanung in den Nordalpen - , die Analyse und Verbreitung
bewährter Praktiken Landmanagement, und schließlich die Rezension
den Definitionen und Werkzeugen, um eine nachhaltige Landnutzung des Alpenraums
implementieren.
|
Remerciements
Tout d'abord, je tiens à remercier Alexandre Mignotte,
directeur de la CIPRA France, qui m'a fait confiance et m'a permis de
travailler en parfaite autonomie durant ces six mois de stage. Je remercie
aussi la petite équipe de la CIPRA qui m'a accueilli chaleureusement
parmi eux.
Je remercie bien évidemment ma tutrice de
mémoire, Sylvie Duvillard, qui a su se montrer présente pour me
faire avancer dans cette démarche de recherche appliquée. Ses
conseils avisés et sincères ont permis d'aller jusqu'au bout de
ce mémoire.
Je tiens également à remercier l'ensemble des
acteurs rencontrés ou sollicités pour la réalisation de ce
travail. Merci pour le temps qu'ils m'ont accordé.
Enfin, je remercie tout particulièrement mes proches,
surtout celui qui partage mon quotidien, qui m'ont soutenu y compris durant
l'été où il était difficile de se mettre au
travail.
Sommaire
Introduction générale
3
Partie I.
Appréhender la question
foncière
9
Chapitre 1. Démarche générale
du mémoire
ou comment construire les bases d'une
énième étude sur le foncier
11
1. Une recherche appliquée aux questions
foncières dans les Alpes du Nord
12
2. « L'effort
méthodologique »
14
3. Production et construction des
données
19
4. Les entretiens
21
5. Liens avec d'autres travaux de recherche
22
Chapitre 2. Les miscellanées du foncier
27
1. Le foncier, de quoi s'agit-il ?
28
2. Qui se préoccupe du foncier ?
36
3. Comment agir sur le foncier ?
40
Partie II.
A la conquête du foncier
alpin
53
Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes
du Nord,
deux cadres normatifs face au foncier alpin
55
1. Quels discours sur le foncier alpin ?
56
2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du
combattant
67
3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs
alpins
72
Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête
de maîtrise foncière
79
1. Une ingénierie au service d'une politique
foncière à Chamonix
80
2. La
« participation-formation » dans le massif du Vercors
87
3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace
dans Belledonne
95
4. Vers la maîtrise foncière
107
Partie III. De la théorie à
la pratique
115
Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres
normatifs à la pratique des initiatives locales alpines
117
1. Grille d'analyse (C) « Cadres
normatifs et initiatives locales face au foncier alpin » :
concordance ou décalage ?
118
2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit
en aménagement ?
121
3. La figure de l'acteur-bricoleur
126
Chapitre 2. De la spécificité alpine
en matière de politique foncière
129
1. Des particularismes reconnus aux
spécificités proclamées
130
2. A qui la terre ?
135
3. Montagne et littoral même combat
foncier ?
139
Chapitre 3. Vers une gestion foncière
durable des territoires alpins
143
1. Foncier et durabilité
144
2. Pour des politiques foncières...
147
3. Elargir le champ de la réflexion
151
Conclusion
générale
157
BIBLIOGRAPHIE
165
ANNEXES
171
J'ai longtemps cru que le problème foncier
était de nature juridique, technique, économique et qu'une bonne
dose d'ingéniosité suffirait à le résoudre. J'ai
lentement découvert qu'il était le problème politique le
plus significatif qui soit, parce que nos définitions et nos pratiques
foncières fondent tout à la fois notre civilisation et notre
système de pouvoir, façonnent nos
comportements ».
Edgard Pisani, Utopie foncière, 1977
Introduction générale
Déjà en 1977, Edgard Pisani, homme politique
français mettait le doigt sur toute la complexité du
problème foncier, un problème politique incontournable.
D'ailleurs, son ouvrage Utopie foncière1(*) est une lecture
étonnamment pertinente plus de trente ans après son
écriture2(*).
Aujourd'hui, l'espace -le manque et le besoin- est devenu un
enjeu majeur dans les territoires urbains, périurbains et ruraux. Comme
en témoigne la forte hausse des prix du foncier et de l'immobilier, la
question de la pression foncière revêt « depuis le
début des années 2000, une acuité grandissante, une
préoccupation qui frappe l'ensemble des régions françaises
et particulièrement la région
Rhône-Alpes »3(*). Le foncier n'est donc plus un simple zonage à
l'intérêt géographique limité tel qu'il était
abordé par le Plan d'occupation des sols, car l'espace se trouve au
coeur d'un système de production de richesses et de contrôle de
rentes et plus-values. Ainsi, si la question foncière est
intéressante pour le géographe, c'est parce qu'elle traduit
publiquement et concrètement -par la matérialité du sol-
une mise en débat du territoire. Le territoire est défini ici
comme l'articulation entre identité, appartenance et appropriation,
c'est en cela un objet géographique à part entière. Par
ailleurs, le champ du foncier est vaste puisque la terre est le seul
élément matériel dont aucun homme ne peut s'affranchir
à moins de vivre en apesanteur, et lorsque l'on redescend sur terre,
gare à l'endroit où l'on pose le pied ! Toute partie
à un propriétaire ou des règles d'usage à ne pas
méconnaître (S. Duvillard).
Désormais, le « foncier » est
devenu un mot presque « tendance ». La remobilisation
publique et politique autour du foncier vient bousculer une de ses
caractéristiques : autrefois réservée aux
initiés et à l'intimité, abordée
intégralement que dans les cabinets des notaires, la question
foncière s'est véritablement transformée en
« problème foncier » discuté sur la place
publique4(*). La formulation
du problème foncier n'est donc pas nouvelle comme le montre E. Pisani,
mais elle est restée d'actualité. Le glissement sémantique
de la « question » au
« problème » s'est accompagné d'une
croissance des injonctions de « maîtrise
foncière », de « politique
foncière » ou encore de « stratégie de
régulation foncière »5(*) qui traduisent des attentes fortes envers les pouvoirs
publics en matière de foncier. La maîtrise foncière
positionne donc les décideurs politiques locaux, avec les maires en
première ligne, comme les acteurs incontournables du foncier, aussi
important sinon plus que les propriétaires fonciers eux-mêmes
(d'autant plus que les maires ou la collectivité sont potentiellement
des propriétaires fonciers). De leur point de vue, le foncier
relève du domaine de politiques publiques mais aussi, sinon plus, du
domaine des stratégies locales. La connaissance particulière du
maire concernant son territoire et ses administrés (dont les
propriétaires) lui permet d'apprécier les marges de manoeuvre
d'une négociation foncière. Bien souvent, la négociation
est une stratégie foncière préférée par les
maires au service de politiques d'aménagement individualistes (E. Pisani
1977, S. Duvillard 2001).
Des acteurs émergeants se positionnent également
sur cette thématique du foncier: la société civile et les
associations, par exemple Terre de Liens, ou des ONG telles que CIPRA France
développent une réflexion ou des actions concrètes. Ces
démarches qui restent encore assez marginales souhaitent faire valoir
l'intérêt général d'un bien commun, le foncier en
tant que ressource rare, indispensable et non renouvelable. Le système
d'acteurs mobilisés autour du foncier est d'autant plus complexe qu'il
concerne des acteurs variés : élus, techniciens, organismes
parapublics, habitants, propriétaires, agriculteurs, notaires,
géomètres, agents immobiliers, services fiscaux, promoteurs...
De plus, la succession des textes relatifs aux politiques
foncières semble montrer que la question foncière marque aussi
son retour au sein des politiques publiques de l'Etat. De la LOADDT de 1999
(Loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable
du territoire) qui comprend un volet foncier pour les contrats
d'agglomération, aux lois Grenelle I et II, en passant par la Loi SRU de
2000 (Loi solidarité et renouvellement urbains) qui a modifié la
mise en oeuvre des programme locaux de l'habitat (PLH) avec entre autre une
exigence de solidarité financière pour le logement social, toutes
les dernières « grandes lois d'aménagement »
ont participé à construire un discours sur le foncier6(*). Par exemple avec la Loi SRU, le
mécanisme mis en place consiste dans le prélèvement sur
ressource de la commune « déficitaire » en logements sociaux
(les 20% de logements sociaux). On peut d'ailleurs remarquer que la Loi SRU
répond à une demande de la société civile en faveur
de l'affichage d'une règle stable et égale pour tous. En ce sens,
elle s'oppose aux pratiques de négociations informelles des
collectivités et plaide dès 2000 pour un retour de la
maîtrise foncière par acquisitions publiques. Si le foncier occupe
une place de choix dans l'actualité territoriale, dans les discours et
finalement peu dans les pratiques, le développement durable n'a rien
à lui envier, bien au contraire.
En effet, l'importance croissante prise par les questions
environnementales et le développement durable au sein des sciences
humaines et sociales traduisent les évolutions sociales et
sociétales, sans épargner le champ du foncier. La prise en compte
de ces questionnements se traduit d'ailleurs par de nouveaux
référentiels pour appréhender le foncier : ceux-ci
tentent d'y intégrer une plus grande « durabilité du
territoire ». On observe ainsi la consommation de terres naturelles
ou agricoles qui « partent » à l'urbanisation chaque
année : en moyenne, un département français tous les
10 ans7(*). Des chiffres
démonstratifs qui appuient un maitre mot unanime :
« économisons le foncier ! ». Rationnaliser la
consommation de foncier met en exergue la pression exercée sur les
terres agricoles qui s'avèrent être finalement plus
« sensibles » car moins protégées en tant que
tel, et donc plus volatiles que le foncier naturel. Ce qui s'expliquerait
peut-être par une « protection » des espaces
agricoles plus récente que celle des espaces naturels qui disposent
quant à eux d'un grand nombre d'outils et de moyens financiers :
par exemple, la labellisation « réserve naturelle »
bénéficie d'aides financières alors que le dispositif
« PAEN »8(*) n'est dispose pas.
Selon ces deux perspectives distinctes, de pression
foncière accrue et de développement durable, l'espace alpin fait
l'objet de nombreuses attentions. La réalisation d'un stage au sein de
CIPRA France9(*) s'ancre
dans cette réalité puisque l'ONG s'engage à construire,
à l'échelle de l'arc alpin, une connaissance territoriale alpine
spécifique, et à promouvoir les bonnes pratiques en
matière de développement territorial alpin. CIPRA France
identifie ainsi une pression foncière dans les territoires alpins
français selon trois modalités que le travail de recherche a
permis d'affiner :
ü la surface disponible en vallée est plus
limitée qu'ailleurs,
ü la périurbanisation autour des pôles
urbains alpins s'étale désormais dans les vallées
avoisinantes et les piémonts (par exemple dans le Sillon alpin et les
massifs préalpins),
ü l'accès au foncier des populations (surtout
locales) au sein des stations et bassins touristiques alpins caractérise
une situation très critique.
Dans ce contexte délicat, l'espace est un bien de plus
en plus convoité et les paysages, qui sont une richesse de l'espace
alpin, sont menacés. A terme, la pression foncière met en danger
la dynamique des activités économiques majeures que sont
l'agriculture et le tourisme. La pression foncière alpine menace aussi
l'habitat permanent des populations locales et les activités
industrielles par l'effet dissuasif que représente une hausse des
coûts d'accès au foncier. Il semble qu'une demande sociale
croissante, notamment de la part des collectivités alpines, pousse
à traiter cet enjeu territorial majeur sans plus attendre. Pour Sylvie
Duvillard, « tout se passe comme si les problèmes
d'aujourd'hui et les incertitudes de demain se dissolvent dans la question
foncière. Celle-ci est liée à la prise de conscience qu'un
certain nombre de problèmes en montagne revêtent une dimension
foncière incontournable, à l'instar de ceux rencontrés
dans les villes »10(*). L'une des dimensions de la question foncière
abordée par ce travail s'interroge donc sur l'existence d'une
spécificité alpine en matière foncière. En d'autres
termes, les caractéristiques spécifiques des territoires
alpins influencent-elles la mise en oeuvre de politiques de maîtrise
foncière ? Certes, l'approche est assez triviale en
géographie mais elle semble ici nécessaire puisque, s'il y a
spécificité alpine en matière de politique
foncière, les procédures et les outils règlementaires sont
peut-être à repenser ou leur utilisation à adapter.
Au moment même de la réalisation de ce travail,
le dernier numéro de la Revue de Géographie Alpine
intitulé La gestion foncière au coeur du devenir des
territoires alpins, amorce une réflexion de plusieurs
chercheurs-géographes autour de la problématique foncière
alpine. Sous la houlette de S. Duvillard, la question suivante interpelle les
chercheurs : entre arbitrages politiques et marchés, est-il
possible d'identifier des modes de gestion foncière spécifiques
dans les territoires de montagne ? L'objectif ici est « de
mettre en lumière les expériences engagées par les
collectivités alpines pour agir à différentes
échelles sur les enjeux de développement saisis à travers
la problématique foncière »11(*). A l'instar de cette
réflexion coordonnée par la tutrice de ce mémoire, mais
également en lien avec les autres initiatives qui se constituent
aujourd'hui (au Suaci, au Cemagref de Grenoble), cette recherche initie un
projet sur le foncier porté par CIPRA France. Souhaitant pleinement
s'inscrire dans une dynamique émergente, l'un de ses objectifs est de
travailler à la définition -par l'illustration- de ce que
peuvent être les perspectives de politiques foncières
volontaristes dans les Alpes.
Ce mémoire s'intéresse à la
capacité d'une collectivité à décider des formes
d'occupation de son territoire suivant son projet et les objectifs qu'elle
s'est fixée. Pour autant, les perspectives de politiques
foncières volontaristes qui peuvent en découler tâcheront
d'éviter l'écueil de la « mode du
durable »12(*) : lorsqu'en amont, une politique volontariste
s'oriente en faveur d'un développement durable de son territoire, alors
seulement le rapprochement entre des actions concrètes et un discours
peut être effectif. De plus, l'élaboration de la notion de
développement durable a permis d'inverser le cheminement classique de
construction d'une utopie, initialement « de l'audible au
faisable » : le développement durable démontre une
démarche d'utopie « du faisable à
l'audible », il
devient ainsi une trajectoire vers laquelle il faut tendre (O.
Soubeyran 2010). En d'autres termes, si une collectivité assure par
exemple la pérennité d'une exploitation agricole en fond de
vallée qui subissait jusqu'alors une très forte pression
foncière (par le rachat des terres par la commune par exemple), c'est
par cette action concrète (le « faisable ») que la
commune s'inscrit dans une politique de développement durable et qu'elle
peut produire un discours sur sa démarche de gestion raisonnée du
foncier (« l'audible »). La primauté de l'action
concrète est la condition sine qua non à la production
d'un discours de développement durable, y compris dans le champ du
foncier.
Ainsi, les premiers questionnements qui se posent à
cette recherche sont de deux ordres :
ü Comment mesurer cette pression foncière dont
tout le monde parle, évaluer son ampleur exacte et sa nature ?
ü Quels sont les outils de maîtrise foncière
mobilisables par les collectivités ? Sont-ils utilisés et
suffisent-ils face à l'ampleur du phénomène actuel?
En effet, malgré les outils au service d'une politique
foncière (outils de planification, d'acquisition foncière,
d'aménagement opérationnel ou encore les outils fiscaux et
financiers), la maîtrise foncière -que tout le monde
appelle pourtant de ses voeux- demeure une action difficile à mener pour
les acteurs locaux. On peut donc se demander à juste
titre si le législateur et l'aménageur ont réellement
inventé les outils d'une maîtrise matérielle et symbolique
du territoire (symbolique afin d'embrasser également les changements de
mode d'appropriation). Pour S. Duvillard, cette « illusion de la
maîtrise » est bien visible dans les territoires ruraux.
L'ensemble de ces cadres règlementaires et législatifs, et des
procédures et outils qui les accompagnent, constitue le contexte
normatif de l'aménagement dans lequel se déroule l'action
foncière : il parait donc intéressant de regarder
ces cadres normatifs comme un moyen de saisir les discours produits, notamment
sur l'objet foncier.
Deux cadres normatifs ont alors été retenu afin
de saisir leur discours en matière de foncier : la Convention
alpine et la Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du
Nord. Leurs territoires d'application se recoupant, ils ont permis de dessiner
les limites du territoire d'étude qui se confondent donc à celle
du projet de DTA. Tout d'abord la Convention alpine est un traité de
droit international, visant à assurer la protection et le
développement durable de la chaîne alpine. Entré en vigueur
en 1995 mais signée en 1991 par les ministres en charge de
l'environnement dans les pays alpins13(*), ce traité a pour objectif la protection
étendue et le développement durable des Alpes. La Convention
alpine est concrétisée par des protocoles dits d'application,
prévus pour douze domaines. Huit d'entre eux ont déjà
été élaborés sur les thématiques telles que
l'aménagement du territoire et le développement durable: ce cadre
normatif peut-il être un recours supplémentaire pour
répondre aux questions de gestion foncière dans l'espace alpin
français?
De façon similaire, le projet de DTA des Alpes du Nord
manifeste une volonté étatique de « préserver le
milieu naturel comme une condition indispensable à toutes perspectives
de développement à long terme »14(*). Cet instrument de
planification territoriale ouvre-t-il de nouvelles perspectives pour les
collectivités alpines françaises ? Ce projet de DTA, qui se
réfère d'ailleurs à plusieurs reprises à la
Convention alpine, pourrait ainsi servir de base à un
référentiel permettant d'appréhender les bonnes pratiques
en matière foncière sur le territoire des Alpes du Nord. De plus,
l'analyse du jeu d'acteurs s'avère nécessaire pour
appréhender les dimensions symboliques mobilisées autour du
projet de DTA : qui l'a fait et contre qui ?
Plus précisément, la question spécifique
soulevée à travers cette recherche s'attache à voir
comment les acteurs se saisissent des outils pour les adapter à
leurs problématiques foncières locales. En somme, il
serait inexact de qualifier une politique foncière de
« bonne » ou « mauvaise » (J. Comby,
2008). La maîtrise foncière fait plutôt
référence à des décisions concernant l'occupation
d'un territoire suivant le projet d'une équipe municipale, ses ambitions
et les objectifs qu'elle s'est fixée : il y a donc des politiques
plus ou moins adaptées aux objectifs. Toutefois, les effets pervers de
l'action publique ou de l'action aménagiste sont nombreux. Une mesure
adoptée peut produire un effet inverse de l'objectif poursuivi et
même d'autres effets imprévus, des « conséquences
non intentionnelles de l'action aménagiste »15(*). Alors, sont-ce les
outils qui sont inadaptés, insuffisants, difficiles à combiner ou
à appliquer, ou la volonté politique de les mettre en oeuvre qui
fait défaut ? Selon S. Duvillard, les outils au service
des politiques ne manquent pas, les auteurs le soulignent (Clivaz, Herrera,
Tranda-Pittion) et surtout les acteurs des espaces alpins, dès lors
qu'ils objectivent l'importance de la dimension foncière dans la gestion
de leur territoire, cherchent des solutions adaptées à un espace
spécifique, celui des Alpes16(*).
L'hypothèse privilégiée
considère que l'outil n'est pas vraiment intéressant en
soi, au profit d'une démarche mise en oeuvre, adaptée
aux objectifs définis par chaque territoire. Cette hypothèse
propose deux modalités de réponse : soit l'on
s'intéresse à une meilleure utilisation des outils existants (les
politiques foncières locales), soit l'on débat sur la
modification de ces outils pour définir de nouvelles politiques
foncières nationales. En matière de foncier, la force de l'outil
est possible grâce à la loi : pour le projet de DTA, son
opposabilité doit être assurée dans cette perspective. Afin
de tester cette hypothèse, le stage à CIPRA France permet une
mise en regard du cadre législatif et des acteurs de terrain et leurs
pratiques. L'objectif du travail de recherche est donc bien de montrer
comment l'on peut utiliser des outils de maîtrise foncière
existants pour mettre en oeuvre des démarches innovantes.
In fine, il s'agit de voir si ces démarches
sont transposables ailleurs. Dès à présent, des premiers
éléments de réponse apparaissent. Tout d'abord concernant
la démarche générale : celle-ci semble être
guidée par l'objectif politique de maîtrise foncière qui
devient alors moteur de l'action. Dans ce cas, les outils utilisés
s'appuient sur le cadre existant et vont au-delà : c'est sur ce
point que l'on peut considérer qu'il y a innovation territoriale en
matière de foncier. D'autre part, une autre posture semble placer la
démarche innovante au centre de l'action foncière : celle-ci
va jusqu'à distordre les outils classiques de gestion foncière.
Toutefois, là encore la démarche établie en amont a
guidé l'action. L'innovation réside dans l'utilisation même
des outils existants.
En outre, si l'analyse de cas concrets doit être
réalisée, il semble opportun de rentrer dans une démarche
de généralisation des réflexions et des outils et la
réflexion engagée par les cadres normatifs de
l'aménagement que sont la Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord
va dans ce sens. La méthodologie de recherche s'appuie donc notamment
sur la réalisation d'entretiens auprès d'acteurs locaux. Les
personnes ressources sont identifiées en fonction des trois terrains
d'études retenus dans le cadre du stage. Chamonix constitue le premier
terrain d'études : il s'agit d'étudier les pratiques de
maîtrise foncière à l'oeuvre avec, a priori, une
utilisation novatrice des outils existants qui traduirait peut-être une
volonté de gestion foncière plus techniciste. Le second terrain
est celui du plateau du Vercors, en particulier du territoire
« Quatre Montagnes » : sur cet espace, la prise en
compte de la question foncière s'est d'abord accompagnée de la
réalisation d'une Charte paysagère. Aujourd'hui, la
volonté de mettre en oeuvre une véritable politique
foncière encourage à aller au-delà, c'est ce qu'ambitionne
la Charte de Développement. Dans le cadre de la Charte du Parc naturel
régional du Vercors, des ateliers sur la mise en oeuvre d'une politique
foncière ont été mis en place en direction des
élus. Cette stratégie de formation des politiques locaux vise
à montrer comment il est possible d'utiliser les outils
existants pour les mettre au service d'une politique visée. Enfin, le
massif de Belledonne est le troisième terrain retenu. Ses balcons qui
surplombent la vallée du Grésivaudan subissent les
conséquences d'une périurbanisation croissante non
maîtrisée, sous la puissante influence du bassin grenoblois.
Pourtant, des pratiques foncières volontaristes semblent aussi se
structurer dans le massif, et la perspective de la révision du SCOT de
la région urbaine grenobloise (dont Belledonne est un secteur) pose
clairement la question des limites intangibles à l'urbanisation.
Ainsi, la réalisation du stage au sein de CIPRA France
offre un contexte qui permet de croiser et d'enrichir mutuellement les deux
approches de ce travail de recherche appliquée : d'une part, le
recul théorique et critique de la posture de recherche, et d'autre part,
l'expérience pratique du terrain par le stage. Ainsi, le présent
mémoire met en regard la demande du stage et la posture de recherche et
son ambition est explicitée dans le titre choisit : Entre
projet de DTA Alpes du Nord, Convention alpine et initiatives locales :
quelles pratiques et perspectives de gestion foncière dans les
vallées alpines françaises ? L'organisation
générale du mémoire s'articule selon trois axes. La
première partie s'attachera à poser les bases de l'objet foncier,
permettant ainsi d'appréhender avec une plus grande justesse le foncier
comme objet d'étude. La seconde partie du mémoire entrera au
coeur des investigations menées durant ces six mois : entre analyse
du discours foncier produit par les deux cadres normatifs, et pratiques
foncières volontaristes dans les Alpes du Nord, il s'agira d'aller
à la conquête de l'objet foncier alpin. Enfin, la dernière
partie permettra de répondre plus précisément à
l'enjeu d'articuler la théorie à la pratique en matière de
foncier, sur le territoire des Alpes du Nord.
Partie
I.
Appréhender la question foncière
Le foncier est un thème étudié depuis
longtemps et assez légitimement par les juristes s'attachant au droit,
les économistes modélisant les prix et les urbanistes se
référant au plan. Comme le remarque Aurélien Esposito-Fava
« la géographie s'est rarement préoccupée du
foncier [...] ce qui apparaît d'autant plus étonnant au regard du
paradigme qui la fonde : comprendre les interactions entre l'homme et la
terre, les sociétés et leur environnement »17(*). En fait, le foncier devient
un objet qui suscite l'intérêt du géographe grâce
à la montée en puissance du concept de
« territoire »18(*): c'est en quelque sorte par le territoire que la
géographie a trouvé sa légitimité scientifique pour
aborder le thème du foncier. La propriété foncière
matérialise alors une forme d'appropriation de l'espace.
Dans cette perspective géographique, la première
partie de ce mémoire s'attache à défricher la question
foncière sans toutefois prétendre à l'exhaustivité.
La métaphore du défrichement se comprend ici au sens propre et au
sens figuré. Au sens propre, il s'agit de faire référence
à un phénomène particulier à certains espaces
montagnards: l'enfrichement des versants dû à la déprise
agricole19(*). Cet enjeu
pèse sur l'usage du foncier alpin, mais l'urbanisation croissante (des
coteaux et balcons) et continue des fonds de vallée constitue une menace
encore plus criante. Au sens figuré, défricher le foncier, c'est
mobiliser activement cette thématique pour mieux la comprendre, dans la
théorie (les chercheurs notamment) et la pratique (les élus et
les techniciens).
Deux chapitres déclinent cette démarche
d'appréhension du foncier alpin. Le chapitre 1 a pour but d'expliciter
la démarche générale du mémoire en s'attachant aux
modalités de production des données et au cheminement de
l'interprétation menée. Le second chapitre souhaite apporter un
éclairage sur les « faits marquants » de la question
foncière : les acteurs, les échelles, les cadres de l'action
foncière et ses outils, telle est l'idée de
« miscellanées » du foncier.
Chapitre 1. Démarche
générale du mémoire
ou comment construire les bases d'une énième
étude sur le foncier
1. Une recherche appliquée
aux questions foncières dans les Alpes du Nord
1.1.
La démarche de recherche
Ce mémoire en géographie est l'aboutissement
d'une année de « Master 2 recherche Villes, Territoires et
Durabilité » dirigé par Olivier Soubeyran à
l'Institut de Géographie Alpine de Grenoble. La démarche de
recherche qui guide la réalisation de ce travail est le fruit d'une
collaboration entre Sylvie Duvillard en tant que directrice de mémoire,
Alexandre Mignotte, directeur de la structure d'accueil -le comité
français de la Commission Internationale pour la Protection des Alpes
(CIPRA France)- et moi-même.
La vision du foncier et l'utilité même de cette
approche du territoire sont dans les pas des réflexions de recherche
menées par Sylvie Duvillard dès 200120(*). Certes le champ du foncier
est vaste, mais on ne peut l'ignorer en tant que géographe car la terre
est en quelque sorte la matérialité du territoire. Puisque la
propriété foncière superpose deux couches distinctes,
d'une part le droit du propriétaire foncier (l'individu, personne
physique ou moral), et d'autre part le droit d'usage (le zonage public du PLU
par exemple), il s'agit de mettre en évidence le pouvoir du
propriétaire foncier et des représentations individuelles et de
montrer de facto la limite des politiques publiques dans la gestion de
l'espace. En ce sens, Sylvie Duvillard a développé une
réflexion selon laquelle « le foncier est bien plus qu'un
opérateur, il permet l'acte d'appropriation. Il révèle la
relation à un espace et permet l'intelligence de cette relation. Cet
acte d'appropriation parfois individuel ou collectif est capital dans la
construction des territoires et dans la pérennisation des constructions
territoriales »21(*).
Ainsi, l'objectif de ce mémoire de recherche est de
participer aux travaux sur la question foncière sous l'angle du
géographe. L'exercice souhaite mettre à l'épreuve le
postulat d'une spécificité alpine en la matière, une
clé d'entrée emblématique de l'Institut de
Géographie Alpine s'il en est. L'intérêt pour
l'apprenti-chercheur est d'aborder le thème du foncier par une approche
« originale » au sens premier du terme. Il s'agit ici d'une
approche par les cadres de planification, des cadres normatifs de
l'aménagement et du développement territorial qui ne sont pas
nécessairement « opposables » au sens du droit de
l'urbanisme22(*). Le
périmètre retenu, les Alpes du Nord, est concerné -entre
autre- par la Convention alpine et le projet de Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord dont l'aboutissement est proche23(*).
Cette démarche de recherche s'est appuyée sur la
réalisation d'un stage de six mois à CIPRA France dont le
siège est à Grenoble. Parmi les objectifs visés par CIPRA
France concernant ce stage, on énoncera les deux principaux :
ü Identifier des leviers d'action efficaces afin que la
question foncière participe au développement durable des
territoires de montagne.
ü Diffuser des bonnes pratiques en matière de
gestion foncière alpine raisonnée et durable pour les territoires
de montagne.
Dès 2007 une réflexion sur le thème du
foncier prend forme avec le projet d'un séminaire à vocation
technique et pratique (des échanges autour d'exemples concrets) sur
« la pression foncière dans les vallées
alpines ». Plusieurs questions alimentent la démarche de la
CIPRA : la mesure du phénomène de pression foncière,
les outils et leurs utilisations, le rôle potentiel de la Convention
alpine sur cette question... D'une manière générale, la
problématique transversale identifiée alors est la
suivante : « pourquoi n'a-t-on pas de réponse politique
et technique globale aux maux de la gestion foncière ? Quels sont
les obstacles à la mise en oeuvre d'une telle
réponse ? »24(*). Prévu pour novembre 2008, le séminaire
a échoué en raison des incompatibilités d'approches entre
certains partenaires. La CIPRA s'est alors réorientée vers des
travaux de recherche (2010-2011) pour préfigurer un séminaire
d'échanges sur cette question. Ce stage correspond à la
première phase du travail et ce mémoire constitue un rendu
intermédiaire.
1.2. Le problème
général de recherche25(*)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo4.png)
Figure 1. Le problème
général de recherche, N. Moyon 2010
L'objectif de ce travail de recherche est bien de montrer
comment l'on peut utiliser des outils (de planification, règlementaires,
fiscaux...) existants pour mettre en oeuvre des démarches efficaces
voire innovantes, qui servent une politique foncière. In fine,
il s'agit de voir si ces démarches sont transposables ailleurs,
autrement dit, de mettre en exergue les conditions de réussite d'une
politique foncière volontariste dans les Alpes du Nord, tout comme les
motifs de ses échecs.
De premiers éléments hypothétiques de
réponse peuvent être apportés. D'une part, la
démarche générale guidée par l'objectif politique
de maîtrise foncière est moteur de l'action. Les outils
utilisés s'appuient sur le cadre existant et vont au-delà :
là se trouve l'innovation territoriale en matière de foncier ou
plutôt l'efficacité de l'action publique. D'autre part, la
démarche innovante va jusqu'à distordre certains outils
classiques de gestion foncière : là encore, la
démarche établie en amont guide l'action publique. Si des
distinctions peuvent être faites dans la pratique de ces
différentes démarches, il ne s'agira pas ici d'en construire la
typologie. Enfin, si le neuf n'est pas dans la nouveauté (un
énième nouvel outil), il est dans la capacité de
dépasser, d'adapter ou d'évoluer avec des outils
« classiques ». Alors, l'innovation se trouve dans
l'utilisation même des outils existants.
Figure 2. Les trois pistes de recherche
identifiées, N. Moyon 2010
1.3. Les jalons de la recherche appliquée
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo5.png)
Dans sa « dimension mémoire »,
trois pistes de recherche sont identifiées sur le schéma
ci-contre :
Dans sa « dimension stage », trois axes de
travail sont définis :
ü L'analyse de deux cadres
« normatifs » de l'aménagement en cohérence
avec les principes de l'ONG : la Convention alpine (et ses protocoles
d'application) et le projet de Directive Territoriale d'Aménagement
(DTA) des Alpes du Nord.
ü L'analyse et la diffusion de bonnes pratiques en
matière de gestion foncière.
ü La recherche de définitions, de dispositifs,
d'outils pour une « gestion foncière durable pour les
territoires alpins ».
La conjonction de ses impératifs de recherche et de
stage pratique, permet d'entamer une démarche de recherche
appliquée qui se formalise à travers la méthodologie mise
en oeuvre.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo6.png)
Figure 3. Les jalons de la
recherche appliquée, N. Moyon 2010
2. « L'effort méthodologique »
2.1. Quelques principes
méthodologiques
La méthodologie mise en oeuvre pour la
réalisation de ce travail s'appuie sur une approche qualitative de la
question foncière. Comme le développe Pierre-Yves LE MEUR,
« Il s'agit ici de montrer que des approches de type qualitatif
obéissent à des procédures qui doivent leur donner toute
leur rigueur, sans pour autant tomber dans la recette - illusoire de toute
manière - [...]»26(*). La méthodologie adoptée durant ces six
mois constitue un processus évolutif et ouvert, s'affinant au fur et
à mesure des travaux et des entretiens effectués. « Il
s'agit en même temps d'éviter deux écueils : celui du
positivisme qui suppose que la réalité se donnerait directement
à voir et à saisir (à cet égard, l'expression
usuelle de "collecte des données" apparaît extrêmement
trompeuse : les données ne sont pas collectées, elles ne sont
justement pas "données", mais produites, construites selon des
procédures d'investigation à expliciter). L'autre écueil
est celui du postmodernisme dans ses variantes radicales, qui réduit le
résultat de l'enquête à une production littéraire,
à un récit parmi d'autres, sans référentiel
empirique. Entre ces deux extrêmes, le principal souci du chercheur
consistera en l'élaboration de procédures rigoureuses et
explicites donnant en particulier au lecteur la possibilité de suivre
autant que faire se peut les modalités de production des données
et le cheminement de l'interprétation, et donc de pouvoir
vérifier la plausibilité des résultats proposés.
Cette exigence renvoie aux trois critères de validité, de
fiabilité et de représentativité »27(*).
En prenant en compte autant que possible les principes
méthodologiques énoncés ci-dessus, la rédaction de
ce mémoire espère répondre aux trois exigences d'un
travail de recherche : « La validité se
réfère à la qualité et à la
"vérité" des données et des interprétations
produites.[...] La notion de fiabilité correspond à la
reproductibilité des résultats et à leur
"accessibilité" à d'autres chercheurs, à leur
vérifiabilité.[...] La représentativité dont il
s'agit ici ne résulte pas de formes de généralisation
statistique ou prédictive. Elle est qualitative et inductive, visant
à expliquer et "abstraire" des mécanismes et des processus. Ici,
un écueil à éviter est celui, malheureusement très
fréquent, de la généralisation empirique abusive
[...] »28(*).
2.2. Les prémices du
sujet de recherche
La CIPRA France travaille sur les questions de
développement territorial de l'espace alpin avec des entrées
généralement thématiques (transport-mobilité,
biodiversité, énergie-bâtiment, tourisme...)
croisées très souvent aux enjeux du changement climatique et du
développement durable. Presque
« inévitablement », la gestion de l'espace, du sol
et donc du foncier s'est révélée être une clé
d'observation transversale assez efficace des jeux et enjeux territoriaux. De
cette façon, Vincent Renard éclaire le constat selon lequel
l'objet foncier est construit parmi des enjeux plus vastes qui focalisent
d'abord sur eux les interrogations de la recherche : « la
question foncière fait système, constitue une sorte de noeud
gordien d'un ensemble de caractères d'une société :
elle est à la fois la synthèse des caractères et origine
des questions »29(*).
D'une façon similaire à la CIPRA, le travail de
Marielle Mouly sur les relations ville-campagne l'amène à
s'intéresser à cette question du foncier : « il
semblerait que les enjeux liés à "la campagne ressource",
agricoles et plus généralement, économiques, soient
recoupés par un enjeu transversal qui est celui du foncier. La question
de l'organisation et de la répartition des usages du sol conditionne le
prix des terres dans notre pays, et est à l'origine de conflits d'usage
et/ou d'intérêts parfois complexes et virulents. Ces conflits
peuvent également être liés à la nouvelle
attractivité des espaces ruraux et à l'arrivée de
nouvelles populations non issues du milieu rural ou de
touristes »30(*).
Au fil du temps, la CIPRA est d'ailleurs passée d'une
approche centrée sur l'environnement stricto sensu à une
vision plus systémique traduite par des projets plus transversaux
(tournés vers l'aménagement et le développement
territorial et plus seulement la protection du milieu) : son entrée
actuelle, « Vivre dans les Alpes », comporte les trois
piliers du développement durable. Au sens de la CIPRA France, faire du
développement territorial durable nécessite d'actionner le levier
du foncier.
Il était alors nécessaire de définir
quelle clé d'entrée choisir pour s'attaquer à la question
foncière. Le contexte normatif de l'aménagement constitué
des cadres règlementaires et législatifs dans lesquels se
déroulent l'action foncière semble intéressant puisqu'il
traduit la façon dont on pense le territoire, et détermine - au
moins à première vue - la manière dont on
« fait » l'action territoriale. Regarder les cadres
normatifs de l'aménagement est un moyen de saisir les discours produits,
notamment sur l'objet foncier. Un choix était donc nécessaire
pour déterminer un ou deux « cadres normatifs »
à étudier et à décortiquer pour entamer ce travail
de recherche. La Convention alpine et ses protocoles d'application ainsi que le
projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord ont
été retenus pour les raisons suivantes.
Comme l'a rappelé Andreas Götz, le directeur de
CIPRA International, à l'occasion du colloque « La
Convention alpine. Un nouveau droit pour la montagne ? » en
200831(*), l'histoire de
la CIPRA est très étroitement liée à celle de la
Convention alpine, un texte de droit international contraignant qui doit
être appliqué par les administrations et les tribunaux32(*). L'idée de la
Convention alpine est née en 1951, tout juste un an avant la fondation
de la CIPRA en tant qu'organisation faîtière alpine dont les
documents de sa création prévoyaient « que la
tâche la plus importante est la protection des Alpes, en élaborant
une convention internationale pour la protection des Alpes et en veillant
à son application par les pays signataires ». La Convention
alpine voit le jour officiellement en 1991 lorsqu'elle fut signée par
une large majorité des pays alpins et l'Union Européenne, et
depuis, la CIPRA dispose d'un statut d'observateur officiel de la mise en
oeuvre du traité.
Les protocoles d'application de la Convention alpine
rédigés au fur et à mesure permettent de décliner
ses principes suivant des grandes thématiques : aménagement
du territoire et développement durable (1994), protection de la nature
et entretien du paysage (1994), agriculture de montagne (1994), forêts de
montagne (1996), protection des sols (1998), énergie (1998), tourisme
(1998) et transport (2000). En raison -peut-être- de la
transversalité de l'objet foncier, on ne retrouve pas de
« protocole foncier ». Toutefois, il semble qu'aujourd'hui
la Convention alpine soit devenue une plate-forme institutionnelle mise en
difficulté33(*).
Bien sûr, elle continue de donner à la CIPRA des axes de
pensée et d'actions en restant un objectif fort mais non unique de son
action.
Le projet de Directive Territoriale d'Aménagement (DTA)
des Alpes du Nord est revenu d'actualité ce printemps 2010 ; il
n'est pourtant pas récent. Dès 1996, soit un an après
l'adoption de la LOADT34(*) instituant ce nouvel outil de planification
étatique, un courrier des trois ministères
concernés35(*)
adressé aux préfets « futurs coordonnateurs »
annonce en objet le « lancement des travaux préparatoires
à l'élaboration des directives territoriales d'aménagement
sur des territoires expérimentaux »36(*). Cinq sites
expérimentaux sont retenus, dont les Alpes du Nord, pour constituer un
échantillon « représentatif des principaux enjeux en
matière d'aménagement, de développement, de protection, et
de mise en valeur du territoire ». Une étude préalable
à une DTA sur les Alpes du Nord est donc lancée pour une
durée de six mois.
Quatorze années plus tard, seule la DTA des Alpes du
Nord n'a pas abouti. Pour la CIPRA et de nombreuses autres associations de
protection de l'environnement, cette DTA constitue (ou plutôt
constituait) un garde-fou utile qui va dans le sens d'un développement
équilibré et raisonné des Alpes du Nord, celle-ci se
référant à plusieurs reprises à la Convention
alpine. On peut ainsi appréhender la DTA des Alpes du Nord comme une
déclinaison locale et concrète (ses orientations sont
prescriptives et non indicatives) de la Convention alpine. Les fortes
oppositions qui ont marqué le projet de la DTA alpine attirent d'autant
plus l'attention sur ce cadre normatif mort-né37(*).
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo7.png)
Le mandat du 11 mai 2000 définit le
périmètre de mise en oeuvre de la DTA des Alpes du Nord : ce
territoire comprend les départements de la Savoie et de la Haute-Savoie,
la partie orientale du département de l'Isère (bornée par
la limite du SCOT de la région urbaine grenobloise), et les communes
drômoises appartenant au Parc Naturel Régional du Vercors. Il
s'agit d'un territoire d'une superficie de 16 077 km², concernant 923
communes et 1 841 256 habitants répartis sur 16 aires urbaines38(*).
Enfin, l'étude de ces deux cadres normatifs ne pouvait
s'effectuer sans une « confrontation » au réel,
c'est-à-dire un travail de terrain39(*).
www.dta-alpesdunord.fr
Au sein du périmètre défini par la DTA
des Alpes du Nord, trois terrains d'études ont été choisis
pour illustrer des situations différentes face à la question
foncière :
ü La commune de Chamonix (74) qui développe une
ingénierie foncière pointue sur des opérations de
lotissement à destination des résidents permanents40(*),
ü Le Vercors Quatre Montagnes (38) qui travaille à
la formation des élus sur les questions de mise en oeuvre d'une
politique foncière,
ü Le territoire des balcons de Belledonne (38-73)
où les enjeux de déprise agricole et de pression urbaine
l'amènent dans l'arène de l'élaboration du SCOT de la
région urbaine grenobloise41(*).
Le développement de l'analyse produite pour ces trois
terrains d'études (Partie II) permettra également de justifier le
choix de ces terrains. De plus, ces trois sites répondent aux
impératifs pratiques qui s'imposent à la réalisation de ce
travail : Chamonix et le Vercors sont deux des terrains d'études du
programme de recherche IngéTerr auquel participe Sylvie Duvillard, le
territoire de Belledonne est quant à lui facilement accessible depuis
l'agglomération grenobloise.
2.3. Les questionnements retenus
Une fois ces premiers cadres posés, les questionnements
suivants permettent d'affiner un peu plus la démarche du mémoire.
Tout d'abord concernant le problème spécifique que l'on cherche
à traiter : les cadres normatifs. Le projet de DTA des Alpes du
Nord (qui reprend les principes de la Convention alpine) produit un discours
sur la question foncière : lequel est-il ? Quel est le rapport
à la réalité de ce discours ? N'est-il qu'une
série de « beaux principes » selon certains, ou les
conditions d'une réelle application sont-elles fournies et
possibles ? Observe-t-on un décalage notoire avec les pratiques du
terrain ou au contraire, une certaine adéquation?
La présentation succincte faite
précédemment indique que quatorze années de
procédure n'ont pas permis d'adopter un projet opposable. D'ores et
déjà, si avec cette DTA il s'agit de passer de la théorie
à la pratique, que peuvent nous apprendre les rebondissements et les
modalités de l'élaboration de cet outil de planification
impulsé par l'Etat ? Le questionnement sera développé
en Partie II du mémoire, où il s'agira de s'intéresser au
rapport au droit et à la norme en aménagement qu'entretiennent
ceux qui « font le territoire » (les élus et les
techniciens essentiellement).
Enfin, la question spécifique de recherche que l'on
souhaite traiter regarde du côté des outils et de leurs
utilisations : comment les acteurs se saisissent-ils des outils pour les
adapter à leurs problématiques foncières locales ? Il
s'agira d'évoquer des procédures de l'action foncière et
d'une forme de « bricolage » qui s'opère en
parallèle42(*).
Cette question opérationnelle nécessite un travail de terrain par
la réalisation d'entretiens.
2.4.
« Méthodologie pratique » de travail
Une méthodologie de travail a été
élaborée avec le tuteur de stage en prenant en compte les
impératifs de recherche. Finalisée durant le premier mois de
stage, elle a permis d'élaborer dans le même temps un planning
prévisionnel sur six mois.
Ce schéma permet d'avoir une vision synoptique de la
démarche réalisée selon trois phases : la
première s'attache aux deux cadres normatifs retenus, la seconde
concerne le travail de terrain, et enfin la dernière s'attache à
mettre en regard le travail accomplit pour dessiner les perspectives d'une
politique foncière « durable » pour les territoires
alpins.
Figure 4.
Méthodologie de travail, N. Moyon 2010
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo8.png)
Le rétroplanning ci-dessous imaginé au
début du stage était optimal. Dans les faits, le travail
d'expérimentations sur le terrain a débuté mi-juin pour
s'achever environ mi-juillet. Ce décalage est essentiellement dû
au fait que la phase I. ait été peut-être
sous-estimée puisqu'elle devait aussi inclure un travail
préalable de prise de connaissance de la thématique
foncière.
Figure 5.
Rétroplanning de l'étude
Mars
|
Phase I. Exploitation du cadre normatif
Convention alpine & DTA
Orientations thématiques, leviers d'action pour la
gestion foncière
|
Avril
|
|
|
Mai
|
Phase II. Expérimentations sur le
terrain
Cas d'étude à définir
|
Juin
|
|
|
Juillet
|
Phase III. Mise en regard, confrontation des
phases I. et II.
|
Aout
|
|
|
Fin Aout -Septembre
|
Rédaction finale du mémoire
(préfiguration d'un livrable CIPRA)
|
3. Production et construction des données
3.1. Elaboration de la grille
d'analyse
L'objectif de la grille d'analyse est de pouvoir confronter le
cadre normatif à la pratique sur le territoire des Alpes du Nord.
L'élaboration de cette grille a été l'objet d'un travail
que l'on peut diviser en trois étapes.
1) Extraction : la méthode employée vise
à « extraire » tout ce qui est dit en matière
de foncier (de manière plus au moins explicite et directe), dans la
Convention alpine et ses huit protocoles d'application43(*), puis dans le projet de DTA
des Alpes du Nord44(*).
2) Reformulation : ces extraits, qui, mis bout à
bout constituent le fond d'un discours sur le foncier, sont relus,
rediscutés, puis reformulés. L'objectif est d'en sortir une forme
minimaliste du discours ; ce sont les « mesures »
envisagées par ces deux cadres normatifs.
3) Actions envisagées
Dénomination : l'enjeu est de trouver les bons
mots clés pour illustrer l'ensemble du discours produit. Ils recouvrent
soit les « thèmes abordés », soit les
« actions envisagées » à propos du
foncier ; ils constituent les deux axes de la grille d'analyse.
|
Action 1
|
Action 2
|
Action 3
|
Action 4
|
Action 5
|
Thème 1
|
|
|
|
|
Mesure
|
Thème 2
|
|
Mesure
|
|
|
|
Thème 3
|
|
|
Mesure
|
Mesure
|
|
Figure 6. Structure de la
grille d'analyse, N. Moyon 2010
Thèmes abordés
Une fois la matrice de la grille constituée, on
peut établir deux grilles d'analyse : l'une sur le discours produit
par les cadres normatifs (A), l'autre sur les pratiques dans le
périmètre des Alpes du Nord (B). Pour la première, il faut
donc revenir sur les morceaux de discours issus de la reformulation afin de les
positionner dans cette « grille d'analyse du discours
normatif ». Pour la seconde grille, il faut activer une
méthodologie pour mobiliser les renseignements fournis dans les
entretiens puis effectuer la même démarche afin de
synthétiser ces données du terrain (entretiens et
documentation).
3.2. Interprétation de
la grille
Disposant d'une même matrice, il est alors possible de
superposer ces deux grilles et de voir ainsi les thèmes ou actions pour
lesquels le discours et la pratique se retrouvent. A l'inverse, on peut
également lire « en creux », c'est-à-dire
s'intéresser aux cases vides ; là où les cadres
normatifs produisent du discours mais où la réalisation pratique
n'existe pas, mais aussi là où les pratiques existent en
outrepassant le cadre normatif, et encore, là où rien n'existe.
C'est peut-être dans ces cases totalement vides, sans discours normatif
et sans pratique de terrain, que s'ouvre le champ des possibles ; proposer
une mesure qui permette de créer un lien encore inédit entre un
« thème abordé » et une « action
envisagée ».
La superposition des deux grilles permet d'appréhender
le décalage, ou au contraire l'adéquation, entre deux cadres
normatifs de l'aménagement (et les principes qu'ils développent
en matière de foncier), et les pratiques et initiatives alpines dans le
périmètre des Alpes du Nord.
4. Les entretiens
4.1. Pourquoi faire des
entretiens ?
Le travail de terrain correspond à la nécessaire
« confrontation » au réel du travail plus théorique
effectué sur les cadres normatifs. La méthode des entretiens a
été choisie car il s'agissait avant tout de saisir des discours
et des expériences d'acteurs « incontournables » sur
la question du foncier. Les personnes interrogées ont ainsi
été identifiées par d'autres acteurs - la CIPRA, Sylvie
Duvillard, leurs pairs - ou par le titre de leur fonction (directeur d'un
établissement foncier local, responsable foncier, par exemple).
L'analyse des discours d'acteurs permet de confronter la réflexion
théorique et la pratique de terrain ; là se trouve tout
l'intérêt, et la condition même, d'un travail de recherche
appliquée.
Afin de vérifier la validité des
hypothèses de recherche, et suivant la méthodologie
définie, les entretiens ont pour objectif de connaître les
perceptions des acteurs, leur connaissance et leur vécu relatif aux
questions foncières. Ainsi, pour la démarche de recherche, les
entretiens permettent de produire un argumentaire de mémoire
inspiré de multiples sources et points de vue : l'argumentaire du
chercheur bénéficie d'une justification par le « poids
de sa connexion avec le réel » ainsi que d'une forme de
« véracité » produite par le terrain et
construite suivant une méthodologie de recherche qui en constitue des
références. Enfin, ces entretiens ont été
particulièrement utiles pour l'analyse des jeux d'acteurs au niveau
local, et les modalités pratiques de mise en oeuvre des mesures
identifiées.
Cette assise du terrain est également une dimension
importante du travail réalisé par la CIPRA. De nombreux travaux
et réflexions plus théoriques naissent bien souvent de
l'étude de pratiques originales et exemplaires en matière de
développement territorial dans les Alpes45(*).
De manière plus prosaïque, la démarche de
terrain basée sur les entretiens permet de faire connaître la
CIPRA, de tisser éventuellement des liens avec de nouveaux acteurs
territoriaux, c'est-à-dire de développer son réseau. Cet
effet induit s'applique aussi personnellement.
4.2. La méthode
utilisée
L'étude a été conduite sur la base
d'entretiens semi-directifs auprès de dix-huit personnes46(*) mobilisées sur la
question du foncier dans le périmètre des Alpes du Nord :
des acteurs concernés directement par le sujet au sein de structures
tels que SAFER, Etablissement Public Foncier Local, ou le service foncier d'une
collectivité, le chargé d'études foncier d'une agence
d'urbanisme par exemple, et plus indirectement concernés comme un
chargé de mission urbanisme, un directeur de CAUE, ou encore
l'animatrice d'une association chargée du développement de
l'agriculture. Les entretiens réalisés ont un statut informatif,
il est donc important de répondre à la question « qui
parle » pour chacun d'entre eux. Ici, il s'agit intégralement
(à une ou deux exceptions près) de techniciens ou de directeur de
structure ou de service de collectivité. De nombreux entretiens
(à partir d'une quarantaine peut-être) auraient permis de
réaliser une typologie des discours d'acteurs produits sur la question
du foncier : par exemple, y'a-t-il un discours type de
« l'élu de vallée » en matière de
foncier ? Une piste de recherche peut s'envisager dans ce sens.
En vue de tester l'hypothèse du mémoire47(*), une grille d'entretien s'est
progressivement structurée conduisant à 1H30 d'entretien en
moyenne. La grille d'entretien est organisée en cinq thèmes dont
l'ordre est tout à fait flexible en fonction de la personne
interrogée48(*) :
1. Une présentation générale ;
permet de cerner l'interlocuteur (sa fonction et sa posture par rapport au
foncier), la structure et son territoire.
2. La mise en oeuvre d'une politique foncière dans les
Alpes ; afin d'aborder plus ou moins en filigrane la question d'une
spécificité alpine en la matière.
3. Les outils d'une politique foncière ; souhaite
susciter des avis sur leurs usages ou non-usages, et décline des
interrogations sur le rapport au droit et à la norme en
aménagement.
4. Les deux cadres normatifs étudiés la
Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord ; pour connaître les
opinions, les positionnements des acteurs, ils sont abordés d'une
manière plus directe.
5. Les perspectives en matière de foncier sur leur
territoire et dans les Alpes du Nord ; désire cerner les pistes de
travail vers lesquelles aller pour une politique foncière participant au
développement durable du territoire.
La méthode utilisée pour traiter le contenu des
entretiens consiste à effectuer une explication de texte
simplifiée : cela implique des relectures de la prise de note
effectuée (pour les entretiens non enregistrés) ou des
réécoutes de l'enregistrement afin de retranscrire le contenu qui
sera réutilisé dans l'analyse. Ce contenu est organisé
suivant les thèmes les plus redondants. De fait, la grille d'analyse
élaborée au préalable est une première clé
de lecture des entretiens.
Le contenu de ces entretiens (les données quantitatives
et qualitatives) constitue l'un des matériaux de base de l'analyse
produite dans ce mémoire, au même titre que la
bibliographie : son contenu sera donc valorisé de la même
manière, comme élément de réflexion ou comme
argumentaire par exemple. Toutefois, les entretiens sont des documents
confidentiels qui garantissent le sens et le contexte des propos tenus par les
personnes rencontrées. Le choix a donc été fait, en
concertation avec les tuteurs de mémoire, de compiler dans un cd annexe
à ce document les fichiers audio des entretiens enregistrés. Un
exemplaire de ce cd annexe est confié à Sylvie Duvillard la
tutrice de recherche, à Alexandre Mignotte pour CIPRA France et à
moi-même.
5. Liens avec d'autres travaux de recherche
« Différents travaux ont été
lancés ces dernières années par des organismes
scientifiques ou techniques concernant le foncier en montagne. La plupart de
ces programmes (pluriannuels le plus souvent) se concentrent
généralement sur les mécanismes et enjeux fonciers pour le
maintien d'espaces naturels, agricoles, forestiers (cf. projet Popfongo du
Suaci Alpes du Nord et du Cemagref de Grenoble). Notre ambition n'est ni
d'ignorer ces travaux qui rassemblent déjà beaucoup d'acteurs
concernés par la question du foncier, ni de s'y
« fondre » pleinement car notre projet ne se concentre pas
directement sur les implications agricoles et naturelles de la gestion
foncière. Il s'agira donc davantage de prendre contact avec les
organismes impliqués dans ces programmes et de discuter la
manière dont notre projet peut contribuer, s'articuler, compléter
des analyses déjà en cours »49(*).
5.1. Le projet
« Foncimalp »
CIPRA France participe au projet de recherche-action
piloté par le Suaci Alpes du Nord, Foncimalp, qui s'intéresse
à la gestion du foncier des espaces agricoles et naturels pour
répondre aux enjeux du multi-usage de l'espace en zone de
montagne50(*). Le constat
de départ est le suivant : des expériences existent mais on
ne capitalise pas assez pour diffuser et reproduire des actions. Foncimalp
souhaite être à l'écoute d'initiatives intéressantes
ou des problèmes récurrents de la gestion de l'espace en
territoires de montagne afin de faire avancer les actions dans les quatre
départements : la Haute-Savoie, la Savoie, l'Isère et la
Drôme. L'objectif visé est double51(*) :
ü Appuyer des expériences locales
« exemplaires » de gestion du foncier visant à
expérimenter de nouveaux outils ou adapter des outils existants, et
expérimenter des formes de gouvernance nouvelles. Des
réalisations locales concrètes sont attendues en réponse
à un certain nombre de questionnements.
ü A partir de ces questionnements, mutualiser des
expériences « exemplaires », en capitaliser et
valoriser les enseignements.
Les objectifs du projet et l'ambition affichée
(« donner aux acteurs des territoires de montagne les moyens d'une
meilleure gestion du foncier ») sont très proches des travaux
entrepris par la CIPRA France sur cette thématique. De même, la
définition du terme « exemplarité »
correspond tout à fait à la démarche de recherche
envisagée dans ce mémoire : il faut entendre par
exemplarité « des solutions techniques ou juridiques
"nouvelles" (des outils nouveaux ou déformés) ou une gouvernance
nouvelle (renouvellement de la façon de mobiliser des outils
"classiques" déjà existants) ». La CIPRA participe aux
réunions du groupe de travail Foncimalp coordonné par Carole
Barthès. Une collaboration plus étroite était
envisagée avec l'élaboration d'une grille d'analyse commune pour
renseigner les actions observées mais l'idée n'a pu aboutir, le
type d'action et les éléments à regarder étant
parfois trop différents : les questions de transmission
d'exploitation et de compensation agricole sont apparues comme
prépondérantes dans le projet Foncimalp alors qu'elles ne
participent pas à la réflexion menée dans l'étude
CIPRA. Un rapprochement est prévu pour la valorisation commune des
travaux respectifs.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo9.png)
Figure 7. Projet Foncimalp,
Suaci Alpes du Nord 2010
5.2. Le projet de recherche
« IngéTerr »
Dans un contexte de mutations de l'action publique, de
nouvelles formes d'ingénierie territoriale émergent. Le projet
IngéTerr s'intéresse ainsi aux concepts, cadres et pratiques de
l'ingénierie territoriale. Il vise en particulier à
caractériser les métiers, identifier les compétences
mobilisées ou attendues, élaborer des indicateurs de suivi de
l'ingénierie et proposer de nouvelles formations. Ce projet est conduit
dans un cadre interrégional (Auvergne - Rhône-Alpes) et
bénéficie d'interrelations avec les projets CreActE et
RessTerr52(*).
Partie prenante du projet, Sylvie Duvillard coordonne plus
spécifiquement les travaux s'attachant à l'ingénierie
foncière et aux compétences associées. Ainsi,
IngéTerr a influencé ce travail sur deux aspects. Tout d'abord,
deux des trois terrains d'études retenus dans la présente
étude sont en commun ; il s'agit de Chamonix et le Vercors. Par
conséquent, des liens pour la réalisation des entretiens se sont
concrétisés sous la forme d'échanges de contacts et d'une
mutualisation de certains moyens logistiques (pour les déplacements en
Haute-Savoie par exemple). Enfin, la question des compétences
disponibles localement pour travailler les questions de gestion du foncier dans
l'espace alpin est une dimension qui ressort des entretiens
réalisés dans le cadre de cette étude.
5.3. Les projets de recherche
« Popfongo » et « AMEN »
Le Cemagref de Grenoble est impliqué dans deux projets
de recherche qui concernent directement les questions de foncier53(*).
Le projet Popfongo, piloté par le Cemagref de Grenoble
et le Suaci GIS Alpes-Jura, observe les dispositifs de gouvernance
foncière des espaces agricoles et naturels périurbains. Cette
recherche vise à mieux comprendre les modalités de gouvernance du
foncier non urbanisé (considéré ici comme une ressource
territoriale rare) à travers d'une part l'étude de leur contexte
(marché foncier et nature de la propriété foncière)
et d'autre part, l'analyse de conflits fonciers et d'actions de
préservation ou de mise en valeur du foncier. A cette fin, la recherche
s'intéresse aux conditions de diversification du marché foncier
agricole et des espaces naturels et en particulier, aux facteurs territoriaux
qui peuvent l'influencer (aménités environnementales notamment) ;
elle s'intéresse également à la diversité des
situations de propriété foncière. Ce premier volet de
recherche est réalisé à l'échelle d'onze SCOT.
L'analyse porte également sur les formes de gouvernance
foncière qui permettent de passer d'une logique purement conservatoire
à une mise en valeur des espaces agricoles et naturels intégrant
leur multi-usage. Deux entrées sont alors proposées pour
décrypter les changements institutionnels et organisationnels et les
nouvelles formes de coordination à l'oeuvre dans cette
gouvernance : le développement et l'expression de conflits d'usage,
ainsi que l'émergence d'accords volontaires et de nouvelles institutions
comme facilitateurs des coordinations entre acteurs du foncier, privés
et publics. Une journée d'échanges sur la question du
marché foncier est prévue pour octobre 2010.
Le projet AMEN porte sur les aménités
environnementales des espaces ruraux : « Valorisation, gestion, et
contribution au développement durable des territoires ».
L'objectif principal de ce projet de recherche interrégional est
d'analyser la cohérence, l'efficacité et la visibilité des
stratégies d'offre (actions publiques et privées)
d'aménités environnementales en relation avec l'évolution
de leurs demandes et leurs incidences sur le développement
régional. Plus précisément, il s'agit d'analyser les
vecteurs possibles et les conditions de valorisation des aménités
environnementales dans les espaces écologiquement remarquables et les
formes de coordination territoriale permettant de concilier activités
économiques et actions de protection des ressources et des milieux
naturels54(*).
Le Cemagref de Grenoble travaille à
l'élaboration d'une typologie des paysages du Parc Naturel
Régional des Bauges selon les enjeux écologiques et
réalise, avec des partenaires, une étude des
aménités environnementales associées à ces types de
paysages, la question du foncier est donc incontournable55(*). L'objectif secondaire est de
répondre à la question suivante : y'a-t-il un effet PNR,
notamment en matière de foncier ? Là encore, ces travaux se
connectent bien avec la présente recherche : le PNR du Vercors est
l'un des terrains d'étude choisi et le massif de Belledonne
débute sa démarche de labellisation auprès de la
région Rhône-Alpes. Dans ce dernier territoire, cet effet
potentiel d'une labellisation PNR est avancé56(*).
Le premier chapitre a permis d'introduire - certes de
façon assez minutieuse - la démarche d'étude choisie. La
posture méthodologique du mémoire a été
détaillée afin de répondre aux exigences d'un travail de
recherche en géographie. Le chapitre qui suit entre davantage dans le
contenu du sujet, l'objet foncier en lui-même.
Chapitre 2. Les miscellanées du foncier
1. Le foncier, de quoi s'agit-il ?
Il apparait tout à fait nécessaire de poser
quelques bases de définition du sujet d'étude. La recherche
bibliographique et les entretiens réalisés ont permis
d'éclairer le sens d'un large vocabulaire qui gravite autour de la
question foncière. Comme le souligne Thibaud Wyon57(*), la gestion foncière
est transversale (multisectorielle) et à diverses échelles
territoriales imbriquées (multiscalaire). Le foncier est bien au coeur
des problématiques d'aménagement du territoire mais de quoi
parle-t-on précisément ? De droit, d'argent et de politique,
telle est en substance la réponse que l'on tachera de formuler selon ce
triptyque.
1.1. De droit
Le droit est peut-être l'angle de départ pour
appréhender le foncier. En effet, l'approche foncière ne
s'attarde pas sur la matérialité du terrain comme le ferait le
géologue ou le géomètre mais plutôt sur les droits
-et leurs valeurs- dont il est l'objet. Pour Joseph Comby, « le
terrain est une abstraction, un support, un espace localisé par rapport
à d'autres localisations. En outre, ce n'est même pas à cet
espace que l'on s'intéresse véritablement »58(*). Aussi, pour que l'usage d'un
terrain soit reconnu (ou protégé), il est nécessaire de
lui associer un régime juridique particulier, ce qui n'est pas toujours
évident. Par exemple, la faible reconnaissance des enjeux liés
à la biodiversité ordinaire se traduit par un nombre très
faible d'instruments opérationnels : « or,
l'opérationnalité d'un outil suppose que le droit dispose d'un
champ d'application territorial pour appliquer un régime juridique. Le
droit, pour se construire et être effectif, a donc besoin d'une
délimitation spatiale, mais il est difficile voire impossible de
définir la délimitation spatiale des corridors
écologiques. Si l'on revendique que la connectivité n'a pas de
limites, le droit lui en a besoin pour exister ! »59(*).
Le foncier nous renvoie directement vers la
propriété foncière et donc le droit de
propriété, élevée au rang de droit naturel et
imprescriptible par la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen
de 1789 : « La propriété étant un droit
inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est
lorsque la nécessité publique, légalement
constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste
et préalable indemnité». C'est ce qui fonde un rapport si
particulier entre la terre et le citoyen français, où le droit
« s'incorpore à la chose » 60(*): la conflictualité
autour du foncier prend ici tout son sens. Ainsi, Olivier Barrière
rapporte l'analyse partagée par de nombreux spécialistes qui
s'appuient sur le Code civil de 1804 pour affirmer que les pouvoirs du
propriétaire sont si étendus qu'ils se confondent avec la chose
sur laquelle ils portent : le droit est un bien et la propriété
est un droit. En d'autres termes, le droit de propriété tel qu'il
est énoncé qualifie l'imprégnation de la chose par
l'homme, et réciproquement selon Carbonnier, une imprégnation de
l'homme par la chose car « la personne ne pouvant être
arrachée sans souffrance à ses entours de biens familiers
»61(*).
Puisqu'il n'existe pas en France de terre sans
propriétaire62(*),
l'appropriation de l'espace par le droit de propriété est
incontournable : c'est ce caractère du foncier qui interpelle la
géographique humaine. En matière de propriété
privée, on qualifie alors, assez péjorativement, ce
« paysage propriétariste ». Alain Bernard63(*) le décrit ainsi, «
l'ordre de la propriété privée trace des lignes droites au
mépris de la courbe naturelle. Il engendre une rationalisation de
l'espace, une mise au pas des paysages et, sans doute, de ses habitants
sommés de se conformer à un modèle unique », et
Dominique Dujols fustige quant à elle « notre vieille nation de
paysans accrochés à leurs parcelles »64(*).
Toutefois, Joseph Comby nous interpelle vivement sur une
interprétation du droit de propriété qui s'est
propagée à tort65(*) : « L'article 544 du Code civil qui
dans une formule inchangée depuis deux siècles, définit le
droit de propriété, le fait à la française, en
jouant sur les mots. Après avoir salué bien bas la grandeur du
droit de propriété, il ne le ramène à presque rien
par une pirouette puisqu'il définit la propriété comme le
droit " le plus absolu " [...] de faire de son bien ... ce que les lois et
règlements autorisent d'en faire. La propriété
c'est le droit d'obéir aux règlements ». C'est
ainsi qu'est censée triompher la collectivité publique qui
dispose quant à elle du droit de définir les utilisations
permises, favorisées ou interdites, voire obligatoires de son
territoire.
En réalité, poursuit J. Comby, personne n'est
jamais propriétaire d'un terrain : « on ne peut ni
l'emmener, ni le détruire et l'usage que l'on fera devra tenir compte de
multiples contraintes juridiques.[...] Le propriétaire d'un terrain,
lui, n'est pas libre d'en faire ce qu'il veut. Jamais il ne dispose de tous les
droits sur son terrain car il existe toujours des droits concurrents du
sien...». Le propriétaire a le droit de gérer son terrain en
prenant compte des limites et contraintes qui s'imposent à sa parcelle.
Cette digression juridique nous apporte un éclairage sur les
résistances de certains propriétaires face aux
velléités d'une collectivité qui voudrait bouleverser
l'ordre établit de la propriété sur son territoire :
le propriétaire schizophrénique se retranche derrière son
droit de propriété absolu tout en sachant que celui-ci est soumis
à des droits concurrents, dont ceux de la collectivité. Le Code
de l'urbanisme ne va d'ailleurs pas dans un autre sens et indique dès
son premier et très long article :
« Le territoire français est le
patrimoine commun de la nation. Chaque collectivité publique en est le
gestionnaire et le garant dans le cadre de ses compétences. Afin
d'aménager le cadre de vie, d'assurer sans discrimination aux
populations résidentes et futures des conditions d'habitat, d'emploi, de
services et de transports répondant à la diversité de ses
besoins et de ses ressources, de gérer le sol de façon
économe, de réduire les émissions de gaz à effet de
serre, de réduire les consommations d'énergie,
d'économiser les ressources fossiles d'assurer la protection des milieux
naturels et des paysages, la préservation de la biodiversité
notamment par la conservation, la restauration et la création de
continuités écologiques, ainsi que la sécurité et
la salubrité publiques et de promouvoir l'équilibre entre les
populations résidant dans les zones urbaines et rurales et de
rationaliser la demande de déplacements, les collectivités
publiques harmonisent, dans le respect réciproque de leur autonomie,
leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace.
Leur action en matière d'urbanisme contribue à la lutte contre le
changement climatique et à l'adaptation à ce
changement »66(*).
Il semble que ce dogme soit repris et rappelé sans
cesse dans les cadres normatifs concernant l'aménagement du territoire
(DTA des Alpes du Nord compris), indiquant d'ailleurs très clairement
l'orientation que doivent prendre les collectivités sur leur
territoire.
L'idée de patrimoine commun est à
défendre, ou au moins à revendiquer, comme l'expose Dominique
Dujols67(*) : cette
notion « implique une gestion au bénéfice de la
communauté, qui permette donc éventuellement de corriger les
effets négatifs d'actions individuelles ». Toutefois, comme
l'auteur le fait remarquer, il s'agit de comprendre pourquoi ce point de
départ du Code de l'urbanisme ne s'est guère illustré dans
les faits. Au-delà du constat d'échec, D. Dujols cherche à
restaurer la notion de patrimoine commun comme guide d'une nouvelle politique
foncière à la fois ambitieuse et réaliste. Pour le moment,
« au tribunal administratif, le maire doit prouver qu'il agit pour
l'intérêt général, le bien collectif, et c'est
presque toujours le requérant privé qui l'emporte sur la
collectivité »68(*).
Enfin, J. Comby nous interpelle sur la superposition des
droits sur le sol, ce qu'il appelle « les mille-feuilles du
foncier »69(*) : le droit du propriétaire est en
compétition avec de nombreux autres droits, notamment ceux de la
collectivité, et c'est l'examen détaillé des droits qui
s'exercent sur une parcelle qui va déterminer, en partie, sa valeur et
donc son prix sur le marché. Or, d'après Comby, « les
changements d'énoncés des règles de droit public sont
devenus la principale cause de valorisation ou de dévalorisation des
terrains privés », ce qui nous montre le lien étroit entre
le droit et la seconde dimension du foncier, l'argent.
1.2. D'argent
Lorsque l'on parle de foncier, on parle forcément
d'argent, ou du moins implicitement tout le monde y pense. En
considérant le foncier comme une ressource primaire et non renouvelable,
celui-ci devient un bien marchand s'échangeant sur un marché, en
somme ; « Achetez de la terre, on n'en fabrique
plus ! »70(*).
Après une entrée par le droit, la
définition du foncier comme bien marchand est liée à la
première : la valeur marchande d'un terrain n'est pas la valeur
intrinsèque de la terre (y compris pour des parcelles agricoles, mais
sauf pour des ressources minières) mais plutôt la valeur des
droits dont le futur acheteur disposera. Un terrain « n'entre dans le
champ économique qu'à partir du moment où il devient le
support de droits »71(*). Cette valeur varie aussi suivant l'utilisation du
terrain (par exemple, si le terrain est squatté), le potentiel de
transformation/d'aménagement du terrain, et également suivant
l'imaginaire collectif qui lui est associé (rumeurs de
phénomènes paranormaux par exemple).
L'économie foncière englobe, selon J. Comby,
tout ce qui concerne les marchés fonciers, les prix des terrains et
leurs variables (constructibles, coûts d'aménagement
associés...). Cela passe par l'analyse d'une valeur foncière (un
prix) qui commence obligatoirement par une analyse précise et exhaustive
des droits concurrents qui existent sur un terrain. Le contexte de pression
foncière rend cette dimension du foncier tout à fait
incontournable. La « pression foncière » est
d'ailleurs une expression souvent utilisée pour qualifier la forte
demande marchande dont certains espaces font l'objet, comme par exemple dans
les vallées alpines ou sur les littoraux. Dans le champ de
l'économie foncière, plusieurs expressions qualifient des
comportements différents, utilisées abondamment par de nombreux
acteurs, parfois à tort. Les définitions qui sont
proposées ci-dessous s'appuient sur le vocabulaire foncier
développé par J. Comby72(*).
Pour commencer, la spéculation foncière -au sens
strict- n'existe pratiquement pas. Il faudrait imaginer qu'il puisse être
rentable d'acheter un terrain et de le revendre en l'état, quelques
temps après en faisant une plus-value, pour que le terme de
« spéculation » garde son sens (la
spéculation boursière par exemple). En réalité, ce
type de plus-value foncière repose presque toujours sur la
capacité du « spéculateur » à obtenir des
informations que tout le monde n'a pas et surtout à faire changer le
droit applicable sur le terrain : on devrait alors plutôt parler de
trafic d'influence. En fait, la véritable spéculation
foncière (achat d'un terrain dans l'espoir de le revendre plus cher,
plus tard, à l'identique) est assez rare compte tenu des coûts de
mutation qu'il faudrait alors assumer. C'est donc improprement que l'on
qualifie habituellement de « spéculation » l'acte d'acheter un
terrain inconstructible et d'obtenir qu'il soit classé constructible
avant de le revendre avec des droits à bâtir.
Le concept de spéculation foncière est
également souvent appliqué à tort aux pratiques de
« rétention foncière » qui obéissent
pourtant à une autre logique. Le propriétaire qui refuse de
vendre aujourd'hui à un prix proposé pourtant supérieur
à la valeur économique d'usage, espère une hausse future
des prix. Ce propriétaire est généralement aussi rationnel
que l'opérateur qui voudrait lui acheter le terrain, mais il ne
fonctionne pas avec les mêmes paramètres. Le prix du temps d'un
propriétaire foncier (qui a placé ses économies) est en
effet généralement beaucoup plus faible que le prix du temps de
l'opérateur (qui « travaille » avec de l'argent
emprunté). Le propriétaire est donc beaucoup plus enclin que
l'opérateur à attendre une hausse hypothétique.
Paradoxalement, il est donc mieux placé que l'opérateur pour
« spéculer » sur l'avenir, c'est-à-dire, attendre une
potentielle hausse des prix à son avantage. D'une certaine
manière, cette pratique foncière de rétention est
« non-conforme aux incitations du zonage » comme l'explique
A. Esposito-Fava73(*).
C'est la non-mise à disposition de terrains ou la non-réalisation
d'une possibilité de construction, pour des objectifs variés :
l'espoir d'une plus-value supérieure évoquée
précédemment, le souhait de réaliser plus tard une
construction pour son propre bénéfice (son fils/sa fille), des
conflits de voisinage, ou encore le plaisir de bénéficier d'un
terrain d'agrément.
La rétention se distingue parfois assez difficilement
de « l'anticipation foncière », et on peut
d'ailleurs considérer celle-ci comme une forme particulière
d'anticipation foncière. C'est donc là encore une
non-conformité des comportements de propriétaires avec les
documents d'urbanisme. Selon Jean-Pierre Boutinet, anticiper, « c'est
montrer cette capacité à suspendre momentanément le cours
des choses pour savoir comment ce cours va évoluer, donc pour tenter le
cas échéant d'infléchir la suite des
évènements »74(*). Dans sa conclusion, A. Esposito-Fava rappelle une
typologie de trois types « d'acteurs anticipateurs », dont
le premier type apparait comme le plus problématique car il est «
actif » :
ü Le premier est l'anticipateur-but (anticipateur) qui
est déterminé à voir le zonage changer sur ses parcelles
et à entreprendre des actions concrètes pour que cela soit le
cas, à un horizon proche.
ü Le second est l'anticipateur-souhait (volitif) qui ne
cherche pas à accélérer l'évolution du zonage en sa
faveur, il attend la plus-value foncière.
ü Et enfin, l'anticipateur-projet (opportuniste) veut
obtenir un certificat d'urbanisme mais il ne peut changer de stratégie
selon la conjoncture future et les opportunités qui s'offrent à
lui.
Face à ces comportements, les collectivités
développent parfois, ou essaient de le faire, une stratégie de
régulation foncière. Tout l'enjeu de la régulation
foncière repose sur la maîtrise des prix du foncier souvent hors
de portée d'une grande partie des concitoyens. Cette question du
« prix acceptable » du foncier est développée
par Dominique Dujols75(*)
qui plaide pour une stratégie de régulation foncière avec
comme mot d'ordre : « ni spoliation, ni enrichissement sans cause
». En effet, le raisonnement qui sous-tend implicitement les politiques de
soutien, à la production de logements par exemple, coûte cher
à la collectivité tout en manquant largement sa cible.
Le raisonnement actuel est le suivant :
« combien peut-on s'offrir de logements accessibles compte tenu des
prix fonciers et de l'état des finances publiques
? »
Sauf que l'auteur remarque à juste titre que l'Etat et
les collectivités se maintiennent dans une posture d'agents
dominés et que leurs actions pour soutenir la production de logements
malgré des prix fonciers élevés ne font parfois
qu'alimenter cette flambée des prix. La question de la régulation
foncière reste ouverte, mais il semble que des éléments de
réponse soient à chercher vers une politique foncière
volontariste plus globale.
1.3. De politique
Le troisième pilier de notre définition de
l'objet foncier est la politique, c'est-à-dire comprendre le foncier
comme un objet politique à part entière tout en étant
lui-même l'objet de politiques publiques. Les solutions invoquées
pour répondre au « problème foncier »
semblent relever bien plus du champ de la politique que de celui du droit ou de
l'économie : « aller vers une politique
volontariste », « mener une stratégie
foncière forte et déterminée », « pour
une politique foncière ambitieuse et efficace ». Ces
expressions recueillies durant les entretiens traduisent une croyance
assez forte en la politique pour agir sur le foncier et
intrinsèquement le maîtriser. Paradoxalement, ces avis cohabitent
avec des désillusions passées de promesses politiques non tenues,
mais surtout une conjoncture difficile dans laquelle les élus locaux
disposent d'une marge de manoeuvre réduite pour agir (restrictions
budgétaires, des priorités sur l'emploi et le social au
détriment de la planification et de l'aménagement).
Le Conseil Général de Haute-Savoie, qui se
montre actif sur la question foncière76(*), définit une politique foncière comme
« l'ensemble des réglementations, moyens, outils mis en oeuvre
afin d'assurer l'administration des sols, qu'ils soient urbains, agricoles ou
naturels. La politique foncière a notamment pour but de maîtriser
le développement urbain, de permettre aux communes la réalisation
de projets importants en réservant des terrains et de contribuer
à la régulation du marché foncier »77(*).
Il semble que le foncier soit devenu un élément
crucial de la gestion de l'espace, à tel point que l'on confonde gestion
foncière et gestion de l'espace. Au sens de Catherine Herrera, la
gestion de l'espace renvoie à l'ensemble des modalités mises en
oeuvre pour administrer au mieux les différents enjeux portés par
les relations construites par l'homme avec son environnement (compris comme
l'ensemble des réalités biophysiques)78(*). Elle recouvre une action plus
globale et systémique du territoire. La gestion foncière peut se
comprendre comme une action particulière de la gestion de
l'espace : elle porte sur l'organisation et la mise en oeuvre de
mécanismes et dispositifs institutionnels qui assurent les droits, les
usages, les transmissions du sol, etc. La gestion foncière renvoie donc
à des instances institutionnelles qui, pour exercer leurs
responsabilités, ont besoin d'outils, de registres, de
procédures, définissant les actes à réaliser et la
façon de les réaliser.
La gestion foncière communale définit des
tâches particulières aux communes, qui doivent alors se doter du
personnel, des compétences et des moyens financiers nécessaires.
En résumé, la gestion foncière qualifie tout un
système qui est d'ailleurs en construction en Afrique (où
l'actualité foncière relate régulièrement de
nouveaux scandales et conflits fonciers). La gestion foncière, bien
établie en France, vise à résoudre les problèmes de
sécurisation foncière, de procédures d'identification et
de validation juridique des droits et des mutations du sol.
En somme, la préoccupation de la gestion de l'espace
s'effectue au niveau de la planification urbaine (là où il faut
entendre « pratique de l'urbanisme ») et amène
à la définition de réglementations de l'usage des sols.
C'est précisément à ce niveau que le courage politique
associé à une vision stratégique du développement
territorial sont incontournables. Le titre de l'article de Romain Cazajous
résume assez bien l'enjeu foncier en politique,
« maîtriser le sol pour maîtriser son
territoire »79(*) : il s'agit donc là d'élaborer une
stratégie foncière.
Une stratégie foncière implique d'observer et de
planifier pour mieux agir, en définissant, d'une part des objectifs
généraux en matières sociale, économique,
environnementale et, d'autre part, les moyens opérationnels et
structurels propres à réaliser ces objectifs. Selon S. Mordaret,
la stratégie foncière d'un agriculteur peut se définir
comme le projet concernant le foncier et sa place dans le fonctionnement global
de l'exploitation, avec un programme d'actions à réaliser pour
atteindre ces objectifs80(*). Pour une collectivité, c'est la traduction
opérationnelle d'un projet de territoire, un ancrage foncier
indispensable, « la matière première de
l'aménagement sans laquelle toute programmation ne serait
qu'utopie »81(*).
La stratégie foncière est donc, ou devrait
être, la déclinaison d'un projet de territoire, lui-même
déclinaison d'un projet politique territorialisé. Elle
précède l'action foncière que J. Comby définit
comme la partie de la politique foncière locale qui consiste, pour la
puissance publique, à intervenir sur le foncier par des acquisitions de
terrains, soit à l'amiable, soit par préemption, expropriation ou
cessions gratuites (par exemple dans le cadre d'une opération
d'aménagement de ZAC ou d'un lotissement) et par différentes
sortes de cessions. La conduite de l'action foncière peut être
confiée par délégation à un « opérateur
foncier», par exemple un établissement public foncier local.
L'action foncière, autrement dit l'acquisition de
foncier en vue de l'action de la collectivité, préfigure
l'aménagement foncier qui regroupe l'ensemble des opérations
consistant à la fois à équiper les terrains (en
particulier à les viabiliser) et à en restructurer le parcellaire
afin de permettre une nouvelle utilisation des sols.
L'aménagement foncier peut être directement
réalisé ou commandité par le propriétaire
(potentiellement la collectivité publique) ou par un
intermédiaire spécialisé (aménageur ou lotisseur,
de statut privé ou parapublic type SEM82(*)).
L'aménagement foncier se réfère parfois
aussi aux opérations de remembrement, ou
remembrement-aménagement, autrefois initiées en vue d'une
restructuration foncière des exploitations agricoles. Cette politique
foncière est « un puissant outil d'aménagement du
territoire »83(*). Concrètement, l'opération consiste en
un échange parcellaire, dans un périmètre
déterminé. Souvent qualifié comme « le meilleur
outil qui puisse exister sur l'aménagement du territoire tant au niveau
de la planification que de la justice par rapport aux
propriétaires »84(*), les opérations menées à terme
sont si rares qu'elles en sont exceptionnelles : « c'est une
mesure qui existait mais qui est peu utilisée parce qu'elle fait peur
aux élus. Vous imaginez bien, en Haute-Savoie, aller toucher le foncier,
le champ du papa, le déplacer... le poirier de la grand-mère...
vous imaginez toutes les résistances mentales qu'il peut y avoir. Il
faut en connaitre les limites »85(*). La force politique semble être au coeur de la
réussite d'une politique foncière globale et ambitieuse qui
souhaite faire passer l'intérêt général avant les
intérêts particuliers, qui sont aussi ceux des
électeurs...
Le foncier est une matière première
transformée à plusieurs reprises pour obtenir, au bout de la
chaîne de valeur, une opération de construction. Sa valeur est
progressivement augmentée par le travail de mobilisation et
d'aménagement réalisé par de multiples acteurs, qui
apporte une véritable valeur ajoutée. Le schéma ci-dessous
permet de comprendre ce que l'on qualifie de « chaîne de
transformation du foncier »86(*).
En effet, l'évolution d'une parcelle (son usage et sa
valeur) va dépendre directement de la politique foncière de la
collectivité, suivant son projet de territoire et donc la
stratégie foncière qui doit s'exercer lors de la vente de la
parcelle en question. Le modèle développé est celui de
l'extensif, tout à fait opérant dans les Alpes françaises,
et il attire l'attention sur le moment « logique »
d'intervention de la collectivité et sur la multiplicité des
choix qui s'offrent à elle, avec l'évolution des prix en ligne de
mire87(*).
Figure 8.Mise en
perspective de la chaîne de transformation du foncier, CLD des Vals du
Dauphiné & Nord Isère 2008
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo10.png)
En somme, la politique foncière est la
résultante des politiques publiques (logement, économie,
agriculture, environnement) ayant trait au développement et à
l'aménagement du territoire. Deux enjeux fonciers où il est
urgent d'agir semblent ressortir des entretiens : le logement et
l'artificialisation des terres agricoles88(*). Faire l'impasse sur la question foncière,
c'est finalement compromettre la concrétisation du projet de territoire.
La responsabilité politique est donc essentielle.
Le foncier est au coeur du projet de territoire, dans sa
dimension politique, économique et dans sa consistance juridique. Les
définitions proposées ont balayé le vocabulaire de
l'univers foncier en essayant de démontrer que ce qui fonde la question
foncière relève de ces trois dimensions complémentaires et
fortement liées : le juridique (le foncier, c'est du droit),
l'économique (le foncier, c'est de l'argent) et du politique (le
foncier, c'est un objet politique).
2. Qui se préoccupe du foncier ?
Cette seconde question est incontournable : qui sont les
acteurs sur cette scène du foncier ? Selon Le Meur89(*), l'enjeu foncier se situe
à ce niveau car « il renvoie tout d'abord à une
relation foncière, c'est-à-dire à un rapport social
noué entre acteurs individuels ou collectifs autour d'une chose ou d'un
bien et non au rapport direct d'un individu ou d'un groupe à cette chose
ou à ce bien. En outre, une relation foncière est souvent
sous-tendue par un complexe d'enjeux très
hétérogènes et dépendants des acteurs
impliqués. [...] En bref, une relation foncière n'est que
rarement purement foncière ». Le jeu d'acteurs permet de
comprendre à la fois le conflit foncier et l'objet foncier en
lui-même (usage, valeur, histoire...). Cette seconde partie s'attardera
donc à la question des acteurs du foncier.
2.1. Les acteurs et la
préoccupation foncière
D'après J. Comby, un opérateur foncier est un
organisme public ou parapublic chargé de mener des opérations
d'achat et de vente de terrains pour le compte d'une collectivité
publique en utilisant un fonds de roulement et la compétence de
techniciens dont les collectivités publiques ne disposent pas toujours.
En effet, depuis les Lois de décentralisation de 1982-1983, les
collectivités territoriales, (communes, départements et
régions) se sont vues octroyer certaines prérogatives
d'aménagement de l'espace et par conséquent, une
responsabilité en matière de gestion du foncier. En revanche,
comme le fait remarquer Comby, ce rôle d'opérateur foncier est
tenu de plus en plus souvent par d'autres acteurs (publics ou parapublics) tels
que les établissements publics fonciers (EPF).
Les enjeux fonciers sont portés par des acteurs
individuels et collectifs, que Le Meur90(*) classe schématiquement dans deux
catégories : d'une part des acteurs en compétition pour
l'accès aux ressources (relations de concurrence, d'échange, de
conflit, d'alliance), d'autre part, des instances ou institutions de
contrôle de l'accès aux ressources (Etat, collectivités).
Cependant, il est très complexe d'essayer de représenter la
diversité des acteurs qui sont mobilisés sur la question du
foncier (cela reviendrait presque à répertorier les acteurs de
l'aménagement et du développement territorial en France), et
développer une liste de ces acteurs, de leurs missions, de leur
échelle d'intervention ou encore de leurs moyens d'actions serait long,
fastidieux et inutile puisque ces données sont facilement accessibles
par ailleurs.
Toutefois, une typologie des acteurs sollicités sur le
thème de l'ingénierie foncière dans le cadre du programme
de recherche IngéTerr est en cours. Cette typologie offrira une
visibilité, jusqu'ici inexistante, des acteurs du foncier en France (et
donc des compétences mobilisables sur le sujet), permettant d'organiser
les organismes ou individus suivants91(*) : CAUE, SAFER, SUACI, Agence d'urbanisme, EPF,
maire, adjoint à l'urbanisme et autres adjoints, conseil local de
développement, DDT, préfet, chambres d'agriculture, conseils
généraux, associations, notaires, bureaux d'études,
citoyens, techniciens des collectivités territoriales, agriculteurs,
PNR...
Le schéma suivant est une première tentative
d'organisation des acteurs qui se « préoccupent » du
foncier (le propriétaire par exemple), ou dont l'objet de travail est le
foncier (le notaire par exemple). Le schéma distingue six grandes
catégories d'acteurs repérés notamment à l'occasion
des entretiens : ces catégories d'acteurs sont
détaillées par une liste non-exhaustive d'individus ou de
structures.
Région, Conseil général,
Communes, EPCI,
PNR, Parcs,
Elus et adjoints
Etat central,
Préfecture de région,
Préfecture départementale,
DDT
SAFER, EPF / EPFL
Chambres d'agriculture,
SUACI, CAUE,
Agence d'urbanisme
Association Foncière Urbaine,
Société Civile Immobilière Association
Foncière Pastorale,
Groupement Foncier Agricole
Notaires
Géomètres
Bureaux d'études
Propriétaires, Citoyens,
Exploitants agricoles,
Terre de Liens,
Associations diverses
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo11.png)
Figure 9. Acteurs et
"préoccupation foncière", N. Moyon 2010
L'approche du foncier par des cadres normatifs de
l'aménagement met en avant le rôle de l'Etat. Il est à la
fois relais des politiques publiques européennes qui peuvent impacter le
foncier (par exemple la Politique Agricole Commune), il initie ses propres
politiques publiques dans un cadre normatif qu'il maîtrise, et met en
oeuvre lui-même certaines de ses directives (à travers ses
services déconcentrés, ou certains outils de planification et
d'aménagement tels que les DTA ou les PIG92(*)). Pourtant, le schéma
précédant montre à quel point l'Etat, mais aussi les
collectivités territoriales « classiques », ne sont
pas seuls sur cette question du foncier. Deux catégories ont vu leur
importance croître ces dernières années : les
organismes publics et parapublics, notamment avec la montée en puissance
des Etablissements Publics Fonciers (locaux ou d'Etat) et les agences
d'urbanisme, ainsi que la société civile.
Certes, les propriétaires ont toujours
été « actifs », mais aujourd'hui ils ne sont
plus les seuls individus à s'adresser à leur maire au sujet du
foncier : un citoyen souhaite préserver le paysage typique de sa
commune, des individus désirent consommer des produits issus d'une
agriculture de proximité, une association nationale se mobilise sur les
questions d'accès au foncier agricole... Le foncier mobilise-t-il plus
d'acteurs qu'auparavant ? Il semblerait que la réponse soit
positive. Ces deux catégories d'acteurs illustrent deux tendances
parallèles, presque contradictoire : d'un côté,
l'objet foncier se spécialise avec une ingénierie qui semble se
déployer progressivement, et de l'autre, la société
civile, novice, se réapproprie cette question territoriale.
Par ailleurs, les collectivités abordent le foncier
à travers une série d'institutions spécialisées
séparées les unes des autres : l'administration de la justice
pour régler les conflits entre propriétaires, la perception de
l'impôt, la conservation juridique des actes de mutation, l'expropriation
d'utilité publique, les interventions sur le marché des terrains,
les politiques d'aménagement, la réglementation de l'usage des
sols. A travers ces institutions, on retrouve les dimensions juridiques,
économiques et politiques de l'objet foncier.
2.2. Le problème du
mille-feuille
L'image du mille-feuille est souvent reprise pour
évoquer l'empilement des structures territoriales, et donc des
compétences, y compris en matière de foncier. A la lumière
d'un cadre législatif national complexe et contraint, où la
compétence foncière est portée par plusieurs
collectivités territoriales, un certain flou plane sur les limites du
principe de subsidiarité et l'action publique en matière de
foncier n'a pas de réelle lisibilité, tant pour les institutions
elles-mêmes et leurs services que pour la population. Comme le constate
Marielle Mouly93(*), les
couches administratives s'empilent et se multiplient. Ainsi, chaque institution
met en oeuvre sa propre politique et ses propres orientations
stratégiques sans concertation préalable avec les autres. Les
politiques de l'Europe, de l'Etat, des régions et des
départements sont cloisonnées entre elles et ce contexte
représente une difficulté supplémentaire pour la
mobilisation des acteurs locaux et des ressources financières.
La future réforme des collectivités,
adoptée par le Sénat en seconde lecture le 8 juillet 2010,
prévoit un nouveau tournant dans l'organisation territoriale
française pour en finir avec « l'empilement des
structures »94(*), telle est la première raison
évoquée pour sortir du contexte organisationnel actuel. Les trois
mots d'ordre de cette réforme, « simplifier, adapter,
alléger », pourraient tout à fait se décliner
à la problématique foncière. Aujourd'hui, tous les
« espoirs » se portent sur l'échelle intercommunale
en matière de gestion de l'espace, considérée comme LA
bonne échelle pour appréhender la question foncière,
à condition que celle-ci corresponde au bassin de vie95(*).
En attendant un échelon de moins dans ce mille-feuille
des compétences foncières, la commune demeure l'échelon
incontournable, quelques soient les espoirs que nourrissent l'échelle de
l'intercommunalité et le PLU-intercommunal : « C'est bien
à cette échelle que se situe la responsabilité de la
délivrance des autorisations de construire ou d'aménager et c'est
bien à cette échelle qu'est réalisée encore
aujourd'hui la quasi-totalité des POS et PLU »96(*).
2.3. Les conflits fonciers
« Rural-urbain : le nombre de conflits en nette
augmentation »97(*) : le foncier est ici identifié comme la
première source de conflit territorial (questions de
constructibilité et de zonage), avec un niveau de conflictualité
qui n'a cessé d'augmenter depuis dix ans et dont le nombre d'affaires
portées devant les tribunaux est en tête de tous les autres types
de conflits. Le foncier est l'objet de conflits notamment car il cristallise
des représentations immatérielles fortes très
ancrées dans les esprits.
Le tableau suivant est extrait des travaux d'Anthony
Tchekemian98(*), où
il explicite -au sujet du foncier- les interactions entre citadins et ruraux
dans les territoires ruraux et périurbains. Ces interactions sont
basées sur les représentations de deux groupes d'acteurs :
les « ruraux » représentés par les
exploitants agricoles d'une part, et les
« néo-ruraux » pour les périurbains d'autre
part.
Interactions dans les territoires ruraux et
périurbains
|
Représentations des citadins sur les
exploitants
|
Représentations des exploitants sur les
citadins
|
Les exploitants souhaitent une valorisation de leurs produits
et de leur profession, mais perçoivent mal l'installation de citadins
dans le village
|
Les néo-ruraux veulent les avantages de la campagne,
mais non les inconvénients liés aux pratiques agricoles (souvent
il s'agit d'exploitants âgés, retraités, sans
successeur)
|
Les exploitants développent des stratégies
différentes :
- obtention du classement de leurs parcelles en zone
constructible afin que la vente soit plus avantageuse ;
- mode de fonctionnement différent (agriculture
biologique, animations, etc.) ;
- grands propriétaires conservant leurs parcelles.
|
La périphérie est rythmée par les
déplacements pendulaires, domicile-travail, des néo-ruraux ;
les villages sont souvent qualifiés de dortoirs. Les exploitants ont le
sentiment que les Coteaux du lyonnais sont une réserve foncière
immobilière.
|
Les territoires périurbains sont attractifs, car ils
permettent l'acquisition d'un habitat pavillonnaire avec jardin, la recherche
d'un meilleur cadre de vie, le souhait d'une reconnaissance sociale et la
nostalgie des souvenirs de campagne.
|
Une fois installés, les néo-ruraux souhaitent
des services et un confort identique à ceux de la ville, pour une
qualité de vie supérieure.
|
Figure 10. Interactions dans
les territoires ruraux et périurbains, d'après A. Tchekemian
2008
Ainsi, ces représentations sont porteuses de conflits
fonciers qui perpétuent en quelque sorte le clivage urbain-rural bien
que tout le monde s'accorde sur sa disparition spatiale progressive.
Par une démarche similaire, Marielle Mouly a construit
un tableau des « exemples d'enjeux et bénéfices
partagés entre le rural et l'urbain »99(*) dont on a extrait ci-dessous
ce qui concernait directement le thème du foncier. Le
bénéfice partagé de la dernière colonne doit
être lu de la sorte : Ville Campagne , « ce que la
ville apporte à la campagne », et inversement. Cette
démarche vise à montrer qu'une complémentarité
entre espaces urbains et ruraux est possible et souhaitable : ce
bénéfice partagé est aussi synonyme d'une moindre
conflictualité autour de l'enjeu foncier. Ainsi, dans la perspective
d'une densification accrue de l'espace urbain qui se traduirait par un
ralentissement de la périurbanisation, la ville serait potentiellement
susceptible de permettre un infléchissement de la pression
foncière à la campagne.
Types d'enjeu
|
Vu par l'urbain
|
Vu par le rural
|
Quel bénéfice partagé ?
|
Foncier
|
Densification de la ville, maîtrise de l'urbanisation
|
Protection des espaces agricoles et
« naturels »
|
Ville Campagne : une diminution de la pression
foncière
Campagne Ville : des espaces verts de
qualités et préservés et des paysages entretenus
grâce notamment à l'agriculture
|
Figure 11. Exemples d'enjeux
et bénéfices partagés entre le rural et l'urbain,
d'après M. Mouly 2008
Au sujet de la conflictualité autour du foncier,
l'espace alpin n'échappe pas à la règle, bien au
contraire. Ce thème est souvent abordé à travers l'enjeu
du maintien du multi-usage de l'espace en montagne, sur les versants et en
vallées.
Dans des espaces protégés tels que les parcs
nationaux, Lionel Laslaz n'oublie pas d'évoquer ce problème.
« Les différents usages des territoires montagnards renforcent
ces tensions récurrentes. Les flux touristiques constituent ainsi un
défi auxquels les gestionnaires des espaces protégés
proposent des solutions souvent identiques, volontiers basées sur une
vision "prédatrice" de la fréquentation récréative
et sur le postulat de la "fragilité" des milieux
montagnards »100(*). De fait, autour des polémiques
déclenchées par la Directive Territoriale d'Aménagement
des Alpes du Nord, Camille Blanc101(*) est allée explorer les enjeux de territoires
et les conflits identitaires cristallisés dans les stations de sports
d'hiver. Là encore l'usage du sol en montagne est tiraillé entre
deux tendances caricaturales : les
« prédateurs » d'un côté, les
« protecteurs » de l'autre.
3. Comment agir sur le foncier ?
Dans son épilogue imaginaire, Edgard Pisani102(*) n'oublie pas de rappeler
qu'un « texte de loi, c'est beaucoup, et c'est très peu de
chose. Ce qui compte est ce qu'en feront les hommes. [...] La loi est
l'expression et l'instrument d'une Nation. L'expression est acquise, il faut
maintenant que la Nation et les collectivités territoriales qui la
composent apprennent à se servir des outils qui sont désormais
à leur disposition ». Pour sa part, Jacques Manesse indique
à propos de la loi Montagne ; « la loi laisse trop
souvent une marge d'appréciation qui peut aller jusqu'à en
tourner l'esprit »103(*).
3.1. Les cadres normatifs du
foncier
Le tableau qui suit permet de récapituler les
principales lois qui ont structuré au fil du temps la question
foncière dans la législation française. De lois
« de référence » à d'autre lois
quelque peu « oubliées », cette vision
synthétique s'est attardée sur les avancées successives en
matière de foncier, depuis la loi Cornudet de mars 1919 jusqu'à
la loi « Grenelle II » de juillet 2010.
Cependant, ce tableau synthétique ne prétend pas
offrir un reflet parfaitement exhaustif des différentes mesures
foncières apportées par ces dix-neuf lois sur une période
de quatre-vingt onze ans.
Figure 12. Les cadres
normatifs du foncier, N. Moyon 2010
Date
|
Loi
|
En matière de foncier...
|
Les outils instaurés
|
14 mars 1919
|
Loi Cornudet
|
Introduction de la planification urbaine.
|
|
15 juin 1943
|
Loi d'Urbanisme
|
Pose les bases de l'urbanisme réglementaire et charge
l'Etat de l'organisation de la gestion urbaine avec sa Délégation
Générale à l'Equipement National
|
3 volets : création d'une administration
spécifique, refonte des projets d'aménagement, renforcement des
réglementations de l'urbanisme (instauration du permis de construire
obligatoire sur tout le territoire).
|
23 octobre 1958
|
Ordonnance
|
Confirme et fixe le droit à l'expropriation
institué aux collectivités
|
Réglementation spécifique
|
26 juillet 1962
|
-------------------------
|
Permet d'éviter un effet spéculatif
généré par l'annonce d'un projet
|
Procédure d'extrême urgence en matière
d'expropriation pour cause d'utilité publique
Création des Zones d'Aménagement
Différées
|
30 décembre 1967
|
Loi d'Orientation Foncière (LOF)
|
Met en place les principales procédures de la
planification réglementaire
|
Distinction entre documents prospectifs et documents
réglementaires (SDAU, POS). Outils : Taxe Local d'Equipement (TLE), COS,
ZAC en remplacement des ZUP
|
31 décembre 1975
|
Loi foncière
|
Deux nouveaux outils de maîtrise foncière et
début des critiques sur la non efficacité de l'interventionnisme
public
|
Plafond Légal de Densité (PLD) et Zone
d'Intervention Foncière (ZIF)
|
7 janvier et 22 juillet 1983
|
Lois de décentralisation
|
Transfert des compétences d'urbanisme aux communes
|
Autorisations de construction confiées aux maires
|
9 janvier 1985 et 3 janvier 1986
|
Loi Montagne & Loi Littoral
|
Protection des zones sensibles
|
Obligation de construire en continuité du bâti
existant et inconstructibilité sur les rivages et les grands lacs
|
23 décembre 1986
|
Loi Méhaignerie
|
Relance l'offre foncière constructible
|
3 mesures : réduction du droit de préemption,
abrogation du plafond légal de densité, application
anticipée des POS en cours de révision
|
25 juin 1999
|
Loi d'Orientation pour l'Aménagement et le
Développement Durable (LOADDT ou Loi Voynet)
|
Affirme la complémentarité entre pays et EPCI
à fiscalité propre et intègre la notion de
développement durable à l'aménagement.
|
-------------------------
|
12 juillet 1999
|
Loi « relative au renforcement et à la
simplification de la coopération intercommunales » (Loi
Chevènement)
|
-------------------------
|
3 échelons de l'intercommunalité sont
définis : communauté de communes, communauté
d'agglomération, communauté urbaine
|
13 décembre 2000
|
Loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU)
|
Lutte contre l'étalement urbain et encourage le
renouvellement urbain
|
Rénovation de certains outils réglementaires et de
planification : SCOT, PLU, PADD, Objectif des 20% de logements sociaux
(Art 55)...
|
2 juillet 2003
|
Loi Urbanisme et Habitat
|
Contribue à accélérer le mitage des zones NB
des POS
Retarde la conversion des POS en PLU
|
-------------------------
|
23 février 2005
|
Loi pour le Développement des Territoires Ruraux (DTR)
|
3 objectifs :
- améliorer les conditions d'exploitations des
propriétés rurales agricoles et forestières,
- assurer la mise en valeur des espaces naturels ruraux,
- contribuer à l'aménagement des territoires
communaux et intercommunaux.
|
- Nouvel outil d'intervention pour les Conseils
généraux : le PAEN (Périmètre de protection et
de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains)
- Permet aux collectivités de choisir entre l'application
de l'une ou l'autre des lois Montagne et Littoral en matière de
constructibilité des rives (Article 187)
|
5 janvier 2006
|
Loi d'Orientation Agricole (LOA)
|
Transfert de compétence vers les Conseils
généraux
|
Mise en place de commission pour avis consultatif sur les PLU
|
13 juillet 2006
|
Loi d'Engagement National pour le Logement (ENL)
|
4 thématiques abordées :
- Aide les collectivités à construire
- Augmente l'offre en loyers maîtrisés
- Favorise l'accession sociale à la
propriété
- Renforce l'accès de tous à un logement
confortable
|
Majoration de la taxe foncière sur les
propriétés non-bâties. Maintien des objectifs de
construction de logement sociaux. Accélération des
procédures de cession des terrains de l'Etat. Pass Foncier.
|
25 mars 2009
|
Loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre
l'exclusion
|
Assouplit l'article 55 de la loi SRU en incluant l'accession
à la propriété dans le calcul des 20% de logements sociaux
obligatoires
|
-------------------------
|
3 août 2009
|
Loi « Grenelle 1 »
|
Programme la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement
|
Limite la consommation de zones agricoles par l'urbanisation
|
12 juillet 2010
|
Loi « Grenelle 2 »
|
Définie les orientations d'application et de
territorialisation du Grenelle de l'environnement et de la loi Grenelle 1
|
Redéfinition des compétences des
établissements publics d'aménagement et fonciers,
Compensation à la charge des départements dans le
cadre d'opérations d'aménagements fonciers,
Observatoire de consommation foncière,
Mise en place des trames vertes et bleues,
Revient sur l'assouplissement de l'art. 187 de la Loi DTR 2005
Remplace les DTA en DTADD (perte du caractère opposable du
document)
|
3.2. Les lois
« Grenelle », et après ?
Dans un article paru début 2010, Richard Trapitzine,
urbaniste consultant, détaille les apports et les oublis des lois
Grenelle I et Grenelle II104(*). Les commentaires qui suivent sont pour la plupart
issus de ses conclusions.
Tout d'abord, le premier constat qui nous intéresse ici
est que la thématique foncière est le grand absent de ces deux
lois Grenelle. L'auteur constate qu'au total, il n'apparait qu'à trois
reprises : dans la loi Grenelle I à propos de l'extension du
foncier artificialisé en zone agricole, et dans la loi Grenelle II,
à l'article 13 pour redéfinir les compétences des
établissements publics d'aménagement et des établissements
publics fonciers, et enfin, à l'article 44 à propos de la
compensation mise à la charge des départements dans le cadre
d'opérations d'aménagement foncier. Ce constat constitue un
véritable paradoxe car ces deux lois Grenelle entrainent « la
réécriture du livre premier du code de l'urbanisme et de grands
pans d'autres codes comme celui de l'environnement ». De plus, ces
textes « bouleversent les façons de concevoir
l'aménagement et la planification des territoires. Ils introduisent en
ces domaines une nouvelle conception de l'action publique d'Etat ».
Pour Trapitzine, le foncier est d'autant plus une dimension incontournable dans
une perspective de développement durable des territoires :
« l'espace ne peut se transformer que par et au profit de celui qui
en détient sa propriété ou son usage », sans
maîtrise du sol aucune stratégie territoriale ne peut aboutir.
Ensuite, l'auteur constate que la loi Grenelle I comme Grenelle II apportent de
nouveaux moyens institutionnels et règlementaires. Ainsi, deux
orientations ont été prises :
ü L'adaptation de l'organisation administrative de
gestion des territoires, pour traiter à la bonne échelle les
enjeux environnementaux et les contradictions entre intérêt local
et intérêt général.
ü La modification des échelles des documents
d'urbanisme, « de sorte qu'à terme le PLU communal devienne
une exception ».
La loi Grenelle II propose donc de favoriser une meilleure
harmonisation des documents d'orientation et de planification avec une
meilleure lisibilité de leur hiérarchisation. Pour Trapitzine,
cela suppose surtout une conception qui s'opère à la bonne
échelle, accompagnée d'un dialogue constructif entre Etat et
collectivités, sans oublier une forte volonté des élus de
mettre en oeuvre au plan opérationnel les orientations
générales. Sur ce dernier point, la maîtrise du foncier,
qui est en quelque sorte le support du projet de territoire, est incontournable
voire « essentielle » selon l'auteur.
En outre, la loi Grenelle II marque également
« la prédominance de l'environnement sur
l'aménagement » d'après Trapitzine. Par exemple, la
nouvelle définition du Plan Local d'Urbanisme (article L 123-1) vise
à intégrer dans les nouveaux documents de planification la
trilogie durable : l'environnement, le social, et l'économie. Selon lui,
« ce ne sera plus l'urbanisme qui façonnera l'environnement,
mais l'environnement et le développement durable qui conditionneront en
amont la localisation des activités humaines et le cadre de vie des
populations ».
Cependant, ce prima de l'environnement représente
d'après l'auteur un risque : un difficile dialogue entre, d'une
part, un Etat qui sera porteur des contraintes écologiques et
environnementales et d'autre part, les collectivités (région,
pays, département, EPCI, communes) proches des réalités
sociales et économiques. Toutefois, ce « prima de
l'environnement sur l'urbanisme » présente également
une opportunité : en fixant des objectifs de modération dans la
consommation d'espace, le Grenelle II opère un retour vers les
fondamentaux de la loi SRU de 2000, qui furent quelque peu mis à mal par
la loi Urbanisme et Habitat de 2003, laquelle a contribué à
accélérer le mitage des zones NB des POS et à retarder
leur conversion en PLU. Les collectivités seront désormais dans
l'obligation de démontrer l'économie effective de l'espace et
leur volonté de stopper la consommation des espaces naturels.
A l'échelle du SCOT, les intercommunalités
devront tenir une comptabilité de la consommation de l'espace
nécessaire pour développer le territoire : cette veille sur
les évolutions foncières et celles de l'occupation de l'espace
doit permettre « d'agir dans le préventif ». Par cet
observatoire, les collectivités locales seront censées orienter
en conséquence leurs stratégies foncières et
d'aménagement : mesures de protection, évaluation
chiffrée de la consommation d'espace, justification de la localisation
et de l'emprise de l'urbanisation... Mais l'auteur estime que dans le projet de
loi Grenelle II, « l'espace agricole reste encore
considéré uniquement comme un espace à
préserver », et regrette que « le souci de
programmation applicable dans les zones urbaines n'ait pas été
explicitement étendu aux territoires à forts enjeux agricoles
méritant d'être considérés comme de
véritables zones de développement économique ».
Selon lui, cette forme d'intégration de l'activité agricole
à l'aménagement urbain ou métropolitain « aurait
contribué à favoriser une approche globale de
l'aménagement et à effacer ainsi la dichotomie ambiante entre
l'urbain et le rural ». Cette approche est également
partagée par plusieurs acteurs locaux proche du milieu
agricole105(*).
Désormais, le PLU semble acquérir une vision
« plus prospective, avec une dimension programmatrice ».
Ces nouvelles qualités contribuent, selon Trapitzine, à effacer
la rupture qui s'opérait jusqu'ici entre le réglementaire et
l'opérationnel, pour qui c'était la cause de nombreuses
« dérives incontrôlées au cours de la phase de
transformation physique de l'espace ». En revanche, la
volonté de généraliser les PLU intercommunaux ne manquera
pas de se heurter aux élus municipaux comme le rappelle
l'auteur : «les réticences des élus communaux à
devoir abandonner leurs prérogatives dans la gestion du droit des sols
n'a pas permis pour l'instant d'imposer des élaborations de PLU à
ces niveaux de territoire.[...] Pour cela, les parlementaires doivent
réussir à convaincre leur base d'appréhender globalement
l'aménagement de l'espace à des échelles homogènes
et pertinentes ». Les lois Grenelle laisseraient ainsi entrevoir la
fin de « l'urbanisme statique de zonage », s'orientant vers
une conception urbaine plus dynamique en terme de gouvernance et
« obligeant à penser à la fois stratégies et
projets au service des territoires et des hommes ». Dans cette
nouvelle perspective, les outils et la règle d'urbanisme doivent se
mettre au service d'un projet de territoire : leur usage n'est pas, ou
n'est plus, une fin en soi.
En matière de préservation de la
biodiversité, les futurs schémas régionaux de
cohérence écologique identifieront les espaces qu'il conviendra
de préserver et d'appeler « trames vertes » et
« trames bleues ». Ce seront donc de nouvelles servitudes
qui participeront à la lutte contre l'étalement urbain et de
facto, contraindront les acteurs locaux à se rendre économes
en espace consommé.
Les lois Grenelle marquent aussi un retour relatif de l'Etat.
Par exemple, avec l'élargissement du contrôle a priori des
préfets, ceux-ci pourront s'opposer à l'entrée en
vigueur d'un PLU si ce dernier autorise une consommation excessive d'espace
sans justification, ou encore la densification des secteurs non desservis par
les transports. De même pour Trapitzine, ces lois annoncent sans le dire
la prochaine loi sur la Réforme des Collectivités Territoriales
qui redéfinira leurs champs de compétences. Cette
évolution devrait entraîner forcément « pour des
raisons d'équilibre » un retour de l'Etat, fort et
déconcentré, « qui ne manquera pas de tenter de
récupérer par des actions préventives le terrain qu'il
avait perdu, en imposant aux futures collectivités locales des visions
d'ensemble plus globales et régulatrices qu'elles ne le sont
actuellement ».
Bien sur, les lois Grenelle « favorise un urbanisme
de projet soucieux de préservation de l'environnement et de
développement durable, et un urbanisme plus dynamique que par le
passé ». Mais une fois n'est pas coutume, « il est
permis de s'interroger sur les conditions de mise en oeuvre et
d'application ». Trapitzine regrette un urbanisme « auquel
il manque un souci de cohérence régionale et surtout l'ancrage
foncier, cette matière première de l'aménagement sans
laquelle toute programmation ne serait qu'utopie ». Enfin, à
la manière d'Edgard Pisani, l'auteur conclue ainsi :
« au-delà des textes, ce sont les volontés politiques
qui, comme toujours, primeront ».
Pour leur part, les élus de l'association nationale des
Elus de Montagne (ANEM) regrettent que les « Lois Montagne et
Littoral se chevauchent à nouveau »106(*). En effet, l'article 187 de
la loi DTR (loi relative au développement des territoires, 2005) avait
assoupli la règle qui prévalait jusque là : il
était devenu possible de distinguer les espaces où devaient
s'appliquer la loi Littoral ou bien la loi Montagne, pour ce qui est de la
règle de constructibilité des rives. Cet article 187 avait
répondu au souhait des élus de l'ANEM. La loi Grenelle II a
supprimé cet assouplissement, ce que les associations écologistes
ont plutôt apprécié. Une dernière inquiétude
semble tourmenter les élus de l'ANEM : « les trames
vertes et bleues ne risquent-elles pas de rendre toute la montagne
inconstructible ? ». Enfin, Thierry Repentin107(*) évoque dans sa
tribune « une évolution en demi-teinte » à
propos de la loi Grenelle II. Selon lui, on a plutôt assisté
à une « déperdition d'énergie entre Grenelle 1
en 2007 et Grenelle 2 d'aujourd'hui », aboutissant à ce qu'il
qualifie de « résultats bricolés et
polémiques ».
Si les lois Grenelle I et II constituent peut-être des
étapes déterminantes qui marqueront durablement les pratiques de
l'aménagement du territoire, c'est à leur
« bonne » mise en oeuvre qu'il faut désormais
s'attacher. Au-delà de ces actualités législatives,
Dominique Dujols propose de poser les bases d'une future « loi
d'orientation foncière urbaine » à partir de
propositions formulées lors des Etats généraux du logement
qui se sont tenus le 4 mai 2010108(*). Cette future « loi d'orientation
foncière urbaine » répondrait notamment à la
nécessité de disposer de valeurs de références,
ainsi que d'une « véritable transparence des prix de
transactions » y compris pour les loyers. Dominique Dujols
énumère les cinq mesures suivantes qui permettraient d'atteindre
ces objectifs :
1. Mise en place d'outils de connaissance des marchés
permettant la transparence des transactions : « c'est
peut-être uniquement dans cette perspective que l'observatoire est
vraiment utile ».
2. Généralisation des PLU intercommunaux avec
des secteurs de mixité sociale.
3. Développement des procédures de gels de prix
à une date antérieure, soit au classement d'un terrain en zone
constructible, soit au lancement d'un équipement valorisant,
« ce qui permettrait l'exercice du droit de préemption
à un prix raisonnable ».
4. Au niveau fiscal : transfert aux collectivités
locales de l'impôt sur les revenus fonciers.
5. Révision de la fiscalité foncière pour
« pénaliser la rétention, inciter à l'activation
et à l'optimisation du foncier ».
3.3. Les outils d'une politique
foncière
Aux multiples lois évoquées
précédemment s'ajoutent une liste d'outils tout aussi longue. Les
outils suivants permettent tous de maîtriser, d'une manière plus
ou moins directe, permanente ou ponctuelle, la gestion de l'espace et l'usage
des sols, les prix du foncier ou leur disponibilité qui permettent la
mise en oeuvre d'un projet d'aménagement. L'ensemble de ces outils sont
donc à articuler autour d'une politique foncière définie
par la collectivité.
D'après la définition de Joseph Comby,
« les politiques foncières peuvent avoir des objets
extrêmement variée (aménagement du territoire,
répartition de la propriété, protection de
l'environnement, politique de peuplement, etc.) et poursuivre des objectifs
différents : telle commune privilégiant une volonté
de développement économique, telle autre une amélioration
des conditions de vie ». Ce premier constat lui permet de
conclure : « il n'existe donc pas de bonnes et de mauvaises
politiques foncières, mais des politiques foncières plus ou moins
bien adaptées aux objectifs poursuivis », une sorte de slogan
repris très largement par l'ensemble des professionnels de la question
foncière.
De plus, J. Comby propose de distinguer : d'une part les
débats portant sur la meilleure utilisation des outils existants dans le
cadre de politiques foncières locales, et d'autre part, les
débats portant sur la modification éventuelle des outils pour
définir de nouvelles politiques foncières nationales. Selon
l'auteur, « on peut aussi parler dans le premier cas de politiques
foncières à droit constant et, dans le second, de politiques
foncières à droit variable ». Selon cette
définition, si les politiques foncières nationales
relèvent de l'Etat, les services de l'Etat peuvent aussi mener des
politiques foncières locales concurrentes ou complémentaires
à celles des collectivités locales, par exemple en souhaitant
implanter localement un projet d'intérêt national.
Hormis ce problème d'arbitrage entre politique
foncière d'Etat et politiques foncières locales, il semble que
l'enjeu réside surtout dans la liste pléthorique d'outils dont
disposent les collectivités. Le paradoxe demeure donc
celui-ci : de nombreux outils existent pour mettre en oeuvre une
politique foncière mais celle-ci semble une action difficile à
mener pour les acteurs locaux. Dans sa thèse, Louis Allie
rapporte cette citation de Faure (In Amoury, 2002)109(*) pour qui l'empilement des
procédures ou des outils de protection de la nature paraît
excessif : « Les parcs naturels régionaux,
réserves naturelles, sites classés, zones humides, sites Nature
2000 ou arrêtés de biotope se conjuguent les uns aux autres -
éventuellement dans une même commune - pour finalement brouiller
les cartes (au point qu'il devient difficile, parfois, de savoir où
poser les toilettes publiques!). Certes, chaque porteur de projet se targue de
justifier le maintien de ses propres classifications; néanmoins, les
choses deviennent rapidement illisibles et insupportables ».
3.3.1. La boite à
outils fonciers
Les boites à outils ou les guides
pour la maîtrise du foncier, urbain ou agricole, sont très
nombreux. En ce sens, après avoir découvert l'ensemble de ces
outils, le choix a été fait de sélectionner les travaux du
juriste Romain Cazajous développés dans son article Le sol
pour maîtriser son territoire110(*), ainsi que ceux de Thibaud Wyon
réalisés dans le cadre d'un Diplôme de Recherche
Technologique à la région Rhône-Alpes111(*) : en effet, leurs
approches bénéficient déjà d'une vision synoptique
de ces outils. Ce qui suit est donc en quelque sorte un panel de cette boite
à outils foncier. Le schéma montre quant à lui le
degré d'imbrication des outils et des opérateurs fonciers,
suivant les différentes échelles de planification territoriale.
La question de la coordination prend alors tout son sens112(*).
Figure 13. Tableau des
outils de planification, d'après R. Cazajous 2007
Outils de planification (selon l'ordre
hiérarchique)
|
o DTA : Directive territoriale
d'aménagement élaborée sous la responsabilité de
l'État. Elle fixe les principaux objectifs de l'État en
matière de localisation des grandes infrastructures et de
préservation des espaces naturels.
|
o SCOT : Schéma de
cohérence territoriale qui fixe les orientations générales
des politiques d'urbanisme, de l'habitat, des activités
économiques, etc. au niveau intercommunal.
|
o PLH : Programme local de l'habitat.
Outil d'observation, de définition et de planification des actions
servant au développement d'une politique locale de logement.
|
o PLU : Plan local d'urbanisme qui
établit un projet global d'urbanisme (projet de territoire avec son
PADD) et fixe les règles d'utilisation des sols au niveau communal
(possibilité de PLU intercommunal).
|
o Carte communale : plus limitée que
le PLU, elle fixe néanmoins les règles d'utilisation des sols en
délimitant les secteurs constructibles de ceux où les
constructions ne sont pas admises.
|
Figure 14. Tableau des
outils d'acquisition foncière, d'après R. Cazajous
2007
Outils d'acquisition foncière
|
o DPU : le droit de
préemption urbain permet à une collectivité
d'acquérir un bien en se substituant à l'acquéreur
trouvé par un vendeur.
o ZAD : la zone d'aménagement
différé est créée par l'État sur proposition
d'une commune ou d'un ÉPCI. C'est un secteur à l'intérieur
duquel s'applique un droit de préemption équivalent au DPU sans
que l'existence d'un document d'urbanisme soit nécessaire.
o Expropriation pour cause d'utilité publique
: une procédure permettant à la collectivité
territoriale de s'approprier, grâce à la contrainte, un terrain
pour réaliser un projet d'aménagement.
|
Figure 15. Tableau des
outils d'aménagement opérationnel, d'après R. Cazajous
2007
Outils d'aménagement
opérationnel
|
o ZAC : la zone d'aménagement
concerté est une opération d'aménagement par laquelle une
collectivité réalise ou fait réaliser l'aménagement
et l'équipement des terrains en vue de les céder ou de les
concéder à des utilisateurs publics ou privés. Cette
procédure consiste donc à la fois à produire des
constructions et à réaliser des équipements publics.
o Lotissement : soumis à une
autorisation administrative individuelle, il consiste dans la division d'une
propriété foncière en vue d'y implanter des
bâtiments.
o Permis de construire groupé :
autorisation donnée à un constructeur pour
réaliser des bâtiments sur le même terrain.
|
Figure 16. Tableau des
outils fiscaux et financiers, d'après R. Cazajous 2007
Outils fiscaux et financiers
|
o La participation pour voirie et réseaux
: possibilité offerte aux communes de percevoir des
propriétaires riverains bénéficiant de la desserte, une
contribution financière pour la réalisation des travaux.
Adaptée aux plus petites communes, elle évite de mettre en place
des procédures plus complexes comme la ZAC ou le PAE.
o La Taxe locale d'équipement (TLE):
outil permettant de financer des équipements rendus nécessaires
par l'urbanisation. C'est un impôt forfaitaire perçu par les
communes exigibles sur toutes les opérations assujetties à un
permis de construire.
o Le Programme d'aménagement d'ensemble
(PAE) : outil complémentaire à la TLE et plus
intéressant au niveau des recettes, il permet le financement par les
constructeurs de tout ou partie des frais relatifs à la
réalisation d'équipements publics importants telles que des
voiries rendues nécessaires par l'édification de nouvelles
constructions.
o La subvention pour surcharge foncière
: subvention étatique allouée à des organismes
bailleurs sociaux en vue de la construction de logements locatifs aidés
lorsque le prix du foncier est très élevé.
|
Figure 17. Schéma des
outils fonciers, par catégorie et échelle
d'intervention/utilisation, d'après T. Wyon 2008
CERF-R-A
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo12.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo13.png)
Thibaud Wyon commente ce schéma en indiquant tout
d'abord que la liste des acteurs du foncier n'est pas exhaustive :
« elle ne comprend que les acteurs directs dont la mission principale
est l'action foncière, que ce soit sur des espaces urbains,
périphériques ou ruraux »113(*).
D'un point de vue spatiale, il remarque également que
c'est à l'échelle communale que la concentration des outils
opérationnels est la plus forte, alors que l'ingénierie
territoriale et la planification se concentre à une plus grande
échelle. En toute logique, ce décalage est donc nuisible à
la bonne mise en oeuvre des outils fonciers. Une des dimensions de l'action
publique peut également porter sur cette aide à
l'ingénierie locale qui demeure « indispensable pour
orchestrer les outils opérationnels nécessaires à la
réalisation de leur projet de territoire » selon T. Wyon.
En outre, Romain Cazajous débute sa
démonstration par le constat suivant : « à
défaut de donner un mode d'emploi de la maîtrise foncière,
l'État a mis à la disposition des collectivités
territoriales une vaste boite à outils, soulignant combien la
maîtrise de la question foncière est une étape
incontournable du développement local ». Toutefois, il ne manque
pas non plus de rappeler que la dissémination des nombreux
textes constitue une difficulté pour les collectivités de s'y
retrouver ; « d'autant que, face à la pénurie
du foncier, à la spéculation du marché, à
l'étalement urbain et aux préoccupations environnementales,
celles-ci ont-elles les moyens d'avoir une réelle maîtrise
foncière ? ».
Puisque la boite à outils semble être remplie, la
mutualisation des efforts apporte une solution à l'effet pervers ainsi
constitué. De même, une plus grande coordination entre les
collectivités permettrait de rechercher l'échelon le plus
pertinent pour exercer les compétences foncières, ou bien pour
trouver une combinatoire des outils fonciers. Toutefois, pour R. Cazajous, il
n'en demeure pas moins que « l'enjeu pour une collectivité est
moins d'avoir une parfaite maîtrise foncière que d'être
acteur de son propre développement ».
3.3.2. La fiscalité,
un levier potentiel
La fiscalité vient compléter la boite à
outils fonciers par de nombreux dispositifs dont le détail
nécessiterait de faire appel à un juriste fiscaliste. Cependant,
Joseph Comby distingue tout d'abord deux types de fiscalité
foncière pour lesquelles les effets économiques sont selon lui,
« diamétralement opposés » :
ü La fiscalité sur les mutations a pour effet de
réduire la mobilité des terrains et du parc immobilier.
ü La fiscalité annuelle sur les
propriétés est plus douloureuse, mais présente une
série d'avantages économiques.
Ainsi, le premier type de fiscalité « freine
l'investissement, pénalise la construction, frappe surtout les jeunes
actifs... mais a l'avantage d'être relativement indolore, les
acquéreurs n'ayant souvent même pas conscience qu'une partie des
sommes qu'ils empruntent sert seulement à payer un
impôt » d'après l'avis de Comby. D'autre part, le second
type de fiscalité « facilite la mobilité du parc,
favorise sa pleine utilisation en poussant les propriétaires à se
débarrasser de biens qui ne sont plus assez utiles ou rentables pour
eux, accroît l'offre foncière, encourage l'investissement. Son
impact social est plus discutable ; ainsi, il frappe surtout les personnes
âgées (statistiquement, les propriétaires sont plus vieux
que les locataires) ». De plus, une réforme fiscale est en
cours de réflexion à l'échelle nationale : l'objectif
consisterait notamment à rénover les outils fiscaux afin d'en
faire de véritables leviers de la maîtrise foncière. Un
groupe de travail réfléchit notamment à la proposition
d'une « taxe sur le non-usage complet du COS
attribué ». L'enjeu est d'inciter à une
réflexion approfondie de l'aménagement pour une rationalisation
de l'utilisation du foncier114(*).
Enfin, Thibaud Wyon s'est penché sur le système
fiscal éprouvé dans plusieurs pays d'Europe du Nord :
« la taxation des plus-values sur la mutation des biens
agricoles »115(*).
Par exemple, le Parlement danois a adopté en 1992,
une loi sur la planification foncière. La taxation des plus-values de
cession sur les terres agricoles s'inscrit ainsi dans un dispositif
législatif « cohérent et relativement
rigide » qui interdit, par exemple, le changement d'affectation des
bâtiments existants. En outre, le taux de la taxe foncière
applicable en zone urbaine est de dix à vingt fois supérieur
à celui concernant les biens situés en zone rurale. La
fiscalité encourage donc les propriétaires à ne pas
demander le classement de leurs biens en zone urbaine. De fait, la base
d'imposition de la taxe d'urbanisation résulte de la différence
entre le prix de vente des terrains urbanisables et la valeur initiale de la
terre agricole (fixée à partir de la valeur locative cadastrale).
Le taux de la taxe est assez élevé puisqu'il varie de 40% pour
les transactions d'un montant inférieur à environ 26 830€
à 60% pour les transactions d'un montant supérieur. De plus, la
taxe est exigible dès le changement de statut des terrains.
La taxation de cet « enrichissement sans
cause » est l'enjeu de ce système fiscal116(*) puisque ce mode de taxation
des plus-values pénalise fortement le changement d'affectation des
terres, et limite ainsi toute spéculation sur les terres agricoles. Il
est à noter que ce système de taxation ne
pénalise pas seulement les particuliers, mais également les
communes qui réalisent des ventes de terrains agricoles à des
fins d'urbanisation. En outre, si elles procèdent à une
modification du document d'urbanisme (équivalent au plan d'occupation
des sols), les communes peuvent être obligées par les
propriétaires de terrains frappés d'une taxe d'urbanisation de
les racheter. En conséquence, ces collectivités sont fortement
incitées à ne pas modifier le zonage qui relève de leur
compétence.
La gestion des marchés fonciers de l'espace rural
au Danemark s'effectue à la source, avec un système qui s'auto
alimente : la sur-taxation des plus values foncières incite à un
gel de la mutation des terres agricoles. La limitation des mutations stabilise
les documents d'urbanisme et réciproquement. En France, La base
d'imposition est cependant beaucoup plus souple (laissant place à un
important régime exonératoire. Outre la complexité du
calcul de la taxe, on note la différence d'engagement politique de la
loi française, beaucoup plus consensuelle. Résultat : même
si cette taxe génère une ressource fiscale supplémentaire
à la commune, elle est contre-productive en termes de stabilisation de
la hausse des marchés fonciers. En effet, les propriétaires
calculent la valeur de la taxe sur leur prix de vente initiale, et
répercutent son montant pour obtenir approximativement le prix de vente
final.
En attendant cette prise de position (à la
probabilité réduite) de l'Etat, les collectivités
territoriales (agglomérations, départements, régions)
allouent chaque année des millions d'euros de subventions pour
réduire une charge foncière ne permettant plus
l'intégration d'opération mixte (accession à la
propriété, locatif et locatif aidé).
Le chapitre 2 a fait le choix de ne pas s'attarder sur les
phénomènes interpellés par le foncier (disparition de
terres agricoles utiles, étalement urbain, mitage, fermeture des
paysages...), ou même l'importance de « travailler »
cette question du foncier : par exemple, l'irréversibilité
de l'imperméabilisation des sols, la réversibilité des
documents d'urbanisme et donc des zonages, d'où les
phénomènes de spéculation foncière, d'anticipation
du changement d'usage du sol, etc. Enfin, ces miscellanées du foncier
ont souhaité offrir un aperçu large et varié de la
complexité de l'objet foncier lui-même : ses interactions
avec les autres champs de l'aménagement et du développement du
territoire, ses acteurs, ses cadres normatifs et ses outils.
Partie I. Conclusion intermédiaire
L'enjeu de cette première partie du mémoire
était de réussir à appréhender l'objet foncier,
malgré sa complexité (son imbrication à d'autres
thématiques de l'aménagement et de l'urbanisme et sa
transversalité). Aujourd'hui, s'il semble que le foncier
bénéficie d'un regain d'intérêt par les pouvoirs
publiques, cette remobilisation du foncier prend la forme tantôt d'une
question posée au foncier, tantôt du problème foncier. En
effet, « c'est bien souvent sous forme de question que le foncier est
évoqué : question posée complexe, difficile, à
résoudre.... pour améliorer la production de logements neufs,
réduire les coûts des opérations... »117(*). Le
« problème foncier » concerne ainsi des élus,
des primo-accédants, mais aussi des natifs évincés par les
prix d'un territoire devenu « trop » attractif par exemple.
Aujourd'hui, le foncier est un problème saisi par les
politiques publiques d'aménagement et de développement du
territoire, mais également par les politiques sectorielles (agriculture,
habitat, environnement, tourisme). Ainsi, dans toutes les dernières
« grandes lois d'aménagement », un discours sur le
foncier se construit : celui-ci vise à faire prendre conscience du
« problème foncier », et ainsi, à
rationnaliser la consommation d'espace utilisé pour le
développement urbain. En somme, il s'agit d'un retour à une plus
grande maîtrise foncière, dans un contexte général
de retour à la maîtrise territoriale.
A la manière dont la mission départementale
drômoise d'observation de l'habitat le formule, cette première
partie « propose des outils de connaissance et des données
[...] sur le foncier, non pour résoudre la question mais contribuer
à mieux la poser. A chaque élu d'utiliser au mieux ces
informations pour avancer dans la résolution de la question
foncière »118(*).
Partie
II.
A la
conquête du foncier alpin
La première partie de ce travail a permis de poser les
bases de la question foncière, dans sa complexité et donc dans
tout son intérêt. Cette seconde partie s'attache à explorer
deux dimensions du mémoire. Celles-ci ont permis de structurer un
cheminement de réflexions tournées vers les enjeux fonciers du
territoire des Alpes du Nord, et même pour ainsi dire, à la
conquête du foncier alpin lui-même.
Le chapitre 1 s'intéresse à étudier et
à décortiquer deux cadres normatifs alpins. La Convention alpine
et la Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord
produisent un discours foncier que ce travail a permis de saisir. Dès
lors, en tant que « cadres normatifs de
l'aménagement », ces deux textes ont une posture
particulière vis-à-vis de leur territoire de mise en
oeuvre : quel est leur rôle respectif, leurs efficacités,
leurs « péripéties »... Sur ce dernier
aspect, la DTA des Alpes du Nord est apparue très vite
intéressante : que révèle son actualité du
printemps 2010 ? Concernant les controverses qui l'entourent, quelles
sont-elles et d'où viennent-elles ? Que défendent-elles si
précieusement sur le territoire des Alpes du Nord ? In
fine, l'analyse de ces deux cadres normatifs alpins amène à
engager une réflexion élargie au rapport au droit et à la
norme sur ces territoires montagnards.
Le chapitre 2 permet d'embrasser la seconde dimension de cette
recherche appliquée. Centré sur l'étude de trois
territoires des Alpes du Nord, ce chapitre questionne les initiatives locales
mises en oeuvre en matière de foncier, plus que les enjeux visés
eux-mêmes. En effet, la commune de Chamonix, le plateau du Vercors et le
massif de Belledonne donnent à voir et à comprendre le sens et la
forme d'une sorte de « quête de maîtrise » de
la problématique foncière. L'approche est donc plus
« pratique » : quels objectifs sont poursuivis, quels
outils sont utilisés, quelles compétences sont mobilisées,
auprès de qui, et quels leviers d'intervention sont actionnés,
quelles thématiques sont mises à contribution... Ce sont à
ces nombreuses questions que le travail de terrain a taché de
répondre. En somme, tout l'enjeu a été d'identifier quel
était le « problème foncier » que chaque
territoire formule, et surtout comment les acteurs locaux ont travaillé
à essayer de le résoudre localement (et continuent de le faire).
Enfin, la prise de recul a permis de mieux voir ce que l'on pouvait en retirer
plus globalement afin de diffuser ces pratiques intéressantes en
matière de politique volontariste du foncier sur le territoire des Alpes
du Nord.
Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes du Nord,
deux cadres normatifs face au foncier alpin
1. Quels discours sur le foncier alpin ?
Le regard porte ici sur un périmètre
limité et précis de l'espace alpin, les Alpes du Nord, qui est
soumis à de multiples cadres normatifs. Deux cadres ont
été choisis pour cette étude : la Convention alpine
et ses protocoles qui s'appliquent à tout l'arc alpin, et le projet de
Directive Territoriale d'Aménagement (DTA) des Alpes du Nord dont le
périmètre d'application nous sert de périmètre
d'études. A travers ces deux textes, l'objectif est d'extraire un
discours, a priori univoque, en matière de foncier : ces
constatations et ces recommandations peuvent constituer un cadre de
référence pour des acteurs tels que la CIPRA France.
1.1. Convention Alpine,
protocoles d`application : quid du foncier ?
Un ouvrage de référence, La Convention
Alpine, Un nouveau droit pour la montagne ? 119(*), permet de faire le point
sur la Convention alpine, sur sa portée juridique en tant que
traité de droit international mais également sur sa portée
plus opérationnelle pour les politiques d'aménagement et de
développement du territoire alpin français. Il ne s'agit donc pas
ici de revenir sur son caractère faiblement astreignant, « ces
"normes molles" courantes dans le droit international »120(*) ni sur la présidence
française de la Convention alpine (2007-2009) considérée
par certains comme un échec car elle aurait pu relancer plus fortement
la visibilité de la Convention alpine en France121(*).
Toutefois, il est important de rappeler que la Convention
alpine est le seul instrument juridique existant au niveau international pour
le développement durable de l'espace alpin. Son approche globale
intégrant les dimensions écologique, économique et sociale
permet de prendre en compte l'interconnexion de l'espace alpin avec les espaces
voisins. Au sein de ce dispositif, CIPRA occupe une place d'observateur
officiel et est souvent considéré comme l'un des
« metteurs en oeuvre » majeur du texte.
Pour notre part, l'objectif est de poser la question du
foncier à la Convention alpine ainsi qu'à ces huit protocoles
d'application. Que disent-ils au sujet de la gestion de l'espace, de l'usage du
sol alpin ? Pourrait-on produire une forme de protocole foncier en
rassemblant les éléments distillés dans ces textes ?
Afin de répondre à ces interrogations, la Convention alpine et
ses huit protocoles ont été décortiqués en
s'arrêtant sur chaque phrase (ou bout de phrase) qui pouvait nous parler
de foncier, de manière plus ou moins directe.
Par exemple, dans l'article 2 de la Convention alpine,
alinéa i, il est écrit qu'en matière de tourisme et de
loisirs, les Etats s'engagent à prendre des mesure appropriées
« notamment par la délimitation de zones
déclarées non aménageables» ; on
considère que cette indication de la Convention alpine concerne la
question foncière très directement car elle incite à un
règlement d'urbanisme qui restreigne la constructibilité de
certains espaces. En revanche, l'article 1er du protocole
aménagement du territoire et développement durable est moins
explicite et indique l'objectif suivant : « harmoniser
l'utilisation de l'espace avec les objectifs et les exigences
écologiques ». Sous l'angle du foncier, on peut comprendre
qu'il faille prendre en compte le multi-usage de l'espace dans le respect des
équilibres environnementaux.
Par la redondance des formulations de certaines idées
concernant la gestion de l'espace alpin, dix « mesures »
extraites de la Convention alpine et de ses huit protocoles d'application ont
été retenues ; elles pourraient permettre de structurer la
rédaction d'un « protocole foncier » pour autant que
cela puisse être envisagée, et même envisageable ! Ces
dix mesures posent les jalons d'un discours en faveur d'une gestion du foncier
qui intègre les principes du développement durable des Alpes.
10 mesures pour construire une gestion foncière
au sens de la Convention alpine
|
1. Utilisation économe et rationnelle de l'espace
|
2. Imperméabilisation limitée des sols et
réversibilité potentielle de l'artificialisation
|
3. Préservation (voir rétablissement) d'espaces
naturels et agricoles
|
4. Délimitation (zonage) et contractualisation de
l'usage des sols
|
5. Densité maîtrisée et densification
urbaine
|
6. Vision prospective, réservation de terrains pour
usages futurs
|
7. Equilibre (économique et social) des territoires et
des populations
|
8. Insertion paysagère et faible impact (qualitatif et
quantitatif) du bâti sur les ressources
|
9. Régulation des prix (mesures financières et
fiscales)
|
10. Observation et veille des espaces naturels et ruraux
|
Figure 18. 10 mesures pour
construire une gestion foncière au sens de la Convention alpine, N.
Moyon 2010
Ce travail permet de montrer que lorsque l'on parle
d'agriculture de montagne, de forêt, de transport ou encore
d'énergie dans un territoire donné, on ne peut ne pas parler de
manière plus ou moins directe de foncier. Bien sur, la nature et le
statut même de la Convention alpine, un traité de droit
international, ne permet pas d'énoncer des règles
opérationnelles, y compris en matière de gestion économe
de l'espace alpin. Comme l'indique Philippe Yolka, il revient au
législateur et au gouvernement de durcir ce droit pâteux, d'en
opérer la catalyse pour passer du « proclamatoire »
à « l'opératoire »122(*). C'est en ce sens que nous
faisons le lien direct avec le projet de Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord.
1.2. DTA des Alpes du Nord et
foncier
« Les Directives territoriales d'aménagement
(définies à l'article L 111-1-1 du Code de l'urbanisme) sont des
documents d'urbanisme élaborés sous la responsabilité de
l'État en association avec les collectivités territoriales et les
groupements de communes compétentes en matière
d'aménagement. Elles sont approuvées par décret en Conseil
d'État. Ciblées en fonction de grands objectifs
sélectionnés pour leur enjeu, elles ne traitent que des questions
pour lesquelles les outils de droit commun sont insuffisants. Leurs
orientations prescriptives encadrent les documents d'urbanisme de rang
inférieur qui doivent leur être compatibles »123(*).
Les enjeux sur lesquels se focalise la DTA des Alpes du Nord
s'inscrivent sur une échelle prospective de long terme (20-25 ans), plus
lointaine que celle des Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT)
et Plans Locaux d'Urbanisme (PLU). L'échelle de réflexion
élargie ainsi que le vaste périmètre retenu pour cette DTA
permet d'aborder les problématiques posées dans leur
globalité, y compris la problématique foncière.
Mentionnée une douzaine de fois dans la version finale de la DTA des
Alpes du Nord124(*), on
peut dire sans crainte que les principes de la Convention alpine ont
inspiré le contenu de ce document de planification française
alpine. L'hypothèse d'un discours univoque au sujet du foncier entre la
Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord semble donc se confirmer.
La DTA des Alpes du Nord est organisée en quatre
chapitres :
ü Le premier chapitre est un diagnostic du territoire des
Alpes du Nord : il s'agit de l'actualisation du Livre Blanc de
2005125(*) (40p.)
ü Le second chapitre reprend les objectifs retenus par le
Livre Blanc (8p.)
ü Le chapitre 3 énonce les orientations
prescriptives de la DTA (qui devait alors être opposable) (33p. + 1
annexe)
ü Le dernier chapitre définit les mesures
d'accompagnement et les recommandations (5p.)
Pour saisir le « discours foncier » de
cette DTA, trois versions ont été analysées : le
projet au 15 juin 2009, puis le projet de novembre 2009 soumis à la
consultation des personnes publiques associées et à enquête
publique, et enfin la version finale de la DTA de Juillet 2010 après que
l'avis de la commission d'enquête publique ait été rendu le
9 juillet dernier. La même méthodologie que celle de l'analyse de
la Convention alpine a été appliquée au premier document,
celui de Juin 2009. Seuls les éléments concernant le foncier ont
ensuite fait l'objet d'une comparaison entre versions.
Trois ressources se sont constituées à l'issue
de ce travail :
ü Tableau 1 : il s'agit d'une liste exhaustive des
éléments évoqués ou développés au
sujet du foncier alpin. Ils permettent de cerner l'objet foncier, ses enjeux et
les connexions qui sont faites avec d'autres thématiques de la
planification territoriale (le logement ou la gouvernance par exemple), ceci
à travers le discours saisi dans la DTA.
ü Tableau 2 : deux colonnes opposent d'une part le
constat alarmant dressé par la DTA à, d'autre part, une vision
promue pour le foncier des Alpes du Nord.
ü Schéma 3 : on s'intéresse à
l'évolution récente de « l'ambition
foncière » du projet de DTA des Alpes du Nord de Juin 2009
à Juillet 2010. Il s'agit de voir si les mesures envisagées par
la DTA en matière de foncier sont plus ou moins ambitieuses au regard du
contenu initial du projet. L'ambition dont il est question est celle
énoncée officiellement par l'Etat :
« définir une stratégie cohérente et
volontaire » et « faire le choix du développement
durable pour les Alpes du Nord »126(*).
1.2.1. L'objet foncier
selon la DTA : un support, un corollaire, un levier
Figure 19. Cerner l'objet
foncier et ses enjeux à travers l'analyse de la DTA des Alpes du Nord,
N. Moyon 2010
Les éléments de l'objet foncier à
travers la DTA Alpes du Nord
|
o Imperméabilisation, atteintes qualitatives des sols,
menace des risques naturels
|
o Atteintes quantitatives des sols, consommation des espaces
naturels et agricoles
|
o Irréversibilité des impacts de
l'artificialisation
|
o En altitude et sur les versants : particularismes du
foncier en station, enfrichement/reboisement des alpages
|
o En vallée : urbanisation,
résidentialisation et infrastructures
|
o Polarisation urbaine, centralité urbaine
|
o Renouvellement urbain, densification, y compris dans les
stations de ski
|
o Lien transport-urbanisme : densification autour des
axes desservis en transport en commun
|
o Problème du logement : social, permanent,
saisonnier
|
o Maîtrise des prix du foncier,
ségrégation socio-spatiale : évincement des
populations locales, des natifs, concurrence avec les résidences
secondaires et les frontaliers à haut pouvoir d'achat
|
o Rôle des pouvoirs publics : prospective,
planification, dans les métropoles et les stations
|
o Gouvernance, subsidiarité, échelles
d'intervention sur le foncier
|
o Question paysagère : destruction,
uniformisation, fermeture des paysages, perte d'identité et du
patrimoine culturel
o Intégration paysagère, question de
l'implantation du bâti
|
o Préservation des espaces naturels et agricoles
existants
|
o Coupures d'urbanisation, continuum urbain les long des
infrastructures et des grands lacs alpins
|
o Connectivité écologique, trame verte et bleue,
espaces de proximité, espaces ordinaires
|
o Dualisme aménagement versus foncier, liens
ville-montagne
|
o Concurrence entre usages, conflits fonciers
|
o Arbitrage, médiation, compensation
|
Figure 20. Constat et
orientations en matière de foncier selon la DTA Alpes du Nord, N. Moyon
2010
« Un constat alarmant »
|
« Ce qu'il est nécessaire de
faire »
|
o Imperméabilisation des sols,
irréversibilité des impacts (quantitatifs et qualitatifs)
|
o Préserver l'existant : ce qu'il reste d'espaces
agricoles et naturels
|
o Risques naturels accrus
|
o Opérer des choix d'implantation pour les constructions
nouvelles
|
o Mitage de l'espace, résidentialisation
|
o Lier transport et urbanisme pour la densification urbaine
|
o Uniformisation des paysages
|
o Organiser les polarités urbaines en maintenant ou
créant des coupures urbaines
|
o Continuum urbain le long des infrastructures et autour des
grands lacs
|
o Considérer la connectivité écologique et
les espaces de proximité
|
o Concurrence entre usages
|
o Mettre en place une gouvernance qui s'appuie sur une vision
prospective et une planification territoriale
|
o Pression foncière, ségrégation
socio-spatiale
|
o Favoriser la médiation pour résoudre les conflits
fonciers et assurer la pluriactivité du territoire
|
o Problème du logement : permanent, social,
touristique, secondaire
|
o Densifier, réhabiliter, renouveler la ville sur la ville
et la station sur la station
|
o Déprise agricole : perte patrimoniale, identitaire,
impact sur la biodiversité, sur les structures sociales
|
o Insérer les projets d'aménagement dans le
paysage
|
|
o Construire ou renforcer les liens ville-montagne,
vallée-versant
|
Cette analyse du discours de la DTA des Alpes du Nord sur le
foncier alpin propose une lecture de l'objet foncier suivant trois
dimensions : « le foncier-support », « le
foncier-corollaire » et « le foncier-levier ».
Tout d'abord, la DTA met l'accent sur l'artificialisation
croissante des sols, la diffusion de l'urbanisation et la mise en danger des
espaces naturels, ruraux ou agricoles. On évoque le foncier plutôt
de manière indirecte, il est toutefois fortement induit par le
diagnostic dressé. En ce sens, le foncier est le support de ces
phénomènes territoriaux qui « mettent en
péril » cet espace alpin au sens de la DTA Alpes du Nord.
Ensuite, cette consommation d'espace pour l'urbanisation ou
les infrastructures a déjà des conséquences sur les
populations et les territoires : ségrégation socio-spatiale,
mitage de l'espace, accroissement des risques naturels et de l'exposition des
populations, perte de paysages, de biodiversité, exacerbation des
problèmes de logement... Le foncier est ici marqué par les effets
pervers d'un mode d'aménagement et de développement territorial
que la DTA des Alpes du Nord souhaite revoir en fixant un nouveau cadre de
planification. Le foncier est donc un objet empreint des
conséquences de pratiques antérieures de
l'aménagement, il en est le corollaire. Ainsi, il n'est pas une
donnée de départ puisqu'il n'est pas une question posée au
territoire (au même titre que la polarisation urbaine par exemple), mais
le foncier est de facto un problème qui se pose au
territoire.
Enfin, les conflits fonciers et les problèmes du
logement imposent aux pouvoirs publics de considérer le foncier comme un
point de blocage de l'action publique. Le foncier existe en soi et peut
donc être le levier des politiques publiques qui daignent l'examiner
comme une donnée de départ. L'objet foncier peut
même constituée le support de sa propre politique publique, «
une politique foncière publique volontariste et pérenne »
que la DTA des Alpes du Nord recommande127(*).
1.2.2.
« L'ambition foncière » de la DTA des Alpes du
Nord
Figure 21. Evolution de
« l'ambition foncière » de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 -
Juillet 2010), N. Moyon 2010
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo14.png)
Les résultats de l'analyse de ce que l'on a
appelé ici « l'ambition foncière de la DTA Alpes du
Nord » à travers ce schéma peuvent surprendre128(*). En effet, il a
été « admis » maintes fois que la DTA avait
été « vidée de sa substance » au cours
de son élaboration, ou encore, que sa volonté d'inscrire la
planification du territoire alpin dans une démarche de
développement durable avait été « revue à
la baisse » (notamment sur les sujets les plus
polémiques : tourisme et infrastructures). En somme, les
éléments réduisant son ambition de départ auraient
dû être prépondérants et ce n'est pas ce qui apparait
dans le schéma ci-dessus. Il est donc important de rappeler deux
caractéristiques fondamentales de notre analyse :
1. L'ambition « mesurée » concerne
uniquement la thématique foncière entendue au sens
large, dans un souci de rationalisation de l'usage des sols.
2. L'analyse porte sur une période extrêmement
courte : de juin 2009 à juillet 2010, soit 13 mois pour un document
dont les négociations ont débuté en 1996, il y a 14
ans !
Ce qui est donc admis au sujet de la DTA Alpes du Nord n'est
pas remis en cause. Cela suggère plutôt que les plus
grosses « pertes d'ambition » du document se sont
déroulées avant la période étudiée
ci-dessus. Le compte-rendu du Comité technique des grandes
collectivités du 26 février 2009 vient corroborer cette
hypothèse (il y aurait probablement de nombreux autres documents
similaires à trouver dans les archives de la DTA)129(*). Il indique qu'il est
proposé « un assouplissement des prescriptions très
strictes pour les grandes stations » à laquelle est
répondue qu'une « réécriture va être
étudiée, qui précisera les règles de construction
dans l'enveloppe bâtie de la station ». Finalement, c'est une
mesure prescriptive indiquant l'interdiction de consommer des espaces naturels
supplémentaires dans les pôles touristiques qui disparait avant la
version de juin 2009.
De même en matière de transport, « il
est précisé que le document remis en séance contient une
erreur à la page 38 : le paragraphe débutant par "Ces principes
s'appliquent aux projets routiers suivants" doit être supprimé,
ces projets n'étant plus explicitement cités dans la
DTA ». Cela nous indique qu'avant février 2009, et donc avant
la version de juin 2009, un degré de détail sur l'application de
ces principes a été supprimé. Depuis 1996, ce type de
modification -pour des raisons diverses- ont dû impacter le degré
d'ambition que l'on cherche à regarder aujourd'hui au sujet du
foncier.
Toutefois, les limites induites par la deuxième
caractéristique permettent de préciser l'intérêt de
cette analyse récente de l'ambition foncière de la DTA Alpes du
Nord. Ce que montre ce schéma est justement très
révélateur de ce qui se joue à travers cette DTA :
contrairement à ce que l'on aurait présumé, les indices
d'une plus grande ambition foncière l'emportent sur les suppressions
d'éléments ambitieux (sept contre quatre) ; en
définitive, la balance penche vers une plus grande ambition
foncière. A cet instant, il ne s'agit pas de se tromper
d'interprétation, l'hypothèse soutenue est la suivante.
L'ambition foncière s'est vue renforcée grâce à deux
facteurs explicatifs :
1. La montée en charge du foncier dans les
mentalités, chez les élus, au sein de la société
civile, et donc dans les politiques publiques locales (tous les échelons
territoriaux s'en sont saisi, y compris la région
Rhône-Alpes) ; ce facteur n'est pas spécifique à la
DTA des Alpes du Nord mais il l'impacte nécessairement.
2. La forte mobilisation des « pro-DTA »
durant les derniers mois de l'élaboration du projet s'est traduite par
de nombreuses contributions, en amont et aussi lors de la phase d'enquête
publique. Cette mobilisation s'est renforcée au regard des menaces
incarnées par le projet de Loi Grenelle II sur le caractère
opposable des DTA en cours d'élaboration.
La DTA des Alpes du Nord s'est donc globalement
« enrichi » de précisions en matière de
foncier durant ces treize derniers mois, quantitativement au moins. Car en
réalité, les « anti-DTA » ne se sont pas
désintéressés du sujet, ils jouaient leurs cartes sur une
autre scène de négociation : la scène politique et
médiatique. Deux suppressions sont assez emblématiques de cette
stratégie pour le sujet, de loin, le plus polémique : le
tourisme.
Plus « qualitativement », l'ambition
foncière de la DTA des Alpes du Nord résidait dans des positions
jusqu'alors inédite : d'une part, dire que dorénavant, le
développement touristique devrait se faire sur le patrimoine existant
dans « les paysages et ensembles bâtis les plus
remarquables », et d'autre part, imposer explicitement l'interdiction
d'une consommation supplémentaire d'espaces naturels dans les
pôles touristiques (« les grandes stations » dans la
version de juin 2009). C'est plutôt dans le poids de ces deux mesures,
qui étaient alors prescriptives, que résidait l'ambition de la
DTA alpine ; sur le plan symbolique, leur suppression est plus
forte que l'ajout d'autres mesures « de moindre
envergure ».
1.3. Grille d'analyse (A)
« Cadres normatifs et foncier »
Comme cela a été détaillé en
Partie I du mémoire, l'objectif de la grille d'analyse est de pouvoir
confronter le cadre normatif à la pratique sur le territoire des Alpes
du Nord. La grille d'analyse suivante correspond donc au « discours
foncier » produit par la Convention Alpine, ses protocoles
d'application et la DTA des Alpes du Nord130(*). Cette grille est un tableau à double
entrée : les colonnes correspondent à des leviers
d'intervention possibles pour agir sur le foncier, et les lignes sont les
différentes thématiques en lien plus ou moins direct avec la
question foncière ou la gestion de l'espace. Par exemple pour les
leviers, la « préservation » est plutôt un
levier dogmatique, idéologique. A l'inverse, le levier « choix
d'urbanisation » correspond à la réflexion que l'on
peut mener pour implanter le bâti sur une parcelle, à la limite de
propriété pour économiser un maximum d'espace ou pour
permettre une division foncière éventuelle par exemple. La grille
d'analyse (A) est accompagnée d'un tableau qui permet de
détailler les cases cochées de la grille : en effet,
intégrer le texte à cette grille n'aurait pas été
lisible. Ces deux documents suivent l'analyse ci-dessous.
Cette première grille d'analyse (A) du discours foncier
des cadres normatifs est complétée à 50% (36 mesures sur
les 72 potentielles). Si ce premier constat semble difficile à
interpréter, on constate toutefois que certains leviers (colonnes) ou
certains thèmes (lignes) sont plus sollicités que d'autres.
Ainsi, le discours foncier produit par les deux cadres normatifs
étudiés se caractérise de la façon
suivante :
Par des leviers d'intervention
privilégiés :
ü La préservation, un mot d'ordre qui semble
être bien intégré au discours sur le foncier.
ü La polarisation urbaine, pour structurer et
hiérarchiser les Alpes du Nord, surtout le long du Sillon alpin.
ü La gouvernance, montre la nécessité de
coordonner les multiples acteurs de la question foncière, à
différentes échelles territoriales (la gouvernance
privilégiant cette de l'intercommunalité ou du basin de vie).
ü La densification, est devenu un mot d'ordre pour
rationnaliser l'utilisation de foncier et économiser le foncier naturel
et agricole.
Par des thématiques d'action
identifiées :
ü Le paysage et le cadre de vie sont deux dimensions
assez larges qui permettent de mobiliser potentiellement presque tous les
leviers d'intervention sur le foncier.
ü L'étalement de l'urbanisation, en ville comme en
station de montagne, est un phénomène à rationnaliser par
une maîtrise accrue du foncier.
ü L'agriculture, sa préservation et son rôle
dans la structuration de l'espace par exemple montre la nécessité
d'intégrer cet enjeu aux questions de développement urbain et
métropolitain.
En revanche, les deux cadres normatifs ne proposent peu -voire
pas- de mesures dans les domaines suivants : les leviers
« participation », « solidarité
territoriale » et « transport-urbanisme » sont
très faiblement actionnés par leur discours foncier, de
même que le thème de la ségrégation socio-spatiale
n'est pas mis en lien avec un levier précis d'intervention
foncière, il reste encore dans le champ des discours politiques et n'est
pas -ou faiblement- entré dans le champ de l'opérationnel.
Grille d'Analyse (A)
« Cadres normatifs et
foncier »
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo15.png)
Figure 22. Grille d'analyse
(A) "Cadres normatifs et foncier", N. Moyon 2010
Détail de la Grille d'analyse (A)
« Cadres normatifs et
foncier »
|
A. Préservation
1. Limiter le développement de l'urbanisation en
fonction des capacités d'alimentation en eau potable et
d'assainissement.
2. La préservation de l'urbanisation à
l'égard de ce risque d'inondation revêt une importance
stratégique vis-à-vis de l'adaptation du territoire aux effets du
changement climatique.
4. Pour l'ensemble des espaces urbanisés ou non, les
documents d'urbanisme protégeront la qualité et les conditions de
perception des paysages (préservation des points de vue et cônes
de vue significatifs).
5. Limiter l'extension de l'urbanisation en front de lac.
8. Le principe général de préservation de
terres agricoles en vallée devra être respecté.
|
B. Choix d'urbanisation
1. Réduire les atteintes d'ordre quantitatif et
qualitatif causées aux sols, notamment en limitant
l'imperméabilisation des sols.
2. Aucun permis de construire ne doit être
accordé dans les zones instables.
4. Privilégier des modes de réalisation de
logement qui permettent de contribuer à la qualité des paysages
(qualité architecturale).
8. Les pôles complémentaires se situent dans les
vallées fragilisées par une urbanisation en continu le long des
infrastructures de transport notamment, qui menace les espaces agricoles et
ruraux.
|
C. Polarisation urbaine
1. Les espaces de nature jugés ordinaires (cours d'eau,
des zones humides, des espaces boisés, des espaces non bâtis de
fond de vallée) assurent des fonctions de continuités naturelles
et de mise en communication avec d'autres espaces.
3. Les pôles locaux doivent être confortés
afin de jouer un rôle de polarisation du développement par rapport
aux autres villages, et constituer une alternative à la dispersion
urbaine.
4. Pour enrayer la déstructuration des territoires et
les atteintes aux milieux naturels et au paysage, la croissance sera
organisée de façon polarisée.
5. Les pôles complémentaires s'appuient souvent
sur plusieurs entités urbaines distinctes dont il convient de
maîtriser la croissance afin d'éviter le développement d'un
continuum urbain.
8. Les coupures d'urbanisation contribuent à conforter
les terres agricoles et massifs boisés, et à maintenir les
continuités biologiques.
|
D. Participation
4. Agir dans un cadre concerté en conciliant les
objectifs de préservation des espaces naturels et les mesures de
développement touristique, dans une optique de «
développement durable ».
8. Agir dans un cadre concerté et associer les acteurs
représentatifs des différentes dimensions de la gestion des
espaces : collectivités, aménageurs, gestionnaires touristiques,
exploitants agricoles et forestiers, administrations, gestionnaires d'espaces
protégés, associations.
|
E. Solidarité territoriale
4. Les collectivités ont un intérêt
à adopter des stratégies communes autour des
problématiques qui les préoccupent, dont la préservation
des paysages, des sites naturels, par la gestion de manière
contractuelle d'un patrimoine naturel, rural et culturel...
7. Outre l'exigence de solidarité, le droit au logement
est aussi un enjeu d'une part, d'aménagement du territoire et de
développement durable et, d'autre part, de développement
économique.
8. Des structures de coopération entre espaces urbains
et milieux ruraux sont nécessaires et doivent se développer
autour de projets communs appuyés sur la complémentarité
de ces espaces, en matière de valorisation agricole notamment.
|
F. Gouvernance
2. Dans les Chartes des parcs naturels régionaux et
nationaux qui constituent le coeur d'un projet de territoire, l'ambition d'un
développement durable pourrait être renforcée en minimisant
les risques.
3. Cette échelle plus large vise à limiter le
"grignotage" des espaces naturels sensibles par la réalisation d'une
succession de projets ponctuels.
4. La gestion de l'espace et la maîtrise foncière
par l'accompagnement des actions entreprises par les EPFL, en articulation avec
celle des SAFER sur les espaces agricoles, et celles du conservatoire du
Littoral ou des conservatoires des espaces naturels.
5. Effectuer un arbitrage fort entre la part et le type de
développement à orienter dans les villes et la part à
orienter en périphérie.
7. Ces politiques locales de l'habitat et du foncier sont
très étroitement liées, elles ne pourront être mises
en oeuvre que grâce à une forte mobilisation et une
coopération de tous les acteurs de l'aménagement et du
logement.
|
G. Prospective
1. Favoriser une vision prospective et concertée de la
valorisation de ces espaces naturels qui sont espaces de projets, eux aussi.
4. Les Parcs doivent conforter leur caractère
exemplaire et innovant en matière de développement durable et
gérer la pression urbaine en évitant qu'elle ne banalise leurs
paysages.
7. Pour atteindre les objectifs fixés pour le logement,
cela nécessite une politique foncière anticipative conciliant le
double impératif de gestion de l'espace et de régulation des
tensions.
8. La vocation agricole de certains secteurs doit être
affichée dans les documents de planification.
|
H. Densification
1.2. Pour limiter les impacts des domaines
skiables sur les espaces naturels et les paysages, les restructurations de ces
domaines se feront à l'intérieur de l'enveloppe existante du
domaine skiable : elles devront contribuer à améliorer la
qualité de l'offre et la sécurité, sans incidence notable
sur les milieux naturels, les paysages et la ressource en eau.
3.4.5. Concernant les paysages, la maîtrise et la
réduction des impacts de l'urbanisation et des équipements de
toutes natures supposent le renforcement des bourgs-centres plutôt que
l'extension urbaine et périurbaine, et l'inscription des installations
nouvelles dans les périmètres déjà
urbanisés.
6. Dans les pôles urbains majeurs, l'objectif de
constructions de logements susceptibles de répondre aux nouveaux besoins
doit être atteint, il comportera 25% de logements sociaux au moins.
7. Privilégier des modes de réalisation de
logement qui permettent d'économiser l'espace: formes d'habitat
économe d'espace, renouvellement urbain dans les
agglomérations.
|
I. Transport-Urbanisme
3. En dehors des parties
agglomérées des pôles urbains majeurs et
complémentaires, les créations de nouveaux diffuseurs ne sont pas
autorisées par l'Etat sauf exception.
5. Les extensions urbaines qui s'avéreraient
nécessaires doivent se réaliser autour de l'offre de transports
collectifs existante ou à développer.
|
Figure 23. Détail
de la grille d'analyse (A), N. Moyon 2010
2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du combattant
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo16.png)
2.1. 14 années de
procédure : rapide retour historique
Le 4 février 1995, la Loi d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire (LOADT, dite
« Loi Pasqua ») instaure un nouvel instrument juridique
d'aménagement du territoire, les directives territoriales
d'aménagement, définies à l'article L 111-1-1 du Code de
l'urbanisme. L'année suivante, cinq territoires expérimentaux
sont retenus pour la mise en place de ce nouvel outil de planification
étatique, une courte étude préalable est lancée,
toutefois, le périmètre définitif de la DTA des Alpes du
Nord ne sera institué qu'en mai 2000.
www.dta-alpesdunord.fr
Plusieurs étapes se succédent durant ces
quatorze années, la DTA Alpes du Nord traversant des passages à
vide, mais les services régionaux de l'Etat persévèrent
puisque « dans un contexte de morcellement institutionnel et
d'émiettement des compétences, il appartient à l'Etat et
aux collectivités de définir une stratégie
cohérente et volontariste pour assurer un développement durable
du territoire des Alpes du Nord » 131(*).
Le 18 décembre 2003, le CIADT132(*) décide de
l'élaboration d'un Livre Blanc. Ce Livre Blanc des Alpes du Nord
élaboré par la DRE Rhône-Alpes est soumis à la
consultation des collectivités locales et autres personnes publiques
associées (PPA) en 2005, il constitue la base de la DTA (chapitre 1 et
2) et élabore le diagnostic territorial ainsi que les six orientations
retenues133(*) :
ü Organiser la métropole du sillon alpin dans un
système multipolaire,
ü Garantir le droit au logement, par une offre
diversifiée et accessible à tous,
ü Préserver un système d'espaces naturels
et ruraux et les ressources naturelles et patrimoniales,
ü Organiser la poursuite du développement
économique, en s'appuyant notamment sur les pôles de
compétitivité,
ü Pérenniser le potentiel touristique,
ü Garantir un système de transport durable pour
les liaisons internes et internationales.
Le CIACT134(*) du 6 mars 2006 approuve le Livre Blanc des Alpes du
Nord et donne mandat au préfet de région de poursuivre
l'élaboration de la DTA. La DRE Rhône-Alpes continue son travail
de rédaction avec l'assistance des DDE concernées, et en
parallèle, une évaluation stratégique environnementale
(ESE) est réalisée par un cabinet privé. Cette
évaluation est conçue dans une logique de démarche
itérative, qui permet de faire évoluer le projet de DTA au fur et
à mesure des analyses, en privilégiant les orientations les plus
respectueuses de l'environnement. Sauf que l'évaluation a
été lancée fin 2008 et a débutée en
février 2009, alors même que le Livre Blanc et les orientations
(chapitre 3 de la DTA) étaient déjà pour l'un
validé, pour les autres en rédaction avancée. De fait, ce
calendrier décalé a limité les possibilités
d'itération en cours de rédaction de la DTA des Alpes du Nord
135(*). La version
finale de ce rapport environnemental de la DTA est rendue le 5 octobre 2009.
Tardivement donc, des informations très intéressantes, notamment
au sujet des « difficultés d'accès à
l'information » sont livrées, notamment sur le thème
qui nous préoccupe, l'occupation des sols136(*).
2008-2009 seront deux années charnières dans
lesquelles la DTA des Alpes du Nord entre dans la dernière ligne droite.
Un calendrier serré enchaîne phase de concertation, comité
de pilotage, puis phase de consultation137(*).
Phase de concertation Réunions des
personnes publiques associées, Réunions techniques avec les
grandes collectivités, Réunions territoriales d'information
|
Octobre 2008 - Avril 2009
|
Comité de pilotage Bilan de la
concertation, présentation du projet de DTA et de l'évaluation
stratégique environnementale
|
28 Avril 2009
|
Phase de consultation Saisine des PPA,
consultation des Etats voisins et des régions voisines
|
15 Novembre 2009 - 15 Février 2010
|
Enquête publique
|
9 Avril - 21 Mai 2010
|
Phase d'approbation Validation et signature
du décret de la DTA en Conseil d'État
|
Juin - Novembre 2010
|
En un peu plus d'un an et demi, le projet de DTA doit
être modifié pour tenir compte de toutes ces contributions, dont
le rapport environnemental138(*), l'avis de l'Autorité
Environnementale139(*)
et les travaux de la commission d'enquête publique. Ainsi, les questions
de calendrier ont caractérisé l'élaboration de la DTA
Alpes du Nord, longue et laborieuse ; mais peut-être est-ce le
destin de ce type de document étatique réalisé à
une échelle inédite.
2.2. Enquête publique et
Grenelle II : le combat de l'opposabilité
La phase d'enquête publique s'est déroulée
du 9 avril au 21 mai 2010 au sein du périmètre de la DTA et la
commission d'enquête publique a rendu son rapport complet et
« ses conclusions personnelles et motivées » (soit
deux documents140(*)) le
9 juillet dernier. La lecture du rapport complet est vivement
recommandée pour saisir avec précision le jeu d'acteurs qui s'est
mis en place autour de cette DTA alpine puisque ce document organisé en
six chapitres expose :
1. Les généralités du projet de DTA des
Alpes du Nord
2. La réalisation pratique de l'enquête
publique
3. Les avis émis par les personnes publiques lors de la
concertation, commentés par la Commission
4. Les observations du public déposées dans les
registres, commentées par la Commission
5. Les demandes de la Commission et les réponses
apportées par le SGAR141(*)
6. L'analyse et l'évaluation du projet par la
Commission
Parallèlement à cette démarche, le projet
de loi portant engagement national pour l'environnement dit
« Grenelle II », adopté par le Sénat en
première lecture le 8 octobre 2009142(*), est discuté à l'Assemblée
Nationale du 4 au 11 mai 2010. Le projet de Loi Grenelle II est donc
adopté par l'Assemblée et, dans le même coup, il vient de
modifier la portée juridique de la DTA des Alpes du Nord en pleine phase
d'enquête publique.
En effet, la Loi Grenelle II prévoit, article
13143(*), la mise en
place de « Directive territoriale d'aménagement et de
développement durables » qui remplace les actuelles
« Directives territoriales d'aménagement ». Les
nouvelles dispositions des « DTADD » changent, entre autre,
la portée juridique du document qui perd son opposabilité.
Toutefois, une disposition proposée au Sénat par M.
Repentin144(*)(sénateur savoyard, groupe socialiste), avait
précisé que les procédures de DTA en cours (celle des
Alpes du Nord étant la seule) gardaient l'ancien régime des DTA,
donc opposable.
Ce qui s'est joué la nuit du mercredi 5 au jeudi 6 mai
à l'Assemblée Nationale a fait basculer la DTA des Alpes du Nord
en « DTADD ». L'amendement « n°208
rectifié » déposé par le député
Michel Bouvard145(*)
revient précisément sur la « disposition
Repentin » mais c'est finalement celui d'Yves Cochet
(député Vert, Paris) qui a déjà enterré
l'opposabilité de la DTA Alpes du Nord. L'amendement d'Yves Cochet
« est déjà satisfait par l'alinéa 16 de
l'article 5 qui précise que : « Si leur adoption
intervient après la publication de la présente loi, elles [les
DTA] sont soumises aux dispositions applicables aux directives territoriales
d'aménagement et de développement durable »146(*). L'amendement de Michel
Bouvard est donc retiré sous la garantit d'un calendrier favorable
à l'adoption d'une « DTADD des Alpes du Nord » non
opposable.
Alors que les élus locaux « Vert et
Gauche » ont défendus l'opposabilité du document aux
côtés des associations de protection de l'environnement, leurs
parlementaires s'y sont opposés, se rangeant aux côtés des
avis des élus savoyards et haut-savoyards,
« anti-DTA » de première heure. Presque plus
personne donc pour défendre le maintien d'une DTA des Alpes du Nord
opposable. En somme, tout s'est réduit à des questions de
calendrier, comme l'illustre ci-contre l'extrait du compte-rendu des
débats de l'Assemblée à ce sujet147(*).
L'opposabilité de la DTA Alpes du Nord, une
question de calendrier
|
Compte rendu intégral - Deuxième
séance du mercredi 5 mai 2010
Article 5 - Amendement n°208
o M. le président : Nous en
venons donc à l'amendement n° 208 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur Bouvard.
o
M. Michel Bouvard [Savoie, UMP]: Cet amendement
avait été déposé indépendamment de
l'adoption d'un amendement de M. le rapporteur qui est venu
préciser le statut des DTA n'ayant pas été publiées
au moment de la promulgation de la loi. Cela constitue un immense
progrès et je salue à la fois l'initiative du rapporteur et la
position de la commission.
Il n'en reste pas moins qu'un problème risque de se
poser si une DTA en cours d'élaboration se trouvait à être
publiée juste avant la publication de la loi, ce qui peut tenir à
des délais liés, par exemple, à son passage devant le
Conseil constitutionnel.
Cet amendement a pour but d'appeler l'attention de notre
assemblée sur le problème qui se pose dans les zones de
montagne.
Comme dans le reste du territoire, nous sommes
confrontés à la problématique des DTA dans son ensemble.
Les DTA ont été créées avec la loi de 1995
d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire dont Patrick Ollier se souvient bien.
o
M. Christophe Caresche [Gironde,
socialiste]: Depuis, M. Ollier est devenu un
élu de la plaine !
o
M. Patrick Ollier [Hauts-de-Seine, UMP, président
de la commission des affaires économiques]: Mais la montagne est
restée dans mon coeur !
o
M. Michel Bouvard : Quant aux SCOT, ils
ont été créés avec la loi SRU. Il s'agit de
documents opposables qui ont un cadre plus large que les PLU.
Il existe encore les prescriptions particulières de
massif, créées avec la loi de 1985 dite loi montagne.
À ce jour, ces dispositions ne sont pas activées ; mais
elles pourraient l'être.
Ainsi, sur un même territoire, nous pourrions disposer
de quatre documents opposables, ce qui entraînerait de nombreux
contentieux. Un récent décret réformant les unités
touristiques nouvelles a considéré que ces unités ne sont
plus applicables dès lors que le SCOT est suffisamment précis et
contraignant.
Nous attendons qu'il soit clairement indiqué qu'il n'y
a pas lieu d'avoir un nouveau document opposable dans les territoires de
montagne.
o
M. François Brottes [Isère,
socialiste] : Il y en a assez !
o
M. Michel Bouvard : En clair, nous
n'avons pas la totale certitude que la DTA en cours d'élaboration
pourrait être publiée après le vote de la loi.
Si le Gouvernement m'indique que cette DTA n'a aucune chance
d'être publiée avant le vote de la loi, je retirerai l'amendement
n° 208 rectifié. Mais si le doute persistait, je serais
obligé de le maintenir afin que nous ne nous retrouvions pas, sur un
même territoire, avec quatre documents potentiellement opposables.
o
M. Hervé Gaymard [Savoie,
UMP] : Très bien !
o M. le président : Quel est
l'avis de la commission des affaires économiques ?
o
M. Michel Piron, [Maine-et-Loire, UMP,
rapporteur pour avis] : Je me réjouis d'avance de la
réponse du Gouvernement. Comme je ne partage pas les doutes de
M. Bouvard, je prends le pari de la sérénité en
émettant un avis défavorable qui devrait être
confirmé par les certitudes du secrétaire d'État.
o
M. Christophe Caresche : Le
secrétaire d'État peut-il le dire ?
o M. le président : Quel est
l'avis du Gouvernement ?
o M. Benoist Apparu [secrétaire
d'État] : « Oui, monsieur Caresche, je peux le
dire !
Monsieur Bouvard, nous avons déjà eu l'occasion
d'évoquer ensemble de sujet.
Je vous confirme, et c'est inscrit noir sur blanc dans le
texte de loi, que toutes les DTA non approuvées à ce jour mais en
cours d'élaboration deviendront des DTADD. Il se trouve qu'une seule est
en cours d'élaboration, celle qui couvre des zones de montagne, ce qui
n'a, bien sûr, rien à voir avec l'amendement que vous avez
déposé. (Sourires.) Pourquoi ces sourires ?
La DTA en cours d'élaboration dans les Alpes ne
paraîtra évidemment pas avant la publication de ce texte de loi.
Ce sera donc bien une DTADD. À la lumière de cette explication,
je vous propose donc de retirer cet amendement ».
|
Figure 24.
L'opposabilité de la DTA des Alpes du Nord, une question de calendrier,
N. Moyon 2010
La Commission mixte paritaire a examiné le 16 juin les
articles restant en discussion à l'issue du passage devant
l'Assemblée du projet de loi Grenelle II, dont l'article concernant les
DTADD. Le caractère opposable de la DTA des Alpes du Nord n'a finalement
pas résisté aux amendements du projet de Loi Grenelle II ;
celle-ci a été promulguée le 13 juillet 2010148(*).
Cependant, le public qui s'est manifesté dans le cadre
de l'enquête publique, ainsi que la Commission d'enquête publique
elle-même, n'ont pas manqué de commenter cette modification du
statut juridique de l'objet d'enquête : « le public qui
s'est exprimé n'a pas apprécié le vote par les
parlementaires [...]. Pour sa part, la Commission d'enquête
publique estime que l'Etat a eu une attitude assez désinvolte en
modifiant la loi pendant l'enquête
publique »149(*). Le débat parlementaire aurait pu être
différé, ou alors la procédure d'enquête
arrêtée, le projet de DTA des Alpes du Nord étant soumis
à de nouvelles règles. « Que faut-il faire ?
Continuer ou pas l'enquête publique ? Si l'on continue, cela est-il
vraiment utile ? »150(*). Sans consigne à ce sujet, la Commission a
mené l'enquête à son terme.
3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs alpins
Au vue des derniers rebondissements dans l'élaboration
de cette DTA des Alpes du Nord, notre approche du foncier alpin s'est
recentrée sur le rapport au droit et à la norme en
aménagement. Il s'agit de voir en quoi la DTA et la Convention alpine
sont des cadres normatifs dont la nature même rend difficile
l'acceptation (voir l'appropriation) par les territoires qu'ils encadrent.
Comme en témoigne la Commission d'enquête de la DTA,
« l'enquête publique aurait dû constituer un temps fort
dans la préparation finale du projet [...]. Mais la complexité du
dossier, la diversité des thèmes traités et
l'étendue du territoire ont rendu difficile la compréhension du
projet »151(*). C'est une première piste de réponse.
En outre, une différence de mobilisation du public est perceptible, au
moins géographiquement : on comptabilise 160 contributions en
Haute-Savoie, contre 258 en Savoie et 229 en Isère152(*).
3.1. Un objet et un cadre
« difficilement audible »
La Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord produisent un
même discours sur le foncier alpin : la question foncière y
est protéiforme car elle mobilise d'autres thématiques (logement,
tourisme, biodiversité...). En somme, l'objet foncier est
déjà « difficilement audible » en soi, mais
la nature même de ces cadres normatifs, leur statut et leurs
modalités d'élaboration puis d'application, représente un
obstacle supplémentaire à cette
audibilité de l'objet foncier par les acteurs locaux. On peut
supposer que certains acteurs locaux alpins qui se sont vigoureusement
opposés à cette DTA (essentiellement savoyards et
hauts-savoyards, proches des milieux économiques dont celui du ski), se
sont focalisés sur la forme et sur le fond de la démarche -ce que
cela symbolise ou cristallise- plus que sur son contenu, c'est-à-dire le
discours réellement porté par la DTA Alpes du Nord.
Bien sur, le discours porté par un cadre normatif
compte beaucoup mais c'est peut-être le sujet abordé et son
degré d'intelligibilité qui suscite plutôt la
polémique. Dans le cadre des différents protocoles d'application
de la Convention alpine, ce sont ceux concernant le transport et le tourisme
qui ont été les plus durs à négocier et à
faire adopter ; des thématiques polémiques s'il en est, qui
mobilisent notamment de puissants lobbies. Concernant la DTA des Alpes du Nord,
aucune des personnes rencontrées n'a indiqué avoir une
connaissance précise du contenu du document, et peu d'entre elles lui
ont vraiment porté un intérêt, ce qui va dans le sens du
commentaire de France Nature Environnement au sujet du Grenelle II :
« un texte de loi n'a jamais été une baguette
magique »153(*).
De plus, la thématique du « tourisme
durable » indiquée par la DTA apporte un autre
éclairage à cet obstacle supplémentaire qu'induit le cadre
normatif154(*).
L'hypothèse du basculement d'un « paradigme du
développement » vers un « paradigme de la
durabilité » dans les vallées alpines peut permettre
d'expliquer les divergences au sujet de la DTA. Dans le premier paradigme selon
lequel « c'est la station qui fait le territoire », le
cadre normatif vient s'opposer à une logique de station, tandis que pour
le second paradigme où c'est « le territoire qui fait la station
», le cadre normatif tend à incarner cette notion de
durabilité portée par une logique territoriale. Ainsi
l'ANMSM155(*)
s'oppose-t-elle dans sa motion, à toutes les prescriptions du chapitre
de la DTA « Promouvoir un tourisme respectueux de
l'environnement » et regrette que les règles
supplémentaires d'encadrement de l'urbanisation touristique remettent en
cause la libre administration des collectivités locales156(*). La région
Rhône-Alpes quant à elle s'ancre un peu plus dans cette logique
territoriale en soutenant la DTA.
3.2. Une DTA directive
Comme son nom le rappelle, la Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord est une directive, « la DTA est
donc d'abord un document d'affichage des politiques de l'Etat »157(*). Le caractère
directif d'une directive explique une majeure partie des oppositions
rencontrées par la DTA alpine : parfois qualifiée
de « diktat » de l'Etat, la DTA provoque une
réaction urticante auprès d'élus locaux dont l'opposition
quasi-systématique à toutes procédures impulsées
par l'Etat est globalement reconnue. Cette logique est peut-être
exacerbée dans les territoires de montagne. L'existence même d'une
DTA sur un territoire alpin est source de conflits. Dans un
périmètre particulier et précis, elle pointe du doigt les
dysfonctionnements d'un territoire, lui dit qu'il ne respecte pas les
règles du jeu ou même certaines lois (Loi Littoral par exemple),
et de part son échelle la DTA rend audible une gestion
territoriale que l'Etat souhaite encadrer plus qu'ailleurs.
Déjà en 1988, un article de Jacques Manesse
posait la question fatidique, Montagne : qui décide ?158(*). L'auteur relate que sur le
terrain, tout encadrement administratif ou réglementaire est
perçu comme une entrave au développement, voire, de façon
plus idéologique, comme une atteinte à la liberté. Mais
avant les lois de décentralisation, « la bonne foi et la bonne
conscience des "victimes" pouvaient, jusqu'alors, et sans risque, s'exprimer
dans un rituel sans surprise, et politiquement rentable, en
dénonçant le centralisme et la bureaucratie »159(*). Encore aujourd'hui, cette
idéologie du « on ne veut pas que les parisiens nous disent
quoi faire chez nous » dont l'auteur parle perdure dans certaines
vallées alpines, c'est donc plutôt en toute logique que la DTA a
perdu son caractère opposable. Dans le cadre de la mise en oeuvre d'une
autre directive, la Directive « Habitats Faune Flore » dite
« Habitats » ratifiée par la France en 1996,
l'Association nationale des élus de montagne (ANEM) avait
déposé un recours au Conseil d'Etat en 2001 : « en
1998, une centaine de maires avaient déjà contesté cette
limitation de fait de la libre administration de leur
territoire »160(*).
Bien sur, ces oppositions ne sont pas sans paradoxe car l'on
peut considérer que le produit économique alpin d'aujourd'hui, le
ski, est entièrement le fruit d'une politique d'Etat, en l'occurrence le
Plan neige. En revanche, comme le remarque J. Manesse, les élus locaux
« montent à Paris » pour solliciter l'Etat contre la
fermeture d'une école ou d'autres services publiques (bureaux de poste
et hôpitaux par exemple), ou encore l'arbitrage de conflits locaux.
L'exemple de la Vanoise développé par
Françoise Gerbaux161(*), « cas d'école de la mise en cause
de l'administration traditionnelle territoriale par des conflits
locaux » illustre la complexité de la gestion de l'espace
montagnard. Si du point de vue temporel, il apparait logique que l'Etat, par sa
permanence, garantisse le maintien des valeurs patrimoniales d'un
« territoire d'exception » tel qu'est décrit le
périmètre de la DTA des Alpes du Nord, du point de vue spatial
cette préoccupation rentre inévitablement en conflit avec une
logique locale de gestion pour laquelle l'espace constitue plutôt une
opportunité de valorisation économique.
L'arbitrage de l'usage des sols traduit ainsi une opposition
entre « nationale ou local », « protection ou
développement » même si ces catégories ne sont
pas aussi tranchées dans la réalité. La DTA alpine le
répète d'ailleurs à plusieurs reprises et encourage
à dépasser cette vision réductrice mais ces termes
symboliques ont occulté ce qui devait être un réel objet de
discussion. Les débats des parlementaires autour de l'article 5 sur les
nouvelles DTADD ont pris parfois la tournure d'un affrontement
quasi-religieux : la dénonciation d'un Etat qui impose sa vision,
ses outils et ses règles du jeu en matière d'aménagement
du territoire, une « logique de recentralisation » pour certains, ou
encore un « Etat bolchévique » pour d'autres. Un
débat qui met en avant la question permanente du partage des
compétences territoriales et du rapport au droit et à la norme
pour les collectivités, dans un contexte de réforme des
collectivités territoriales.
Comme l'écrit ainsi Catherine Bersani dans son article
au titre évocateur, La DTA ou le retour de l'Etat
gendarme162(*), « la relation de l'Etat avec les
élus est bien au coeur du débat, et plus largement le droit des
citoyens à dire comment ils veulent habiter leur pays, et à vivre
selon ce souhait. La démocratie est donc l'enjeu par excellence
de la DTA. Assumer cette vocation impliquera encore beaucoup de
travail [...] ».
Toutefois, l'opposabilité de cette DTA qui pouvait
représenter un infléchissement supplémentaire des pouvoirs
et des compétences locales n'a pas empêcher la région
Rhône-Alpes de soutenir la démarche. Malgré le fait que cet
échelon territorial monte en puissance et en capacité
d'ingénierie territoriale notamment, la région a admis et
appuyé la nécessité d'une intervention d'Etat en
matière d'aménagement du territoire sur cet espace des Alpes du
Nord. Sans doute que l'opposabilité induit alors une protection contre
les pression locales plutôt qu'une contrainte dans l'exercice de ses
pouvoirs.
3.3. Des montagnards, coupables
désignés
« Nous, élus parfois rudes de ces territoires
rudes, ne sommes ni des accros du bulldozer, ni les tenants de la
sanctuarisation de nos régions, mais les garants d'une démarche
de développement que nous souhaitons harmonieux »163(*). Si ces propos paraissent
peut-être exagérés ou hors de propos, ils ne sont toutefois
dénués de raison. L'image de certains montagnards (surtout
proches du milieu du ski), coupables et irresponsables, perdure depuis
longtemps dans les esprits et risque de perdurer avec la montée des
préoccupations environnementales dans les massifs alpins comme ailleurs.
Aujourd'hui, les associations de protection de l'environnement se rangent
d'ailleurs souvent derrière cette vision
« initiée » par l'Etat il y a bien longtemps.
Dans Les Faiseurs de montagne164(*), Bernard Debarbieux et
Gilles Rudaz illustrent au XIXe siècle avec les politiques de
reboisement cette image stéréotypée du montagnard
rebelle qui s'est construite depuis le siècle des
Lumières. Ils indiquent ainsi que « si l'habitant des hauteurs
est parfois idéalisé sous cette image du "gardien de la
montagne", les auteurs et les forestiers les décrivent le plus souvent
sous les traits, moins avantageux, du coupable et de
l'irresponsable ». Les ingénieurs de l'Etat dénoncent
ainsi les droits communaux, les prélèvements de bois de
consommation courante, le pacage des moutons et des chèvres en
sous-bois, la transhumance aux densités excessives... et
« Bernard Lorents, le premier directeur de l'Ecole nationale des Eaux
et Forêts de Nancy, s'insurge lors d'une tournée en montagne en
1840 : est-il tolérable que des propriétaires de la montagne y
introduisent une culture et un mode de jouissance qui portent la
désolation dans les vallées ? ». Des accusations comparables
sont proférés en Suisse ; en 1849, le responsable des
forêts du canton de Berne s'exclame : « si le malheur qui frappe les
montagnes déboisées se limitait à ces régions, on
aurait pu dire qu'il sanctionnait l'imprudence coupable de leurs habitants
[...]. Mais ce malheur touche jusqu'aux vallées et aux plaines fertiles
».
Les lois de la seconde moitié du XIXe siècle
priveront alors ces montagnards irresponsables de droits séculaires et
les évinceront de la gestion de leurs ressources naturelles. On ne peut
s'empêcher de faire le rapprochement avec la démarche d'une DTA
alpine entreprise en 1996, même si, à bien des égards, les
proportions des injonctions du XIXe sont sans commune mesure avec celles de la
DTA des Alpes du Nord. La force symbolique d'une politique interventionniste
est toutefois bien présente.
Ainsi, cette image des montagnards n'est pas récente,
et si à cette époque on évoquait la résistance de
quelques « foyers d'agitation dans certaines petites
républiques de pasteurs cachées dans les replis des
Alpes »165(*),
aujourd'hui, on pointe du doigt des vallées et des élus savoyards
et hauts-savoyards, à tort ou à raison166(*).
3.4. Ces cadres normatifs, des
tentatives de gouvernance environnementale
La Convention alpine et la DTA des Alpes du Nord sont
considérées d'emblée comme des cadres normatifs, plus ou
moins précis ou concrets, qui viennent contraindre leur territoire
d'application. On peut aussi montrer que ces outils de planification
fournissent de nouveaux cadres de réflexion qui servent le
territoire ; pour Philippe Yolka par exemple, la Convention
alpine « fournit un cadre de réflexion commun pour rompre avec
l'esprit de vallée »167(*).
Dans cette perspective, la gouvernance environnementale
propose une compréhension théorique de ce changement de regard
sur ces deux cadres normatifs. Dans son article sur le sujet, Olivier
Barrière168(*)
indique que l'objectif de la gouvernance environnementale est « de
parvenir à une régulation des pratiques des acteurs en
répondant à un souci de responsabilisation, mais également
à la nécessité de canaliser leurs comportements en
limitant leur marge de manoeuvre, afin de circonscrire les stratégies
des acteurs dans un cadre », le tout se construisant sur deux
fondamentaux : les préoccupations écologiques du
monde et les univers endogènes des sociétés. Cette notion
de gouvernance environnementale, qui définit et organise la place de
chacun des acteurs concernés, permet de basculer d'une DTA vue comme le
retour de l'Etat gendarme169(*) vers un outil qui impulse « un nouveau
type de rapport entre l'Etat et les citoyens pour aboutir à un
partenariat entre le pouvoir central et le pouvoir local »170(*).
Pour mettre en oeuvre cette gouvernance environnementale,
l'Etat devient alors partie prenante de la gestion raisonnée du
territoire, ce qu'il a semblé vouloir faire à travers les Lois
Grenelle I et II, et il intervient « seulement » en
orientant le comportement des acteurs locaux, confortés dans leur
responsabilité ; l'Etat peut donc « orienter »
en posant si nécessaire de nouveaux cadres normatifs. Aussi, l'auteur
remarque avec justesse que la préférence de la persuasion
à l'action autoritaire peut faire son chemin surtout face à
l'inapplication de la législation répressive. Dans une certaine
mesure, c'est ce constat d'inapplication de la règle qui a pu guider
pendant quatorze ans la mise en oeuvre d'un outil étatique, opposable,
de planification qu'était la DTA des Alpes du Nord.
Cette persuasion qui peut passer par l'incitation ne constitue
qu'une étape vers la réalisation des objectifs d'une politique
publique. Avec la nouvelle formule de DTA non-opposable, les DTADD orientent
les comportements sur des thématiques plus larges et plus nombreuses,
sans les rendre obligatoires. Finalement, l'action devient directive car elle
« imprime une direction sans l'imposer »171(*), comme le fait la Convention
alpine sur l'arc alpin, ou les futurs DTADD au sein de leur
périmètre. La gouvernance environnementale permet de prendre le
contre-pied des formes autoritaires de conduite des comportements.
Ce premier chapitre nous a permis de revenir sur deux cadres
normatifs alpins : la Convention alpine et ses huit protocoles, ainsi que
le projet de Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord dans
le périmètre définit par cette dernière.
Cette analyse sur le « discours foncier »
d'une part, et sur les modalités de mise en oeuvre de ces cadres
normatifs alpins d'autre part, permet de distinguer trois niveaux croissants
d'ajustement, voire de distorsion, de ces cadres :
ü Ces cadres permettent de rendre intelligible
une vision de l'aménagement et du développement du territoire
alpin promu par l'Etat : en particulier la DTA qui contextualise
assez précisément ce discours. Sauf que deux obstacles se posent
et peuvent expliquer une opposition féroce et unanime du milieu des
stations de ski : l'objet au coeur du discours est faiblement audible,
mais surtout, la nature de la procédure (DTA et même Convention
alpine) a une audibilité plus que limitée sur ces territoires et
empêche de facto l'acceptabilité d'un tel cadre normatif,
vécu plutôt comme un diktat de l'Etat.
ü Les acteurs locaux se servent de ces cadres : en
les décriant ils réaffirment leur propre projet de territoire, ou
inversement, ils enrichissent ou confortent leurs politiques et leurs pratiques
territoriales, ils « font déjà de la DTA ou de la Convention
alpine »172(*).
Dans les deux cas, le cadre normatif a le mérite d'exister car
il re-questionne forcément l'ensemble des acteurs locaux
(partisans et opposants confondus) et favorise les réajustements.
ü Dans les pratiques innovantes, les outils ou les
méthodes existantes sont souvent refaçonnées par un cadre
règlementaire ou des mentalités progressistes :
l'intérêt ici est de voir comment ces ajustements ou ces
distorsions de méthodes ou d'outils peuvent monter en
généralité (verticalement) ou se
diffuser dans d'autres territoires (horizontalement). Toutefois, la
montée en généralité ne signifie pas de copier une
solution trouvée localement pour en faire une nouvelle règle,
mais plutôt de faciliter la prise de conscience, de créer les
conditions « pour que », en somme, des conditions favorables
localement pour que ce type de solution puisse se multiplier avec de moindres
contraintes (des contraintes réduites comparées à la
situation de départ).
Dans le troisième niveau, l'Etat applique le principe
de réflexivité, il tient compte des réactions des
destinataires de ses commandements, ou bien il cherche à s'adapter
à la logique des systèmes qu'il tente d'influencer173(*).
Ces démarches innovantes permettent également de
voir comment les acteurs locaux sont capables de remobiliser un cadre normatif
ou un outil différemment. Le chapitre suivant s'attachera donc à
des pratiques de terrain qui offrent des pistes de réponse pour
continuer d'explorer ce rapport au droit et à la norme en
aménagement, et plus spécifiquement, sur des questions
foncières alpines.
Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête de
maîtrise foncière
1. Une ingénierie au service d'une politique
foncière à Chamonix
1.1. Présentation
générale
La présentation générale de Chamonix qui
suit s'est appuyée essentiellement sur quatre sources174(*).
Située à 1000m d'altitude dans la
haute-vallée de l'Arve (74), Chamonix est emblématique des
territoires touristiques de haute-montagne. Avec ses 10 000 habitants à
l'année, Chamonix doit accueillir jusqu'à 100 000 personnes en
été et 60 000 en hiver, dans une vallée très
étroite (de 500m à 1,5km de largeur) s'étirant sur 17km
des Houches jusqu'à Vallorcine. Par ailleurs, le territoire est
très contraint par les risques naturels (avalanches et inondations) ce
qui restreint d'autant les possibilités de constructions. La
Haute-Savoie est un département où la pression foncière
est l'une des plus élevée de France, et il reste le plus cher
à l'échelle régionale : Chamonix n'échappe pas
à cette règle.
Aujourd'hui, Chamonix se recompose d'une manière
inédite sous l'influence de la métropolisation de grands centres
urbains ; elle devient l'épicentre d'une dynamique de redistribution de
la population et produit à son tour ses propres espaces
périurbains. Désormais, Chamonix la ville-station est une
banlieue lointaine de Londres ou de Genève, elle loge ses
salariés dans l'ensemble de la vallée de l'Arve à
défaut de pouvoir les accueillir sur son propre territoire, et c'est
ainsi que la population chamoniarde est devenue déclinante et
vieillissante (départ des jeunes ménages qui ne peuvent se loger
sur place, et arrivée de résidents secondaires dont beaucoup de
retraités).
Alors qu'en station, trois fonctions se disputaient
traditionnellement l'occupation de l'espace -l'agriculture, le tourisme et
l'habitat-, c'est dorénavant pour cette dernière que la
compétition se complexifie (quantitativement et qualitativement). En
effet, un arbitrage est rendu nécessaire selon les quatre usages de
l'habitat -touristique, secondaire, principal ou saisonnier- mais la
flambée des prix de l'immobilier et du foncier bénéficie
souvent aux résidences secondaires. Ainsi, les phénomènes
de ségrégation socio-spatiale qui opèrent finissent par
dessiner des « territoires patchworks » ; à
l'échelle micro apparaît un ensemble composé de types de
résidents aux intérêts souvent divergents voire
contradictoires, qui ne permettent bientôt plus de faire consensus et
donc de produire du collectif.
La prise de conscience du problème par les élus
chamoniards remonterait au début des années 1990
(réflexion autour de la Zac de la Frasse dès 1996) et c'est en
toute logique que la préoccupation du logement permanent est devenue de
plus en plus prégnante dans les politiques locales, parallèlement
à l'accroissement du phénomène. De fait, l'éviction
d'une partie de la population locale ou autochtone a permis une mobilisation
des élus et des habitants autour de cette question de l'habitation
principale à Chamonix, et c'est la formulation d'un
problème collectif - et non de problèmes particuliers - qui a
permis d'enclencher un politique foncière volontariste ciblée sur
cet enjeu.
En revanche, on peut évoquer brièvement deux
limites à la politique foncière chamoniarde. Alors que
l'intercommunalité est proclamée partout comme l'échelle
la plus pertinente pour aborder l'enjeu foncier, et que l'adhésion
à un Etablissement public foncier local (ici l'EPFL 74) est en passe de
devenir un outil jugé pertinent et efficace pour le portage foncier (qui
reste en quelque sorte le bras armé d'une politique foncière),
Chamonix semble plutôt mettre de côté ces deux leviers.
Tout d'abord en matière d'intercommunalité, rien
ne semble aller de soi en Haute-Savoie, en particulier au sein du Syndicat
mixte du Pays Mont-Blanc175(*). Ce syndicat mixte (ex-SIVOM Pays du Mont-Blanc)
avec quelques ambitions de gestion coordonnée du territoire avait
engagé un ensemble de réflexions (schéma
d'aménagement commercial, politique locale de l'habitat, schéma
de transport, SCOT) mais à ce jour, aucune des démarches n'a
abouti. Trois explications permettent de comprendre les obstacles à
cette coopération intercommunale renforcée dont les politiques
devaient s'incarner in fine dans un SCOT:
ü un territoire « globalement riche »
qui n'a pas besoin d'une intercommunalité pour « bien
fonctionner »,
ü un territoire dans lequel il est difficile de
créer des solidarités entre plaine et stations, de faire
comprendre que les handicaps et les intérêts sont partagés
sur de nombreux sujets,
ü entre stations elles-mêmes, la situation de
concurrence demeure.
Ce constat a encouragé Chamonix et ses trois communes
voisines, déjà regroupé en SIVOM, à aller plus loin
dans la coopération intercommunale sur un territoire où
« la communauté d'intérêt était plus
forte »176(*) : c'est le choix d'une intercommunalité
de proximité qui a donc été fait, s'affranchissant pour un
temps des difficultés -qui semblent aujourd'hui encore insurmontables-
de faire naître une réflexion stratégique et
partagée à l'échelle adéquate d'un territoire
élargi (celle correspondant au bassin de vie). Un choix en outre
revendiqué puisque, « pour agir efficacement, il faut agir sur
un périmètre à dimension humaine avec les meilleurs
outils. Ainsi, les communes transfèrent leurs compétences en
matière de logement aidé, d'aménagement de l'espace, de
protection et de mise en valeur de l'environnement, d'équipements
culturels, sportifs et éducatifs, d'aide sociale et d'assainissement.
[...] Concrètement, la Communauté de Communes de la Vallée
de Chamonix Mont-Blanc mettra en oeuvre la politique foncière en faveur
du logement aidé et du logement saisonnier »177(*).
Au rang des compétences déléguées
à la communauté de communes, on retrouve toutefois les grands
enjeux territoriaux de cette vallée de Chamonix :
l'aménagement de l'espace, l'élaboration et la révision
d'un SCOT, l'élaboration et la révision des schémas de
secteurs, la mise en oeuvre d'une démarche d'harmonisation des PLU et
d'une zone d'aménagement à vocation communautaire, la mise en
oeuvre d'une politique transfrontalière et de transports urbains, un
schéma territorial de mobilité, l'élaboration d'un plan
local d'habitat intercommunal, et la mise en cohérence d'une politique
foncière en faveur de logements sociaux locatifs conventionnés.
En outre, c'est précisément sur ce dernier point qu'une attention
particulière des élus a été portée puisque
c'est une problématique forte partagée par les quatre communes.
Enfin, l'adhésion à l'établissement
public foncier de Haute-Savoie ne semble pas répondre à un besoin
de la commune de Chamonix. Comme l'explique le directeur de l'EPFL 74, Philippe
Vansteenkiste178(*), on
peut distinguer quatre freins potentiels à l'adhésion d'une
commune à l'EPFL179(*) :
ü la mise en place d'une fiscalité
spécifique,
ü l'intérêt de l'outil lui-même, qui
peut être perçu comme trop interventionniste,
ü l'attente d'une situation particulière qui
rendra nécessaire l'adhésion de la commune à l'EPFL pour
cette opération précise,
ü la problématique majeure de l'EPFL, inscrite
dans la charte de création, qui est la mixité sociale180(*).
En somme, comme pour l'intercommunalité en
Haute-Savoie, « plus une commune est riche, moins elle a
d'intérêt à adhérer à l'EPFL [...], cela se
voit notamment dans les dents creuses du périmètre de
celui-ci »181(*).
A Chamonix, même si les façons de faire ne
semblent pas être tournées vers la coopération ni vers les
dynamiques de réseau182(*), elles n'en sont pas moins intéressantes,
bien au contraire. Ainsi, les opérations engagées par la commune
et réalisées par ses services semblent innovantes, quasi
inédites voires exemplaires.
1.2. Une politique
foncière volontariste et interventionniste tournée vers l'habitat
permanent
« La rareté et la cherté du foncier
chamoniard s'est accompagnée d'une « prise de conscience
partagée par les élus et les habitants »183(*) ce qui a conduit à
l'émergence d'un discours politique volontariste,
« c'est-à-dire prêt à proposer, imposer et donc
s'opposer »184(*). La pérennité du logement permanent,
problématique partagée par d'autres stations, a permis de
construire une politique foncière qui formule un problème
collectif, d'intérêt général, et qui n'est pas
basé sur l'agrégation de problèmes particuliers :
« tel est bien le dilemme dans lequel se trouve prise la question
foncière et ... avec elle, les élus »185(*). De fait, la
négociation foncière prend le sens d'une médiation au
service de la politique communale.
Propriétaire foncier important, la commune de Chamonix
a engagé le recensement de tous ses biens (terrains, bâtiments,
salles) dans la perspective d'une gestion plus stratégique de son
patrimoine (en vue de ventes potentielles et donc de recettes municipales),
sous l'impulsion des élus. Dès 2009, des groupes de travail se
sont donc constitués pour réfléchir à l'affectation
future de chaque bien, pour éviter « une gestion au coup par
coup »186(*),
tout cela s'articulant dans le processus de révision du PLU. Cette
stratégie foncière qui s'affirme a amené la commune
à se comporter en tant qu'aménageur parce qu'elle était
propriétaire des terrains sur lesquels portaient les opérations
d'habitat qu'elle envisageait. Ainsi, Chamonix a vendu des lots
viabilisés dont l'acte de vente encadrait les conditions de revente,
avec en amont la sélection des candidats acheteurs selon des
critères définis par la commune.
1.2.1. Des
opérations pour le logement permanent qui se multiplient
A partir de 1996, l'opération de la Zac de La Frasse
marque en quelque sorte le début d'une politique foncière
chamoniarde, volontariste et interventionniste en faveur de l'habitat
permanent. Avant La Frasse, Chamonix avait déjà participé
à d'autres programmes d'accession à la propriété
mais plus timidement, avec des clauses assez
« légères » et sans sanction en cas de non
respect.
Pour la Zac de La Frasse, la commune achète les
terrains pour compléter le tènement, effectue le remembrement
puis commercialise trente-deux lots à bâtir : ces lots sont
« contraints » par le cahier des charges de la ZAC qui
prévoit un droit de priorité de la commune en cas de
revente. Lors d'une revente et malgré les efforts de
sensibilisation entrepris par la commune, les propriétaires se tournent
vers le plus offrant ; la commune engage alors une procédure mais
est déboutée par le tribunal administratif puis par la Cour de
cassation qui estime qu'il y a un détournement du droit de
préemption pour motifs anti-spéculatifs. Aujourd'hui, ces biens
et leur objet « résidence permanente » sont inscrits
au PLU en droit de préemption renforcé. En somme, dix ans
après, on constate seulement trois ou quatre cas de revente et dans
certains cas une transformation en résidence secondaire, ce qui reste
concluant sur un total de trente-deux lots.
Dès le début des années 2000,
l'idée d'un programme aux Bossons, « le Clos
Napoléon », va rompre avec les opérations
antérieures puisque des compétences externes vont être
sollicitées pour renforcer les clauses de revente. Prenant le
contre-pied des mésaventures de La Frasse, le Clos Napoléon sera
« une opération lourde et difficile »187(*) et marque ainsi
l'affirmation de la politique foncière de Chamonix pour offrir à
sa population des logements à des prix inférieurs à ceux
du marché. En 2005, la mise en oeuvre est effective ; le montage du
programme technique et surtout des clauses juridiques de la Zac vont
concernés douze lots à bâtir en accession à la
propriété. Cinq ans plus tard, la dernière vente a lieu
malgré un ensemble de clauses limitatives du droit de
propriété plus affirmées.
Aujourd'hui, on peut considérer que la politique
foncière de Chamonix prend de l'envergure. Un futur projet,
« Les Tissières », prévoit la
réalisation de quatre-vingt à cent logements (lots individuels et
collectifs) à l'horizon 2012 : des maitres d'oeuvres externes sont
sollicités sous l'égide d'un comité de pilotage pour cette
opération trop lourde pour être menée en interne188(*). Un autre projet de huit
logements se profile également aux Pèlerins. D'autre part, un
travail de longue haleine a mobilisé la commune autour du centre Jean
Franco en centre ville (un grand terrain et un bâtiment
propriétés de l'Etat). Après deux ans de
négociation pour l'acquisition du bien et la négociation du prix,
assortie d'un contentieux avec une association locale, l'Etat a
décidé de vendre à la commune dans le cadre des
dispositions de la circulaire Borloo : 75% de logement social seront donc
réalisés sous un délai de cinq ans. On remarquera ici que
la politique foncière de Chamonix reproduit à son échelle
communale une disposition de « clauses particulières de
vente » déjà mise en oeuvre par l'Etat. Enfin, la
commune de Chamonix agit sur la maîtrise du coût du foncier en
acquérant des terrains de RFF ou de la SNCF189(*) puis en les revendant
« à un prix défiant toute
concurrence »190(*) à l'opérateur d'habitat social ICF.
1.2.2. Une
technicité juridique qui s'affine : vers un infléchissement
du droit de propriété
La politique foncière de Chamonix a fait le choix de
développer la technicité juridique des opérations
d'habitat permanent pour réaliser son objectif : garantir la
destination et un prix encadré lors de la revente du logement, et donc
en un sens, comment faire en sorte que lors de la revente la plus-value soit
reversée à la commune et que le bien ne change pas d'usage ?
Ces conditions de revente, inscrites dans l'acte de vente, constituent des
limitations explicites du droit de propriété assorties de clauses
anti-spéculatives : si la revente s'effectue au-delà d'un
certain prix, les vendeurs doivent rembourser à la commune la
différence en raison de l'effort financier consenti en amont par cette
dernière.
Pour le Clos Napoléon, il s'agit bien
« d'encadrer la revente » : aux clauses
anti-spéculatives s'ajoutent des clauses d'affectation du bien sur une
durée de vingt ans (au début il a même été
question de trente ans) : une durée déjà assez longue
a estimé le notaire qui a piloté le montage juridique. Bien sur,
la revente n'est pas interdite mais les acheteurs savent qu'ils devront
revendre leur bien, sans réaliser de plus-value, à des personnes
correspondant aux critères définis par la commune et qui
s'engageront à leur tour à respecter les mêmes termes du
contrat. L'ensemble de ces clauses juridiques ont fait l'objet d'un
exposé préalable au programme communal afin de préciser
les motifs de cet interventionnisme (déclin démographique,
fermeture de classes,...) justifiant l'objectif du « maintien
de la population permanente sur le territoire » dans sa dimension
d'intérêt général.
Bien que le bon sens semble donner raison à cette
stratégie foncière, l'expérience judiciaire pour
l'opération de La Frasse rappelle qu'en France, le droit de
propriété est sacré. Ainsi, « dans la mesure
où le droit de disposer du terrain (le vendre ou le donner) est le
critère de la pleine propriété, il est logique de
considérer que toute restriction apportée à la
liberté de la mutation, constitue une réduction des droits du
propriétaire » rappelle Joseph Comby191(*). Mais il semble que le droit
reconsidère ses positions et qu'une jurisprudence en la matière
vienne récemment encourager les politiques foncières
volontaristes et interventionnistes des communes. L'article d'Hugues
Périnet-Marquet relate avec une précision juridique cette
évolution tout à fait inédite qui décrit
parfaitement la situation chamoniarde 192(*):
« Le droit de propriété que se fait
consentir une commune venderesse de pouvoir racheter un terrain à son
prix de vente pendant vingt ans n'est pas une atteinte au droit de
propriété. L'arrêt rendu le 23 septembre 2009 est important
car, pour la première fois, se trouvaient soumises à la Cour de
cassation les modalités de création d'un marché de
l'acquisition protégé.
Une commune avait vendu un terrain à un prix
relativement modique. Mais, sous l'intitulé "pacte de
préférence", il était prévu dans l'acte qu'avant
toute revente à un tiers, le rachat du terrain devait, pendant vingt
ans, être proposé à la commune, au prix de l'acquisition
initiale réactualisé.[..]Or, trois ans après avoir
acheté, les acquéreurs signent un compromis de vente de leur
terrain à un prix trois fois supérieur à celui
d'acquisition. La commune voulant exercer son droit de
préférence, les acquéreurs tentent de faire annuler la
clause [...].
En l'espèce, l'important n'était pas tant la
priorité offerte à la commune que le blocage du prix de revente,
qui pouvait apparaître comme une évidente limitation du droit de
disposer au prix du marché. Pourtant, l'atteinte au droit de disposer,
flagrante, est validée tant par les juges du fond que par la Cour de
cassation qui considère qu'outre la libre acceptation de la stipulation,
celle-ci avait pour but d'empêcher la spéculation sur le bien dans
un contexte marqué par la rareté de l'offre et le
décrochage des possibilités financières de la plupart des
ménages par rapport à l'envolée des prix de l'immobilier
et que l'acquéreur avait bénéficié, en contrepartie
de son acceptation, de la possibilité d'accéder à un
marché protégé de la spéculation
immobilière. [...] En effet, l'effort fait par la commune en vendant le
terrain à un prix sans rapport avec celui du marché
méritait d'être encouragé et
protégé. »
Cette jurisprudence valide ainsi la mise en oeuvre de clauses
restrictives de revente, démarche adoptée dans les
opérations de lotissement de la commune de Chamonix. Enfin, une seconde
question juridique restait à traiter, celle des critères de
sélection des futurs propriétaires. Pour le Clos Napoléon,
un groupe de travail avait permis de définir quatre principaux
critères :
ü la composition familiale : nécessité
d'avoir un ou plusieurs enfants scolarisés dans la commune,
ü un revenu-plafond fixé à 54 000
€/an/ménage (soit 4 500 €/mois/ménage en
moyenne),
ü l'âge : = 90 ans d'âges cumulés
pour un couple, ou = 45 ans pour une famille monoparentale,
ü l'activité professionnelle : dix ans
d'activité sur la commune.
Cet aspect n'échappe pas à Hugues
Périnet-Marquet : « comment sont déterminés les
bénéficiaires des prix préférentiels ? Y'a-t-il une
véritable publicité ? [...]Quels que soient les bons sentiments
qui président à cette technique, elle n'en conduit pas moins une
personne publique à consentir un avantage financier plus ou moins
immédiat à certaines personnes privées dont le choix est
fait sans transparence »193(*). A Chamonix, le jury d'attribution194(*) des lots du Clos
Napoléon a fini par solliciter les compétences d'un huissier afin
de réaliser un tirage au sort pour départager les vingt-deux
candidats restants pour les douze lots disponibles. La démarche semble
trouver un large écho auprès des chamoniards, et depuis 2000, une
liste d'inscription a été ouverte : toute personne qui
souhaiterait disposer de ce type de logement peut s'inscrire, et bien que les
prochains critères d'attribution pour Les Tissières ne soient pas
encore définis, plus de cinq cent personnes se sont manifestées.
Enfin, cette question des critères reste assez sensible
car elle discrimine, plus ou moins implicitement, une population jugée
indésirable195(*). Toutefois, le but est d'arriver à
définir des critères qui permettent à la fois d'atteindre
les objectifs de la politique foncière municipale, et qui sont
« recevables » d'un point de vue juridique, d'où la
nécessité de s'entourer par exemple d'un bon notaire196(*). Quoiqu'il en soit, chaque
territoire doit réfléchir à ses propres critères en
fonction de ses spécificités locales.
1.3. Entre bricolage et
ingéniosité
La démarche adoptée par la commune de Chamonix
est guidée par le souci d'améliorer et de peaufiner un
dispositif, en l'occurrence, une technicité juridique197(*). Ainsi, les écueils
rencontrés pour la Zac de La Frasse ont tenté d'être
corrigés pour le Clos Napoléon, et il en sera probablement de
même pour Les Tissières. Aujourd'hui, la jurisprudence
émergente sera peut-être renforcée par des dispositions
prises par le législateur car le risque juridique pour une
collectivité qui tenterait l'aventure reste présent198(*).
La politique foncière de Chamonix mobilise
différents outils de maîtrise du foncier afin de
« varier les procédures »199(*) le plus possible. A raison
d'une déclaration d'intention d'aliéner (DIA) reçue par
jour (entre trois cent et quatre cent par an en moyenne, sauf en 2009 avec la
chute du nombre de transactions), le service foncier privilégie comme
ailleurs les procédures à l'amiable : en moyenne, le droit
de préemption urbain est utilisé une fois par an. Cependant, la
définition d'emplacements réservés (disposition du Code de
l'urbanisme) au Plan local d'urbanisme est peut-être la mesure phare de
la commune : beaucoup d'emplacements réservés
« logement » quadrillent le PLU, du centre-ville de
Chamonix jusqu'à Argentières notamment. Les chercheurs
relèvent d'ailleurs la façon dont les élus
interprètent, optimisent et souhaitent adapter un zonage dont le
rôle est renouvelé par la stratégie foncière ou
encore, comment le pouvoir politique s'empare du zonage pour contrer les
projets individuels200(*).
En somme, « les outils, on les a mais il faut savoir
bien les utiliser pour ce pourquoi ils sont faits, et après, on peut
arriver à les adapter à certaines mesures pour répondre
à nos besoins, par exemple en matière de logement
permanent »201(*). Mais encore faut-il être capable de mobiliser
des compétences externes coûteuses tels que notaire, avocat,
juriste, ou encore géomètre et bureau d'étude, et seules
les collectivités suffisamment riches le peuvent. Même si les
services de la ville se défendent d'être innovants, et encore
moins d'être exemplaires, leurs démarches et leur manière
de se saisir des outils existants est proche de ce que l'on qualifierait
couramment de « bricolage ». La figure de
« l'acteur-bricoleur » de Louis Allie202(*) montre notamment
« comment et pourquoi l'acteur au coeur des processus
d'aménagement, de gestion et de planification agit et pense à la
manière d'un bricoleur qui bricole »203(*). Cet éclairage de
Louis Allie est tout à fait opportun pour observer la situation à
Chamonix : il permet de relever une certaine forme
d'ingéniosité dont font preuve ceux qui réalisent la
politique foncière chamoniarde.
De plus, les opérations réalisées
à Chamonix font peut-être déjà boule de neige :
d'autres municipalités n'hésitent pas à contacter les
services chamoniards pour obtenir des détails sur le montage de la Zac,
les critères, etc. Ces procédures sont donc amenées
à se diffuser et ainsi à s'améliorer. Déjà
aux Houches un programme pour de l'accession à la
propriété, avec un organisme social, se construit avec des
critères assez similaires, sur des terrains appartenant aussi à
la commune. Pourtant, il est vrai que Chamonix n'a rien inventé bien que
ses opérations semblent quasi-inédites en territoire de montagne.
Ailleurs, ou plutôt hors de vallées touristiques alpines, des
démarches similaires (dans la technique) sont observables partout ou
presque, par exemple lorsque l'on fait un OPH204(*). Pour ces logements, des critères
d'attribution et des clauses anti-spéculatives existent afin qu'en cas
de revente avec plus-value, l'office public puisse récupérer les
subventions injectées dans l'opération. Ce qui est
spécifique ici ce n'est peut-être pas tant la thématique du
maintien des populations locales, mais plutôt le retard dans la prise de
conscience ou la mise en oeuvre de solutions répandues ailleurs
(deux cent soixante-dix-neuf OPH en France en 2007). En résumé,
si la technique existe déjà, Chamonix a eu l'intelligence
de l'adapter pour la mettre au service de l'objectif visé par
sa propre politique foncière locale : l'habitat permanent.
2. La « participation-formation » dans le
massif du Vercors
2.1. Présentation
générale
Le Vercors est le plus grand massif des Préalpes du
Nord (environ 135 000 ha) et constitue la limite sud-est du
périmètre d'application de la DTA des Alpes du Nord. Loin
d'être un territoire homogène, le Parc naturel régional du
Vercors (PNRV) distingue huit secteurs confrontés à des enjeux
territoriaux parfois très différents. La DTA des Alpes du Nord
différencie quant à elle un territoire soumis à la forte
pression urbaine qui correspond aux piémonts isérois du Vercors
(secteur « Piémont Nord »), et un territoire soumis
à une pression émergente sur le plateau (secteur
« Quatre-Montagnes »). Toutefois, au sein de ce
« PNR montagnard périurbain »205(*), cette diversité de
situation est appréhendée au sein du périmètre de
révision de la charte du Parc 2008-2020 : celui-ci regroupe 95
communes dont 62 classées « Parc ».
Du point de vue foncier,
l'hétérogénéité du massif du Vercors doit
être soulignée : globalement, une moitié nord du
massif est soumise au phénomène de périurbanisation de la
région urbaine grenobloise, voire lyonnaise, tandis qu'une moitié
sud est plutôt menacée de déclin206(*). Ces deux tendances
traduisent assez bien l'une des distinctions possibles que l'on peut faire
entre les Alpes du Nord et les Alpes du Sud. On s'intéressera donc
à cette partie nord du Vercors, où certaines communes craignent
« de devenir des cités-dortoir d'un nouveau genre, banlieues
de luxe pour cadre des hautes technologies du sillon
alpin »207(*),
et où l'artificialisation des sols menace de manière
irréversible l'agriculture, les paysages typiques des piémonts et
du plateau, et donc à terme le potentiel touristique de ce
territoire.
C'est au sein de la communauté de communes du massif du
Vercors208(*) que la
croissance démographique a été fulgurante ces quinze
dernières années, soit trois fois supérieure à
celle de l'agglomération grenobloise. Une population estimée
à 11 600 habitants, relativement jeune (28 % de moins de 20 ans) mais
vieillissante209(*),
avec des communes comme Méaudre ou Lans-en-Vercors dont la population a
augmenté respectivement de 30 et 50%210(*). Ainsi, les constructions induites ont
dessiné progressivement un chapelet de maisons le long des voies de
communications, alors que la part des résidences secondaires dans
l'ensemble des logements s'élevait à 59,2% sur le canton de
Villard-de-Lans en 2006211(*).
En outre, l'hypothèse de transformation du plateau en
« banlieue de luxe pour cadres » est corroborée par
plusieurs chiffres : depuis 1999, sur 153 logements construits par an en
moyenne sur le canton, 58 % des demandeurs de permis de construire viennent de
l'extérieur du plateau, à un prix de vente au mètre
carré en hausse de 58 % pour les maisons individuelles (depuis
2000)212(*), mais qui
demeure plus attractif que dans la plaine.
L'arrivée de ces néo-ruraux sur le plateau s'est
assortie d'un accroissement des conflits d'usage avec les exploitants agricoles
pour qui l'enclavement progressif du siège d'exploitation met en
péril la pérennité de l'activité agricole tout
entière. Dès avril 2004, un diagnostic territorial agricole met
en perspective le rôle et le fonctionnement des exploitations avec les
enjeux de développement économique, de gestion de l'espace ou
encore des choix en matière d'aménagement, dans le but de
concilier aménagements fonciers et paysages. Peu à peu, les
élus ont pris conscience des dangers d'une urbanisation non
maîtrisée213(*) et la question de la maîtrise foncière
est devenue évidente.
Dans le cadre de la révision de la Charte du PNRV
(bilan évaluatif et diagnostic territorial) ainsi que lors des
débats locaux organisés pour la phase de concertation, les
principaux enjeux mis en évidence ont permis de préciser les
différents axes et objectifs stratégiques de la nouvelle Charte
2008-2020 : à la première place des enjeux
répertoriés figure « la gestion du foncier et de
l'urbanisme »214(*). Ainsi, l'objectif opérationnel 1.4.1. engage
le Parc à soutenir la mise en place de stratégies
paysagères et de plans d'action portés localement ; ces
« Chartes paysagères » doivent permettre de
planifier l'usage des sols et de protéger le foncier agricole soumis
à la pression de l'urbanisation.
La « dimension foncière » que l'on
a souhaité explorer sur ce territoire du Vercors est introduite par
l'axe 3 de la Charte du Parc : « Inventer et préparer les
territoires de demain »215(*). En effet, face à la pression urbaine et
à ses effets sur la gestion de l'espace qui échappe alors
à la maîtrise des pouvoirs publics, les collectivités
doivent en faire une de leurs préoccupations majeures. Dès lors,
il est nécessaire qu'elles se mobilisent fortement « à
l'échelle communale, intercommunale et avec les agglomérations
voisines », pour retrouver la maîtrise foncière de leur
territoire. Suivant cette logique de mobilisation, « le parc incitera
et soutiendra les collectivités locales dans la mise en place d'outils
permettant de contenir la pression urbaine et de préserver les espaces
à vocation agricole et forestière ». Deux objectifs
opérationnels déclinent cet axe d'action216(*) :
ü 3.2.1. Contribuer à la définition et la
mise en oeuvre des stratégies et documents d'urbanisme. Les
interventions du PNR visent l'appuie à la mise en place de Charte de
développement et paysagère à l'échelle
intercommunale.
ü 3.2.2. Assurer une observation de l'évolution du
foncier et de la construction aux différentes échelles
territoriales. Il s'agit de développer une « approche
prospective sur le foncier et la construction ».
Ainsi, les communes signataires de la Charte du Parc
s'engagent « à économiser l'espace, à
préserver le foncier agricole et à densifier les zones
déjà urbanisées ou urbanisables dans le cadre des
documents d'urbanisme ». Toutefois, c'est dans le passage à
l'acte que le Vercors semble se distingue et qu'il retient ici notre
attention.
2.2. La Charte de
développement de la CCMV
Tout d'abord, une charte paysagère
élaborée au sein du PNR va permettre de poser les
premières pièces de la future Charte de développement.
Coordonnée par la conseillère de la commission paysage de la
CCMV, Michelle Prax, et le chargé de mission paysage-urbanisme du PNR,
Guy Chatain, la charte paysagère devient par la suite l'outil de mise en
oeuvre de l'objectif opérationnel 1.4. de la future Charte du Parc.
Lors d'un entretien avec Guy Chatain217(*), en quelque sorte la
cheville ouvrière du projet (côté Parc), l'analyse faite du
problème foncier identifie trois dimensions pour appréhender cet
enjeu complexe:
ü avoir une vision claire et simple du
foncier (mais pas simpliste car les enjeux n'en sont pas moins
énormes : enjeux financiers et de pouvoir) qui puisse se traduire
dans un document de synthèse. Le manque de formation des élus est
l'obstacle majeur de ce type de démarche (des guides sur le foncier
agricole, le foncier urbain,etc. ne répondent pas à ce besoin de
formation).
ü avoir du courage politique pour mener
à son terme une démarche volontariste en matière de
foncier. Jusqu'à présent, les enjeux sont tels que
l'intérêt général s'oppose systématiquement
aux intérêts particuliers. Le manque de vision à long
terme, de projet de territoire est rattrapé par les visions
court-termistes des acteurs locaux.
ü se comporter en aménageur pour
qu'un projet de territoire soit élaboré en amont de la
règlementation. C'est un problème lié au processus
lui-même qu'il faudrait inverser : un projet de territoire
permettrait alors de fixer un cadre aux futurs projets d'aménagement,
tout cela en amont de la décision finale de l'élu. C'est le
projet de territoire qui refaçonne l'élu en aménageur.
Ce sont ces trois dimensions qui ont nourri le projet de
Charte de développement porté par la communauté de
communes du massif du Vercors.
2.2.1. Une démarche
alternative au SCOT
Dès 2005, donc avant l'adoption de la nouvelle Charte
du Parc, les premières réflexions sont lancées pour
l'élaboration d'une charte de développement durable du territoire
de la CCMV. Accompagnée dans sa démarche par le PNR Vercors, mais
également par le département de l'Isère et le contrat de
développement Rhône-Alpes du Royans-Vercors, la CCMV sollicite un
bureau d'études. En septembre 2006 émergent les orientations de
développement à moyen terme (dix ans) ; celles-ci sont
validées en conseil communautaire le 6 novembre 2006.
Ce « Vercors à l'horizon 2015 » se
construit donc à l'échelon intercommunal : les sept communes
s'engagent ainsi dans une vision concertée de l'aménagement, et
traduisent :
« Une vision du territoire qui dépasse
les limites communales dans une approche identitaire fondée à la
fois sur la géographie, l'histoire et les caractéristiques
économiques, sociales et culturelles des Quatre Montagnes. Un
développement maîtrisé et concerté s'impose pour
maintenir un cadre naturel attractif et favoriser une économie locale
diversifiée, capable de s'adapter aux évolutions de
l'environnement. Ce document est le résultat d'un engagement unanime des
élus de la Communauté de communes qui ont participé
activement à son élaboration sous la conduite de Guy Charron,
Vice-Président à l'aménagement de
l'espace »218(*).
L'adoption d'un Plan d'actions le 4 mai 2007219(*) décline alors les
actions opérationnelles et leur mise en oeuvre (objectifs,
résultats attendus, maître d'ouvrage, partenaires, maîtres
d'oeuvre, contenu, méthodologie et mesures d'accompagnement) selon cinq
orientations thématiques (dont deux transversales) : l'habitat, le
tourisme, l'emploi, le paysage et les réseaux. Ce sont donc 25
fiches-action qui guident la mise en oeuvre de la Charte de
développement.
La démarche de la CCMV est donc finalement assez proche
de celle d'un SCOT : l'élaboration a été relativement
longue, concertée mais beaucoup moins lourde que celle d'un
véritable SCOT, et aussi beaucoup moins coûteuse. Peut-être
même au-delà d'un SCOT, cette Charte de développement
intercommunale s'oriente vers ce que pourrait être à terme un
PLU-intercommunal. Comme le souligne Guy Chatain, « jusqu'alors,
l'harmonisation se limitait aux prescriptions architecturales figurants dans
l'article 11 de leur POS ou PLU. La Charte de développement ne devant
pas être l'oeuvre de la communauté de communes mais de toutes les
municipalités, cette méthode permit de les associer
directement »220(*). Cette association des communes a permis de
co-construire ce nouveau cadre de planification à moyen terme, qui s'est
accompagné d'un calendrier de mise en oeuvre, ainsi que d'une carte de
destination générale des sols. Le schéma ci-dessous
récapitule la démarche entreprise à travers cette Charte
de développement221(*).
Figure 25. Démarche
de la Charte de développement de la CCMV, 2007
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo17.png)
A la manière d'un SCOT, de grandes orientations ont
été retenues, et celles concernant la thématique de
l'habitat permettent de cerner la vision du foncier prônée par la
Charte. Deux orientations sont ainsi retenues 222(*):
1.1. Contenir l'urbanisation dans la limite des surfaces
constructibles des documents d'urbanisme actuels
a) Localiser la construction selon les caractéristiques
des communes
Autrans
|
réduit son rythme annuel de construction à 8
logements/an (12 logements/an entre 1999-2005). Autrans conserve des
possibilités de développement à long terme dans
l'enveloppe foncière destinée à la construction (zones
NA).
|
Corrençon
|
maintient son rythme de construction à 4 logements/an.
Corrençon reste en deçà de ses capacités afin de
préserver des possibilités à long terme (zones NA).
|
Engins
|
maintient le rythme de 1999-2005. La construction d'une
vingtaine de logements d'ici 2015 mènera la commune au bout de ses
capacités de construction et de renouvellement.
|
Lans-en-Vercors
|
limite son rythme annuel de construction à 17
logements/an (27 logements/an entre 1999-2005). La commune assure
néanmoins 19 % de la construction du plateau et mise sur la reconversion
en habitat d'une partie du parc touristique désaffecté. Elle
garde des possibilités d'optimiser sa capacité de
construction.
|
Méaudre
|
maintient son rythme de construction à 19 logements/an.
Méaudre assure plus de 20 % de la construction du plateau et va au bout
de ses capacités.
|
Villard-de-Lans
|
qui concentre 45 % de la construction du plateau,
réduit néanmoins considérablement son rythme de
construction de 72 logements/an entre 1999-2005, à 52 logements/an
jusqu'en 2015. La commune ne prévoit qu'une reconversion partielle de
son parc touristique désaffecté en logement, lui
préférant la réhabilitation en lits touristiques et la
création de lits marchands.
|
Saint-Nizier
|
limite sa construction à 7 logements/an, avec la
possibilité de transformation d'immeubles touristiques. Le rythme est
divisé par deux pour des raisons techniques et sociales : desserte et
organisation des circulations, adduction en eau potable, gestion des
équipements liés à la petite enfance, animation et vie
communale...
|
1.2 Optimiser la capacité de construction du plateau
a) Programmer la construction
Cette orientation se décline suivant trois
modalités : la diversification de la construction, la relance de la
construction sociale, et enfin, la production de nouvelles formes de logements
(individuel et collectif). L'objectif visé est celui du maintien de la
mixité sociale sur le territoire.
b) Adopter une politique foncière
Identifier comme « un levier de développement
primordial pour la CCMV », la maîtrise foncière doit
permettre la mise en oeuvre du scénario retenu. C'est une politique
foncière à moyen et à long terme qui doit être
impulsée selon trois axes :
ü la réduction de la part du développement
en secteur diffus pour lutter contre l'urbanisation linéaire,
ü l'ajustement des densités de construction afin
d'optimiser le foncier disponible,
ü la régulation du coût du foncier par
l'utilisation d'outils d'aménagement opérationnel (ZAC...) et
l'intervention de l'établissement public foncier.
Document de cadrage mais aussi document de mise en oeuvre, la
Charte de développement, dans son Plan d'actions, va au-delà d'un
SCOT. En matière de foncier, six fiches-action (sur les 25)
déclinent la marche à suivre223(*). La volonté de formation, de mise en dialogue
des acteurs est très présente. Par exemple, dans la fiche-action
1, il est question d'organiser des formations sur le panel d'outils
mobilisables pour une politique foncière, destinées aux
élus et personnels des mairies. Dans la fiche-action 3, il s'agit
d'aider directement les communes, ou encore dans la fiche-action 9, l'enjeu est
de développer le dialogue territorial avec les habitants, permettant de
réduire aussi les conflits fonciers.
2.2.2. Une Charte
opposable
L'atout de cette Charte de développement réside
à la fois dans sa forme, relativement courte, lisible, chiffrée
et cartographiée, que dans le fond adopté par les communes, par
des orientations stratégiques, des mesures volontaristes et des
fiches-actions pragmatiques. Toutefois, ces efforts auraient peut-être
été réduits à de simples « voeux
pieux » -comme il en existe déjà tant- malgré la
volonté d'une majorité d'élus.
Bien sur, comme le relate Isabelle Berthier dans son article,
le déclassement de certaines parcelles a suscité quelques
émois : « les menaces de contentieux n'ont pas
manqué. Les discussions avec les propriétaires sont très
longues ; les intérêts des agriculteurs et des
propriétaires ne se recoupent pas puisque rares sont les
propriétaires qui sont en même temps agriculteurs, rapporte Pierre
Buisson, président de la communauté de communes, conseiller
général et maire de Méaudre »224(*).
Sans l'opposabilité de la Charte de
développement, le souci d'économiser l'espace agricole par
exemple pouvait être remis en cause : le maire cédant
inévitablement aux pressions de certains défendant ardemment leur
intérêt particulier, ou encore, au changement de
municipalité suivant (ou basculement de l'équilibre entre
pouvoirs au conseil municipal), les limites instaurées se seraient
progressivement délitées.
Afin de donner une force juridique à ce cadre de
planification intercommunal, le document devait donc être opposable aux
tiers, assurant le crédit de la CCMV face à l'Etat -la Charte de
développement étant validée par le préfet-, mais
aussi face à l'ensemble des élus et des concitoyens du territoire
des Quatre-Montagnes. Alors que la révision de la Charte du Parc du
Vercors était en cours, il a été décidé
d'inscrire la Charte de développement de la CCMV ainsi que sa carte de
destination des sols au sein de la future Charte du Parc 2008-2020, lui donnant
automatiquement le caractère opposable qu'il lui manquait. Grâce
à ce montage judicieux, l'intégralité de la Charte de
développement de la Communauté de communes du massif du Vercors
bénéficie de l'opposabilité de la Charte du Parc naturel
régional du Vercors pendant la durée d'exécution de
celle-ci, soit jusqu'en 2020. Cette démarche originale et volontariste
initiée à l'échelle de l'intercommunalité va ainsi
au-delà de l'affichage politique.
2.2.3. Une réaction
au SCOT grenoblois
La Loi Urbanisme et Habitat du 2 juillet 2003 prévoit
que « dans les communes qui sont situées à moins de
15km de la périphérie d'une agglomération de plus de 50
000 habitants et qui ne sont pas couvertes par un schéma de
cohérence territoriale, le plan local d'urbanisme ne peut être
modifié ou révisé en vue d'ouvrir à l'urbanisation
une zone à urbaniser délimitée après le
1er juillet 2002 ou une zone naturelle » (Art. L. 122-2 du
Code de l'Urbanisme). Toutefois, en cas de rupture géographique due
à des circonstances naturelles, le préfet peut exclure du champ
d'application de cette règle certaines communes : ainsi, la CCMV a
alors le choix d'intégrer le périmètre de la région
urbaine grenobloise -RUG- et donc son SCOT, ou de rester sous un régime
d'autorisations délivrées par le préfet. Dans un contexte
de forte pression immobilière et foncière, le préfet
interpelle la CCMV en 2004 : celle-ci décide de rester hors du SCOT
et d'enclencher une réflexion collective, encouragée par le
Parc225(*).
La Charte de développement constitue dès lors un
outil de « résistance » à
l'intégration des Quatre-Montagnes au sein de la RUG. Selon
l'appréciation des élus de la CCMV, « les
intérêts et attitudes des communes du Vercors divergent trop de
celles de l'agglomération pour envisager une prise de décisions
commune »226(*). La crainte d'être assimilée à
ce vaste périmètre, d'être réduite au statut de
« secteur » du SCOT, n'efface cependant pas les liens
évidents entre ces deux territoires. Une charte d'intention est donc
signée en 2005 entre la CCMV, La Métro et le PNRV afin
de « coordonner plus étroitement les actions pour garantir un
développement équilibré et concerté des
territoires ».
D'autre part, on peut considérer que la démarche
entreprise par les communes de la CCMV est plus ambitieuse que ce qu'il aurait
été possible de réaliser au sein du SCOT de la RUG,
notamment parce que les orientations prises ont été
co-construites par les communes elles-mêmes et leurs élus,
qu'elles ont été cartographiées avec précision, et
que l'ensemble de la Charte de développement est opposable aux documents
d'urbanisme de rang inférieur. Comme en témoigne Michelle Prax de
la CCMV : « la charte est à certains égards plus
contraignante car elle comprend une carte de destination générale
des sols, à la différence d'un SCOT. Or autant cela peut se
justifier lorsque le SCOT couvre un vaste périmètre, autant
l'absence de carte est pénalisante pour un territoire restreint tel que
le Vercors-Quatre-Montagnes »227(*). Cependant, il semble que la perspective d'une
intégration préoccupe toujours quelques élus : la
Charte de développement sera-t-elle un jour transformée en
schéma de secteur du SCOT grenoblois ?
2.3. Sensibilisation,
participation, formation
Dès le début de la démarche entreprise
pour l'élaboration de la Charte de développement de la CCMV, le
bureau d'études choisit de travailler d'abord sur les logiques
d'acteurs, avant d'effectuer un diagnostic pour sous-tendre le projet de
charte. Comme le précise Guy Chatain228(*), « il s'agissait de conduire les communes,
par le recours à des jeux de rôles, à évaluer
ensemble l'impact de l'urbanisation sur l'agriculture et le tourisme, et
à coordonner leur politique ». Ces ateliers participatifs pour
maîtriser la pression urbaine se sont appuyés sur l'utilisation du
logiciel Urbax qui met en scène l'élaboration d'un PLU avec
simulation des actions et conséquences sur les différents types
d'acteurs mobilisés.
Les projections intégrées à la Charte de
développement229(*) ont été travaillées au cours de
trois ateliers avec les élus, les institutionnels et les professionnels
de l'aménagement. Ce travail de mise en situation des élus face
aux scenarii a permis d'appréhender véritablement leur impact
à l'échelle du plateau et de chaque commune : les
décisions adoptées à l'issue de ce processus participatif
(limitation de l'urbanisation, déclassement de zones AU en zone A ou N)
témoignent d'une prise de conscience et d'une volonté
réfléchie de changer en profondeur le modèle
d'aménagement et de développement des Quatre-Montagnes.
Poursuivant sur cette démarche participative -et
même intégrative- des élus dans l'élaboration du
projet de territoire, le Plan d'actions énonce plusieurs besoins en
matière de formation, qui devront être satisfaits à travers
la réalisation des fiches-actions. Les actions de formation sont
récapitulées dans le tableau suivant (fiche-action 1 à
8)230(*).
Plan d'actions CCMV : 3 mesures pour structurer la
démarche de formation des acteurs locaux
|
11. Lancer un appel à candidatures pour organiser une
formation à destination des élus et personnels des mairies sur
les outils de maîtrise foncière
12. Organiser des journées d'échanges entre
élus et opérateurs de l'aménagement et de la
construction
13. Organiser des journées d'échanges sur la
révision des P.L.U, sur l'élaboration des prescriptions
particulières d'aménagement, sur la présentation
d'opérations « pilotes »
|
Figure 26. Démarche
de formation des élus du Vercors, Plan d'actions CCMV 2007
La réalisation de la première mesure a
été confiée au Parc : la formation aurait dû
commencer début 2010, mais elle sera finalement lancée
début 2011, sous la houlette de Guy Chatain. La formation,
proposée et acceptée par les élus, concernera les trois
types d'acteurs qui interviennent sur ces questions de foncier : les
élus, les techniciens et les consultants, s'appuyant sur la
méthode mise en oeuvre pour l'élaboration de la Charte de
développement.
Dans un autre territoire vertacomicorien, la Communauté
des communes du Vercors231(*) sur le canton de La Chapelle-en-Vercors, un
processus participatif a été engagé dans le cadre des
opérations pilotes de la Charte paysagère232(*). Sous forme d'ateliers, deux
objectifs définis lors de l'élaboration de la Charte
paysagère sont poursuivis : « Mieux maîtriser
l'urbanisation future des villages et hameaux ainsi que l'intégration
paysagère et architecturale des nouvelles constructions ». Une
première tranche d'ateliers a été réalisée
en 2008-2009, et une seconde tranche a été définie puis
engagée sur les communes de St Agnan, de La Chapelle et de St Julien en
2010. Ce projet innovant mobilise élus et habitants pour les faire
travailler ensemble, dans le cadre d'ateliers participatifs, sur un
pré-projet d'aménagement. Plus concrètement, ce sont des
groupes d'une vingtaine de personnes, une moitié d'élus et une
moitié d'habitants (dont beaucoup de porteurs de projet), qui ont
été « formés en pratiquant » à
partir de cas concrets, dans l'idée de faire des propositions à
la Communauté des communes qui assurera ensuite la cohérence
à l'échelle du canton.
Partant d'une dimension paysagère, et donc
esthétique voire affective, ce travail participatif mobilise les
élus et les habitants et concoure ainsi à une meilleure
compréhension mutuelle des enjeux liés à la gestion
territoriale. L'approche paysagère permet d'aborder, d'une façon
détournée, les conflits fonciers, les choix d'implantation des
nouvelles constructions, et in fine, la difficulté d'accorder
intérêts particuliers et intérêt
général. C'est dans cette mise en dialogue, à
travers la formation par l'élaboration de pré-projets
d'aménagement, que ces ateliers participatifs renouvellent le dialogue
territorial difficile au sujet du foncier.
Dans ce processus de dialogue, de la sensibilisation à
la formation en passant par la participation, le Parc du Vercors est un
acteur-clé incontournable : l'objectif de faire participer les
acteurs, les partenaires et les habitants, est une dimension forte de son
action sur le territoire du Parc. Ainsi, l'Axe 6 des orientations du PNRV
marque sa volonté « d'impulser les démarches
participatives et [de] renforcer l'implication des territoires et
collectivités du Vercors »233(*) pour la mise en oeuvre, le suivi et
l'évaluation de la Charte du Parc. Il s'agit également de
développer des méthodes participatives, tels que les jeux de
rôles évoqués précédemment. De même,
l'ouverture des Commissions du Parc et groupes de travail aux acteurs
associatifs et socioprofessionnels peut servir à renouveler cette mise
en dialogue du territoire, notamment sur la question foncière.
Enfin, les réflexions de Louis Allie sur le rôle
du PNR du Vercors l'amènent à considérer que
l'éducation des jeunes et la sensibilisation des élus est
peut-être « la voie la plus porteuse afin de maintenir en
vie l'âme du massif [...]. Selon cette idée, les P.N.R.
insuffleraient des valeurs du développement durable dans les
comportements des touristes jusqu'aux conseils municipaux et ce dès le
plus jeune âge. Les plus optimistes considèrent ces actions comme
étant potentiellement rayonnantes à conditions d'expliquer de
manière convaincante les tenants et les aboutissants des enjeux de
développement social et économique et de la préservation
du patrimoine culturel et naturel»234(*). Par ces démarches innovantes de
« participation-formation » qui n'oublient pas la question
foncière, le Parc naturel régional du Vercors contribue à
faire vivre l'idée selon laquelle les Parcs sont des territoires
d'innovation235(*).
3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace dans
Belledonne
3.1. Présentation
générale
Le massif de Belledonne est une chaîne de montagnes qui
s'étend sur 60 km de long et 10 km de large, constituant la bordure sud
et est de la vallée du Grésivaudan. La vallée du
Grésivaudan est quant à elle un axe majeur du Sillon alpin (du
Genevois français au nord, au Valentinois au sud) et draine une
très forte croissance démographique et économique entre
Grenoble et Chambéry. Belledonne est donc sous influence
périurbaine, essentiellement par sa relative proximité à
l'agglomération grenobloise. Néanmoins, il est difficile de
qualifier pleinement ce massif de territoire périurbain car des logiques
d'agriculture de montagne et de tourisme alpin notamment sont encore
très présentes.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo18.png)
D'un point de vue administratif, une partie du massif de
Belledonne, les « balcons », est réunie depuis le
1er janvier 2009 au sein de la Communauté de communes du
Grésivaudan : cette récente intercommunalité
résulte de la fusion de cinq communautés de communes et d'onze
autres communes « isolées » (qui n'étaient
pas membre d'un EPCI), soit un total de 47 communes réunies236(*). Côté
Belledonne, l'ancienne Communauté de communes du balcon de Belledonne
(CCBB) créée en 1993 regroupait alors les dix communes de la
partie sud des balcons : limitée au nord par la commune de Laval,
et au sud par Vaulnaveys-le-Haut. Cependant, la fusion au sein de la nouvelle
intercommunalité n'a pas permis l'intégration de toutes les
communes des balcons de Belledonne : en 2010, Venon a
intégré La Métro (agglomération grenobloise), et
Vaulnaveys-le-Haut la Communauté de communes du Sud Grenoblois.
Source : AURG, Avril 2002
D'un point de vue purement géographique, l'analyse du
massif de Belledonne indique une unité territoriale qui ne correspond
pas vraiment au découpage administratif existant.
On pourrait ainsi imaginer une intercommunalité des
balcons de Belledonne Sud, qui regrouperait les seize communes suivantes, du
nord au sud : Laval, Saint-Agnès, Saint-Mury-Monteymond, La Combe
de Lancey, Saint-Jean-Le-Vieux, Revel, Saint-Martin-d'Uriage, Chamrousse,
Vaulnaveys-le-Haut, Vaulnaveys-le-Bas, Herbeys, Brié-et-Angonnes,
Bresson, Jarrie, Champagnier, Montchaboud.
Le retour à la réalité du
découpage administratif est d'autant plus intéressant qu'il
reflète un décalage dans le temps entre Belledonne Sud (dont les
communes les plus au sud font partie de l'intercommunalité du Sud
Grenoblois ou de La Métro), et Belledonne centre et nord (dont les
communes sont réunies au sein de l'intercommunalité du
Grésivaudan). Ce décalage dans le temps concerne des logiques
territoriales liées à la périurbanisation rayonnante de
l'agglomération grenobloise. Cette influence urbaine s'étend
progressivement aux balcons de Belledonne, du sud vers le nord : c'est
ainsi que les communes de l'extrémité sud du massif sont
déjà des territoires périurbains, subissant dès la
fin des années 1990, les tensions foncières
caractéristiques d'un espace attractif de coteaux. Dans une perspective
de gestion de l'espace économe en foncier ou encore du maintien de
paysages patrimoniaux, pour Belledonne Sud « c'est quasiment trop
tard, ce n'est plus là que tout se joue car le pire est
passé »237(*). L'enjeu d'aujourd'hui semble donc porté sur
la partie centre et nord du massif où s'affirme un enjeu majeur :
la « disparition » du foncier agricole.
Lorsque l'on aborde la problématique foncière
sur ce territoire, le maintien de l'agriculture de Belledonne s'affirme comme
la problématique première du massif : de là
découlent les questions du mitage de l'espace sous la pression urbaine
de la vallée du Grésivaudan et de la cuvette grenobloise, de la
concurrence entre usages de sols et de la fermeture des paysages en raison de
l'enfrichement238(*).
De plus, c'est sous l'action de deux phénomènes
intimement liés que la surface agricole recule ; ils structurent la
réflexion sur la gestion de l'espace au sein du massif. D'une part,
l'urbanisation des terres agricoles plates traduit le processus de mitage
à l'oeuvre (responsable à 25% de la perte de terres agricoles),
et d'autre part, l'enfrichement de la pente conduit à la fermeture des
paysages d'alpages, synonyme d'uniformisation (l'avancée de la
forêt constitue les 75% restants). Cet enfrichement résulte peu du
déclin du pastoralisme mais plutôt de l'urbanisation des surfaces
agricoles mécanisables, et donc plates, comme le résume
l'illustration suivante proposée par l'Association pour le
Développement de l'Agriculture de Belledonne,
« l'ADABEL »239(*).
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo19.png)
Figure 27. Interdépendance
vallée-versant, ADABEL 2009
Cette interdépendance de la parcelle en pente avec la
parcelle plane est peut-être exemplaire de la précarité de
l'agriculture dans Belledonne : à cela s'ajoute un foncier
très morcelé, avec des exploitations restées modestes. De
plus, le développement des espaces résidentiels s'effectue au
détriment de la superficie des espaces agricoles : une agriculture
qui, au fil du temps, occupe de moins en moins d'espace et d'hommes.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo20.png)
Figure 28. Evolution de
l'agriculture de Belledonne, ADABEL 2009
Ce tableau offre une perspective historique du déclin
de l'agriculture de Belledonne : durant la période de 1979 à
1988, c'est en moyenne 66 ha par an « perdu » pour
l'agriculture, puis la seconde période, de 1988 à 2000, où
la consommation d'espace agricole dans Belledonne a presque doublée
passant à 113 ha par an, et enfin, la dernière période
montre un ralentissement de la consommation d'espace agricole, ramenée
à 84 ha en moyenne par an, pourtant loin d'être stoppée
sans l'adoption d'un changement de cap radical.
Ainsi, sous le spectre de devenir définitivement des
« communes-dortoirs », le maintien du multi-usage de
l'espace alpin sous influence urbaine est un enjeu fort du massif de
Belledonne. Comme ses deux voisins, le Vercors et la Chartreuse, Belledonne
subit de profondes transformations par l'arrivée de nouveaux habitants
qui viennent trouver un cadre de vie bucolique -au moins dans leur imaginaire-
réalisant l'idéal de vivre à la campagne-montagne et de
travailler en ville, dans la vallée. L'intercommunalité du
Grésivaudan réunie ainsi les communes des balcons de Belledonne
et leurs semblables de l'autre côté de la vallée, les
communes du Plateau des Petites Roches sur le balcon de Chartreuse.
Deux organismes jouent un rôle clé pour aborder
les questions de gestion de l'espace sur Belledonne. Tout d'abord,
l'association Espace Belledonne, créée en 1998, rassemble 33
communes (19 des balcons isérois de Belledonne puis 14 communes
savoyardes du massif) sous une instance fédératrice souple afin
de permettre un travail collectif à cette nouvelle échelle. Ce
territoire élargi a été choisi pour constitué un
Groupement d'Action Locale -GAL- qui a mis en oeuvre entre 2000 et 2006 le
programme Leader+, puis sur la période 2007-2013 un programme Leader
intitulé « La coopération, pour une démarche
qualité commune de nos territoires ». Enfin, l'ADABEL est une
association qui regroupe des agriculteurs, élus locaux, partenaires
socioprofessionnels et autres citoyens qui sont impliqués dans le
développement agricole sur vingt-deux communes du massif. Axée
sur les questions agricoles, l'ADABEL défend depuis 1985 une gestion de
l'espace qui assure la pérennité de l'activité agricole
dans Belledonne : la sensibilisation a toujours été une
orientation forte de son travail de terrain. L'association a identifié
six axes d'action pour agir sur le foncier dans Belledonne :
1. modification des pratiques de pâturage pour lutter
contre la friche,
2. réorganisations du parcellaire agricole pour
faciliter l'accès et l'entretien des parcelles,
3. création d'une Association Foncière Pastorale
(en relation avec l'ADASEA240(*)),
4. favoriser la création d'exploitation
(création ou reprise d'activité),
5. responsabiliser les propriétaires et faire appliquer
la loi (mesures « terres incultes » notamment),
6. création d'Unités d'Habitations Nouvelles sur
des zones délaissées par l'agriculture.
Sur le massif de Belledonne, les préoccupations en
matière de gestion de l'espace semblent dessiner un tournant dans la
stratégie adoptée jusqu'ici. Plutôt tournés vers la
sensibilisation et la médiation depuis plusieurs années, les
démarches s'orientent peut-être aujourd'hui vers d'autres pistes
de solutions pour tenter de maîtriser l'usage des sols et garantir ainsi
le maintien de l'activité agricole : intégré au
périmètre de la région urbaine grenobloise, le territoire
pourrait bien « bénéficier » des mesures
imposées règlementairement par le futur SCOT.
Ce terrain d'études permet ainsi d'identifier les
principaux freins à la mise en oeuvre d'actions concrètes en
faveur d'une gestion économe du foncier, assurant le multi-usage de
l'espace alpin sur un territoire soumis à de fortes pressions urbaines.
En outre, il s'agit d'interroger cette difficulté récurrente dans
le passage à l'action, malgré les efforts qui sont parfois
portés depuis longtemps.
3.2. Des efforts portés
sur la sensibilisation et l'animation territoriale
3.2.1. Sensibiliser les
élus et les habitants
Si aujourd'hui la prise de conscience d'une gestion
raisonnée de l'espace, protectrice des terres agricoles, est quasiment
acquise sur Belledonne, c'est probablement grâce aux nombreuses
démarches de sensibilisation menées depuis plusieurs
années. Ici, l'effort s'est concentré sur la volonté de
faire changer les mentalités, celles des élus en premier lieu. Et
puisque les habitants, la société civile d'une façon plus
globale, est aussi potentiellement un propriétaire foncier, la
sensibilisation ne s'est pas cloisonnée aux élus ou aux acteurs
institutionnels mais s'est adressée aux habitants de Belledonne. Dans le
cadre du programme Leader+ de 2000-2006 sur le thème « la
valorisation des ressources naturelles et culturelles », de
premières initiatives dont la pertinence a été ensuite
reconnue, ont pu être lancées.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo21.png)
Source : ADABEL, 2001
Dès 2001, l'ADABEL met en place un processus de
concertation aboutissant à la rédaction d'une charte
« Bien vivre en Belledonne ». Devant l'augmentation des
conflits d'usage, l'incompréhension mutuelle, et la
méconnaissance de l'agriculture, un groupe de travail est
constitué pour élaborer ensemble une liste
« d'actions-citoyennes » afin de réduire les
conflits et mieux vivre dans Belledonne. Rassemblant des agriculteurs, des
habitants, des chasseurs, des pêcheurs, des bergers, les Offices de
Tourisme, des usagers et la Fédération de randonnée, un
large espace de dialogue a pu s'ouvrir. A l'origine seuls les nouveaux
résidents étaient visés, mais le sujet s'est vite
élargi, des enquêtes auprès des élus et des parents
d'élèves ont été réalisées, et la
charte a finalement été diffusée très largement,
chez tous les habitants des 22 communes participantes.
Cependant, la Charte n'était pas une fin en soi :
elle a permis d'impulser une large concertation mais la mise en oeuvre des
principes définis aurait nécessité un travail d'animation
important et continu, déterminé par la volonté politique
et les moyens consacrés241(*).
La sensibilisation se poursuit plus précisément
sur la question de la gestion de l'espace face à l'avancée de la
friche sur les terres agricoles non entretenues. Un Guide méthodologique
« Agir contre la fermeture de l'espace » à
destination des élus va ainsi être réalisé en 2003
par l'ADABEL à la demande de l'Espace Belledonne. Cette sensibilisation
se fait plus « opérationnelle » et souhaite servir
d'appui à la conception, à la planification et à la mise
en place d'actions concertées de lutte contre la friche et l'extension
des boisements en Belledonne.
Enfin, l'enjeu de l'urbanisation du massif est abordé
à travers la brochure pédagogique « Habiter et
construire en Belledonne » distribuée systématiquement
aux personnes venant retirer un dossier de demande de permis de construire. La
réflexion est menée à l'échelle de l'unité
paysagère de la maison, en passant par le hameau et la parcelle. De
plus, c'était aussi la première fois que les dix-neuf communes
iséroises de l'Espace Belledonne portaient un même discours sur
l'urbanisation du massif. Le CAUE de l'Isère242(*) associé à un
bureau d'étude, a mis en place un plan d'action de qualité
architecturale et paysagère, et ce processus s'est accompagné
d'un travail de sensibilisation des élus, en partenariat avec la DDE et
le CAUE.
D'autres démarches de sensibilisation et de
pédagogie ont été initiées sur Belledonne, et c'est
sans doute par l'accumulation de ces efforts que la prise de conscience a pu
aboutir à ce qu'elle est aujourd'hui. Cette stratégie a permis de
répondre aux nombreuses interrogations et inquiétudes qui
pesaient sur la gestion de l'espace, auprès des élus, des
institutionnels mais également des habitants ou des agriculteurs.
Aujourd'hui, la Communauté de communes du Grésivaudan relance sa
Charte paysagère et urbanistique qui devrait également impulser
une nouvelle dynamique de sensibilisation sur les balcons de Belledonne.
Ce volet de sensibilisation-pédagogie apparait être un
préalable incontournable à toutes actions territoriales et semble
faire l'unanimité.
En lien avec l'Association Régionale de
Développement de l'Emploi Agricole et Rural, et l'association Terre de
Liens, la Communauté de communes du Sud Grenoblois se tourne elle aussi
vers « la pédagogie auprès des élus ».
Progressivement, la gestion des espaces sous pression urbaine et la
maîtrise du foncier deviennent des sujets que la société
civile s'approprie publiquement. En organisant de nombreuses réunions
avec des propriétaires, sur les enjeux fonciers de Belledonne, les
devoirs de chacun, les projets qui peuvent émerger, l'ADABEL diffuse les
principes qu'elle défend. Par cette démarche de sensibilisation,
longue, régulière et parfois laborieuse, la
société civile devient un nouvel acteur sur la scène du
foncier ; en faisant circuler l'information, cet acteur diffuse
ainsi une sensibilisation à la gestion économe de l'espace.
Finalement, se tourner vers le grand public, vers les habitants, c'est
peut-être opérer un changement stratégique.
Toutefois, il n'est pas question de faire sans les
élus : « on ne peut pas faire sans les élus, c'est
la donnée de base » indique Sophie Gouin, l'animatrice de
l'Espace Belledonne243(*). Si tout est donc question de sensibilisation, il
faut néanmoins sortir les élus de leur cadre communal : en
montrant la dynamique à l'échelle du massif, la sensibilisation
des élus permet d'amener à la réflexion territoriale, et
c'est bien là tout l'enjeu. Ainsi, un travail sur l'harmonisation des
documents d'urbanisme des communes de Belledonne permet de formuler
collectivement la question suivante : « comment travailler
ensemble ? ». Car si les mentalités des élus ont
presque toutes évolué, les communes n'ont pas forcément
les mêmes objectifs pour passer à l'action.
3.2.2. Entre animation et
accompagnement
Cette seconde étape découle avant tout de la
première : les acteurs sensibilisés sont potentiellement
prêt à entrer dans une démarche de projet, mais pour cela,
l'animation et l'accompagnement sont indispensables. Sur le territoire de
Belledonne, de nombreux « petits » projets ont pu
être porté grâce à cette stratégie
portée par l'Espace Belledonne et l'ADABEL.
Par exemple, l'ADABEL travaille avec les collectivités
et les exploitants agricoles pour élaborer une stratégie en
faveur de la transmission des exploitations sur Belledonne. L'accompagnement
réalisé par l'ADABEL a initié la création de
Comités Locaux d'Installation (CLI) en 2008. Ces CLI mobilisent des
élus et des agriculteurs qui s'organisent dans une démarche de
veille foncière, de diffusion de l'information, voire de
médiation avec les propriétaires. L'objectif est d'essayer
d'anticiper les mouvements fonciers, en amont de la vente. Le rôle
d'animateur de l'ADABEL a permis d'organiser le fonctionnement de ces CLI, de
favoriser leur mise en place, et l'association a également accompagner
les communes afin qu'au sein de chacune, il y ait une personne chargée
d'assurer cette veille foncière sur toutes les notifications de vente.
La stratégie adoptée vise donc à accompagner les
différents acteurs, élus, agriculteurs, candidats à
l'installation, ou encore habitants, à se saisir des outils existants,
à les aider dans l'élaboration d'un projet cohérent et
concerté de gestion de l'espace et du foncier.
L'ADABEL a d'autant plus un rôle stratégique que
sous la pression foncière, la question de l'adaptation de l'agriculture
à un nouveau contexte se pose. Ici, l'accompagnement permet d'opter pour
une stratégie de spécialisation avec des produits du terroir, la
vente directe, le bio, en somme, des projets innovants avec beaucoup de jeunes
et de néo-agriculteurs sur un foncier précaire244(*). La pluriactivité, la
transformation et la commercialisation à la ferme, sont autant de
démarches de qualité soutenues par l'association245(*). Par ces actions d'animation
de groupe de travail ou d'accompagnement de projet, la dynamique territoriale
est bien présente, le territoire de Belledonne demeure attractif
même si le coût du foncier reste assez sclérosant.
Cependant, si la dynamique est présente, elle serait
nettement réduite sans les missions d'animation et d'accompagnement
assurées par différents organismes : « si l'on
attend que les communes nous sollicitent, concrètement il ne se passera
rien sur le foncier »246(*). L'animation permet en réalité de
créer du projet, parfois ex nihilo, l'accompagnement vient donc
ensuite. C'est au final un procédé en trois étapes qui
succède à la phase de sensibilisation : chercher sur les
communes les projets éventuels, accompagner les porteurs (élus ou
individus) dans la définition du projet, et enfin, les aider
jusqu'à la mise en oeuvre. Aujourd'hui, l'ADABEL est au début de
cette démarche et de premières communes ont été
visitées : de premières perspectives de projet ont
déjà été identifiées, par exemple sur la
commune de Saint-Martin-d'Uriage, un recensement de tous les exploitants est
envisagé dans la perspective d'un échange parcellaire. Beaucoup
de petits projets, en général sur des petites parcelles,
bénéficient de cette aide, mais la question des moyens humains
alloués à la démarche d'accompagnement est
posée.
Parmi les outils de gestion foncière ou de veille
foncière sur Belledonne, on peut aussi citer la création de deux
nouvelles Associations Foncières Pastorales (AFP), la mise en place
d'une veille foncière en partenariat avec la SAFER ainsi qu'un
répertoire des cédants potentiels de terres agricoles
réalisé par l'ADASEA sur la partie sud de Belledonne (membre de
l'intercommunalité du Sud Grenoblois). De plus, l'ADABEL assure le suivi
des procédures de PLU et l'expérimentation d'une démarche
sur une commune volontaire dans le cadre de l'arrêt des Programmes
d'Entretien des Zones Menacées d'Abandon (PEZMA) fin 2010247(*). Enfin, au sein de la
Communauté de communes du Grésivaudan, une réflexion est
menée sur la création d'un Etablissement Public Foncier Local ou
l'adhésion à l'EPFL grenoblois. L'acquisition foncière,
quasiment impossible par les petites communes de Belledonne, reste un moyen
direct mais lourd pour maîtriser son foncier.
En revanche, si le diagnostic s'affine progressivement
grâce aux missions d'animation et d'accompagnement, la plupart
des collectivités sont encore dans l'incapacité de sortir du
« rôle de gendarme », en réaction à un
phénomène et non en anticipation de celui-ci. Face
à l'urbanisation, il apparaît nécessaire d'anticiper,
d'être dans une posture proactive. Pour la pérennité de
l'activité agricole sur le massif, il s'agit de rassurer les
agriculteurs encore en activité face aux
agriculteurs-propriétaires qui anticipent le changement d'usage de leurs
parcelles et à la tradition des baux oraux qui précarisent
l'activité mais permet une vente aisée au cas où la
parcelle devenait constructible.
L'accompagnement des projets qui permettent d'assurer le
multi-usage du territoire alpin est d'autant plus coûteux en
énergie qu'il n'est pas un gage de réussite du projet. Par
exemple, l'ADABEL essaie, parfois en vain, de trouver des terres pour de jeunes
agriculteurs (car la demande d'installation est extrêmement forte).
Ainsi, un projet de chèvrerie bio à Revel a pu aboutir
grâce à la mobilisation de plusieurs acteurs, mais l'obstacle du
foncier n'a pu être franchi ; c'est donc une chèvrerie
« hors-sol » dépourvue de terres pour faire
pâturer les chèvres qui a ouverte.
En somme, la sensibilisation et les démarches
d'animation ou d'accompagnement de projets participent fortement à la
prise de conscience générale des problèmes fonciers sur
Belledonne, mais le passage à l'action reste difficile. La
volonté de mise en oeuvre concrète d'un projet de gestion de
l'espace ou de maîtrise du foncier est bien moins évidente et tout
semble dépendre de la politique de chaque commune. Si certaines communes
sont volontaristes en la matière, la commune de Saint-Martin-d'Uriage a
ainsi « rendu » 100 hectares à l'agriculture, a
contrario, d'autres élus du massif ne sont pas du tout réceptifs.
Dans une certaine mesure, la stratégie
« sensibilisation-animation-accompagnement » au service de
la maîtrise foncière reste limitée et « tant que
les communes n'ont pas définis leur politique, cela ne pourra pas aller
plus loin »248(*). Une autre démarche plus lourde, plus
difficile et plus risquée politiquement fédère pourtant
les acteurs soucieux du développement équilibré de
Belledonne : « il faudrait plutôt réussir à
anticiper, à construire une vraie politique foncière qui permette
de trouver et de proposer de nouveaux projets dans une cohérence globale
à l'échelle du territoire »249(*).
3.3. Des
« UHN » aux « limites intangibles », le
tournant du SCOT ?
L'initiative des Unités d'Habitations Nouvelles (UHN)
sur Belledonne opte pour une démarche orientée vers le projet
d'aménagement lui-même, à l'échelle de la commune.
La volonté de passer à l'opérationnalité de la
lutte contre la friche est ici prépondérante. Cependant, la
révision du Schéma Directeur en SCOT de la Région Urbaine
Grenobloise offre une autre perspective d'action pour préserver les
terres agricoles de Belledonne et les soustraire à la pression
foncière : la réflexion ainsi menée
révèle aussi les potentiels effets pervers de l'inscription d'UHN
au sein du futur SCOT.
3.3.1. Le Projet
d'Unités d'Habitations Nouvelles (UHN)
Partant du constat selon lequel les espaces agricoles sont les
seuls réserves foncières utilisées pour permettre la
croissance urbaine, l'ADABEL propose de trouver un nouvel équilibre pour
mieux répartir la pression foncière sur différents types
d'espace. Par ailleurs, on constate que sur le massif, des surfaces importantes
ont été délaissées par l'agriculture depuis plus de
trente ans. L'avancée de la friche et des boisements porte alors
atteinte aux terres agricoles mais aussi à la capacité de
construire. Profitant du soutien financier du Leader+ sur Belledonne, l'ADABEL
entame une réflexion sur des formes d'urbanisation alternatives, les
« Unités d'Habitations Nouvelles »: l'idée
est d'implanter de nouvelles constructions en hameau dans la pente, quitte
à défricher ou déboiser certains espaces, dans le but de
préserver les terres agricoles stratégiques sur terrain plat.
Dans cette perspective, « les collectivités locales sont les
acteurs clefs pour construire en lisière de forêt et
préserver les terres agricoles »250(*). Il s'agit aussi de prendre
le contre-pied suivant : « Alors que les espaces agricoles,
forestiers et naturels sont régulièrement associés dans
les textes législatifs, ils n'ont absolument pas le même
rôle face au développement des activités consommatrices
d'espace. A ce jour, seules les surfaces agricoles sont mises à
contribution, cette situation ne doit pas perdurer »251(*).
La création de ce nouvel outil d'aménagement
profite du cadre règlementaire modifié par la Loi Urbanisme et
Habitat de 2003 : l'article L 145-3 du Code de l'Urbanisme autorise
dorénavant, sous certaines conditions, la réalisation de
constructions en dehors des zones déjà urbanisées de la
commune, sur des terrains à vocation pastorale, agricole ou
forestière. C'est notamment le cas quand le maintien des terres
nécessaires aux activités agricoles et forestières [...]
impose une urbanisation en discontinuité des hameaux252(*). En fait, cette
disposition existait déjà au sein de la Loi Montagne de 1985
-« création de hameaux nouveaux »- ou encore au sein
de la Loi SRU de 2000 : « la construction de zones urbaines
nouvelles en discontinuité, à condition que cette
discontinuité soit nécessaire à une meilleure
préservation des terres agricoles et des espaces naturels ».
L'originalité et l'intelligence de cet outil UHN est de permettre la
mise en oeuvre de principes édictés dans la loi mais qui
n'avaient jusqu'ici pas été décliné. Ici, le cadre
normatif n'était pas restrictif, au contraire, il offrait la
possibilité d'être décliné localement :
avec les UHN, l'ADABEL a construit une intelligibilité mais
surtout une utilité au cadre normatif, au service des enjeux du
territoire de Belledonne.
Seulement, les UHN sont restées au stade de projet. Par
exemple à Saint-Mury-Monteymond (10,84 km², 344 habitants au
recensement 2006) en 2006, des projets d'UHN ont été
portés jusqu'au Conseil municipal, mais lors du vote, il a manqué
une voix pour que les projets soient approuvés. Les études
lancées également sur Laval et Saint-Pierre-d'Allevard n'ont pas
abouti, et à chaque fois « les élus ont eu
peur »253(*).
Pourtant, dans la partie nord du massif de Belledonne, « la
vallée du Haut-Bréda est tellement envahie par l'avancée
de la forêt qu'il n'y a même plus de place pour construire des
maisons : l'enjeu là-bas c'est déjà de
défricher pour construire »254(*).
En 2008, le Pays du Grésivaudan propose de relancer
l'idée des UHN dans le cadre de la charte paysagère urbanistique
et architecturale du Pays du Grésivaudan, le projet s'intitule
alors : « Extension choisie du paysage bâti dans le cadre
d'une approche environnementale, paysagère et urbanistique : un projet
de nouveau hameau ». Ce dernier n'aborde toutefois pas le
préalable d'une contrepartie agricole à l'urbanisation, et
l'ADABEL rappelle que « la construction d'UHN doit être
accompagnée de la préservation de façon durable d'espaces
agricoles à fort potentiel »255(*). Le Pays se justifie en indiquant alors qu'il n'est
pas possible d'imposer aux maires du Pays cette contrepartie agricole de
manière règlementaire. Depuis, aucun projet d'UHN n'est en cours
ni à l'étude.
Aujourd'hui, le territoire de Belledonne s'inscrit dans la
dynamique de révision du Schéma Directeur en SCOT de la
Région Urbaine Grenobloise. L'ADABEL a été
sollicitée au sujet des UHN afin d'étudier l'intégration
de cette démarche au futur document. Après réflexion, il a
été décidé de ne pas porter cette idée d'UHN
à l'échelle du SCOT car le zonage actuel U (urbanisable) et AU
(à urbaniser) est déjà suffisamment important pour
contenir la croissance urbaine à venir. En effet, le diagnostic
réalisé256(*) indique que dans les périmètres
urbains actuels (PLU et Schéma Directeur), et au rythme de croissance
actuel (130ha/an pour l'habitat) des réserves sont constituées
pour soixante ans dans les PLU, et pour quinze ans dans les marges du
Schéma Directeur : « le risque que comporte les UHN,
c'est d'ouvrir des zones à l'urbanisation, là où il n'y en
aurait pas eu »257(*). Puisqu'à l'échelle du SCOT les
réserves foncières actuelles sont assez importantes, nul besoin
d'ouvrir des espaces à l'urbanisation en discontinuité des zones
urbanisées existantes : autant urbaniser d'abord les zones U puis
AU, au fur et à mesure des besoins. Pour une fois, cet outil
d'aménagement, l'UHN, ne semble trouver sa pertinence qu'à
l'échelle communale, au service d'un projet local et précis.
3.3.2. Le SCOT de la RUG et
ses « limites intangibles »
Le futur SCOT contient des prescriptions pour valoriser et
préserver les espaces naturels et agricoles (zonage N et A) sur le long
terme, à l'horizon 2030. Ainsi, une carte indiquera
précisément les limites maximales intangibles du
développement urbain sur tout le périmètre du SCOT
(nouveauté des SCOT « Grenelle »). Ce sont donc sur
ces futures « limites intangibles » de l'urbanisation du
massif de Belledonne que l'ADABEL a préféré concentrer ses
efforts.
Dans ce nouveau contexte, la maîtrise du foncier
agricole du territoire de Belledonne peut s'appuyer sur ces limites intangibles
afin d'asseoir l'usage des parcelles stratégiques pour l'agriculture qui
sont soumises aux pressions de l'urbanisation. Pour l'ADABEL, il s'agit de
ramener ces limites intangibles au plus près de l'urbanisation actuelle,
afin d'assurer une superficie agricole la plus grande possible sur des terrains
plats. Le lobbying est ici la stratégie à adopter pour que ce
SCOT encadre fortement la consommation des terres agricoles. Les limites
fixées doivent reprendre au moins toutes les zones N et A des POS et
PLU, et de façon optimale ou idéale, reprendre des zones
classées AU qui sont véritablement stratégiques pour
l`agriculture, ce qu'a identifié l'ADABEL par ailleurs. De la même
manière, l'intercommunalité du Sud Grenoblois a lancé une
étude foncière réalisée par l'ADAYG sur les
secteurs à enjeux stratégiques sur son territoire. Ainsi,
la révision du SCOT peut se comprendre comme une occasion
inédite de poser des limites intangibles pour préserver les
terres agricoles et ce, à une échelle intercommunale
élargie, celle du bassin de vie, autrement plus pertinente que
l'échelle communale.
Les prescriptions du SCOT seront inscrites d'ici la fin 2010
dans son Document d'Orientations et d'Objectifs (DOO) qui dispose d'une valeur
règlementaire : ses prescriptions s'imposeront donc à tous
les documents d'urbanisme dits « de rang inférieur »
(PLU, PLH, PDU, schéma commercial...) qui devront lui être
compatible. Ainsi, la carte des limites intangibles de l'urbanisation imposera
aux PLU de définir la position exacte de ces limites qui deviendront
alors intangibles (sauf décision prise à l'échelle de la
RUG). Si ces limites ne sont pas définies par le PLU communal dans les
trois ans qui suivent l'adoption du SCOT (donc d'ici fin 2013 a
priori), ce sont les limites actuelles qui deviendront intangibles.
De plus, le SCOT prescrit aussi de diviser par deux la
consommation d'espaces urbains non bâtis dédiés à
l'habitat et aux services urbains : pour chaque secteur a donc
été fixé un seuil de consommation annuel qui est de
15ha/an sur Belledonne (chiffres de novembre 2009). Toujours dans cet
état d'esprit de limiter au maximum l'étalement urbain et la
périurbanisation, des règles limitant la consommation d'espace
par logement ont également été fixées : pour
l'habitat individuel, il s'agit de 500m² par logement maximum (chiffre
calculé sur l'ensemble des logements individuels réalisés
durant l'année dans une commune). Cet automne 2010 devrait être
proposée aux communes une méthodologie pour travailler à
la question de ces limites intangibles : une méthodologie qui
serait retravaillée pour chaque territoire de la région
grenobloise.
Si le futur SCOT de la région grenobloise est une
nouvelle opportunité pour la gestion de l'espace sur Belledonne, il n'en
demeure pas moins que revenir sur le classement de parcelles AU non
urbanisées (et encore plus pour une parcelle U non urbanisée)
n'est pas aisé. A cette échelle, la démarche a des chances
d'aboutir alors que cela est quasiment impossible à l'échelle
communale, c'est ainsi qu'il est porteur d'un certain espoir. Le SCOT
permet d'éloigner le centre de décision, du Conseil
municipal vers le Conseil communautaire.
Le zonage proposé par le SCOT n'engage pas directement
la responsabilité des maires. « Il y a des maires
volontaristes, qui sont très clairs et cohérents sur ce qu'ils
veulent, et il y en a d'autres qui sont plus sensibles aux demandes
individuelles : c'est là qu'il faut être le plus
vigilent »258(*). On en revient dès lors au problème de
fond du foncier dans ces territoires, le prix. Faire avec l'état actuel
du marché foncier amène ainsi à opposer frontalement les
intérêts particuliers à l'intérêt
général. Maintenir le collectif, c'est cela qui demande le plus
d'énergie et une stratégie de sensibilisation et d'animation sur
un temps long. Avec un zonage fort qui pose des limites intangibles sur le long
terme, la réversibilité des documents d'urbanisme locaux est
évitée, et même si les élus ont souvent de
très bonnes intentions c'est au moment de déterminer les
parcelles qui resteront agricoles que les impératifs de
« démocratie participative » sont parfois
brandis259(*).
Aujourd'hui, « au-delà des intentions, il
faut arriver à trouver des élus qui sont près à se
faire des ennemis pour défendre l'intérêt
collectif »260(*). De nombreuses exemples illustrent ce constat et sur
Belledonne, c'est l'exemple de la ferme communale de La Chapelle du Bard :
à l'époque, une hostilité féroce s'était
manifestée et les élus locaux n'avaient bien entendu pas
été réélu, mais sous la menace ils avaient fait
naître ce projet dont aujourd'hui l'utilité et la pertinence font
l'unanimité...261(*)
Enfin, si l'on peut parler d'un tournant opéré
par le SCOT dans la stratégie de gestion de l'espace sur Belledonne,
c'est essentiellement grâce à la portée
règlementaire et contraignante d'un tel document. De fait, quand les
cadres ne sont pas « règlementaires » ou
« opposables », la pratique de terrain semble montrer que
leurs bons principes passent par la sensibilisation, l'animation ou
l'accompagnement réalisés à l'échelle locale ;
le cadre est alors subsidiaire.
Si le cadre normatif doit jouer son rôle, il
s'avère peut-être que ce soit plutôt à
l'échelle d'un SCOT, puisque dans un PLU, on s'appuiera
directement sur celui-ci et pas sur d'autres cadres normatifs, ni Convention
alpine ni DTA des Alpes du Nord : le PLU ne multipliera pas les
références. D'après plusieurs acteurs locaux, si ces
cadres peuvent devenir « parlants », c'est par leur
transcription au sein des SCOT, pour inclure les spécificités de
la montagne par exemple. La traduction opérationnelle de ce type de
cadres normatifs est donc surement à construire à cette
échelle de l'intercommunalité.
3.4. Le problème
récurrent du financement
La dernière dimension offerte par ce terrain
d'études sur Belledonne est le problème du financement des
actions. En effet, ni sur Chamonix ni sur le Vercors cette question a
semblé poser véritablement problème, alors que sur le
massif de Belledonne, le financement apparait comme un obstacle
récurrent.
3.4.1. Financer une mission
d'ingénierie à destination des élus
Avec le programme Leader 2007-2013, l'Espace Belledonne
souhaite porter à l'échelle du massif de Belledonne l'objectif de
« maîtriser les mutations du territoire placé sous
influence périurbaine, par la mise en oeuvre d'une démarche
qualité territoriale »262(*). Mais d'après l'animatrice du
programme263(*), pour
passer à la mise en oeuvre il faudrait activer d'autres financements car
les dispositifs du FEADER264(*) ne permettent pas de financer une
« mission d'ingénierie à destination des
élus ». Ce qui semble poser problème c'est le public
ciblé par cette mesure, les élus. Si l'Espace Belledonne a choisi
de renforcer sa stratégie d'accompagnement des élus, le cadre
règlementaire européen n'est dans ce cas pas adapté aux
besoins exprimés par ce territoire. En attendant de trouver une autre
solution, la mise en oeuvre de cette mission d'ingénierie est
reportée.
Si la sensibilisation est un préalable, le financement
de la mise en oeuvre et donc l'accompagnement du projet est indispensable. Les
actions sont pour l'instant en attente mais « quand l'outil financier
sera là, cela redémarrera tout seul »265(*). L'espace Belledonne apporte
ainsi la majeure partie, si ce n'est l'intégralité des
financements pour la réalisation d'actions sur le massif. Toutefois on
peut comprendre les limites qui sont imposées par le FEADER car il est
du devoir légal des municipalités d'assurer et d'assumer les
compétences dont elles disposent. Si l'Espace Belledonne, par un
accompagnement renforcé auprès des communes, souhaite voir la
réalisation (facilité et plus rapide) de projets concrets sur le
massif en faveur d'une gestion raisonnée de l'espace, dans
quelle mesure permet-elle aux municipalités de se soustraire de leurs
obligations ? Le fait de mobiliser des financements
extérieurs au territoire (l'Europe) révèle le point faible
de cette stratégie : ce qui pose problème ce n'est pas cette
« stratégie de l'accompagnement » en
elle-même, mais c'est plutôt par qui est-elle
financée ? Il semble logique que si les communes ont besoin
d'être accompagnées pour réaliser pleinement leurs
obligations, elles sont censés affecter le financement correspondant. En
matière de gestion foncière aussi les moyens financiers et
humains locaux ne sont pas à la hauteur des enjeux auxquels doivent
faire face les communes de Belledonne. Et pourtant, le besoin en accompagnement
semble unanime266(*) :
ü « Ce n'est pas forcément la
volonté politique qui manque mais plutôt le manque de moyen en
ingénierie, en animation et pour l'accompagnement des
élus »
ü « Ce dont on a besoin c'est "simplement" de
l'animation et de l'accompagnement »
ü « Les outils sont déjà
nombreux, mais c'est l'action au cas par cas il est la plus
pertinente »
D'après l'ADABEL267(*), aujourd'hui il existe peu de financement sur ces
questions d'animation foncière : ce sont les projets
eux-mêmes qui mobilisent les aides, bien qu'il faille en amont de
l'animation pour les susciter. Le projet Foncimalp piloté par le
Suaci268(*) permet de
dégager du temps sur cette question, mais peu d'aides s'attachent
à faire émerger les projets (a priori ni le Leader ni le
CDRA le permettent). Pour la lutte contre la friche, l'ADABEL a réussi
à négocier des budgets qui seront alloués aux communes
pour réaliser des actions concrètes dans le cadre de
l'après-PEZMA. De cette manière, chaque commune pourra
gérer une enveloppe financière allouée à la gestion
de l'espace, et mettre ainsi en place les actions les plus pertinentes suivant
le contexte local. En résumé, en matière de financement,
les acteurs locaux partagent ce sentiment : « on n'a pas les
moyens d'un Parc »269(*).
3.4.2. Le projet de PNR de
Belledonne
Le projet de Parc Naturel Régional de Belledonne est
intéressant au-delà du fait qu'il permettrait d'apporter des
moyens financiers supplémentaires pour travailler sur cette question de
l'animation foncière, ce qui n'a toutefois pas manqué
d'être évoqué par les acteurs locaux.
Promu « territoire remarquable de montagne » en
février 2009 par la région Rhône-Alpes, le massif de
Belledonne pourrait constituer un Parc comparable, en superficie, à
celui de la Chartreuse : il rassemblerait un total de 54 communes (dont 27
iséroises et 27 savoyardes), s'étendant de Vaulnaveys-le-Bas
à Le Pontet. Fortement mobilisée sur le projet, l'Espace
Belledonne avait profité de son Assemblée Générale
le 18 juin 2009 pour organiser un débat autour de la question suivante :
« L'avenir de l'Espace Belledonne : quels outils pour construire un
projet de territoire partagé et durable ? » Bien sur, la
question de fond était celle du Parc comme outil adapté ou non
pour assurer l'avenir du territoire de l'Espace Belledonne. Plusieurs
élus avaient été conviés pour apporter leur
éclairage sur ce questionnement et indiquer la meilleure marche à
suivre.
Depuis, un avant-projet a été lancé par
l'Espace Belledonne et son président Jean Picchioni, et la région
en a pris acte : le 15 avril 2010, elle a annoncé le lancement
d'une étude préliminaire à un dossier de projet de PNR
(réalisée par le bureau d'études Mosaïque
Environnement) qui permettra de statuer sur la valeur du patrimoine naturel du
territoire (qui doit être d'intérêt national pour le
classement PNR) ; le rendu est prévu pour novembre 2010.
Toutefois, la procédure de validation est devenue
très complexe, longue et coûteuse et d'autres projets de PNR sont
déjà en cours en Rhône-Alpes, dont celui des Baronnies
initié il y a presque dix ans par exemple. Une procédure
« normale » qui devrait prendre environ une dizaine
d'année avant d'aboutir si tout se passe sans encombre sur Belledonne.
Aujourd'hui, le contexte est plutôt défavorable donc, notamment en
raison de la baisse de moyens que subit la région. Aussi, sur cette
question récurrente du financement, la perspective d'un classement en
PNR ne résoudrait ce problème que d'ici dix ans, au mieux. Enfin,
il est difficile de ne pas y voir un probable « effet PNR »
sur cette question de la maîtrise foncière.
4. Vers la maîtrise foncière
4.1. La grille d'analyse (B)
« Initiatives locales et foncier »
Cette seconde grille répond à la première
réalisée pour l'analyse du discours foncier produit par les deux
cadres normatifs alpins. La grille (B) est organisée de la même
manière, les leviers potentiels d'intervention foncière en
colonne, et les thèmes en lien avec le foncier et la gestion de l'espace
en ligne, indiquant ainsi un large spectre de mesures possibles en
matière de foncier. La grille (B) « Initiatives locales et
foncier » permet d'organiser les multiples initiatives en
matière de foncier dans les Alpes du Nord. Ainsi, plusieurs dimensions
des expériences menées dans trois terrains d'études
permettent de remplir la grille, mais également quelques autres
initiatives -qui ont pu être évoquées par les acteurs
interrogés- sont mobilisées. Toutefois, toutes les initiatives
locales de la grille (B) sont cantonnées au périmètre de
l'étude. De fait, il ne s'agit pas d'une liste exhaustive des
initiatives locales en matière de foncier sur le territoire des Alpes du
Nord. Les cases vides peuvent donc signifier qu'il n'y a pas d'initiatives
connues qui peuvent correspondre à la structure de la grille telle
qu'elle a été conçue. Dès lors, en cherchant
spécifiquement une initiative selon un thème et un levier
d'intervention, il est sans doute possible de remplir d'autres cases.
Cette seconde grille d'analyse (B) des initiatives
foncières locales est complétée à 68% (49 mesures
sur les 72 potentielles) ce qui montre d'abord que les initiatives
locales alpines sont variées dans leur mode d'action foncier
(les colonnes) et transversales dans les thématiques
abordées. De plus, les initiatives répertoriées
sont inégalement réparties suivant les thèmes et les
leviers : les pratiques foncières des acteurs du territoire des
Alpes du Nord se caractérisent ainsi.
Tout d'abord la majorité des leviers d'intervention
sont fortement actionnés sur le terrain, avec une très faible
variation entre eux (trois leviers sont mobilisés sept fois, trois
autres six fois, et un autre levier cinq fois sur les huit fois possibles).
Cependant, une « lecture en creux » montre d'une
façon plus évidente que deux leviers d'intervention
foncière semblent « mis de
côté » :
ü La solidarité territoriale, est un levier qui
vise à entreprendre des actions concrètes d'assistance, de
soutien entre collectivités, ou de coordination pour la mise en oeuvre
d'action foncière sur le territoire communal ou supra-communal, on
comprend de fait la difficulté d'actionner ce levier pour une
collectivité. Sa mobilisation doit s'effectuer plutôt à
l'échelle d'une intercommunalité.
ü Le lien entre transport et urbanisme est
également un levier foncier qui s'actionne à une échelle
supra-communale (inter-Scot, approche métropolitaine par exemple) et la
question de la gouvernance pour ce levier est essentielle. Cette logique de
mise en oeuvre explique peut-être la moindre utilisation de ce levier.
Par cette même « lecture en creux »,
seules deux thématiques sont moins mobilisées (trois fois sur
neuf possibles) que les autres :
ü L'atteinte aux ressources naturelles,
« pâtit » certainement d'une approche qui demeure
centrée sur la protection au sens strict (par un zonage, une
règlementation inflexible, des périmètres...).
ü La ségrégation socio-spatiale, ne semble
pas être considérée comme une thématique sur
laquelle l'action foncière peut agir. La politique du logement supplante
une réflexion centrée sur cette ségrégation,
peut-être parce qu'elle est politiquement
« dangereuse » voire « taboue ».
Cette grille d'analyse d'initiatives locales qui agissent sur
le foncier alpin est complétée d'un tableau qui détaille
les mesures identifiées sur le terrain.
Grille d'Analyse (B)
« Initiatives locales et
foncier »
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo22.png)
Figure 29. Grille d'analyse
(B) "Initiatives locales et foncier", N. Moyon 2010
Détail de la Grille d'analyse (B)
« Initiatives locales et
foncier »
|
A. Préservation
1. Aux Gets dans le cadre du Projet Village 2003-2013, le
gèle des constructions a répondu aux capacités
d'approvisionnement et de traitement de l'eau localement.
2. Principe de champs d'inondation contrôlée dans
le Grésivaudan permet une réduction du débit de
l'Isère en étalant la crue sur de grandes étendues, au
lieu de la canaliser entre les digues.
4. Charte paysagère de la communauté de communes
du Massif du Vercors (CCMV) en 2006.
5. Le Conservatoire du littoral détient de nombreux
sites sur les bords du lac d'Annecy et du lac Léman côté
français permettant de limiter l'étalement urbain et constituer
un continuum urbain autour des lacs.
8. Limites intangibles du SCOT de région urbaine
grenobloise (RUG) pour préserver les espaces agricoles et naturels sur
le long terme.
|
B. Choix d'urbanisation
1. Petit guide Bien construire sur les balcons de Chartreuse,
réalisé en mai 2006 par le CAUE de l'Isère.
2. PPR de Chamonix avec un zonage limitant l'implantation du
bâti.
3.5. Sur les balcons de Belledonne, la brochure Habiter en
Belledonne » préconise un habitat économe en espace et
cohérent avec le tissu bâti existant afin l'éparpillement
de maisons individuelles positionnées au centre de leur parcelle.
4. Guide méthodologique « Agir contre la fermeture
de l'espace » à destination des élus a été
réalisé en 2003 par l'ADABEL à la demande de l'Espace
Belledonne.
7. La brochure pédagogique « Habiter en Belledonne
- construire en montagne» est distribuée systématiquement
aux personnes venant retirer un dossier de demande de permis de construire.
L'implantation de la maison sur la parcelle ou encore son orientation sont
abordés
8. Construire en continuité du bâti existant le
plus possible, en ouvrant progressivement à l'urbanisation des parcelles
plus éloignées si au moins 70% des parcelles urbanisations sont
bâtis (SCOT RUG) : assure une meilleure pérennité de
l'exploitation des terres agricoles périurbaines.
|
C. Polarisation urbaine
1. Renforcer les bourgs centres et les centres village pour
limiter l'artificialisation des sols (Charte de développement de la
CCMV).
2. Les zones inconstructibles à risque participent
à la polarisation urbaine dans une vallée longue et
étroite comme Chamonix.
3. C'est par le mitage de l'espace que s'opère
l'étalement urbain, il faut donc ouvrir à l'urbanisation future
seulement autours des pôles existants pour les renforcer (AURG).
4. Les corridors biologiques permettent de maintenir des
paysages de proximité (CG 38).
5. Les coupures d'urbanisation doivent constituer des
frontières intangibles à l'extension des pôles urbains
(Scot Rug).
7. L'axe 1 du futur PLH de l'agglomération grenobloise
(2010-2015) indique d'accroître le rythme de production de logements,
notamment les logements locatifs sociaux et en accession sociale à la
propriété, dans une logique d'équilibre du territoire.
8. Maintenir l'exploitation des terres mécanisables
pour l'essentiel en plaine, entre les pôles urbains (Adabel, Adayg).
|
D. Participation
2. Dans le cadre de l'opération « Sites
pilotes de gestion intégrée des risques naturels dans les
Alpes » (PGRN) un projet participatif de réduction des risques
s'est déroulé à Bourg Saint-Maurice au premier semestre
2010.
3.4. Atelier avec les habitants dans le cadre des chartes
paysagères à l'initiative du PNR Vercors.
5. Sensibilisation à travers des ateliers pratiques des
élus pour l'élaboration de la Charte de Développement de
la CCMV.
7. La mobilisation de plusieurs services de la commune de
Chamonix (social, urbanisme, économie, tourisme) et la participation
active de nombreux élus a fait émerger les lignes directrices de
la politique foncière de Chamonix.
8. La Charte Bien vivre en Belledonne a permis d'entamer un
dialogue entre néo-ruraux et agriculteurs sur le massif : la charte
a notamment permis de construire un discours pour limiter les conflits
d'usage.
|
E. Solidarité territoriale
6. Chamonix mène une politique foncière en
faveur du maintien des populations locales évincées par les prix
élevés du marché local de l'habitat.
7. A l'échelle de la communauté de communes de
la Haute-Vallée de l'Arve, en matière de logement, l'objectif est
mis sur le logement aidé et le logement saisonnier.
8. L'ADABEL met en avant la liaison entre vallée et
versants et la solidarité induite entre communes pour préserver
l'activité agricole et l'entretien des versants.
|
F. Gouvernance
2. La communauté de communes de la vallée de
Chamonix est chargée de réunir les financements pour
améliorer le paravalanche de Taconnaz : la thématique des
risques naturels mobilise cette nouvelle instance de gouvernance
intercommunale.
3. La réalisation de la carte de destination des sols
jointe à la Charte de développement de la CCMV vise notamment
à stopper le mitage de l'espace : cette carte à
échelle intercommunale est opposable.
4.5. Les débats de secteur dans le cadre du futur Scot
de la Rug ont constitué une instance d'échanges supra-communale
pour établir les limites de l'urbanisation future.
7. Un groupe de travail « cession d'actifs
immobiliers » s'est organisé en interne des services de la
commune de Chamonix pour définir l'usage futur possible des biens
immobiliers de la commune, certains ont été identifiés
pour du logement.
8. L'ADABEL et l'ADAYG participent en un sens à faire
émerger une gouvernance agricole à l'échelle du Y
grenoblois.
|
G. Prospective
2. Le SYMBHI se charge de la planification des travaux
nécessaires dans le cadre de la gestion intégrée des
grandes rivières et la protection contre les crues sur le bassin de
l'Isère.
3. La Charte de Développement de la CCMV ou le
futur Scot de la Rug affichent des objectifs de limitation du mitage de
l'espace.
4. La Charte du PNR Vercors impulse une dynamique pour
la réalisation de chartes paysagères.
5. De même que pour le mitage de l'espace, les
documents de planification restreignent l'étalement urbain.
6.7. Le PLH est un document de planification qui fixe
les objectifs de construction de logements sociaux et leur répartition
au sein du périmètre de mise en oeuvre (PLH de
l'agglomération grenobloise).
8. L'ADABEL a identifié les zones agricoles
stratégiques dans le secteur de Belledonne, afin que un zonage
protecteur soit mise en place dans le cadre du futur Scot de la Rug.
|
H. Densification
3.4.5. Le guide « Habiter en Belledonne »
indique qu'il est préférable de rénover l'habitat existant
des centre-village avant d'ouvrir à l'urbanisation nouvelle d'autres
parcelles, pour maîtriser l'étalement de l'urbanisation et
maintenir des paysages patrimoniaux.
6.7. Le futur programme Les Tissières piloté par
la commune de Chamonix, à destination du logement permanent, comportera
quelques lots individuels ainsi que du semi-collectif afin d'atteindre
l'objectif de 80 à 100 logements.
8. La densification de l'urbain, la rénovation, la
construction des dents creuses est une priorité pour diminuer la
consommation d'espaces agricoles et naturels (Scot de la Rug).
|
I. Transport-Urbanisme
3. Dans la région urbaine grenobloise, la polarisation
urbaine autour des pôles multimodaux de transport concoure à
limiter le mitage de l'espace en ouvrant à l'urbanisation de
manière préférentielle des parcelles regroupées
autour des pôles.
5. Parmi les principaux éléments du futur Scot
de la Rug, la réduction des vitesses (réaménagement des
voies, par exemple réservées aux TC) devrait renforcer les
comportements de proximité et donc l'offre locale, fiabiliser les
distances/temps et l'équilibre des territoires, tout en
infléchissant l'étalement urbain.
|
Figure 30. Détail
de la grille d'analyse (B), N. Moyon 2010
4.2. Trois stratégies
cumulatives pour construire les conditions d'une maîtrise
foncière
L'étude des trois terrains a montré des
démarches différentes pour appréhender la question
foncière dans les Alpes du Nord, et tenter d'y répondre.
L'objectif poursuivi était de montrer l'utilisation de certains outils
de maîtrise foncière dans un contexte local particulier, au
service d'un projet précis. Ces démarches, dont
l'efficacité ou le caractère novateur sont variables, servent
quoiqu'il en soit une politique foncière volontariste, ou ses
prémices, dans l'espace alpin.
De plus, les particularismes de chaque cas
étudié pourraient laisser penser que les démarches
entreprises ne sont pas -ou faiblement- transposables à d'autres
territoires. Et pourtant au contraire, ces trois terrains sont
représentatifs d'une grande partie du territoire des Alpes du
Nord : un territoire plutôt riche et très attractif à
Chamonix, un autre qui bénéficie d'une puissante structure
d'accompagnement (un PNR), et enfin, un dernier territoire qui ne
possède ni l'un ni l'autre et qui actionne ainsi d'autres leviers
d'action pour travailler cette question foncière. Chacun dans
leur style, ces territoires ont développé une démarche
pour maîtriser le foncier (ou tenter de le faire) qui leur est
propre.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo23.png)
Figure 31. Trois
stratégies cumulatives vers une politique foncière volontariste,
N. Moyon 2010
Bien qu'il n'y ait pas de recette miracle, les trois
« stratégies » qui vont être
déclinées servent cette quête de la maîtrise
foncière dans les Alpes du Nord. Ces
« stratégies » peuvent être cumulatives, elles
s'inspirent des trois cas d'étude et du ressenti formulé sur les
problèmes fonciers auprès des personnes rencontrées en
entretien.
4.2.1. Construire du
dialogue
Sur le thème du foncier peut-être plus que sur
d'autres sujets de l'aménagement et du développement territorial,
le dialogue, l'échange, la médiation révèlent les
conflits. Autour du foncier se cristallise souvent une forme de lutte opposant
les intérêts particuliers à l'intérêt
général : une situation difficile que la collectivité
est censée arbitrer. La sensibilisation permet de créer de
l'échange mais pas nécessairement de résoudre les
conflits : son action est intéressante car elle
créée, comme le dialogue, des conditions favorables à
l'élaboration d'un projet futur. Il ne s'agit donc pas de construire du
dialogue pour le dialogue lui-même, mais plutôt pour construire du
projet ou le mettre en oeuvre.
La stratégie est donc de construire un contexte
favorable à une future politique foncière, de lui offrir
en amont les conditions de sa réussite ; c'est un investissement
dans l'immatériel. La sensibilisation, l'animation, l'accompagnement, la
formation toutes ces démarches permettent d'impulser un dialogue
territorial. Cette stratégie est très
« utile » en vue de l'élaboration d'un PLU
volontariste par exemple, qui portera des principes forts d'économie
d'espace ou d'aménagement, des obligations d'insertion architecturale et
paysagère, etc.
Les moyens pour servir cette stratégie du dialogue sont
illimités, notamment en faisant intervenir des acteurs extérieurs
au territoire : des artistes, des formateurs, et pourquoi pas des
psychologues. L'intérêt est bien d'ouvrir un espace de dialogue,
d'aménager un moment propice à celui-ci (un
évènement festif par exemple) et de réussir à faire
échanger entre eux tous les acteurs d'un même territoire, de
l'élu à l'habitant, des techniciens aux agriculteurs, des
associations locales aux prestataires extérieurs.
La sensibilisation, l'animation, l'accompagnement ou la
formation sont nécessaires pour faire germer les idées, et donc
construire les projets ou les mettre en oeuvre. Cependant, cette
stratégie autour du dialogue n'a de sens que si elle s'inscrit dans un
projet plus vaste, dans une démarche de projet de territoire. Le
dialogue peut participer à la construction du projet dans un processus
participatif ou itératif, mais également à sa
réalisation.
4.2.2. Investir dans la
technique
Cette seconde stratégie met l'accent sur le
développement d'une technicité dans la mise en oeuvre de
politiques publiques. Investir dans la technique implique de s'entourer de
spécialistes (notaire, géomètre, avocat, etc.) et donc
d'avoir les moyens financiers de faire appel à ce type de prestataires.
Le choix peut être d'investir en interne sur ce type de
compétences, juridiques notamment, qui seront utiles pour la mise en
oeuvre de la politique foncière : il s'agit de se doter d'une
ingénierie territoriale, voire foncière, assez
spécialisée. Le projet quant à lui relève avant
tout du domaine du politique. Il s'agit là d'imaginer une technique et
ensuite, sur chaque territoire, les critères, les modalités de
mise en oeuvre seront plus ou moins différentes au regard des objectifs
politiques.
Investir dans la technique c'est donc plutôt investir
dans des compétences qui, mises au service d'une politique
foncière, permettront à la collectivité de se comporter
comme un aménageur, parfois en dépassant le cadre classique de
ses compétences, voire être à la limite de la
légalité. La façon de faire à Chamonix est
très intéressante car elle renouvelle aussi
l'interventionnisme public en matière de foncier. C'est une
sorte « d'interventionnisme à la chamoniarde » ou
« à la haute-savoyarde » : si la formulation
est certes caricaturale, la stratégie est efficace et reproductible. Les
élus se comportent progressivement en aménageur et l'on est
finalement assez peu dans une situation classique d'une politique
interventionniste qui poserait des cadres normatifs de plus en plus restrictifs
et contraignants pour l'ensemble des acteurs (habitants, aménageurs,
promoteurs et acteurs institutionnels eux-mêmes). Ici, on fait le plus
possible en interne, dans une perspective de maîtrise optimale des
opérations portées par une politique foncière
volontariste et interventionniste. Cependant, pour pouvoir se
comporter en promoteur, la commune doit être obligatoirement
propriétaire des terrains270(*).
Cette stratégie peut aussi permettre de créer de
nouveaux outils, comme cela a été le cas avec les UHN.
L'ingénierie disponible localement a permis de créer un outil
pour rendre opérationnel un principe énoncé dans la
loi : de la sorte, l'échelon local s'est approprié le cadre
normatif et législatif et l'a interprété au regard des ses
propres enjeux.
Enfin, cette stratégie de la technique ou de
l'ingénierie foncière, pose avant tout une question :
les collectivités peuvent-elles se doter des moyens de leur
compétence foncière? Les communes riches le peuvent
très certainement (il s'agit plus d'une question d'arbitrage dans les
priorités qu'elles se donnent), une structure tel qu'un PNR assure en
partie cette mission, mais les autres collectivités ? Globalement,
le constat est plutôt celui du « sous-équipement en
technicité » alors qu'il y en aurait d'autant plus besoin
qu'il y a de réformes, d'outils, de lois. Dans ce contexte, cette
seconde stratégie est tout à fait pertinente.
4.2.3. Agir sur les cadres
de planification
La dernière stratégie se concentre sur les
outils classiques de la planification territoriale. C'est le choix
d'agir sur les cadres, PLU et SCOT, et de produire un certain
urbanisme qui réponde au projet de territoire défini au
préalable. Il s'agit de « jouer » avec ces cadres
règlementaires, de les modeler, de les mettre au service d'une vision de
territoire. L'effort consiste donc à redonner de l'intelligence à
tous ces outils, de les choisir, de jongler avec la vaste boite à outils
de la maîtrise foncière dont l'on dispose. En redonnant de
l'intelligence à ces outils, l'ambition est de retrouver
l'efficacité des documents d'urbanisme. Puisque la
difficulté n'est pas tant de fixer des règles ou des orientations
volontaristes, mais plutôt de réussir à les respecter,
l'enjeu est de réfléchir à la mise en oeuvre de quel
projet et par quels moyens opérationnels.
Agir sur les cadres de planification est en fait
inévitable puisqu'il s'agit de la traduction règlementaire des
règles d'aménagement sur un territoire. Ici, il est question de
se concentrer sur ces documents, d'en faire des outils inédits,
correspondant aux spécificités de son territoire, et non pas la
reproduction de celui de la commune voisine. Cette intelligence du document
d'urbanisme peut faire l'objet de formations auprès des élus afin
qu'ils se saisissent de l'opportunité qu'offre par exemple la
révision d'un PLU271(*), mais des compétences spécifiques sont
requises. Là encore une certaine ingénierie est nécessaire
mais elle servira avant tout un projet porté par le conseil municipal.
On peut y voir une certaine ingéniosité dans la pratique
des documents, dans l'utilisation des outils. C'est développer
une certaine habilité dans l'agencement des dispositifs entre eux.
L'action sur les cadres de planification est un moyen plus indirect de
maîtriser le foncier, notamment son coût ou la forme urbaine. C'est
donc un « PLU bien ficelé », avec des orientations
d'aménagement ou encore un COS bonifié, qui apporte une
maîtrise sur les permis de construire. Le Code de l'Urbanisme est en ce
sens extrêmement pragmatique puisqu'il offre tous les outils
possibles : le problème est donc bien dans la capacité
à les utiliser, à leur donner du sens, à les mettre au
service d'un projet. Cette stratégie s'attarde donc à travailler
à ce problème. Toutefois, « si la règle est un
outil extrêmement important, de même que la planification opposable
aux tiers, ce ne sont pas des outils autonomes, ce sont des outils parmi
d'autres, qui doivent être au service du projet »272(*).
La réversibilité des documents d'urbanisme a
souvent été évoquée par les acteurs locaux, mais
face aux « déçus de la limite »273(*), le coût de
révision d'un PLU par exemple risque de freiner ce
phénomène. L'éloignement du centre de décision en
matière d'aménagement et d'urbanisme de la commune vers
l'intercommunalité contribue également à la
pérennité des cadres de planification. Toutefois, élaborer
des cadres de planification ne doit pas faire oublier l'utilité du
document : être au service d'un projet de territoire, d'un projet de
vie pour ce territoire. L'enjeu du PLU est de réussir une
hiérarchisation de l'espace : définir les espaces de
développement et les espaces de préservation notamment, et en
justifier la pertinence. Cette stratégie doit mettre en place des
systèmes évolutifs afin de ne pas figer ni le projet d'urbanisme,
ni le foncier. Aussi, l'adaptabilité ne doit pas être confondue
avec la volatilité : il est important de réussir à
faire évoluer la règle en fonction de l'évolution des
modes de vie par exemple. Le travers de cette stratégie de
maîtrise foncière par les cadres de planification est sans doute
là : réussir une règle ferme, mais
potentiellement évolutive qui puisse correspondre aux
évolutions des mentalités et des modes de vie, en somme, trouver
un juste équilibre.
Dans ce second chapitre, les trois terrains d'études
ont été explorés de manière très
détaillée afin d'apporter une connaissance précise de
certaines pratiques foncières qu'on a jugé ici innovantes et/ou
volontaristes. A Chamonix, dans le Vercors ou dans Belledonne, les acteurs
locaux montrent qu'ils sont capables de mobiliser les cadres normatifs et les
outils pour les mettre au service de leurs politiques foncières.
Partie
III. De la théorie à la pratique
Cette troisième et dernière partie permet de
confronter les deux étapes précédentes, la théorie
avec les cadres de planification, et la pratique avec les initiatives de
terrain. Le premier chapitre permettra donc de tirer les conclusions du travail
entrepris à travers les grilles d'analyse : la grille (C) montrera
les points de concordance et de décalage entre le discours foncier des
cadres normatifs et les initiatives locales répertoriées sur le
terrain d'étude.
A travers l'analyse qui en sera faite, la démonstration
se concentrera ensuite sur la question de la spécificité alpine
en matière de foncier. La troisième et dernière partie a
permis de répondre plus précisément à l'enjeu
d'articuler la théorie à la pratique en matière de
foncier, sur le territoire des Alpes du Nord.
Enfin, le dernier chapitre questionnera la pertinence du
concept de durabilité associé à la thématique
foncière. Quelles perspectives cela offre-t-il à l'heure
où tout le monde ou presque se réclame de mettre en oeuvre, sur
son territoire, les principes du développement durable ? En somme,
qu'est-ce que pourrait-être une gestion durable, raisonnée,
volontariste du foncier dans les Alpes ?
Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres normatifs
à la pratique des initiatives locales alpines
1. Grille d'analyse (C) « Cadres normatifs et
initiatives locales face au foncier alpin » : concordance ou
décalage ?
L'ambition de départ était de voir, à
l'aide des deux premières grilles (A) et (B), si l'on pouvait constater
et mesurer un décalage plus ou moins flagrant entre le discours foncier
porté par les deux cadres normatifs d'une part, et les mesures des
initiatives locales dans le périmètre des Alpes du Nord d'autre
part. A l'inverse, sur les « mesures concordantes » des
deux grilles, l'analyse permettrait de commenter ou d'expliquer cette
adéquation entre la théorie des cadres normatifs, et la pratique
du terrain.
Avec une méthodologie de recherche similaire, les
chercheurs du Cemagref de Grenoble et du laboratoire PACTE proposaient
d'élargir et de systématiser leur démarche sur un
territoire plus vaste (la Tarentaise), afin d'avoir une vue transversale et de
pouvoir repérer l'écart entre le discours
« foncier » d'une autorité organisatrice et sa
traduction quantitative et spatiale274(*).
Cette dernière grille « d'analyse
foncière comparative » des cadres normatifs et des initiatives
locales affiche une globale concordance entre la théorie des
discours sur le foncier et les pratiques en la matière :
en effet, on comptabilise trente-trois mesures qui sont partagées par la
théorie et la pratique (croix rouges), on remarquera en ce sens une
relative adéquation (45% des mesures en commun) entre deux cadres
normatifs - qui paraissaient pourtant éloignés des territoires
alpins d'après les acteurs locaux - et les initiatives locales qui
travaillent au quotidien à une plus grande maîtrise de la question
foncière.
D'autre part, cette grille de synthèse montre aussi que
les initiatives locales dépassent bien plus les cadres normatifs - seize
mesures sont « initiées » par la pratique de terrain
- que les cadres normatifs ne dépassent les initiatives locales -
seulement trois mesures sont initiées par la
« théorie ». Le décalage est le plus flagrant
pour les leviers (colonnes) de participation et de prospective pour lesquels
les initiatives locales ont porté beaucoup plus de mesures que les
cadres normatifs l'ont envisagé. Cela est d'ailleurs assez
étonnant pour la prospective qui conviendrait plutôt à la
perspective d'un document de planification à une échelle
macro-territoriale. On peut ainsi dire que les collectivités
locales ont pris conscience de l'importance de ce « levier
planificateur » pour traiter les questions foncières
auxquelles ils sont confrontés (Scot, Charte de développement,
Charte paysagère, etc.).
Un décalage est aussi visible dans l'approche
transversale de la thématique foncière. Ainsi, les initiatives
locales proposent de plus nombreuses solutions que les cadres normatifs pour
les trois thématiques suivantes, pour lesquelles elles actionnent aussi
de multiples leviers :
ü les risques naturels,
ü le mitage de l'espace,
ü le logement.
Est-ce le signe d'une plus grande transversalité des
pratiques foncières locales comparée au discours foncier
porté par les cadres normatifs ? Les cadres normatifs
« dépassent » quant à eux les initiatives
locales en associant :
ü le thème du paysage/cadre de vie au levier de la
solidarité territoriale : il s'agit d'inciter les
collectivités à adopter des stratégies communes autour des
problématiques qui les préoccupent, dont la préservation
des paysages et des sites naturels, par une gestion de manière
contractuelle.
ü le thème des risques naturels au levier de
densification : par exemple, dans le but de limiter les impacts des
domaines skiables sur les espaces naturels et les paysages, leurs
restructurations se feront à l'intérieur de l'enveloppe existante
du domaine skiable et devront contribuer à améliorer la
qualité de l'offre et la sécurité.
ü le thème des atteintes aux ressources naturels au
levier de la prospective, afin de favoriser une vision prospective et
concertée de la valorisation des espaces naturels.
Cependant, le résultat obtenu par la grille (C) est une
analyse à un instant T, basée sur six mois de travaux de
recherche appliquée, dont la portée n'est pas exhaustive pour les
raisons suivantes :
ü le discours théorique de la grille d'analyse (A)
est issu de « seulement » deux cadres normatifs, qui,
associés, sont toutefois spécifiques au périmètre
d'étude.
ü la grille d'analyse des initiatives locales alpines (B)
est alimentée pour l'essentiel des recherches effectuées sur
trois terrains, Chamonix, le Vercors et Belledonne, qui ne revendiquent pas
d'offrir un panel exhaustif des initiatives possibles en matière de
foncier sur le territoire des Alpes du Nord.
Toutefois, ce travail d'analyse permet, dans une certaine
mesure, de contrecarrer l'idée reçue selon laquelle les
cadres normatifs sont totalement déconnectés de la
réalité, et qu'ils ne permettent pas de percevoir
réellement les enjeux auxquels sont confrontés les acteurs
locaux. Ce travail de construction puis de confrontation de plusieurs grilles
d'analyse est aussi un exercice théorique et méthodologique qui
participe à la dimension de recherche de cette étude. Enfin,
l'enjeu était aussi de tenter d'articuler « savoir
expert » et « savoir profane », sans
dénigrer l'un ou l'autre. Alors que les savoirs institutionnels ou
scientifiques ont un regard plus externe sur le territoire, les savoirs locaux
sont issus des acteurs qui pratiquent le territoire, et par la recherche
appliquée en sciences sociales l'articulation des deux a
été tentée à travers ce travail de mémoire
en géographie.
Grille d'Analyse (C)
« Cadres normatifs et initiatives locales
face au foncier alpin »
ý33 mesures partagées par la théorie et
la pratique
ý16 mesures initiées par la pratique de
terrain
ý3 mesures initiées par la théorie des
cadres
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo24.png)
Figure 32. Grille d'analyse
(C) "Cadres normatifs et initiatives locales face au foncier alpin", N. Moyon
2010
2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit en
aménagement ?
2.1. Des perspectives ouvertes
par la gouvernance...
Dans une perspective plus globale, la confrontation des deux
grilles d'analyse amène à s'interroger sur les relations entre
les acteurs locaux de l'aménagement du territoire et les cadres
normatifs, et par conséquence sur les rapports à la norme et au
droit au sujet du foncier et in fine à l'aménagement du
territoire. Ainsi, les apports théoriques sur la gouvernance permettent
de poser quelques bases à cette réflexion275(*).
Tout d'abord, selon Olivier Barrière qui
développe une réflexion sur l'écologie foncière
à partir de la gouvernance environnementale ancrée dans une
perspective patrimoniale276(*), la gouvernance est une démarche qui permet
d'orienter et de guider plutôt que d'appliquer une régulation
autoritaire, dans le but de construire la légitimation d'un mode de
régulation par la négociation, voire la construction par les
acteurs eux-mêmes. Se référant alors à J.
Kooiman277(*), la
gouvernance est « le processus par lequel les organisations humaines,
qu'elles soient privées, publiques ou civiques, prennent
elles-mêmes la barre pour se gouverner ». Aujourd'hui, la
gouvernance peut être vue comme un phénomène
inter-organisationnel ou encore comme un système plus coopératif,
proche des expressions de « co-gestion, codirection et
co-orientation », toujours d'après J. Kooiman.
Cette démarche de gouvernance met en avant la posture
de « l'Etat incitateur » qui, pour O. Barrière,
dispose dès lors « d'une panoplie de moyens lui permettant
d'orienter les comportements sans édicter de normes
obligatoires ». En matière foncière, il est vrai que
son intervention par la fiscalité et l'urbanisme réglementaire
est incontournable tout en restant indirecte. Si la persuasion, l'information
ou la diffusion de connaissances constituent des « ressources
essentielles de la gouvernance étatique, un ressort majeur des
politiques publiques »278(*), elles sont tout de même devenues des moyens
largement utilisés par les collectivités locales. D'après
l'auteur, ces moyens illustre un renoncement à la contrainte, au profit
d'une « influence douce sur les comportements, un pilotage indirect
de ceux-ci ». En revanche, la DTA des Alpes du Nord, par son
caractère opposable initial, ne relève pas vraiment de cette
posture de l'Etat incitateur mais plutôt d'une stratégie de
passage en force face à certaines oppositions locales qui se sont
toujours manifestées. Si le désire « d'organiser
l'auto-organisation de la société »279(*) se retrouve dans la
gouvernance, il semble que l'auto-organisation des Alpes du Nord n'ait
pas été perçue comme souhaitable par l'Etat,
justifiant ainsi des années de procédures et de bras de fer.
Cependant, le recours à ces modes d'action « plus
négociée » en quelque sort, s'explique par trois
raisons principales selon MORAND :
ü la très grande complexité de la
société que les pouvoirs publics cherchent à
influencer,
ü l'inadéquation fréquente du
contrôle direct des comportements au moyen de règles
autoritaires,
ü l'effritement de la capacité de l'État
à assurer, de manière centralisée et autoritaire, la
régulation sociale.
D'autres démarches peuvent être
interpréter comme des alternatives à la gouvernance : le
contrat, ou des relations de type contractuel, sont un substitut possible
à la perte du pouvoir de tutelle de l'Etat. Ainsi, pour Jean-Marie
Pontier, « lorsqu'en effet, le législateur supprime la tutelle
administrative (qui est surtout de l'ordre du symbolique), la tutelle
financière (bien réelle, elle) et réduit la tutelle
technique (d'autant plus efficace qu'elle n'était prévue par
aucun texte de loi), l'autorité administrative centrale est bien
obligée de trouver un autre moyen que les circulaires et instructions
qui constituaient de véritables fourches caudines sous lesquelles, bon
gré mal gré, étaient obligées de passer les
autorités locales»280(*). Toutefois, dans une démarche de gouvernance,
l'idée de l'Etat « incitateur » telle qu'elle est
décrite pourrait aussi bien être formulée de manière
plus péjorative transformant « l'influence douce »,
en « manipulation ». A l'intermédiaire de ces deux
postures opposées, on peut rappeler plus fondamentalement qu'il n'y a
pas de systèmes sociaux entièrement réglés ou
contrôlés (du type « Big Brother »), et que
les acteurs, même à l'intérieur des contraintes souvent
très lourdes imposées par le
« système », disposent d'une marge de liberté
qu'ils utilisent de façon stratégique dans leurs interactions
avec les autres281(*).
Enfin, si l'on peut constater la
« négociation » de certains cadres normatifs, comme
cela a été le cas avec le projet de DTA des Alpes du Nord, c'est
peut-être parce qu'il s'agit de remettre en cause la
légitimité de la légalité elle-même dans
certains territoires alpins. En somme, si c'était le cas, la gouvernance
a encore du chemin à parcourir pour devenir une démarche
efficiente partout en France.
2.2. Mais un cadre qui reste
« hyper réglementé »
En matière d'aménagement comme de foncier, la
pratique doit considérer une multitude de cadres, de normes, de
règles, de lois, d'outils282(*) avant de passer à l'acte. Pour Marc
Sauvez283(*), ce qu'il
dénonce comme « la vanité de la réglementation
et son inefficacité » ont pour conséquence de proposer
un cadre de l'action territoriale tellement réglementé qu'il
semble immuable. S'il la qualifie « d'idéologie
réglementeuse », ici se profile le débat d'une
planification réglementaire à la française, et la question
posée est la suivante : « l'urbanisme
réglementaire est-il adapté aux problématiques plus
récentes ? Ne faut-il pas développer d'autres outils comme
le font la plupart des autres pays
européens ? »284(*). Pourtant la profusion d'outils et le « on
a tout ce qu'il nous faut » l'emportent largement auprès des
personnes entretenues sur le terrain. Ce que M. Sauvez dénonce c'est un
certain décalage entre la « machine centrale » et la
réalité locale, alors qu'il considère que l'existence d'un
cadre national adapté est pourtant indispensable pour obtenir une
garantie juridique de toute les démarches de planification. Ce travail
de recherche appliquée posait cependant l'hypothèse
suivante : les cadres et donc les outils qui peuvent en découler ne
sont pas vraiment intéressants pour ce qu'ils sont, mais c'est
plutôt dans la façon dont les acteurs s'en emparent, ce qu'ils en
font et la manière dont ils les utilisent, c'est sur tout cela que
l'analyse doit s'attarder.
L'hypothèse a été vérifiée
par les études de terrain, mais elle est quelque peu infléchie
par l'analyse du rapport à la norme qui se dessine ici. Ce qu'indiquent
ces cadres normatifs, c'est peut-être leur incapacité à
évoluer (ou à évoluer suffisamment rapidement)
parallèlement aux transformations du contexte de l'aménagement et
de la maîtrise foncière d'aujourd'hui. De même que
si le décalage ressentit n'est pas dans le discours produit par
ces cadres normatifs, il ne peut être que dans leur forme, leur nature ou
encore leur procédure de mise en oeuvre. L'obstacle posé
par des procédures incapables d'intégrer ces évolutions
amène au constat suivant : les cadres et donc les outils deviennent
inadéquates, rendant de facto caducs les démarches
impulsées par l'Etat.
Pour illustrer ce problème, Marc Sauvez prend l'exemple
de l'inexistence d'un cadre de négociation financière entre
collectivités qui conduit a « beaucoup
d'irresponsabilité». Il est vrai que « dans le
système réglementaire actuel, la réglementation sur la
construction est principalement définie au niveau communal, mais ses
conséquences financières, du fait notamment des
équipements induits ou des coûts sociaux qui en découlent,
sont assumés en grande partie par les "grandes collectivités
locales" (Etat, région, département). Or, il n'y a pas de cadre
pour les négociations financières globales qui permettraient une
régulation entre les niveaux qui décident et ceux qui financent.
De même, les engagements pris sur le court terme n'engagent personne sur
le long terme »285(*).
Paradoxalement, cette règlementation croissante de
l'aménagement du territoire et de l'urbanisme ne semble pas avoir permis
de réaliser toutes ses promesses ; les problèmes de
logements, de transports, et bien sûr de maîtrise foncière
portent déjà atteinte au fonctionnement des territoires. C'est
donc un constat d'échec de cette politique d'aménagement
« hyper-règlementée » que certains dressent,
à l'instar de Serge Gros, le directeur du CAUE de l'Isère :
« globalement, mon sentiment reste que l'urbanisation s'est faite en
choisissant la voie de la facilité. [...] On a bâti en quarante
ans plus qu'en trois siècles. On a jamais tant planifié,
programmé, délibéré de schéma directeur,
d'aménagement et de règlement. Force est de se rendre compte que
le règlement n'a pas généré de qualité, bien
au contraire que la programmation ou les tentatives de prospective n'ont pas
été stimulantes intellectuellement, ni permis d'installer un art
de vivre satisfaisant »286(*).
De plus, la relation entre l'accroissement des règles,
notamment juridiques, et des difficultés des collectivités
ressemble plutôt à un cercle vicieux : la pression
foncière perçue comme un problème majeur induit alors un
essor de règles, et plus le problème est criant, plus la norme
est rigoureuse. A la non maîtrise d'un phénomène
territorial s'ajoute ainsi la non maîtrise d'outils et de normes
pour résoudre cette première non maîtrise, car les
collectivités faiblement équipées en ingénierie
foncière ou territoriale ne sont pas capables de s'approprier une
recrudescence de règlements. En un sens, c'est le législateur qui
a accentué ce problème de non-maîtrise foncière, par
une norme qui sclérose une situation plus qu'il ne la résout. Sur
cette question du rapport à la norme, il devient alors difficile de
distinguer le problème foncier du reste de l'aménagement du
territoire.
Enfin, le principe de « droit négocié
pour mettre en oeuvre une gouvernance environnementale » d'Olivier
Barrière287(*)
propose un rapport à la règle et au droit avec lequel les
impératifs d'un développement urbain maîtrisé sont
compatibles. Selon lui, c'est le rapport d'obligation
intergénérationnelle qui justifie et définit le patrimoine
commun et renverse ainsi la tendance à la dilapidation, par exemple du
foncier agricole. La portée philosophique de cette
« écologie foncière » est très proche
du principe même de « développement durable »
puisque la gouvernance patrimoniale repose ici sur un « lien
ombilical entre générations » qui responsabilise
particulièrement ceux qui se situent en amont de la transmission :
le rapport que les sociétés entretiennent à
l'espace-milieu, sont inéluctablement dans un rapport foncier.
L'écologie foncière traduit dès lors un jeu d'acteurs, au
sein duquel les relations entre sociétés et nature constituent un
enjeu vital de reproduction à travers un lien
intergénérationnel. En termes juridiques, cette perspective
éco-foncière se définit dans « un rapport
où les devoirs dominent les droits subjectifs ».
Plus concrètement, l'application de cette inversion
juridique serait déterminante au sujet du maintien des terres agricoles
stratégiques par exemple. Ainsi, la formule suivante
énoncée dans plusieurs entretiens, « l'agriculteur
n'est pas le meilleur ami de l'agriculture » ne pourrait plus se
vérifier au regard de la pénurie actuelle de foncier agricole sur
certains territoires. Par cette situation où les devoirs domineraient
sur les droits, l'intérêt de maintenir l'usage de parcelles
agricoles mises en vente l'emporterait sur la perspective pour le vendeur
d'obtenir la plus-value liée au changement d'affectation, de
l'agriculture vers de l'habitat par exemple.
Ainsi, même si cet apport d'Olivier Barrière
reste très théorique, il offre un éclairage
intéressant pour réfléchir à un rapport au droit et
à la norme en aménagement qui permettent d'intégrer de
nouveaux enjeux. Si l'on considère que la lutte contre le changement
climatique est l'enjeu majeur du XXIe siècle, ce qui par ailleurs est un
objectif affiché dans tous les derniers cadres normatifs français
(textes de Loi et documents d'urbanisme), alors repenser le droit de
propriété en France devient absolument nécessaire afin que
les devoirs intergénérationnels puissent un jour dominer les
droits subjectifs si profondément ancrés dans les
mentalités288(*).
2.3. L'efficacité des
outils et des cadres
Les entretiens réalisés ont permis de
dégager un avis univoque au sujet des outils de la gestion
foncière : la boîte à outils du foncier est pleine de
procédures ou de règlements que les collectivités sont
bien en mal de mettre en oeuvre, bien souvent par manque de connaissances sur
l'usage possible des outils. Le manque de moyens en ingénierie
territoriale, et encore plus en ingénierie foncière est
globalement évoqué ce qui pose problème dans la mesure
où les normes générales de l'Etat s'avèrent parfois
peu adaptés à chaque situation particulière. Les documents
d'urbanisme réglementaire, limités à la seule interdiction
de faire et non à la convergence vers des réalisations,
deviennent parfois incantatoires289(*), ce que les acteurs locaux avouent parfois
eux-mêmes : « la vraie difficulté semble
plutôt résider dans la décision des territoires de se
donner les conditions et les moyens nécessaires pour leur permettre de
faire ce qu'ils ont dit. Et jusqu'à présent : aucun
territoire ne semble y être encore parvenu »290(*).
C'est toute la question de l'efficacité des documents
d'urbanisme qui est posée, et l'entrée par le rapport à la
norme et au droit en aménagement semble montrer que si l'approche
réglementaire n'est pas mise en oeuvre à la bonne échelle,
elle est vouée à l'échec et à
l'inefficacité. Marc Sauvez aspire quant à lui à
« une résurrection de la planification sur de nouveaux
paradigmes [...], pour de nouveaux acteurs [...] et sur de nouveaux
thèmes tels que l'environnement, la culture ou la santé [...] et
en recherchant leur convergence sur des périodes longues autour de
documents explicites accompagnant leurs accords et leurs
projets... »291(*). Si ce sont les outils d'une planification
stratégique partenariale qui font réellement défaut,
peut-être que les nouveaux SCOT, dits « SCOT
Grenelle », dont celui de la région urbaine grenobloise,
permettront de relever ce défi.
Cependant, les écarts constatés
précédemment entre le cadre prospectif souhaité par le
législateur et la réalité du terrain, rendent difficile
l'élaboration d'une véritable vision foncière pour les
petites collectivités. Le projet de territoire ou la
détermination politique locale sont deux « conditions de
réussites » identifiées par le travail de terrain qui
sont évoquées au même degré d'importance, si ce
n'est plus, que la maîtrise des outils ou du cadre normatif.
L'élaboration d'un nouveau document d'urbanisme ou sa révision
reste avant tout une démarche politique, donc des instants précis
dans l'évolution du territoire. A ce sujet, les conclusions des travaux
sur les nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne292(*) vont dans ce sens. Leurs
analyses de terrain ont montré qu'à la question de
l'adéquation des outils de gestion foncière aux enjeux locaux, il
convenait de formuler un questionnement plus large notamment autour d'un
triptyque élus-orientations stratégiques-outils293(*).
Finalement, l'ingénierie foncière est
formulée par les acteurs rencontrés comme un moyen transversal de
mobilisation technique mais aussi politique autour de l'élaboration ou
de la mise en oeuvre d'un projet foncier ou plus globalement d'un projet de
territoire. C'est de cette manière une solution pour dépasser
l'obstacle des cadres normatifs innombrables ou des outils inusités, et
dans un sens s'affranchir de la non-maîtrise de la
norme.
Pourtant, les travaux de thèse de Dany
Lapostolle294(*)
démontrent tout l'inverse : par cette ingénierie
(territoriale ou foncière, peu importe ici), la collectivité
apporte les conditions de son contrôle par l'Etat, ainsi l'esquisse le
résumé suivant :
L'ingénierie territoriale est une bureaucratie
professionnelle territoriale coincée entre les injonctions autoritaires
de l'État et les velléités d'autonomie du pouvoir local.
D'un côté, on observe que l'Europe, les services centraux de
l'État diffusent des représentations et les bonnes pratiques
aussi strictes que les règles impersonnelles du modèle
bureaucratique wébérien. De l'autre côté, les
pouvoirs locaux, face à aux insuffisances des services
déconcentrés de l'État structurent une ingénierie
territoriale composite pour se doter de l'expertise nécessaire à
leur stratégie de développement.
Paradoxalement, c'est dans le cadre des politiques
constitutives, que le pouvoir local en se dotant d'un appareil d'expertise,
gage d'autonomie, crée les conditions de son propre contrôle et de
sa soumission au régime d'agence qui s'impose comme nouveau mode de
régulation de l'action publique au détriment de la
négociation contractuelle. En d'autres termes, les instruments d'action
publique et les savoir mobilisés par l'ingénierie territoriale
dans la démarche de projet participent d'une technologie de gouvernement
qui ne met pas fin à la rationalité bureaucratique, elle la
transforme.
Si cette bureaucratie territoriale est renouvelée comme
l'expose Dany Lapostolle, des expériences de terrain rappellent
néanmoins que les acteurs, tout en évoluant à
l'intérieur de cadres sociaux structurants, conservent une certaine
liberté et autonomie décisionnelle qui leur offrent la
capacité de faire évoluer ces mêmes cadres295(*). Par exemple, dans le cadre
des discussions autour du projet de Loi de Modernisation Agricole (LMA) au
printemps 2010, un problème très local, spécifique
à la montagne a pu remonter à l'échelle nationale pour
être discuté296(*).
Dans cette perspective, Yves Barel297(*) évoque la rencontre
du code avec le territoire, ce qui signifie dès lors
« l'irruption de la ruse dans le code ». Il explique ainsi
que les pratiques sociales concrètes sont souvent des combinaisons
dynamiques du code et de la ruse, où le code lui-même est
rusé, où la ruse elle-même est secrètement
codifiée et où se manifeste aussi la ruse du code et la ruse avec
le code.
3. La figure de l'acteur-bricoleur
A travers les entretiens réalisés, la
démarche de l'action foncière ou territoriale apparait souvent
comme le résultat d'un cheminement sinueux, marqué par des
expérimentations, des déboires, des négociations ou des
ajustements. Les acteurs locaux semblent fonctionner ainsi, par
tâtonnement successifs, en se saisissant de quelques outils,
parfois en les détournant même de leur fonction première
pour construire une démarche permettant d'atteindre l'objectif
fixé. Poussée à l'extrême, des alternatives au
modèle rationnel de planification proposent des démarches de
tâtonnements-réajustements permanents, ou encore l'improvisation
comme discipline de l'action298(*).
A Chamonix, la démarche de bricolage mise en oeuvre
pour les opérations de lotissement traduit à la fois cette
démarche de tâtonnement (vers un meilleur montage juridique
à chaque opération), ainsi qu'une ingéniosité,
peut-être même une ruse, dans la façon d'utiliser les outils
existants, de les combiner ou de les distordre. Cette même
démarche se retrouve sur le Vercors et sur Belledonne, qui, chacun
à leur manière, développe aussi une intelligence dans
l'agencement des outils entre eux ou dans l'utilisation renouvelée de
ces derniers.
A partir de ce constat, la figure de
« l'acteur-bricoleur » construite par Louis Allie299(*) apporte l'éclairage
théorique suivant. « Tout d'abord, cet acteur-bricoleur n'est
pas un type d'acteur au même titre qu'un agriculteur, un élu ou un
militant. Il s'agit d'un fondement commun aux acteurs que nous
définissions ici afin de mieux saisir et expliquer comment et pourquoi
les acteurs de la gestion pensent et agissent comme ils le font ». A
partir de l'apport théorique de C.L. Strauss pour qui « il
semble ne pas y avoir de plus grand producteur d'espaces que le
bricoleur », L. Allie montre « comment et pourquoi l'acteur
au coeur des processus d'aménagement, de gestion et de planification
agit et pense à la manière d'un bricoleur qui
bricole » ; c'est précisément une dimension qu'a
révélé la question du foncier sur les trois terrains
étudiés.
Dans notre perspective de questionner le rapport à la
norme et au droit en aménagement, de son point de vue, l'auteur affirme
que :
« La production spatiale n'est pas une
fin en soi ni un moyen d'atteindre un optimum territorial mais simplement la
résultante de petits arrangements entre acteurs équipés
d'un bagage d'information, d'outils théoriques et pratiques innés
ou acquis, plus ou moins volontairement consentants mais qui est toujours la
résultante de choix structurellement contraints.
Ainsi, l'aménagement, la gestion et la
planification au sein d'objectifs de développement et de
préservation sont des activités à l'image d'un bricoleur
dont la portée des outils est parfois bien en deçà de
l'ampleur des projets. Il aimerait volontiers tout assembler d'un seul tour de
mains mais des aléas conceptuels, pratiques et techniques
l'empêchent d'y parvenir: il n'a pas tout le temps qu'il souhaite pour se
familiariser avec les outils (par ex. P.L.U., S.CO.T., P.N.R. et S.R.U.) qui ne
sont pas tous faciles d'utilisation, il a un budget limité, il ne peut
pas toujours mettre à jour son équipement, les bons
matériaux ne sont pas nécessairement à portée de
mains, les partenaires sont plus ou moins disponibles; il possède
cependant des habiletés exceptionnelles qui lui permettent de tout faire
avec presque rien »300(*).
La particularité offerte ici par les territoires de
montagne est peut-être d'accroître cette nécessité
d'allier développement et protection, et par conséquent de
bricoler des solutions territoriales particulières dans l'espace et dans
le temps. Une nécessité affirmée à plusieurs
reprises dans les deux cadres normatifs étudiés, la Convention
alpine et la DTA des Alpes du Nord, et dont la difficulté est
partagée par les acteurs rencontrés.
Ce premier chapitre a souhaité explorer le défi
que constitue finalement cette articulation de la théorie des cadres
normatifs à la pratique des initiatives locales. L'intérêt
d'une réflexion sur les cadres normatifs de l'aménagement est
finalement posé en ces termes. Par la « gouvernance », la
« démocratie participative », ou encore le «
développement durable », l'Etat incite, encourage,
préconise. En revanche, avec la profusion de cadres normatifs, de lois,
de règles, l'Etat semble en réalité rechercher une
nouvelle maîtrise du territoire dans un contexte d'incertitude, notamment
économique et climatique.
Chapitre 2. De la spécificité alpine en
matière de politique foncière
Le périmètre d'étude de ce travail de
mémoire se confond avec celui de la Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord : il s'agit d'un territoire
hétérogène, constitué par exemple de larges
vallées urbanisées à l'image du Sillon alpin, de
vallées étroites, industrielles ou touristiques (par exemple, la
vallée de l'Arve en Haute-Savoie), de plateaux, de coteaux ou de balcons
qui se péri-urbanisent progressivement (ou se
« monturbanisent »301(*)). A l'opposé, les Alpes du Nord sont aussi
des alpages, de hauts sommets et des paysages patrimoniaux, ou encore des
versants qui s'enfrichent (par exemple, la vallée du Haut-Brédat
en Isère).
Or, comme le constate Josselin Dupont dont la thèse est
en cours, il existe peu « d'études
générales » sur le foncier dans un contexte
régional en France. Le retour aux approches régionalistes
pourrait ainsi constituer un nouveau champ d'investigation scientifique,
« surtout si il est enrichi par l'analyse et l'évaluation
d'expériences antérieures (en France mais aussi à
l'étranger) » 302(*).
L'enjeu de cette question, éminemment empreinte des
fondements de l'Institut de Géographie Alpine de Grenoble, est
peut-être de réussir à distinguer ce qui
relèverait :
ü d'une part, du particularisme :
« tendance d'un groupe à conserver ses traits particuliers,
distinctifs. Particularisme artistique; particularisme corporatif;
particularisme breton »303(*). Donc, ce qui distingue les politiques
foncières alpines d'autres formes de politique foncière.
ü d'autre part, de la
spécificité : « qualité de
ce qui est spécifique, qui présente une caractéristique
originale et exclusive »304(*). Donc, ce qui rend les politiques foncières
alpines uniques.
Cependant, il s'agit ici de questionner, avec une moindre
ambition, une « potentielle » spécificité
alpine en matière de politique foncière. L'hypothèse est
la suivante : les caractéristiques spécifiques aux
vallées alpines jouent peut-être un rôle dans la
difficulté constatée du passage à l'action
foncière, autrement dit, y'a-t-il une spécificité
alpine en matière de politique foncière ? Est-ce
que les particularismes fonciers que l'on observe sont liés à la
montagne ou à d'autres facteurs ?305(*) Dès lors, cette première analyse
permet de constituer les bases d'une réflexion qu'il faudrait
approfondir par ailleurs.
1. Des particularismes reconnus aux spécificités
proclamées
1.1. La loi Montagne de
1985
Printemps 2010, la réalisation d'un
énième « Bilan de la Loi Montagne » a
été entreprise par le Conseil national de la montagne. Dès
2002, le rapport d'information de Jean-Paul Amoudry (au nom de la mission
commune d'information) dresse un « bilan de la politique de la
montagne et en particulier de l'application de la loi du 9 janvier 1985, de son
avenir, et de ses nécessaires adaptations »306(*). En 2003, une autre mission
d'information initiée par les élus de l'Association Nationale des
Elus de Montagne (ANEM) aboutit à une proposition de Loi307(*). Pour sa part, le
Comité français de l'Union Mondiale pour la Nature (UICN)
édite en 2005 un bilan des vingt ans de la loi Montagne
accompagné de propositions308(*).
Tous ces bilan dressés s'accordent à
reconnaître que la loi Montagne de 1985 a constitué un cadre
cohérent pour la mise en oeuvre d'une politique de la montagne qui ne
reniait pas la compensation des handicaps du territoire alpin, et donne droit
à la reconnaissance de la spécificité de la montagne. L'un
de ces initiateurs, Louis Besson, reconnait qu'il s'agissait d'une loi
« assez révolutionnaire » puisque
« c'était le premier texte qui ne s'appliquait pas à la
totalité du territoire mais uniquement aux 22% qui occupe la
montagne »309(*). Aujourd'hui, les opinions divergent, une loi
vidée de sa substance ou édulcorée pour certains, un flou
juridique qui la rend inapplicable pour d'autres310(*), mais ces opinions se
retrouvent autour d'une nécessaire réforme.
Toutefois, la loi Montagne symbolise la reconnaissance de
particularismes régionaux des territoires de montagne (divisés en
sept massifs, dont les Alpes) qui sont élevés au rang de
« spécificités » reconnues par la Nation, les
élus montagnards s'attachant à revendiquer dès les
années 1970 un « droit à la
différence »311(*). Cette spécificité revendique, de
fait, des caractéristiques originales et exclusives en matière
d'organisation institutionnelle, d'aménagement et de
développement du territoire en montagne. En revanche, la loi
Montagne ne permet pas de répondre à la question d'une
spécificité alpine au sein même de la
spécificité montagnarde.
De plus, avec la loi Montagne, le pari a été
fait de rapprocher les décisions du terrain, concrétisant alors
« l'aboutissement d'un vaste mouvement qui croit à
l'efficacité du développement maîtrisé par les
acteurs locaux »312(*). Si l'auto-développement est fondé sur
la mobilisation locale et maîtrisée de toutes les ressources
territoriales, la maîtrise du foncier aurait dû devenir au fil du
temps un axe majeur des politiques d'aménagement. Paradoxalement, la
prise de conscience de l'ampleur de la problématique du logement dans
les vallées alpines a été très tardive :
« on pressentait bien les choses mais elles n'étaient pas
objectivées et ne justifiaient pas la mise en place de dispositions
particulières »313(*), cela pourrait par ailleurs être
qualifiée de spécificité.
Enfin, le projet d'une Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord, dont la décision est intervenue
dix ans après le vote de la loi Montagne, vient infléchir
fortement les ambitions d'auto-développement qui ont pu être
portées dans les Alpes, par sa nature même de
« Directive étatique ». Dès lors, si une
spécificité alpine devait s'édifier, ce fût sous le
contrôle de l'Etat par un document de planification opposable.
Aujourd'hui, la perte du caractère opposable de l'ancienne DTA devenue
DTADD des Alpes du Nord, peut être vue soit comme un échec de
l'Etat à imposer « un cadre de cohérence au
développement durable du territoire »314(*), soit comme un retour de
l'Etat à une stratégie d'auto-développement des
territoires (dans la continuité du désengagement financier des
l'Etat et d'un transfert de compétences notamment vers les
régions).
1.2. Entre handicaps et
opportunités pour le territoire alpin
Au sens de la loi Montagne de 1985, les particularismes
montagnards, formulés plutôt comme des
« handicaps », deviennent constitutifs d'une
véritable « spécificité montagnarde ».
La proposition de loi de l'ANEM en 2003 reprend cette notion de
« spécificité montagnarde » et propose la
nouvelle définition suivante315(*) :
« L'article 3 de la proposition de loi introduit
une nouvelle définition de la montagne. Celle-ci est
présentée comme un territoire caractérisé par des
modes de vie et d'occupation de l'espace, des activités
économiques, des formes d'organisation sociale et des cultures
originales, ainsi que par des écosystèmes particuliers
représentant autant d'adaptations des sociétés ou
espèces aux caractéristiques géographiques que sont
l'altitude, la pente, le climat. La montagne est ainsi saisie dans son
originalité et dans son identité profonde. Elle apparaît
comme un « système » complexe, géographique, humain,
biologique, qui exige d'être appréhendé dans son ensemble.
Le fondement de l'intervention publique n'est donc plus le handicap à
corriger mais le caractère spécifique d'un territoire, ce qui
élargit considérablement le champ des politiques à mettre
en oeuvre ».
A travers les entretiens, cette notion de
« spécificité montagnarde » se confond avec
l'idée d'une « spécificité alpine »
que l'on tente de formuler. Les premiers éléments
évoqués, impactant nécessairement la gestion de l'espace
et donc la politique foncière à mettre en oeuvre, relèvent
des caractéristiques physiques du territoire alpin : ils reprennent
ainsi les termes de la définition de l'ANEM ci-dessus. Ces
caractéristiques topographique et géographiques sont
également reprises par les chercheurs qui reconnaissent eux-aussi leurs
« effets induits » sur le foncier : « la
région Rhône-Alpes, avec sa capitale lyonnaise et le Sillon alpin,
font partie des régions présentant un tissu urbain dense et des
phénomènes de desserrement urbain associés. S'ajoute
à cela une topographie montagnarde qui réduit d'autant les
surfaces facilement urbanisables. Ces différents éléments
contribuent à donner une tonalité particulière aux
enjeux fonciers dans ces territoires touristiques, même si ils
restent le reflet de tendances lourdes aux échelons national comme
européen »316(*). Cette « tonalité
particulière » dont il est question peut laisser supposer que
les enjeux fonciers nécessitent une politique foncière
adaptée au territoire : en somme, passer
« d'enjeux fonciers sur le territoires alpins » à
« des enjeux fonciers alpins ».
Face au changement climatique, la CIPRA317(*) précise que les Alpes
se caractérisent par des particularités qui doivent être
prise en compte par le développement territorial et la protection du
climat. Ainsi, ce sont principalement les risques naturels qui font peser une
menace importante sur les populations locales, pour qui l'espace urbanisable
est amené à se réduire de plus en plus. Cette question des
risques naturels et de son impact sur la limitation de l'expansion urbaine pour
protéger les populations (par la généralisation des Plans
de Prévention des Risques) est un enjeu majeur des territoires alpins
détaillé dans le projet de DTA des Alpes du Nord : couloirs
d'avalanche, risques d'inondation, d'éboulement ou de glissement de
terrain sont autant de facteurs qui participent fortement à diminuer le
foncier disponible pour l'urbanisation.
Enfin, il apparait évident que la gestion courante d'un
territoire montagnard, généralement plus vaste, discontinu et
accidenté, subissant des contraintes géophysiques et climatiques,
est plus coûteuse qu'en plaine (notamment pour les voiries et
réseaux divers). Ces surcoûts demeurent des handicaps pour les
collectivités en zone de montagne qui souhaitent par exemple ouvrir
à l'habitat des espaces pentues, boisés ou en friche, pour
répondre à la forte demande de logement.
Pourtant, si ces handicaps montagnards accroissent
objectivement les difficultés de gestion de l'espace et participent
à l'émergence d'enjeux fonciers spécifiquement alpins,
dans notre « imaginaire aménageur »318(*) ils constituent des
défis à relever, voire des opportunités pour marquer une
singularité des « gens » et du territoire alpin (et
pourquoi pas une spécificité).
Plusieurs ouvrages, séminaires ou colloques mobilisent
de nombreux acteurs alpins selon une même dynamique que l'on peut essayer
de résumer ainsi : « le territoire alpin est
spécifique mais profitons-en pour développer une intelligence
particulière aux problèmes rencontrés afin de les
dépasser collectivement »319(*). Ainsi, les deux derniers colloques de la Facim
(cimes 2007 et cimes 2009) s'intitulent respectivement, « la
montagne, univers de tous les possibles ? » et
« construire dans la pente, une
opportunité ? » : les actes de ces deux colloques
permettent d'illustrer l'idée selon laquelle, si une
spécificité alpine existe, elle constitue en tout cas une
opportunité de développement et d'innovation pour le
territoire.
De même, dans son article Innovation et territoires:
les effets contradictoires de la marginalité320(*), Frédéric
Giraut invoque « la posture optimiste qui [...] se focalise sur les
marges de manoeuvre offertes par la situation périphérique pour
innover hors de standards qui régissent l'économie du centre,
mais aussi hors des normes que le centre impose en son sein mais auxquelles la
marge peut déroger [...] pour adapter les pratiques à ses
difficultés ou problématiques propres, et parce que la
dérogation n'y met pas en cause la cohérence du centre et peut
donc y être tolérée, ce qui en fait des espaces
d'expérimentations (Antheaume & Girut, 2002) ». Dans la
littérature, Louis Allie321(*) remarque que la montagne apparaît sous la
métaphore de « laboratoire de la diversité »
en reprenant ainsi le titre d'un ouvrage collectif, et poursuit :
« comme tout ce qui est grand, écrit Le Bras, la montagne a
une dimension d'universalité: c'est un lieu d'innovation, un laboratoire
(...). L'idée de laboratoire renvoie aussi à l'idée de
produit à étudier. On retrouve à cette occasion la
revendication de SPÉCIFICITÉ du milieu et de la
société montagnarde ».
« Spécificité montagnarde »,
« opportunité » et
« expérimentation » semblent être des notions
clés qui éloignent les caractères handicapants de ces
mêmes territoires alpins. Ainsi, c'est peut-être parce que les
acteurs locaux sont pris dans une dualité d'appréciation qu'il
est difficile de saisir, à travers les entretiens
réalisés, dans quelle mesure des « enjeux fonciers
alpins » et une « spécificité alpine en
matière de politique foncière » peuvent globalement
faire sens.
1.3. Une
spécificité des territoires touristiques alpins ?
Il semble que les territoires de montagne cumulent les
évolutions de deux phénomènes, sources de
difficultés territoriales profondes. A la manière dont l'exprime
S. Duvillard, A. Sgard et C. Ziotti, « depuis que les prix de
l'immobilier s'envolent, rien n'est plus comme avant ; ou du moins rien ne sera
plus comme avant. Ce phénomène [la pression foncière]
s'observe sur divers territoires en France, mais il prend une acuité
particulière dans les régions touristiques où cette
activité exacerbe les pressions en rentrant en concurrence avec les
autres logiques d'occupation de l'espace, en pesant sur le marché des
biens mais aussi sur le dynamisme économique et l'attractivité.
[...] Les territoires touristiques des Alpes du nord connaissent actuellement
des transformations majeures liées tant à l'évolution des
pratiques de séjours et de loisirs, qu'aux effets de plus en plus
étendus de la périurbanisation et aux nouvelles formes de
résidentialité »322(*).
Ainsi, en territoire alpin, l'enjeu du multi-usage de l'espace
est très présent, tant dans les deux cadres normatifs alpins
étudiés (Convention alpine et DTA des Alpes du Nord) que dans les
entretiens réalisés, a priori quelque soit les
territoires concernés du périmètre d'étude. De
plus, on peut considérer qu'une majorité de territoires alpins
sont « touristiques » bien qu'il ne le soit pas uniquement.
L'arbitrage foncier qui tente d'être mené pour maintenir le
multi-usage sur certains espaces se confrontent donc à deux
problématiques majeures :
ü les évolutions du tourisme alpin
ü la périurbanisation croissante des fonds de
vallées, des coteaux, des balcons et des plateaux
Les effets conjugués de ces deux
phénomènes constituent une caractéristique de l'espace
alpin qui semble être indéniable.
Pour leur part, les stations de ski apparaissent être
des territoires touristiques particuliers, y compris en matière de
gestion foncière à l'image du questionnement suivant :
« quelles sont les marges de libertés laissées par les
politiques foncières passées ? Autrement dit, les stations
de tourisme sont-elles structurellement handicapées pour répondre
aux pressions foncières qu'elles subissent et maintenir leur
capacité à porter une offre
touristique ? »323(*). Les vieux lotissements du début des stations
de ski cristallisent par exemple des points de blocage à une gestion
foncière répondant à d'autres objectifs : ainsi,
certains cahiers des charges très précis sur la destination
individuelle des logements empêchent aujourd'hui d'en changer
l'utilisation vers du logement collectif car ces dispositions de droit
privé ne peuvent être abandonnées qu'à
l'unanimité des propriétaires.
Une autre dimension « spécifique »
sur ces territoires touristiques alpins s'avère être
l'organisation institutionnelle des communes de station. D'un point de vue
opérationnel, « il est à constater, à
déplorer diront certains, qu'aucun guide de bonnes pratiques n'existe
sur les outils des politiques foncières locales, appliqués
à la spécificité institutionnelle des communes supports de
station »324(*). D'un point de vue plus polémique, cette
spécificité des territoires touristiques alpins est
abordée notamment par un article de Jacques Manesse au titre
évocateur et provocateur, Montagne : qui
décide ?325(*) :
« Tout ce qui touche au partage de l'espace,
déclenche des passions, suscite conflits et controverses.
L'expérience de l'aménagement touristique de la montagne est,
depuis une trentaine d'années, un de ces exemples, quasi
caricatural.[..] Le débat se cristallise autour de la question "qui
décide", à laquelle, bien sûr aucune réponse
tranchée ne peut être objectivement apportée. La discussion
porte d'abord moins sur les finalités, le "pourquoi" que sur le
"comment", sur les procédures. Celles-ci ont pris le pas sur les
objectifs. On en arrive à se demander de quelles politiques elles
constituent la mise en oeuvre.
Les tenants d'un étatisme plus ou moins bien
tempéré invoquent, selon les cas, l'utilité collective
d'un patrimoine naturel de valeur universelle ou les enjeux économique
et sociaux de caractère national. Leur répond comme en
écho le slogan sommaire "la montagne aux montagnards" qui a fleuri ces
dernières années sans arriver toujours à dissimuler la
revendication du droit de se vendre au plus offrant ».
Enfin, il serait difficile de ne pas faire de parallèle
avec les controverses suscitées par le projet de DTA des Alpes du Nord,
bien que l'article de Manesse date de 1988. Aussi bien que le développe
Camille Blanc326(*), ce
sont dans les territoires touristiques alpins que les oppositions au projet de
DTA ont été les plus vives, marquant ainsi une distinction
possible entre les stations de montagne et les autres territoires alpins,
touristiques ou non.
2. A qui la terre ?
Reprenant une partie du titre de la thèse de
Mériaudeau, A qui la terre ? La propriété
foncière en Savoie et Haute Savoie327(*), soutenue en 1985, cette partie s'attache
à questionner la propriété foncière dans les
territoires alpins et ses incidences potentielles sur la gestion
foncière des collectivités.
Ce questionnement est apparu nécessaire à
travers les entretiens réalisés dont les avis divergeaient :
deux points de vue s'opposent ainsi. D'une part, l'avantage dans les
territoires alpins, et ce qui pourrait en faire une spécificité,
c'est une relative disponibilité du foncier : beaucoup de parcelles
appartiennent aux communes alpines, y compris en zone potentiellement
urbanisable. La faible utilisation d'outils du type ZAC ou DUP
(déclaration d'utilité publique, pour de l'expropriation)
rapporté au nombre de m² construits dans les communes alpines vient
appuyer cet avis : la pression foncière serait donc toute
relative, car de nombreuses communes détenant du foncier
participent en un sens à accroître ce phénomène.
A contrario, face à la pression foncière les
communes alpines (certaines ont dilapidé leur foncier dans les
années 1990 et d'autres n'en ont jamais disposé)
acquièrent avec une grande difficulté du foncier très
coûteux pour réaliser des projet d'habitat ou d'équipement
par exemple. La naissance de trois Etablissement Public Foncier
Locaux328(*) (à
l'initiative des collectivités, contrairement aux EPF d'Etat dont le
périmètre est imposé) marque fortement la
nécessité de disposer d'un outil d'acquisition foncière
pour les collectivités des Alpes du Nord, d'autant plus qu'il est le
fruit de leur initiative (l'adhésion à l'EPFL est volontaire).
Face à ce questionnement, il apparait intéressant de solliciter
les recherches pointues de Robert Mériaudeau réalisées
dans les années 1980.
1.1. L'apport de
Mériaudeau sur la question foncière alpine
Robert Mériaudeau329(*), offre une étude presque exhaustive de la
propriété foncière dans les 595 communes savoyardes comme
le relève Bernard Janin dans un compte-rendu critique de ces
travaux330(*). En
répondant aux deux questions suivantes, l'auteur montre qu'une
indéniable spécificité foncière caractérise
les montagnes françaises et que celle-ci impose des contraintes
particulières à l'aménagement du territoire. D'une part,
à qui appartient la terre savoyarde aujourd'hui ? Et d'autre part,
quelles sont ses fonctions ?
L'analyse de Mériaudeau s'effectue à partir de
la distinction entre personnes morales et personnes physiques et son
décryptage du cadastre a pour résultats de mettre en relief le
bouleversement de l'espace rural et l'ébranlement de la tradition
paysanne au profit de l'espace urbain et de la civilisation des loisirs. Selon
B. Janin « le cadastre est un palimpseste où s'inscrivent
l'organisation agraire et sociale d'hier et celle de
demain »331(*), ce que traduit aussi la conclusion
générale de Mériaudeau : « finalement,
depuis le début du XXIème siècle, le véritable
changement réside moins dans la distribution superficiaire de la
propriété que dans la répartition sociale des bien-fonds
des personnes physiques. Et la mutation la plus profonde porte sur les
fonctions mêmes de la propriété
foncière »332(*).
En matière de spécificité foncière
alpine, Mériaudeau affirme : « Oui il existe une
spécificité foncière de la montagne française, et
plus particulièrement de sa partie alpestre entendue ici comme une
montagne constituée de vigoureux reliefs saillants séparés
par de profondes vallées. Cette spécificité s'exprime
d'une part par la forte proportion de l'appropriation publique dans les parties
les plus élevées et/ou fortes pentes, et d'autre part, par des
tensions exacerbés sur les bas versants et les fonds de
vallées »333(*). L'auteur établit donc une distinction entre
ces deux types d'espaces : les « hauts versants »,
alpages et forêts qui subissent le « déterminisme de la
pente et de l'altitude », et les « bas
versants », fonds de vallées et autres replats qui sont
concernés par des tensions foncières liées à
l'urbanisation croissante.
Tout d'abord, sur la montagne française de haute et
moyenne altitude, Mériaudeau indique (statistiquement) qu'elle est
le lieu de l'appropriation publique collective constituant une
spécificité foncière de la montagne
alpestre : les grandes communes situées à haute
ou moyenne altitude possèdent un vaste communal, les petites communes
sises dans les fonds de vallée ou de cluse, dans les bassins
intramontagnards ou sur les bas versants, ne disposent que d'un bien collectif
de petite contenance. Son analyse fine du parcellaire alpin montre
l'hétérogénéité des communes alpines en
matière de propriété foncière, cela rend
intelligible les deux positions divergentes développées
précédemment. Il relève qu'à l'époque, la
plus vaste cote parmi les possessions de communes est celle de Chamonix
« qui se range parmi les plus grandes propriétés
française, mesure 18 47O hectares ». Ainsi, à
l'auteur de proclamer : « oui, la montagne française,
notamment dans ses parties les plus alpestres, est bien la terre
d'élection de la grande propriété collective ».
Une distinction peut être faite entre les Alpes du Nord et les Alpes du
Sud pour qui la forme juridique du communal est préférée
à la propriété domaniale plutôt étatique.
Mériaudeau relève également une autre
spécificité montagnarde : celle de la diversité
et la complexité des régimes juridiques et des droits d'usage du
communal et du sectionnal. Cette spécificité à pour
conséquence selon lui qu'il faut beaucoup de temps et de
détermination pour réussir une opération
d'aménagement du territoire... sur des communaux ou sectionnaux soumis
au régime forestier. Les droits d'usages, quant à eux, sont
sources de plus de difficultés encore... Mériaudeau
présageait dès lors que : « droits d'usage,
complexité ou flou juridique pourraient, à terme, en ce qui
concerne l'aménagement du territoire, donner à la montagne
alpestre une inquiétante spécificité ».
Ensuite, concernant les replats, les bas versants et les
fonds de vallées, l'auteur constate qu'ils sont les lieux des
principaux conflits fonciers, et reconnait par ailleurs qu'il y a aussi des
conflits « sur les hauts » (création de parc
naturel, réserves naturelles, extension de domaine de station de ski,
exercice des droits de chasse) qui sont toutefois « plus
localisés et beaucoup moins fréquents que dans les fonds de
vallées ». L'auteur caractérise ces espaces par
« de minuscules biens-fonds privés », des
« fiefs lilliputiens » ou encore une
« proliférante micro-propriété » qui
ont des conséquences multiples sur l'aménagement du territoire
alpin : selon lui et « de manière générale,
en montagne, c'est cette micro-propriété qui nourrit une bonne
part de l'offre sur un marché très peu ouvert et c'est elle aussi
qui règle, indirectement, le prix des terres agricoles ». Le
recul historique permet d'expliquer cette situation : « ces
espaces furent, jadis et naguère, l'objet d'une âpre
compétition foncière que la prolifération des micro-cotes
révèle aujourd'hui encore ».
Constituant un sérieux handicap pour la
collectivité, ces espaces sont les lieux de tous les conflits fonciers
car leur situation est très convoitée pour : de
l'habitat, des loisirs et du tourisme, de l'industrie, du commerce et des
services, des transports, de la production hydro-électrique ou de la
protection des bas pays contre les crues, etc. Ainsi, le territoire de
l'urbain est restreint, « ce n'est pas la montagne qui fait la
pression foncière, c'est bien la ville »334(*). Sur ce problème du
multi-usage de l'espace alpin, Mériaudeau ne manque pas de soulever un
paradoxe tout à fait d'actualité335(*) : « Les
meilleures terres agricoles sont ainsi les plus disputées au tire de
l'aménagement du territoire : voilà encore une autre
spécificité bien montagnarde ». A l'époque,
cette caractéristique se limitait à l'espace montagnard comme
l'indique l'auteur, en revanche, ce phénomène d'artificialisation
des terres agricoles, même les plus fertiles, s'est aujourd'hui
étendu à tout le territoire français336(*).
En conclusion, Mériaudeau réaffirme son propos
quant à une spécificité alpine en matière de
foncier:
« Oui d'un point de vue foncier, tant en ce qui
concerne la propriété elle-même que ces contraintes en
termes d'aménagement du territoire, la montagne, et plus
spécifiquement la montagne alpestre, est autre, particulière,
spécifique... Cette spécificité née de
déterminants locaux forts et anciens, perdure alors même que ces
déterminants ont presque perdu toute signification locale... Toutefois,
tant que le législateur ne se sera profondément
pénétré de la complexité de cette
spécificité, tant qu'il tentera d'imposer une rationalité
exogène oublieuse des mentalités indigènes, il n'y a
guère de risques à prévoir l'échec des
législations foncières en montagne ».
Cette dernière remarque de Mériaudeau
montre peut-être à quel point le rapport à la norme et au
droit en aménagement, qui est pénétré lui aussi
d'une potentielle spécificité alpine, à une incidence
tangible sur la mise en oeuvre de politiques foncières volontaristes
dans les Alpes.
2.2. Un état d'esprit
typique et ses incidences sur les politiques foncières alpines
S'il n'y a pas une politique foncière alpine mais de
multiples politiques foncières, propres à chaque territoire de
projet, certaines d'entre elles sont pourtant le reflet d'un état
d'esprit partagé plus largement. Plus marqué en Savoie et
Haute-Savoie qu'en Isère, cet état d'esprit montagnard est
peut-être ce que suggère Mériaudeau par
« mentalités indigènes » : il s'agit
d'une autre dimension, plus sociologique, que l'on pourrait retrouver dans une
spécificité alpine des politiques foncières. Cet
état d'esprit typique des territoires de montagne a été
abordé également lors des entretiens, un argument pour tenter de
mieux comprendre comment les communes alpines considèrent les enjeux
fonciers de leur territoire, et surtout, quelles stratégies (dont les
politiques foncières) elles mobilisent pour y faire face.
A ce propos, le directeur du CAUE de Haute-Savoie, Arnaud
Dutheil337(*) indique
que pendant trente ans le développement économique du
département fut incroyable : au sein du triangle Lausanne - Annecy
- Milan, dont le PIB est le plus élevé d'Europe, ce
« miracle de développement » tient à :
quatre moteurs :
ü la finance grâce à la proximité avec
Genève
ü l'industrie de « l'or blanc » avec les
stations de ski
ü le leadership mondial en mécanique de la
vallée de l'Arve
ü l'agriculture de montagne grâce à ses AOC
En somme, ces territoires alpins sont pétris de
l'esprit libéral - comprendre ici « favorable aux
libertés individuelles »338(*) - qui porte une vision dynamique et entrepreneuriale
du territoire alpin. Le projet de territoire et ses priorités sont
reliées à ce mode de développement, marquant
nécessairement la gestion foncière locale : une
volonté de maîtrise plus ou moins forte, une stratégie de
réserves foncières, un plan d'actions autour d'une politique
foncière, ou à l'inverse, une dimension du projet local
secondaire. Par la discussion avec les acteurs économiques notamment,
les collectivités parviennent ainsi à résoudre ou à
réduire certains problèmes autour du foncier (sa
disponibilité par exemple) mais d'autres problèmes s'aggravent
à l'instar de l'éviction des populations locales qui ne trouvent
plus de logement à prix abordable. Dans cette perspective, il est
possible que, ancrées dans un système économique qui a
généré un essor formidable du territoire mais qui ne
fonctionne plus si bien, certaines collectivités alpines ont des
difficultés, ou des réticences, à trouver un modèle
de développement territorial qui leur permettrait de faire face à
un nouveau contexte urbain et touristique, et qui se traduirait in
fine par une politique foncière locale adaptée aux enjeux
locaux.
Une seconde dimension de cet état d'esprit typique qui
peut influencer la manière de faire le territoire alpin est sans doute
plus anthropologique339(*). Selon l'expression familière, en montagne,
« tout le monde connait tout le monde » : cette
caractéristique permet souvent de distinguer les espaces ruraux des
espaces urbains et métropolitains, mais en matière de foncier,
cela constitue une véritable
« problématique ». Faisant écho à
l'échelle la mieux adaptée pour traiter des questions
foncières, celle de l'intercommunalité ou du bassin de vie est
plébiscitée dans le but, entre autre, d'éloigner le
pouvoir décisionnel de l'échelon communal, trop enclin à
l'influence des demandes individuelles au lieu de servir l'intérêt
du collectif.
Les territoires alpins ne font donc pas exception à
cette problématique du foncier, peut-être bien au contraire. Sur
un territoire montagnard où des communautés
d'intérêts (essentiellement économiques) peuvent être
plus fortes et plus persistantes qu'ailleurs, dont les acteurs institutionnels
et économiques sont enchevêtrés ou se confondent même
souvent, la gestion du foncier (du droit, de l'argent et de la
politique340(*))
est hautement plus délicate que l'implication de chacun dans les
affaires locales est forte.
Cette « communauté montagnarde
d'intérêts » semble rassemblée autour d'une
même vision de l'aménagement et du développement de la
montagne, partageant probablement une identité montagnarde commune et
fréquentant les mêmes institutions politiques et
économiques (par exemple, l'ANEM, l'ANMSM, les CCI, Ski France, France
Neige International, etc.). Pour autant, l'implication parfois personnelle de
certains élus de montagne ne signifie pas fatalement l'absence de projet
de territoire sur le long terme. A l'inverse d'un élu « de
plaine » qui peut s'en aller à l'issu de son mandat, les
élus de montagne qui sont communément « du
cru » restent bien souvent, même s'ils ne sont pas
réélus : finalement, ils assument peut-être plus
qu'ailleurs les conséquences de leurs actions, y compris en
matière de foncier. Trouver un équilibre entre implication
personnelle, familiale, ou amicale et intérêt
général au coeur d'un projet de territoire
« durable »341(*) apparait donc le plus ardu au sein de ces
communautés alpines.
Cependant, afin d'étayer l'hypothèse d'un
état d'esprit typique alpin et les suppositions évoquées
précédemment, il serait nécessaire de rechercher des
études sociologiques ou anthropologiques des acteurs alpins
d'aujourd'hui, ou d'en réaliser, par exemple à la manière
des travaux des sociologues Monique Pinçon-Charlot et Michel
Pinçon sur la bourgeoisie française342(*).
3. Montagne et littoral même combat foncier ?
3.1. Des problématiques
foncières assez proches
Sur ces deux types de territoire, « les
collectivités doivent avoir conscience des particularités (sur
les plans géographique, historique, naturel, etc.) et des
sensibilités des espaces littoral et montagne »343(*). Pourtant très
différents sur le plan géographique ou topographique, le littoral
et la montagne sont tous deux des espaces particulièrement sensibles,
dont « les richesses écologiques, patrimoniales, et
paysagères qui les caractérisent, les soumettent en
général à des pressions fortes en matière
d'aménagement »344(*). Ces pressions de l'urbanisation rappellent trois
qualificatifs partagés en grande partie par ces territoires alpins ou
littoraux :
ü attractif : pour l'emploi et l'habitat, ces
territoires subissent une pression démographique.
ü touristique : leur patrimoine attire de
très nombreux touristes.
ü limité : par le rivage ou la pente,
l'espace « à occuper » temporairement ou
définitivement est restreint.
D'un point de vue foncier, la montagne et le littoral sont
donc assez semblables. La pression foncière croissante résulte de
la conjonction de plusieurs phénomènes urbains qui semble-t-il,
n'ont pas été suffisamment anticipés. Ainsi, la pression
démographique locale se confronte à celle du tourisme et
créée une situation de concurrence par exemple entre les
différents types d'habitats. A la montagne comme à la mer, les
prix du marché évincent les populations locales au profit des
résidents secondaires dont la capacité d'investissement est plus
élevée (notamment les investisseurs étrangers). De
même, l'artificialisation croissante d'espaces naturels ou agricoles est
un phénomène partagé. La disparition du foncier agricole,
qui semble avoir été estimée à 24m² de terres
par seconde345(*), ou
encore 320 terrains de football par jour346(*), concerne également les parcelles agricoles
« de proximité » (à proximité des
centres urbains), en raison du refus de certains propriétaires de louer
leurs terres à l'exploitation, en montagne et aussi sur le
littoral347(*).
Au regard des outils dont disposent la montagne et le
littoral, ces territoires bénéficient chacun de mesures prenant
en compte leurs spécificités. Par exemple, la loi Montagne de
1985 est suivie de la loi Littoral en 1986, et le réseau d'espaces
protégés Natura 2000 regroupent des sites alpins et du littoral.
Si le classement en « Parc national »
bénéficie plutôt aux territoires alpins, le littoral
profite de l'action d'un Conservatoire qui lui est dédié. En
effet, le Conservatoire du littoral (« Conservatoire de l'espace
littoral et des rivages lacustres ») est un établissement
public créé en 1975 « qui acquiert des terrains
fragiles ou menacés à l'amiable, par préemption, ou
exceptionnellement par expropriation »348(*). Le Conservatoire est donc
un outil opérationnel qui met en oeuvre une politique foncière
visant à la protection définitive des espaces naturels et des
paysages sur les rivages maritimes et lacustres français.
Massif alpin ou littoral français, il apparait que ces
deux espaces sensibles ont en commun la plupart des enjeux fonciers auxquels
ils doivent faire face, non sans difficulté, quelque soit leur
spécificité respective.
3.2. L'exemple de la
Bretagne
L'aperçu de la situation foncière en Bretagne
qui est dressé ci-dessous s'appuie en grande partie sur un article de
Josselin Dupont, dont la thèse actuellement en cours concerne
« La Maîtrise du foncier comme outil de gestion
intégré des territoires bretons »349(*). De toute évidence,
ce portrait succinct pourrait bien être celui d'un territoire alpin.
« Pierre d'angle des politiques
d'aménagement, la question foncière mobilise aujourd'hui nombre
d'acteurs privés et publics et tous s'accordent à
reconnaître qu'il n'existe pas de pénurie foncière brute
mais une insuffisance de terrains à prix abordables notamment pour
construire des logements adaptés aux besoins actuels. Fort de son
attractivité résidentielle, économique et touristique, le
territoire breton connaît une forte dynamique démographique, c'est
pourquoi il est aujourd'hui confronté à des enjeux fonciers de
premier ordre ».
La précision sur la pénurie foncière
permet de réitérer ici notre propos : dans les territoires
alpins comme en Bretagne, c'est la disponibilité d'un foncier à
prix abordable, pour les populations locales et pour les collectivités,
qui fait véritablement défaut. D'ailleurs, le
phénomène d'anticipation foncière (anticipation sur le
changement de zonage) participe à augmenter les prix, y compris sur des
parcelles classées « AU » ou
« A ».
« En effet, si l'on considère les
projections de l'Insee, la région Bretagne pourrait voir sa population
augmenter de 350 000 habitants d'ici à 2030. Cette pression
démographique nouvelle essentiellement due à un solde migratoire
très nettement positif, renforce une pression foncière
déjà très vive et pose la question de la consommation de
l'espace. Dans des territoires bretons où l'artificialisation de
l'espace avance à grands pas (+25% ces dix dernières
années selon l'Insee contre 16% en moyenne nationale), encouragée
par des modes d'habitat spécifiques (fort attachement à l'habitat
individuel), la consommation et le bon usage du capital foncier questionne les
acteurs des territoires bretons notamment face aux difficultés
d'accès au logement, en particulier pour les ménages les plus
modestes ».
Cette problématique du maintien des ménages
modestes dans les centres urbains est également partagée par les
territoires des Alpes du Nord. Un autre handicap s'impose aux territoires
touristiques, celui de la concurrence avec l'habitat secondaire ou touristique.
A Chamonix par exemple, mais probablement dans certaines communes du littoral
breton, les collectivités doivent faire face au déclin de leur
population active au profit des résidents secondaires ou des
touristes.
« La cohésion sociale et territoriale est
mise à rude épreuve et une ségrégation
socio-spatiale par les prix s'opère de fait (opposant ainsi les centres
aux périphéries et le littoral à l'arrière-pays) et
menace l'équilibre du développement régional. La forte
demande sociale actuelle (et à venir !) semble nécessiter
une intervention directe des institutions publiques sur le marché du
foncier et ce à une échelle régionale. C'est dans ce
contexte que le Conseil Régional cherche à mettre en place une
nouvelle politique territoriale s'appuyant notamment sur la création
d'un Etablissement Public Foncier (EPF) d'Etat.
L'EPF, outil de solidarité reposant sur la
mutualisation des moyens, il sera chargé de constituer des
réserves foncières pour faciliter l'action des
Intercommunalités en faveur de l'habitat (public et privé), de
l'environnement (protection des paysages et prévention des risques) et
du développement économique (capacité d'accueil et
reconquête de friches industrielles et militaires) ».
Créé par décret en Conseil d'Etat le 8
juin 2009, le « Foncier de Bretagne » est devenu
l'établissement public foncier d'Etat (sous son contrôle) dont le
périmètre d'intervention s'étend à l'ensemble de la
région administrative bretonne. De la même manière
qu'en Rhône-Alpes (qui dispose quant à elle d'un EPF d'Etat
-EPORA-, et de quatre EPFL), la Bretagne se dote d'un outil opérationnel
pour épauler les politiques foncières locales de ses
collectivités. Dorénavant, le foncier constitue un enjeu
territorial majeur en Bretagne. Daniel Cueff, le Président de Foncier de
Bretagne le présente ainsi : « la maîtrise du
foncier permet aux collectivités de mener leurs projets, de gérer
leur développement et ainsi de maîtriser leur avenir. Cependant,
toutes n'en ont pas les moyens notamment dans les zones rurales et littorales
particulièrement concernées par les pressions foncières.
D'autant qu'en dix ans, les prix ont en moyenne augmenté de 129% en
Bretagne et que la pression sur les terres urbanisables n'a cessé de
croître. Et que dire du grignotage des terres agricoles qui ne cesse de
s'accélérer année après
année »350(*).
Enfin, la question du foncier agricole occupe une place
importante en Bretagne. Si après quinze années de hausse les prix
des terres agricoles semblent s'être stabilisés, il
n'empêche que « 5 000 ha échappent
définitivement à l'agriculture »351(*). Dans ce contexte tendu, la
Safer intervient en utilisant son droit de préemption et est
également sollicitée pour aider les agriculteurs à
préserver l'environnement et la ressource en eau. Ainsi, dans les
bassins versants touchés par les algues vertes, des tentatives de
réserves foncières pour faciliter les échanges ou les
regroupements de parcelles sont en cours puisque les agriculteurs ne peuvent
plus exploiter les terres de manière intensive. En outre, cet exemple
montre que la préservation de l'environnement et des terres agricoles ne
s'opposent pas forcément.
Chapitre 3. Vers une gestion foncière durable des
territoires alpins
Ce dernier chapitre s'attèle à construire les
bases de ce que « la mode du durable » étendue au
champ du foncier appelle déjà « gestion foncière
durable », « foncier durable » ou encore
« politique foncière durable ». A la manière
dont cela a été énoncé en introduction de ce
mémoire, il s'agit de partir du postulat suivant : lorsqu'en amont,
une politique volontariste s'oriente en faveur d'un développement
durable de son territoire, alors seulement le rapprochement entre des actions
concrètes et un discours peut être effectif. Ainsi, le
qualificatif de durabilité apporte-t-il une dimension nouvelle ou un
sens renouvelé à l'action foncière ? Une
politique foncière durable est-elle différente d'une politique
foncière volontariste ? Ces questions tacheront d'être
éclaircies afin d'éviter l'écueil de cette « mode du
durable ». Enfin, d'un point de vue plus opérationnel, il
s'agit de voir « comment les préoccupations de
développement durable peuvent-elles s'intégrer
concrètement dans les politiques de gestion urbaine en
privilégiant le levier de la politique
foncière ? »352(*)
1. Foncier et durabilité
1.1. « Faire du
foncier durable »
Parmi les nombreuses recherches réalisées dans
le cadre de ce travail, le lien direct entre les termes
« foncier » et « durable » ou
« durabilité » reste encore très rare et
relativement récent (le plus « ancien » document
répertorié date de 2007353(*)). Si l'aménagement, l'urbanisme et
l'architecture « durables » sont entrés dans le
vocabulaire courant des professionnels, il semble donc que ce ne soit pas -
encore - le cas du foncier. Dans le cadre des actions menées par le
chantier maîtrise qualitative, innovation urbaine et sociale de
la démarche métropole Sillon alpin en 2006-2007354(*), Jean-Claude Martin,
Président de l'EPFL de la Haute-Savoie, Président de la
communauté de communes du pays d'Alby et Maire d'Alby-sur-Chéran
présente sa vision du « foncier durable » :
« J'entends par foncier durable un espace
construit, sans pour autant être dénaturé : pour cela,
il faut respecter les courbes de niveau, éviter les remblais,
gérer les eaux de pluie... En tant que maire, j'utilise plusieurs outils
pour faire du foncier durable. Le SCOT d'abord [...] qui constitue le meilleur
moyen de mettre en place une politique de l'aménagement du territoire
cohérente à l'échelle d'un bassin de vie. Le PLU ensuite,
qui permet de traduire ces orientations à l'échelle de la
commune. Enfin, le passage à la TPU [Taxe Professionnelle Unique] de la
communauté de communes a permis de définir judicieusement
l'emplacement des zones d'activités en effaçant la
compétition entre les communes ».
Un encart répond à la question
« qu'est-ce qu'un foncier durable ? ». Cinq axes
d'action sont ainsi proposés pour que ce foncier durable permette
« de limiter l'éparpillement urbain et de rationaliser
l'aménagement en termes de déplacements, de densité et de
formes urbaines »355(*):
ü privilégier l'urbanisation en continuité du
bâti existant,
ü polariser le territoire et hiérarchiser les
pôles urbains en fonction de leur accessibilité en transport en
commun (un pôle autour d'une gare par exemple),
ü fixer des objectifs de densité au projet urbain
(par exemple, les contrats d'axe avec le tramway grenoblois),
ü reconquérir en priorité les dents creuses du
tissu urbain (friches industrielles ou militaires par exemple),
ü proposer des nouvelles formes d'habitat qui
répondent aux enjeux de densification, de fonctionnalité, de
qualité de vie et de réduction de l'impact écologique du
bâti.
Il est ensuite rappeler qu'il faut au préalable
désigner les zones naturelles à préserver, les espaces
agricoles à forts potentiels, les zones à enjeu agricole et
espace de vie, définir celles où l'urbanisation doit se
concentrer, renforcer les pôles annexes, et éventuellement fixer
les densités de bâti, avant de conclure que la principale
clé de la maîtrise de l'étalement urbain, ce sont les
collectivités qui la détiennent, à travers les documents
de planification que constituent SCOT, PLU et PLH.
Si la construction du concept de « foncier
durable » ou de « gestion foncière
durable » peut tenter de renouveler l'approche de cette
thématique et faire évoluer les modes d'action, il est certain
que cette définition du foncier durable est loin de relever ce
défi. En réalité, on constate que l'expression
« foncier durable » correspond plutôt à une
« gestion foncière » ou une « politique
foncière » qui répondrait aux injonctions du
développement urbain durable. Les principes de ce foncier
durable sont donc la déclinaison d'un urbanisme
« économe en foncier » : on en revient ainsi
aux mêmes propositions que celles qui concernent l'aménagement ou
l'urbanisme durable.
1.2. Durabilité en
station de montagne
Si cette première tentative pour construire le concept
de « foncier durable » n'est pas concluante, il semble
intéressant de se tourner vers les territoires touristiques alpins
où la durabilité a progressivement remodelé les discours
des acteurs locaux.
Comme l'évoque - non sans moquerie - Vincent
Renard356(*) dès
2005, la notion de développement durable déferlera
inéluctablement sur les territoires alpins : « La
"conquête" de la montagne et le développement de l'industrie du
ski, avec notamment le "plan neige", ont constitué une étape qui
a probablement trop mis l'accent sur la monoactivité touristique
hivernal. L'heure est probablement venue de décliner la notion
fourre-tout de développement durable au territoire montagnard, en y
introduisant en particulier une perspective de diversité, de
stratégie de long terme et de
réversibilité ».
Effectivement, en quelques années à peine la
« durabilité » a envahi les stations de ski quelque
soit leur taille ou leur renommée357(*) : du changement d'ampoules au tri des
déchets en passant par la maîtrise de l'énergie et des
consommations d'eau, il demeure difficile à conceptualiser un
tel changement de paradigme sur ces territoires dont le mode de
développement industrielle (tourisme de masse) est - par essence -
incompatible avec des principes de durabilité ou de développement
durable des territoires alpins358(*).
En matière de foncier, les actions
réalisées dans les territoires touristiques alpins comme Chamonix
doivent s'inscrire dans une stratégie durable dans le temps : ici,
la durabilité peut alors se traduire par la notion de
pérennité. La gouvernance en station semble un levier
pertinent pour mobiliser efficacement les outils de maîtrise
foncière au service d'une vision partagée (par les acteurs
publics et privés et les habitants) du territoire.
Enfin, l'idée d'élaborer des indicateurs
fonciers et de les intégrer à une mesure globale de la
performance des stations et du degré de durabilité de leur
développement a été émise par les chercheurs du
Cemagref de Grenoble et du laboratoire PACTE359(*). Elle est tout à fait intéressante car
ces indicateurs permettraient sans doute de nuancer avec objectivité les
« bonnes performances » des stations engagées sur la
voie du développement durable. En extrapolant cette idée, on peut
se demander si ce n'était pas la dimension (limiter la consommation
d'espace par les stations de ski) la plus dérangeante du projet de DTA
des Alpes du Nord.
1.3. « Personne n'a
intérêt à scier la branche sur laquelle il
s'assoit »
La définition du développement durable
(« sustainable development ») communément
admise est celle du rapport Brundtland de 1987 : « un
développement qui répond aux besoins des
générations du présent sans compromettre la
capacité des générations futures à répondre
aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : le
concept de "besoins", et plus particulièrement des besoins essentiels
des plus démunis à qui il convient d'accorder la plus grande
priorité, et l'idée des limitations que l'état de nos
techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de
l'environnement à répondre aux besoins actuels et à
venir »360(*).
Les acteurs locaux rencontrés dans le cadre de
l'étude sont concernés par les questions foncières sur le
territoire des Alpes du Nord : à l'unanimité, ils constatent
que, globalement, les mentalités ont évolué vers une prise
de conscience progressive de la nécessité de considérer
dorénavant le foncier comme une ressource rare et non renouvelable qu'il
faut donc économiser. Suivant des injonctions diverses, crise
alimentaire ou financière, destruction des paysages et de la
biodiversité et même lutte contre le changement climatique,
la notion de développement durable rend audible la multitude des
enjeux fonciers. Ainsi, elle a sans doute permis une prise de
conscience plus large et plus rapide des enjeux qui pèsent aujourd'hui
sur la ressource foncière.
L'extrait suivant permet d'illustrer cette prise de conscience
en faveur d'une meilleure gestion foncière, à travers le regard
d'un maire du Trièves (38)361(*) :
« Les temps changent, et c'est tant mieux. Il y
a de cela dix ou quinze ans, si une entreprise projetait de venir s'installer
chez nous, nous étions prêts à lui offrir le plus beau
terrain de la commune. Le spectre de l'exode n'était encore pas si loin
et le développement économique, sous n'importe quelle forme,
semblait être la première des richesses pour un territoire comme
le nôtre.
Aujourd'hui, on n'a pas complètement changé
d'avis, mais on a radicalement changé de raisonnement. On est capable
d'expliquer à un entrepreneur qu'il est de son intérêt,
comme de l'intérêt collectif, de respecter la qualité de
l'endroit où il s'installe. Personne n'a intérêt à
scier la branche sur laquelle il s'assoit.
Avant, on disait : "ce n'est pas la place qui
manque !" Aujourd'hui, on affirme qu'en matière de
paysage, c'est le "vide" qui révèle le "plein" et
vice-versa ; et la zone d'équilibre entre les deux est plutôt
mince...[...] Ce n'est pas toujours facile de déclasser des terrains qui
avaient été déclarés constructibles
"avant"...
Il faut pouvoir s'appuyer sur des arguments solides pour
négocier... et le sens de l'intérêt commun, la philosophie
supra-communale qui justifie ces contraintes nouvelles, ne font pas recette
à tous les coups...
C'est comme pour tout : il vaut mieux être
très nombreux à jouer le jeu pour venir à bout des
individualismes. »
2. Pour des politiques foncières...
La notion de « foncier durable » ne fait
peut-être pas recette, en revanche, celle de « politique
foncière durable » est en train de se construire. Ainsi, le
Conseil général de la Gironde pose les fondements de sa
définition (ci-dessous) plutôt axée sur le foncier rural,
au sein d'une démarche plus large du « foncier au service d'un
développement solidaire »362(*).
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo25.png)
Figure 33. Les atouts d'une
politique foncière durable, CG Gironde 2010
De la même façon, le guide Agir ensemble pour
le foncier agricole dont l'initiative et la réalisation revient
à la Direction Départementale de l'Agriculture et de la
Forêt de l'Isère (devenue Direction Départementale des
Territoires, DDT) évoque l'enjeu de « gérer durablement
le foncier »363(*).
2.1. Cinq conditions de
réussite pour une politique foncière volontariste
Bien que l'étude réalisée ne
prétende pas à l'exhaustivité des situations existantes
sur le territoire des Alpes du Nord, les trois terrains ont permis de mettre en
exergue certaines conditions nécessaires à la mise en oeuvre
d'une politique foncière volontariste. Les entretiens
réalisés ont également enrichi la réflexion et
conforté cette approche par des « conditions de
réussite ».
Ainsi, si chaque démarche est particulière, ces
cinq conditions de réussite se révèlent être des
constantes pour structurer une politique foncière volontariste, qui,
mises au service d'un projet plus large de développement territorial
durable pourraient bien être « cinq conditions de
réussite pour une politique foncière volontariste et
durable ». Suivant ces jalons, les démarches
présentées à Chamonix, dans le Vercors et Belledonne,
peuvent inspirer d'autres territoires, dans les Alpes et ailleurs.
Figure 34. 5 conditions de
réussite pour une politique foncière volontariste, N. Moyon
2010
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo26.png)
De plus, les entretiens apportent une épaisseur
à ces cinq conditions de réussite. En effet, à la question
qui s'intéresse aux perspectives en matière de foncier dans un
contexte de développement durable du territoire (question
clôturant en général l'entretien), les personnes
interrogées énuméraient pour la plupart des mesures
d'action foncière « raisonnées »,
« économes »,
« stratégiques » ou
« coordonnées », dessinant au fur et à
mesure ce que serait une politique foncière durable pour les
Alpes :
« Une gestion foncière raisonnée
et durable, ce serait une gestion qui essaie d'être
responsable dans l'utilisation du foncier - communale entre
autre - mais aussi au niveau général avec le PLU qui affecte une
destination à certains biens. Mais la commune ne peut pas tout faire ni
tout se permettre, d'autant plus qu'elle subit de nombreuses contraintes qui
limitent l'action. Ce serait une gestion foncière
raisonnée par rapport à une politique, à
l'intérêt de la commune, et aussi
réfléchit, de plus en plus, on répertorie
les biens, on décide de leur utilisation, c'est une vision à plus
long terme et plus ciblée. Tout cela
structure une politique foncière, en somme, il y a des enjeux, on y
réfléchit et donc on essaie d'y répondre. C'est une
politique foncière qui existait déjà avant mais seulement
au stade de la prise de conscience, aujourd'hui, la politique foncière
est de plus en plus réfléchit »364(*).
2.2. Vingt-quatre propositions
de Joseph Comby
Dans la continuité des cinq conditions de
réussite exposées précédemment, le tableau
ci-dessous synthétise vingt-quatre propositions faites par Joseph Comby
sur les politiques foncières locales365(*) : il énumère ainsi
« quelques lignes de conduite utiles à respecter »
n'oubliant pas de préciser que la bonne et l'unique politique
foncière n'existe pas. Certaines des propositions de J. Comby ont
déjà été abordées par ailleurs, mais ce
tableau donne tout de même l'occasion d'un panorama qui se veut
général mais exhaustif.
24 propositions sur les politiques foncières
locales par Joseph Comby
|
o Ne pas réduire la « politique
foncière » à « l'action
foncière »
On fait d'abord de la politique foncière (règles
d'urbanisme, négociation avec les opérateurs, organisation du
financement), puis vient l'action foncière publique qui est l'aspect le
plus coûteux (achat des terrains, portage...).
|
o Choisir l'échelle de l'agglomération
ou du pays pour conduire une politique foncière
cohérente
L'ambition poursuivie est d'avoir un impact sur la formation
des valeurs foncières et l'approvisionnement du marché en
terrains. C'est à cette échelle que s'établissent les
interactions qui conditionnent le fonctionnement des marchés
fonciers.
|
o Une bonne politique foncière doit être
subordonnée à une politique d'aménagement
La politique foncière n'est qu'un outil ; elle ne
constitue jamais une fin en soi.
|
o Une bonne politique foncière doit savoir
être « opportuniste »
Elle se donne les moyens d'une prise de décision rapide
appuyée sur un potentiel d'intervention suffisant : elle ne doit pas
s'enfermer dans une planification pluriannuelle trop rigide car la mise en
vente d'une emprise intéressante peut être imprévisible.
|
o Une politique foncière a besoin d'un
système d'observation foncière
La connaissance du fonctionnement et de l'évolution des
marchés nécessite un système d'observation pérenne
et global qui doit rester neutre et accessible à tous.
|
o S'appuyer sur une claire conceptualisation des
différents types de marchés
Ils n'obéissent pas aux mêmes types de
mécanismes, les techniques d'observation, les méthodes de
diagnostic et d'analyse, et donc les modes d'intervention doivent être
adaptés selon le marché (voir typologie des six
marchés).
|
o Articuler urbanismes règlementaire et
opérationnel à la politique foncière
La politique foncière doit inclure toutes les
interventions qui contribuent à infléchir la valeur et l'usage
des espaces, ou du moins s'articuler avec elles.
|
o Intervenir en priorité sur le marché
des terrains à urbaniser et non pas sur celui des terrains à
bâtir
Subventionner la production de terrains à bâtir
est une politique facile à concevoir mais extrêmement
coûteuse et ne se justifie pas en termes de politique foncière
mais plutôt de politique sociale (pour logements sociaux) ou
économique (aide à l'implantation d'activités).
|
o Assurer une stabilité du zonage pour garantir
la valorisation des espaces agricoles et naturels
Les exploitants agricoles, les propriétaires
privés d'espaces boisés, ne sont généralement pas
des « spéculateurs ». Ils le deviennent lorsqu'ils
constatent que les collectivités publiques changent d'avis, rendent
constructibles, au cas par cas, des terrains voisins qui ne l'étaient
pas auparavant, procurent ainsi à certains acteurs de fortes
plus-values.
|
o Une hausse excessive des prix des terrains est
d'abord le résultat d'une mauvaise politique foncière
Inutile d'accuser la « spéculation
foncière » qui profite seulement de cette situation. Le prix
des terrains ne dépend que de la compétition entre les
acquéreurs potentiels de ces terrains.
|
o De trop faibles valeurs peuvent aussi être le
symptôme de graves dysfonctionnements
Le but d'une politique foncière peut parfois devenir la
revalorisation du marché d'un secteur, il faut donc être attentif
à ces signaux et les expliquer.
|
o La croissance urbaine est nécessaire,
même en l'absence de croissance démographique
Cette croissance urbaine peut se faire soit par densification
du bâti, soit par extension du bâti, soit, plus naturellement, les
deux à la fois.
|
o Ne pas confondre densification du bâti et
densification de la population
La population peut diminuer alors que les volumes bâtis
augmentent si cette augmentation est insuffisante. A fortiori, si les
constructions nouvelles ne font que remplacer les constructions vétustes
à l'identique, la population diminuera (sauf en cas de
paupérisation relative).
|
o Ne pas confondre « extension
urbaine » et « dispersion urbaine »
La même quantité de constructions nouvelles et
d'habitants nouveaux dans une commune périphérique d'une
agglomération n'a pas le même impact selon que les constructions
nouvelles se font en continuité du bourg existant ou en petites
opérations dispersées.
|
o Pour préserver les espaces agricoles et
naturels il est nécessaire d'accepter une certaine densification des
espaces urbanisés
Du point de vue de la défense de l'environnement, il
est contre-productif d'adopter des règlements d'urbanisme qui imposent
de faibles densités constructibles.
|
o C'est moins l'habitat individuel en tant que tel,
que la taille des terrains qui est responsable de l'étalement
urbain
Dans la mesure où il existe une forte demande pour la
maison individuelle, il est donc plus sage d'y répondre en produisant
des petits terrains individuels bien placés plutôt que de
prétendre imposer une urbanisation en habitat collectif dont les
acquéreurs ne veulent pas.
|
o Densifier en priorité les secteurs desservis
par une ligne de transport en commun en site propre
La localisation des stations doit être choisie en
fonction de la densité (en activités et/ou en logement) de ces
secteurs ou de leur capacité de densification.
|
o La finalité d'une politique de réserve
foncière n'est pas d'ordre financier mais d'ordre
urbanistique
Contrairement à une idée reçue, une
réserve foncière est rarement une bonne affaire
financière. Par contre, c'est presque toujours une bonne affaire
urbanistique car il faut du temps pour constituer, acquisition après
acquisition, les ensembles fonciers cohérents dont on a besoin par la
suite.
|
o Le portage foncier public, peut se
révéler dangereux dans le tissu urbain existant
Les coûts financiers de portage qui n'avaient qu'un
faible impact sur les coûts finaux de l'aménagement en
périphérie, ont au contraire un poids capital dans une
opération de renouvellement urbain.
|
o L'utilité d'un EPF n'est pas la
réalisation d'économies mais l'apport d'un savoir-faire et la
contribution à une meilleure maîtrise du territoire
Il est en particulier erroné d'imaginer qu'ils
permettent de faire plus avec moins d'argent. L'EPF dispose d'un
véritable savoir-faire et la négociation, l'acquisition et la
gestion d'un portefeuille foncier nécessite des professionnels.
|
o Les implantations d'activités excentriques
sont davantage responsables de l'étalement urbain que les implantations
résidentielles
L'implantation des zones d'activités étant
presque toujours le résultat d'initiatives publiques soutenues par des
subventions locales, on pourrait donc facilement éviter qu'elles ne
compromettent les politiques d'aménagement menées par
ailleurs.
|
o Le renouvellement urbain peut relever de deux
stratégies foncières opposées
Soit on considère que la situation du quartier n'est
pas trop dégradée et que des actions de revalorisation
ramèneront une dynamique immobilière. Soit il faut se
résoudre à engager une action plus lourde de restructuration qui
nécessitera d'abord d'importantes acquisitions. Mais il faut choisir.
|
o Le recours (mesuré) à l'expropriation
est inévitable pour faire un bon urbanisme
Si la localisation des opérations nouvelles n'est
conditionnée que par l'existence de propriétaires qui ont besoin
de vendre leurs terrains, il est clair que l'on aboutit à des formes
d'urbanisation anarchique. Quoi qu'il en soit, l'utilité publique de
l'opération doit être clairement établie.
|
o Une bonne gestion de l'espace peut amenée
à la mise en vente de terrains publics sous utilisés
Le recensement, la cartographie et le diagnostic de l'ensemble
des terrains publics doivent constituer l'une des préoccupations
permanentes des politiques foncières.
|
Figure 35. 24 propositions
sur les politiques foncières locales, J. Comby 2009
3. Elargir le champ de la réflexion
Le terrain d'étude du mémoire s'est
limité aux Alpes du Nord, suivant le périmètre
défini par la Directive Territoriale d'Aménagement du même
nom. Toutefois, aller voir plus loin, et précisément dans
d'autres territoires alpins promet d'être tout à fait
intéressant. Enclin à des problématiques foncières
peut-être différentes, le territoire des « Alpes du
Sud » française mériterait ainsi d'être explorer.
En outre, d'autres terrains d'étude choisis dans tout l'arc alpin
offriraient une vision pan alpine de la question foncière dans toute sa
diversité.
Par exemple en Suisse, des initiatives en faveur d'une gestion
raisonnée du foncier font parler d'elles. L'association `Altitude 1400'
« milite pour une urbanisation des Alpes axée sur un
développement naturel et construit au service d'une vision
économique et touristique de qualité et durable » et a
publié en 2009 un dépliant comportant « 10 propositions
pour l'avenir »366(*). L'association ProNatura (la plus ancienne
organisation suisse de protection de la nature) a également
édité un « Point de vue : milieu bâti et
paysage »367(*) qui montre que cette thématique de la
maîtrise foncière n'a pas de frontière alpine. Enfin, un
article enthousiaste relate la mise en place d'un Plan directeur cantonal
(PDCn) pour le Canton de Vaud offrant ainsi un outil stratégique
complémentaire pour construire un projet de territoire368(*).
Cependant, l'élargissement du champ de réflexion
proposé ici ne s'effectuera pas géographiquement mais
plutôt historiquement puis culturellement.
3.1. Une mise en perspective
historique
Dans un article de Dominique Dujols369(*), le retour au siècle
dernier est opéré pour apporter un éclairage au propos
central du texte qui concerne la notion de patrimoine commun de la
Nation. En effet, l'auteur revient sur la vaste et longue politique de
remembrement foncier lancée en réaction aux pénuries
alimentaires qui ont succédés à la Première Guerre
Mondiale. L'auteur propose cette mise en perspective historique pour
démontrer qu'à cette époque, la réglementation
n'avait cessé d'encadrer les conditions d'exercice du droit de la
propriété rurale pour lutter contre la rétention des
terres, favoriser voire imposer leur valorisation, éviter la
spéculation et préserver le droit des exploitants. Elle commente
dès lors que « l'usage l'a emporté sur le
support : le territoire rural français est devenu "patrimoine
commun de la Nation" ». Cependant, si par le remembrement l'usage du
foncier l'emporte sur le droit de propriété, les
difficultés rencontrées aujourd'hui par les exploitants non
propriétaires ne sauraient être oubliées : le refus de
louer des parcelles sous statut de fermage par exemple fragilise la
pérennité et la stabilité des exploitations370(*), démontrant à
l'inverse que le droit du propriétaire foncier l'emporte sur
l'usage agricole.
Grâce à cette référence à la
politique foncière du remembrement (16 millions d'hectares ont ainsi
été restructurés), l'auteur bénéficie d'un
argument supplémentaire pour appeler à une politique
foncière volontariste en faveur de l'habitat : « le moins
que l'on puisse dire est que le législateur a été d'une
audace inouïe. Demander aux propriétaires d'apporter leurs terres
pour recevoir d'autres parcelles en échange, et imposer aux non
exploitants de mettre leurs terres à la disposition des
agriculteurs... ». Dans quelle mesure serait-il pertinent de
relancer ce type de politique étatique forte pour obliger en quelque
sorte une mobilisation « optimale du foncier agricole »
aujourd'hui ? Surtout, quelle probabilité d'aboutir une
telle politique aurait-elle ? D'ailleurs, la loi instituant le droit au
logement opposable du 5 mars 2007 (DALO) ne suit-elle pas, dans une moindre
mesure, une logique similaire ? A cette époque donc, « la
collectivité a fait prévaloir pour l'agriculture
l'intérêt général, sans mettre à bas le droit
de propriété ». Dominique Dujols s'interroge
ainsi : « Pourquoi n'en serait-il pas de même pour le
logement dans la "Nation urbaine" que nous sommes devenus ? »
Cet éclairage historique semble d'autant plus pertinent
qu'il réitère des avis saisis durant les entretiens
effectués sur le terrain. Enfin, à la façon dont
l'énonce la région Rhône-Alpes, « l'obligation du
retour de l'intérêt général est une question du
21ème siècle »371(*).
3.2. L'apport des chercheurs
« du Sud » aux problématiques foncières
alpines ?
Elargir le champ de la réflexion à des
territoires qui sont très différents du terrain d'étude
alpin constitue une ouverture plus culturelle que géographique. Les
systèmes sociaux, institutionnels ou législatifs qui structurent
des problèmes fonciers de certains « pays du Sud »
sont parfois éloignés des problématiques des
vallées alpines, mais pas toujours. De plus, quand bien même les
situations de problèmes sont différentes des nôtres, les
solutions qui sont construites localement ouvrent des perspectives
intéressantes de « transposition » ou
« d'importation » d'une méthodologie
éprouvée par les chercheurs dans des pays du Sud.
Ainsi, en matière de prévention des risques dans
une perspective de réduction de la vulnérabilité, le
chercheur Jean-Christophe Gaillard qui travaille essentiellement sur les pays
du Sud (Philippines, Indonésie, Comores...) a participé à
un projet dans les Alpes dont la stratégie de réduction de la
vulnérabilité est directement issues de ses travaux de
l'hémisphère sud. Celui-ci s'est déroulé à
Bourg-Saint-Maurice du 27 mai au 2 juin 2010. Le projet était
financé par le Pôle Grenoblois d'Etude et de Recherche pour la
Prévention des Risques Naturels dans le cadre de l'opération
« Sites pilotes de gestion intégrée des risques
naturels dans les Alpes ». De même, un article
intitulé Stratégie pour un développement durable par
le foncier à Madagascar372(*), enrichit une approche franco-française
des problématiques foncières et encourage à
expérimenter d'autres méthodologies et d'autres stratégies
« du Sud » sur des territoires alpins.
Ainsi, les chercheurs du Laboratoire d'Anthropologie Juridique
de Paris (LAJP) partagent à travers cet article sur la gestion
patrimoniale373(*) une
démarche de négociation, de discussion, d'élaboration d'un
projet commun pour dépasser les intérêts particuliers
induits par la propriété foncière, en somme, une
stratégie de négociation foncière assez similaire aux
pratiques observées dans le périmètre alpin retenu pour le
mémoire.
« Les ordonnancements sociaux sont ensuite le
facteur le plus déterminant de l'approche patrimoniale en
privilégiant le mode négocié dans des contextes
antérieurement régulés selon le mode imposé,
technocratique ou bureaucratique au sommet, tatillon, interventionniste et
caporaliste à la base quand il s'agissait des interventions des Eaux et
Forêts avant leur réforme interne dans nombre de pays africains.
Le choix de la négociation représente une véritable
révolution culturelle au sein de l'administration. Il aura fallu
batailler ferme à Madagascar pour l'obtenir. Au Mali, l'idée est
acceptée "du bout des lèvres". Ailleurs, le principe
adopté peut être contredit dans la pratique ».
« Pour négocier il faut que les
intervenants soient globalement à égalité. Il faut donc
aider les plus faibles à réunir leurs informations, approfondir
leurs analyses et pondérer leurs choix : à organiser leurs
conduites sur les plans stratégique et tactique. Pour ce faire, on
recommande de former des formateurs qu'on appelle médiateurs
environnementaux à Madagascar, médiateurs patrimoniaux aux
Comores et qui sont choisis en raison de leurs expériences,
compétences et proximité psychologique avec les populations
à assister. Il va falloir en effet se plier, pour tous les protagonistes
de la négociation, à une démarche intellectuelle
délicate fondée sur une méthode régressive et
associant divers processus ».
L'idée d'un nouvel acteur spécialiste de
la médiation foncière et identifié comme tel, le
« médiateur patrimonial » ou
« médiateur environnemental » est tout à fait
intéressante car des acteurs alpins endossent déjà plus ou
moins ce rôle sauf qu'ils n'en ont pas forcément toute la
légitimité et la reconnaissance.
« Dans un premier temps, les acteurs sont
invités à déterminer en commun l'objectif qu'ils assignent
à leur gestion en se projetant sur vingt à trente ans (une
génération, celle de leurs enfants). Ils déterminent donc
un résultat à atteindre compte tenu des informations en leur
possession (pression et projection démographiques, évolution du
marché, environnement national et international...). Puis, par
régressions successives, émergent toutes les contraintes dont il
faut tenir compte et les réponses que chaque acteur devra apporter pour
que l'objectif final soit atteint. On passe ainsi de l'horizon trente ans
à l'horizon un an, voire un mois ou un jour en cas d'urgence, cette
combinaison de méso et de micro-processus faisant prendre conscience de
l'indispensable solidarité par interaction spatio-temporelle des
décisions collectives ».
La démarche décrite ci-dessus est exactement la
même qui a été entreprise début 2010 sur la commune
de La Grave (38). Dans la perspective de la révision du POS en PLU, une
démarche de concertation préalable à la rédaction
d'un cahier des charges pour l'élaboration du PLU par un bureau
d'études a été initiée et mise en oeuvre par
Vincent Tonnelier374(*),
« missionné » par le maire de la commune pour tenter
de construire avec l'ensemble des habitants les bases d'une vision prospective,
« Quel avenir pour La Grave à l'horizon
2025 ? ».
« Enjeux et règles du jeu sont, à
nouveau, étroitement associés. Les solutions adoptées
doivent en effet prendre une forme juridique et leur adoption doit être
assez solennelle pour que le mode de gestion soit stabilisé sur une
longue période. Actuellement, la démarche adoptée à
Madagascar préconise la forme contractuelle accompagnée de
rituels sociaux et religieux (kabary et sacrifice de boeufs).[...]
Reste enfin un dernier problème, celui de la
qualification de ce mode de gestion. Derrière l'adjectif patrimonial,
que veut dire patrimoine ? En quoi ce mode de gestion se distingue-t-il
d'une approche domaniale ou privative-capitaliste ? C'est là
où l'inventivité des jeunes chercheurs a pu se
développer ».
Sans aller jusqu'au sacrifice de boeufs, là encore
l'adoption de nouvelles règles doit prendre une forme juridique stable,
reconnue et respectée de tous, par exemple, grâce à un
document de planification opposable. Dans le Vercors, la communauté de
communes du Massif du Vercors a réussi à donner cette
qualité à sa Charte de Développement en l'intégrant
(ainsi que la carte de destination des sols) à la Charte du Parc naturel
régional qui est un document opposable aux documents d'urbanisme de rang
inférieurs (PLU, PLH) dans tout le territoire du Parc.
« Un des effets les plus visibles de ce type de
recherches est de remettre au premier plan les notions de commun, communaux,
communautaire et communauté que la pensée moderne avait
dévalorisées [...]. C'est parce que, en Afrique et à
Madagascar mais aussi en France, certains acteurs se situent dans des logiques
traditionnelles et communautaires et d'autres dans des logiques capitalistes
qu'il convient de confronter leurs points de vue et leurs besoins
considérés chacun comme initialement légitimes mais
à négocier nécessairement ».
A la source même de la question foncière, l'enjeu
de concilier intérêt général et
intérêts particuliers est un obstacle à franchir quelque
soit le territoire, au Nord comme au Sud.
Ce dernier chapitre a permis d'éclaircir ce que pouvait
constituer une gestion foncière durable pour les territoires de
montagne. Si cette approche ne semble pas révolutionner les pratiques,
elle met l'accent sur la nécessité de mettre en oeuvre une
politique foncière volontariste - qui soit au service d'un projet de
territoire plus vaste - afin d'accomplir une véritable politique de
développement durable.
Pour finir, cette illustration intitulée « un
aménagement foncier réussi »375(*) offre un joli modèle,
idyllique et apaisé de quelques interventions foncières en espace
rural. Un beau dessin qui rappelle à quel point la théorie est
parfois loin de la pratique.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo27.png)
Conclusion générale
Avant de clore ce travail de recherche appliquée
à la question foncière dans les Alpes du Nord, il est opportun de
rappeler tout d'abord le point de départ de la réflexion qui a
guidé le mémoire. Ensuite seront reprises les différentes
étapes de la démonstration articulée autour des trois
grandes parties du document. Enfin, il s'agira d'ouvrir ce travail à de
nouvelles pistes de recherche évoquées au fil du
mémoire.
Ce travail part d'un constat simple : de nombreux outils
existent pour mettre en oeuvre une politique foncière mais celle-ci
semble une action difficile à mener pour les acteurs locaux. Au regard
du territoire d'étude induit par la réalisation d'un stage
à CIPRA France, les Alpes, il a semblé intéressant
d'étudier le rôle potentiel que pouvaient jouer les
caractéristiques spécifiques aux espaces alpins dans la
difficulté du passage à l'action foncière. Dès
lors, il s'agissait de poser la question d'une spécificité alpine
en matière de gestion et de politique foncière.
L'hypothèse qui a permis de guider l'investigation répondait
ainsi au constat de départ : l'outil de l'action publique n'est pas
important en soi pour mener une politique foncière mais il est
intéressant car il révèle des discours. C'est plutôt
la démarche mise en oeuvre localement, adaptée aux propres
objectifs définis par chaque territoire, qui détermine
l'efficience d'une politique foncière volontariste dans les Alpes du
Nord.
L'hypothèse suppose dès lors plusieurs nuances
à corroborer ou à infirmer, partant d'une même
donnée : le projet de territoire (projet politique) est le moteur
de l'action foncière. Tout d'abord, les outils de maîtrise du
foncier qui sont utilisés dépassent les cadres normatifs en
innovant là où ces derniers ne sont pas encore allés.
D'autre part, la démarche foncière innovante va jusqu'à
distordre certains outils de gestion foncière pour les mettre au service
de son projet (détourner l'usage commun de l'outil, le combiner à
d'autres pour en changer la nature...). Ainsi l'a résumé
Alexandre Mignotte (CIPRA France), si le neuf n'est pas dans la
nouveauté (un énième nouvel outil), il est dans la
capacité de dépasser, d'adapter ou d'évoluer avec des
outils « classiques », là se trouve l'innovation territoriale
en matière de foncier.
Une méthodologie exploratoire a proposé un angle
d'attaque original pour travailler cette réflexion sur le foncier. La
mise en regard de deux cadres normatifs de planification avec les acteurs de
terrain et leurs pratiques a permis d'aborder le rapport au droit et à
la norme en aménagement, et plus spécifiquement sur le foncier.
Une première grille d'analyse (A) a donc permis de saisir le discours
foncier produit par les deux cadres normatifs retenus, la Convention alpine, et
la Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Une seconde
grille réalisée selon la même méthodologie, a saisi
les pratiques foncières explorées sur le terrain d'étude
des Alpes du Nord (B). La dernière grille (C) a permis de confronter la
théorie de ces cadres normatifs à la pratique foncière
alpine, de « voir » la relative adéquation et de
« mesurer » le décalage perceptible grâce
à cette méthodologie.
Guidé par l'hypothèse de départ,
l'objectif poursuivit était de montrer, par trois exemples concrets et
détaillés, des pratiques foncières alpines qui mettent en
oeuvre des démarches efficaces voire innovantes sur leur territoire.
Trois terrains d'étude ont été retenus : Chamonix, le
plateau du Vercors, les balcons de Belledonne. Au-delà de ces trois
terrains, la réflexion devait permettre de mettre en exergue les
conditions de réussite et les obstacles d'une politique foncière
volontariste dans les Alpes du Nord.
Figure 36. Imbrication de la recherche et du stage, N.
Moyon 2010
Au final, trois dimensions ont été
explorées selon un axe de recherche, et trois autres selon celui du
stage, ce qui a permis d'associer les impératifs d'un mémoire de
recherche et ceux d'un stage professionnalisant.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo28.png)
Le mémoire s'est structuré selon trois grandes
parties dont les conclusions principales vont être
énoncées, rappelant ainsi le fil de cette longue
démonstration.
La première partie a permis de mobiliser les
différentes facettes de l'objet foncier afin de l'appréhender
avec une plus grande attention une fois sur le terrain. Cette partie plus
introductive était donc nécessaire pour poser les bases de
l'objet d'étude et comprendre par conséquent la complexité
de la question foncière. Ainsi, le foncier s'est
révélé être l'objet de toutes les attentes et donc
de nombreux conflits. Mobilisant pléthore d'acteurs, de lois et
d'outils, la question foncière prend racine dans le droit, mobilise de
l'argent et questionne la politique (c'est même à la fois un objet
politique et l'objet de politiques). En résumé, c'est par son
imbrication à d'autres thématiques de l'aménagement et de
l'urbanisme, et la transversalité elle-même de l'objet foncier que
l'on peut appréhender le problème foncier plus justement.
La seconde partie a constitué le coeur de la
démarche de recherche, entre cadres normatifs et pratiques de terrain,
montrant comment chacun d'eux allaient en quelque sorte « à la
conquête » du foncier alpin. L'attention s'est portée
sur le discours foncier de deux cadres normatifs : la Convention alpine et
ses protocoles d'application, et le projet de DTA des Alpes du Nord. Ensuite,
l'analyse de la mise en oeuvre de ces cadres normatifs alpins a montré
les modalités du rapport au droit et à la norme qu'entretiennent
certains acteurs, en particulier avec la DTA. Revenant sur l'hypothèse
de départ, il a été possible de distinguer trois niveaux
croissants d'ajustement par rapport aux cadres, voire de distorsion des cadres
normatifs.
Premièrement, ces cadres normatifs permettent de rendre
intelligible la vision de l'aménagement et du développement alpin
promue par l'Etat. La DTA restreint ce discours à un
périmètre identifié et réduit, se confrontant
dès lors à la farouche et unanime opposition des territoires
touristiques de station. Deux explications sont proposées pour
comprendre ce phénomène : l'objet au coeur du discours de la
DTA est faiblement audible (une réalité donnée à
voir par l'Etat qui ne correspond pas du tout aux représentations de
certains acteurs locaux), mais surtout, la nature de la procédure
étatique (une DTA « directive » par essence) a une
audibilité presque inexistante car
« inacceptée » sur ces territoires alpins. De
facto l'acceptabilité d'un tel cadre normatif est rendue impossible
car la norme est ici vécue plutôt comme un diktat de l'Etat.
Deuxièmement, le cadre normatif a le mérite
d'exister car il re-questionne forcément l'ensemble des acteurs locaux
(partisans et opposants confondus) et favorise les réajustements :
en les décriant, les acteurs locaux s'en servent pour réaffirmer
leur propre projet, et inversement, ils peuvent tout autant enrichir ou
conforter leurs pratiques.
Enfin, les pratiques innovantes peuvent permettre de
réajuster ou refaçonner les cadres normatifs : en montant en
généralité (verticalement) ou en se diffusant dans
d'autres territoires (horizontalement). La montée en
généralité peut permettre de faciliter la création
de conditions favorables localement pour que ce type de « solution
foncière innovante » puisse se multiplier avec de moindres
contraintes.
Le chapitre 2 s'est ensuite attaché à
répondre à la question spécifique de recherche. En
regardant du côté des outils et de leurs utilisations sur trois
terrains d'études, l'analyse des différentes pratiques
foncières a montré un hiatus relatif entre les procédures
définies en théorie, et le bricolage opéré en
pratique pour les mettre en oeuvre. En effet, à Chamonix, dans le
Vercors ou dans Belledonne, les acteurs locaux se saisissent des outils de
maîtrise foncière dans les cadres normatifs existants et les
mettent au service de leur politique foncière ou de leur vision du
territoire quitte à les distordre. En réalité, la
procédure foncière est « absorber » par ce
qu'il convient d'appeler un « bricolage foncier ». Pour
autant, ce bricolage mobilise une intelligence particulière (et sans
doute accrue) des acteurs locaux, une forme d'ingéniosité dans
l'utilisation et la mise en oeuvre d'outils ou de cadres, voire le signe de
l'irruption de la ruse dans le code (BAREL, 1981). Dans cette perspective, la
figure de « l'acteur-bricoleur » (ALLIE, 2005) vient
éclairer ces pratiques foncières innovantes ou volontaristes
saisies dans les Alpes du Nord.
Là encore, la montée en
généralité a permis d'identifier trois stratégies
cumulatives pour construire les conditions d'une maîtrise foncière
diffusable plus largement. Celles-ci s'appuient sur les expériences des
trois terrains d'études : chacun dans leur
« style », ces territoires ont développé une
démarche pour maîtriser le foncier (ou tenter de le faire) qui
leur est propre. Chamonix a renforcé sa technicité territoriale
et foncière pour la mettre au service d'un projet politique ; c'est
donc une stratégie d'investissement dans la technique qui a
été retenue. Le plateau du Vercors et Belledonne, chacun d'une
façon différente illustrent et enrichissent la seconde
stratégie qui vise à « construire du
dialogue » : par la sensibilisation, la participation et la
formation aux questions foncières, la collectivité fabrique un
contexte favorable à l'élaboration et à la mise en oeuvre
d'une politique foncière volontariste. Enfin, la troisième
stratégie, transversale aux trois terrains d'étude, met l'accent
sur les cadres de planification. Il s'agit de « jouer » avec ces
cadres règlementaires, de les modeler pour les mettre au service d'un
projet de territoire. Une question a germé au fil des
réflexions : que cherche-t-on réellement à
maîtriser, le foncier ou la question foncière ?
La troisième et dernière partie a permis de
répondre plus précisément à l'enjeu d'articuler la
théorie à la pratique en matière de foncier, sur le
territoire des Alpes du Nord. Le premier chapitre a opéré la
confrontation entre les grilles d'analyses du « discours
foncier » et des « initiatives locales » :
la grille (C) montre les points de concordance et de décalage et permet,
dans une certaine mesure, de contrecarrer l'idée reçue selon
laquelle les cadres normatifs sont déconnectés de la
réalité. Par cette grille d'analyse, on voit que 45% des mesures
foncières recensées sont partagés par les cadres normatifs
et les initiatives locales (même levier d'intervention et même
thème mobilisé). La grille montre également que les
initiatives locales « dépassent » bien plus les
cadres normatifs (seize mesures initiées par la pratique) qu'ils ne les
« dépassent » (trois mesures initiées par le
discours foncier). Ce travail de construction puis de confrontation de
plusieurs grilles d'analyse est un exercice à la fois théorique
et méthodologique qui a participé à la dimension de
recherche de cette étude.
Le second chapitre pose la question de la
spécificité alpine en matière de politique
foncière, une question quelque peu en filigrane dans la partie
concernant la DTA des Alpes du Nord. Il s'avère que des
particularités physiques du territoire alpin impactent
nécessairement la gestion de l'espace et donc l'appréhension du
foncier. De fait, dans ces espaces restreints par la pente ou les risques
naturels, et convoités (attrait du site, bassin d'emploi dynamique,
tourisme), les conflits fonciers sont inévitables et l'enjeu du
multi-usage de l'espace montagnard est accru : habitat, loisirs, tourisme,
industrie, transports... Ainsi, c'est plutôt le territoire de l'urbain
qui est restreint et donc dans ce sens, ce n'est pas la montagne qui
créée la pression foncière mais bien la ville. Toutefois,
une certaine spécificité alpine semble pertinente pour le foncier
des territoires touristiques alpins qui conjuguent des contraintes physiques,
urbaines et touristiques. C'est aussi là qu'un état d'esprit
montagnard typique continue d'influencer fortement la manière dont on
fait le territoire. Les territoires alpins du Nord, à l'image des
littoraux, subissent une pression urbaine qui prend une acuité
particulière dans les régions touristiques.
Enfin, le dernier chapitre pose une question qui répond
plutôt aux impératifs du stage : peut-on parler d'une
politique foncière durable pour les Alpes ? La réflexion
s'est beaucoup inspirée des avis émis par les acteurs
rencontrés, construisant au fur et à mesure ce qu'il serait
possible d'envisager grâce au concept de durabilité
appliqué au champ du foncier. De plus, énonçant des
conditions de réussite pour une politique foncière volontariste
ainsi que les vingt-quatre propositions de J. Comby pour les politiques
foncières locales, il a été déduit que le concept
de durabilité ne renouvelait pas vraiment l'idée d'une politique
foncière volontariste. La réflexion portée sur une gestion
du foncier alpin qui soit durable signifie, en d'autres termes, qu'il faille
maîtriser le foncier en faveur d'un projet de développement
durable du territoire. Cela recouvre ainsi deux étapes : tout
d'abord, la maîtrise du foncier par la collectivité, et ensuite,
un arbitrage de l'usage des sols qui soit en faveur du développement
durable du territoire. Par cette démonstration, il semble que le concept
d'urbanisme durable ou d'aménagement durable suffise à impulser
une politique foncière volontariste sur la voie de la
durabilité.
Ainsi, l'hypothèse du mémoire a pu être
vérifiée à travers les modalités de mise en oeuvre
des cadres normatifs et les pratiques foncières sur les terrains
d'étude. Cependant, si l'outil de l'action publique n'est pas important
en soi pour mener une politique foncière, le jeu de l'hypothèse
implique de tester cette affirmation et de tenter de l'invalider. En ce sens,
l'outil (ou le cadre) est intéressant pour lui-même car s'il
révèle des discours, il traduit aussi l'effort mis dans sa
« construction ». L'outil est très important selon
comment il a été construit et définis, et surtout selon la
force normative qu'on lui donne. La DTA illustre cette idée : tant
qu'elle était opposable, elle a déclenchée les passions,
mais dès lors qu'elle perdu son opposabilité, l'outil
« DTA » est tombé dans l'oubli. On a bien là
un cadre de planification dont l'efficacité peut être forte comme
nulle. En somme, l'efficacité potentielle d'un outil ou d'un cadre
normatif renouvelle l'importance à lui consacrer, pour
lui-même.
En somme, ce mémoire a permis d'effleurer d'autres
pistes de recherche plus ou moins liées à la question
foncière mais ici on en retiendra deux qui ont été
récurrentes durant cette démonstration. Ainsi, les
réflexions sur les relations ville-campagne et de manière plus
spécifique, ville-montagne ou vallée-versant, semblent tout
à fait pertinentes dans un contexte d'urbanisation croissante des
massifs préalpins. De plus, il semble que l'une des priorités des
territoires ruraux à faible ressource est de réussir à
mobiliser une ingénierie territoriale, et plus particulièrement
une ingénierie foncière dans les espaces sous influence
périurbaine.
Sur ce territoire des Alpes du Nord, deux grands enjeux en
matière de foncier se distinguent : d'une part le foncier du Sillon
alpin, un foncier ancré dans une stratégie métropolitaine
qui influence les massifs de proximité, et d'autre part, le foncier des
territoires touristiques. Quoiqu'il en soit, « la question
foncière est toujours et partout un problème difficile,
lancinant, mal résolu, ou enraciné dans l'histoire des
patrimoines »376(*) et des identités locales.
Table des matières
Introduction générale
3
Partie I.
Appréhender la question
foncière
9
Chapitre 1. Démarche générale
du mémoire
ou comment construire les bases d'une
énième étude sur le foncier
11
1. Une recherche appliquée aux questions
foncières dans les Alpes du Nord
12
1.1. La démarche de recherche
12
1.2. Le problème général de
recherche
13
1.3. Les jalons de la recherche
appliquée
14
2. « L'effort
méthodologique »
14
2.1. Quelques principes méthodologiques
14
2.2. Les prémices du sujet de recherche
15
2.3. Les questionnements retenus
18
2.4. « Méthodologie
pratique » de travail
18
3. Production et construction des
données
19
3.1. Elaboration de la grille d'analyse
19
3.2. Interprétation de la grille
20
4. Les entretiens
21
4.1. Pourquoi faire des entretiens ?
21
4.2. La méthode utilisée
21
5. Liens avec d'autres travaux de recherche
22
5.1. Le projet
« Foncimalp »
23
5.2. Le projet de recherche
« IngéTerr »
24
5.3. Les projets de recherche
« Popfongo » et « AMEN »
24
Chapitre 2. Les miscellanées du foncier
27
1. Le foncier, de quoi s'agit-il ?
28
1.1. De droit
28
1.2. D'argent
30
1.3. De politique
32
2. Qui se préoccupe du foncier ?
36
2.1. Les acteurs et la préoccupation
foncière
36
2.2. Le problème du mille-feuille
38
2.3. Les conflits fonciers
38
3. Comment agir sur le foncier ?
40
3.1. Les cadres normatifs du foncier
40
3.2. Les lois « Grenelle », et
après ?
44
3.3. Les outils d'une politique foncière
46
3.3.1. La boite à outils fonciers
47
3.3.2. La fiscalité, un levier potentiel
50
Partie II.
A la conquête du foncier
alpin
53
Chapitre 1 La Convention Alpine et la DTA des Alpes
du Nord,
deux cadres normatifs face au foncier alpin
55
1. Quels discours sur le foncier alpin ?
56
1.1. Convention Alpine, protocoles
d`application : quid du foncier ?
56
1.2. DTA des Alpes du Nord et foncier
57
1.2.1. L'objet foncier selon la DTA : un
support, un corollaire, un levier
59
1.2.2. « L'ambition
foncière » de la DTA des Alpes du Nord
61
1.3. Grille d'analyse (A) « Cadres
normatifs et foncier »
63
2. La DTA des Alpes du Nord ou le parcours du
combattant
67
2.1. 14 années de procédure :
rapide retour historique
67
2.2. Enquête publique et Grenelle II :
le combat de l'opposabilité
69
3. L'acceptabilité de ces cadres normatifs
alpins
72
3.1. Un objet et un cadre « difficilement
audible »
72
3.2. Une DTA directive
73
3.3. Des montagnards, coupables
désignés
75
3.4. Ces cadres normatifs, des tentatives de
gouvernance environnementale
76
Chapitre 2. Trois territoires alpins en quête
de maîtrise foncière
79
1. Une ingénierie au service d'une politique
foncière à Chamonix
80
1.1. Présentation générale
80
1.2. Une politique foncière volontariste et
interventionniste tournée vers l'habitat permanent
82
1.2.1. Des opérations pour le logement
permanent qui se multiplient
83
1.2.2. Une technicité juridique qui
s'affine : vers un infléchissement du droit de
propriété
84
1.3. Entre bricolage et
ingéniosité
85
2. La
« participation-formation » dans le massif du Vercors
87
2.1. Présentation générale
87
2.2. La Charte de développement de la
CCMV
88
2.2.1. Une démarche alternative au SCOT
89
2.2.2. Une Charte opposable
91
2.2.3. Une réaction au SCOT grenoblois
92
2.3. Sensibilisation, participation, formation
93
3. L'ambition d'agir sur la gestion de l'espace
dans Belledonne
95
3.1. Présentation générale
95
3.2. Des efforts portés sur la
sensibilisation et l'animation territoriale
98
3.2.1. Sensibiliser les élus et les
habitants
98
3.2.2. Entre animation et accompagnement
100
3.3. Des « UHN » aux
« limites intangibles », le tournant du SCOT ?
101
3.3.1. Le Projet d'Unités d'Habitations
Nouvelles (UHN)
102
3.3.2. Le SCOT de la RUG et ses « limites
intangibles »
103
3.4. Le problème récurrent du
financement
105
3.4.1. Financer une mission d'ingénierie
à destination des élus
105
3.4.2. Le projet de PNR de Belledonne
106
4. Vers la maîtrise foncière
107
4.1. La grille d'analyse (B)
« Initiatives locales et foncier »
107
4.2. Trois stratégies cumulatives pour
construire les conditions d'une maîtrise foncière
111
4.2.1. Construire du dialogue
112
4.2.2. Investir dans la technique
112
4.2.3. Agir sur les cadres de planification
113
Partie III. De la théorie à
la pratique
115
Chapitre 1. Articuler la théorie des cadres
normatifs à la pratique des initiatives locales alpines
117
1. Grille d'analyse (C) « Cadres
normatifs et initiatives locales face au foncier alpin » :
concordance ou décalage ?
118
2. Quel(s) rapport(s) à la norme et au droit
en aménagement ?
121
2.1. Des perspectives ouvertes par la
gouvernance...
121
2.2. Mais un cadre qui reste « hyper
réglementé »
122
2.3. L'efficacité des outils et des
cadres
124
3. La figure de l'acteur-bricoleur
126
Chapitre 2. De la spécificité alpine
en matière de politique foncière
129
1. Des particularismes reconnus aux
spécificités proclamées
130
1.1. La loi Montagne de 1985
130
1.2. Entre handicaps et opportunités pour le
territoire alpin
132
1.3. Une spécificité des territoires
touristiques alpins ?
133
2. A qui la terre ?
135
1.1. L'apport de Mériaudeau sur la question
foncière alpine
135
2.2. Un état d'esprit typique et ses
incidences sur les politiques foncières alpines
137
3. Montagne et littoral même combat
foncier ?
139
3.1. Des problématiques foncières
assez proches
139
3.2. L'exemple de la Bretagne
140
Chapitre 3. Vers une gestion foncière
durable des territoires alpins
143
1. Foncier et durabilité
144
1.1. « Faire du foncier
durable »
144
1.2. Durabilité en station de montagne
145
1.3. « Personne n'a intérêt
à scier la branche sur laquelle il s'assoit »
146
2. Pour des politiques foncières...
147
2.1. Cinq conditions de réussite pour une
politique foncière volontariste
148
2.2. Vingt-quatre propositions de Joseph Comby
149
3. Elargir le champ de la réflexion
151
3.1. Une mise en perspective historique
152
3.2. L'apport des chercheurs « du
Sud » aux problématiques foncières alpines ?
153
Conclusion
générale
157
BIBLIOGRAPHIE
165
ANNEXES
171
Table des illustrations
Figure 1. Le problème général
de recherche, N. Moyon 2010
13
Figure 3. Les jalons de la recherche
appliquée, N. Moyon 2010
14
Figure
2. Les trois pistes de recherche identifiées, N. Moyon 2010
14
Figure 4. Méthodologie de travail, N. Moyon
2010
19
Figure 5. Rétroplanning de
l'étude
19
Figure 6. Structure de la grille d'analyse, N.
Moyon 2010
20
Figure 7. Projet Foncimalp, Suaci Alpes du Nord
2010
23
Figure 8.Mise en perspective de la chaîne de
transformation du foncier, CLD des Vals du Dauphiné & Nord
Isère 2008
35
Figure 9. Acteurs et "préoccupation
foncière", N. Moyon 2010
37
Figure 10. Interactions dans les territoires ruraux
et périurbains, d'après A. Tchekemian 2008
39
Figure 11. Exemples d'enjeux et
bénéfices partagés entre le rural et l'urbain,
d'après M. Mouly 2008
39
Figure 12. Les cadres normatifs du foncier, N.
Moyon 2010
41
Figure 13. Tableau des outils de planification,
d'après R. Cazajous 2007
48
Figure 14. Tableau des outils d'acquisition
foncière, d'après R. Cazajous 2007
48
Figure 15. Tableau des outils d'aménagement
opérationnel, d'après R. Cazajous 2007
48
Figure 16. Tableau des outils fiscaux et
financiers, d'après R. Cazajous 2007
49
Figure 17. Schéma des outils fonciers, par
catégorie et échelle d'intervention/utilisation, d'après
T. Wyon 2008
49
Figure 18. 10 mesures pour construire une gestion
foncière au sens de la Convention alpine, N. Moyon 2010
57
Figure 19. Cerner l'objet foncier et ses enjeux
à travers l'analyse de la DTA des Alpes du Nord, N. Moyon 2010
59
Figure 20. Constat et orientations en
matière de foncier selon la DTA Alpes du Nord, N. Moyon 2010
59
Figure 21. Evolution de « l'ambition
foncière » de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 - Juillet 2010), N.
Moyon 2010
61
Figure 22. Grille d'analyse (A) "Cadres normatifs
et foncier", N. Moyon 2010
64
Figure 23. Détail de la grille d'analyse
(A), N. Moyon 2010
66
Figure 24. L'opposabilité de la DTA des
Alpes du Nord, une question de calendrier, N. Moyon 2010
71
Figure 25. Démarche de la Charte de
développement de la CCMV, 2007
90
Figure 26. Démarche de formation des
élus du Vercors, Plan d'actions CCMV 2007
93
Figure 27. Interdépendance
vallée-versant, ADABEL 2009
96
Figure 28. Evolution de l'agriculture de
Belledonne, ADABEL 2009
97
Figure 29. Grille d'analyse (B) "Initiatives
locales et foncier", N. Moyon 2010
108
Figure 30. Détail de la grille d'analyse
(B), N. Moyon 2010
111
Figure
31. Trois stratégies cumulatives vers une politique foncière
volontariste, N. Moyon 2010
112
Figure 32. Grille d'analyse (C) "Cadres normatifs
et initiatives locales face au foncier alpin", N. Moyon 2010
120
Figure
33. Les atouts d'une politique foncière durable, CG Gironde 2010
147
Figure 34. 5 conditions de réussite pour une
politique foncière volontariste, N. Moyon 2010
148
Figure 35. 24 propositions sur les politiques
foncières locales, J. Comby 2009
151
Figure 36. Imbrication de la recherche et du stage,
N. Moyon 2010
Erreur ! Signet non
défini.
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développement durable (CGEDD) - Autorité Environnementale,
Avis délibéré de l'Autorité environnementale
concernant la Directive territoriale d'aménagement « Alpes du Nord
», n° 2010 - 02, 14/O1/10, 13p.
- Conseil régional Rhône-Alpes, schémas
de cohérence territoriale : enjeux d'équilibre en
Rhône-Alpes, septembre 2007, 48 pages.
- DAVID-CAVAZ Bernard, Paroles..., Brochure du CAUE de
l'Isère, page sur le Trièves, le pays des âmes
fortes - Paroles de maires, s.l.n.d.
- Direction régionale de l'Equipement, Projet de
Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord, 15 Juin
2009
- DTA Alpes du Nord, Juillet 2010
- Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du
Nord. Rapport Final de la Commission d'enquête publique, 09/07/10,
111p., p.11
- Etablissement public du SCOT, Document support au
débat des territoires, Premiers éléments de diagnostic,
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- GIS Alpes du Nord, Agriculture et urbanisation dans les
Alpes du Nord, sept.2004, 4p.
- MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en
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Grenoble/PACTE-Territoires, s.l.n.d, 71p. Disponible en ligne (consulté
le 29/03/10) :
http://www.tourisme.gouv.fr/stat_etudes/etudes/territoires/zone_montagne.pdf
- Mission départementale d'observation de l'habitat,
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http://adil.dromenet.org/obs/lettres_adil/Mission_obs_6.pdf
(consulté le 24/05/10)
- Moutain Riders, L'Eco guide des stations. Disponible
sur :
http://www.mountain-riders.org/_EcoGuideStations/
(consulté le 02/09/10)
- Parc Naturel Régional de Chartreuse, Guide à
destination des élus locaux : réaliser un Plan Local
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- PNRV, 2008-2020, la charte du parc du Vercors,
approuvée le 22/09/07 par le comité syndical, 96p.
- PNRV, Bilan d'activité 2009, mars 2010,
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- Préfecture de région Rhône-Alpes, DTA
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-Préfecture de région Rhône-Alpes :
Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord -
Évaluation Stratégique Environnementale - Rapport
Environnemental, Mars 2010, 230p
- Programme Comédie, Etude de cas La charte de bien
vivre en Belledonne, concilier différents usages de l'espace, Forum
régional sur la concertation et la médiation environnementales,
28 juin 2006, 14p.
- Rapport final de la Commission d'enquête
publique, 09/07/10, 111p., Conclusions motivées de la
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- Région Rhône-Alpes, Compte-rendu des
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2050? s.l.n.d.
- Région Rhône-Alpes, Rapport n°08.10.490
Politique de la ville et du logement
- RENARD Vincent, Politiques foncières et
développement durable, Formation Sciences Po Paris, 15/06/10 [En
ligne]. Disponible sur :
http://www.sciences-po.fr/spf/programmes/pdf/IPP11.pdf
(consulté le 02/09/10)
- SUACI Alpes du Nord, Expériences de gestion du
foncier (espace agricoles et naturels) en zone de montagne -Projet
Foncimalp- , groupe de travail, 22 Avril 2010, St Baldoph
- UICN, 1985-2005 : 20 ans de loi Montagne - Bilan et
propositions, Paris, 2005, 15p.
Site Internet
http://www.dta-alpesdunord.fr/quest-ce-quune-dta.html
http://www.senat.fr
http://www.vercors.net/
http://www.le-gresivaudan.fr
http://www.parcs-naturels-regionaux.fr
http://www.assemblee-nationale.fr
http://www.comby-foncier.com/voc/vocabulaire_foncier.htm
http://www.offices-hlm.org/
www.observatoire-montagnes.org
http://www.espacebelledonne.fr
Conseil Général de Haute-Savoie, définition
de « politique foncière » [en ligne]. Disponible
sur :
http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche7.pdf
(Consulté le 13/08/10)
Conseil Général de la Moselle, définition du
principe de l'aménagement foncier [en ligne]. Disponible sur :
http://www.cg57.fr/vivrelamoselle/Pages/Environnement/Amenagementfoncier.aspx
(consulté le 29/07/10)
CLD Nord Isère et Val Dauphiné :
http://www.rhonealpes21.fr/IMG/pdf/contribution_cld_nordisere_valsdauphine.pdf
(consulté le 15/06/10)
Site dédié à l'expérimentation du
dispositif PAEN :
http://www.experimentation-paen.fr/index.asp
(consulté le 26/10/10)
Site officiel de la Réforme des collectivités
territoriales :
http://www.interieur.gouv.fr/sections/reforme-collectivites/pourquoi-reforme
(consulté le 11/08/10)
http://www.cemagref.fr/le-cemagref/lorganisation/les-centres/grenoble/ur-emgr/projets/amen-les-amenites-environnementales-des-espaces-ruraux-valorisation-gestion-et-contribution-au-developpement-durable-des-territoires/
ANNEXES
1. Tableau de synthèse des entretiens
réalisés
2. Grille détaillée d'entretien
3. Conformité, compatibilité des documents
d'urbanisme : éclairage
4. L'enchevêtrement de compétences et
d'interventions publiques autour du SCOT
5. Schéma de l'évolution de l'ambition
foncière de la DTA des Alpes du Nord - références
6. Exemples de Fiches-action de la CCMV dans le cadre de sa
Charte de développement
1. Tableau de synthèse des entretiens
réalisés
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo29.png)
2. Grille détaillée d'entretien
Etude Cipra - Mémoire de recherche IGA
I. Présentation
générale
1) Pouvez vous me présenter votre structure et son
action sur le foncier ?
2) Qui sont les acteurs de la question foncière, qui
sont les décideurs, qui sont les « metteurs en
oeuvre » ? Où vous situez-vous ?
3) Quels sont les enjeux fonciers de votre territoire
d'intervention ?
4) Avec du recul, observe-t-on une évolution des
problématiques foncières et de sa gestion sur votre
territoire ? Y-a-t-il plus d'acteurs qu'avant, plus de compétences,
de connaissances, d'outils, de nouveaux enjeux... ?
5) Pouvez-vous me donner un exemple emblématique des
actions/projets/réflexions que mène votre structure ?
II. Mettre en oeuvre une politique foncière
volontariste, dans les Alpes (en filigrane, la question de la
spécificité alpine)
6) Selon vous, quelles sont les forces et faiblesses de votre
territoire pour conduire sa propre politique foncière ?
7) Aujourd'hui, les collectivités ont-elles les moyens
de leurs compétences foncières face aux enjeux auxquels
elles sont confrontées?
8) La collectivité doit-elle chercher des appuis ou des
soutiens pour réussir à mettre en oeuvre une politique
foncière volontariste ?
9) Peut-on parler d'une spécificité alpine en
matière de gestion foncière?
10) Faut-il des moyens spécifiques à la montagne
pour traiter des questions de foncier? (procédures et outils
particuliers, compétences spécifiques renforcées, aides
financières...)
III. Les outils de gestion foncière
11) Quels sont les outils de maîtrise du foncier que
vous utilisez ? Votre avis sur ces outils : trop ou pas assez, peu
connus, mal utilisés, pas adaptés aux situations locales...
12) Par qui les procédures relatives au foncier
sont-elles impulsées et décidées? D'où proviennent
les cadres dans lesquels agissent les collectivités ?
13) Dans quelle mesure les territoires participent à
l'élaboration des outils et des cadres de l'aménagement du
territoire qu'ils sont chargés d'utiliser?
14) Faites-vous remonter (auprès d'autres
échelons territoriaux) vos problématiques de terrain, des
blocages que peuvent constituer certaines procédures ou outil de gestion
foncière?
15) Selon vous, qui a le pouvoir de faire évoluer des
procédures nationales qui s'avèreraient inadaptées
localement? Peut-on agir localement sur les outils et les cadres de
planification?
IV. Deux cadres de planification des Alpes du
Nord : la Convention alpine et la DTA Alpes du Nord
16) Des cadres de planification ou d'aménagement tels
que la Convention Alpine et le projet de DTA Alpes du Nord vous semblent-ils
« utiles » localement pour mener une politique
foncière ?
17) Peuvent-ils le devenir ?
18) Y fait-on référence dans les documents
d'urbanisme locaux ?
V. Quelles perspectives de gestion foncières
dans les Alpes ?
19) Où se situent les besoins pour maîtriser le
foncier dans les territoires de montagne? (Connaissances, sensibilisation des
acteurs, accompagnement/formation des élus et techniciens, gouvernance,
intercommunalité...)
20) Pour conclure, comment définiriez-vous une "gestion
raisonnée et durable du foncier" dans les territoires de montagne?
3. Conformité, compatibilité des
documents d'urbanisme : éclairage
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo30.png)
Sur son site internet, le conseil général de
Haute-Savoie propose l'accès à un centre de ressources sur les
questions foncières ainsi que des fiches techniques sur le foncier et le
logement. Ces nombreux outils sont destinés aux collectivités
territoriales. Les informations qui suivent en sont tirées.
Disponible sur :
http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche10.pdf
(consulté le 13/08/10)
En matière juridique, la hiérarchie des
normes (normes constitutionnelles, traités internationaux,
lois, règlements) s'organise sous différents rapports :
1) Le rapport de conformité :
Le contenu de la norme inférieure doit être
déduit du contenu plus général de la norme
supérieure. L'autorité inférieure ne dispose alors que
d'une compétence liée et l'on peut bien dire qu'en lui
obéissant, on n'obéit qu'à la loi.
2) Le rapport de
compatibilité :
La norme supérieure se borne à tracer un cadre
général, par exemple, en déterminant des objectifs ou en
fixant des limites, mais laisse à l'autorité inférieure le
choix des moyens et le pouvoir de décider librement, dans les limites
prescrites, du contenu de la norme.
L'autorité administrative peut user d'une marge
d'interprétation et d'appréciation dans la mise en oeuvre d'un
document prévisionnel, sous réserve que ce document ne
l'interdise pas et que son économie générale ne soit pas
remise en cause. La compatibilité ne doit révéler aucune
contradiction.
Le rapport de compatibilité est donc moins
strict que le rapport de conformité.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo31.png)
Ci-dessous, un schéma de la hiérarchie des
normes en matière d'urbanisme et d'habitat :
4. L'enchevêtrement de compétences et
d'interventions publiques autour du SCOT
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo32.png)
Source : Conseil régional, schémas de
cohérence territoriale : enjeux d'équilibre en
Rhône-Alpes, septembre 2007, 48 pages.
5. Schéma de l'évolution de l'ambition
foncière de la DTA des Alpes du Nord
Le schéma présenté s'intéresse
à l'évolution récente de « l'ambition
foncière » du projet de DTA des Alpes du Nord de Juin 2009
à Juillet 2010. Il s'agissait de voir si les mesures envisagées
par la DTA en matière de foncier sont plus ou moins ambitieuses au
regard du contenu initial du projet. L'ambition dont il est question est celle
énoncée officiellement par l'Etat :
« définir une stratégie cohérente et
volontaire » et « faire le choix du développement
durable pour les Alpes du Nord »
Il est donc nécessaire de se reporter aux deux versions
qui sont comparées :
Doc 1 : Version de Juin 2009
Doc 2 : Version de Juillet 2010
Figure 21bis. Evolution de « l'ambition foncière
» de la DTA Alpes du Nord (Juin 2009 - Juillet 2010), N. Moyon 2010
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo33.png)
6. Exemples de Fiches-action de la CCMV dans le cadre
de sa Charte de développement
Dans le cadre du Plan d'action de la Charte de
Développement de la Communauté de Communes du Massif du
Vercors, 25 fiches-action ont été élaborées,
réparties suivant 5 thématiques de l'aménagement et du
développement : habitat, tourisme, emploi, paysage,
réseaux.
Les 6 fiches-action suivantes sont quelques exemples les plus
en lien avec le sujet abordé ; elles concernent toutes la
thématique de l'habitat.
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo34.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo35.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo36.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo37.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo38.png)
![](Entre-convention-alpine-directive-territoriale-damenagement-des-Alpes-du-nord-et-initiatives-lo39.png)
* 1 PISANI Edgard, Utopie
foncière, 1977, Editions du Linteau, réédition 2010,
Paris, 240p. Citation pp.9-10
* 2 Entretien n°16, EPFL
74
* 3 Rapport n°08.10.490
Politique de la ville et du logement - Région Rhône-Alpes
* 4 Séminaires,
colloques, tables rondes, les évènements autour de la
thématique foncière se sont multipliés partout en France,
en réponse à une pression foncière de plus en plus
ressentie.
* 5 Le vocabulaire est
défini Partie I., chapitre 2, 1. Le foncier, de quoi
s'agit-il ?
* 6 Cf. Partie I, chapitre
2, 3. Comment agir sur le foncier ?
* 7 La Gazette.fr, Le
gouvernement veut lutter contre le gaspillage des terres agricoles, [en
ligne], publié le 11/01/10.Disponible sur :
http://infos.lagazettedescommunes.com/27581/le-gouvernement-veut-lutter-contre-le-gaspillage-des-terres-agricoles/
(consulté le 22/03/10)
* 8 PAEN :
périmètres de protection et de mise en valeur des espaces
agricoles et naturels. Consulter le site dédié à
l'expérimentation du dispositif :
http://www.experimentation-paen.fr/index.asp
(consulté le 26/10/10)
* 9 CIPRA France est la
délégation française de CIPRA international. CIPRA est
l'acronyme de Commission internationale pour la protection des Alpes.
* 10 DUVILARD Sylvie,
« Préface », Revue de géographie
alpine [En ligne], 98-2 | 2010, mis en ligne le 10/09/10. Disponible
sur :
http://rga.revues.org/index1181.html
(consulté le 27/10/10)
* 11 Idem
* 12 Par exemple, la
Convention Européenne du Paysage (Florence, 2000) qui était
liée à la problématique du développement durable a
fait naitre le nouveau concept de "paysage durable". Ce type de situation est
relativement problématique car pour les chercheurs, ces nouveaux
concepts doivent être définis. La chercheure Anne Sgard pose donc
la question: "qu'est-ce qu'un paysage durable?". SGARD Anne, Une «
éthique du paysage » est-elle souhaitable ?, VertigO, vol.10,
n°1, avril 2010, [En ligne], mis en ligne le 07/04/10. Disponible
sur :
http://vertigo.revues.org/9472
(consulté le 25/07/10)
* 13 La Convention alpine a
été signée le 7 novembre 1991 à Salzbourg en
Autriche par l'Autriche, la France, l'Allemagne, l'Italie, le Liechtenstein, la
Suisse et l'Union Européenne.
* 14 Site officiel de la DTA
des Alpes du Nord :
http://www.dta-alpesdunord.fr/
* 15 SOUBEYRAN Olivier,
cours 2010
* 16 DUVILARD Sylvie,
« Préface », Revue de géographie alpine,
op. cit.
* 17 ESPOSITO-FAVA
Aurélien, Economisons le foncier agricole ! Conflits d'acteurs
et de référentiels dans la gestion territoriale du foncier
agricole, Mémoire de Master 2 Sciences du Territoire, Institut de
Géographie Alpine, Grenoble 1, 2006, p.6
* 18 Cf. l'article de
BESANCENOT François, Le territoire : un espace à
identifier, Grain de géo [en ligne], ENS Lyon, 2006. Disponible
sur :
http://grain-de-geo.ens-lyon.fr/article.php3?id_article=165
(consulté le 20/07/10). L'article permet de « mettre en
lumière les principales acceptations de la notion de
territoire » de BAILLY à LUSSAULT en passant par BRUNET,
DI MEO, LACOSTE et LEVY. Au sein de ce travail de mémoire, le terme
« territoire » doit toutefois être entendu avant tout
dans sons sens administratif, juridique et politique.
* 19 JAUNEAU Jean-Claude,
CHEDIN Sylvie, Le Vercors en friche ? et alors ? Revue de
géographie alpine, 1990, fascicule 4, p.33, p.41
* 20 DUVILLARD Sylvie,
De l'appropriation foncière à la
« ville-territoire » : les processus de
territorialisation par la propriété foncière dans deux
petites villes des Montagnes Méditerranéennes (Nyons et
Aubenas), thèse de géographie, Institut de Géographie
Alpine, Grenoble 1, 2001, 314p.
* 21 DUVILLARD S.,
Ségrégation en zone rurale - Le cas des Baronnies.
Etudes Foncières, 2005, n°113, pp. 28-32
* 22 L'opposabilité
d'un document d'urbanisme induit une compatibilité et une mise en
conformité des documents dits de rang inférieur, par exemple, une
DTA opposable encadre les SCOT de son périmètre, et
eux-mêmes encadrent les PLU. Pour plus de précision, voir l'Annexe
n°3.
* 23 A l'issue de l'avis
favorable émis par la commission d'enquête le 9 juillet 2010, le
décret de la DTA des Alpes du Nord devrait être validé et
signé en Conseil d'Etat d'ici novembre 2010 (calendrier
prévisionnel).
* 24 CIPRA France, Le
foncier en vallée alpine, Document de cadrage en vue d'un projet
CIPRA-Région Rhône-Alpes, Octobre 2009
* 25 Cette démarche
est inspirée de BEDARD Mario, Vade-Mecum méthodologique,
Méthodologie et méthodes de sa recherche en géographie,
UQAM, 2009
* 26 LE MEUR Pierre-Yves,
Approche qualitative de la question foncière, Note
méthodologique, IRD REFO, Document de travail de l'unité de
recherche 095. Mai 2002, n°4, 23p.
* 27 Idem, p.3
* 28 Idem,
pp.3-4
* 29 RENARD Vincent,
Préface. In : ELLOUMI M., JOUVE A.M. (sous la dir. de).
Bouleversements fonciers en Méditerranée : des
agriculteurs sous le choc de l'urbanisation et des privatisations,
Karthala-CIHEAM, Montpellier, 2003, 384p.
* 30 MOULY Marielle, Les
relations ville-campagne, Stratégies de développement
urbain-rural en Rhône-Alpes, Mémoire de Master 2 Sciences des
Sociétés et de leur environnement, Université
Lumière, Lyon 2, 2008, p.63
* 31 YOLKA Philippe (sous la
dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la
montagne ?, CIPRA France, Grenoble, 2008, 148p.
* 32 GÖTZ Andreas,
Architecture, fonctionnement et dysfonctionnements du système
conventionnel, In :idem, p.16
* 33 De plus, d'autres
initiatives émergent, « complémentaires »
pour certains, « concurrentes » pour d'autres : le
réseau des régions alpines avec l'idée d'une
macro-région telle qu'envisagée au niveau communautaire, ou
encore le programme communautaire INTERREG "Alpine Space" qui constitue une
plate-forme technique qui agit concrètement sur les territoires
alpins.
* 34 La Loi n°95-115 du
4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire (LOADT) instaure un nouvel instrument
juridique d'aménagement du territoire, les directives territoriales
d'aménagement, définies à l'article L 111-1-1 du Code de
l'urbanisme.
* 35 Ministère de
l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration,
Ministère de l'environnement, et Ministère de
l'équipement, du logement, des transports et du tourisme.
* 36 Une photocopie de ce
courrier daté du 23/07/1996 a été retrouvée dans
les archives de CIPRA France.
* 37 Comme cela sera
détaillé dans la Partie II du mémoire, le caractère
opposable de la DTA des Alpes du Nord n'a pas résisté aux
amendements du projet de loi Grenelle II ; celle-ci a été
promulguée le 13 juillet 2010.
* 38 DTA Alpes du Nord,
Chiffres clés en 2006, Juillet 2010, p.8
* 39 L'intérêt du
travail de terrain est développé au chapitre concernant les
entretiens.
* 40 DEVOUASSOUX Anne-Sophie,
Chamonix mène-t-il une politique exemplaire en matière de
logement? Mémoire Master 2 géographie, Institut de
Géographie Alpine, Grenoble, 2006
* 41 Le Schéma de
Cohérence Territorial de la Région Urbaine Grenobloise (RUG)
devrait être adopté courant 2011.
* 42 ALLIE Louis, La
gestion de l'espace dans des Parcs naturels régionaux sous pressions
touristique et urbaine ou comment les acteurs bricolent du développement
et de la préservation dans les massifs de Chartreuse et du Vercors?
Thèse de géographie, Université de Montréal, 2005,
450 p.
* 43 L'ensemble des
protocoles de la Convention Alpine a été ratifié par la
France.
* 44 Les deux
dernières versions - à ce jour - du projet de DTA Alpes du Nord
ont été décortiquées et comparées l'une
à l'autre : il s'agit du projet présenté par la
Direction régionale de l'équipement Rhône-Alpes en juin
2009, et de la version de novembre 2009 soumise à consultation des
personnes publiques associées puis à enquête publique.
* 45 Pour illustrer cette
démarche : CIPRA, Nous les Alpes ! Des femmes et des
hommes façonnent l'avenir, 3ième rapport sur
l'état des Alpes, Schaan, Liechtenstein, Editions Yves Michel, Gap,
2007, 301p.
* 46 Voir annexe Tableau de
synthèse des entretiens.
* 47 « L'outil de
l'action publique n'est pas important en soi pour mener une politique
foncière mais il est intéressant car il révèle des
discours. C'est plutôt la démarche mise en oeuvre localement,
adaptée aux propres objectifs définis par chaque territoire, qui
détermine l'efficience d'une politique foncière volontariste dans
les Alpes du Nord ».
* 48 Voir en annexe la grille
d'entretien détaillée
* 49 CIPRA France, Le
foncier en vallée alpine, op.cit.
* 50 Projet d'une durée
de deux ans (septembre 2009 - septembre 2011) avec un financement FNADT et
Région Rhône-Alpes.
* 51 Les éléments
concernant le projet Foncimalp (schéma compris) sont issus de :
SUACI Alpes du Nord, Expériences de gestion du foncier (espace
agricoles et naturels) en zone de montagne -Projet Foncimalp- , groupe de
travail, 22 Avril 2010, St Baldoph
* 52 IngéTerr :
concepts, cadres et pratiques de l'ingénierie territoriale, s.l.n.d. [En
ligne]
https://psdr-auvergne.cemagref.fr/documents/seminaire-nov-2009/4p_ingeterr09.pdf
(consulté le 26/07/2010)
* 53 Entretien avec Nathalie
Bertrand (Cemagref Grenoble), Nicolas Gourdin (stagiaire du projet AMEN, qui
travaille à l'analyse, dans le contexte de la charte du PNR des Bauges
soumis à pression urbaine, des modalités de l'action
foncière dans les espaces naturels et agricoles) et Alexandre Mignotte
pour la CIPRA, le 12/07/10.
* 54 Descriptif du projet AMEN
[en ligne] :
http://www.cemagref.fr/le-cemagref/lorganisation/les-centres/grenoble/ur-emgr/projets/amen-les-amenites-environnementales-des-espaces-ruraux-valorisation-gestion-et-contribution-au-developpement-durable-des-territoires/
(consulté le 26/07/10)
* 55 Sur les liens
« paysage et foncier », se référer aux
travaux de recherche d'Anne SGARD et Sylvie DUVILLARD.
* 56 Tel qu'il est
formulé, cet effet PNR espéré et attendu repose surtout
sur le fait que la labellisation corresponde à l'attribution de moyens
financiers et donc humains supplémentaires pour coordonner et mettre en
oeuvre la Charte du Parc. Entretien n°8, Espace Belledonne.
* 57 WYON Thibaud,
Eléments d'analyse, d'évaluation et de repositionnement des
dispositifs fonciers de la région Rhône-Alpes, Mémoire
de DRT, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008, p.12
* 58 COMBY Joseph, De la
volatilité foncière, Etudes Foncières,
janvier-février 2009, n°137, pp.6-8, p.6
* 59 LANGLAIS Alexandra,
Programme DIVA-corridors, action 10 « continuités
écologiques et politiques publiques » : Quelles
procédures juridiques de conception et de mise en oeuvre de corridors
pour dégager de nouvelles pistes d'actions ?, In Econnect - WP6 /
séminaire du 06-05-2010 / Grenoble
* 60 BARRIERE Olivier, Une
gouvernance environnementale dans une perspective patrimoniale :
approche d'une écologie foncière, Portail foncier
et développement [en ligne], 2005, 26p. Disponible
sur :
http://www.foncier-developpement.org/analyses-et-debats/decentralisation-et-gestion-fonciere/une-gouvernance-environnementale-dans-une-perspective-patrimoniale-approche-d2019ecologie-fonciere/view
(consulté le
31/05/10)
* 61 Idem,
pp.4-5
* 62 DRIARD J-H, Droit
de l'urbanisme et Droit de propriété, 1997, In WYON Thibaud,
op.cit., p.18
* 63 BERNARD Alain, 2002, In
BARRIERE Olivier, op.cit.
* 64 DUJOLS Dominique, Le
territoire français est le patrimoine commun de la Nation, Etudes
Foncières, juillet-août 2010, n°146, pp. 24-26
* 65 COMBY Joseph,
op.cit.
* 66 Code de l'urbanisme,
Partie législative, Article L 110 [en ligne]. Disponible sur :
http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=D87142082162DDB996C5B0F503F8DA6F.tpdjo10v_3?idSectionTA=LEGISCTA000006143277&cidTexte=LEGITEXT000006074075&dateTexte=20100907
(consulté le 18/07/10)
* 67 DUJOLS Dominique,
op.cit., p.24
* 68 Entretien n°3,
CIPRA
* 69 COMBY Joseph,
Superposition des droits sur le sol, Les mille-feuilles du foncier,
Etudes Foncières, janvier-février 2010, n°143, pp.21-29
* 70 TWAIN Mark (1835-1910), In
WYON Thibaud, op.cit., p.11
* 71 COMBY Joseph, De la
volatilité foncière, op. cit., p.6
* 72 COMBY Joseph, Vocabulaire
foncier [en ligne]. Disponible sur :
http://www.comby-foncier.com/voc/vocabulaire_foncier.htm
(consulté le 03/08/10)
* 73 ESPOSITO-FAVA
Aurélien, op.cit., p.86
* 74 BOUTINET Jean-Pierre,
Anthropologie du projet, PUF, Paris, 1992, 307 p., p.67
* 75 DUJOLS Dominique, op.
cit., pp.25-26
* 76 Le Conseil
Générale de Haute-Savoie dispose d'un centre de ressources sur
les questions foncières ainsi que plusieurs fiches techniques. Toutes
ces données sont disponibles sur :
http://www.cg74.fr/pages/fr/menu1/les-actions/amenagement-du-territoire/questions-foncieres-256.html
(consulté le 16/06/10)
* 77 Conseil
Général de Haute-Savoie, définition de
« politique foncière » [en ligne]. Disponible
sur :
http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche7.pdf
(Consulté le 16/06/10)
* 78 HERRERA Catherine, A
la recherche de la ressource foncière territoriale sur les territoires
de montagne, Revue de géographie alpine [En ligne], 98-2 |
2010, mis en ligne le 10/09/10. Disponible sur :
http://rga.revues.org/index1185.html
(consulté le 27/10/10)
* 79 CAZAJOUS Romain,
Maîtriser le sol pour maîtriser son territoire,
Territoires [en ligne]. Septembre 2007, n°480. Disponible sur :
http://www.adels.org/territoires/480.htm#aun
(consulté le 05/06/10)
* 80 MORDARET Sylvie,
Pratiques et stratégies foncières des agriculteurs : un outil
d'analyse pour l'aménagement des zones fragiles, Thèse
CEMAGREF, Montpellier, 1994, p.42
* 81 TRAPITZINE Richard,
Les non-dits du Grenelle, Entre oubli du foncier, nouvelle conception de
l'action publique, retour de l'Etat et primat de l'environnement, Etudes
Foncières, janvier-février 2010, n°143, p.9
* 82 SEM :
Société d'Economie Mixte
* 83 Conseil
Général de la Moselle, définition du principe de
l'aménagement foncier [en ligne]. Disponible sur :
http://www.cg57.fr/vivrelamoselle/Pages/Environnement/Amenagementfoncier.aspx
(consulté le 29/07/10)
* 84 FACIM, La montagne,
univers de tous les possibles ?, Actes de la
conférence-débat CIMES 2007, Albertville. Intervention de Jean
Picchioni pp :200-201, Présentation de l'opération
menée à Cervens (74) par Jean-Claude Reynaud pp :145-158
* 85 Idem,
présentation de l'opération menée à Cervens (74)
par Jean-Claude Reynaud pp :145-158
* 86 Région
Rhône-Alpes, disponible sur :
http://www.rhonealpes21.fr/IMG/pdf/contribution_cld_nordisere_valsdauphine.pdf
(consulté le 15/06/10)
* 87 Pour plus de
détail, consulté la fiche n°21 sur la création des
valeurs foncières réalisée par le CG74. Disponible
sur :
http://www.cg74.fr/download/site-principal/document/actions/amenagement/questions-foncieres/fiche21.pdf
(consulté le 13/08/10)
* 88 Probablement en raison
de la « casquette » CIPRA, mes interlocuteurs se sont
plutôt attardés sur les problèmes posés par
l'artificialisation des terres agricoles, ou encore l'enfrichement.
* 89 LE MEUR Pierre-Yves,
op.cit.
* 90 Idem, p.4
* 91 Cette liste est
indicative et donc non-exhaustive, elle est donnée à titre
d'exemple.
* 92 DTA : Directive
territorial d'aménagement, devenue DTADD, et PIG, Projet
d'intérêt général.
* 93 MOULY Marielle, op.
cit., p.137
* 94 Site officiel de la
Réforme des collectivités territoriales :
http://www.interieur.gouv.fr/sections/reforme-collectivites/pourquoi-reforme
(consulté le 11/08/10)
* 95 Entretien n° 17,
ADAYG
* 96 MARLY Jean et BONNEFOY
Serge, Urbaniser le périurbain, Etudes Foncières,
mars-avril 2010, n°144, p.36
* 97 ZAPALSKI Emilie,
Rural-urbain : le nombre de conflits en nette augmentation,
Localtis.info [en ligne], article publié le 04/05/09
* 98 TCHEKEMIAN Anthony,
L'impact d'une politique publique agricole européenne sur les
acteurs et les territoires ruraux français, thèse de
géographie, Institut de Géographie Alpine, Grenoble 1, 2008,
505p., p.290
* 99 MOULY Marielle, op.
cit., p.79
* 100 LASLAZ Lionel,
« Préface », Revue de géographie alpine,
Parcs nationaux de montagne et construction territoriale des processus
participatifs [En ligne], mars 2010. Disponible sur :
http://rga.revues.org/index1088.html
(consulté le 06/06/10).
* 101 BLANC Camille, La
Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Enjeux de
territoires et conflits identitaires portés par les stations de sports
d'hiver, Mémoire Master 1, Institut d'Urbanisme de Paris, juin
2010, 64p.
* 102 PISANI Edgard,
Utopie Foncière, op. cit., pp.214-215
* 103 MANESSE Jacques,
Montagne : qui décide ?, Etudes foncières,
n°38, mars 1988, pp.8-16
* 104 TRAPITZINE Richard,
op.cit.
* 105 Réunion du
groupe de travail Foncimalp, 22/04/10
* 106 Dossier : Le
monde de l'après-Grenelle, Pour la montagne, n°207,
juillet-août 2010, paris, pp.7-10
* 107 Président de
la communauté d'agglomération de Chambéry
métropole, Thierry Repentin est également sénateur et chef
de file de l'opposition socialiste au Conseil Général de la
Savoie. Tribune In Pour la montagne, op. cit.
* 108 DUJOLS Dominique,
op.cit.
* 109 ALLIE Louis, op.
cit., p.54
* 110 CAZAJOUS Romain, Le
sol pour maîtriser son territoire, Revue Territoires, n°480,
septembre 2007, [En ligne]. Disponible sur :
http://www.adels.org/territoires/480.htm#aun
(consulté le 05/08/10)
* 111 WYON Thibaud, op.
cit.
* 112 A l'échelle du
SCOT, l'enchevêtrement de compétences et des interventions
publiques nécessite cet effort de coordination. Le schéma en
Annexe l'illustre parfaitement bien.
* 113 WYON Thibaud, op.
cit., p.29
* 114 Entretien n°6, CAUE
74
* 115 WYON Thibaud, op.
cit., pp.81-82
* 116 Voir également le
rapport du Sénat [en ligne]. Disponible sur :
http://www.senat.fr/rap/r97-415/r97-41540.html
(consulté le 12/06/10)
* 117 Mission
départementale d'observation de l'habitat, La question
foncière, Lettre de la mission, septembre 2007 [en ligne].
Disponible sur :
http://adil.dromenet.org/obs/lettres_adil/Mission_obs_6.pdf
(consulté le 24/05/10)
* 118 Idem
* 119 YOLKA Philippe (sous la
dir. de), La Convention Alpine. Un nouveau droit pour la
montagne ?, op.cit.
* 120 Idem, p.5
* 121 La CIPRA France a
été fortement sollicitée durant cette période pour
« épauler » la présidence française de
la Convention alpine. Toutefois, les moyens humains et financiers
mobilisés par le ministère n'auraient pas été
à la hauteur, et en mars 2009, la présidence française
était plutôt ravie de « passer le
bâton » à la présidence slovène selon
certains.
* 122 YOLKA Philippe, op.
cit., p.6
* 123 Site officiel de la DTA
des Alpes du Nord. Disponible sur :
http://www.dta-alpesdunord.fr/quest-ce-quune-dta.html
(consulté le 13/08/10)
* 124 Sur les 103 pages de la
version finale de la DTA des Alpes du Nord de juillet 2010, la Convention
alpine est citée douze fois : dans la description du contexte mais
également dans les objectifs et les orientations prescriptives du
document.
* 125 Le Livre Blanc a
été approuvé par le Comité Interministériel
d'Aménagement et de Compétitivité des Territoires (CIACT)
du 6 mars 2006 : « le CIACT a approuvé le Livre Blanc des Alpes du
Nord qui constitue la référence stratégique de l'Etat pour
la définition et la mise en oeuvre de ses politiques sur ce territoire
et a demandé au préfet de la région Rhône-Alpes de
poursuivre l'élaboration de la DTA des Alpes du Nord sur un nombre
limité d'objectifs ». Source : DTA Alpes du Nord,
Juillet 2010, p.6
* 126 Disponible sur le site
officiel de la DTA des Alpes du Nord :
http://www.dta-alpesdunord.fr/diagnostic.29.html
(consulté le 13/08/10)
* 127 DTA Alpes du
Nord, « Des politiques foncières pour mieux
maîtriser le développement, gérer l'espace et
réguler les tensions », Juillet 2010, p.103
* 128 Se reporter à la
notice explicative du schéma pour les références et autres
détails, en Annexe.
* 129 Compte-rendu du GTGC
du 26-02-09 (rédigé le 18/03/09) [en ligne], p.4. Disponible
sur :
http://www.dta-alpesdunord.fr/la-concertation.html
(consulté le 24/03/10)
* 130 DTA des Alpes du
Nord : hors introduction et diagnostic du chapitre 1, de la version finale
de juillet 2010.
* 131 Direction
régionale de l'Equipement, Projet de Directive Territoriale
d'Aménagement des Alpes du Nord, 15 Juin 2009, p.38
* 132 CIADT :
Comité Interministériel d'Aménagement et de
Développement du Territoire
* 133 Direction
régionale de l'équipement en Rhône-Alpes, Livre Blanc
et DTA Alpes du Nord [en ligne]. Disponible sur :
http://www.rhone-alpes.equipement.gouv.fr/article.php3?id_article=90&var_recherche=alpes+nord
(consulté le 16/08/10)
* 134 CIACT :
Comité interministériel d'aménagement et de
compétitivité des territoires. Le CIACT du 6 mars 2006 [en
ligne]. Disponible sur :
http://www.rhone-alpes.equipement.gouv.fr/IMG/pdf/CIACT_6_mars_2006-Alpes-du-Nord_cle656b81.pdf
(consulté le 16/08/10)
* 135 Edater, Evaluation
Stratégique Environnementale de la DTA Alpes du Nord - Rapport
environnemental, 05/10/ 2009, 203p., p.5
* 136 Idem, p.14.
« Les principaux obstacles étant d'une part d'obtenir des
données actualisées et, d'autre part, de les avoir à
l'échelle du territoire de la DTA ».
* 137 Calendrier officiel [en
ligne]. Disponible sur :
http://www.dta-alpesdunord.fr/Calendrier.html
(consulté le 16/08/10)
* 138 Le rapport
environnemental rendu par Edater le 5 octobre 2009 (203p.) est ensuite repris
comme document officiel par la préfecture de région
Rhône-Alpes : Directive Territoriale d'Aménagement des
Alpes du Nord - Évaluation Stratégique Environnementale - Rapport
Environnemental, Mars 2010, 230p.
* 139 Conseil
général de l'environnement et du développement durable
(CGEDD) - Autorité Environnementale, Avis
délibéré de l'Autorité environnementale concernant
la Directive territoriale d'aménagement « Alpes du Nord »,
n° 2010 - 02, 14/O1/10, 13p.
* 140 Rapport final de la
Commission d'enquête publique, 09/07/10, 111p., Conclusions
motivées de la Commission d'enquête publique, 09/07/10,
13p.
* 141 SGAR :
Secrétariat Général pour les Affaires Régionales.
Il assiste le préfet de région dans ses fonctions et constitue
à ce titre la Préfecture de Région. Disponible sur :
http://www.rhone.gouv.fr/web/127-le-secretariat-general-pour-les-affaires-regionales.php
(consulté le 16/08/10)
* 142 Pour plus de
détails, se référer au site officiel du
Sénat :
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjl08-155.html
* 143 Version en vigueur au 14
juillet 2010, Titre 1er, Chapitre 2, article 13 (ex-article 5 du
projet de Loi)
* 144 Projet de Loi Grenelle
II, article 5 : « Sur proposition de MM Thierry Repentin, Daniel
Raoul et des membres du groupe socialiste, rattachés et
apparentés, votre commission a introduit dans le texte
une disposition visant à permettre aux parties prenantes dans les DTA
actuellement en cours, mais pour lesquelles les négociations ont pris du
retard, de poursuivre l'élaboration dans le cadre des procédures
existantes, de sorte que ces territoires ne soient pas pénalisés,
et que les études n'aient pas été réalisées
en pure perte », [en ligne]. Disponible sur :
http://www.senat.fr/rap/l08-552-1/l08-552-127.html
(consulté le 20/05/10)
* 145 Michel Bouvard,
député UMP de la 3ième circonscription de
Savoie, vice-président du Conseil Général de Savoie,
vice-président de la Commission des Finances de l'Assemblée
Nationale et président de l'Association Européenne des
élus de la Montagne (AEM).
* 146 Extrait du compte-rendu
des débats sur l'article 5 (actuel article 13) du projet de Loi Grenelle
II, à propos du maintien du caractère opposable de la DTA des
Alpes du Nord en cours d'élaboration, amendement n°457
proposé par Yves Cochet.
* 147 Tous les comptes-rendus
des débats à l'Assemblée Nationale sont disponibles en
ligne, dont celui de la 2ème séance du Mercredi 5 mai
2010 :
http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2009-2010/20100179.asp#ANCR201000000184-00404
(consulté le 20/05/10)
* 148 Les conclusions de la
commission mixte paritaire ont été examinées à
l'Assemblée le 28 juin et le 29 au Sénat. Un tableau comparatif
des modifications apportées est disponible en ligne :
http://www.senat.fr/rap/l09-567/l09-5670.html#toc0
(consulté le 17/08/10)
* 149 Directive
Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Rapport Final de la
Commission d'enquête publique, op.cit.
* 150 Rencontre avec
Pierre-Yves FAFOURNOUX, Président de la Commission d'enquête
publique de la DTA des Alpes du Nord, permanence du commissaire enquêteur
à Crolles, le 21/05/10, en présence de Vincent Neirinck pour
Mountain Wilderness France.
* 151 Directive
Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Rapport Final de la
Commission d'enquête publique, op. cit.
* 152 Idem, p.43
* 153 France Nature
Environnement, Grenelle II voté : que l'esprit du Grenelle continue
!, communiqué de presse [en ligne], 11/05/10. Disponible
sur :
http://fne.asso.fr/fr/grenelle-ii-vote--que-lesprit-du-grenelle-continue-.html?cmp_id=33&news_id=1657&vID=49
(consulté le 12/05/10)
* 154 MIGNOTTE Alexandre,
Le tourisme durable à l'échelle des Alpes : quelle place pour
les stations de montagne? In Les stations de sports d'hiver face au
développement durable. L'Harmattan, Paris, 2010, p.101
* 155 ANMSM : Association
nationale des maires des stations de montagne
* 156 BLANC Camille, La
Directive Territoriale d'Aménagement des Alpes du Nord. Enjeux de
territoires et conflits identitaires portés par les stations de sports
d'hiver, op.cit.
* 157 Préfecture de
région Rhône-Alpes, DTA Alpes du Nord, Présentation de
la démarche, 17/07/98, Lyon, 6p.
* 158 MANESSE Jacques,
Montagne : qui décide ?, op.cit.
* 159 Idem
* 160 Brève du
Dauphiné Libéré du 06/06/01. La Directive Habitats doit
s'appuyer sur la mise en place du réseau Natura 2000.
* 161 GERBAUX
Françoise, La montagne en politique, L'Harmattan, 1994.
Commentaire de l'ouvrage [en ligne]. Disponible sur :
http://pweb.ens-lsh.fr/omilhaud/La_montagne_en_politique.doc
(consulté le 20/04/10). L'affaire de la Vanoise concerne le promoteur de
la station de Val-Thorens et les élus mauriennais qui revendiquent un
accès Ménuires/Val-Thorens et pour cela, le déclassement
d'une partie du parc national de la Vanoise ; ils rencontrent alors de
violentes oppositions des « naturalistes » qui mettent en
avant l'intangibilité des parcs. Un arbitrage est finalement
demandé au président Pompidou qui autorisera les remontées
mécaniques.
* 162 BERSANI Catherine,
La DTA ou le retour de l'Etat gendarme, Etudes Foncières, juin
1999, n°83. Mme Bersani est inspecteur général de
l'Equipement. Disponible sur :
http://www.adef.org/site/1999/06/01/les-dta-ou-le-retour-de-letat-gendarme/#more-203
(consulté le 20/10/10)
* 163 NAYROU Henri, Le
Grenelle des idées, oui, des leçons, non ! (Edito), Pour la
montagne, juillet-août 2010, n°207. Henri Nayrou est le
président de l'ANEM, l'association nationale des élus de la
montagne, et député de l'Ariège. Le magazine Pour la
Montagne est le mensuel d'information de l'ANEM.
* 164 DEBARBIEUX Bernard,
RUDAZ Gilles, Les Faiseurs de montagne, CNRS Editions, Paris, 2010,
373p. « Les montagnards, coupables désignés »,
pp.107-108
* 165 DEBARBIEUX Bernard,
RUDAZ Gilles, loc. cit.
* 166 Une visite au
« SAM 2010 », « le rendez-vous international de
référence pour l'aménagement en montagne », le
23/04/10 à Grenoble, offre un aperçu assez exhaustif de ce qu'est
l'aménagement de la montagne dans sa version durable.
* 167 YOLKA Philippe, op.
cit., p.5
* 168 BARRIERE Olivier,
Une gouvernance environnementale dans une perspective patrimoniale :
approche d'une écologie foncière, op.cit.
* 169 BERSANI Catherine,
op. cit.
* 170 BARRIERE Olivier ,
loc. cit.
* 171 BARRIERE Olivier,
loc. cit.
* 172 C'est d'ailleurs l'un
des questionnements de CIPRA France et une dimension de ce travail de
recherche : la Convention alpine, et plus précisément la DTA
des Alpes du Nord, peuvent-elles servir de base d'un référentiel
pour appréhender les bonnes pratiques de gestion foncière dans
l'espace alpin ?
* 173 MORAND Charles-Albert,
Le droit néo-moderne des politiques publiques, éd. LGDJ,
coll. Droit et société, 1999, 224p.
* 174 Cette
présentation s'est appuyée sur deux documents et deux entretiens
réalisés à Chamonix :
DUVILLARD S., SGARD A., ZIOTTI C., Les territoires
touristiques de montagne bousculés par la pression
foncière : le poids des politiques publiques dans les trajectoires
territoriales, 6è Rencontres de Mâcon "Tourismes et
territoires", pré-actes, 13-14-15 septembre 2007, 8p.
MARCELPOIL E. (coord.), Nouvelles pratiques touristiques en
zone de montagne : vers un renouvellement des pratiques de gestion
foncière ? Réponse à l'appel d'offre "Hausse du
foncier et de l'immobilier, quels enjeux autour du tourisme ? ", Cemagref
Grenoble/PACTE-Territoires, s.l.n.d, 71p. Disponible en ligne (consulté
le 29/03/10) :
http://www.tourisme.gouv.fr/stat_etudes/etudes/territoires/zone_montagne.pdf
Entretien n°1 et 2, Chamonix
* 175 Il rassemble quatorze
communes, dont Servoz, Les Houches, Vallorcine et Chamonix qui constituent de
leur côté une communauté de communes depuis le
1ier janvier 2010 : transformation de l'ex-SIVOM HVA -Haute
vallée de l'Arve- en un EPCI à fiscalité propre. Les
réflexions ont été initiées dès octobre
2008
* 176 Entretien n°2,
Chamonix
* 177 Plus
d'efficacité avec la nouvelle Communauté de Communes de la
Vallée de Chamonix-Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n°
3, décembre 2009, p.2
Une nouvelle étape pour la vallée de Chamonix
Mont-Blanc, Chamonix Bulletin municipal n°4, mai 2010, p.2
* 178 Entretien n°16,
EPFL 74
* 179 Une étude
réalisée en 2009 par l'EPFL 74 s'est intéressée aux
freins potentiels à l'adhésion d'une commune.
* 180 Cette thématique
mobilise 60% (voir 80% certaines années) des interventions de l'EPFL de
Haute-Savoie.
* 181 Entretien n°16,
EPFL 74
* 182 Ainsi, une étude
pour un observatoire foncier a été commandée par le
syndicat mixte du Pays du Mont-Blanc auprès de la SAFER
Rhône-Alpes pour l'automne 2010 (Entretien n°7, SAFER
Rhône-Alpes). Le service foncier de la ville de Chamonix n'en
était pas informé.
* 183 Entretien n°1,
Chamonix
* 184 DUVILLARD S., SGARD A.,
ZIOTTI C., op. cit., p.6
* 185 Idem
* 186 Entretien n°1,
Chamonix. Ce travail « en interne » marque une
démarche sur le long terme, avec plusieurs échéances. En
revanche, le service foncier ainsi que l'élue à l'urbanisme ne
participaient pas au groupe de travail (composé d'élus) :
ils l'ont intégré par la suite.
* 187 Entretien n°1,
Chamonix
* 188 Il était aussi
question de monter une SEM, société d'économie mixte,
comme alternative à un promoteur mais cela n'a pas encore aboutit...
L'idée s'inspire d'une expérience menée dans le
Beaufortain où une SEM aurait été créée pour
ce type d'opération.
* 189 Deux
établissements publics (EPIC) qui sont dans l'obligation de faire
appliquer un droit de priorité aux collectivités territoriales,
tout comme l'Etat, sur la cession de biens fonciers ou immobiliers.
* 190 Entretien n°1,
Chamonix
* 191 COMBY Joseph,
Superposition des droits sur le sol. Les mille-feuilles du foncier,
Etudes Foncières, n°143, janvier-février 2010, p.24
* 192 PERINET-MARQUET Hugues.
In La Semaine Juridique, édition notariale et
immobilière, n°21, 28 mai 2010, pp.18-19. Article disponible
sur :
http://anil.bibli.fr/opac//doc_num.php?explnum_id=5604
(consulté le 13/07/10)
* 193 PERINET-MARQUET Hugues,
op. cit.
* 194 D'après A.S.
Devouassoux, pour le Clos Napoléon, le jury d'attribution composé
d'élus aurait subit des pressions significatives. In Chamonix
mène-t-il une politique exemplaire en matière de logement?
op.cit.
* 195 A Chamonix, on peut
supposer sans trop se tromper qu'il s'agit d'anglais richissimes.
* 196 Maitre Pacaud
s'avère être le notaire de référence sur cette
question récurrente des stations alpines. Il est intervenu à
Chamonix mais aussi à Courchevel et ailleurs.
* 197 La responsable du
service foncier, Anne Berthier, est d'ailleurs juriste de formation.
* 198 Entretien n°1 et 2,
Chamonix
* 199 Entretien n°1,
Chamonix
* 200 DUVILLARD S., SGARD A.,
ZIOTTI C., op. cit., pp.6-7
* 201 Entretien n°1,
Chamonix
* 202 ALLIE Louis,
op.cit.
* 203 Idem, p.41
* 204 OPH : Office Public
de l'Habitat, nouveau et unique statut qui regroupe les OPAC et OPHLM depuis le
1ier février 2007. Plus d'informations sur le site de la
fédération nationale :
http://www.offices-hlm.org/
* 205 ALLIE Louis, op.
cit., p.6
* 206 Secteur Gervanne et
Diois. Dans une étude réalisée à la demande du PNRV
par la sociologue Josette Debroux, il est évoqué l'apparition
d'un « quart-monde » dans ses secteurs sud du
Vercors : Les nouveaux venus du canton de Châtillon-en-Diois ou
la rencontre entre un territoire et des histoires individuelles, In HANUS,
Regards croisés sur l'agriculture en Vercors, Éd. Parc
naturel régional du Vercors, coll. « Études et chroniques
», Lans-en-Vercors, 2003, pp. 240-254
* 207 DUVILLARD S., SGARD A.,
ZIOTTI C., op. cit., p.2
* 208 La
« CCMV » regroupe les sept communes suivantes :
Autrans, Corrençon-en-Vercors, Engins, Lans-en-Vercors, Méaudre,
Saint-Nizier-du-Moucherotte, Villard-de-Lans.
* 209 CCMV, Charte de
développement, document de référence, mai 2007, 57p.,
p.14. Population en 2005.
* 210 BERTHIER I., Massif
du Vercors, une contrainte librement ressentie, Diagonal, n°181, juin
2010, pp : 54-56
* 211 Source : INSEE-RP.
Disponible sur :
www.observatoire-montagnes.org
(consulté le 23/08/10)
* 212 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit.
* 213 Idem, p.25
* 214 PNRV, 2008-2020, la
charte du parc du Vercors, approuvée le 22/09/07 par le
comité syndical, 96p., p.7
* 215 Idem, p.54
* 216 Idem,
pp.58-59
* 217 Entretien n°4, PNR
Vercors
* 218 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit., p.3.
Discours d'introduction de Jean Faure, président de la Communauté
de communes du massif du Vercors, sénateur-maire d'Autrans.
* 219 CCMV, Charte de
développement, Plan d'actions, mai 2007, 45p.
* 220 BERTHIER I., Massif
du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.
* 221 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit.,
p.12
* 222 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit., p.40.
Tableau réalisée à partir des données du
document.
* 223 C.f. Annexes.
* 224 BERTHIER I., Massif
du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.
* 225 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit.,
p.10
* 226 Idem, p.26
* 227 BERTHIER I., Massif
du Vercors, une contrainte librement ressentie, op.cit.
* 228 Entretien n°4, PNR
Vercors
* 229 CCMV, Charte de
développement, document de référence, op. cit.,
p.12
* 230 CCMV, Charte de
développement, Plan d'actions, op. cit., p.45
* 231 La Communauté des
communes du Vercors regroupe cinq communes du même canton : La
Chapelle-en-Vercors, St Agnan-en-Vercors, St Julien-en-Vercors, St
Martin-en-Vercors et Vassieux-en-Vercors. Informations disponible sur :
http://www.vercors.net/
* 232 PNRV, Bilan
d'activité 2009, mars 2010, 123p., p.29. Les opérations
pilotes de Charte paysagère sont impulsées par le PNRV dans le
cadre des objectifs définis par sa Charte 2008-2020.
* 233 Idem, p.32
* 234 ALLIE Louis, op.
cit., p.448-449
* 235 Congrès des Parcs
naturels régionaux « Les parcs, terres
d'innovations », le 30 septembre, 1er et 2 octobre 2009, Parc naturel
régional de la Chartreuse [en ligne]. Disponible sur :
http://www.parcs-naturels-regionaux.fr/fr/approfondir/communique-presse.asp?op=_communique_details&id=1088
* 236 Plus d'informations
disponibles sur :
http://www.le-gresivaudan.fr/-Fiche-d-identite-
(consulté le 24/08/10)
* 237 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 238 Dans leur article Et
si le capitalisme foncier changeait nos paysages quotidiens ?,
Françoise Jarrige, Anne-Marie Jouve et Claude Napoleone estiment que la
première conséquence de la périurbanisation est le mitage
de l'espace et donc la production d'un paysage
« patchwork ». In
Le Courrier de l'environnement,
n°49, juin 2003, Disponible sur :
http://www.inra.fr/dpenv/jarric49.htm
(consulté le 24/08/10)
* 239 ADABEL, Contribution de
l'ADABEL au SCOT de la Région grenobloise, octobre 2009, 4p.
* 240 ADASEA :
Association Départementale pour l'Aménagement des Structures des
Exploitations Agricoles
* 241 L'expérience est
détaillée dans les deux documents suivants :
- MOULY Marielle, op. cit. p.64-65
- Programme Comédie, Etude de cas La charte de bien
vivre en Belledonne, concilier différents usages de l'espace, Forum
régional sur la concertation et la médiation environnementales,
28 juin 2006, 14p.
* 242 CAUE : le Conseil
d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement de l'Isère
* 243 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 244 JARRIGE F., JOUVE A-M.,
NAPOLEONE C., op.cit.
* 245 ADABEL, Une
coopérative laitière en projet sur Belledonne, 19/04/10 [en
ligne]. Consulté le 09/06/10. Disponible sur :
http://www.sillon38.com/blog/2010/04/19/une-cooperative-laitiere-en-projet-sur-belledonne/
* 246 Entretien n°13,
ADABEL
* 247 ADABEL, PEZMA, un
programme en voie d'abandon, 29/03/10 [en ligne]. Consulté le
09/06/10. Disponible sur :
http://www.sillon38.com/blog/2010/03/29/pezma-un-programme-en-voie-d%E2%80%99abandon/
* 248 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 249 Entretien
téléphonique avec M. Benigna, Communauté de communes Sud
grenoblois.
* 250 ADABEL, Entre
urbanisation et agriculture, juin 2005, 4p.
* 251 Idem
* 252 Idem
* 253 Entretien n°13,
ADABEL
* 254 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 255 ADABEL,
Unités d'Habitations Nouvelles, Conseil d'Administration du
03/03/08
* 256 Etablissement public du
SCOT, Document support au débat des territoires, Premiers
éléments de diagnostic, Document de travail, novembre 2009,
Grenoble
* 257 Entretien n°13,
ADABEL
* 258 Entretien n°13,
ADABEL
* 259 Idem
* 260 Idem
* 261 Visite de la ferme, CA
CIPRA France Mars 2010
* 262 Informations
détaillées disponible sur :
http://www.espacebelledonne.fr/-Leader-2007-2013-.html
(consulté le 15/05/10)
* 263 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 264 Le FEADER, Fonds
Européen Agricole pour le Développement Rural, complète
les fonds structurels mis en place par la Commission Européenne (Fonds
Social Européen -FSE- et Fonds Européen de Développement
Régional -FEDER-). Le FEADER finance le programme Leader.
* 265 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 266 Idem et
Entretien n°13, ADABEL
* 267 Entretien n°13,
ADABEL
* 268 C.f. Partie I, chapitre
1
* 269 Entretien n°8,
Espace Belledonne
* 270 PERINET-MARQUET Hugues,
op. cit.
* 271 Le Parc Naturel
Régional de Chartreuse a édité en 2009 un
« Guide à destination des élus locaux :
réaliser un Plan Local d'urbanisme dans le Parc de
Chartreuse ». Une double page (pp.4-5) est consacrée à
poser des questions préalables sur l'intérêt de
réviser ou d'élaborer un document d'urbanisme. Entretien
n°12, PNR Chartreuse
* 272 Entretien n°5,
Métropole Savoie
* 273 Entretien n°17,
ADAYG. Expression pour définir les propriétaires donc la parcelle
se trouve de l'autre côté du trait de l'urbaniste, en zone N, A ou
AU, contrairement à son voisin de parcelle qui lui est en zone U.
* 274 MARCELPOIL E
(coord.), Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers
un renouvellement des pratiques de gestion foncière ?
op.cit., p.59
* 275 Il s'agit d'aborder ici
quelques pistes de réflexion sur cette dimension du rapport à la
norme et au droit en aménagement, en ayant toutefois conscience que ce
sujet ouvre sur un nouveau champ d'investigation qui n'était pas le
point focal de ce travail de recherche.
* 276 BARRIERE Olivier,
op.cit.
* 277 Idem
* 278 Idem
* 279 Idem, citation
de MORAND Charles-Albert (1999)
* 280 MAULY Marielle, op.
cit. Citation de PONTIER Jean-Marie (1993), p.45
* 281 ALLIE Louis, op.
cit. p.343. Référence à M. Crozier et E.
Friedberg.
* 282 Un aperçu a
été donné en Partie I du mémoire.
* 283 SAUVEZ Marc,
Accompagner les mutations urbaines vers une autre planification,
Etudes Foncières, n°146, juillet-août 2010, pp :
11-13
* 284 Idem
* 285 SAUVEZ Marc, op.
cit.
* 286 GROS Serge, In CIMES
2009 Construire dans la pente, une opportunité, Actes de la
conférence-débat du 17 déc. 2009, Fondation Facim,
Chambéry, 120p., pp.116-117
* 287 BARRIERE Olivier,
op. cit., p.22
* 288 Une première
étape vers un infléchissement du droit de propriété
est déjà engagée par la démarche de
« démembrer la propriété », ou
« démembrer le foncier ». Se référer
par exemples à l'article de TOURNAFOND Bérénice,
L'usufruit social, Etudes Foncières, n°136,
novembre-décembre 2008, pp.49-52
* 289 SAUVEZ Marc, op.
cit.
* 290 Etablissement public du
SCOT de la région urbaine grenobloise, op. cit.
* 291 SAUVEZ Marc, op.
cit.
* 292 MARCELPOIL E (coord.),
Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un
renouvellement des pratiques de gestion foncière ?
op.cit., p.59
* 293 Idem, p.64
* 294 LAPOSTOLLE Dany,
L'ingénierie territoriale vue des pays : une bureaucratie
professionnelle territoriale en gestation, thèse de sciences
politiques, Institut d'Etudes Politiques de Lyon, Université
Lumière Lyon 2, 2010 [en ligne]. Disponible sur :
http://theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2010/lapostolle_d/info
(consulté le 17/08/10). Résumé de la thèse.
* 295 ESPOSITO-FAVA
Aurélien, op. cit., p.7
* 296 Entretien n°7,
SAFER Rhône-Alpes. Au sujet de la vente des chalets d'alpage (bâti
et alpage agricoles), si la SAFER préempte, elle ne peut dissocier le
bâti des terres lors de la rétrocession si l'ensemble de reste pas
agricole.
* 297 BAREL Yves,
Modernité, code, territoire, Annales de la recherche urbaine,
n°10-11, printemps 1981, Paris, pp.3-21
* 298 Se référer
aux travaux de SOUBEYRAN Olivier qui posent la question : l'improvisation
peut-elle être une théorie de l'action ou de la pensée
aménagiste ? Ainsi qu'aux travaux des pragmatistes
américains, et ceux de C. Lindblom dans les années 1950 sur
l'incrémentalisme, The Science of muddling throught, 1959
* 299 ALLIE Louis, op.
cit. p.350, p.339, p.41, p.39
* 300 ALLIE Louis,
op. cit.
* 301 ALLIE Louis, op.
cit., p.14. Selon l'expression de Louis Allie, la «monturbanisation
est une forme d'urbanisation de moyenne montagne ». Ni
« l'urbanisation galopante ni la multiplication de grandes surfaces
commerciales [...] Il s'agit plutôt de la résultante d'action au
coeur d'objectifs de développement et de
préservation ».
* 302 DUPONT Josselin, La
Maîtrise du foncier comme outil de gestion intégré des
territoires bretons, ESO-Rennes, 16/09/08, [en ligne]. Disponible
sur :
http://eso.cnrs.fr/spip.php?article406
(consulté le 19/05/10)
* 303 Définition du
Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL)
* 304 Idem
* 305 Question posée
lors de : Entretien n°6, CAUE 74
* 306 Annexe au
procès-verbal de la séance du Sénat du 09/10/02, 408p.
* 307 ANEM, Pour la
Montagne, n°126-127, mars-avril 2003, 23p.
* 308 UICN,
1985-2005 : 20 ans de loi Montagne - Bilan et propositions,
Paris, 2005, 15p. Le comité français regroupe deux
ministères, cinq établissements publics, trente-sept ONG (dont
CIPRA France) et deux cent experts.
* 309 BESSON Louis (initiateur
de la Loi Montagne de 1985 et ancien maire de Chambéry), In Pour la
Montagne, op. cit., p.3.
* 310 MANESSE Jacques,
Montagne : qui décide ?, op.cit. L'auteur
remarque que la loi Montagne qui reprend pourtant les principales rubriques de
la Directive de 1977, « n'est pas marquée par un contenu
clairement et fermement normatif ». Par exemple, la
préservation des terres nécessaires à l'agriculture n'est
pas « nettement garantie contre la concurrence des équipement
liés notamment à la pratique du tourisme sportif (L
145-3-1) ». Ainsi dès 1988, J. Manesse souligne que
« la marge d'appréciation n'est pas
négligeable ».
* 311 GERBAUX
Françoise, La montagne en politique, op.cit.
* 312 Idem
* 313 Entretien n°2,
Chamonix
* 314 Site internet officiel
de la DTA des Alpes du Nord :
www.dta-alpesdunord.fr
* 315 ANEM, Pour la
Montagne, op. cit., p.5
* 316 MARCELPOIL E. (coord.),
Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un
renouvellement des pratiques de gestion foncière ?
op.cit., pp.61-62
* 317 CIPRA, Spatial
planning in climate change, a background report of CIPRA, Compact No
02/2010, p.4
* 318 CHALAS Yves (sous la
dir. de), L'imaginaire aménageur en mutation. Cadres et
référents nouveaux de la pensée et de l'action
urbanistique, L'Harmattan, Paris, 2004, 340 p.
* 319 Le
2ième forum des « ONG montagne »
organisé à l'Institut de géographie alpine de Grenoble le
30/04/10 par la CIPRA France, le REEMA, l'IGA et la GTA était
teinté de cet état d'esprit comme en témoigne son
intitulé : « vers une intelligence collective et
territoriale ? »
* 320 GIRAUT
Frédéric, Innovation et territoires: les effets
contradictoires de la marginalité, In Semaine alpine 2008 :
innover dans les Alpes, RGA, Editions du Fournel, L'Argentière La
Bessée, s.l.n.d., pp.6-8
* 321 ALLIE Louis, op.
cit., p.48
* 322 DUVILLARD S., SGARD A.,
ZIOTTI C., Les territoires touristiques de montagne bousculés par la
pression foncière : le poids des politiques publiques dans les
trajectoires territoriales, op.cit., p.1
* 323 MARCELPOIL E. (coord.),
Nouvelles pratiques touristiques en zone de montagne : vers un
renouvellement des pratiques de gestion foncière ?, op.cit.,
p.3
* 324 Idem, p.64
* 325 MANESSE Jacques, op.
cit.
* 326 BLANC Camille, op.
cit.
* 327 MERIAUDEAU Robert, A
qui la terre ? La propriété foncière en Savoie et
Haute Savoie, Thèse de Géographie, Institut de
géographie alpine de Grenoble, 1986, 480p.
* 328 L'EPFL de la
région grenobloise (2002), l'EPFL de la Haute-Savoie (2003) et l'EPFL de
Savoie (2005)
* 329 MERIAUDEAU Robert,
op cit. Sa thèse a reçu le Prix Sully Olivier de Serres
1985 (premier prix de thèse)
* 330 JANIN
Bernard, La terre savoyarde - Compte-rendu critique, In Revue de
géographie alpine, Vol. 75, N°1, 1987, pp. 96-97
* 331 Idem
* 332 Idem
* 333 MERIAUDEAU Robert,
La spécificité foncière de la montagne
française. In Revue de géographie alpine, Tome 77,
N°1-3, 1989, pp. 203-210 [en ligne]. Disponible sur (consulté le
27/07/10) :
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_1989_num_77_1_2741
* 334 Entretien n°6, CAUE
74
* 335 AGRESTE Primeur,
L'artificialisation atteint 9% du territoire en 2009, n°246,
juillet 2010, 4p.
GIS Alpes du Nord, Agriculture et urbanisation dans les Alpes
du Nord, sept.2004, 4p. Atelier dans le cadre du programme de
recherche-développement du GIS 2001/2006
* 336 L'artificialisation des
terres agricoles rassemble une très large littérature
(recherches, guides pratiques et articles d'actualité), sans doute la
production de connaissances et de données la plus importante
actuellement.
* 337 Entretien n°6, CAUE
74
* 338 Définition du
Petit Larousse illustré 2007
* 339 Anthropologique dans le
sens où il s'agit de « l'étude générale
de l'homme sous le rapport de sa nature individuelle ou de son existence
collective, sa relation physique ou spirituelle au monde, ses variations dans
l'espace et dans le temps », définition du CNRTL, op.
cit.
* 340 cf. Partie I
* 341 Au sens de
« qui dure longtemps, qui est de longue durée, qui
présente de la stabilité et de la constance dans le
temps », définition du CNRTL, op. cit.
* 342 A lire par
exemple : Les Ghettos du Gotha : Comment la bourgeoisie défend
ses espaces, Seuil, 2007, 294p.
* 343 Atout France,
Tourisme, urbanisme et aménagement sur le littoral et en montagne,
guide de savoir-faire, n°31, août 2009, 136p., p.39.
* 344 Idem
* 345 Clicanoo.com, Chaque
seconde, 24 m² de terres disparaissent, Clicanoo - le journal de
l'île de la Réunion, article publié le 20/06/10 [En ligne].
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disparaissent chaque jour, article publié le 21/07/10 [en ligne].
Consulté le 09/08/10.
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