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UNIVERSITÉ DE POITIERS FACULTÉ DE
DROIT ET DES SCIENCES SOCIALES
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MÉMOIRE DE MASTER II DROIT DE L'ACTIVITÉ AGRICOLE
ET DE L'ESPACE RURAL
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION DANS LES
PROCÉDURES COLLECTIVES AGRICOLES
MONSIEUR JÉRÉMY MAINGUY
DIRECTEUR DU MÉMOIRE
Monsieur Pascal RUBELLIN
Maître de conférences à la
faculté de droit et des sciences sociales de l'université de
Poitiers
Année universitaire 2009-2010
L'université de Poitiers n'entend donner aucune
approbation ni improbation aux opinions émises dans ce document ; ces
opinions doivent être considérées comme propres à
leurs auteurs.
Je dédie ce travail à mon défunt
grand-père qui m'a soutenu tout au long de mes études.
À Monsieur Pascal Rubellin qui a accepté
d'être mon directeur de mémoire À Monsieur Denis Rochard
pour ses précieux conseils
À Maître Nelly Leroux-Bostyn et sa
collaboratrice Valérie qui m'ont aidé tout au long de
l'élaboration de mon travail
À Monsieur Rémy Lérignier pour son aide
précieuse
SOMMAIRE
SOMMAIRE 5
LISTE DES ABRÉVIATIONS 7
PREMIÈRE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION
AU PREMIER TEMPS DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE
15
A. LE SORT DES DROIT DE PRÉEMPTION AU DÉBUT
DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE AGRICOLE 17
1. Rappel des règles déterminant
l'ouverture d'une procédure collective en matière agricole et de
leurs effets 17
2. Les effets du jugement d'ouverture sur les droits de
préemption dans le domaine agricole 23
B. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX DANS
LES PLANS DE SAUVEGARDE
ET DE LIQUIDATION JUDICIAIRE 34
SECONDE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION
RURAUX EN CAS DE DISPARITION TOTALE OU
PARTIELLE
DE L'EXPLOITATION AGRICOLE 37
A. LES PRINCIPAUX EFFETS DU JUGEMENT OUVRANT UNE
PROCÉDURE
DE LIQUIDATION JUDICIAIRE 38
1. La nomination d'un liquidateur judiciaire
39
2. Le dessaisissement du débiteur de ses pouvoirs
39
B. LE PLAN DE CESSION, UN OBSTACLE À L'EXERCICE
DES DROITS DE PRÉEMPTION
EN MATIÈRE AGRICOLE ? 40
1. Le plan de cession 40
2. Le sort des droits de préemption ruraux en cas
de plan de cession 42
3. Le sort du bail rural dans le plan de cession
44
C. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX EN CAS
DE CESSION DES ACTIFS
EN ORDRE DISPERSÉ 52
1. Les règles relatives à la
réalisation des actifs isolés 52
2. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption du preneur 53
3. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption de la SAFER 58
CONCLUSION 62
ANNEXES
EXEMPLE DE PLAN DE CESSION D'UNE EXPLOITATION AGRICOLE
66
BIBLIOGRAPHIE 79
TABLE DES MATIÈRES 83
LISTE DES ABRÉVIATIONS
Act. proc. coll. Actualités des procédures
collectives
AJ Actualités juridiques
act. jurispr. Actualité jurisprudentielle
al. Alinéa
Ann. Loyers Annales des loyers (les)
AN Assemblée nationale
Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation
(chambres civiles)
BICC Bulletin d'information des arrêts de la Cour de
cassation
CA Cour d'appel
Cass. Cour de cassation
ch. chambre
C. civ. Code civil
C. com. Code de commerce
C. rur. Code rural
coll. Collection
comm. Commentaire
concl. Conclusions
D. Dalloz (Recueil)
Dict. perm. Dictionnaire permanent (éditions
législatives)
DEA Diplôme d'études approfondies
DPU Droit à paiement unique
doc. Document
éd. Edition
EARL Entreprise agricole à responsabilité
limitée
Et. fonc. Etudes foncières
JOAN Q Journal officiel (Questions réponses)
Sénat
J.-Cl. Juris-Classeur (Encyclopédies)
JCP E Juris-Classeur périodique- édition
entreprise
JCP G Juris-Classeur périodique - édition
générale
JCP N Juris-Classeur périodique - édition notariale
et immobilière
LPA Les Petites Affiches
L. Loi
n° Numéro
obs. Observation
ord. Ordonnance
p. Page
RMI Revenu minimum d'insertion
RSA Revenu de solidarité active
RD
banc. et bourse Revue de droit bancaire et
bourse
RD rur. Revue de droit rural
Rev. proc. coll. Revue des procédures collectives
Rapp. Rapport
SAFER Société d'aménagement foncier et
d'établissement rural
SARL Société à responsabilité
limitée
SRU Solidarité et renouvellement urbain
soc. social
SAU surface agricole utile
TGI Tribunal de grande instance
T. com. Tribunal de commerce
V. Voir
INTRODUCTION
La loi n° 88-1102 du 30 décembre 1988 a
généralisé l'application du droit des procédures
collectives aux exploitation agricoles.
En effet, bien que certains agriculteurs étaient
déjà soumis aux procédures collectives (agriculteur ayant
la qualité de commerçant...), cette loi constitue un tournant.
Elle a pris en compte une situation existant depuis plusieurs
décennies un certain nombre d'exploitations agricoles sont
confrontées à une situation financière difficile :
- en 1992, 8 000 agriculteurs étaient
bénéficiaires du RMI ;
- de 1988 à 1991, 3 500 exploitations agricoles ont
cessées d'exister à cause de difficultés
financières 1 ;
- plus récemment le revenu des agriculteurs a
diminué de 34 % au cours de l'année 2009 et près de 75 000
agriculteurs seraient éligibles au RSA 2.
Cependant, cette loi a aussi créé un espace de
confrontation entre le droit des procédures collectives et le droit
rural.
Les procédures collectives ont pour effet d'assurer un
règlement collectif des créanciers en supprimant le droit des
créanciers d'exercer des poursuites individuelles.
Ce droit n'a jamais cessé d'évoluer afin de
permettre une meilleure survie des débiteurs en difficulté. Cette
priorité est inscrite dans l'article premier de la loi du 25 janvier
1985 qui fixe les objectifs des procédures collectives :
« La sauvegarde de l'entreprise, le maintient de
l'activité, de l'emploi et l'apurement du passif ».
La loi n° 2005-45 du 26 juillet 2005 a créé
la procédure de sauvegarde. Rompant avec les critères
traditionnel, cette procédure peut être ouverte sans que le
débiteur ne soit en état de cessation des paiements.
D'autres mécanismes se sont développés :
la procédure de conciliation prévue à l'article L. 611-4
du Code de commerce, crée par la loi du 25 janvier 2005 en
1 F. Colson, A. Blogowski, B. Dorin, « Les
exploitations agricoles en situation difficile », RD. rur.,
n° 220 février 1994, p. 49.
2 Le Monde, 2 mars 2010.
remplacement de la procédure de règlement
amiable. Elle peut être ouverte bien que le débiteur soit
déjà en état de cessation des paiements dans la limite de
45 jours.
Comme nous pouvons le constater, les différentes
réformes montrent que l'objectif des procédures collectives se
modifie. Le but n'est plus seulement d'assurer un règlement du passif
mais de faire le nécessaire pour empêcher la disparition de
l'entreprise.
La cause se trouvent principalement dans la lutte contre le
chômage, objectif prioritaire des gouvernements français depuis la
fin des Trente Glorieuses. La sauvegarder d'une entreprise permet
d'éviter une hausse du taux de chômage et ainsi éviter une
hausse des déficits publics.
L'application des procédures collectives aux
agriculteurs a les mêmes causes, le traitement des difficultés
d'une exploitation agricole par les procédures collectives est meilleure
que si elle était confrontée à de multiples mesures
d'exécutions individuelles (saisie conservatoire...) la
dépossédant de tout son actif sans lui avoir laissé une
chance de procéder à des réformes structurelles. Cependant
cela n'est pas sans poser certains problèmes. L'activité agricole
est une activité très encadrée par les pouvoirs publics,
il suffit d'ouvrir le Code rural et de constater le nombre de dispositions
d'ordre public dans le statut du fermage.
Le but de ces dispositions est de protéger
l'activité agricole de pratiques nuisibles à l'équilibre
économique des exploitations, citons comme exemple la prohibition de la
cession du bail rural, érigée par l'article L. 411-35 du Code
rural. Elle permet d'éviter une spéculation sur les baux ruraux.
Cependant ces règles d'ordre public ne risquentelles- pas de rentrer en
conflit avec les règles en matières de procédures
collectives ?
Cette question est centrale dans ce mémoire lequel
traite de la question du sort des droits de préemption dans les
procédures collectives agricoles.
On peut les définir comme l'avantage qui est
donné soit par la loi soit par une disposition contractuelle, de pouvoir
se substituer à l'acquéreur d'un droit ou d'un bien pour en faire
l'acquisition à sa place et dans les mêmes conditions que ce
dernier.
Nous étudierions les deux droits de préemption
légaux majeurs en droit agricole :
- le droit de préemption du preneur posé à
l'article L. 412-1 et suivants du Code rural ;
- le droit de préemption de la SAFER posé
à l'article L. 143-1 et suivants du Code rural.
Est soumis au droit de préemption du preneur en vertu
de l'article L. 412-1 et suivants du Code rural les opérations
d'aliénation à titre onéreux des biens loués en
vertu d'un bail rural consenties à des personnes qui ne sont pas
parentes ou alliées du bailleur jusqu'au 3° degré inclus,
que la cession soit de gré à gré ou par adjudication est
sans importance.
Peuvent donc être soumis à ce droit de
préemption les opérations de vente ou d'échange d'un bien
immobilier sur lequel a été consenti un bail rural. Cependant ce
droit est neutralisé si la contrepartie n'est pas en argent. Les baux
à nourriture, les apports en société ainsi que les
échanges sont donc exclus des opérations soumises au droit de
préemption.
Est soumis au droit de préemption de la SAFER en vertu
de l'article L. 143-1 du Code rural les opérations d'aliénation
à titre onéreux des biens immobiliers à usage agricole
ainsi que leurs biens mobiliers accessoires et des biens immobiliers à
usage d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole à des
personnes qui ne sont pas parentes ou alliées du propriétaire
jusqu'au 4° degré inclus.
Le caractère volontaire ou forcée de la cession
est indifférent. Il existe cependant des exceptions légales,
d'une part celles énumérées précédemment
pour le droit de préemption du preneur et d'autre part d'autres tenant
à la nature du bien. En effet, le droit de préemption de la SAFER
est neutralisé en cas de vente d'un bien ayant perdu sa vocation
agricole.
Rappelons qu'en vertu de l'article R. 143-7 du Code rural le
droit de préemption du preneur est prioritaire à celui de la
SAFER sauf si le preneur en place exploite le bien concerné depuis moins
de trois ans.
Il est possible que lors d'une procédure collective
ouverte à l'encontre d'une exploitation agricole, il soit question de
ces deux droits de préemption.
Tel peut être le cas d'un exploitant agricole
céréalier en état de cessation des paiement qui a
loué des prairies dont il est propriétaire par héritage
à un éleveur de bovins. Afin de permettre la rentrée
rapide de liquidités, l'administrateur judiciaire peut être
tenté de vendre ce bien au cours de la période d'observation
à un éleveur d'ovins qui ferait une offre intéressante.
La question est de savoir si les droits de préemption
ruraux sont neutralisés ou non. La question n'est pas anodine. Si les
droits de préemption ne sont pas neutralisés et que les droits de
préemption ne sont pas purgés par le notaire, alors la vente
commise en fraude de ces droits encourt
l'annulation3.
Afin de répondre à cette question, nous
étudierons le sort de des droits de préemption ruraux au cours
des différentes étapes de la procédure collective.
3 C. rur, art. L. 412-10 et R. 143-20.
PREMIÈRE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION AU PREMIER
TEMPS DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE
Le plan de ce mémoire suit les différentes
étapes de la procédure collective.
Ce choix est justifié par le fait que le droit des
procédures collectives modifie les droits et devoirs des
différents acteurs au cours des différentes procédures.
En effet le débiteur, soumis à une
procédure collective, verra ses droits restreints au début de la
procédure au profit de l'administrateur judiciaire et il en sera
totalement dessaisi au moment de la liquidation judiciaire.
Cette partie sera composée de deux temps, dans un
premier temps nous rappellerons les règles relatives à
l'ouverture dans une procédure collective car l'interaction entre le
droit de préemption et le droits des procédures collectives
commence à cet instant, ensuite nous essayerons de déterminer les
effets de l'ouverture d'une procédure collective sur les droits de
préemption en matière agricole.
A. LE SORT DES DROIT DE PRÉEMPTION AU
DÉBUT DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE AGRICOLE
Le jugement d'ouverture marque le début de la
procédure collective, le tribunal constate que l'entreprise
connaît des difficultés de nature à amener à une
cessation de l'activité.
Ce jugement a un effet constitutif, il impose une nouvelle
organisation et de nouvelles règles à l'entreprise contre
laquelle une procédure a été ouverte.
1. Rappel des règles déterminant l'ouverture
d'une procédure collective en matière agricole et de leurs
effets
Le sujet traité se situe temporellement entre le
jugement d'ouverture de la procédure et la clôture, de ce fait il
est important de revoir les règles qui commandent l'ouverture d'une
procédure et leurs conséquences.
a. L'état de l'entreprise agricole : la notion de
difficultés avérées ou prévisibles de cessation des
paiements
L'ouverture d'une procédure collective est
subordonnée à l'état financier de l'entreprise. Par
l'état financier nous entendons le rapport entre l'actif et le passif de
l'entreprise.
On utilise le terme « procédures collectives
», ce pluriel signifie qu'il existe plusieurs procédures
collectives différentes dont le choix est principalement lié
à l'état financier de l'entreprise.
Les exploitants agricoles sont soumis aux mêmes
procédures que les entreprises commerciales, à l'exception d'une
particularité : la procédure de conciliation ne peut être
utilisée. Une autre procédure amiable est prévue en
matière agricole : le règlement amiable. Il existe une
spécificité relative à cette procédure.
En effet, l'article L. 351-1 du Code rural interdit l'ouverture
d'une procédure en redressement ou de liquidation judiciaire à
l'encontre d'un exploitant agricole suite à la
saisine du tribunal par un créancier avant l'ouverture
d'une procédure de règlement amiable.
Cette condition s'applique pour toutes les entreprises
agricoles à l'exception des entreprises agricoles exploitantes sous
forme de sociétés commerciales (SARL...).
La procédure collective qui intervient le plus en amont
est la procédure de sauvegarde. Celle-ci a été
instituée par la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 et
codifiée aux articles L. 620-1 et suivants du Code de commerce.
Elle est ouverte à deux conditions :
- seul le débiteur peut en demander l'ouverture ;
- l'exploitant doit faire face à des difficultés
avérées ou prévisibles.
Cette procédure a donc un caractère volontaire,
au contraire de la procédure de redressement et de liquidation
judiciaire où le débiteur en état de cessation des
paiements est obligé de demander l'ouverture en vertu de l'article L.
631-4 Code de commerce sous peine de sanctions.
Les conditions de fond relatives à l'ouverture de cette
procédure ont pour but d'intervenir le plus tôt possible dans la
prise en charge des difficultés.
En effet, la notion « des difficultés
avérées ou prévisibles » se caractérise
par sa souplesse, en effet elle permet d'intervenir sur des difficultés
à un stade où elles n'ont pas encore causé des dommages
irrémédiables.
Elle appelle une appréciation in concreto de la
situation du débiteur par les juges.
En matière agricole, cette notion permet notamment
à un exploitant agricole de demander l'ouverture une procédure
dès qu'un événement va grever son résultat, par
exemple la diminution des cours des matières premières ou une
épidémie qui frappe le bétail. La procédure doit
amener à l'élaboration d'un plan de sauvegarde à l'issue
d'une période d'observation permettant de pérenniser
l'entreprise.
La procédure de redressement judiciaire intervient plus
en aval. Elle doit être ouverte en principe dès que l'entreprise
est en état de cessation des paiements en vertu de l'article L. 631-1 du
Code de commerce.
Cette notion appelle une appréciation in abstracto
de la part des juges contrairement à la notion « de
difficultés avérées ou prévisibles ».
Elle signifie que l'entreprise ne peut faire face à son passif
exigible avec son actif disponible. C'est une situation comptable.
Par passif exigible on entend l'ensemble des dettes certaines,
liquides et exigibles. Il est à noter que l'on entend par dette exigible
une dette non seulement dont le terme est expiré mais aussi une dette
sur laquelle les créanciers n'ont consenti aucun moratoire ou
crédit.
Cette notion a été jugée insuffisante, la
connaissance de l'état de cessation des paiements était souvent
trop tardive et obligeait à ouvrir une procédure de liquidation
judiciaire 4. Cette critique a conduit a
créé la procédure de sauvegarde.
En matière agricole, la dette d'un exploitant agricole
envers un fournisseur par exemple de matériels dont le terme est
expiré est une dette exigible, sauf si ce fournisseur consent une
réserve de crédit ou un moratoire 5.
L'actif disponible désigne l'ensemble des ressources
financières disponibles immédiatement ou par conversion
immédiate, ce qui en terme comptable correspond en grande partie
à l'actif circulant dans le bilan : solde créditeur du compte
bancaire, stocks de marchandises en cours d'être vendu et argent en
caisse.
Il y a un certain nombre de règles relatives à
la fixation de la date d'état de cessation des paiements.
La date de cessation des paiements est appréciée
au jour où la juridiction statue 6. La seule
constatation qu'un exploitant agricole soit débiteur de dettes qu'il
refuse de payer ne permet à un créancier d'obtenir l'ouverture
d'une procédure collective à son encontre, ce dernier doit
établir l'incapacité du débiteur à payer sa dette
avec son actif disponible.
La procédure de redressement suit le même
cheminement que la procédure de sauvegarde (cette dernière
reprend presque toutes les règles de la procédure de sauvegarde
mais elle permet d'intervenir plus tôt). Cette procédure doit
permettre à l'issue d'une période d'observation l'adoption d'un
plan de redressement judiciaire
4 C. Saint-Alary-Houin, « L'ouverture de la
procédure de sauvegarde », Rev. proc. coll. Avril-mai-
juin 2008, p. 85.
5
C. com. art. L. 631-1, al. 1.
6
Cass. com. 7 novembre 1989 : Bull. civ.
IV, n° 273.
permettant d'assurer la pérennité de
l'entreprise par un travail de concertation entre l'administrateur judiciaire,
le débiteur et les créanciers.
Enfin la dernière procédure pouvant faire
l'objet d'un jugement d'ouverture est la procédure de liquidation
judiciaire codifiée aux articles L. 640-1 et suivants du Code de
commerce.
Cette procédure est ouverte dès lors que le
débiteur est en état de cessation des paiements et que le
redressement est impossible, la liquidation est prononcée lorsque la
situation du débiteur est irrémédiablement compromise,
c'est à dire lorsque la situation du débiteur n'est plus viable
et n'a plus de chance d'être redressée 7.
Le but de cette procédure est de tenter d'apurer le
passif avec le produit de la réalisation d'actif. Elle peut se faire
sous deux modalités depuis la loi du 26 juillet 2005 : une liquidation
pure et simple ou un plan de cession, cette dernière solution permet de
céder une partie ou la totalité de l'activité permettant
d'apurer le passif tout en contribuant au maintien de l'activité.
Si l'état financier de l'entreprise continue de se
dégrader au cours de la procédure (le débiteur est en
état de cessation de paiement au cours de la procédure de
sauvegarde), les magistrats sont tenus de modifier la procédure par un
jugement de conversion 8.
b. L'entreprise agricole dans les procédures
collectives, rappel des principales règles gouvernant la
procédure
Nous avons déterminé les règles relatives
à l'ouverture d'une procédure collective, il est maintenant
nécessaire de rappeler certaines règles conductrices des
procédures collectives en matière agricole.
« Les entreprises agricoles sont placées sous
le droit commun des procédures collectives mais
bénéficient également de règles spécifiques
» 9. Un exemple de ces
spécificités est le tribunal compétent en matière
de procédures collectives agricoles :
7 Sur la distinction des notions de cessation
des paiements et de situation irrémédiablement
compromise,
V. Cass. com. 31 mars 2004 : D.
2004, AJ 1231.
8
Cass. com., 20 octobre 2009 : RD rur.
février 2010 n°381, comm. 15, C. Lebel.
9 Dict. perm. Entreprises agricoles.
décembre 2009 : Exploitations agricoles en difficultés :
feuilles
585.
c'est le tribunal de grande instance dans le ressort duquel se
trouve le siège de l'exploitation 10.
Nous allons traiter d'autres spécificités : les
droits de préemption et le bail rural.
Il n'y a a pas de différences sur la question des
personnes clés de la procédure qui sont :
- du juge-commissaire : il est chargé de veiller au
déroulement rapide de la procédure et à la protection des
intérêts en présence (
C. com, art. L. 621-9) ;
- de l'administrateur judiciaire : sa nomination est
obligatoire dès lors que l'entreprise compte plus de 3 millions d'euros
et compte plus de 20 salariés (ce qui est très rare dans le cas
des entreprises agricoles), sa fonction est d'assister le débiteur dans
l'exercice de ses droits sur son patrimoine au cours de la procédure
collective ;
- du ministère public qui possède de nombreuses
prérogatives : surveillance du mandataire de justice... ;
- du mandataire judiciaire , c'est le représentant des
créanciers, il a un certain nombre de prérogatives notamment en
matière de vérification de créances (
C. com, art.
L. 622-24), en matière de maintien des contrats en cours
en cas d'absence de nomination d'un administrateur judiciaire (
C. com, art. L. 626-2).
Il est à noter qu'en cas de liquidation judiciaire, le
mandataire judiciaire exerce en principe les fonctions de liquidateur
judiciaire , dont le but est d'opérer une épuration du passif du
débiteur en réalisant son actif.
c. Les effets de l'ouverture d'une procédure
collective
C'est la clé de ce sujet, si la procédure
collective ne produisait aucun effet les règles prescrits dans le Code
rural s'appliquerait normalement. Cependant l'ouverture d'une procédure
collective entraine la création d'une période où un
certain nombre de règles sont suspendues pour permettre la survie du
débiteur.
On peut faire un parallèle avec la notion «
d'état d'exception » crée par Carl Schmitt
11. Cette notion est invoquée afin de
permettre à un État de déroger à certaines
10 C. rur., art. L. 351-2.
11 Carl Schmitt, Théologie politique,
Gallimard, 1988.
règles dans le but de survivre, de la même
manière les procédures collectives dérogent au droit
commun pour permettre la survie des entreprises contre lesquelles une
procédure a été ouverte.
L'ouverture d'une procédure collective a un certain
nombre d'effets sur le débiteur, mais il y a trois effets majeurs.
Le premier effet est la suspension des poursuites. C'est l'une
des dispositions majeures du droit des procédures collectives
12. Son effet est d'interrompre certaines actions
en justice entamées avant l'ouverture de la procédure collective
et interdit le fait d'en intenter de nouvelles. Sont visées les actions
tendant au paiement d'une somme d'argent et les actions tendant à la
résolution d'un contrat pour défaut de paiement du prix. Sont
aussi visées les procédures d'exécution notamment la
saisie-attribution.
Cet effet est important dans le cadre de notre sujet, en effet
la suspension des actions tendant à la résolution du contrat
permet d'interrompre l'action en résiliation du bail rural pour
défaut de paiement du fermage 13. Le fermage
est le contrat conférant au preneur un droit de préemption sur le
fonds loué.
Le deuxième effet est l'arrêt du cours des
intérêts des prêts contractés par le débiteur
14. Cela concerne toutes les créances,
à l'exception des intérêts des contrats de prêt
conclus pour une durée égale ou supérieure à un an.
Cet effet a peu d'intérêt dans le cadre de notre sujet.
Enfin le dernier est l'arrêt du cours des inscriptions
notamment les sûretés réelles 15 au jour
du jugement d'ouverture. Le but étant de fixer la consistance du
patrimoine de l'entreprise débitrice et d'en favoriser le redressement
en évaluant exactement sa situation financière.
Nous allons rentrer maintenant plus dans le sujet en
étudiant les effets du jugement d'ouverture sur les droits de
préemption. En effet, comme nous l'avons dit, le jugement d'ouverture
produit des effets faisant rentrer l'entreprise dans un « état
d'exception », il sera bon d'étudier ses premiers effets sur les
droits de préemption.
12
C. com., art. L. 622-21.
13 C. rur., art. L. 411-31.
14
C. com., art. L. 622-28.
15
C. com., art. L. 622-30.
2. Les effets du jugement d'ouverture sur les droits de
préemption dans le domaine agricole
A l'exception de la procédure de sauvegarde,
l'état de cessation des paiements est le critère de l'ouverture
d'une procédure collective. Il est impossible en pratique que la date de
cessation des paiements soit à la date du jugement d'ouverture.
Il existe un décalage entre le moment où le
débiteur prend conscience de sa situation financière et le
délai nécessaire au tribunal pour prendre sa décision.
a. Le sort des droits de préemption ruraux pendant
la période suspecte
Par principe, la cessation des paiements est au jour du
jugement d'ouverture de la procédure collective. Cependant le tribunal
peut par jugement reporter cette date jusqu'à 18 mois avant la date du
jugement d'ouverture, ceci n'est fait que par la demande de certains acteurs
tel l'administrateur judiciaire.
Ce jugement crée une période suspecte. La
période suspecte est la période entre le jour de l'état de
cessation des paiements et le jour du jugement d'ouverture de la
procédure collective. La période suspecte présente un
intérêt : certains actes conclus par le débiteur soumis
à une procédure collective vont pouvoir être annulés
par le tribunal. Ce sont les nullités de la période suspecte
mentionnées aux articles L. 632-1 et suivants du Code de commerce.
La question de la motivation d'une période s'explique
par le comportement de certains débiteurs, certains en effet
s'appauvrissent volontairement afin d'organiser leur insolvabilité avec
la complicité d'un tiers, d'autres tentent
désespérément d'éviter l'état de cessation
des paiements par la vente de leur capital ceux qui désavantagent
certains créanciers. De tels comportement existent bien
évidemment en matière agricole, citons l'arrêt de la cour
d'appel de Bourges du 7 décembre 2006 16 qui
déclare un agriculteur en état de cessation de paiement du fait
qu'il envisage de vendre une partie des 300 hectares qu'il exploite afin de
régler l'ensemble de ses dettes qui se chiffrent à environ 300
000 €.
La question dans le cadre de notre sujet est de savoir si les
actes effectués dans le cadre de l'exercice des droits de
préemption en matière agricole sont touchés.
16 CA Bourges, ch. civ., 7 décembre 2006
: Rev. proc. coll. septembre 2007 n° 3, p. 163.
Les actes commis dans le cadre de l'exercice des droits de
préemption ont déjà été
énumérés 17. Ce sont des actes
de cession à titre onéreux de biens immobiliers à vocation
agricole.
Il existe trois types de nullités dans le cadre de la
période suspecte :
- Les nullités de droit, ici sont visés les
actes d'appauvrissement tels les actes translatifs à titre gratuit, les
actes translatifs à titre onéreux lésionnaires, les actes
portant atteintes à l'égalité des créanciers comme
le paiement de dettes non échues par le débiteur et le paiement
par des moyens anormaux ou le fait pour le débiteur de consentir des
sûretés afin de garantir des dettes antérieures au
début de la période suspecte. Ces actes sont annulés sur
simple demande des organes de la procédure cités notamment
à l'article L. 632-4 du Code de commerce.
- Les nullités facultatives, ici sont visés, les
actes à titre gratuit accomplis dans les 6 mois précédent
la date de cessation des paiements ainsi que les actes à titre
onéreux et les paiements intervenus en période suspecte mais non
visés par les nullités de droit, lorsque les cocontractants
savaient que le débiteur était en état de cessation des
paiements. Comme dans les nullités de droit ce sont les mêmes
organes qui demandent l'annulation, à la différence que le juge
dispose ici d'une marge d'appréciation et que les demandeurs sont tenus
d'apporter la preuve par tous moyens de la connaissance par les cocontractants
de l'état de cessation des paiements du débiteur.
- Les nullités interdites, ce sont des actes qui ne
peuvent en aucun cas être annulés bien que réalisés
pendant la période suspecte : les paiements au moyen d'un effet de
commerce.
L'examen nous amène à la conclusion que la
période suspecte peut avoir un impact sur les actes commis dans le cadre
de l'exercice d'un droit de préemption.
En effet, la vente de fonds ruraux sur lesquels les droits de
préemptions ont été exercés peuvent être
annulées si :
- le prix du bien vendu lors de l'exercice du droit de
préemption est lésionnaire, l'article 1674 du Code civil
considère qu'une vente d'immeuble est lésionnaire si le
17 V. introduction.
vendeur reçoit moins de cinq douzième de la
valeur normale de l'immeuble, dans ce cas il est possible de demander la
nullité du contrat car cela rentre dans les nullités de droit
;
- la vente s'est faite pendant la période suspecte et le
cocontractant était au courant que le débiteur était en
état de cessation des paiements au moment de l'acte.
Illustrons ces deux hypothèses par deux exemples :
- un agriculteur souhaite organiser son insolvabilité
en vendant des parcelles à un tiers à vil prix, cependant ce
dernier mal informé des droits de la SAFER voit son bien
préempté, il ne fait aucun recours ;
- un céréalier, en difficulté
financière, vend une parcelle de prairies herbagères qu'il loue
actuellement à un éleveur à un tiers, le preneur
préempte en connaissant l'état financier de son bailleur.
Il est à noter que ce dernier cas est assez rare dans
les faits. Les juges du fond sont très exigeants : une illustration est
faite par l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 20
décembre 2007 18 où la demande en
nullité de paiements litigieux a été rejeté alors
que le créancier en cause étant le banquier du
débiteur.
Quelles seraient les conséquences de l'annulation de la
vente du bien préempté ?
L'effet de la nullité d'un contrat est bien connu, elle
tient dans un adage « quod nullum est, nullum producit effectum »
: ce qui est nul ne produit aucun effet. La nullité oblige à
remettre les parties dans la situation où ils se trouvaient:au jour de
la vente.
Cela passe par un retour du bien objet de la préemption
dans le patrimoine du vendeur et le retour de la contrepartie dans le
patrimoine de l'acheteur.
Cependant la nullité se produit lors d'une
procédure collective, à un moment où le débiteur
est sous contrôle par les acteurs de la procédure, notamment au
niveau de la contenance de son patrimoine. Une des restrictions à sa
liberté est l'interdiction de payer tout fait générateur
de créance antérieur au jour du jugement d'ouverture de la
procédure 19.
Il est donc important de déterminer la date de naissance
de cette créance.
18 CA Paris, 20 décembre 2007 : Rev.
proc. coll. Octobre-novembre-décembre 2008 n° 4, comm. 158,
G.B.
19
C. com., art. L. 622-7.
La logique voudrait que l'on considère que la
créance soit née au jour du jugement prononçant la
nullité de la vente.
La créance de restitution née d'un jugement est
effet un fait juridique, c'est à dire un événement
quelconque auxquels une règle de droit attache des effets juridiques qui
n'ont pas été spécialement et directement voulus par les
intéressés 20. L'imprévision
amène logiquement à penser que la créance ne peut
être née qu'au jour où un acte a entaché un fait
d'effets de droit, en l'espèce le jugement a entaché le contrat
de vente d'une nullité, les parties ne pouvaient en principe nullement
prévoir cela où jour de la conclusion du contrat.
Dans le cadre des procédures collectives, la
jurisprudence a reconnu que la créance de restitution, née de
l'annulation d'un contrat passée au jugement d'ouverture, est une
créance postérieure si l'annulation intervient après le
jugement d'ouverture 21.
Cependant la jurisprudence adopte une position contraire dans
le cas de la nullité des contrats de vente conclus en période
suspecte : l'annulation d'un contrat de vente oblige l'acheteur à
déclarer au passif le montant du prix de vente qui doit lui être
remboursé selon la procédure décrite à l'article L.
622-24, alinéa 1 du Code de commerce 22. Or
les créanciers soumis à cette obligation ne peuvent pas recevoir
de paiements tout au long la procédure au contraire des
créanciers dont le fait générateur est postérieur
au jugement d'ouverture.
La question du fondement de cette position est encore
imprécise, des auteurs justifient cela par la volonté des juges
de sanctionner les cocontractants 23, d'autres
pensent que cette position n'est motivée que par la volonté des
juges de sauver l'entreprise en facilitant au maximum les rentrées
d'actif dans le patrimoine du débiteur, il est vrai que l'annulation
d'une vente conclue en vertu du droit de préemption du preneur permet de
récupérer des biens immobiliers agricoles sans avoir à
restituer jusqu'à la clôture de la procédure.
20 F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette,
Droit civil : Les obligations, 9° édition, Dalloz coll.
Précis Dalloz,
2007, p. 6.
21
Cass. com. 19 décembre 2006 :
JCP E 14 avril 2007, p. 23, obs. M. Cabrillac, Ph. Pétel.
22
Cass. com., 28 janvier 2004 : Rev.
proc. coll. n° 4 décembre 2004, p. 389, obs. G. Blanc.
23 P.M Le Corre, Droit et pratique des
procédures collectives, 5° éd., Dalloz, coll. Dalloz
action , 2008-2009, p. 1568.
La situation du preneur qui aurait préempté
serait catastrophique : il perd la propriété d'un bien sans
récupérer la somme versée.
De plus, le bien peut tout à fait être revendu au
cours de la procédure collective. Pire dans l'hypothèse d'une
liquidation judiciaire, le preneur serait un créancier antérieur
chirographaire 24, ce rang est très
défavorable pour le créancier lors de la répartition des
fonds obtenues par la réalisation de l'actif du débiteur.
Seul lueur d'espoir, la nullité par son effet
rétroactif remet les cocontractants dans l'état où ils
étaient avant l'acte. Le preneur reste donc titulaire du bail rural.
La dernière interrogation porte sur les
conséquences en cas de cession du bien immobilier agricole
préempté avant la déclaration de nullité faite par
le tribunal.
La revente du bien est interdite par le preneur pendant neuf
ans 25 mais tout à fait possible par la
SAFER qui d'ailleurs doit rétrocéder le bien
préempté dans les cinq ans 26. Les
acquéreurs postérieurs devront-ils restituer le bien immobilier
préempté ?
L'effet de la nullité de cette vente faite en
période suspecte est très défavorable pour l'acheteur qui
est confronté à de multiples difficultés. Étendre
les effets de la nullité mettra d'autres créanciers face aux
problèmes des créances impayées et les exposera à
des ouvertures de procédures collectives à leur encontre.
Bien que conscient de ce problème, la jurisprudence a
limité l'annulation de cession subséquente faite par
l'acquéreur aux cessions à titre gratuit
27. La solution est juste et contient l'extension
des difficultés.
24
C. com, art. L. 641-13 et suivants.
25 C. rur, art L. 412-12.
26 C. rur, art L. 142-4.
27
Cass. com. 30 juin 2004 : Bull. civ.
IV n° 137; Act. proc. coll. 2004/15, n° 191, note J.
Vallansan.
b. Le sort des droits de préemption ruraux pendant
la période d'observation
La période d'observation est un moment important de la
procédure. Pendant cette période d'une durée maximum de 18
mois, le sort du débiteur va être décidé.
Vulgairement cette période est comparable dans la vie humaine au moment
où le médecin vous fait des examens pour déterminer votre
maladie. A l'issue on saura si on peut vous guérir ou... vous
préparez à votre enterrement.
Pendant cette période, l'entreprise va être
soumise à un régime spécial reposant, d'une part un
régime spécial pour les contrats en cours afin que
l'activité de l'entreprise perdure, et d'autre part sur la
préparation d'un plan de sauvegarde ou de redressement pour permettre
.
Dans le cadre de ce mémoire nous nous interrogerons sur
les conséquences de la période d'observation sur les droits de
préemption par une succession de questions.
Première question : un preneur soumis à une
procédure collective et qui ne paye pas son loyer peut-il exercer son
droit de préemption au cours de la période d'observation ?
La réponse se fera en plusieurs étapes. Il faut
déjà déterminer si le bail a été
résilié. Comme l'exige l'article L. 411-31 alinéa 2 du
Code rural, la résiliation pour défaut de paiement du fermage
n'est que possible que si :
- deux défauts de paiement du fermage ont
été constatés et ont perduré après deux
mises en demeure séparées de trois mois pour régulariser
la situation ;
- une résiliation judiciaire prononcée par le
Tribunal paritaire des baux ruraux .
La jurisprudence est très claire : si la
décision n'a pas été passée en force de chose
jugée au jour du jugement d'ouverture l'action en résolution
subit l'arrêt des poursuites 28. Le preneur
conserve donc son droit au bail et tous les accessoires à celuici.
Il peut exercer son droit de préemption à deux
conditions :
28 CA Bordeaux ch. soc., 26 septembre 2006 :
Rev. proc. coll. septembre 2007 n° 3, p. 163.
- l'administrateur ou à défaut par le
débiteur sous le contrôle du mandataire judiciaire doit respecter
les règles posées aux articles L. 622-13 et suivants du Code de
commerce relatives à la continuation des contrats en cours sous peine de
résiliation du bail rural ;
- le preneur doit s'assurer que les restrictions de pouvoir
décidées par le jugement d'ouverture ne lui ont pas enlevé
la faculté d'effectuer des actes de disposition. L'article L. 622-3 du
Code de commerce précise que :
« Le débiteur continue à exercer sur
son patrimoine les actes de disposition et d'administration, ainsi que les
droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission de l'administrateur
».
L'exercice du droit de préemption par un preneur soumis
à une procédure collective reste hypothétique. En effet il
est peu probable qu'un preneur soumis à une procédure collective
ait les moyens d'acheter des terres dont le coût ne cesse d'augmenter
pour atteindre aujourd'hui une moyenne de 5 000 euros par hectare
29.
Il existe certaines exceptions cependant. L'acquisition de
parcelles essentielles pour l'exploitation comme les parcelles où se
trouvent les points de captage pour l'irrigation des terres est
nécessaire..
Ce point résolu, il reste à déterminer si
les droits préemption ruraux sont neutralisés pendant la
période d'observation.
Deuxième question : quel est le sort des deux droits de
préemption en cas de vente du bien au cours de la période
d'observation ?
Nous avons démontré qu'il est possible pour un
preneur de conserver son bail malgré l'ouverture d'une procédure
collective.
Les droits de préemption sont-ils neutralisés
par le jugement d'ouverture ? La question n'est pas une pure invention, nous
avons vu que l'ouverture d'une procédure collective neutralise certaines
dispositions du Code rural comme les dispositions relatives à la
résiliation du fermage pour faute.
Il n'existe aucun texte ni aucune jurisprudence en la
matière cependant il est possible d'émettre une
hypothèse.
29 Le Monde, 29 mai 2010, p. 13
L'article L. 412-4 du Code rural dispose :
« Le droit de préemption (du preneur) s'exerce
nonobstant toutes clauses contraires. »
L'article énonce apparemment que, sauf indication expresse
du législateur, le droit de préemption s'exerce quelle que soit
la situation.
Une réponse ministérielle
30 corrobore ce raisonnement.
De plus l'esprit de la règle a son importance, les
droits de préemption ne sont pas en opposition avec l'objectif de
sauvegarder l'activité et de permettre le paiement des
créanciers.
Il est fort probable que les droits de préemption ne
sont pas neutralisés cependant il serait intéressant de
déterminer si les actions en révision du prix prévue par
le Code rural 31 l'est également.
La durée moyenne de ces actions peut présenter
un risque pour une unité ayant besoin d'actifs pour survivre. Ces
contentieux limitent les chances de survie des exploitations agricoles.
Il est seulement posé que ces actions sont
neutralisées en cas d'adjudication 32. L'adjudication
d'un bien peut tout à fait être volontaire, c'est à dire
décidée par le propriétaire si le tribunal ne lui a pas
retiré ce pouvoir.
Aucune disposition ne réglemente la cession de
gré à gré. Il est donc fort probable que l'action ne soit
pas neutralisée. La vente se faisant dans un cadre normal sans
règles dérogatoires au droit commun.
Troisième question : la vente d'un bien dont le bail rural
a été résilié au cours de la période
d'observation est-elle constitutive d'une fraude au droit du preneur ?
Nous avons parlé antérieurement de la notion de
« contrats en cours », ce sont des contrats qui ne sont pas
résiliées au jour du jugement d'ouverture et qui n'ont pas
été entièrement exécutés.
30 Rép. Min. n° 11270 : JOAN
Q, 11 juillet 1994, p. 3567
31 C. rur., art. L. 412-7 et L. 143-10.
32 C; rur., art. L. 412-11.
Rentrent dans cette catégorie : les contrats à
exécution successive, c'est à dire ceux qui ne sont pas
arrivés à leur terme au jour du jugement d'ouverture et qui ne
sont pas résolus avant le jugement d'ouverture et les contrats à
exécution instantanée dont la prestation caractéristique
et principale n'a pas encore été fournie.
Afin de sauvegarder l'entreprise, il a été
instituée un droit d'option sur ces contrats, notamment « la
faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours » (
C. com, art. L. 622- 13-II, al. 1) ou de
résilier soit de plein droit par l'administrateur après sa mise
en demeure par le cocontractant (
C. com, art. L. 622-13-III-1) soit par le
juge-commissaire sur demande de l'administrateur (
C. com, art L. 622-13-IV). Les deux
dernières options permettent la résiliation, qui dit
résiliation dit dans le cas d'un bail rural perte du droit de
préemption.
Il est à noter que la nomination d'un administrateur
judiciaire si le seuil n'est pas atteint dépend du libre choix des
juges. Un examen des jugements prononçant l'ouverture des
procédures collectives fait apparaître que chaque tribunal a une
position sur ce sujet.
Par exemple le tribunal de grande instance d'Évreux ne
nomme un administrateur que si le seuil obligatoire est atteint, alors que la
nomination est systématique dans le cas du tribunal de grande instance
de Chartres.
En l'absence d'administrateur, le choix appartient au
débiteur avec avis favorable du mandataire judiciaire
33.
La question est donc de savoir si l'exercice de l'option ne
permettrait pas au débiteur de réaliser une fraude au droit de
préemption du preneur.
Un cas concret : un agriculteur céréalier a
reçu des prairies herbagères en héritage et les a
loué. Cependant au fil du temps une intimité entre les
cocontractants est apparue et le bailleur souhaite faire partir son preneur par
tous les moyens. De plus une procédure collective a été
ouverte à son encontre, il souhaite donc céder des biens qui ne
sont pas essentiels à son exploitation.
Maître Nelly Leroux-Bostyn, avocate au barreau
d'Évreux et spécialisée en droit rural depuis une dizaine
d'années, nous a en effet expliqué que l'échec des
procédures de
33 A. Jacquemont, Droit des entreprises en
difficulté, Litec, 6° édition, 2009, p. 213.
conciliation devant le tribunal paritaire des baux ruraux (sur
l'ensemble de ses dossiers deux conciliations ont réussi en 10 ans)
avaient pour origine des conflits purement d'ordre privé.
Nombre de conflits devant le tribunal paritaire des baux
ruraux peuvent très bien avoir un arrangement, le problème vient
d'éléments annexes à l'activité agricole :
mésententes, volonté de récupérer les terres afin
d'en confier l'exploitation à un membre de la famille.
Il peut donc exister un intérêt personnel et un
intérêt financier à résilier le bail.
En effet, les différentes protections dont jouit le
fermier et l'encadrement administratif du montant du fermage ont pour
conséquence de réduite la valeur d'une terre cédée
à bail.
Monsieur Thierry Nansot 34 met en
avant le rôle du droit de préemption du preneur et de l'action en
révision du prix du fermier dans la moins-value du fonds
cédé.
La jurisprudence précise que le tribunal statuant sur
l'action en fixation de la valeur vénale du fonds doit tenir compte de
la moins-value résultant de l'existence du bail rural
35.
L'intérêt de pouvoir résilier le bail et
ainsi de mettre fin au droit de préemption n'est pas vain.
Il existe trois mécanismes permettant de résilier
un contrat en cours :
- le cocontractant (dans notre exemple le preneur) met le
débiteur en demeure de prendre position sur le sort du contrat. En cas
de réponse expresse de refus ou d'absence de réponse du
débiteur, le contrat est résilié de plein droit sur le
fondement de l'article
L. 622-13, III du Code de commerce ;
- l'administrateur ou le débiteur peut renoncer
à la poursuite du contrat sans mise en demeure préalable, dans ce
cas le contrat est suspendu et le cocontractant devra faire prononcer en
justice la résiliation 36;
34 T. Nansot, « Le prix d'un terrain
agricole sous bail rural » , Et. fonc., n° 92,
Juillet-août 2001, p. 13.
35 Cass. civ. 3°, 7 novembre 1990 :
Bull. civ. III, n° 220 ; JCP G 1991. II. 21 665, note
Ourliac.
36
Cass. com 19 mai 2004 : JCP E
2004., n° 37, p. 1388, obs. Ph. Pétel.
- une troisième option a été ouverte par
l'ordonnance du 18 décembre 2008 à l'article L. 622-13, IV du
Code de commerce.
Le preneur qui ne souhaite pas perdre son droit de
préemption ne va mettre en demeure les organes de la
procédure.
La deuxième option ne semble pas présenter de
risques. En effet, bien que le contrat soit en quelque sorte « suspendu
», le preneur conserve son droit d'exploiter les terres en fermage et le
bénéfice du droit de préemption.
Le bailleur ne peut le priver de ses droits que par une
résiliation du bail.
Seule la troisième option présente un risque.
Son caractère récent empêche d'avoir des informations sur
la conception retenue par les juges commissaires sur la notion d'atteintes
excessives.
Cependant en matière agricole cette notion a plusieurs
sens :
- une atteinte économique, notamment une reprise de
parcelles nécessaires à la survie économique de la
structure ;
- une atteinte juridique, car d'une part la perte des
parcelles louées pourrait entrainer une diminution de la taille de
l'exploitation en dessous du seuil fixé par le schéma directeur
départemental du contrôle des structures, ce qui en principe la
subordonne à une autorisation préfectorale et d'autre part la
reprise des parcelles a pour effet de mettre fin au droit de
préemption.
La doctrine 37 estime qu'il n'y
aura pas de dérives dans l'utilisation de cette option, cependant les
procédures collectives agricoles présentent des risques d'abus
que Monsieur Philippe Roussel Galle ne présente pas :
- il y a le risque d'une mauvaise appréciation par le
juge commissaire d'une atteinte excessive est réel en raison de la
méconnaissance par une majorité de magistrats de la
matière agricole ;
- l'auteur de l'article cité prend pour exemple les
baux commerciaux où il est vrai que priver un commerçant de son
bail est excessif. Mais en matière de droit rural le
37 Ph. Roussel Galle.« Les nouveaux
régimes des contrats en cours et du bail », Rev. proc. coll.
n° 1 janvier 2009, p. 85.
problème est différent. Les exploitants ont
souvent 3 à 5 bailleurs 38 et une
multiplicité de baux portant sur diverses parcelles. De ce fait les
preneurs ont plus de difficultés à prouver le caractère
excessif de l'atteinte.
La question qui se pose ici est de connaître les
éventuels recours du cocontractant lésé.
L'article L. 622-13 IV du Code de commerce nous précise
que c'est le juge- commissaire qui prononce la résiliation. Le juge
statue par ordonnance.
Celles-ci sont notifiées aux personnes et aux parties dont
les droits et obligations sont affectés et elles sont exécutoires
de plein droit à titre provisoire 39.
Le Code de commerce prévoit que ces ordonnances peuvent
faire l'objet d'un recours dans les dix jours de la notification, par
déclaration faite contre récépissé ou
adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de
réception au greffe 40.
Il conviendra dans une telle situation pour le preneur
lésé de démontrer lésé de démontrer
la portée de la résiliation (perte de produits d'exploitations
par l'impossibilité d'activer des DPU, difficultés pour continuer
l'exploitation...) et la réalité des motivations à la
réalisation si elles existent.
B. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX DANS
LES PLANS DE SAUVEGARDE ET DE LIQUIDATION JUDICIAIRE
La période d'observation a vocation à se terminer
par l'adoption d'un plan en vertu des articles L. 626-1 et L. 631-1 du Code de
commerce.
Il est élaboré par l'administrateur avec le
concours du débiteur ou en l'absence d'administrateur, le
débiteur seul l'établit avec l'assistance éventuelle d'un
expert nommé par le tribunal en vertu de l'article L. 631-21 du Code de
commerce.
Les plans de sauvegarde et de redressement judiciaire ont de
nombreuses dispositions communes aussi bien dans l'élaboration que de
son exécution.
38 V. annexe.
39
C. com, art R. 621-21, al. 3.
40
C. com, art. R. 621-21, al. 4.
Nous nous attarderons que sur les différences ayant un
rapport avec les droits de préemptions.
La question ici est de savoir si l'élaboration de ces
plans et leur exécution peut mettre en jeu les droits de
préemption en matière agricole.
Il faut donc déterminer si les plans de sauvegarde et de
redressement judiciaire peuvent contenir des mesures visant la cession d'actifs
immobiliers.
L'examen des dispositions du Code de commerce relatives aux
procédures collectives amène une réponse positive, deux
types de mesures sont possibles dans le cadre d'un plan de sauvegarde ou de
redressement judiciaire :
- « l'arrêt, l'adjonction ou la cession d'une
ou plusieurs activités » (
C. com., art. L. 626-1, al. 2). Cela signifie
que le plan peut prévoir une cession partielle de l'entreprise. Beaucoup
d'exploitations agricoles sont en polyculture (exemple, une EARL ayant une
activité céréalière et laitière), le plan de
redressement peut prévoir la cession de l'activité
laitière par la vente des pâtures, matériels de traite,
quotas...Elle est régie par les dispositions applicables à la
cession d'entreprise en cas de liquidation judiciaire, nous l'étudierons
donc ultérieurement dans le mémoire.
- La cession d'actifs isolés 41.
La question est de savoir si les dispositions prévues par
le Code rural s'applique en cas de cession d'actifs isolés.
L'absence de dispositions nous amène à penser que
les droits de préemption ne sont pas neutralisés comme en
période d'observation.
Cette solution semble logique, la neutralisation des droits de
préemption légaux ne semblent être que des exceptions
justifiées par la volonté de sauvegarder l'activité de
l'entreprise. La cession d'actifs isolés n'est qu'une opération
visant à réaliser un actif dont l'entreprise peut se
séparer sans mettre en péril son activité et dont le but
est de permettre la rentrée d'argent permettant la continuité de
l'activité.
Le problème est que l'exercice des droits de
préemption peut être un frein à ces cessions.
41 A. Jacquemont, Droit des entreprises en
difficulté, Litec, 6e édition, 2009, p. 380.
En effet, la SAFER et le preneur disposent d'une action en
contestation du prix de vente 42 d'un bien sur
lequel ils peuvent exercer leur droit de préemption.
Or ces actions :
- empêchent la réalisation rapide des actifs, et
ainsi elles peuvent mettre en difficulté le débiteur d'honorer
les engagements pris dans le plan de sauvegarde ou de redressement ;
- risquent de diminuer la rentrée d'argent
escomptée et ainsi remettre en cause le plan, le tribunal paritaire des
baux ruraux peut fixer un prix inférieur à ce que le
débiteur avait prévu.
De ce fait, il serait peut être opportun de prévoir
des règles dérogatoires partiellement.
Il semble que cela soit le cas. En effet, si la cession des
actifs isolés est ordonnée par le tribunal dans un jugement. Ce
jugement précise :
- le nom de l'acheteur ;
- le bien vendu ;
- les conditions de vente (prix...).
Il est raisonnable de penser que le jugement du tribunal fasse
obstacle à l'action en révision du prix qui serait en opposition
avec les mesures décidées par le tribunal.
42 V. note 29.
SECONDE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX EN
CAS DE DISPARITION TOTALE OU PARTIELLE DE L'EXPLOITATION AGRICOLE
Lorsqu'il apparaît que le redressement de l'entreprise est
impossible, le tribunal prononce la liquidation judiciaire.
À l'heure actuelle la liquidation judiciaire est la
procédure la plus utilisée : le rapport de Monsieur De Roux fait
au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale
43 le démontre :
- 90 % des procédures ouvertes se soldent par une
liquidation judiciaire ; - les procédures de liquidation judiciaire
durent en moyenne 4 ans.
Ce constat a été à l'origine de la loi sur
la sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005.
La liquidation judiciaire consiste à « mettre
fin à l'activité de l'entreprise ou à réaliser le
patrimoine du débiteur par une cession globale ou séparée
de ses droits et de ses biens » 44.
La liquidation judiciaire a pour but d'organiser la cession des
biens du débiteur afin de tenter de réaliser le passif.
Il existe deux techniques pour céder les biens du
débiteur : - la vente des biens par un plan de cession ;
- la vente des biens en ordre dispersé.
A. LES PRINCIPAUX EFFETS DU JUGEMENT OUVRANT UNE
PROCÉDURE DE LIQUIDATION JUDICIAIRE
Afin de traiter au mieux les différentes questions de ce
mémoire, il convient de rappeler les principaux effets de la liquidation
judiciaire.
43 Rapp. X. De Roux, au nom de la commission des
lois de l'Assemblée nationale : Doc. AN 2005, n° 2095.
44
C. com., art. L. 640-1.
1. La nomination d'un liquidateur judiciaire
Le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation
judiciaire entraine la nomination d'un administrateur judiciaire. Ce dernier
est, sauf cas exceptionnel, celui qui a exercé les fonctions de
mandataire judiciaire pendant la période d'observation.
Ses missions sont codifiées aux articles L. 641-4 et
suivants du Code de commerce, les plus importantes sont :
- la liquidation des actifs de l'entreprise ;
- la plupart des missions dévolues antérieurement
au mandataire et à l'administrateur judiciaire.
2. Le dessaisissement du débiteur de ses
pouvoirs
Le jugement de liquidation judiciaire entraîne de plein
droit un dessaisissement des droits du débiteur sur ses biens en vertu
de l'article L. 641-9-I du Code de commerce, qui dispose :
« Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation
judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement
pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens
même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que
la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et
actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés
pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur.
»
Son effet porte sur la quasi totalité des biens et
interdit le débiteur d'accomplir tout acte d'administration ou de
disposition sur ses biens.
Il est à noter que le débiteur est dessaisi
et non frappé d'incapacité. Cette différence
est fondamentale : les actes faits en violation de cette interdiction ne sont
pas nuls mais inopposable aux créanciers de la procédure
collective 45.
Le résultat peut choquer : la vente d'un immeuble
à un débiteur en liquidation judiciaire au mépris de la
règle du dessaisissement ne sera pas annulée mais l'acheteur
45
Cass. com., 19 mai 2004 : JCPE
2004 n°5, p. 1292, obs. M. Cabrillac.
ne pourra être payé sauf en cas de retour à
meilleure fortune du débiteur après la clôture de la
procédure.
Il sera intéressant de déterminer si un preneur en
liquidation judiciaire peut exercer sans l'accord du débiteur son droit
de préemption.
Pour étudier le sort des droits de préemption
nous suivrons l'ordre du Code de commerce en étudiant en premier le sort
des droits de préemption ruraux lors d'un plan de cession puis leur sort
en cas de cession en ordre dispersée des actifs immobiliers à
vocation agricole.
B. LE PLAN DE CESSION, UN OBSTACLE À L'EXERCICE
DES DROITS DE PRÉEMPTION EN MATIÈRE AGRICOLE ?
1. Le plan de cession
a. Un rôle renouvelé par la loi du 26 juillet
2005
Le plan de cession est une procédure organisant la
transmission de certains éléments d'exploitation de l'entreprise
à un repreneur.
Le plan de cession peut prévoir la cession d'actifs (biens
immobiliers, mobiliers) et de contrats.
Il est à noter que par dérogation au droit
commun des contrats, le tribunal peut imposer cette cession au cocontractant si
les contrats cédés sont nécessaires au maintient de
l'activité 46.
Le plan de cession a été profondément
modifié par la loi du 26 juillet 2005, sa modification a
entraîné la disparition de certaines modalités de cession
telle la cession d'unité de production.
Il n'est plus une procédure mais une mesure liquidative
qui peut être arrêtée à l'occasion de toute
procédure collective : procédure de sauvegarde, de redressement
et de liquidation judiciaire.
46
C. com, art. L. 642-7.
Les plans de cession arrêtés dans le cadre d'une
procédure de sauvegarde et de redressement judiciaire sont soumis aux
mêmes règles que ceux arrêtés dans le cadre d'une
procédure de liquidation judiciaire 47.
Il est à noter que le plan de cession poursuit plusieurs
buts, en effet l'article L. 642-1 du Code de commerce dispose :
« La cession de l'entreprise a pour but d'assurer le
maintien d'activités susceptibles d'exploitations autonomes, de tout ou
partie des emplois qui y sont attachés et d'apurer le passif
».
On retrouve l'ordre des priorités instaurées par
l'article 1er de la loi du 25 janvier 1985.
La jurisprudence a notamment déduit qu'un tribunal peut
arrêter un plan de cession qui ne permet d'apurer que partiellement le
passif 48 .
Le but du plan de cession n'est donc pas de payer les
créanciers mais de confier l'entreprise à un repreneur apte
à la redresser.
b. Une procédure complexe
Cette procédure est marqué par un formalisme
important et par la grande liberté du tribunal.
C'est en effet le tribunal qui décide si la cession est
possible et qui fixe le délai dans lequel les offres de reprise doivent
parvenir au liquidateur et à l'administrateur judiciaire
49.
De plus le Code de commerce réglemente soigneusement les
offres destinées à être soumises au tribunal :
- les offres doivent respecter un formalisme prévu
à l'article L. 642-2 II du Code de commerce (identité de
l'offrant, désignation des biens et des droits inclus dans l'offre,
prix...) ;
47 Com, art. L. 626-1, al 2 (sauvegarde) et
C. com, art L 631-22 (redressement
judiciaire).
48
Cass. com. 26 juin 1990 : Bull. civ.
IV,n° 191.
49
C. com., art. L. 642-2-I.
- l'intangibilité des offres, les auteurs ne peuvent les
retirer jusqu'à la décision du tribunal.
Lorsque le délai expire, le jugement statue sur les offres
de reprise.
Il faut noter que les juges du fond exercent un pouvoir
souverain pour apprécier le fait que le plan de cession répond
aux objectifs légaux posés à l'article L. 642-5 du Code de
commerce 50.
Afin d'éviter des recours purement dilatoires le Code de
commerce limite les possibilités de faire appel d'un jugement
arrêtant ou rejetant un plan de cession51.
En effet, l'article L. 661-66 du Code de commerce limite les
appelant au débiteur, au ministère public et dans certains cas au
cessionnaire ainsi qu'aux cocontractants des contrats cédés.
2. Le sort des droits de préemption ruraux en cas de
plan de cession
a. Une solution ancienne pour le droit de préemption
de la SAFER
Une analyse préliminaire conduit à penser que les
droits de préemptions ruraux sont neutralisés en cas de plan de
cession.
En cas de plan de cession, l'utilisation par le preneur ou par
la SAFER du droit de préemption conduirait à des
ingérences et des lenteurs de nature à nuire au plan de
cession.
La cession pourrait se trouver perturbée et
l'équilibre de l'opération perdue si on autorise le titulaire du
droit de préemption à exercer son droit sur un bien compris dans
un plan de cession.
Cette analyse a été reprise depuis un certain temps
par le législateur et par la jurisprudence.
L'article L. 143-4 du Code rural relatif au droit de
préemption de la SAFER dispose dans son alinéa 7 :
50
Cass. com. 26 juin 1990 : JCP E
1991 I n° 73, p. 6.
51 A. Jacquemont, Droit des entreprises en
difficulté, Litec, 6° édition, 2009, n° 855.
« Ne peuvent faire l'objet d'un droit de
préemption :[...]
7° : Les biens compris dans un plan de cession totale
ou partielle d'une entreprise arrêté conformément aux
articles 81 et suivants de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au
redressement et à la liquidation judiciaire des entreprises
».
La disposition ne laisse aucun doute, le droit de
préemption de la SAFER est neutralisé. Cette disposition a aussi
été prévue dans le cas du droit de préemption
urbain à l'article L. 213-1 du Code de l'urbanisme par la loi SRU du 13
décembre 2000, modifiée par la loi n° 2008-1425 du 27
décembre 2008.
En revanche ce n'est que récemment que des dispositions
législatives spécifiques sur le sort du droit de
préemption du fermier en cas de plan de cession ont été
posées.
b. Le rôle décisif de l'ordonnance du 18
décembre 2008 sur la question du droit de préemption du
preneur
L'article L. 412-1 du Code rural dispose :
« Le propriétaire bailleur d'un fonds de terre
ou d'un bien rural qui décide ou est contraint de l'aliéner
à titre onéreux [...] ne peut procéder à
cette aliénation qu'en tenant compte [...] d'un droit de
préemption au bénéfice de l'exploitant preneur en place
».
L'article ne prévoit aucune exception que la vente soit
volontaire ou contrainte, isolée ou globale.
Une exception existait cependant dans le cas de l'outre-mer,
l'ancien article L. 461-18 du Code rural limitait le bénéfice du
droit de préemption seulement au « cas d'aliénation
volontaire à titre onéreux de tout ou partie des biens qui lui
ont été donnés à bail ».
Cet article semble exclure explicitement l'exercice du droit de
préemption en cas de plan de cession.
La jurisprudence a d'ailleurs confirmé que le plan de
cession n'est pas une aliénation volontaire et que le preneur ne
bénéficiait pas du droit de préemption prévu
à l'article L. 461-18 52 du Code rural.
52 Cass. civ. 3e, 1er avril 1998 : D.
1998, act. jurispr. p. 805, obs. AL.
Le problème posé par le droit de
préemption prévu à l'article L. 412-1 du Code rural n'est
cependant pas résolu cette jurisprudence contrairement à ce que
monsieur Jacques Lachaud avait affirmé 53.
Nos recherches ne m'ont pas permis de trouver une jurisprudence
où la question de l'application de l'article L 412-1 du Code rural dans
un plan de cession s'est posée.
Le législateur a consacrée une solution par
l'ordonnance du 18 décembre 2008 portant modification des
procédures collectives.
L'article L. 642-5 du Code de commerce a été
modifié, son 3e alinéa dispose :
« Les droits de préemption institués par
le Code rural ou le Code de l'urbanisme ne peuvent s'exercer sur un bien
compris dans un plan ».
Cette solution a l'avantage d'affirmer que les droits de
préemption sont tous traités sur un pied
d'égalité.
Cependant la formulation manque de précision. L'article
parle d'un « plan » mais de quel plan ? Il y a le plan de cession, de
sauvegarde et de redressement.
Ces derniers peuvent prévoir un projet de cession
totale ou partielle de l'exploitation, cependant les plans de sauvegarde ou de
redressement judiciaire peuvent aussi prévoir des cessions d'actifs
isolés, sont-ils aussi soumis à cette disposition ?
On peut espérer que les juges feront une application des
textes en suivant leur esprit et non une application littérale.
3. Le sort du bail rural dans le plan de cession
a. Les effets de la liquidation judiciaire sur le bail
rural
Le droit de préemption du fermier est un accessoire du
bail rural. C'est un droit personnel du preneur qui ne peut être
cédé (C. rur., art. L. 412-4).
Cependant les procédures collectives sont « une
période d'exception » où plusieurs principes et
règles de droit commun sont écartés.
53 J. Lachaud, « Un soupçon de droit
rural dans l'ordonnance du 18 décembre 2008 portant modification des
procédures collectives », Ann. Loyers, n° 1 janvier
2009, p. 85.
La question du devenir du bail rural en cas de liquidation
judiciaire et notamment en cas de plan de cession est importante :
- Le bail est-il résilié ou maintenu à la
suite d'un jugement prononçant la liquidation judiciaire ?
- Peut il être transféré à un
repreneur ce qui signifie de ce fait un transfert du droit de préemption
?
- Ce transfert peut-il être à titre onéreux
par exception au statut du fermage ?
La première question est de savoir si la liquidation
judiciaire entraîne la résolution du bail purement et
simplement.
L'article L. 640-1 du Code de commerce précise en effet
que le but de la liquidation est de mettre fin à l'activité de
l'entreprise, cela passe nécessairement par la fin des contrats que le
débiteur avait conclu.
L'article L. 641-11-1 I du Code de commerce apporte une
réponse limpide :
« Nonobstant toute disposition légale ou toute
clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou
résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de
l'ouverture ou du prononcé d'une liquidation judiciaire. »
Le bail n'est pas résilié par le jugement ouvrant
une procédure de liquidation judiciaire.
Comme l'explique Madame Emmanuelle Le Corre-Broly
54, les paragraphes I, II, V, VI de cet article
sont calqués sur les mêmes paragraphes de l'article L. 622-13 du
Code de commerce que nous avons vu précédemment.
Il existe une disposition propre à la liquidation
judiciaire. Le 3e alinéa du paragraphe III de l'article L. 641-11-1 du
Code de commerce autorise le liquidateur à résilier de plein
droit un contrat obligeant le débiteur a payé une somme
d'argent.
Concrètement dans le cadre de notre sujet :
54 E. Le Corre-Broly, « Les modifications
apportées au droit commun de la continuation des contrats en cours,
» D. 2009, p. 663.
- dans le cas où le bailleur est en liquidation
judiciaire, la seule possibilité de résiliation du bail rural par
les organes de la procédure consiste à en demander la
résiliation auprès du juge-commissaire. La vente du bien ne
mettra pas fin au bail ;
- dans le cas où le preneur est en liquidation
judiciaire, il sera possible de demander la résiliation du contrat sur
le fondement de l'impossibilité pour le preneur de payer une dette dont
le paiement est en argent.
b. La cession du bail rural dans le cadre d'un plan de
cession
L'article L. 642-7 du Code de commerce impose la cession des
contrats nécessaires à l'activité économique.
Il faut cependant rappeler que le statut du fermage repose sur de
grands principes d'ordre public :
- le caractère intuitus personnae du fermage,
cela signifie que dans le fermage la personnalité cocontractant est
déterminant dans la conclusion du contrat ;
- l'incessibilité et la non-patrimonialité du bail
rural.
Le Code rural a certes prévu des exceptions au principe
d'incessibilité du bail rural mais pas dans le cadre du plan de cession
:
- le bail cessible prévue à l'article L. 418-1 du
Code rural ;
- la cession dans un cadre familiale prévue à
l'article L. 411-35 du Code rural. Les dispositions du Code de commerce et du
Code rural sont en conflit.
Il a donc été posé une autre exception dans
le cas du plan de cession.
L'article L. 642-1 du Code de commerce dispose dans son
alinéa 3 issu de l'article 82 alinéa 3 de la loi du du 25 janvier
1985 :
« Lorsqu'un ensemble est essentiellement
constitué du droit à un bail rural, le tribunal peut, sous
réserve des droits à indemnité du preneur sortant et
nonobstant les autres dispositions du statut du fermage, soit autoriser le
bailleur, son conjoint ou l'un de ses descendants à reprendre le fonds
pour l'exploiter, soit attribuer le bail rural à un autre preneur
proposé par le bailleur ou, à défaut, à tout
repreneur dont l'offre a été
recueillie dans les conditions fixées aux articles
L. 642-2, L. 642-4 et L. 642-5. Les dispositions relatives au contrôle
des structures des exploitations agricoles ne sont pas applicables
».
Ce texte autorise la cession du bail rural et par
conséquent le transfert du droit de préemption.
Il faut noter que cette possibilité est cependant
très encadrée.
En premier lieu, l'ensemble d'éléments faisant
l'objet d'un plan de cession doit être constitué pour l'essentiel
par des baux ruraux.
La loi de 1988 n'explicite pas ce critère, aucun
élément dans le texte n'indique à partir de quel
degré une exploitation ou une branche d'exploitation cédée
est essentiellement constituée d'un droit à un bail rural.
La jurisprudence a posé une interprétation par
différents arrêts dont les plus importants sont :
- l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 novembre 1993
55 ;
- l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation
du 28 avril 1998 56.
Le caractère essentiel ne doit nullement se fonder sur
la valeur des biens cédés selon l'arrêt de 1998, le
caractère non patrimonial du bail rural tend à rejeter cette
interprétation.
Le droit au bail rural doit être essentiel à
l'équilibre économique de l'exploitation notamment sur le rapport
entre les hectares exploitées et les hectares louées. Si les
revenus générés par ces hectares loués sont
essentiels à la survie économique d'une exploitation, le
caractère essentiel est rempli.
On peut en déduire qu'un nombre important
d'exploitations françaises sont susceptibles d'être soumises
à un plan de cession. Une enquête sur les structures agricoles
réalisée par l'Agreste en 2007 indique que 77 % de la SAU en
France est exploitée en mode de faire valoir indirect
57.
55 CA Paris, 2 novembre 1993 : RD
banc. et bourse 1994, p.
111; RD rur. Janvier 1994, p. 3.
56
Cass. com. 28 avril 1998 : Bull.
civ. IV, n° 138; D. Affaires 1998. 960, obs. V. A.-R.
57 V. http ://
agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/file/Gaf09p021-026(1).pdf
Si la condition est remplie, le juge n'est pas libre de choisir
le repreneur, le texte offre deux possibilités :
- une reprise des parcelles par le bailleur ou sa famille, en
réalité si la reprise est au profit du bailleur il s'agit d'une
reprise anticipée du bail ;
- l'attribution du droit au bail à un repreneur,
celle-ci est réalisée en priorité au profit d'un preneur
proposé par le bailleur. Le choix du tribunal ne s'exerce librement
qu'en l'absence de propositions du bailleur.
On en déduit que le bailleur conserve la parfaite
maîtrise du choix de son preneur.
On peut donc dire que si le droit de préemption peut
être transféré à l'occasion d'un plan de cession,
son bénéficiaire doit avoir en principe l'agrément du
bailleur.
L'esprit du texte montre le souci de concilier l'esprit du statut
du fermage avec les impératifs liés aux procédures
collectives.
Malheureusement il a des limites.
Cette disposition apporte en effet une solution idéale
dans le cas où un exploitant exploite essentiellement des terres par un
fermage consenti par un seul bailleur.
Or les agriculteurs ont souvent trois à cinq bailleurs.
Que doit-on faire si chaque bailleur propose un repreneur ou veut
reprendre ses terres ?
Différentes solutions sont possibles :
- ou bien on respecte le texte et le plan de cession peut
conduire à un véritable morcellement de l'exploitation si chaque
bailleur propose son repreneur ;
- ou bien on considère que si le choix des bailleurs
entraîne un morcellement trop important, cette disposition n'est plus
applicable car l'objet du plan de cession est de céder l'exploitation ou
une branche d'activités ;
- ou bien on considère que si le choix des bailleurs
entraine un morcellement trop important de l'exploitation, le juge peut imposer
son choix aux bailleurs.
Cette dernière solution est ambiguë, si elle est
judicieuse en pratique elle est en contradiction avec le principe selon lequel
le juge ne peut créer des lois.
La jurisprudence a tranché dans un arrêt de la
chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 9 juin 1998
58.
En l'espèce, à l'issu d'une procédure
collective le tribunal a attribué les baux détenus par des
époux agriculteurs à divers preneurs proposés par les
différents propriétaires. Le représentant des
créanciers a fait appel de cette décision.
Cet arrêt est emblématique du problème, le
plan de cession n'a pas conduit à la cession d'une exploitation ou d'une
branche d'activités mais à différents repreneurs.
La jurisprudence considère que les dispositions du 3e
alinéa de l'article 82 de la loi du 25 janvier 1985 devenues l'article
L. 642-1 alinéa 3 du Code de commerce sont applicables lorsque les biens
de l'exploitation agricole sont exploités au moyen de plusieurs baux
même consentis par plusieurs propriétaires.
Dès lors le tribunal considère que l'attribution
de ces baux aux divers preneurs proposés par chaque preneur est valide
si les baux constituent l'essentiel de l'exploitation.
Cette jurisprudence tente de concilier les impératifs
liés aux procédures collectives avec le statut du bail rural.
Cependant elle entraîne un véritable
détournement du plan de cession.
Au lieu de céder un ou deux ensembles autonomes on
cède les différents éléments de l'exploitation.
Cette jurisprudence ne facilite pas le travail des praticiens
notamment les avocats et les liquidateurs judiciaires.
L'intérêt des liquidateurs est de céder un
ensemble dont le prix permettra de payer les créanciers.
Ne céder que les actifs, sur lesquels les bailleurs
n'exercent aucun contrôle, réduit le prix de cession.
58
Cass. com. 9 juin 1998 : Bull.
civ IV, n° 186; D. Affaires 1998. 1217, obs. V. A.-R.
b. La question de la cession à titre onéreuse
du bail rural
En effet, il ne faut pas éluder une question centrale
dans le devoir : la question de la cession à titre onéreux des
baux lors des plans de cession, appelée communément «
chapeau » ou « pas de porte ».
Cette pratique est interdite en vertu de l'article L. 411-74 du
Code rural.
Cependant cette pratique existe toujours. Elle est très
répandue dans de nombreuses régions notamment la région
naturelle du Vexin normand pour donner un exemple.
Les procédures collectives étant une «
période d'exception », il est judicieux de s'interroger si le plan
de cession ne permet pas de déroger à cette disposition.
Dans le contexte du plan de cession, l'autorisation de
céder les baux ruraux à titre onéreux serait judicieux en
pratique :
- le prix permettait de payer les créanciers ;
- le versement d'une somme aux bailleurs éviterait la
dispersion des baux que permet l'arrêt du 9 juin 1998.
Il n'existe pas de textes prévoyant expressément
cette possibilité.
En son absence, ce sont les dispositions du Code rural qui
s'appliquent.
Cependant un jugement du tribunal de grande instance de
Chartres en date du 22 mai 1991 59 avait retenu une
offre de cession valorisant le bail rural par une interprétation de
l'article 82 alinéa 3.
Le tribunal estimait que la dérogation prévue
à l'article 82 alinéa 3 de la loi du 25 janvier 1985, portait sur
l'intégralité du statut du fermage.
Ce jugement reste une décision d'espèce.
Les professionnels travaillant sur les procédures
collectives agricoles connaissent cette règle.
Le plan de cession annexée au mémoire le
démontre : l'interdiction du pas de porte posée à
l'article L. 411-74 du Code rural est rappelée.
En réalité, il y a un pas de porte versé
dans la majorité des cas.
59 TGI Chartres 22 mai 1991 : RD rur.
n° 198 décembre 1991, p. 403.
Afin de réaliser les cessions, ces professionnels
utilisent une technique simple : ils fixent un prix global et non
élément par élément.
Le pas de porte est ainsi englobé dans une totalité
rendant le versement de cette somme parfaitement légale.
Autre solution il suffit de surévaluer
l'indemnité d'amélioration des fonds loués prévue
par l'article L. 411-69 du Code rural, la jurisprudence a facilité cette
pratique par l'arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de
cassation du 22 octobre 2003 60.
Cet arrêt pose le principe que la
répétition d'une somme équivalente à la
différence entre le prix des biens mobiliers acquis par le preneur et
leur valeur vénale suppose la démonstration d'une contrainte
exercée par le cédant à l'encontre du cessionnaire.
Cette condition supplémentaire limite les actions
fondées sur l'article L. 411-74 du Code rural.
Il n'y a pas lieu de juger ces professionnels, les pas de
porte permettent de réussir des cessions où le choix
opéré par le bailleur peut entrainer un morcellement total de
l'exploitation.
La pratique du pas de porte est une véritable coutume dans
certaines régions.
En effet, la longue pratique des pas de porte a comme
résultat que certains agriculteurs assimilent pas de porte et
indemnités pour amélioration du fonds.
Il faut noter qu'il y a très peu d'action en
répétition des sommes qui sont intentées, même si
les sommes sont restituées le preneur aura beaucoup de
difficultés à trouver d'autres terres.
Les agriculteurs qui intentent cette action subissent la
méfiance et le rejet de la part des propriétaires.
On peut considérer que le pas de porte est une
véritable coutume contra leguem.
Il résulte de ces éléments que le plan de
cession peut permettre la cession du bail rural et ainsi le transfert du droit
de préemption à un autre preneur en dérogation de
l'article L. 411-35 du Code rural.
Une cession qui est souvent faite à titre onéreuse
mais de manière officieuse.
60 Cass. civ. 3°, 22 octobre 2003 :
Ann. Loyers 2004, 455, note Lachaud.
C. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX EN
CAS DE CESSION DES ACTIFS EN ORDRE DISPERSÉ
Les règles relatives à la cession des actifs en
ordre dispersé s'applique pour les biens du débiteur :
- en cas d'absence de plan de cession ;
- pour les biens du débiteur qui ne sont pas compris dans
un plan de cession.
Les articles L. 642-18 et suivants et les articles R. 642-22 et
suivants du Code de commerce posent les règles relatives à ce
mode de réalisation des actifs.
1. Les règles relatives à la
réalisation des actifs isolés
Il existe un principe posé à l'article L. 642-18
: les ventes immobilières ont lieu suivant les dispositions relatives en
matière de saisie immobilière posées aux articles 2206 et
suivants du Code civil.
Ces articles sont issus de l'ordonnance n° 2006-461 du 21
avril 2006.
En vertu de ces articles, les biens saisis peut être vendus
soit à l'amiable sur autorisation judiciaire soit par adjudication.
Rappelons que l'adjudication est selon Monsieur le professeur
Gérard Cornu : « L'ensemble des formalités d'une vente
aux enchères et cette vente même »
61.
Cette vente est selon l'article 2208 du Code civil une vente
forcée par opposition à la vente amiable, celle-ci étant
considéré comme une vente volontaire.
Le contexte des procédures collectives engendrent
certaines particularités.
Le rôle du juge commissaire qui fixe le les conditions de
vente (
C.com., art. L. 642- 19), la mise à
prix et les modalités de publicité.
Les articles 2206 et 2211 du Code civil ne sont pas
applicables.
Si le liquidateur souhaite une cession amiable, il doit
présenter une requête au juge-commissaire.
61 Gérard Cornu, Vocabulaire
juridique, PUF, coll. Dicos poche, 8° édition, 2007.
Ce dernier n'est pas lié par la demande du liquidateur.
Cependant son ordonnance fixant les conditions de la vente est notifiée
par le greffier au débiteur, au liquidateur, aux créanciers
inscrits et aux contrôleurs (
C. com., art R. 642-22).
L'article R. 642-37-1 du Code de commerce ouvre une voie de
recours contre cette ordonnance par voie d'appel que seuls le débiteur,
certains créanciers, le Ministère public et certains institutions
représentatives du personnel peuvent exercer.
De plus en cas de cession amiable, le juge-commissaire a le choix
entre deux modalités de cession :
- L'adjudication amiable réalisée par un notaire
désigné par le juge-commissaire, cette adjudication est plus
souple que l'adjudication judiciaire traditionnelle et tout comme elle, elle
emporte aussi la purge automatique des inscriptions.
- La cession de gré à gré, le liquidateur
ne peut demander cette cession que s'il a reçu des offres d'acquisition
avant de solliciter le juge-commissaire. L'autorisation du jugecommissaire
n'est accordée qu'au profit de l'auteur d'une offre identifié et
aux conditions fixées par le juge-commissaire. Le liquidateur
représente le débiteur dans la vente. Cette cession n'emporte pas
le purge des inscriptions.
Cette présentation amène des questions :
- Le caractère volontaire ou forcé de la vente
a-t-il un effet sur les droits de préemption ruraux ?
- Le preneur en situation de liquidation judiciaire est
dessaisi de ses droits et représenté par le liquidateur peut-il
exercer son droit de préemption si ce dernier n'est pas
neutralisé ?
2. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption du preneur
a. L'exercice du droit de préemption du preneur en
cas de liquidation judiciaire
La première question est de savoir si le droit de
préemption du preneur est neutralisé par la cession d'actifs de
manière volontaire ou forcée.
Contrairement au plan de cession il n'existe aucun texte
répondant explicitement à cette question.
Cependant au fil de notre réflexion, il est apparu que,
sauf textes contraires, les dispositions d'ordre public du Code rural
s'appliquent aux procédures collectives.
Nous avons déjà évoqué les conditions
d'exercice du droit de préemption du fermier.
Il s'exerce en cas de toutes aliénations à titre
onéreux sauf expropriation et apport en société.
L'article L. 412-2 du Code rural précise qu'il s'exerce
sur toutes les ventes y compris les adjudications, ce qui inclut les ventes
forcées.
Le Code rural ne semble donc pas prévoir une exception
pour cette cession, qu'elle soit volontaire ou forcée, sauf dans le cas
de l'ancien article L. 461-18 du Code rural aujourd'hui abrogé.
La jurisprudence a confirmé cette position après
plusieurs hésitations.
En effet, la jurisprudence s'est déchiré sur le
sort du droit de préemption du preneur lors de l'ouverture d'une
procédure de liquidation judiciaire.
Bien que la lettre du texte soit favorable à l'exercice
du droit de préemption du preneur, plusieurs arrêts de la cour
d'appel de Montpellier 62 l'ont neutralisé
sur le fondement du caractère non-volontaire de cette
aliénation.
Il est vrai que la cession des biens du débiteur, dessaisi
de ces droits au profit du liquidateur, ne peut être
considérée comme volontaire.
L'arrêt de la troisième chambre civile de la Cour
de cassation en date du 5 février 2003 63 a
mis fin à cette mauvaise interprétation de la loi dans un attendu
qui pose comme principe que la liquidation judiciaire ne neutralisait pas
l'exercice du droit de préemption, le caractère volontaire ou
forcé de la cession est indifférent.
Cette solution de principe a été confirmée
ultérieurement 64.
62 CA Montpellier, 6 novembre 2000 :
JurisData n° 2000-136721.
63 Cass. civ. 3e, 5 février 2003 :
JCP N 23 avril 2003 n° 21, p. 1339, note B. Grimonprez ; D.
2003, p. 696 ; RD rur. 2003, p. 141, obs. B. Grimonprez.
64 Cass. civ. 3e, 7 avril 2004 : RD rur.
décembre 2004, n° 328, comm. 85, B. Grimonprez.
b. La confrontation entre le principe du dessaisissement du
débiteur en liquidation judiciaire et du droit de préemption
Une difficulté subsiste si c'est le preneur qui est en
liquidation judiciaire.
Comme nous l'avons déjà dit, le débiteur en
liquidation judiciaire est de plein droit
dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens
tant que la liquidation
judiciaire n'est pas clôturée.
Le problème est de savoir si cette mesure ne frappe pas le
débiteur dans sa capacité à exercer le droit de
préemption et, si c'est le cas, de déterminer les
conséquences.
L'étude des articles du Code de commerce relatifs au
dessaisissement du débiteur conduit à envisager que le
débiteur ne puisse exercer son droit.
La jurisprudence considère que l'article L. 622-9 du
Code de commerce devenu l'article L. 641-9 depuis la loi n° 2005-845 du 26
juillet 2005 entraîne un dessaisissement s'étendant à toute
opération ou tout acte ayant un caractère patrimoniale et atteint
l'ensemble des biens du débiteur qu'ils soient affectés ou non
à l'exploitation 65.
Or, l'exercice du droit de préemption a pour effet
d'engendrer une opération permettant l'entrée d'un bien dans le
patrimoine du débiteur, ce bien est affecté à son
exploitation.
La lettre du texte conduit donc à dessaisir le preneur de
ce droit.
La Cour de cassation a adopté une position contraire dans
différents arrêts 66.
Elle considère que l'exercice du droit de
préemption ainsi que l'action en
reconnaissance du bail échappent au dessaisissement qui
frappe le débiteur en faillite. Traditionnellement, le failli
considère certaines prérogatives pour des droits et
actions attachées à sa personne : faculté
d'accepter une succession 67...
L'exercice du droit de préemption n'appartient pas
à cette sphère d'opération. Il y a cependant des
explications à cette position.
En effet, le droit de préemption est un droit
attaché au bail rural.
65
T. com Caen, 25 novembre 1997 : BICC
1998, n° 608.
66
Cass. com., 21 janvier 1974 : Bull.
civ IV, n° 4; Cass. Civ 3°, 7 avril 2004 : RD rur.
décembre 2004, n° 328, comm. 85, B. Grimonprez.
67
Cass. com., 3 mai 2006 : JCP E 2006,
n° 37, p. 1553, obs. M. Cabrillac.
Ce bail est un droit personnel, incessible et non patrimonial.
De ce fait bien que l'exercice de ce droit engendre une
opération d'ordre patrimonial, ce droit n'a pas en lui même un
caractère patrimonial.
Cette explication est très théorique mais elle
démontre que la Cour de cassation observe les prescriptions
légales et le statut du fermage.
Une autre explication moins théorique existe.
Elle est issue de la nature du droit de préemption.
Certains auteurs estiment que c'est droit « potestatif »
68, c'est à dire un droit conférant
à leur titulaire le pouvoir d'agir sur une situation juridique
préexistante par une manifestation unilatérale de
volonté.
Un tel droit apporte un avantage exceptionnel à son
titulaire. En l'espèce ce droit permet de déroger au
caractère absolu du droit de propriété du bailleur. Le
législateur a donc identifié clairement son titulaire : le
preneur en place titulaire d'un bail rural.
Ce droit a pour but de permettre la maîtrise de la taille
de son exploitation par le preneur. Seul lui est considéré comme
seul apte à opérer cette décision.
Or dans le contexte de la liquidation judiciaire, le fait de
dessaisir le preneur de ce droit au profit du liquidateur entraîne un
changement : ce droit n'est plus confié à un exploitant pour
qu'il maîtrise le devenir de son exploitation mais à une personne
dont le but est de réaliser au mieux l'actif du débiteur pour
payer les créanciers.
Le droit de préemption est ici détourné de
son but initial dans ce cas.
On peut objecter que l'exercice de ce droit par le seul preneur
est aussi détourné de son but.
En effet, si le preneur achète un bien immobilier, il
ne pourra pas pas en conserver la maîtrise par l'effet du
dessaisissement, il ne pourra donc consentir à un bail rural à
ses proches lui permettant de conserver indirectement ce bien (ce qui est tout
à fait normal car cela reviendrait à contourner les effets du
dessaisissement).
La question d'une neutralisation du droit de préemption du
fermier en situation de liquidation judiciaire n'est donc pas à
exclure.
68 C. Saint-Alary, Le Droit de
préemption : thèse LGDJ 1979, n° 507.
S'il n'est pas neutralisé, ce n'est que par souci de
respecter la lettre du texte mais non son esprit.
Il existe une autre interrogation relatif à ce sujet.
Le but principal de la liquidation judiciaire étant de
payer les créanciers, l'action en contestation par le preneur du prix et
des conditions de la vente posée à l'article L. 412-7 du Code
rural est-elle neutralisée ?
La question est essentielle, cette action est gênante de
deux manières pour le liquidateur, d'une part elle peut entraîner
la réduction du prix de vente du fonds rural, et d'autre part elle peut
entraîner un accroissement du temps nécessaire à la cession
du fonds.
Il faut se rappeler que la cession des actifs peut se faire soit
par adjudication soit par cession de gré à gré avec
autorisation du juge-commissaire.
Le Code rural a prévu une procédure
particulière en cas d'exercice du droit de préemption du preneur
lors d'une vente par adjudication.
Celle-ci est posée à l'article L. 412-11 du Code
rural.
La jurisprudence a déduit de la particularité de
l'exercice du droit de préemption en cas de vente par adjudication que
l'action en révision du prix ou des conditions de la vente est exclu
69.
Il faut noter que l'exercice d'une telle action serait contraire
au principe des enchères de l'adjudication.
Cependant le Code rural ne prévoit aucune procédure
particulière lors de la vente de gré à gré au cours
d'une liquidation judiciaire.
Mais en cas de cession de gré à gré,
l'ordonnance du juge-commissaire détermine le prix et les conditions de
vente.
Si la jurisprudence a estimé que l'exercice du droit de
préemption n'entrainait pas la nullité de l'ordonnance bien que
cela conduise à modifier le nom de l'acheteur
69 Cass. soc., 17 juin 1948 : JCP G
1948, III, 4507.
initialement déterminé
70, il n'est nullement dit que l'exercice de la
préemption permet de modifier les autres éléments de
l'ordonnance.
De plus si cette action était possible, il est fort
probable que les juges-commissaires ne permettraient pas la cession de
gré à gré des fonds ruraux, le risque de voir le prix
d'achat diminué par l'action en révision du prix est un obstacle
trop important.
3. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption de la SAFER
Bien que la question du sort du droit de préemption de
la SAFER en cas de cession des actifs isolés ait les mêmes
problématiques que celle du droit de préemption du preneur.
Cependant il existe peut être certaines singularités
qui peuvent amener de nouvelles problématiques à ce sujet.
a. Une identité des solutions avec le droit de
préemption du preneur
La première question la plus évidente est de savoir
si le droit de préemption de la SAFER est traité de la même
façon que celui du preneur.
La Cour de cassation a estimé que l'article L. 143-4
alinéa 7 du Code rural ne neutralisait le droit de préemption
seulement pour les biens objets d'un plan de cession 71.
Cette solution a été confirmé
72
Elle est donc dépendante de la décision des juges
du fond sur la manière de réaliser l'actif.
L'arrêt de la Cour de cassation en date du 19 mai 2010
73 montre la limite de cette décision. Les
juges du fond ont choisi le plan de cession, faisant obstacle ainsi au droit de
préemption de la SAFER, afin de céder un ensemble d'actifs d'une
exploitation
70 Cass. civ. 3°, 5 février 2003 :
LPA 14 juillet 2003 n° 139, p. 8, note Ph. Roussel Galle.
71
Cass. com., 15 octobre 2002 : JCP N
25 avril 2003 n° 17, p. 1296, obs. M-A Rakotovahiny ; JCP N
23 mai 2003 n° 21, p. 1342, obs. B. Grimonprez.
72 Cass. civ 3°, 30 avril 2003: JCP
N 12 novembre 2004 n °46, p. 1551, note F. Vauvillé.
73 Cass. civ. 3°, 19 mai 2010 : Dict.
perm. Entreprises agricoles. juin 2010, n° 431, p. 4.
agricole qui n'étaient pas un ensemble autonome permettant
la continuité économique de l'exploitation.
Cet arrêt pose le problème de la grande
liberté des juges du fond dans l'appréciation de la
décision d'arrêter ou non un plan de cession et les
conséquences liées aux restrictions dans la procédure
d'appel.
b. La liquidation judiciaire, un contexte potentiellement
très favorable à l'exercice du droit de préemption par la
SAFER
La deuxième porte sur les modalités de la
préemption.
À nouveau les solutions semblent être identiques
à celles du preneur.
Si la SAFER dispose de la faculté de discuter le prix
par le biais de l'action estimatoire (C. rur., art. L. 143-10), cette
faculté est neutralisée en cas d'adjudication, l'article R.
143-13 du Code rural relatif au droit de préemption de la SAFER
opère un renvoi à l'article L. 412-11 du Code rural.
La seule question réside en cas de cession de gré
à gré, il est fort probable que la SAFER ne puisse pas discuter
le prix fixé par le juge-commissaire.
Cela entraverait la procédure de liquidation, certains
auteurs corroborent cette position 74.
La question de la préemption de la SAFER pose cependant
d'autres questions. En effet, la SAFER est dans une position différente
du preneur.
Elle est extérieure à la procédure,
contrairement au preneur qui est soit en liquidation judiciaire, soit
débiteur du bailleur en liquidation judiciaire.
Contrairement au preneur qui doit exploiter les terres
personnellement et pendant 9 ans à la suite de l'exercice de son droit
de préemption, elle est dans l'obligation de rétrocéder
les fonds ruraux acquis de manière amiable ou par préemption
75.
Il est donc possible qu'elle puisse rétrocéder
à un des membres de la famille le bien préempté.
74 E. Lemmonier, « Le droit commercial
frappé de ruralité », RD rur. 2003, n° 309, p.
20-21.
75 C. rur., art. L. 143-2.
Les articles L. 642-3 et L. 642-20 du Code de commerce
prohibent la cession des actifs réalisés aux parents ou
alliés du débiteur ou du dirigeant de fait et de droit de la
société liquidée.
Cependant il est prévu une exception en matière
agricole au 2e alinéa de cet article.
La SAFER peut donc très bien rétrocéder un
fonds rural acquis à l'occasion d'une adjudication ou d'une vente de
gré à gré à un proche parent du débiteur.
L'article L. 143-4 alinéa 3 du Code rural neutralise
l'exercice du droit de préemption de la SAFER pour :
« Les acquisitions effectuées par des
cohéritiers sur licitation amiable ou judiciaire et les cessions
consenties à des parents ou alliés jusqu'au quatrième
degré inclus, ou à des cohéritiers ou à leur
conjoint survivant ainsi que les actes conclus entre indivisaires en
application des articles 815-14, 815-15 et 882 du Code civil. »
Cet article est-il neutralisé par le contexte de la
liquidation judiciaire ?
A priori non aucune disposition ne dispose expressément
qu'un tel article est neutralisé.
Il faut noter que le contexte peut induire peut être une
neutralisation de cette disposition.
En cas de cession de gré à gré, l'exercice
du droit de préemption par la SAFER entraîne une substitution de
l'acquéreur nommé dans l'ordonnance elle-même.
Il y a donc une modification des conditions de la vente, celle-ci
est faite pour la SAFER.
La question porte sur les conséquences, la
préemption oblige le juge-commissaire a modifié l'ordonnance.
Le liquidateur est en effet tenu de vendre le bien à la
personne ayant fait l'offre acceptée par le juge commissaire.
L'ordonnance ne vaut pas vente 76,
on peut donc estimer que dans ce contexte particulier seul l'acte de vente vaut
vente et non le consentement par dérogation à l'article 1589 du
Code civil.
76
Cass. com., 5 décembre 1995 :
Bull. civ. IV n° 279, p. 258.
La SAFER ne fait pas ici obstacle à la réalisation
d'une vente mais à une procédure dont l'objectif est une
vente.
La nuance est subtile mais on peut considérer que la
SAFER évince indirectement les acheteurs visés par l'article L.
143-7 alinéa 3 du Code rural et ainsi conduire à neutraliser
cette disposition en cas de cession de gré à gré.
Il n'existe pas de jurisprudence relative à cette
question.
Il existe par contre une jurisprudence en cas d'adjudication.
L'arrêt de la troisième chambre civile de Cour de
cassation en date du 10 juin 2009 77 exclut l'exception
prévue à l'article L. 143-7 alinéa 3 dans le cas où
l'adjudicataire évincé était le frère du
débiteur.
la Cour estimant que la cession n'ayant pas été
consentie par le débiteur lui-même. L'adjudication ayant
été autorisée par le juge-commissaire et non le
débiteur lui même.
Par cet arrêt la Cour restreint le champ des exceptions de
la SAFER aux seules acquisitions effectuées par les cohéritiers
du débiteur au liquidation judiciaire.
Il en résulte que paradoxalement à la plupart de
nos constations dans le mémoire, la liquidation judiciaire renforce le
droit de préemption de la SAFER en neutralisant certaines de ses
exceptions.
77 Cass. 3° civ., 10 juin 2009 : RD
rur. Août-septembre 2009 n° 375, comm. 129, note J-J
Barbiéri ; Ann. Loyers décembre 2009 n° 12, p. 2449.
CONCLUSION
Nous avons étudié le sort des droits de
préemption ruraux tout au long de la procédure collective.
Il nous a permis de faire ressortir une problématique
qui traverse le droit rural : le droit agricole n'est pas le droit de
l'entreprise agricole mais celui de l'exploitation agricole.
L'esprit du droit commercial et du droit rural sont en partie
opposés. Il suffit de lire certains titres d'articles au titre explicite
: « Le droit commercial frappé de ruralité »..., ces
deux droits sont perçus comme antagonistes et leur interaction comme un
empiètement de l'un sur l'autre.
En effet, si ces deux droits encadrent une activité dont
le but est de générer un profit, les formes souhaitées de
l'activité sont radicalement différentes.
Le statut du fermage vise à protéger
l'exploitation familiale des bailleurs et de phénomènes
spéculatifs tels le prix du loyer ou la vente de fonds agricole. La
volonté de les encadrer résulte d'un but protéger les
exploitations moyennes d'une disparition.
Si l'intention est louable, nous avons constaté tout au
long du mémoire que le droit des procédures collectives se
prête parfois très mal aux problèmes des exploitations
agricoles.
Le statut des baux ruraux d'ordre public rend le bail rural
rigide 78, cette rigidité s'accorde mal du
droit des procédures collectives agricoles dont le but est de
libérer le débiteur d'un certain nombre de contraintes afin de se
redresser.
Ce statut souffre dans une certaine mesure d'un
vieillissement, son esprit ne correspond plus à l'époque actuel.
L'esprit qui a motivé l'introduction du droit de préemption du
preneur en est l'exemple.
Introduit afin d'accroître le faire-valoir direct des
exploitations moyennes, il est souvent peu utilisé. Les agriculteurs
concentrent majoritairement leur investissement sur l'achat de matériel
agricole. De plus, le faire-valoir direct pose des problèmes
successorales que le salaire différé ne peut résoudre.
Les résultats de ces difficultés sont
édifiantes.
78 S. Crevel, La rigidité des
contrats, RD rur., 2010, n° 384, p. 13.
Les différents acteurs (juge, avocat...) sont
obligés de contourner le statut du fermage afin de sauver les
exploitations agricoles, la pratique de versements de pas de porte de
manière détournée est un triste exemple.
La Cour de cassation face aux multiples points de frictions
entre le droit rural et le le droit des procédures collectives
interprète littéralement les textes avec comme critère
pour écarter le droit rural une disposition expresse du Code de
commerce, le principe est donc : « Un ordre public chasse l'autre
».
Elle conduit à poser des principes dont les
conséquences sont incertaines telle la conservation de la maîtrise
par le preneur en situation de liquidation judiciaire de son droit de
préemption.
La plupart des tentatives tendant à faire
évoluer les pratiques telle la validation des pas de porte des baux en
cas de plan de cession ont échoué, pourtant elles n'auraient que
légaliser des pratiques.
Les juges sont certes tenus par un droit, cependant la
jurisprudence a parfois provoqué le législateur pour changer la
loi.
L'arrêt Desmares 79 est un
exemple. La jurisprudence voulait une intervention du législateur sur la
question de la responsabilité des conducteurs d'engins terrestres
à moteur. Cet arrêt avait eu pour but de provoquer le
législateur, la Cour de cassation avait en l'espèce adopté
une position extrêmement sévère vis à vis des
conducteurs d'engins à moteur.
La loi du 5 juillet 1985 a institué un droit à
indemnisation des victimes d'accident de la circulation routière.
L'élan de la réforme est venue de la jurisprudence.
C'est donc le droit qu'il faut modifier. Il existe plusieurs
options :
- écarter purement et simplement la plupart des
dispositions du Code rural en cas de procédures collectives ;
- créer un droit des procédures collectives
agricoles autonomes ;
- modifier le statut du fermage pour glisser progressivement vers
l'entreprise agricole.
79 Cass. civ. 2e, 21 juilllet 1982 : D.
1982, p. 449, concl. Charbonnier.
Les deux premières options sont irréalistes et
contraires à l'évolution actuelle du monde agricole, la
troisième est plus cohérente et permettrait une adaptation lente
de la législation agricole au monde actuel.
La loi d'orientation agricole n° 2006-11 du 5 janvier 2006 a
apporté un début d'évolution par la création du
bail cessible et du fonds agricole.
La dernière loi d'orientation agricole n° 2010-874
en date du 27 juillet 2010 n'aborde pas ce domaine alors que suite aux
difficultés économiques rencontrées par les agriculteurs
ces deux dernières années le nombre d'exploitations agricoles en
difficultés a explosé.
Il est vrai qu'elle aborde d'autres sujets inexplorés
ou presque : règles applicables aux contrats écrits entre
producteurs et acheteurs de certains produits agricoles, assurances
agricoles...
Peut être est-ce pour la prochaine fois.
ANNEXES
EXEMPLE DE PLAN DE CESSION D'UNE EXPLOITATION
AGRICOLE
- Page 67 -
- Page 71 -
- Page 73 -
- Page 75 -
- Page 77 -
BIBLIOGRAPHIE
I. OUVRAGES GÉNÉRAUX, TRAITÉS, MANUELS,
PRÉCIS
· C. Dupeyron, J.-P Theron, J.-C Barbieri, Droit
agraire, 1re éd., 1er volume, Economica,
1985.
· A. Jacquemont, Droit des entreprises en
difficulté, 6e éd., Litec, 2009.
· D. Krajeski, Droit rural, Defrénois,
2009.
· P.-M. Le Corre, Droit et pratique des
procédures collectives, 5e éd., Dalloz, coll. Dalloz action,
2008- 2009.
· Ph. Pétel, Procédures collectives,
Dalloz, coll. Cours, 5e éd. 2006.
· F. Terré, P. Simler, Y. Lequette, Droit civil
: Les obligations, 9e édition, Dalloz, coll.
Précis Dalloz, 2005.
II. OUVRAGES SPÉCIAUX, THÈSES, MONOGRAPHIES
· M. Amary, L'incessibilité et la non
patrimonialité du bail rural, Mémoire de DEA de droit rural,
Poitiers, 1995.
· V. Brouard, Le sort du bail rural dans les
procédures collectives, Mémoire de DEA de droit rural,
Poitiers, 1996.
III. RECUEILS
· Dictionnaire permanent entreprise agricole 2009
:
- Exploitations agricoles en difficulté : feuilles
583.
· Dictionnaire permanent droit des affaires 2009
:
- Procédures collectives : feuilles 2345.
?Jurisclasseur droit rural :
- Volume 1 : Droits et obligations du preneur : Droit de
préemption : fascicule 60-70. - Volume 5 : SAFER : fascicule
30-35-40.
?Jurisclasseur procédures collectives :
- Volume 1 : Procédures collectives agricoles : fascicule
1715.
- Volume 1 : Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire
: Continuation des contrats en cours : fascicule 2335.
- Volume 1 : Redressement et liquidation judiciaire :
Nullités de droit et nullités facultatives : fascicule 2502.
- Volume 2 : Liquidation judiciaire : Réalisation de
l'actif : Réalisation immobilières en liquidation judiciaire :
fascicule 2707
- Volume 2 : Sauvegarde, redressement et liquidation judiciaire :
Plan de cession : cession des contrats : fascicule 2740.
IV. ARTICLES, CHRONIQUES, ÉTUDES ET NOTES
· J.-J. Barbiéri, Sur la survivance du droit de
préemption de la SAFER en cas de ventes résultant d'une
liquidation judiciaire, RD rur. n° 375 août-septembre 2009,
p. 43.
· J.-J. Barbiéri, Nouvelle exclusion de la SAFER
dans les procédures collectives, Dict. perm. Entreprises agricoles.
n° 431 juin 2010, p. 4.
n M. Cabrillac, Ph. Pétel, Sauvegarde, redressement et
liquidation judiciaire des entreprises, JCP E n° 14 avril 2007,
1450, p. 23.
n G. Blanc, Nullités de la période suspecte-Effets
de la nullité, Rev. proc. coll. n° 4 décembre 2004,
p. 389
n F. Colson, A. Blogowski, B. Dorin, Les exploitations agricoles
en situation difficile, RD rur. n° 220 février 1994, p.
49.
n J. Dannet, Les procédures collectives en agriculture :
des premiers débats jurisprudentiels à la loi du 10 juin 1994,
RD rur. n° 229 janvier 1995, p. 1 et RD rur n° 230
février 1995, p. 57.
n X. De Roux, Rapport au nom de la commission des lois de
l'Assemblée nationale : Doc. AN 2005, n ° 2095.
n D. Ferru, Le bail rural peut-il avoir un prix ?, RD
rur. n° 198 décembre 1991, p. 401.
n J.-A. Gravillou, Incessibilité du bail rural et droit
des procédures collectives, JCP N n° 5 30 janvier 1998, p.
173
n B. Grimonprez, La liquidation judiciaire laisse
entières les prérogatives de la SAFER, JCP N n°
2123 mai 2003, p. 1342.
N B. Grimonprez, Le dessaisissement du débiteur en
liquidation judiciaire ne s'étend pas aux prérogatives issues du
fermage, RD rur. n° 328 décembre 2004, comm. 85.
n B. Grimonprez, L'influence de l'ouverture d'une
procédure collective sur le droit de préemption du preneur en
place, JCP N n° 21 23 mai 2003, p. 821.
n J. Lachaud, Un soupçon de droit rural dans l'ordonnance
du 18 décembre 2008 portant modification des procédures
collectives, Ann. Loyers n °1 janvier 2009, p. 84.
N E. Lemonnier, Le droit commercial frappé de
ruralité, RD rur. n° 309 janvier 2003, p. 319.
n T. Nansot, Le prix d'un terrain agricole sous bail rural,
Et. fonc., n° 92, Juillet-août 2001, p. 13.
n M.A. Rakotovahiny, La singularité du droit de
préemption de la SAFER dans le cadre d'une liquidation judiciaire,
JCP N n° 17 25 avril 2003, p. 661.
N C. Rollot, Le Monde, 2 mars 2010.
n Ph. Roussel Galle, Les « nouveaux »régimes
des contrats en cours et du bail, Rev. proc. coll. janvier 2009, p.
55.
n C. Saint-Alary-Houin, L'ouverture de la procédure de
sauvegarde, Rev. proc. coll. Avril-mai-juin 2008, p. 85.
n F. Vauvillé, Faut-il purger les droits de
préemption en cas de procédure collective ?, JCP N
n° 46 12 novembre 2004, p. 1551.
V. PRINCIPAUX ARRÊTS
n
Cass. com., 21 janvier 1974
(conséquence du dessaisissement du preneur en liquidation judiciaire
dans l'exercice de son droit de préemption, note 66).
n
Cass. com, 26 juin 1990 (faculté du
tribunal d'arrêter un plan de cession n'apurant que partiellement le
passif, note 48).
n Cass. civ. 3°, 7 novembre 1990 (effet de l'existence d'un
bail rural sur la valeur d'un bien immobilier vendu, note 35).
n
Cass. com 28 avril 1998 (sur
l'appréciation du caractère essentiel du droit au bail rural dans
une exploitation agricole, note 56).
n
Cass. com 9 juin 1998 (application de
l'article L. 642-1 al. 3 du Code de commerce en présence de plusieurs
bailleurs, note 58).
·
Cass. com., 15 octobre 2002 (sur le sort
du droit de préemption de la SAFER en cas de réalisation des
actifs en ordre dispersé, note 72).
· Cass. civ. 3°, 5 février 2003 (sur le sort du
droit de préemption du preneur en cas de réalisation des actifs
en ordre dispersé, note 63).
· Cass. civ. 3°, 22 octobre 2003 (sur l'exigence de la
démonstration d'une contrainte exercée dans le cadre du versement
d'un pas de porte, note 60).
·
Cass. com., 28 janvier 2004
(conséquence de la nullité du contrat passé en
période suspecte, note 22).
·
Cass. Com., 30 juin 2004 (effet de
l'annulation du contrat de vente passé en période suspecte sur
les cessions ultérieures, note 27).
· CA Bordeaux ch. soc., 26 septembre 2006 (effet du
jugement d'ouverture sur l'action en résiliation du bail rural, note
28).
· Cass. civ. 3°, 10 juin 2009 (droit de
préemption de la SAFER et droit des parents du débiteurs en
liquidation judiciaire, note 77).
· Cass. civ. 3°, 19 mai 2010 (droit de
préemption de la SAFER et liberté des juges du fond dans la
décision d'arrêter un plan de cession , note 73).
TABLE DES MATIÈRES
SOMMAIRE 5
LISTE DES ABRÉVIATIONS 7
PREMIÈRE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION
AU PREMIER TEMPS DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE
15
A. LE SORT DES DROIT DE PRÉEMPTION AU DÉBUT
DE LA PROCÉDURE COLLECTIVE AGRICOLE 17
1. Rappel des règles déterminant
l'ouverture d'une procédure collective
en matière agricole et de leurs effets
17
a. L'état de l'entreprise agricole : la notion de
difficultés avérées ou prévisibles de cessation des
paiements 17
b. L'entreprise agricole dans les procédures collectives,
rappel des principales règles gouvernant la procédure 20
c. Les effets de l'ouverture d'une procédure collective
21
2. Les effets du jugement d'ouverture sur les droits de
préemption
dans le domaine agricole 23
a. Le sort des droits de préemption ruraux pendant la
période suspecte 23
b. Le sort des droits de préemption ruraux pendant la
période d'observation 28
B. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX DANS
LES PLANS DE SAUVEGARDE
ET DE LIQUIDATION JUDICIAIRE 34
SECONDE PARTIE.
LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION
RURAUX EN CAS DE DISPARITION TOTALE OU
PARTIELLE
DE L'EXPLOITATION AGRICOLE 37
A. LES PRINCIPAUX EFFETS DU JUGEMENT OUVRANT UNE
PROCÉDURE
DE LIQUIDATION JUDICIAIRE 38
1. La nomination d'un liquidateur judiciaire
39
2. Le dessaisissement du débiteur de ses pouvoirs
39
B. LE PLAN DE CESSION, UN OBSTACLE À L'EXERCICE
DES DROITS DE PRÉEMPTION
EN MATIÈRE AGRICOLE ? 40
1. Le plan de cession 40
a. Un rôle renouvelé par la loi du 26 juillet 2005
40
b. Une procédure complexe 41
2. Le sort des droits de préemption ruraux en cas
de plan de cession 42
a. Une solution ancienne pour le droit de préemption de
la SAFER 42
b. Le rôle décisif de l'ordonnance du 18
décembre 2008 sur la question du droit de préemption du preneur
43
3. Le sort du bail rural dans le plan de cession
44
a. Les effets de la liquidation judiciaire sur le bail rural
44
b. La cession du bail rural dans le cadre d'un plan de cession
46
b. La question de la cession à titre onéreuse du
bail rural 50
C. LE SORT DES DROITS DE PRÉEMPTION RURAUX EN CAS
DE CESSION DES ACTIFS
EN ORDRE DISPERSÉ 52
1. Les règles relatives à la
réalisation des actifs isolés 52
2. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption du preneur 53
a. L'exercice du droit de préemption du preneur en cas de
liquidation judiciaire 53
b. La confrontation entre le principe du dessaisissement du
débiteur en liquidation judiciaire et du droit de préemption
55
3. La cession des actifs isolés et le droit de
préemption de la SAFER 58
a. Une identité des solutions avec le droit de
préemption du preneur 58
b. La liquidation judiciaire, un contexte potentiellement
très favorable à l'exercice du droit de préemption par la
SAFER 59
CONCLUSION 62
ANNEXES
EXEMPLE DE PLAN DE CESSION D'UNE EXPLOITATION AGRICOLE
66
BIBLIOGRAPHIE 79
TABLE DES MATIÈRES 83
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