INTRODUCTION
1. La présence de l'Internet dans tous
les secteurs de la vie moderne est indéniable. Il se
révèle être un média qu'il est désormais
impossible d'ignorer. Internet1(*) est prisé aussi bien par le surfeur2(*) en quête
d'informations nouvelles sur le réseau3(*) que par des partenaires à l'occasion d'une
transaction internationale, en passant par le client qui désire des
produits de consommation dans un supermarché.
2. Nul n'a besoin d'être
convaincu ; le développement exponentiel de l'Internet est en train
de changer tant les habitudes et les réflexes de communication que
l'organisation des échanges commerciaux. A l'heure actuelle, rares sont
les entreprises acceptant encore de se priver de cette
opportunité4(*).
3. Internet semble être le phare qui
assurera la croissance économique des prochaines années. Son
développement outre atlantique dope les cours du Nasdaq5(*) et fait rêver bien
des hommes d'affaire lorsqu'ils regardent les cours boursiers des valeurs
Internet comme Yahoo ! ou Amazon. Tandis que le
continent européen s'éveille peu à peu à cette
nouvelle vague, et découvre avec un mélange de plaisir et
d'angoisse l'Internet6(*),
notre continent semble peu préoccuper par le phénomène,
malgré sa présence dans notre quotidien.
4. Objet de l'étude. L'étude
que nous entreprenons est consacrée à un aspect, à une des
multitudes questions auxquelles donne lieu le phénomène de
l'Internet: celle de la preuve d'une obligation contractuelle sur le
réseau Internet, plus spécifiquement la preuve du contrat de
vente en ligne.
5. La preuve sur Internet, est une question
qui appelle une réflexion approfondie de la part des juristes. Pour
notre part, nous avons décidé de contribuer à la
réflexion, en nous limitant, cependant, à la vente. La vente a
été choisie comme objet d'étude, parce qu'Internet est
pour elle un terrain fertile. « Ceux qui ont des biens à
vendre n'ont jamais eu un aussi grand bassin de clients potentiels ni un moyen
aussi efficace de les atteindre, et ces derniers n'ont jamais eu, et de
façon si accessible, tant de choix »7(*). Du point de vue juridique, elle
présente également un attrait. En effet, « c'est
dans la vente que l'homme sent aujourd'hui le plus intensément l'acte de
contracter »8(*).
6. Appréhension des termes du sujet.
Avant d'aller plus loin, il nous paraît utile d'apporter quelques
précisions d'ordre terminologique. Comme souvent, il faut s'entendre sur
les mots, les expressions. Il importe, en effet, de préciser les
concepts d'Internet, de preuve et de vente en
ligne.
7. Approche historique de l'Internet. Le
réseau que l'on connaît aujourd'hui sous le nom d'Internet est
né à la fin des années soixante aux États-Unis sous
l'impulsion du Département américain de la défense9(*). L'Internet est avant tout un
produit de la guerre froide. A ses origines, il y eut l'ARPANET10(*) .
8. L'objectif du réseau ARPANET
était d'assurer les échanges d'informations électroniques
entre les centres névralgiques américains dans le contexte de la
guerre froide. Le but de la démarche initiale était de mettre en
place un nouveau moyen de communication informatisé, capable de
fonctionner dans l'éventualité d'une destruction d'une de ses
mailles11(*).
9. L'idée était de relier entre
eux de multiples réseaux12(*) de telle façon qu'en cas de destruction d'un
site ou d'une ligne de connexion, notamment en cas d'attaque nucléaire
soviétique, les messages puissent parvenir à leur destinataire en
empruntant des itinéraires alternatifs.
10. Ainsi, si une portion du réseau
venait à être détruite, la pérennité du
réseau global n'était pas remise en cause. L'ARPANET ne disposait
alors que du courrier électronique. En 1973, un ingénieur
informatique du projet ARPANET, du nom de Bob KAHN crée, en
collaboration avec Vinton CERF, chercheur à Stanford, un nouveau
« protocole informatique »13(*) capable de transmettre des
paquets d'informations afin d'assurer une réception optimale des
données entre ordinateurs, quelles que soient les éventuelles
perturbations radio. Dans les faits, deux protocoles seront
créés, prenant le nom de TCP/IP14(*). Ils sont l'âme de
l'Internet, car ils permettent de relier des réseaux entre eux.
11. Naissance de l'Internet. Ce n'est
pourtant qu'en 1980 que le réseau planétaire ouvert15(*) nommé Internet
voit le jour. Il tire son nom d'une interconnexion à un réseau
déjà existant16(*). Nul ne peut désormais ignorer le
phénomène de l'Internet. A l'heure où l'Internet
connaît un développement foudroyant, il est sans doute
intéressant de prendre la mesure du phénomène et des
changements qu'il génère.
12. La mondialisation ou la globalisation des
échanges internationaux caractéristiques de ces dernières
années, conduit toutes les grandes firmes internationales à
utiliser l'Internet pour promouvoir leur image et vendre leurs
produits17(*).
13. La sécurisation des
échanges et la reconnaissance de la valeur juridique d'une transaction
sur l'Internet font parties des principaux objectifs poursuivis dès le
lancement de ce nouveau monde virtuel.
14. Importance de la preuve. Le régime
juridique de la preuve est au coeur des débats puisqu'il doit permettre
d'assurer la sécurité juridique18(*) des transactions. En effet, le droit de la preuve
permet d'asseoir les contrats en assurant leur application. La preuve des
transactions est un élément essentiel pour le
développement du commerce électronique dans un cadre juridique
sûr.
15. Un adage ancien, à propos de la
preuve, pose le postulat suivant : « idem est non esse aut
non probari »19(*). En d'autres termes, celui qui ne parvient pas
à faire la preuve de l'existence d'un droit dont il est titulaire est
dans la même situation juridique que s'il n'avait pas ce droit20(*). Il est clair que ne pas
être en mesure de prouver l'existence de son droit en cas de
contestation, équivaut, en fait, à n'avoir pas le droit
contesté puisque l'obstacle de la preuve empêche son exercice.
Pour reprendre la formule d'IHERING21(*), « La preuve est la rançon des
droits »22(*). Si la preuve est le reflet de l'existence de
droits et de situations juridiques, sa finalité, comme l'enseignait
PLANIOL, est de convaincre le juge23(*). En ce sens, la preuve est une pierre essentielle du
fonctionnement de la plupart des systèmes juridiques, notamment ceux de
tradition romano-germanique24(*).
16. En droit, « la preuve est
la clé du succès, c'est en tout cas la clé du
procès »25(*). Le système probatoire permet de
délivrer au droit son « certificat de vie
juridique »26(*). Le rôle de la preuve est si
prépondérant qu'elle a été pendant longtemps
considérée comme confondue au droit allégué
lui-même, en devenant le critère27(*). Prouver, c'est démontrer qu'une chose est
vraie, sinon la faire apparaître comme vraie28(*), du moins comme probable.
17. Hégémonie de
l'écrit. Les modes probatoires révèlent
l'existence du témoignage, du serment, de la présomption, de
l'aveu et de l'écrit29(*). Le dernier procédé de preuve a connu
jusqu'alors une singulière fortune fondée sur la grande vertu
sécuritaire qu'on lui attribue. Son hégémonie sur les
autres modes de preuve est si accusée que dans l'ancien droit romain, il
avait été élevé au rang de summa probatio,
place qu'il occupe encore dans le droit contemporain. Il sera
intéressant de voir comment l'écrit traditionnel, ainsi que les
autres modes de preuve s'appliqueront à la vente en ligne.
18. Approche envisagée. De ce point de
vue, notre étude ne s'alignera pas sur la présentation classique
attachée à l'examen des règles de preuve en droit. Notre
prétention n'est nullement ici de refaire tout le droit de la preuve,
encore moins, en quelques pages, d'écrire un droit de la vente en ligne.
Il ne s'agira donc pas, en ce qui nous concerne, de refaire l'étude
traditionnelle sur le sujet, se rapportant notamment aux questions d'objet de
la preuve, des divers modes de preuve, ainsi que de la charge de la
preuve30(*). Il serait
superfétatoire de reprendre des démonstrations depuis longtemps
acquises. Bien sûr, ces aspects ne seront pas éludés; mais
notre approche sera principalement de voir comment le droit positif
appréhende la question de la preuve dans la logique d'une vente en
ligne.
19. Notre société entre
progressivement dans l'air de l'immatériel. Les nouvelles technologies
de l'information et de la communication, marquées par l'échange
de données dématérialisées ou
immatérielles31(*),
tissent leur toile dans tous les domaines d'activités. Les
échanges contractuels n'y échappent pas. L'Internet qui semble
être la locomotive de ces nouvelles technologies, est l'espace qui
s'offre le plus souvent à ces échanges contractuels. La
manifestation la plus caractéristique de ces échanges est le
commerce électronique32(*) dont la vente en ligne constitue une des
modalités.
20. Le commerce électronique et la vente en
ligne. Le commerce sur Internet est devenu aujourd'hui possible. La
vente électronique, notamment sur Internet recouvre deux
modalités d'exercice de l'activité commerciale. Dans la
première, le commerçant utilise le réseau uniquement pour
promouvoir un bien ou un service, présenter des offres commerciales et
recevoir des commandes : le contrat est ainsi conclu
électroniquement, mais le bien ou le service est fourni par un autre
moyen, la livraison du bien s'effectuant par voie postale ou tout autre mode de
transport et le service étant réalisé en dehors du
réseau33(*). Le
contrat est, en définitive, conclu sur Internet, mais la livraison du
bien n'emprunte pas la même voie, autrement dit, elle s'effectue par des
moyens autres que le réseau.
21. Dans la seconde modalité, le
commerçant assure en outre la fourniture des biens et services
commandés au moyen du réseau : c'est ainsi que, par exemple,
le logiciel commandé sera téléchargé ou que les
informations d'une banque de données seront transmises par le
réseau. Par conséquent, c'est non seulement la conclusion du
contrat, mais encore son exécution qui revêtent une forme
électronique. On utilise alors le vocable de « vente en
ligne » qui constitue, de nos jours, la forme techniquement la
plus avancée de la vente à distance. La vente dite
« en ligne », qui désigne la fourniture des
biens et services commandés sur le réseau implique donc que la
conclusion du contrat de vente mais aussi son exécution34(*) revêtent une forme
électronique. Néanmoins, la pratique parle de
« vente en ligne », que le bien soit
délivré sur le réseau ou hors réseau, dès
lors que le contrat est conclu sur cet espace virtuel.
22. Modalité classique de la formation du
contrat. Traditionnellement, le contrat de vente est conclu entre deux
personnes qui se rencontrent physiquement pour échanger leurs
consentements. Un « d'accord »,
« ça marche » ou un
« ok », un stylo, une signature apposée au
pied d'une feuille de papier et une poignée de mains sont les mots et
les gestes qui scellent couramment l'entente.
23. Lorsque les contractants sont en
présence l'un de l'autre, l'échange des paroles et des gestes
traduisant le consentement a lieu simultanément et sur-le-champ. Le
contrat naît ainsi de façon instantanée. Dans cette
hypothèse de contrat entre personnes présentes, l'offre et
l'acceptation s'opèrent simultanément. La règle de la
simultanéité prévaudra toujours dès lors que les
contractants seront face-à-face physiquement.
24. Hypothèse des contrats entre personnes
éloignées. Mais cette règle sera prise en
défaut toutes les fois que les contractants seront
séparés. L'offre et l'acceptation ne peuvent se réaliser
simultanément en pareille hypothèse. Ainsi, dans cette
hypothèse de contrat par correspondance, autrement dit entre personnes
séparées géographiquement, les consentements, au lieu
d'être concomitants, seront nécessairement successifs. Se poseront
alors les problèmes de détermination du moment et du lieu de
conclusion du contrat.
25. En effet, le consentement exprimé
par l'acheteur, si l'on se trouve dans le contrat de vente, ne sera pas
reçu instantanément par le vendeur. L'acceptation émise
par l'acheteur ne parviendra pas immédiatement à la connaissance
du vendeur. D'où il suit que des difficultés
s'élèveront relativement à la détermination du
moment précis de la rencontre des volontés. La doctrine et la
jurisprudence se sont déjà prononcées sur cette
question35(*).
26. La vente en ligne : contrat entre personnes
éloignées. La matière des contrats entre
personnes éloignées intègre la vente en ligne36(*). Aujourd'hui, les
échanges contractuels entre personnes séparées ont
abandonné les voies traditionnelles qu'ils empruntaient alors. On a
quitté le domaine traditionnel d'envoi de courriers postaux pour celui
plus moderne d'échanges via Internet. Désormais, nombreux sont
ceux qui utilisent le cyberespace37(*) pour réaliser des affaires, pour conclure des
contrats.
27. La vente en ligne est de ces contrats
conclus sur l'Internet. Ceux-ci sont passés entre des personnes qui ne
se rencontrent pas physiquement au moment de l'échange des
consentements. De fait la vente en ligne relève ainsi des contrats par
correspondance.
28. Particularités de la vente en
ligne. Certes, les contrats en ligne se réalisent par des
personnes séparées géographiquement, à l'instar des
contrats par correspondance. Cependant, les contrats en ligne ne doivent pas
être totalement confondus avec ces derniers.
29. En effet, à la différence
de ces contrats où les contractants échangent habituellement par
des courriers postaux, les contrats en ligne se caractérisent par la
dématérialisation des opérations. Les consentements
s'effectuent dans un univers virtuel, impalpable.
30. En outre, alors que dans les contrats
classiques entre personnes éloignées, l'offre et l'acceptation ne
sont pas concomitantes, mais successives, il en va différemment dans les
contrats en ligne. Dans ceux-ci, les échanges de volontés sont
quasi simultanés. Dans le cas de la vente en ligne, le vendeur
reçoit l'acceptation de l'acheteur, sur son site marchand, dès
que celui-ci envoie sa réponse d'acceptation.
L'interpénétration entre l'offre et l'acceptation conduisant
à la conclusion du contrat, donc à son existence, se fait
concomitamment.
31. Mais les opérations, se
réalisant dans un espace virtuel, totalement
dématérialisé, des problèmes de preuve desdites
opérations vont nécessairement se poser. Ainsi, du fait de
l'éloignement des parties à la vente, la préconstitution
de la preuve doit être contrôlée puisque l'acte où le
document associé à la convention n'est plus échangé
de la main à la main. Comment démontrer l'existence d'un contrat
conclu dans un tel environnement ?
32. Préoccupations nouvelles. La
structure du réseau entraîne des questions nouvelles auxquelles
des réponses ont dû être, ou restent à trouver. Deux
aspects attirent particulièrement l'attention du juriste : sa
dimension mondiale d'une part, ce qui multipliera, au moins potentiellement,
dans bien des cas, le nombre des juges susceptibles d'être saisis ainsi
que la loi applicable38(*) ; le fait qu'il s'agit d'un univers largement
immatériel d'autre part, ce qui, bouleverse les formes traditionnelles
de preuve et pourra, par exemple, entraîner des incertitudes quant
à la réalité d'un fait ou d'un acte juridique
procédant de l'utilisation du réseau.
33. Une révolution technologique
doit-elle entraîner une révolution juridique ? Les
règles traditionnelles de preuve appliquées aux relations
contractuelles classiques sont-elles adaptées aux litiges
résultant d'une vente en ligne ?
34. Intérêt de l'étude.
La question de la preuve de la vente en ligne revêt une importance
indéniable. En effet, les règles de preuve du droit positif ont
été conçues pour des relations physiques. Aujourd'hui
où l'on assiste à une dématérialisation croissante
de ces relations dans le cadre d'opérations virtuelles, la question de
la preuve se pose avec une acuité particulière.
35. Or ni la doctrine,39(*) ni la jurisprudence ivoirienne
ne se sont encore saisies de la question. L'intérêt de l'envisager
est donc évident au moment où un nombre sans cesse croissant de
particuliers et de professionnels empruntent quotidiennement les autoroutes de
l'information et que se multiplient dans la presse économique des titres
tels que : « Commerce électronique : la
révolution à laquelle vous n'échapperez
pas ! »40(*).
36. Le commerce électronique, du moins
la vente en ligne est une réalité et est appelée à
se développer. Pour doper les opérations commerciales sur le
réseau, un cadre juridique sûr est nécessaire. La
résolution des questions de preuve participe de cette
sécurité juridique.
37. Dans le contexte électronique, les
contrats de vente de biens matériels, de services et de licences
d'utilisation41(*) peuvent
faire l'objet d'une preuve dans une instance. De plus, à cause des
questions de sécurité inhérentes au droit, la
sécurité informatique est devenue essentielle et a
opéré des changements importants, notamment en ce qui a trait au
régime de la preuve.
38. Un contrat transfrontalier. Par ailleurs,
la vente en ligne se laisse saisir comme un contrat transfrontalier42(*). Or qui dit, contrat
transfrontalier, dit plusieurs lois applicables possibles. En effet, quand vous
effectuez un achat auprès d'une entreprise située dans un pays
autre que le vôtre, vous concluez indéniablement un contrat
transfrontalier. Un tel contrat peut être conclu à l'occasion d'un
séjour à l'étranger. Mais, parfois, sans même vous
en rendre compte, vous concluez un tel contrat lorsque vous effectuez votre
achat sur Internet43(*).
L'aspect transfrontalier suppose ainsi un lien entre deux parties
établies dans des pays différents.
40. Ce faisant la convention est susceptible
d'être soumises à l'application de deux législations au
moins : celle du pays de l'acheteur ou celle du pays du vendeur. Sous ce
rapport, un intérêt s'attache à la découverte de la
loi applicable à cette convention. Mais s'agissant de la preuve de la
vente, il conviendra de voir comment le droit international privé va
appréhender cette question dans le domaine plus spécifique du
conflit de lois.
41. La vente en ligne est avant tout un
contrat classique. Les règles classiques de preuve ont ainsi vocation
à s'appliquer. Cependant, du fait du support de la transaction, à
savoir l'Internet caractérisé par sa
dématérialisation, influençant les transactions
passées en ligne, elle présente des spécificités.
La vente en ligne comporte des avantages en ceci qu'Internet est un outil de
communication mondial qui transcende les frontières et tout site
web, une fois créé, est immédiatement
planétaire. Les transactions deviennent également mondiales. Des
entreprises de toutes tailles commercent plus souvent et plus directement avec
des fournisseurs et des clients établis à l'étranger.
42. Problèmes soulevés par
l'opération. A côté de ces avantages, à
l'instar de tout contrat entre personnes éloignées, la vente en
ligne pose plusieurs problèmes. Il s'agit de l'existence des
risques44(*)
évidents liés :
- aux paiements : la relation Internet est par nature
rapide et il peut être difficile d'accepter une commande ou un paiement
sans avoir pu vérifier au préalable la solidité
financière du client ;
- au règlement des différends: notamment
à la détermination de la juridiction compétente pour
connaître du litige qui naîtrait dans l'exécution du
contrat ;
- à la loi applicable: dans l'hypothèse
où les parties ne désignent pas la loi applicable à leur
contrat, cela peut engendrer quelques difficultés en raison de
l'immatérialité d'Internet ;
- à la preuve: dans la mesure où Internet est
caractérisé par la dématérialisation des
opérations.
43. Problématique. L'objet de notre
étude consistera en l'examen de la question se rapportant à la
preuve, et se résume dans les interrogations suivantes :
- Les règles traditionnelles de preuve de notre droit
positif sont-elles adaptées pour faire la preuve des opérations
de vente sur Internet ? Autrement dit, les règles actuelles de
preuve sont-elles de nature à soutenir juridiquement la vente en
ligne ?
- Au regard de la dimension quasi-internationale de la vente
en ligne, quelle devra être la loi applicable à sa
preuve ?
44. Démarche. Pour élucider ces
différentes questions, notre étude s'appuiera sur l'examen des
textes de droit commun relatifs à la preuve. Nous ouvrirons
également des perspectives de droit comparé par l'examen de
textes étrangers.
45. Constat de l'absence de
dispositions spéciales. A l'examen, l'on s'aperçoit
très vite que notre droit positif reste encore attaché aux modes
classiques ou traditionnels de preuve. Le droit ivoirien peine à
anticiper, à englober et surtout à intégrer les
phénomènes qui agitent le monde virtuel. En Côte d'Ivoire,
comme dans de nombreux pays du continent africain, il n'existe pas encore de
législation régissant spécialement la vente en ligne. On a
recours aux dispositions du droit commun. De même, dans l'espace plus
large de l'OHADA45(*),
aucune disposition spécifique ne régit cette modalité de
la vente. La raison de cette situation se trouve dans le fait que le commerce
en ligne n'est pas développé en Afrique. Mais il faut croire que
cet état de fait ne saurait rester en l'état très
longtemps, du fait que l'économie africaine, extravertie,
intégrera la vente en ligne qui connaît un essor en Occident.
46. Prise en compte de la
spécificité de la relation en droit comparé. En
Europe et en Amérique du nord, des procédés nouveaux de
preuve sont proposés pour répondre aux exigences du commerce
électronique, spécialement de la vente sur Internet.
47. Loi type des Nations Unies. Parce que le
statut incertain des actes et documents dématérialisés se
devait d'être clarifié, la Commission des Nations Unies pour le
Droit Commercial International (CNUDCI) a adopté en 1996 une Loi type
sur le commerce électronique46(*) qui encourage la reconnaissance juridique des outils
du commerce électronique. Cette Loi type connaît un large
succès dans la mesure où elle a servi de modèle dans la
grande majorité des États qui entendaient apporter une
réponse aux problèmes juridiques du commerce électronique,
spécialement aux questions de preuve, d'écrit et de signature
électroniques47(*).
48. Directive européenne sur les signatures
électroniques. La Directive européenne du 12
décembre 1999 sur les signatures électroniques48(*) va alors marquer une
avancée significative dans la mesure où elle va reconnaître
en son article 549(*)
l'admissibilité de la signature électronique. Le but de cette
Directive était de promouvoir la sécurisation des transactions
sur les réseaux numériques. Pour ce faire, elle attribue un
minimum d'effet juridique aux signatures électroniques, et assure la
libre circulation des produits et services.
49. Loi française portant adaptation du droit
de la preuve. La loi du 13 mars 200050(*) est, pour sa part, venue modifier le droit
français relatif à la preuve. Désormais, le droit
reconnaît, l'équivalence du support papier et du support
électronique dès lors qu'un certain nombre de conditions sont
respectées51(*).
50. Lois uniformes
canadiennes. De même, le Canada, par la Conférence
d'harmonisation des lois52(*), adoptait deux lois inspirées de la Loi type
de la CNUDCI : la Loi uniforme sur le commerce électronique et la
Loi uniforme sur la preuve électronique53(*) qui confirmait que l'information électronique
était présentable en preuve.
51. Commercialité de la vente. La
vente en ligne peut être civile ou commerciale. Dans cette
hypothèse, elle fera intervenir des personnes non commerçantes.
Mais, elle sera, dans la plupart des cas, une opération commerciale. En
effet, s'il n'est pas exclu qu'un particulier, occasionnellement, propose sur
le réseau, la vente d'un produit, il est évident que la
majorité des sites de vente de produits en ligne sont le fait de
professionnels du commerce. Eu égard à cette donnée, notre
étude, loin d'écarter entièrement l'analyse des
règles de preuve relevant du droit civil, privilégie cependant
l'examen du régime de la preuve en droit commercial, régime dit
de la « liberté de la preuve »54(*).
52. Plan. Ceci dit, dans la perspective de
répondre aux préoccupations formulées plus haut, nous
envisagerons, dans un premier temps, la vente en ligne et la preuve au regard
du droit interne (Ire partie), avant d'examiner, dans un second
moment, la vente en ligne et la preuve en droit international privé
(IIème partie).
Ire partie : La vente en ligne et la
preuve en droit interne
IIème partie : La vente en
ligne et la preuve en droit international privé
Ière PARTIE :
LA VENTE EN LIGNE ET LA PREUVE EN DROIT INTERNE
53. Présentation. Le droit de la
preuve, en Côte d'Ivoire, repose essentiellement sur des dispositions
logées dans le Code civil. Celles-ci constituent le droit commun de la
preuve. A côté de ce droit commun, existent des règles
dérogatoires. Ainsi, le droit commercial notamment, énonce des
règles qui s'écartent des principes dégagés par le
Code civil. L'ensemble de ces règles a vocation à régir
les relations contractuelles qui se nouent entre les personnes.
54. L'avènement de l'Internet a
transformé notre façon d'échanger, de communiquer.
Aujourd'hui, les relations humaines sont de plus en plus
caractérisées par l'immatériel, le virtuel. Les
échanges à distance via l'Internet ont donné naissance
à la vente en ligne. Les internautes concluent des contrats de vente sur
le réseau sans presque jamais se rencontrer. L'exécution des
obligations résultant de la vente se réalise également en
ligne. Devant cette modalité particulière de conclure un contrat
de vente, et en cas de litige se rapportant à l'opération, les
parties devront, pour la preuve de leur relation, se reporter aux dispositions
classiques du droit de la preuve, puisque aucune disposition spécifique
n'a été prévue, se rattachant à la
particularité de ce mode nouveau de conclusion du contrat. Cette absence
de mécanismes spécifiques applicables à la
particularité de l'échange, offre de constater l'inadaptation des
règles classiques de preuve à la vente en ligne (chapitre I). Ce
constat conduit nécessairement à envisager des pistes de
solutions, à ouvrir des perspectives nouvelles (chapitre II) pour tenir
compte des impératifs qu'impose la spécificité de
l'opération.
CHAPITRE I : L'INADAPTATION DU DROIT POSITIF DE LA
PREUVE
A LA VENTE EN LIGNE
55. Le développement du commerce
électronique requiert un cadre juridique sûr, susceptible de
créer un climat de confiance entre les parties impliquées. La
preuve des transactions, quant à leur existence, leur contenu et
l'identité des contractants en est un élément majeur. Or,
notre droit de la preuve dont les dispositions essentielles remontent à
l'époque de la rédaction du Code civil, n'est plus en mesure
aujourd'hui de répondre pleinement aux exigences résultant des
particularités de ce nouveau mode d'échange marchand.
56. En effet, les normes actuelles du droit
positif ivoirien de la preuve ne sont guère au diapason de la
réalité électronique contemporaine. Les règles
traditionnelles élaborées pour être appliquées dans
un environnement papier auront, sans aucun doute, du mal à régir
la vente en ligne, qui s'opère à distance sans support
papier55(*). En
vérité, les dispositions du droit positif de la preuve se
révèlent parfaitement inadaptées. L'examen des moyens de
preuve dits «parfaits» (section 1) ainsi que celui des moyens
«imparfaits» de preuve (section 2) permettront de s'en convaincre.
SECTION 1 : L'INADAPTATION AU REGARD DES MOYENS DE
PREUVE «PARFAITS»
57. Les preuves dites «parfaites»
renvoient à des preuves auxquelles on attache traditionnellement, pour
diverses raisons, une autorité particulière dans
l'établissement de la réalité d'une allégation. Ces
modes de preuve sont au nombre de trois. Il s'agit de l'écrit, de l'aveu
et du serment. Mais on peut les ramener à deux catégories :
on les synthétise ainsi en preuves écrites (I) et en preuves non
écrites (II).
I : Les preuves littérales
58. Prééminence de
l'écrit. L'Ordonnance de Moulins de 1566 a
conféré à la preuve par écrit une
prééminence qu'elle n'avait pas auparavant56(*). Réaffirmée par
l'Ordonnance de 1667 sur la procédure civile, la règle de la
preuve écrite des actes juridiques est inscrite dans l'article 1341 du
Code civil57(*). En effet,
« il doit être passé acte devant notaire ou sous
signatures privées de toutes choses excédant la somme ou la
valeur de 500 francs ». Chacun s'accorde à
reconnaître que ce texte pose une double règle de preuve. D'une
part, « il doit être passé acte devant notaire ou
sous signatures privées de toutes choses excédant la somme ou la
valeur de 500 francs » ; il est entendu que cet acte
instrumentaire fera la preuve de l'existence et du contenu de l'acte juridique.
59. D'autre part, « il n'est
reçu aucune preuve par témoins contre et outre58(*) le contenu aux actes, ni sur
ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou
depuis les actes (...) ». Autrement dit, à supposer que,
suivant la prescription de la loi, un acte écrit ait été
établi, la preuve contraire (ou la preuve d'une modification
apportée à l'acte) ne pourra être faite par témoins,
présomptions ou indices, mais par écrit.
60. La défense de rapporter la preuve
par témoins ou par présomptions énoncée à
l'article 1341, n'a de portée véritable qu'en droit civil
où règne le régime de la preuve légale.
61. Liberté de preuve. Dans un
régime de preuve légale, la règle de l'article 1341 du
Code civil s'analyse comme une obligation faite aux parties à un acte
juridique de rédiger un écrit destiné à servir de
preuve. Une telle obligation imposée aux parties à un acte
juridique ne vaut pas dans un système de liberté de preuve. Dans
ce dernier système, tous les modes de preuves reconnus par la loi sont
recevables. Et le juge ne peut, a priori les écarter59(*).
62. Ainsi, même si les parties ont
rédigé un écrit, les autres moyens de preuve sont
également admissibles. C'est ce régime qui prévaut en
droit commercial, où la preuve des actes de commerce, des
opérations commerciales est libre60(*). A cet égard, l'article 5 de l'acte
uniforme61(*) portant
droit commercial général dispose : « Les actes
de commerce peuvent se prouver par tous moyens à l'égard des
commerçants ». La vente qui sera, dans l'immense
majorité des cas, une opération commerciale est soumise à
ce régime.
63. Sous ce rapport, les parties à la
vente peuvent rédiger ou faire rédiger un écrit inscrit
sur support papier (A). Certes, la possibilité existe, mais force est de
constater que cette option s'avère inadaptée dans le contexte de
la vente en ligne (B). Les écrits instrumentaires conçus dans un
contexte de passation de contrats classiques, sont-ils en mesures de satisfaire
les exigences d'un contrat conclu dans un environnement virtuel comme c'est le
cas pour la vente en ligne ? Il est permis d'en douter.
A- Les écrits sur support papier
64. Les parties, si elles décident de
préconstituer la preuve de leur opération, autrement dit de
rédiger un écrit valant preuve, auront soit la
possibilité de formaliser leur convention dans un acte authentique (1),
soit de l'inscrire dans un acte sous-seing privé (2).
1- L'acte authentique
65. Aux termes de l'article 1317 du Code
civil, « l'acte authentique est celui qui a été
reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter dans le lieu
où l'acte a été rédigé, et avec les
solennitéS requises. »
66. L'acte authentique est donc celui
dressé par un officier public62(*) compétent, dans les formes légalement
requises. A titre d'exemple, on peut citer, comme actes authentiques63(*), les actes de l'état
civil et les actes notariés. Ces actes sont soumis à des
conditions de validité. Celles-ci tiennent à la compétence
de l'officier public, et à la forme des actes. Les parties à la
vente, si elles veulent s'assurer de la valeur de leur acte du point de vue de
la preuve, devront tenir compte de ces conditions.
67. Compétence. La compétence
de l'officier public se dédouble en une compétence d'attribution
et en une compétence territoriale. On parle de compétence
d'attribution lorsque l'exercice de la fonction d'authentification est
réservé à l'officier public désigné par la
loi. Il en est ainsi des notaires pour tous les actes et conventions auxquels
les parties veulent donner le caractère d'authenticité
attaché aux actes de l'autorité publique. La compétence
territoriale s'exprime dans l'idée que l'officier public ne peut
prêter son ministère que dans le ressort où il est admis
à exercer ses fonctions64(*).
68. Forme. Pour ce qui se rattache à
la forme de l'acte authentique, il faut noter que les actes notariés
doivent être rédigés en français, soumis aux
formalités de timbre et de l'enregistrement. Ils doivent être
rédigés en un seul contexte, sans blanc ni interligne. Ils
doivent être signés par le notaire et les parties.
69. Les règles de compétence et
de forme précédemment énoncées, si elles sont
méconnues, entraînent la nullité de l'acte seul en tant
qu'acte authentique, cependant valable en tant qu'acte sous seing privé
s'il porte les signatures des parties65(*).
70. Force probante et force
exécutoire. Les actes authentiques doivent être
présentés en original et copies pour être dotés de
la force probante. L'original encore appelé minute, comportant les
signatures de l'officier public et des parties, demeure entre les mains de
l'officier public, celui-ci ne pouvant s'en dessaisir. Des copies -
expéditions - peuvent être délivrées aux
intéressés. L'une de ces copies dite copie exécutoire ou
grosse, est revêtue de la formule exécutoire et a force
exécutoire. Elle permet de procéder à l'exécution,
en employant toutes voies de droit, sans procédure.
71. L'acte dressé par un officier
public va conférer à l'acte une authenticité qui a une
force exécutoire et une force probante66(*).
72. Supposons qu'il n'y est pas de doute sur
l'authenticité de l'acte. Est-ce à dire que ce qui est
écrit ait la même valeur en tant que preuve?
73. La force probante des actes authentiques
fait l'objet d'une distinction suivant les mentions. L'original de l'acte
authentique fait foi jusqu'à inscription de faux67(*). Il est présumé
authentique du seul fait qu'il présente l'apparence extérieure de
la régularité. La date de l'acte authentique fait foi
jusqu'à inscription de faux. Le contenu de l'acte authentique renferme
les déclarations de l'officier public et celles des parties. Les
déclarations de l'officier public, par exemple « que tel
jour s'est présentée telle personne », font foi
jusqu'à inscription de faux. Les déclarations des parties
relatées par l'officier public ne font foi que jusqu'à preuve
contraire.
74. Certaines mentions ont été
directement constatées par l'officier public ex propriis
sensibus68(*). Il en
est ainsi de la date de l'acte qui peut avoir une grande importance, ou de
l'identité des parties qui ont dû en justifier. Il en est de
même des volontés exprimées par les parties: l'une, par
exemple déclare vendre tel bien, l'autre acheter en promettant tel prix.
Toute mention qui correspond à une constatation personnelle du notaire a
valeur authentique69(*),
à moins que l'adversaire n'arrive à démontrer que cette
mention est un faux en déclenchant la procédure d'inscription de
faux.
75. Les mentions qui figurent à l'acte
sans que l'officier public ait pu en en vérifier l'exactitude n'ont pas
la même force que celles constatées directement par lui. Elles
constituent, certes, des preuves en faveur de celui qui produit l'acte, mais
l'adversaire peut établir que ces mentions sont inexactes, sans
être obligé d'employer la procédure d'inscription de
faux70(*).
76. Les copies d'actes authentiques font foi
comme l'original, qu'elles soient manuscrites, dactylographiées ou
photocopiées, à condition d'être authentifiées par
la signature du dépositaire de l'original.
77. Outre le recours à un officier
public, notamment le notaire, pour la formalisation de leur acte, les
cocontractants peuvent simplement établir un acte sous seing
privé.
2- L'acte sous seing privé
78. Définition. Les actes sous-seing
privé sont des actes sous signature privée, établis par
les particuliers et signés par eux, sans l'intervention d'un officier
public. On distingue différentes sortes d'actes sous-seing
privé : les actes « originaires »,
dressés au moment même de l'acte, les actes
« récognitifs », dressés soit pour
remplacer un acte originaire perdu, soit pour interrompre la prescription par
une reconnaissance du droit résultant de l'acte originaire ; les
actes « confirmatifs », dressés pour
confirmer un acte annulable. De tels actes doivent être revêtus du
seing, c'est-à-dire de la signature manuscrite des parties.
79. La signature est aussi bien un
procédé d'identification que le signe qu'une volonté
proprement dite s'est manifestée. Ainsi, le passage du simple projet
à l'acte se marque par l'apposition de la signature.
80. Signature. La reconnaissance de la force
probante à l'acte sous-seing privé est subordonnée
à la satisfaction de certaines conditions. Il s'agit essentiellement de
conditions de forme. La condition essentielle à l'admission d'un acte
sous seing privé est la signature manuscrite des parties71(*). En conséquence, l'acte
sous seing privé peut être écrit en français ou en
une autre langue, par l'une des parties ou par un tiers, à la main ou
dactylographié, sur une formule imprimée d'avance ou en tout ou
en partie, sous forme de lettre missive.
81. Soulignons ici que l'acte sous seing
privé est valable même si les signatures ne sont pas
précédées de la mention « Lu et
approuvé ». Nonobstant sa pratique universelle, cette
mention est superfétatoire72(*). Ou la personne qui signe l'acte en a effectivement
pris connaissance et, en le signant, elle l'approuve; ou bien elle signe sans
lire, et une telle formule ne débouche sur aucune protection. Cette
formalité, bien que répandue, est dépourvue de toute
portée.
82. Par application du principe de la seule
exigence de la signature des parties pour admettre l'acte sous-seing
privé, il y a une impossibilité pour celui qui ne sait pas
écrire de passer un acte de cette nature73(*).
83. Formalités supplémentaires.
En dehors de la signature exigée de ceux qui s'obligent, on
relève des conditions de formes supplémentaires concernant
certains actes particuliers. Ainsi, les actes constatant des conventions
synallagmatiques doivent être établis en « autant
d'originaux qu'il y a de parties ayant un intérêt
distinct »74(*). De plus, mention doit être faite du nombre
d'originaux sur chaque exemplaire75(*). A défaut de ces formalités, l'acte
juridique n'est pas nul, mais l'écrit ne peut servir de preuve. Tout au
moins pourra-t-il constituer un commencement de preuve.
84. Force probante. En ce qui se rapporte
à la force probante de l'acte sous-seing privé entre les parties
contractantes, il résulte de l'article 1322 du Code civil, qu'on ne peut
être obligé par un acte sous seing privé qu'on n'a pas
signé, soit personnellement, soit par mandataire76(*). Un acte sous seing
privé n'a de force probante qu'autant que la signature en est
expressément ou tacitement reconnue ou a été
préalablement ratifiée en justice. Si celui à qui on
l'oppose ne nie pas l'avoir signé, l'acte sera considéré
comme émanant de lui77(*). Mais s'il prétend que cette signature est une
imitation, que ce n'est pas la sienne, l'acte n'a plus de valeur
probante78(*).
85. S'il s'élève une
contestation relative à un acte sous seing privé, il appartient
au juge de procéder à la vérification
d'écriture79(*)
conformément aux dispositions des articles 87 et suivants du Code de
procédure civile, commerciale et administrative80(*).
86. La preuve littérale, celle
relevant d'un écrit sur support papier telle que perçue
traditionnellement, se révèle inadaptée au regard du
contexte numérique de la vente. De fait, les exigences requises pour
l'établissement des actes authentiques et sous seing privé sont
loin d'être en adéquation avec celles des échanges
électroniques.
B- Les écrits papiers : preuves
inadaptées aux exigences de la vente en ligne
87. Le droit ivoirien de la preuve, tel qu'il
existe actuellement, ne s'est pas encore enrichi de dispositions
spécifiques à la vente électronique81(*). La vente en ligne
caractérisée par la dématérialisation du support
(1) et la rapidité de l'échange (2) rend inapte l'écrit
papier en tant que preuve du contrat.
1- Le support de la transaction
88. L'écrit est un concept juridique
élaboré dans un contexte bien différent de celui du
commerce électronique et des environnements
dématérialisés82(*). La notion d'écrit se rattache
traditionnellement au support papier, de sorte que la signature,
nécessaire à la perfection d'un acte juridique, n'était
pas adaptée au monde dématérialisé. D'ailleurs, on
a du mal à imaginer comment les exigences strictes telles que les
signatures de l'officier public ou des parties requises sur du papier, vont
pouvoir s'effectuer sur Internet. Ce d'autant plus que les parties, dans la
plupart des cas, ne se rencontreront pas, vivant dans des Etats
différents et éloignés.
89. Ainsi, un commerçant basé
en Belgique, qui propose sur son site la vente d'un produit, à
l'égard duquel un internaute ivoirien manifeste sa volonté
d'acheter, ne prendra certainement pas l'avion ou ne demandera pas à son
cocontractant de le faire à l'effet d'apposer sa signature pour
matérialiser l'engagement. De même, relativement à l'acte
authentique, il est prescrit le respect de sa compétence territoriale
par l'officier public. A cet égard, il ne peut prêter son
ministère que dans le ressort où il est admis à exercer
ses fonctions. La compétence du notaire, par exemple, s'étend
à l'ensemble du territoire ; il ne peut donc instrumenter
au-delà des limites territoriales de l'Etat. Or, en matière de
vente en ligne, les parties sont le plus souvent situées dans des Etats
différents. En pareille hypothèse, le notaire appelé
à prêter son ministère, se trouvera nécessairement
incompétent, ne pouvant le faire au-delà de son territoire
national.
90. Concept d'écrit et support
dématérialisé. Le concept d'écrit,
créé pour le papier ne correspond pas aux exigences des
transactions réalisées par le biais du réseau. L'Internet
offre, en effet, un support différent de celui utilisé couramment
pour la conclusion des conventions. Le support, ici, est électronique,
immatériel. Les échanges électroniques impliquent ainsi
une dématérialisation totale des relations entre les
différents acteurs. Il apparaît sans contexte que cette
dématérialisation des échanges bouleverse les
données fondamentales du droit de la preuve.
91. Internet constitue aujourd'hui un lieu
non négligeable d'échanges commerciaux. C'est un espace que l'on
ne peut plus ignorer. L'Internet, c'est le monde réel mis en situation
virtuelle. Les règles classiques de preuve se rapportant à
l'écrit papier ne répondent pas aux particularités de cet
espace virtuel.
92. Il est clair qu'avec l'essor du commerce
électronique, notamment de la vente en ligne, les préoccupations
juridiques liées à la preuve et à la sécurisation
des échanges se posent. Et des règles établies dans un
environnement papier ne correspondent plus à la réalité
électronique actuelle. L'écrit papier apparaît comme un
concept inapproprié au support électronique.
93. En effet, comment prouver avec un
écrit sur support papier, une réalité
générée par un support électronique ?
L'écrit papier est-il à même de saisir cette
réalité immatérielle ? Pas si sûr, d'autant que
la rapidité des transactions en ligne n'attendra pas
nécessairement la rédaction d'un écrit sur support
papier.
2- L'exigence de rapidité de la
transaction
94. L'un des signes qui caractérisent
le mieux l'Internet, c'est la vitesse des échanges qu'il permet.
L'Internet est prisé parce qu'il offre la réalisation
d'échanges, l'accès à l'information, à des fonds
documentaires, en un temps record. Les échanges se font ainsi en ligne,
c'est-à-dire en temps réel83(*).
95. Vitesse des échanges. Le monde du
commerce électronique en général, et de la vente en ligne
en particulier, est caractérisé par la rapidité avec
laquelle il agit et, par voie de conséquence, la simplicité des
relations qui se nouent à l'occasion des contrats et de leur
exécution. L'Internet est un outil qui consacre la rapidité des
échanges. Les acteurs qui l'utilisent, par son biais, envoient des
messages qui parviennent à leurs destinataires presque
instantanément. Les transmissions et l'accès à
l'information sont quasi instantanés.
96. Utilisation irréaliste du papier.
Dans un contexte où la rapidité des échanges est l'une des
raisons qui déterminent les parties à recourir au réseau,
la préconstitution d'une preuve écrite sur support papier ne
paraît pas réaliste84(*) ; car le virtuel s'accommode difficilement du
papier. Un utilisateur qui désir acheter un logiciel en ligne
auprès d'un fournisseur, n'attendra pas qu'un contrat traditionnel sur
support papier lui soit envoyé pour signature éventuellement. Il
prendra simplement connaissance des clauses du contrat directement sur
l'écran de son ordinateur et procédera au
téléchargement du logiciel s'il adhère à ces
clauses.
97. On s'en aperçoit : toute
l'opération s'exécute électroniquement, sans aucune
référence au papier. Ce type d'opération se fait
quotidiennement sur le réseau. En cas de contestation, comment alors les
parties qui n'ont pas recouru au papier pourraient-ils apporter aisément
la preuve de leur relation ? Les procédés
électroniques pourraient en faciliter la preuve, encore faudrait-il que
le droit positif reconnaisse leur efficacité. Ce qui n'est pas encore le
cas en Côte d'Ivoire.
98. La législation actuelle n'est pas
adaptée aux nouveaux enjeux de la société de
l'information. Et cette situation n'est certainement pas de nature à
faire prospérer la vente en ligne qui, sous d'autres cieux connaît
un essor fulgurant. Si la preuve littérale n'apporte pas de solutions
convaincantes à la preuve de la vente en ligne, l'alternative des deux
autres procédés de preuve parfaits constitués de l'aveu et
du serment pourrait être envisagée.
II : Les preuves non écrites
99. Les preuves parfaites non écrites
sont au nombre de deux : il s'agit de l'aveu (A) et du serment (B).
A- L'aveu
100. Définition. On énonce
habituellement que l'aveu est la déclaration par laquelle une personne
reconnaît pour vrai et comme devant être tenu pour avérer
à son égard, un fait de nature à produire contre elle des
conséquences juridiques. L'article 1354 du Code civil distingue deux
sortes d'aveu : « L'aveu qui est opposé à une
partie, est ou extrajudiciaire ou judiciaire ». Seul l'aveu
judiciaire nous intéressera puisque lui seul est une preuve parfaite,
liant le juge quant au prononcé de sa décision.
101. Rareté de l'aveu judiciaire.
L'aveu judiciaire est celui qui est fait au cours d'un procès et dont
dépend le sort du procès85(*). On le devine aisément, cette forme d'aveu est
rare. Le plaideur reconnaît rarement le bien-fondé de la
prétention de son adversaire au cours du procès. Soit il le
reconnaît avant le procès, soit il ne le reconnaît presque
jamais. Emportant des conséquences graves, l'aveu doit émaner
d'une personne capable de disposer de ses droits. Aussi, l'aveu n'est-il pas
recevable s'il émane d'un mineur ou d'un majeur
protégé.
102. Indivisibilité. Par ailleurs,
l'aveu judiciaire est indivisible86(*). Cette règle signifie qu'on ne peut retenir
qu'une partie de l'aveu et rejeter l'autre. En plus d'être indivisible,
l'aveu est irrévocable. En témoigne l'article 1356 :
« Il ne peut être révoqué, à moins
qu'on ne prouve qu'il a été à la suite d'une erreur de
fait. Il ne pourrait être révoqué sous prétexte
d'une erreur de droit ». Cela signifie que l'aveu ne fait foi
que jusqu'à preuve contraire. Il en découle que l'auteur de
l'aveu peut démontrer la fausseté de son aveu, en apportant la
preuve qu'il n'a été donné qu'à la suite d'une
erreur de fait.
103. Aveu impossible ? L'aveu, dans le
régime de la preuve libre, est admissible au même titre que les
autres procédés de preuve pour établir la
réalité d'une allégation. Elle est pourvue d'une force
probante redoutable87(*).
Reste qu'il est très rare d'obtenir des aveux d'un adversaire. En
pratique, et dans la plupart des cas, outre l'hypothèse de violences ou
tortures pour arracher des aveux88(*), on n'avoue que lorsque certains indices concourent
à nous compromettre et qu'il devient alors impossible de nier ce qui
semble désormais se poser comme vraisemblable. Eu égard à
cela, il sera davantage rare, sinon utopique d'obtenir des aveux dans un
environnement virtuel où la volatilité des informations et
l'usage de pseudonymes dans les échanges sont des pratiques fort
répandues.
104. A l'instar de l'aveu, le serment est
aussi un procédé de preuve parfait, d'une autorité
certaine.
B- Le serment
105. A propos du serment, il faut noter qu'il
en existe deux types : le serment supplétoire et le serment
décisoire. Il convient d'indiquer d'emblée que le serment
supplétoire, déféré par le juge, relevant de son
pouvoir discrétionnaire, et ne le liant pas89(*), ne fera pas l'objet de
développement. Seul sera examiné le serment décisoire qui
est un véritable mode de preuve parfait, liant le juge.
106. Définition. Le serment est,
généralement, reçu comme la déclaration par
laquelle un plaideur affirme d'une manière solennelle et devant le juge,
la réalité d'un fait qui lui est favorable. Le serment
décisoire est une espèce particulière de serment,
très rare en pratique, car très dangereux pour celui qui serait
tenté de l'utiliser90(*).
107. Le jeu du serment décisoire. En
effet, l'un des plaideurs offre de s'en remettre au serment de son adversaire
pour établir le fait contesté, dont dépend l'issue du
débat. On dit qu'il défère serment à son
adversaire. Ce dernier peut adopter trois attitudes. Ou bien il prête le
serment qui lui est déféré et gagne son
procès ; ou bien il refuse de le prêter, ce qui constitue un
véritable aveu judiciaire dont l'autre partie pourra se prévaloir
pour gagner le procès. Il lui reste une troisième attitude
possible : il peut référer le serment au plaideur qui le lui
a déféré. Si ce dernier prête serment, il remporte
le gain du procès ; si, au contraire, il refuse de prêter le
serment, il perd le procès.
108. Le serment décisoire, on l'a
souligné, est un mode de preuve parfait. Il lie le juge qui doit
conformer sa décision aux conséquences du serment91(*). Le serment dicte sa
décision. Mais, on se l'imagine, cet appel à la bonne foi de
l'adversaire est très rare92(*). C'est pourquoi, il ne faut pas trop s'attendre
à ce que les parties, dans des échanges électroniques, en
use.
109. Reste à présent les
procédés de preuve imparfaits qui, bien que d'une autorité
limitée par rapport aux procédés parfaits de preuve, n'en
seront pas moins employés à l'effet d'établir la
réalité de la relation contractuelle intervenue sur le
réseau Internet.
SECTION 2 : L'INADAPTATION AU REGARD DES MOYENS DE
PREUVE «IMPARFAITS»
110. Les procédés de preuve
imparfaits ont en commun de ne jamais lier le juge. Celui-ci reste toujours
libre de leur appréciation. On distingue deux types de modes de preuve
imparfaits : le témoignage (I) et les présomptions du fait
de l'homme (II).
I : Le témoignage
111. Définition. Le témoignage
s'appréhende comme la relation faite par une personne des faits dont
elle a eu connaissance par elle-même. Le témoignage est la preuve
qui procède des déclarations des témoins93(*) rapportant ce qu'ils ont
constaté, vu ou entendu directement.
112. L'objet du témoignage est
toujours ce que le témoin a personnellement vu ou entendu. Le
témoin se doit de relater ce qu'il a perçu par ses propres sens.
En effet, les témoins déposent sur des faits dont ils ont eu
personnellement connaissance. Leur devoir est donc de dire la
vérité, s'il se peut la vérité objective. Ce qui
ajoute à leur crédibilité, c'est le serment qu'ils
prêtent, et les peines qui planent sur le faux témoin. Nonobstant
ces garanties, on n'est pas toujours à l'abri du phénomène
de la subornation des témoins94(*).
113. Par ailleurs, il faut remarquer que le
témoignage, telle qu'il se présente, semble très proche de
la preuve par commune renommée où les parties rapportent ce
qu'elles ont ouï-dire à propos d'un fait ou d'un acte juridique.
114. Le droit positif prohibe la preuve par
commune renommée ou encore preuve par «on dit». Dans une telle
hypothèse, le déclarant se fait l'écho de bruits
incontrôlables qui se colportent de bouche à oreilles. Cette
preuve, courante sous l'Ancien Droit, était et reste très
dangereuse par son imprécision croissante au fur et à mesure que
l'on s'éloigne du témoignage direct. Le danger est évident
compte tenu de la grande probabilité de déformation des faits.
Cette preuve n'est pas généralement admise du fait de son
caractère incontrôlable.
115. Probabilité de recours
limitée. Ramené à la vente en ligne, le
témoignage apparaît d'usage très peu probable. En effet, en
se situant dans le contexte de l'Internet, on voit bien que l'internaute qui se
connecte à un site, est seul devant sa machine. Il passe d'une page
à une autre par de simples clic à partir de la souris de
son ordinateur, et il le fait, généralement, tout seul sans la
présence d'une personne étrangère. Dans ce cas, il n'est
pas possible de recueillir des témoignages sur la réalité
ou non de la relation contractuelle, sauf le cas d'un espion du système
informatique qui, en règle générale, agissant de
façon malveillante, n'apportera pas son concours à la
manifestation de la vérité.
Qu'en est-il des présomptions ?
II : Les présomptions
116. Appréhension de la notion. Il
importe de préciser, ici, que les présomptions dont il sera
question ne sont pas celles établies par la loi, qui opère
redistribution de la charge de la preuve, mais bien plutôt celles de
l'homme. On appelle «présomptions de l'homme» ou
«présomptions du fait de l'homme» ou encore
«présomptions de fait», les conséquences que le
magistrat tire d'un fait connu à un fait inconnu. L'article 1353 du Code
civil indique que les présomptions sont tous indices, tous les
éléments de conviction appréciés par la
réflexion du juge. Le juge, à partir de divers
éléments de fait, va forger son intime conviction quant à
l'existence du fait litigieux.
117. Les indices à partir desquels le
juge peut former son intime conviction sont nombreux. Il peut s'agir de
constations matérielles, de déclarations de personnes qui ne
peuvent être entendues en qualité de témoins, tous les
documents quelle qu'en soit la nature ou l'origine, de l'attitude des parties
au cours d'une comparution personnelle, des résultats d'une
expertise.
118. Les présomptions du fait de
l'homme ne sont, évidemment pas un mode de preuve scientifique. Il est
même permis de soutenir qu'elles sont dangereuses. Elles sont
néanmoins indispensables car il est bien rare que le fait litigieux
précis soit prouvé, car c'est bien souvent le doute quant
à son existence qui a été à l'occasion de la
saisine du juge.
119. Appel à la prudence. L'article
1353 recommande au juge la prudence quant à l'appréciation de ce
procédé de preuve. L'article dispose ainsi :
« les présomptions qui ne sont point établies par
la loi, sont abandonnées aux lumières et à la prudence du
magistrat, qui ne doit admettre que des présomptions graves,
précises et concordantes (...) ». Il faut dire que la
formule légale n'est qu'un conseil de prudence adressé au
magistrat. Aussi a-t-il été décidé qu'il peut
s'appuyer sur un indice unique95(*).
120. Crédibilité. Les preuves
par présomptions ont une force probante relative. Elles sont, en effet,
aux termes de l'article 1353, « abandonnées aux
lumières et à la prudence du magistrat »,
autrement dit à sa libre appréciation96(*). Et les juges font des
éléments présentés, une appréciation
souveraine97(*).
121. Le mode de raisonnement lié
à la preuve par présomptions est susceptible d'être mis en
oeuvre pour convaincre de la réalité de la vente en ligne. En
s'appuyant sur des indices, tels que l'échange de courriers
électroniques, le juge pourrait s'estimer convaincu de l'existence ou
non du rapport juridique unissant les parties.
122. Mais les indices
générés par le réseau Internet doivent
être pris avec des pincettes. En effet, les informations circulant sur le
réseau ne sont pas à l'abri de modifications ou
d'altérations de la part d'internautes malveillants.
L'intégrité des messages peut être ébranlée
par des attaques de pirates des systèmes d'information. La
sécurité du réseau est une quête permanente pour
assurer la sincérité des messages diffusés. Les
inquiétudes exprimées montrent combien les présomptions,
ainsi que les autres procédés classiques de preuve admissibles,
par principe, pour faire la preuve de la vente en ligne, apparaissent, en
réalité, limités au regard de la particularité, de
la spécificité de l'opération qui se développe dans
un univers électronique.
CHAPITRE II : LES PERSPECTIVES DE SOLUTIONS
123. Les nouveaux modes d'échanges
commerciaux marqués par le commerce électronique dont la vente en
ligne constitue une modalité, commandent des règles nouvelles,
spécifiques. Pour doper le développement du commerce
électronique, partant de la vente en ligne dans un cadre juridique
sûr, il importe de se rendre à l'évidence, à la
lumière de l'examen des divers procédés de preuve existant
actuellement, de la vétusté de ces derniers. S'il est vrai qu'il
n'y a pas de vacum juris en la matière, force est cependant
d'observer l'inadaptation des règles en vigueur.
124. Sous ce rapport, des pistes de solutions
doivent être explorés ; des solutions nouvelles doivent
être dégagées pour marquer véritablement notre
adhésion aux échanges électroniques. En occident, des
solutions ont déjà été posées (section 2).
Le législateur ivoirien pourrait s'en inspirer pour enrichir et
développer les perspectives envisagées (section 1).
SECTION 1: LES PERSPECTIVES IVOIRIENNES
125. Le caractère très
particulier de ce nouveau mode de commercialisation qu'est l'Internet impose de
faire évoluer notre droit de la preuve. L'essor rapide des
échanges à partir d'un ordinateur et le succès du
réseau plaident, en effet, pour que des règes nouvelles de preuve
soient dégagées. Les autorités ivoiriennes semblent
l'avoir perçu à travers un ambitieux projet (I). Au niveau
sous-régional, il importe aussi de relever les solutions
proposées par l'UEMOA (II).
I : Les ambitions du P.A.G.E.
126. Face au développement des
nouvelles technologies de l'information, les autorités ivoiriennes ne
sont pas entièrement restées insensibles. Par les soins du
ministère de la Justice, un projet a été
élaboré en 1999 pour tenir compte de ce nouveau contexte. Ce
projet, même s'il recèle des insuffisances en matière de
preuve (B), se laisse, cependant, saisir comme l'expression de la
volonté des autorités d'intégrer les données
nouvelles liées à l'essor de l'Internet dans son champ d'action.
C'est pourquoi, il convient de le présenter pour en déceler ses
caractéristiques (A).
A- La présentation du P.A.G.E.
127. Objectif du projet. Fruit d'une
étude réalisée par un groupe d'universitaires et de
professionnels, le Projet d'Appui à la Gestion Economique est
destiné à faire la promotion de l'outil informatique dans
l'activité économique en vue d'en susciter sa prise en compte. On
pense que son achèvement devrait en faire un instrument d'impulsion du
secteur économique98(*).
128. L'informatique est devenue, aujourd'hui,
incontournable dans le paysage économique ivoirien. Pourtant, il ne fait
l'objet d'aucun encadrement juridique. L'on sait, cependant, que sa prise en
compte par le droit est nécessaire. Cela permettra notamment d'assurer
la sécurisation des rapports juridiques.
129. Volet juridique. Guidés par ce
souci, les initiateurs ont inclus un volet juridique99(*) dans le projet. Celui-ci
prévoit la création d'un cadre juridique adapté à
l'utilisation de l'outil informatique. Ce cadre juridique détermine,
entre autres, le champ d'application de l'outil informatique, ses
modalités d'utilisation, ainsi que le règlement
d'éventuels litiges pouvant surgir à l'occasion de son
utilisation, notamment ceux relatifs au copyright100(*).
130. Malgré ses perspectives
intéressantes, le projet présente des lacunes sur le point de la
preuve.
B- Les carences du P.A.G.E. en matière de
preuve sur Internet
131. Le P.A.G.E. constitue sans aucun doute
un pas non négligeable dans l'encadrement juridique des
procédés informatiques en Côte d'Ivoire. Les questions se
rapportant à la preuve y sont évoquées. A ce titre, le
projet admet la possibilité de recourir à l'article 1334 du Code
civil pour reconnaître, en tant que copie de l'original, un document qui
serait édité en sortie d'ordinateur. Mais aucune précision
n'est apportée, aucun argument n'est articulé pour soutenir cette
position.
132. Absence de solutions concrètes.
Compte tenu du domaine particulier qu'il envisage, le projet aurait
gagné en innovation majeure si ses initiateurs avaient fait preuve d'une
plus grande audace. Des suggestions plus pertinentes relativement au droit de
la preuve pour solutionner les litiges éventuels résultant de
l'utilisation des nouvelles technologies de l'information, auraient pu
être proposées.
133. Certes, le Projet d'Appui à
la Gestion Economique recèle des carences sur le point de la
preuve. Souhaitons simplement qu'il s'enrichisse d'avis éclairés
et d'expériences extérieures101(*). A cet effet, les initiatives, au niveau
sous-régional, pourraient être d'un apport appréciable. Le
cas du Règlement n° 15 de l'UEMOA sur les systèmes de
paiement102(*)
mérite, à cet égard, d'être évoqué.
II : Le Règlement n° 15 de l'UEMOA sur les
systèmes de paiement
134. Mutation. Les États membres de
l'UEMOA103(*) ont pris
conscience des mutations qui agitent le monde aujourd'hui, notamment dans le
domaine technologique. Nos sociétés s'éloignent de plus en
plus du papier, pour épouser l'ère du numérique, de
l'électronique. C'est un processus qui semble irréversible. Les
décideurs ne peuvent ignorer cette nouvelle donne. L'électronique
doit être intégré dans tous les domaines d'activités
impliquant des rapports humains.
135. A l'instar de certaines
législations occidentales, les Etats membres de l'UEMOA ont
expressément reconnu la valeur des données sous la forme
électronique. Le Règlement n° 15 sur les systèmes de
paiement, l'instrument de cette reconnaissance, a expressément
consacré l'écrit et la signature électronique (A). Ce
dispositif réglementaire se situe sans doute au diapason de
l'actualité. Cependant, il ne faut pas se le cacher, il s'agit là
d'une initiative dont la portée est réduite du fait qu'elle ne
concerne que les systèmes de paiement (B).
A- La reconnaissance de l'écrit et de la
signature électronique
136. Rupture. Aux termes de l'article 18 du
Règlement, « La preuve littérale ou preuve par
écrit résulte d'une suite de lettres, de caractères, de
chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification
intelligible, quels que soit le support et les modalités de
transmission. » Cet article, équivalent du nouvel article
1316 du Code civil français issu de la loi française du 13 mars
2000, offre de constater que la notion d'écrit (littérale) ne se
confond plus avec le support papier. Il faut dire que, depuis longtemps,
l'écrit était reçu comme celui figurant
nécessairement sur le papier. L'article 18 du Règlement rompt
donc avec cette conception traditionnelle.
137. Admission de l'écrit
électronique. L'écrit, aujourd'hui, n'est plus
tributaire d'un support déterminé. Cette indépendance,
traduite par l'expression « quels que soit le
support », permet de concevoir l'écrit sur un support
électronique comme mode de preuve104(*). A cet égard, l'article 19 du
Règlement énonce que « l'écrit sous forme
électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit
sur support papier ». Par cette disposition, on
s'aperçoit qu'en admettant l'écrit électronique, le
Règlement de l'UEMOA ne lui a pas donné une position
inférieure à celle de l'écrit sur support papier. Il n'a
pas, ainsi, institué de hiérarchie entre support
électronique et support papier.
138. Cette solution doit être
approuvée parce que la solution contraire aurait réduit
considérablement la portée de l'initiative, et au surplus,
n'aurait pas été conforme à l'évolution actuelle
incarnée par l'essor des technologies de l'information et de la
communication.
139. Equivalence de force probante. En outre,
et suivant la logique précédente, l'article 19 consacre
l'égalité de la force probante entre l'écrit
électronique et l'écrit papier. Ainsi, l'écrit sous forme
électronique « a la même force probante que
celui-ci (l'écrit sur support papier) »105(*). Le Règlement, par le
biais de l'article 19 qui est, en réalité, une reprise
combinée des nouveaux articles 1316-1106(*) et 1316-3107(*) du Code civil français, confère
à l'écrit électronique une force probante
équivalente à celle attachée traditionnellement à
l'écrit papier.
140. Le Règlement ne s'est pas
limité à la reconnaissance de l'écrit
électronique ; il est allé plus loin en conférant
à la signature électronique une valeur juridique. Dans sa
démarche, le Règlement propose une définition de la
signature électronique. L'article 21 énonce que
« la signature électronique consiste en l'usage d'un
procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte
auquel elle s'attache »108(*).
141. La définition posée, le
Règlement se prononce sur la force probante de la signature
électronique. Aussi, indique-t-il, à cet effet, que
« la signature électronique (...) a la même force
probante que la signature manuscrite »109(*). Ce faisant, l'article 22
soutient qu'« une signature électronique ne peut
être déclarée irrecevable au seul motif qu'elle se
présente sous forme électronique ».
142. Prise en compte des questions nouvelles.
Les développements qui précèdent permettent d'observer que
les Etats membres de l'UEMOA n'ont pas voulu rester en marge des progrès
technologiques qui rythment le monde aujourd'hui. Le développement des
nouvelles technologies de l'information et de la communication
symbolisées par l'Internet, est en train de changer progressivement nos
rapports. Ceux-ci sont de plus en plus dématérialisés.
143. Les échanges, les transactions se
font plus souvent par des moyens électroniques. C'est la raison pour
laquelle il importe que les différentes législations, africaines
notamment, prennent en compte cette réalité nouvelle.
L'initiative des Etats membres de l'UEMOA, à travers le Règlement
n° 15, vient à propos et doit donc être encouragée.
Toutefois, cette initiative apparaît quelque peu limitée dans son
champ d'application.
B- Les limites du Règlement
144. Il faut l'admettre : par le
Règlement n° 15, les Etats membres de l'UEMOA, en consacrant
l'écrit et la signature électronique, se sont donnés les
moyens de ne pas se situer en retrait du progrès technologique de ces
dernières années. Grâce au Règlement n° 15, le
document électronique peut être articulé comme preuve par
les plaideurs au cours d'un litige impliquant les systèmes de paiement.
Et le juge ne peut a priori prononcer son irrecevabilité au
motif qu'il est sous la forme électronique.
145. Evolution limitée. Certes, il
s'agit là d'une avancée significative du droit de la preuve dans
les pays membres de l'UEMOA. Cependant, l'on doit relativiser cette
évolution. En effet, le champ d'application des dispositions du
Règlement est limité aux opérations de banque et de
paiement. Aussi, la valeur juridique du document électronique ne
peut-elle trouver à s'exprimer que dans le cadre d'un litige
généré par les systèmes de paiement.
146. L'électronique a un domaine
d'intervention beaucoup plus vaste. Aujourd'hui, il n'est pas d'entreprises
dignes de ce nom, qui ne recourent aux nouvelles technologies de l'information
et de la communication, notamment à l'outil informatique. Or,
l'utilisation d'un tel outil appelle nécessairement et
inévitablement la mise en oeuvre de données électroniques.
147. Des échanges électroniques
se font régulièrement sur le réseau ; ce qui
n'écarte pas tout litige entre les acteurs utilisant ce moyen de
communication. Etant donné que les échanges sont
dématérialisés, autrement dit électroniques, la
preuve des relations ou des échanges intervenus sur le réseau
devient difficile. L'échange électronique, par exemple, par
nature refoule le concept même de papier. A ce titre, la
généralisation de procédés de preuve
électroniques apparaît nécessaire.
148. Initiative nouvelle. Devant
l'insuffisance des droits nationaux face à l'essor des technologies de
l'information et de la communication, des réponses se doivent
d'être trouvées si les pays africains ne veulent pas rester en
marge de ce nouvel espace d'échanges et de croissance. A ce sujet, il
convient de relever et de saluer l'initiative récente prise par la
CEDEAO et l'UEMOA, à travers le Projet de lignes directrices
générales sur l'harmonisation du cadre légale et
réglementaire des Technologies de l'Information et de la Communication
(TIC) en Afrique de l'Ouest110(*).
149. Partant du constat que l'importance des
transactions électroniques est actuellement relativement faible dans
l'espace de la CEDEAO et de l'UEMOA, mais que son potentiel de croissance est
indéniable, « l'objet de ces lignes directrices vise donc
à assurer la sécurité et le cadre juridique
nécessaires à l'émergence d'un commerce
électronique fiable dans la
sous-région »111(*).
150. Ce projet est une avancée
importante pour les États concernés, puisque la
possibilité de mise en oeuvre de procédés de preuve issus
de l'exercice du commerce électronique est expressément reconnue.
Il s'agit précisément de l'écrit électronique et de
la signature du même genre. Un pas est fait, sans aucun doute.
151. Principes non contraignants. Cependant,
il reste que ces principes dégagés n'intègrent pas encore
les différentes législations nationales. Il ne s'agit là
que d'une invitation faite aux Etats membres de procéder à
l'adaptation nécessaire de leurs droits pour tenir compte du
phénomène électronique.
152. Sans preuve, il est impossible de faire
valoir ses droits : idem est non esse aut non probari dit
l'adage. Or, par définition, en matière de vente en ligne, les
parties ne souhaitent pas doubler leurs envois de documents
numérisés (contractuels ou autres) par la transmission de
documents papiers signés. Dès lors, comment les parties à
un contrat conclu sans support papier peuvent-elles se ménager une
preuve et voir reconnaître sa validité alors qu'il a
été réalisé par des moyens
électroniques ?
153. Pour l'heure, nous en sommes toujours
à appréhender la vente en ligne sous le prisme des règles
traditionnelles de preuve. Nul doute que l'essor de ce nouveau modèle
d'échange impulsera l'admission de solutions nouvelles de preuve
déjà intégrées dans divers droits positifs
occidentaux et même africains.
SECTION 2 : LES PERSPECTIVES DE DROIT COMPARE
154. Dans le cadre des relations
contractuelles se rapportant à une opération de vente sur
Internet, divers documents électroniques sont susceptibles d'être
échangés112(*). Dans l'hypothèse d'un litige opposant les
parties à la vente, celles-ci devront apporter la preuve de leurs
allégations. Cette tâche se révèle délicate
lorsque les éléments de preuve sont essentiellement des documents
sous la forme électronique. Ayant perçu ces difficultés et
la nécessité de les surmonter, des Etats113(*) ont récemment mis en
place un corpus de règles destinés à reconnaître
juridiquement l'écrit électronique (I) et la signature du
même genre (II).
I : La reconnaissance juridique de l'écrit
électronique
155. L'avènement de l'Internet a rendu
les règles de preuve de droit commun, contenues dans le Code civil,
inadaptées. Le législateur, notamment français,
procédant à une réforme du droit commun de la preuve, a
adopté une définition nouvelle de la preuve littérale (A)
et pris soin de reconnaître une force probante à l'écrit
électronique (B).
A- La nouvelle définition de la preuve
littérale
156. La loi française du 13 mars 2000
portant adaptation du droit de la preuve propose une nouvelle définition
de la preuve littérale. Ce texte remet en cause l'assimilation
historique de la preuve littérale au support papier. En effet, comme le
souligne l'exposé des motifs du projet de loi, les dispositions du Code
civil sur la preuve ont été rédigées à une
époque où le papier était le seul support utilisé
pour constater l'existence et le contenu des contrats et en faire la preuve.
157. Extension de la notion de « preuve
littérale ». La loi du 13 mars 2000 étend la
notion de preuve littérale ou par écrit à tous les
écrits114(*),
qu'ils soient papiers, électroniques ou autres. Selon le nouvel article
1316 du Code civil : « La preuve littérale, ou
preuve par écrit, résulte d'une suite de lettres, de
caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles
dotés d'une signification intelligible, quels que soit leur support et
leurs modalités de transmission »115(*).
158. Comme on l'observe, cette
définition est extensive, ce qui valide toutes les formes
d'écrits, y compris ceux sous forme électronique. L'écrit
avait, traditionnellement, fini par se confondre avec son support
papier116(*). L'article
1316 nouveau met fin à cette confusion. Ainsi, la preuve
littérale est redéfinie afin de la rendre indépendante de
son support. Ce principe d'indépendance de l'écrit par rapport au
support est également énoncé dans le Code civil
québécois117(*). L'écrit demeure un moyen de preuve quel que
soit le support sur lequel il se trouve, à moins que la loi n'exige un
support spécifique118(*). Le juge ne pourra donc refuser qu'un document soit
déposé en preuve pour le seul motif qu'il ne se trouve pas sur un
support traditionnel tel que le papier. La preuve littérale ne
s'identifie plus au papier, ne dépend ni de son support matériel,
ni de ses modalités de transmission. On peut ainsi constater que le
droit de la preuve s'affranchit du monopole ou de la
« tyrannie »119(*) du papier.
159. Soutenir que la preuve par écrit
ne dépend ni du support, ni de ses modalités de transmission,
correspond au souci de respecter le principe de neutralité technique et
médiatique120(*).
La jurisprudence et la doctrine ont depuis longtemps mis en exergue le fait que
l'écrit était dissocié de l'instrument et de la
matière qui ont permis de le réaliser121(*). Plus récemment, la
Cour d'appel de Versailles a reconnu la validité d'un écrit sans
support matériel122(*). De même, la Chambre commerciale de la Cour de
cassation s'est également prononcée sur l'usage d'un crayon
à papier lors de la rédaction d'un acte sous seing
privé123(*).
160. La preuve littérale reçoit
donc une définition nouvelle adaptée aux exigences des
transactions passées sur le réseau, notamment à celle de
la vente en ligne. Désormais, la preuve littérale ne
s'identifiera plus à son support papier124(*). Elle ne dépendra pas
non plus des modalités de sa transmission. La Loi uniforme canadienne
précise, à ce propos, qu'il ne peut y avoir de discrimination sur
la base du médium125(*). La suite de signes constituant l'écrit doit
être ordonnée de façon à être intelligible,
c'est-à-dire produit de manière lisible et compréhensible
par l'homme. Ainsi, un texte peut être crypté, mais il doit
pouvoir être déchiffré pour posséder une vocation
probatoire126(*).
B- La reconnaissance de la force probante de
l'écrit électronique
161. La force probante est traditionnellement
reçue comme l'efficacité d'un moyen de preuve127(*). La reconnaissance de la
force probante de l'écrit électronique s'apprécie au
regard de son équivalence avec l'écrit sur support papier d'une
part (1), et au regard du règlement des conflits de preuve d'autre part
(2).
1- L'équivalence entre l'écrit
électronique et l'écrit sur support papier
162. La jurisprudence avait
déjà posé les jalons d'une équivalence probatoire
entre les écrits traditionnel et électronique en décidant
que « l'écrit peut être établi et
conservé sur tout support, y compris par télécopie,
dès lors que son intégrité et l'imputabilité de son
contenu à l'auteur désigné ont été
vérifiées ou ne sont pas
contestées »128(*). La nouvelle loi française, abondant dans le
sens de cette jurisprudence, en a repris l'idée en ses articles 1316-1
et 1316-3.
163. Aux termes du nouvel article
1316-1129(*) du Code
civil français issue de la loi du 13 mars 2000,
« l'écrit sous forme électronique est admis en
preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous
réserve que puisse être dûment identifiée la personne
dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des
conditions de nature à en garantir
l'intégrité ». Pour sa part, l'article 1316-3 de
la même loi précise : « L'écrit sous
forme électronique a la même force probante que l'écrit sur
support papier ».
164. Assimilation de l'écrit
électronique à l'écrit papier. En posant cette
règle, le législateur, par l'assimilation qu'il réalise
ainsi, ouvre la voie à un recours de plus en plus fréquent
à l'écrit électronique pour la préconstitution de
la preuve. Il n'est pas discutable, en effet, que le message
électronique puisse être fixé, sous la forme d'informations
binaires, sur un disque dur, sur un CD-ROM ou toute autre mémoire de
masse comme il en serait des mots ou autres symboles quelconques exposés
sur une feuille de papier. La force probante de l'écrit
électronique est, aujourd'hui, reconnue par plusieurs
législations. Ainsi, l'article 4 de la loi tunisienne indique que
« la conservation du document électronique fait foi au
même titre que la conservation du document
écrit »130(*).
165. Valeur juridique. De même, le
droit québécois précise que « la valeur
juridique d'un document, notamment le fait qu'il puisse produire des effets
juridiques et être admis en preuve, n'est augmentée ni
diminuée pour la seule raison qu'un support ou une technologie
spécifique a été choisi. Le document dont
intégrité est assurée a la même valeur juridique,
qu'il soit sur support papier ou sur un autre support, dans la mesure
où, s'il s'agit d'un document technologique, il respecte par ailleurs
les mêmes règles de
droit »131(*).
166. En tout état de cause,
l'équivalence probatoire ayant été affirmée, en cas
de contentieux dans lequel les titres seraient concurremment invoqués,
la loi fait obligation au juge de régler le conflit.
2- Le règlement des conflits de preuves
littérales
167. Actuellement, le Code civil tel
qu'applicable en Côte d'Ivoire, héritage du Code napoléon,
ne contient aucune disposition réglant les conflits de preuves
littérales. Cette question du règlement des conflits de preuve ne
fait l'objet d'aucune disposition dans le Code civil pour cause de monopole de
l'écrit privé sur support papier.
168. La loi du 13 mars 2000 est venue combler
cette lacune en droit français. Avec la reconnaissance d'autres
écrits, il est probable que des conflits en découlent. Ainsi, la
superposition de flux d'échanges papier et électronique peut
engendrer de sérieux risques de divergences, notamment si l'une des
parties a intérêt à expédier un courrier postal qui
invalide ou qui diffère d'un message électronique
représentant une offre ou l'acceptation d'une offre (ou l'inverse) de
vente.
169. Casuistique et pouvoir du juge. La
question du conflit de preuve littérale est désormais
régie par l'article 1316-2 du Code civil qui prévoit qu'il
appartiendra souverainement au juge, lorsque la loi n'a pas fixé
d'autres principes, et à défaut de convention valable entre les
parties, de déterminer, au cas par cas, en tenant compte des
circonstances de l'espèce, quelle est la preuve littérale la plus
vraisemblable.
170. Le juge se voit ainsi octroyer un large
pouvoir d'appréciation en cas de conflit en matière de preuves
littérales. Cette prérogative du juge connaît
néanmoins des atténuations. Aussi, ne peut-il exercer son pouvoir
discrétionnaire dans deux hypothèses :
- lorsque le législateur n'a pas prévu de
solutions spécifiques à la résolution d'un tel
contentieux ;
- lorsque les parties ont passé une convention de
preuve132(*) valable qui
règle la question.
171. Quoiqu'il en soit, le juge est investi
d'un pouvoir souverain d'appréciation relativement à la preuve
littérale qui est la plus vraisemblable133(*) en fonction du cas qui lui
est soumis. La vraisemblance est un critère d'origine jurisprudentielle,
récemment rappelé par la doctrine à propos des preuves
technologiques134(*). La
notion de vraisemblance peut paraître a priori
subjective. L'acte doit permettre une approche de la vérité,
faire présumer celle-ci sans la prouver entièrement. La
qualification de la vraisemblance relève du pouvoir exclusif des juges
du fond et échappe au contrôle de la Cour de cassation135(*).
172. L'appréciation du juge consistera
à rechercher ce qui lui semble vrai ou bien le titre qu'il
considère comme étant le plus crédible. Il faut
espérer que le juge, confronté à la preuve
électronique, n'ait pas, vis-à-vis de cette dernière, une
attitude de défiance systématique qui le conduirait à
prendre le parti de l'écrit traditionnel chaque fois qu'un conflit
surgirait entre les deux types de preuve.
173. A travers la redéfinition de la
preuve littérale pour la rendre indépendante de son support,
ainsi que la reconnaissance de l'efficacité du document
électronique, la consécration de l'égalité entre le
papier et l'électronique est affirmée.
II : La consécration juridique de la signature
électronique
174. Selon le Code Civil du Québec,
une signature est l'apposition qu'une personne fait de son nom ou d'une marque
qui lui est propre et qu'elle utilise pour manifester son
consentement136(*). La
signature électronique est aujourd'hui possible tant techniquement que
juridiquement (A). Dès que l'intégrité du document est
assurée et que le lien entre la personne et la signature est maintenu,
la signature lui sera opposable. Mais quelles sont les fonctions d'une telle
signature? (B)
A- La consécration jurisprudentielle et
législative
175. Devant un tribunal, il faudra aussi
prouver l'identité de la personne partie à la vente en ligne.
Actuellement, cela peut se faire avec la signature électronique qui est
légalement reconnue (2). Avant le législateur, la jurisprudence
s'était déjà prononcée en faveur de cette
reconnaissance (1).
1- La consécration
jurisprudentielle
176. La jurisprudence fut, dans un premier
temps, réticente à la reconnaissance de la signature
électronique137(*). Mais l'évolution technologique conduisit,
dans un second temps, la Cour de cassation à reconnaître la
validité de la signature électronique138(*).
177. Jurisprudence Crédicas. Ce sont
les arrêts Crédicas rendus le 8 novembre 1989 par la Cour de
cassation française139(*), consacrant la licéité des conventions
sur la preuve, qui reconnaissent la validité de la signature
électronique. Celle-ci est équivalente à une signature
manuscrite car une chaîne de caractères peut être
assimilée aux caractères représentés par la
main140(*). Certaines
conventions relatives à la preuve définissent la signature
électronique comme un ensemble de chiffres qui résultent d'un
calcul algorithmique déclenché ou initié par la frappe
d'un code confidentiel.
178. Les arrêts Crédicas ont
été rendus dans des affaires concernant ce qu'il convient
d'appeler la « signature électronique »
dans les cartes de crédit, de retrait, de paiement en matière
bancaire. Et c'est à l'occasion d'un paiement par carte de paiement que
la Cour de cassation a consacré la signature électronique. Il
s'agissait, dans ces espèces, de l'emploi d'un code secret pour
l'utilisation d'une carte bancaire. Selon la convention de preuve, la saisie du
code en complément de l'utilisation de la carte permet de
présumer que l'ordre de paiement a bien été
effectué par le titulaire de la carte. Cette décision,
au-delà de la reconnaissance de la validité des conventions de
preuve, prend en compte le procédé de signature
électronique choisi comme mode de preuve.
179. A la suite de la jurisprudence
Crédicas, le législateur est intervenu pour asseoir
définitivement la validité de la signature
électronique.
2- La consécration
législative
180. Dans différents pays, les
pouvoirs législatifs ont résolument amorcé la tendance en
faveur de la consécration de la signature électronique dans les
transactions en ligne dans le cadre du commerce électronique. De
nombreux pays s'étant inspirés de la Loi type, la reconnaissance
de la signature électronique se rencontre dans plusieurs pays de droit
civil141(*) et de common
law142(*).
181. Réforme législative
française. En adaptant le droit de la preuve aux technologies
de la communication, le droit positif français consacre désormais
la signature électronique. Le droit français n'avait pas
prévu le commerce électronique, mais seulement la vente à
distance. Or la reconnaissance de la signature électronique comme mode
de preuve et d'authentification existait déjà à
l'échelon international et la Directive communautaire du 13
décembre 1999143(*) prévoyait un cadre commun pour les signatures
électroniques. La France ne donnera une réponse officielle
à la question liée à la valeur probatoire qu'avec la loi
du 13 mars 2000. Elle répond ainsi aux préoccupations
exprimées par le Conseil d'État dans son rapport de juillet
1998 : Internet et les réseaux
numériques144(*).
182. En effet, le Conseil d'État a
souhaité que le législateur précise la valeur juridique de
la signature et d'un e-mail dans une transaction. L'article 1316,
alinéa 2 du Code Civil semble satisfaire l'attente du Conseil d'Etat. Le
législateur a conféré à la signature
électronique la même force probante que la signature manuscrite
sur support papier145(*) : un écrit sous forme
électronique peut désormais être signé par un
procédé nommé signature électronique, dont
le rôle est analogue à celui d'une signature manuscrite pour un
manuscrit. L'effectivité de la réforme du droit de la preuve,
consacrant la signature électronique ne sera définitivement
acquise qu'avec le décret du 30 mars 2001146(*).
183. Législation canadienne. En droit
canadien, la reconnaissance de la signature électronique par le
législateur ne figure pas expressément dans la Loi uniforme sur
la preuve électronique. Il est regrettable que la signature
électronique n'ait point été évoquée dans le
texte de la Loi uniforme, alors même qu'elle constitue bien souvent l'un
des points les plus importants de discorde entre les plaideurs. Malgré
cette lacune formelle, on peut croire que le document électronique
présentable en preuve, est envisagé dans son entier, englobant
ainsi la signature électronique. En tous les cas, la présence
d'une signature doit être déterminante au niveau de la force
probante attachée au document électronique.
B- Les fonctions de la signature électronique
dans la vente en ligne
184. La signature d'un acte ne peut
émaner que d'une personne qu'elle identifie et à laquelle elle
est rattachée. Généralement, il s'agit d'un moyen
technique qui permet d'identifier et d'authentifier l'auteur d'un document sur
le réseau. L'emploi d'une signature électronique dans le cadre
d'une vente en ligne engage les signataires, commerçants et internautes,
comme le ferait un contrat sous forme papier. Non seulement la signature
électronique accompagnant l'acte identifiera celui dont il émane
(1) et lui conférera une valeur probatoire équivalente à
celle d'un écrit papier, mais elle permettra également de
s'assurer de l'expression du consentement à la vente en ligne (2).
Aussi, non seulement la signature est-elle la marque de la personne qui
s'oblige, mais encore, elle est le signe visible de son acceptation des
obligations contenues dans l'acte147(*).
1- L'identification de l'auteur
185. L'identification du signataire est la
vertu dominante de tout type de signature148(*). En effet, la fonction d'identification constitue le
premier référent de la signature. En matière de vente en
ligne, l'identification des acteurs constitue une préoccupation majeure.
Il faut être persuadé de l'identité de chaque contractant,
mais surtout de son habilitation à contracter en tant que particulier ou
représentant social. Il est donc nécessaire de garantir
l'identification du signataire. De plus, il est nécessaire, pour une
signature électronique, que soit assurée
l'intégrité du document. En effet, il suffirait de modifier
l'acte après apposition de la signature pour modifier la teneur de
l'engagement contractuel.
- La nécessité de garantir l'identification
de l'auteur
186. Pour que la validité de la
signature puisse être assurée, l'auteur doit pouvoir être
identifiable149(*). En
effet, il faut que le signataire puisse être formellement
identifié. Le processus d'identification fait appel à un tiers,
appelé tiers certificateur. Celui-ci intervient pour la certification de
la signature électronique.
187. Cryptologie et identification. Lorsque
l'on énonce : « Je crypte, donc je
suis »150(*), doit-on comprendre que l'usage de
procédés de cryptologie151(*) permet d'identifier les signataires d'actes
juridiques électroniques sur le réseau ? A notre avis, la
réponse doit être positive, étant précisé ici
que la cryptologie à clé publique ne se contente pas d'identifier
la personne ; elle renseigne également sur l'identité de
l'auteur de la signature, contrairement à la signature manuscrite.
188. Cryptologie asymétrique. La
signature électronique utilise une « Infrastructure de
gestion de Clé Publique »152(*). C'est un système
fondé sur la cryptologie asymétrique153(*). Ici, ce n'est pas la
même clé qui crypte et décrypte les messages154(*).
189. En pratique, la clé
privée est un identifiant numérique qui peut être
intégré dans divers supports, tels qu'un logiciel, une carte
à puce. A terme, celle-ci pourra être remplacée par l'usage
de la biométrie, qui permet l'identification de l'être humain par
ses données organiques155(*). La clé publique est, quant à
elle, apposée sur le certificat de signature électronique, sorte
de carte d'identité virtuelle156(*).
190. La clé privée
permet de signer le document électronique ; c'est donc
l'équivalent du stylo. Il est impératif que la clé
privée ne soit pas divulguée et reste en la possession de
son propriétaire157(*). De plus, le recours à un code d'accès
complémentaire pourrait être une garantie supplémentaire.
Ainsi, la mise en oeuvre du procédé de signature ne pourrait
être validée qu'une fois un code ou un
« identifiant » saisi158(*), ce qui permettrait
l'accès à la clé privée.
191. Afin de pouvoir s'assurer que la
clé publique est réellement celle du détenteur
prétendu, que celle-ci n'a pas été usurpée, ou que
le bi-clé159(*) n'a pas été tiré
frauduleusement, il convient de le faire certifier par une tierce partie :
le prestataire de service de certification électronique160(*), qui va émettre un
certificat.
192. En effet, la clé
privée doit rester en possession de l'utilisateur pour signer. La
clé publique devra faire l'objet de tous les soins: le
destinataire du message signé s'en servira pour ouvrir et
déchiffrer la signature au moment de sa vérification. Comment,
pratiquement, la clé publique parviendra-t-elle au destinataire
du message? Si elle lui est transmise directement par le signataire de la main
à la main, comment avoir confiance, comment être sûr qu'il
ne s'agit pas d'une «vraie fausse» clé? C'est la raison
principale de l'intervention d'un témoin privilégié, le
prestataire de service de certification.
193. Certification, tiers certificateurs et
certificats. En l'absence d'un réseau de
certification161(*), la
question des échanges entre personnes qui ne sont jamais rentrées
en relation auparavant reste entière : comment ces personnes
vont-elles échanger de manière sécurisée leurs
clés publiques ? Qui garantira que la clé donnée est
bien celle de la personne annoncée et non pas celle d'un imposteur? Sans
certitude sur l'identité du cocontractant, la validité de la
signature et donc de la transaction peut être contestée.
194. Pour que le recours au système de
cryptage à clé publique offre une sécurité
juridique, des réseaux de certifications doivent être mis en
place. Le tiers certificateur162(*) est un organisme, public ou privé, qui
émet des certificats électroniques163(*).
195. Le certificat est au coeur du processus
de signature électronique. Il est porteur d'une valeur juridique,
puisqu'il va permettre l'identification de la personne164(*). En pratique, l'utilisateur
va transmettre sa clé publique au certificateur165(*). Après certaines
vérifications sur l'identité et la capacité de la
personne, le certificateur va garantir son identité en confectionnant,
puis émettant un certificat électronique qui contiendra la
clé publique et les informations permettant l'identification de la
personne. Aussi, pour assurer le destinataire que le certificat n'est pas un
faux, le certificateur va-t-il devoir signer ce certificat de sa signature
électronique166(*).
196. Certificat électronique simple et
certificat qualifié. Le décret du 30 mars 2001
reconnaît deux types de certificats : le certificat
électronique simple et le certificat qualifié. Le premier est un
document qui se présente sous la forme électronique et qui
atteste du lien entre les données de vérification de signature
électronique et un signataire. Le certificat électronique
qualifié doit répondre à une série de
critères définis par le décret. Il doit avoir
été délivré par un prestataire capable de
délivrer ce type de certificat et comporter certaines
indications167(*).
197. La certification et la gestion des
certificats constituent « la pierre
angulaire »168(*) du système, car dans le cas d'un certificat
qualifié, associé à d'autres conditions, la
fiabilité de la signature sera présumée169(*).
198. Selon l'article 3 du décret du 30
mars 2001, seul le prestataire de service de certification
(PSC) peut délivrer une signature électronique
sécurisée, car il est le seul à mettre en oeuvre un
dispositif de création sécurisé. Le prestataire est, selon
l'article 2, alinéa 11 de la Directive du 13 décembre 1999 sur un
cadre communautaire pour les signatures électronique,
« Toute entité ou personne physique ou morale qui
délivre des certificats ou fournie d'autres services liés aux
signatures électroniques ».
199. Le prestataire de service de
certification est un des éléments clés de la signature
électronique. La délivrance du certificat va permettre
d'identifier la personne physique ayant apposé la signature170(*).
200. Responsabilité du certificateur.
Sous ce rapport, une des parties à la vente en ligne étant mise
dans l'impossibilité de rapporter la preuve de la réalité
du contrat du fait d'un certificat erroné, pourra engager la
responsabilité du certificateur, lequel ne pourra s'exonérer de
cette responsabilité qu'en prouvant qu'il n'a commis aucune
négligence.
201. Outre la nécessité de
garantir l'identification de l'auteur de la signature, il est tout aussi
nécessaire d'assurer la garantie de l'intégrité du
document.
- La nécessité de garantir
l'intégrité du document
202. Risques. L'un des traits
caractéristiques de la signature électronique réside en ce
qu'elle fait l'objet d'une télétransmission171(*). Or, pendant cette
transmission, la signature peut être altérée, comme
d'ailleurs le message lui-même, cette altération peut être
due aux conditions techniques ou à l'intervention de personnes mal
intentionnées. Le message, à son arrivé, peut ne pas
correspondre exactement à celui qui a été envoyé.
Ce sont ces risques qui expliquent la nécessité d'une garantie,
voulue par les parties, de l'intégrité des messages
électroniques, et donc de la signature, qui en est une des
données172(*).
Cette intégrité173(*) devra être permanente : de la
création jusqu'à la vérification par le destinataire du
lien de la signature avec l'acte de vente, puis lors de l'archivage de la
signature électronique.
203. Le terme
« intégrité » est peu usité
en droit174(*).
Techniquement, l'intégrité signifie l'état d'une chose
complète, qui n'a pas subi d'altération175(*). C'est, dans le cas de la
signature électronique, la transmission qui pourra être à
l'origine de la modification du fichier, ce qui explique la
nécessité de contrôler le bon état du fichier
à l'arrivée176(*). Également, le destinataire pourra être
tenté de modifier la teneur du contrat pour, par exemple, limiter son
engagement. Il ne faut pas se limiter à cet exemple : la signature
électronique tend également à protéger le
destinataire car elle va sceller l'engagement contractuel de
l'expéditeur. En ce sens, la signature électronique se veut
protectrice de toutes les parties au contrat.
204. Mise en oeuvre de
l'intégrité. L'intégrité recourt, en
informatique, à l'utilisation de la technique. Elle sera mise en oeuvre
par le contrôle du condensé « hash ».
En effet, le message à signer va tout d'abord être
haché177(*) par
un logiciel. De ce hachage va résulter un condensé178(*), sorte de chaîne
alphanumérique, qui sera le résultat du contenu même du
message. Ainsi, à chaque message correspond un condensé
numérique unique. Toute modification du message jusqu'à la
suppression d'une virgule, engendrerait un condensé différent.
Ensuite, grâce à un dispositif de création de signature
électronique, le condensé va pouvoir être chiffré
par la clé privée de l'expéditeur. Il en
résultera un cryptogramme. C'est pourquoi, l'on emploie
généralement le terme de « signature
numérique ». Le lien avec l'acte est donc respecté
parce que la signature est le condensé du document à signer.
Techniquement, ce lien est indiscutable.
205. Vérification de la signature.
Lors de la réception du message, les données de la signature
électronique devront être vérifiées. On utilisera,
pour ce faire, un dispositif de vérification de la signature
électronique qui permettra de s'assurer de l'identité du
signataire grâce au certificat et de l'intégrité du
message. Il va falloir ainsi défaire ce qui a été fait par
le signataire. Le cryptogramme sera déchiffré grâce
à la clé publique de l'expéditeur, ce qui va permettre de
retrouver le résumé du message ou
« hash », garant de l'intégrité.
Parallèlement à cela, le message sera haché par le
destinataire. Il suffira alors de comparer les deux
résumés : s'ils coïncident, la signature est
validée.
206. Si l'intégrité peut
être assurée lors de la réception du document, encore
faut-il que celui-ci perdure, pour pouvoir assurer son rôle de preuve
lorsque cela sera nécessaire. En effet, il faut que le fichier
informatique représentatif de l'instrumentum connaisse un
état fixe pendant le temps juridiquement nécessaire.
207. Conservation et preuve. Compte tenu de
la fugacité des données, l'administration de la preuve reposera
sur des éléments conservés. La force probante de
l'écrit électronique ou de sa signature est subordonnée
à la condition qu'ils soient conservés dans des conditions de
nature à en garantir l'intégrité.
208. La question de la conservation est
indissociable de la question de la preuve et correspond à un besoin
pratique réel. La finalité est de détenir un
véritable écrit électronique pouvant être produit en
justice. Les conditions de la conservation vont emporter des effets juridiques,
c'est pourquoi il convient de sécuriser179(*) au maximum cette
conservation.
209. Archivage. Les données sous forme
électronique doivent être archivées dans des conditions
offrant des garanties de sécurité contre toute altération,
modification ou destruction. L'archivage correspond à l'idée de
pérennité de l'information avec la possibilité de la
restituer intacte180(*).
L'archivage peut avoir pour origine la volonté des parties lors de la
conclusion du contrat ou du choix d'un des contractants. La possibilité
d'archiver en interne offre une faiblesse certaine car le fichier reste,
pendant le temps de l'archivage, sous le contrôle direct de l'une des
parties. En effet, en cas de problème interne ou de litige avec les
partenaires aux échanges électroniques, comment s'assurer que le
message sur lequel on raisonne est bien le message considéré?
Comme le message est resté sous le contrôle de l'utilisateur,
celui-ci avait tout le loisir de le modifier et de le rectifier. Ainsi,
sera-t-il préférable de recourir à un tiers archiveur,
distant, à qui l'utilisateur va transmettre les documents à
archiver par voie électronique.
210. Cet ensemble de règles permet de
conférer à la signature électronique une valeur
probatoire. La validité de la signature électronique conduit
à conclure à la manifestation du consentement du signataire
à la vente.
2- La manifestation du consentement à la
vente
211. Le consentement est l'une des conditions
les plus importantes de validité des actes juridiques181(*). Cette exigence est
jugée fondamentale au point que tout vice affectant le consentement est
susceptible d'entraîner l'anéantissement de l'acte. C'est pourquoi
l'expression du consentement doit être consciente. Or, dans le domaine de
l'immatériel, le contrat de vente en ligne n'est pas à l'abri de
tout vice du consentement.
212. Expression du consentement
présumée. A l'effet de mieux comprendre la
spécificité de la signature électronique quant à
l'expression du consentement, il est nécessaire de faire un
parallèle avec la signature traditionnelle. Si la signature
apposée sur le papier établit indubitablement l'identité
de son auteur182(*),
cette certitude n'est que présumée en ce qui concerne son
consentement au contenu de l'acte. En effet, il est constant de signer les
actes juridiques sans vraiment prendre le temps de les lire attentivement.
L'exercice est jugé souvent trop fastidieux et l'on rechigne à la
tâche183(*). De
fait, de nombreux contrats sur support papier184(*) sont ainsi signés sans être lus.
213. Dispositifs de protection du
consentement. Dans le contrat passé électroniquement, la
réalité est souvent différente, car divers dispositifs
sont mis en place à l'effet d'éviter que personne ne signe sans
avoir adhéré, au préalable, au contenu de l'acte.
L'exemple typique est donné par le contrat de vente en ligne sur
Internet. Par des fenêtres successives, une explication
détaillée est donnée sur l'objet de la vente, ses
modalités d'exécution, ses conditions de paiement, etc. Un accord
est exigé sur chaque point, sur chaque rubrique par l'inscription de la
mention « continuer »,
« valider » ou
« ok ». Une telle stratification peut rendre
parfois impatient car le processus se déroule ainsi pendant de longues
minutes. Toutefois, la validation page par page réduit
considérablement la possibilité pour une personne d'apposer son
paraphe sans avoir adhéré au contenu de l'acte de vente. Mais, un
tel système ne peut être efficace que s'il est impossible de
« sauter » les étapes dans le processus.
214. Il sera parfois imposé au
cocontractant, une relecture du contrat. A la suite de cela, il lui sera
demandé de donner son consentement en cliquant une première fois
sur les icônes de validation, puis de le confirmer en validant une
deuxième fois.
215. Conclusion de la première partie.
Nous venons de fournir une confrontation du droit interne de la preuve à
l'opération virtuelle que constitue la vente en ligne. Nous avons pu
nous rendre compte de l'obsolescence et des limites des dispositions
établissant les règles probatoires en droit interne. Toute chose
qui pose le droit positif interne comme inadapté à fournir une
preuve efficace à la vente en ligne. Le constat aussitôt fait, il
nous apparût évident d'envisager les pistes de solutions
susceptibles d'être tracées à l'effet de corriger les
lacunes relevées. A cet égard, outre les perspectives ivoiriennes
caractérisées par leur timidité, nous avons, faisant appel
au droit comparé, exposé les solutions audacieuses
élaborées par diverses législations, occidentales
notamment, pour soutenir la preuve des relations
dématérialisées conclues sur le réseau. La vente en
ligne porte en elle-même les germes de l'internationalité. C'est
pourquoi, il est impossible d'éluder l'étude de l'aspect
« droit international privé » qu'impose une telle
relation. Nous proposons, en ce qui nous concerne, de nous appesantir, dans le
cadre des développements se rattachant à la seconde partie, sur
la vente en ligne et la preuve en droit international privé.
IIème PARTIE :
LA VENTE EN LIGNE ET LA PREUVE EN DROIT
INTERNATIONAL PRIVE
216. Présentation. Le contrat de vente
international joue un rôle essentiel dans les relations commerciales
internationales. Ces dernières trouvent, en effet, leur principal cadre
contractuel dans la vente. La vente en ligne s'inscrit incontestablement dans
un contexte international du fait du caractère transnational du
réseau Internet.
La vente internationale présente une
spécificité dans son régime juridique, distinct de celui
qui sera appliqué à la vente relevant du droit interne. Eu
égard à sa structure juridique particulière, certaines
questions délicates doivent être résolues.
217. D'abord, la question initiale qui se
pose est celle de la détermination du caractère international du
contrat (chapitre I). En d'autres termes, comment s'opère la
qualification internationale du contrat ?
218. Une autre question, qui se posera
logiquement, si le contrat revêt un caractère international, est
celle de la détermination de la loi applicable au rapport juridique.
Notre étude se rattachant à la question de la preuve de la vente,
la préoccupation fondamentale sera la suivante : quel est le droit
applicable à la preuve de la vente en ligne ? (chapitre II).
CHAPITRE I : LE CARACTERE INTERNATIONAL DE LA
VENTE
219. L'appréhension de la notion de
vente ne pose pas de difficulté majeure. La définition en est
fournie par l'article 1582 du Code civil dans les termes suivants :
« La vente est une convention par laquelle l'un s'oblige à
livrer une chose, et l'autre à la payer. »
220. Par contre, la difficulté
réside dans l'appréhension du caractère international du
contrat. En effet, il est très délicat de définir le terme
« international », en ce sens qu'il paraît impossible
de trouver une définition unique applicable à l'ensemble des
contrats internationaux185(*).
221. Ainsi, l'appréhension du
caractère international se fera en référence à
certains critères (section 1). Une fois les critères de
l'internationalité du contrat dégagés, il sera
intéressant de savoir comment ils s'appliqueront à la
réalité de la vente en ligne (section 2).
SECTION 1 : LES CRITERES DE L'INTERNATIONALITE
222. Comme déjà indiqué,
la question de la qualification du contrat international est apparue
délicate, et il est difficile de donner une définition
précise et exacte de la notion de contrat international.
223. Pour saisir l'internationalité du
contrat, des critères sont traditionnellement mis en oeuvre. Il s'agit
d'abord de critères qui relèvent du droit commun (I), enfin, du
droit conventionnel (II).
I : Les critères au regard du droit commun
224. Au regard du droit commun, deux
critères généraux, qui énoncent à leur tour
divers critères, sont pris en compte pour admettre ou non
l'internationalité du contrat. Le premier est un critère
économique (A), le second est un critère juridique (B).
A- Le critère économique
225. Ce critère renferme trois
idées, pour la détermination du caractère international du
contrat.
226. Flux et reflux au-delà des
frontières. En premier lieu, le contrat est international
lorsqu'il met en cause des éléments du commerce international,
dès qu'il apparaît que l'opération contient un mouvement de
biens et de services à travers les frontières. Dans ce sens, et
ce relativement à la qualification des contrats impliquant un paiement
international de nature à autoriser les clauses dites «or» ou
«valeur or» prohibées par la loi, la Cour de cassation a
considéré le paiement comme international dès lors que le
contrat produisait « un mouvement de flux et de reflux au-dessus
des frontières, et des conséquences réciproques dans un
pays et dans un autre »186(*).
227. Pour que le contrat revête donc un
caractère international, il faut que la marchandise se déplace
vers un pays autre que celui où elle se trouvait au moment de la
conclusion du contrat.
228. En d'autres termes, le contrat doit
impliquer un mouvement réciproque de valeurs187(*). Cela signifie qu'il suppose
un déplacement de la marchandise d'une part, et un mouvement des moyens
de règlement d'autre part, au-delà des frontières d'un
Etat.
229. En revanche, on considère que le
contrat ne revêt pas le caractère international s'il n'implique
pas de mouvement réciproque de valeurs. Ainsi, dans le cadre d'un
contrat de prêt conclu à l'étranger, entre
étrangers, stipulé en francs or et remboursable en France, la
Chambre des requêtes de la Cour de cassation, par un arrêt du 31
juillet 1928, annula la clause or au motif qu' « une convention
de ce genre n'impliquait aucun échange de valeurs entre deux pays, et
par suite ne pouvait donner lieu à un règlement
international »188(*).
230. Relativement à la première
idée de flux et reflux au-dessus des frontières pour
déterminer l'internationalité du contrat, on peut conclure que le
contrat est international si la marchandise doit être livrée dans
un pays autre que celui où elle se trouve au moment de la conclusion du
contrat189(*).
231. Transaction dépassant le cadre de
l'économie interne. En deuxième lieu, le contrat est
considéré somme international lorsqu'il se lie à une
opération dépassant le cadre de l'économie interne. En ce
sens, la Cour de cassation a admis la validité de clauses or
insérées dans des contrats à effets internes, mais conclus
en « étroite corrélation » avec une
opération internationale190(*), l'ensemble des deux opérations
présentant un caractère dépassant le cadre de
l'économie interne.
232. Opération mettant en jeu les
intérêts du commerce international. Enfin, un
troisième critère a été élaboré.
Selon ce critère, le contrat est international lorsqu'il met en jeu les
intérêts du commerce international. La Cour d'appel de Paris a
été amenée à se prononcer sur
l'internationalité d'un contrat au regard de ce critère.
233. Dans une affaire opposant deux
sociétés italiennes à propos d'une vente de deux navires,
recherchant si l'arbitrage présentait un caractère international,
par application de la règle suivant laquelle « est
international l'arbitrage mettant en cause les intérêts du
commerce international », la Cour a d'abord recherché si
le contrat donnant lieu au litige, mettait lui-même en cause les
intérêts du commerce international. Affirmant le caractère
international du contrat, elle faisait remarquer que l'acquéreur
agissait pour le compte d'une société étrangère en
formation, mettant aussi en évidence l'origine exclusivement
étrangère des fonds destinés à l'acquisition des
navires191(*).
234. Il faut dire que la précision
limitée du critère économique, a conduit à
préférer une approche purement juridique.
B- Le critère juridique
235. Relation connectée à plusieurs
ordres juridiques. De façon générale, le
critère juridique dépend principalement de l'analyse des
éléments de la relation contractuelle qui concerne les parties,
l'objet et la cause du contrat afin de vérifier s'il existe un lien avec
plusieurs droits nationaux. En effet, le contrat est international lorsqu'il
présente un lien avec plusieurs systèmes juridiques192(*) ; autrement dit, il se
rattache à des normes juridiques émanant d'Etats
différents193(*).
236. Un exemple pour déterminer
l'internationalité du contrat a été énoncé
par M. JACQUET. Il a fait valoir que « le contrat conclu à
Paris entre un Français résidant en France et un Belge
résidant en Belgique impliquant la livraison d'une machine en Italie et
un paiement en France peut être tenu pour international car il
présente des liens avec trois pays et donc trois systèmes
juridiques »194(*).
237. Il en résulte que le contrat
international se caractérise par des éléments
d'extranéité qui sont notamment le lieu de conclusion, le lieu
d'exécution ou la nationalité. Mais la question qui se pose est
celle de savoir lequel de ces éléments peut être
déterminant dans la qualification internationale du contrat.
238. Efficacité limitée de
l'élément « nationalité ». Il
importe de noter que pour M. KAHN, il faut « rejeter
l'idée que la nationalité des parties puisse jouer un rôle
déterminant comme moyen de reconnaître si une vente est interne ou
internationale. La différence de nationalité, et surtout le fait
pour un commerçant de ne pas avoir la nationalité de son lieu de
résidence auront des répercussions sur les conditions dans
lesquelles il pourra exercer son activité ou jouir de certains droits.
Mais, il ne semble pas qu'un contrat puisse être
qualifié d'international parce que le vendeur et l'acheteur n'ont pas la
même nationalité, en particulier dans le cas où toutes les
opérations se déroulent sur un même territoire. Par contre,
si le domicile commercial de chacun des contractants se trouve dans des pays
différents, on peut présumer que les différentes
opérations concernant la vente se dérouleront dans des pays
différents »195(*).
239. Nationalité et lieu de conclusion du
contrat. M. MAYER, pour ce qui le concerne, a soutenu que
« ni la nationalité des parties, ni le lieu de conclusion
du contrat ne sont à prendre en considération (sauf lorsqu'ils
coïncident), la première parce qu'elle ne caractérise pas
l'opération, le second parce qu'il est trop facile aux parties de le
situer fictivement où elles le jugent bon »196(*).
240. Nationalité, lieu de conclusion et lieu
d'exécution. On peut, cependant, admettre que la
nationalité des parties et le lieu de conclusion du contrat jouent un
rôle important avec d'autres éléments pour
caractériser l'internationalité du contrat.
241. La Cour de cassation avait refusé
le caractère international à un contrat, en estimant qu'
« un contrat passé entre Français domiciliés
en France, qui soumettait au droit français les rapports des parties
entre elles, n'avait pas, même si l'un des contractants était
appelé à s'expatrier, le caractère
international »197(*).
242. Cette décision a
été fortement critiquée car elle ne tient pas compte du
lieu de l'exécution en dépit de l'importance de cet
élément pour caractériser l'internationalité du
contrat198(*).
243. En définitive, on peut observer
que ni le critère économique, ni le critère juridique, ne
peuvent être déterminants isolément dans la qualification
du contrat international. En conséquence, les décisions
jurisprudentielles sont marquées par une dualité entre le
critère économique et le critère juridique. Ainsi,
malgré l'adoption du critère juridique, la jurisprudence reste
également sensible à l'élément économique
qui, dans certaines affaires, joue un rôle déterminant.
II : Les critères au regard du droit
conventionnel
244. Plusieurs conventions internationales
portant sur la plupart des contrats ou relatives spécifiquement à
la vente, ont été adoptées sur la question du
caractère international du contrat.
245. Apport limité du droit
conventionnel. Il faut déjà indiquer que ces conventions
sont d'un apport très limité en droit positif ivoirien. Celle qui
est actuellement en vigueur en Côte d'Ivoire est la convention du 15 juin
1955, relative à la loi applicable aux ventes à caractère
international d'objets mobiliers corporels. Cependant, il faut regretter
qu'elle ne contienne aucune indication sur la détermination du
caractère international de la vente.
246. Néanmoins, il convient de noter
l'existence de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux
obligations contractuelles, et la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les
contrats de vente internationale de marchandises.
247. Convention de Rome du 19 juin 1980.
S'agissant de la Convention de Rome du 19 juin, il est indiqué à
l'alinéa 1 de l'article premier, que la Convention régit les
rapports contractuels « comportant un conflit de
lois ». Il faut dire que les solutions déjà
acquises en droit commun serviront de base à l'appréciation du
caractère international du contrat, conduisant nécessairement
à un conflit de lois dans l'espace.
248. Convention de Vienne du 11 avril 1980.
Pour la Convention de Vienne du 11 avril 1980, l'article premier énonce
que la vente sera internationale dès lors que l'établissement du
vendeur et celui de l'acheteur sont dans des Etats différents. Au sens
de cette Convention, la condition d'établissement dans des Etats
différents constitue le critère de l'internationalité du
contrat.
249. Mais, l'on doit regretter que la
Convention de Vienne ne fournisse aucune définition de la notion
d'établissement.
250. Finalement, nous observons que, pour la
détermination du caractère international du contrat, plusieurs
critères sont mis en oeuvre ; il s'agit principalement de
critères relevant du droit commun, le droit conventionnel reprenant
parfois certaines solutions du droit commun.
SECTION 2 : L'APPLICATION DES CRITERES A LA VENTE EN
LIGNE
251. Intérêt de
l'internationalité. L'intérêt fondamental qui
s'attache à la question de l'internationalité du contrat est
celui se rattachant à la possibilité ou non pour les parties
d'élire le droit applicable à leur convention. Les parties
à un contrat international peuvent donc faire le choix de la loi qui
s'appliquera à leur relation. Mais, elles ne pourront s'offrir cette
possibilité que si la vente revêt un caractère
international.
252. Il faut alors savoir si la vente est
internationale. Pour ce faire, les critères énoncés
précédemment pourront servir à l'appréciation de
l'internationalité du contrat. Parmi les critères
dégagés, certains ne soulèvent pas de véritables
problèmes dans le contexte de la vente en ligne. Il en est ainsi du
critère de la nationalité des parties.
253. Il ne s'agira donc pas d'appliquer
l'ensemble des différents critères dégagés
ci-dessus à la réalité de la vente en ligne. Nous
retiendrons, parmi ces critères, ceux susceptibles de poser des
difficultés dans le cadre d'une vente en ligne. Ce sont notamment le
critère se rapportant au lieu de l'exécution (I), et celui se
rattachant au lieu de la conclusion de la vente en ligne (II).
I : Le critère du lieu de l'exécution du
contrat de vente
254. Une précision doit
d'emblée être acquise : l'exécution du contrat en
dehors des réseaux ne soulève pas de difficulté majeure.
En effet, même s'il a été conclu en ligne, ce contrat
renvoie aux règles ordinaires de localisation du lieu
d'exécution. Dans l'hypothèse de la vente sur Internet d'un bien
matériel, on remarquera que le lieu d'exécution sera
généralement celui où le bien commandé devra
être livré.
255. Pour ce qui est du contrat en ligne,
c'est-à-dire celui conclu et exécuté sur Internet, force
est de constater que l'absence de texte solutionnant le problème de la
localisation est manifeste.
256. Difficulté et incertitude des
solutions. L'exécution de la vente en ligne soulève une
véritable difficulté quant à la détermination du
lieu de l'exécution. En effet, dans tous les cas de mise à
disposition de biens informationnels, tels que les logiciels ou la musique, il
convient de déterminer si le vendeur livre le bien sur la machine de
l'acquéreur ou si ce dernier se « déplace »
afin de le récupérer sur la machine du vendeur. En raisonnant par
analogie avec la vente de marchandises, une solution peut être
proposée. Dans cette optique, le lieu d'exécution sera celui du
lieu de livraison.
257. En prenant l'exemple du
téléchargement d'un logiciel depuis un site Internet, et au
regard des solutions retenues, le lieu d'exécution de la prestation
pourra être celui où se trouve le serveur du site du vendeur sur
lequel la transaction a été conclue, le lieu d'hébergement
du serveur depuis lequel le logiciel est téléchargé, ou le
lieu où se trouve l'ordinateur à destination duquel le logiciel
est téléchargé199(*).
258. Un tel raisonnement conduit à
hésiter entre deux solutions. Dans l'exemple du
téléchargement d'un logiciel, il faudra distinguer suivant que ce
logiciel s'installe directement, ou suivant que le logiciel
téléchargé devra être exécuté pour
s'installer. Dans la première hypothèse, le lieu où se
trouve l'ordinateur sur lequel le logiciel a été installé
sera retenu comme lieu d'exécution effectif. Dans la seconde
hypothèse, il faudra tenir compte du lieu de livraison. Cela implique,
compte tenu du format numérique du logiciel, de retenir le lieu
où est hébergé l'ordinateur qui va réceptionner le
produit. Il s'agira en clair du lieu où est situé l'ordinateur
qui permet à l'acheteur d'accéder au réseau, à
savoir soit le lieu où se trouve son ordinateur de réception,
soit, si l'acheteur n'est pas directement relié à Internet, le
lieu où se trouve son fournisseur d'accès200(*).
259. Observons, pour conclure, que la Loi
type de la CNUDCI sur le commerce électronique suggère de retenir
que les données échangées sont réputées
avoir été expédiées du lieu où
l'expéditeur, c'est-à-dire le vendeur, a son
établissement, et avoir été reçues au lieu
où le destinataire, l'acheteur, a son établissement201(*). Cependant, cette Loi type
est dépourvue de force contraignante. Elle se présente seulement
comme un guide à l'attention des Etats qui envisageraient l'entreprise
de révision de leur législation en matière de commerce
électronique.
260. Tout comme la détermination du
lieu de l'exécution, celle du lieu de la conclusion de la vente en ligne
n'est pas évidente.
II : Le critère du lieu de la conclusion du
contrat de vente
261. En matière contractuelle, le
principe est que le contrat est formé au lieu où se trouvent les
parties et au moment où leurs volontés se rencontrent. La mise en
oeuvre du principe ainsi dégagé pose un problème
dès lors que le contrat est conclu en ligne.
262. Pour un tel contrat, conclu sur un site
web marchand, on pourra retenir comme lieu de conclusion, soit le lieu
où est hébergé le site, soit le lieu de résidence
du vendeur, soit le domicile de l'acheteur. Dans le même ordre
d'idée, on pourra réputer formé un contrat conclu par
courrier électronique au lieu de l'émission de l'accord, ou au
lieu de réception202(*).
263. Théorie de l'acceptation et théorie
de l'émission. La doctrine, sur la question de la
détermination du lieu de la conclusion du contrat, a largement
débattu. Deux théories ont dominé les débats en la
matière. Il s'agit de la théorie de l'émission de
l'acceptation ou théorie de l'acceptation203(*), et la théorie de la
réception.
264. Sans reprendre, ici, les
développements de ces théories, on peut simplement retenir qu'en
dernière analyse, la théorie de la réception semble
être la solution consacrée sur la question du lieu de la
conclusion du contrat204(*). On considère qu'il y a réception
dès que la manifestation de volonté parvient dans la
sphère de puissance du pollicitant. Le contrat est conclu au lieu et au
moment où le message d'acceptation parvient dans le système de
l'offrant.
265. Interprétation. Rappelons que les
normes de droit international privé renvoient fréquemment aux
notions de domicile, de résidence, d'établissement, de
siège de l'activité, de siège de l'administration des
personnes morales205(*).
Le problème d'interprétation de ces notions, dans l'univers de
l'Internet, s'était posé. On s'est demandé si le lieu
où est localisé l'ordinateur dans lequel sont
exécutées les informations transmises à travers Internet,
ou bien si le site Internet, peuvent en eux-mêmes compléter les
notions de « résidence, d'établissement ou, celle
d'une succursale, d'une agence ou de tout autre siège de
l'activité »206(*).
266. Solutions envisagées. En
théorie comme en pratique, deux possibilités existent : ou
on fait application de la loi du pays où l'information, lato
sensu, stockée sur un serveur est ainsi à la disposition du
public, ou on applique celle du ou des pays où le public a accès
à cette information.
267. Sollicitation active de l'internaute. Si
l'on penche pour la première solution, on observera, par exemple, que le
contrat est réputé conclu en France, s'agissant d'une information
ou une offre de produits ou de services mise à la disposition du public
ivoirien, malien, sénégalais ou autres, sur un serveur
situé en France.
268. L'ensemble des droits positifs, aussi
bien aux Etats-Unis qu'au Pays-Bas, en Allemagne qu'en France, semble
s'orienter vers cette solution, tenant compte des principes
généraux du droit et de la spécificité de l'outil
Internet. Les informations sont, en principe, soumises à la loi du seul
pays dans lequel elles sont mises à la disposition des internautes (loi
du serveur), dès lors que cette mise à disposition se fait d'une
manière passive, qui implique que l'internaute sollicite activement
lesdites informations. On considère alors qu'il se déplace vers
le serveur afin d'en récupérer l'information de son choix, et
ainsi conclure la convention au lieu où est localisé ce
serveur207(*).
269. Réception d'informations sans
sollicitation préalable. Par contre, dans l'hypothèse
où les informations sont envoyées activement, sans que
l'internaute auquel elles sont destinées les sollicite
préalablement, dans des pays autres que celui où est situé
le serveur, on considère généralement que ces informations
tombent alors sous le coup des lois du pays de réception, la convention
étant alors réputée conclue dans ce pays.
270. Le cyberspace comme élément
d'extranéité ? Par ailleurs, toujours dans le cadre
de la localisation du contrat conclu en ligne, on a agité la question de
savoir si le cyberspace pouvait être considéré comme un
élément d'extranéité ; autrement dit, peut-on
considérer le cyberspace comme un lieu à part, dont la situation
géographique ne se trouve pas sur les espaces terrestres, et donc
étranger aux internautes ?
271. Théorie GUILLEMARD. Sur cette
question, Sylvette GILLEMARD, dans sa thèse208(*), estime que le cyberspace
est une localisation, et que ce faisant, il constitue un élément
d'extranéité. Elle pense, qu'il ne faut pas considérer le
cyberspace exclusivement comme un moyen de communication, au même titre
que le téléphone par exemple. Le faire, c'est, selon elle,
maintenir le cadre exclusivement terrestre, et donc géographique des
relations entre les contractants.
272. Contre cette conception, elle pense
qu'il faut reconnaître au cyberspace une qualité spatiale, et
ainsi admettre l'existence d'une entité qui se situe en dehors de la
planète et de son découpage territorial. A ce titre, cette
entité est « étrangère » à la
terre et à ses territoires. L'espace virtuel est
« étranger », et l'activité qui s'y
déroule est en dehors des territoires nationaux qui forment la terre.
273. Illustration. Le raisonnement de
Sylvette GUILLEMARD conduit à considérer que tout contrat conclu
sur Internet est nécessairement un contrat international. Ainsi, si deux
commerçants ivoiriens, domiciliés sur le territoire de la
Côte d'Ivoire, concluent un contrat sur Internet, ce contrat ne peut
être national, mais nécessairement international du fait de
l'élément étranger que constitue l'espace virtuel
Internet. Ce qui amène alors à déclencher le raisonnement
de droit international privé.
274. Critique de la théorie
GUILLEMARD. Certes, l'analyse est séduisante, mais nous devons
prendre du recul par rapport à celle-ci. En effet, suivre la logique de
l'auteur serait admettre que les parties à un contrat conclu en ligne,
même situées sur le même territoire et ayant la même
nationalité, puissent élire le droit applicable à leur
relation en vertu de la mise en oeuvre de la loi d'autonomie. Ainsi, dans
l'exemple des deux commerçants ivoiriens domiciliés en Côte
d'Ivoire et contractant sur Internet, ils pourraient décider de
soumettre leur contrat à la loi d'un Etat autre que l'Etat ivoirien.
Cette situation peut conduire à échapper, de façon
artificielle à la loi qui, raisonnablement, devrait régir la
convention. Cela n'est pas souhaitable. C'est pourquoi, il convient de
relativiser l'analyse de Sylvette GUILLEMARD.
275. Risques et litiges éventuels. A
l'instar de tout contrat, la vente en ligne comporte des risques juridiques
susceptibles d'engager les parties dans un contentieux. Ces risques peuvent se
développer dans cet univers nouveau, immatériel, que
représente Internet. L'acheteur ne peut alors, matériellement,
toucher, goûter, tester l'objet ou le service convoité
préalablement à son engagement ; il le découvre
après coup, c'est-à-dire, au moment de la livraison.
276. Dans ces conditions, le bien
acheté peut ne pas être conforme à ses attentes, à
la description figurant sur le site Internet du commerçant. Il peut y
avoir également défaut de paiement de la part de l'acheteur. Les
raisons de se plaindre ne manquent pas. Le litige né, il faudra le
résoudre, soit par la voie extrajudiciaire, soit par la voie
judiciaire.
277. Résolution extrajudiciaire du
litige. S'agissant du règlement extrajudiciaire du litige, les
parties peuvent convenir de ne pas recourir aux tribunaux étatiques,
ceci compte tenu des avantages que présente l'alternative de la justice
privée. Les motifs du recours à un mode alternatif de
règlement des différends tiennent le plus souvent à un
souci de discrétion, d'efficacité et de rapidité.
278. Les principaux modes de règlement
extrajudiciaire des litiges sont au nombre de deux : l'arbitrage et la
médiation209(*).
De nombreux organismes ambitionnent de faciliter le recours à ces modes
alternatifs. Plusieurs sites se proposent ainsi de résoudre en ligne les
litiges210(*).
279. Recours à la résolution
judiciaire. Mais les modes de résolution des litiges
extrajudiciaires peuvent échouer. Il faudra alors recourir au
règlement judiciaire. Sur la question, il faut observer que la plupart
des règles nationales et internationales dégagent un principe
commun. Il est unanimement posé que le tribunal du lieu du domicile,
résidence ou établissement du défendeur, est
compétent ; il s'ensuit que les tribunaux de l'Etat dans lequel
celui-ci est établi sont compétents.
280. En somme, le régime de la
compétence territoriale interne est étendu à la
compétence internationale avec toutes ses implications. Il faut, en
outre, ajouter la règle de la compétence fondée sur la
nationalité, suivant laquelle les tribunaux ivoiriens sont
compétents dès lors qu'un national ivoirien est partie au litige
en qualité de demandeur ou de défendeur.
281. Les questions liées à la
compétence internationale sont d'importance, car l'application de telle
ou telle loi est souvent tributaire du tribunal saisi de l'affaire. Ceci dit,
notre analyse ne s'inscrira pas dans la perspective de l'examen des conflits de
juridictions211(*).
282. En effet, s'agissant du problème
de la preuve de la vente en ligne, la question qui revêt une importance
considérable est celle de la loi applicable à cette preuve.
Ainsi, parmi les divers ordres juridiques auxquels est connectée la
relation contractuelle en ligne, quel est celui qui sera appelé à
régir la question de la preuve de la vente?
CHAPITRE II : LE DROIT APPLICABLE A LA PREUVE DE
LA VENTE EN LIGNE
283. Loi d'autonomie. En matière de
détermination du droit applicable à un rapport contractuel de
caractère international, le rattachement retenu est celui de la loi
d'autonomie. C'est la volonté des parties qui fait le lien entre le
contrat et la loi qui lui est applicable. C'est au début du
20e siècle que la Cour de cassation française consacre
le principe : « La loi applicable aux contrats, soit en ce
qui concerne leur formation, soit quant à leurs effets et conditions,
est celle que les parties ont adopté »212(*).
284. On observe donc, en la matière,
qu'est consacré le principe de l'autonomie de la volonté.
L'admission du principe de la liberté contractuelle, implication directe
du principe précédemment énoncé, répond aux
besoins du commerce international, « en permettant que soient
écartées les entraves que constituent des dispositions nationales
généralement conçues en considération des seules
relations internes, et qui se révèleraient inacceptables pour
l'autre partie dans un contrat international »213(*). Le recours à la loi
d'autonomie dans le domaine normatif constitue un principe admis de
façon quasi-universelle214(*).
285. Loi d'autonomie et preuve du contrat.
Mais s'agissant de la loi applicable à la preuve du rapport
contractuelle, il semble que le choix des parties ne puisse s'exprimer de
façon absolue. Divers aspects de la matière de la preuve
échappent à la loi d'autonomie. Le fait est que la matière
de la preuve se révèle complexe comme le souligneront les lignes
qui suivent. En effet, la preuve revêt un caractère hybride.
286. Caractère hybride de la
preuve. Ainsi, d'une part, elle semble étroitement liée
au fond du droit parce qu'elle a vocation à établir l'existence
ou l'absence d'un droit. D'autre part, on peut rattacher la preuve à la
procédure, dans le sens où elle a pour objet, l'activité
du juge, et qu'elle dépend des prérogatives de ce dernier.
287. Quelle conséquence en tirer alors
quant à la résolution des conflits de lois en matière de
preuve, sachant que les règles de fond et de procédure ne sont
pas soumises à un rattachement international identique ? Diverses
solutions, émanant tant de la doctrine que de la jurisprudence ou des
textes, ont été proposées.
288. Champ de l'analyse. Précisons que
la perspective que nous envisageons ne prend pas en compte l'étude de la
preuve dans les procédures arbitrales, qui dépendent
majoritairement de la volonté des parties. Les questions de
compétence internationale afin de connaître les problèmes
de preuve ne seront pas non plus envisagées. Les seules questions qui
seront abordées sont relatives aux difficultés consubstantielles
à l'élection de la loi applicable à la preuve. Ces
difficultés relèvent, par principe, de la méthode des
conflits de lois.
289. Le caractère hybride des règles de preuve,
déjà souligné, procède du fait que certaines
dispositions, en la matière, présentent une nature substantielle,
tandis que d'autres ont une nature processuelle. Cette ambivalence de nature
des règles de preuve conduit à une ambivalence des solutions
suivant la nature desdites règles.
290. Ainsi, distingue-t-on la loi applicable
aux règles de preuve de nature processuelle (section 1) de la loi
applicable aux règles de preuve de nature substantielle (section 2).
SECTION 1 : LA LOI APPLICABLE AUX REGLES DE PREUVE
DE NATURE PROCESSUELLE
291. Preuve et procédure. Comprenant
l'ensemble des formalités qui doivent être suivies en vue de
soumettre une prétention à un juge, la procédure n'est pas
indifférente à la matière de la preuve. Ce faisant, pour
être porté en justice, tout procédé de preuve doit,
selon sa nature, se couler dans une procédure spécifique,
destinée notamment à garantir le respect du principe du
contradictoire. Ce lien entre l'administration de la preuve et la
procédure est aisé à justifier.
292. Sans incidence sur le fond du litige,
les règles relatives à l'administration des preuves
intéressent au premier chef la bonne marche du procès.
« Instituées en vue d'une bonne administration de la
justice, elles tiennent à l'activité proprement juridictionnelle
du magistrat »215(*). Elles constituent par essence des ordinatoria
litis.
293. En outre, il ne semble pas possible
d'imaginer qu'un procédé puisse être admis en preuve si
aucune procédure ne permet de le porter en justice. Il est concevable
alors que l'admission ou l'admissibilité des procédés de
preuve, tributaire de l'administration de ces mêmes
procédés, revête une nature processuelle.
294. Procédure et lex fori.
Le principe est posé qu'en cas de conflit de lois dans l'espace, la loi
du for doit être retenue pour régir la procédure.
La lex fori jouit d'un quasi-monopole dans la procédure.
Autrement dit, les questions d'ordre procédural sont traditionnellement
assignées au domaine de la lex fori216(*). La procédure
demeure le domaine le plus indiscutable et le plus intangible de la lex
fori217(*). Il ne
faut, d'ailleurs, qu'une seule proposition pour consacrer ce
précepte ; ceci explique que la catégorie de la
procédure ne reçoive qu'une place aussi minime dans les ouvrages
de droit international privé218(*).
295. Dans une perspective comparative, il
convient d'observer que certaines législations rangent la
procédure dans la sphère de la lex fori219(*). Ce principe se
rencontre également dans les systèmes jurisprudentiels, tels que
le droit français220(*) et le droit anglais. Dans ce dernier système,
il est intéressant de relever la distinction qui existe entre
rights (substance ou fond) et remedies
(procédure)221(*). Au regard de cette consécration, nous ne
pouvons que marquer notre adhésion à l'assertion suivant laquelle
« il est universellement admis qu'en ce qui concerne le
déroulement du litige, une juridiction interne applique ses propres
règles de procédure : c'est le principe de soumission de la
procédure à la loi du for »222(*).
296. Justification du principe de soumission de la
procédure à la lex fori. Pour admettre le
rattachement de la procédure à la lex fori, deux
idées sont mises en exergue. Dans un premier temps, on soutient que les
règles de procédure ont pour objet le service public de la
justice. A cet égard, il semble impossible de soumettre celui-ci
à une loi autre que celle qui l'a institué. Pierre MAYER et
Vincent HEUZE expliquent que les tribunaux, organes internes auxquels a
été confié le service public interne de la justice, sont
liés par la loi dont ils tiennent leurs pouvoirs. Cette dernière
leur impose la façon dont ils doivent se comporter, c'est-à-dire
la façon dont ils doivent procéder223(*). On observe ainsi que c'est
un principe relevant du droit international public, en vertu duquel l'Etat fixe
souverainement l'organisation et le fonctionnement de ses institutions
internes, qui est souvent évoqué en doctrine pour pourvoir
à l'explication du lien entre la lex fori et la
procédure224(*).
297. Dans un second temps, on relève
que ces règles de procédure, par essence, ne visent qu'à
assurer le bon déroulement du procès, partant elles
s'avèrent indifférentes à la substance du litige. En
conséquence, le juge ne peut s'affranchir de ses règles
processuelles sous le prétexte qu'une loi étrangère serait
applicable au fond225(*). Il en découle que la procédure suivie
pour la résolution des litiges internationaux est identique à
celle qui est suivie pour les litiges internes. Le caractère
international de la situation juridique n'a donc que très peu
d'influence sur les règles de procédure226(*).
298. Dès lors, les implications de ce
rattachement se laissent aisément saisir. Aussi bien l'admission (I) que
l'administration (II) des modes de preuve ont vocation à être
régies par la loi du for.
I : L'application de la lex fori à l'admission
des modes de preuve
299. Sous cette rubrique, une distinction est
opérée en tenant compte de la matière sur laquelle porte
la contestation. Relativement à l'admissibilité des modes de
preuve, on propose la soumission des litiges à une règle de
conflit alternative : le principe serait la compétence de la loi du
for, la loi locale s'appliquant subsidiairement227(*).
300. S'agissant de la force probante, bien
qu'il soit admis que la lex formae doit fixer l'autorité des
écrits, la plupart des auteurs s'accordent cependant pour soumettre les
autres procédés de preuve à la lex fori.
301. Les raisons qui président au
rattachement de la crédibilité des modes non écrits de
preuve à la lex fori (B) seront étudiées à
la suite de celles justifiant la soumission de l'admissibilité des
procédés de preuve à la loi du juge saisi (A).
A- Le rattachent de l'admissibilité des modes
de preuve à la lex fori
302. Dans le contexte du commerce
international, et plus spécifiquement dans celui de la vente en ligne,
il est clair que la protection de la sécurité juridique ne peut
être efficacement assurée que par un rattachement de
l'admissibilité des modes de preuve à la lex loci
actus. Mais, en cas de conflit de lois dans l'espace, la question
pourrait davantage être rattachée à la lex
fori.
Face à cette différence de solutions, laquelle
préférée ?
303. Les réflexions de BATIFFOL. Sur
la matière de l'admissibilité des procédés de
preuve, la solution des conflits de lois semble avoir été
considérablement influencée par les travaux du doyen
BATIFFOL228(*). Au
regard de l'apport du droit comparé, il soulignait que, fidèle
à la tradition enracinée dans les pays latins229(*), la Cour de cassation
française avait, à maintes reprises, affirmé que les
procédés de preuve devaient être déterminés,
comme la forme, par la loi du lieu de l'acte230(*). Il indiquait, néanmoins, à juste
titre, que cette solution méconnaissait la doctrine et la jurisprudence
des pays germaniques et de common law, qui appliquaient en la
matière la loi du for231(*).
304. En outre, l'éminent auteur,
faisait remarquer que si la solution proposée par la Cour
régulatrice assurait à la règle locus regit actum
son effet sur la preuve, elle exagérait, cependant, le lien entre la
preuve et la forme ; il n'y aurait aucun lien entre la forme et les
preuves non écrites. En témoigne cette réflexion :
« N'appartient-il pas à la loi du for de dire si
tel moyen de preuve pourra être considéré comme convaincant
par le juge ? Nous avons admis que la qualité pour témoigner
relevait de la loi du for parce qu'en matière de
crédibilité des individus, la loi pouvait difficilement
transiger ; il semble que le degré de confiance dû à
un moyen de preuve pose un problème du même ordre. La conviction
du juge est un phénomène psychologique qui est indépendant
du lieu d'origine de l'acte litigieux ; les règles que la loi lui
impose tiennent principalement au souci d'une administration de la justice
rapide et sûre »232(*).
305. Convaincu qu'il était non
seulement possible, mais surtout nécessaire de concilier les deux
solutions233(*),
l'éminent auteur tirait en définitive la conclusion
suivante : l'admissibilité des modes de preuve devait
dépendre de la loi du for, sous réserve de la
possibilité offerte aux parties de réclamer les modes admis par
la loi du lieu où elles avaient contracté.
306. La solution énoncée par
BATIFFOL est révélatrice des tendances doctrinales contemporaines
qui fondent l'élaboration des règles de conflit de lois sur
l'analyse approfondie du droit interne en s'efforçant de maintenir
l'équilibre entre les exigences des intérêts nationaux et
celles du commerce international.
307. Portée de la réflexion de
BATIFFOL. Cette solution a fortement influencé l'orientation
jurisprudentielle de la Cour de cassation, de même que la
rédaction de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable
aux obligations contractuelles.
308. A cet effet, l'article 14, alinéa
2 de la Convention énonce que « les actes juridiques
peuvent être prouvés par tout mode de preuve admis soit par la loi
du for, soit par l'une des lois visées par l'article 9 selon laquelle
l'acte est valable en la forme, pour autant que la preuve puisse être
administrée selon ce mode devant le tribunal
saisi »234(*).
309. La solution de l'arrêt
Isaac. Quant à la Cour de cassation, elle a, dans
l'arrêt Isaac, estimé que « s'il appartient
toujours au juge (français) d'accueillir les modes de preuve de la loi
du for, c'est néanmoins sans préjudice du droit pour les parties
de se prévaloir des règles de preuve du lieu étranger de
l'acte »235(*).
310. La décision de la Cour de
cassation, dont la formulation diffère de celle de l'article 14,
alinéa 2, dans la mesure où elle ne constitue peut-être pas
tant une règle de conflit bilatérale qu'une directive
donnée au juge a été approuvée par la
majorité de la doctrine.
311. Par cette décision se trouve
dégagée la règle de rattachement applicable en
matière d'admissibilité des modes de preuve des actes juridiques.
En vertu de cette jurisprudence, la recevabilité des modes de preuve des
actes juridiques ressortit à la compétence alternative de la
lex fori et de la lex formae. Considéré comme
l'arrêt fondateur de la nouvelle jurisprudence en matière de
preuve des actes juridiques, l'arrêt Isaac n'a pas
été contredit par la jurisprudence postérieure de la Cour
de cassation.
312. La solution antérieure. La
tradition, depuis la décision de la Cour de cassation du 23
février 1864, soumettait l'admissibilité des modes de preuve
à la loi du lieu où l'acte avait été passé.
C'était l'application de la règle locus regit actum qui
commandait cette solution. On sauvegardait ainsi les prévisions
légitimes des parties. C'est cette indispensable
prévisibilité juridique avec la nature véritable des
règles de preuve que la solution de l'arrêt Isaac tente
de concilier.
313. Possibilité de se prévaloir des
règles de preuve du lieu étranger de l'acte. La
recevabilité ou l'admissibilité des moyens de preuve est une
question de procédure que règle, en principe, directement la
lex fori ; « mais celle-ci, pour tenir compte de
l'extranéité de l'acte, permet aux parties d'échapper
à l'exigence de préconstitution de la preuve, si elle n'est pas
posée par la loi locale, ainsi prise en
considération »236(*).
314. Si l'on souhaitait que l'ensemble des
conflits de lois en matière d'admissibilité des
procédés de preuve relève d'une règle de conflit
unique, l'on doit en constater le contraire. Longtemps rangée dans la
sphère de compétence de la loi du lieu de l'acte, la
recevabilité des procédés de preuve des actes juridiques,
par l'arrêt Isaac, relève de la lex fori, sous
réserve du droit, pour les parties à l'acte, de se
prévaloir également des règles de preuve du lieu
étranger de l'acte.
315. Vocation subsidiaire de la loi du lieu de
l'acte. Ainsi, nonobstant la place importante qui lui est
accordée dès lors qu'il en va de la preuve des actes juridiques,
la loi locale n'aurait qu'une vocation subsidiaire à s'appliquer en la
matière. Le principe dégagé est bien le suivant :
l'admissibilité des modes de preuve ressortit à la
compétence de la loi du juge saisi des conflits de lois dans
l'espace.
316. Application à la vente en ligne.
Appliquée à la vente en ligne, la règle
énoncée déterminera si les procédés de
preuve électroniques brandis par une partie seront recevables devant le
juge saisi. Ce dernier devra, en vertu du principe, se référer
à sa propre loi pour décider.
317. Mais, les parties ont également
la possibilité de se prévaloir des règles de preuve du
lieu étranger de l'acte. La difficulté dans cette dernière
hypothèse est celle qui se rapporte à la détermination du
lieu de l'acte de vente en ligne, comme développée
précédemment.
318. Conclusion. Pour conclure sous ce titre,
observons que pendant longtemps, la Cour de cassation n'a tranché les
litiges relatifs aux conflits de lois en matière d'admissibilité
des modes de preuve qu'en référence à la loi du fond ou
à la loi de survenance du lieu de l'acte. Ainsi fut-il
décidé à plusieurs reprises qu'en cas de conflit de lois
dans l'espace, un acte juridique devait être régi par la loi du
lieu où il était passé « quant à sa
forme, à ses conditions fondamentales et à son mode de
preuve »237(*). La loi du juge saisi n'occupait qu'un domaine
très réduit. Toutefois, depuis la fin des années
cinquante, la Cour de cassation sembla avoir inversé les solutions. La
compétence de la lex fori est beaucoup plus souvent retenue,
même si elle se combine parfois avec celle de la loi du fond ou de la loi
locale.
319. Les règles actuelles de conflits
de lois en matière d'admissibilité des procédés de
preuve s'offrent comme le fruit d'une analyse fournie par BATIFFOL, analyse qui
fut, par la suite, consacrée par la jurisprudence de la Cour de
cassation, ainsi que par la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi
applicable aux obligations contractuelles.
320. Suivant la logique de BATIFFOL, en droit
interne, la preuve relèverait, dans divers domaines, de l'intime
conviction du juge, ce qui confèrerait aux règles relatives
à la recevabilité des procédés de preuve une nature
processuelle, justifiant, en cas de conflit de lois dans l'espace, la
soumission de la matière à la loi du juge saisi.
321. Le principe étant posé du
rattachement de l'admissibilité des procédés de preuve
à la lex fori, il n'en va pas différemment en ce qui
concerne la crédibilité des modes non écrits de preuve.
B- Le rattachement de la crédibilité des
modes non écrits de preuve à la lex fori
322. Liée intimement à la forme
des actes, de même qu'au respect des prévisions des parties
contractantes, la crédibilité ou la force probante des
écrits étrangers, sous réserve de quelques exceptions,
doit ressortir à la loi du lieu de rédaction de ces instruments.
Une telle solution n'est pas nécessairement transposable à la
crédibilité des modes non écrits de preuve.
323. Doctrine dominante. En effet, bien
qu'admettant que la force probante des procédés écrits de
preuve doive relever de la lex loci actus, la majorité des
auteurs suggèrent néanmoins que la crédibilité des
procédés non préconstitués de preuve relève
de la lex fori238(*). Cette solution semble tellement évidente que
le doyen BATIFFOL ne trouve même pas nécessaire de la justifier.
324. En ce qui concerne les preuves non
écrites, il énonce d'ailleurs que « la force
probante ne peut être réglée que par la loi du for :
on ne voit pas quelle autre loi pourrait s'appliquer à des preuves non
préconstituées »239(*).
325. En droit interne, la force probante des
modes non écrits de preuve est traditionnellement laissée
à la libre appréciation du juge. Il en est ainsi du
témoignage et des présomptions du fait de l'homme.
326. Le témoignage. Du fait qu'elle
revêt un caractère indéniablement subjectif, fonction des
qualités personnelles du témoin, la preuve par témoignage,
quant à sa crédibilité, est, en droit interne
abandonnée à la libre appréciation du juge240(*).
327. Plusieurs arguments permettent de
justifier une telle solution : soit qu'ils manquent eux-mêmes
d'impartialité, soit qu'ils subissent des pressions de la part des
parties, les témoins peuvent tout d'abord procéder à des
déclarations mensongères ; ensuite, un long délai
sépare fréquemment l'instant de la constatation des faits
relatés et leur déposition dans le prétoire, ce qui
suppose inéluctablement un effort de mémoire de la part du
témoin ; or, avec le temps, « les souvenirs
s'appauvrissent ou, ce qui peut être plus redoutable, s'enrichissent par
un travail mental inconscient »241(*).
328. Intime conviction du juge saisi. Par
ailleurs, il est exigé du témoin d'exprimer par des mots ce qu'il
a personnellement constaté. Un nouveau risque de déformation des
faits en résulte, « d'autant plus sérieux que les
questions posées au témoin pour obtenir de lui les indications
utiles orientent et influencent l'expression du
témoignage »242(*). Ce faisant, le juge, confronté à un
témoignage, quant à l'appréciation de sa force probante,
jouit de la plus grande liberté pour décider, selon son intime
conviction, de l'existence des faits rapportés.
329. Dans l'hypothèse d'un conflit de
lois dans l'espace se rattachant à l'autorité d'un
témoignage, et eu égard à ce qui vient d'être
énoncé, il semble difficilement concevable de soustraire la
matière à la compétence de la loi du juge saisi.
D'ailleurs, la Cour de cassation française, dans deux affaires où
les juridictions allemandes avaient admis la preuve de relations sexuelles en
vue de fonder des allocations de secours alimentaire à la charge des
pères présumés, s'est ainsi prononcé pour le refus
de l'exequatur aux jugements en invoquant l'ordre public international
français243(*).
330. En réalité, dans lesdites
décisions, la Cour de cassation n'a manifestement pas voulu accorder
force exécutoire au motif que le procédé de preuve retenu
par le juge étranger en application de sa propre loi, n'avait pas
réussi à convaincre le juge français saisi de l'exequatur.
331. Les raisons qui justifient la soumission
de la crédibilité des témoignages à la loi du juge
saisi sont généralement appelées à expliquer le
rattachement à cette loi de la force probante des présomptions du
fait de l'homme.
332. Les présomptions du fait de
l'homme. La preuve par présomptions du fait de l'homme n'est
admissible que dans les hypothèses où la preuve testimoniale
l'est elle-même. La valeur de la preuve par présomptions est
totalement subordonnée à l'intime conviction du juge. En effet,
ces présomptions sont abandonnées « aux
lumières et à la prudence du magistrat »244(*). Ce constat a
nécessairement un impact, en cas de conflit de lois dans l'espace
portant sur la force probante d'une présomption du fait de l'homme.
333. Pouvoir d'appréciation du juge
saisi. En effet, dans la mesure où une présomption de
fait est administrée devant le juge, et qu'elle laisse à ce
dernier un large pouvoir d'appréciation, la matière se trouve
indubitablement liée au déroulement de l'instance. Sa nature
processuelle se laisse alors saisir par l'évidence. Dès lors, la
crédibilité d'un tel procédé de preuve ne peut
être appréciée par un juge qu'en vertu des règles
issues de sa propre loi. On ne peut rattacher la crédibilité des
présomptions du fait de l'homme à une autre loi que la lex
fori.
334. En toute logique, parce que ni le
témoignage, ni les présomptions du fait de l'homme ne sont des
preuves préconstituées et se situant hors de la prévision
des parties, leur autorité doit ressortir, en cas de conflit de lois
dans l'espace, à la compétence de la lex fori.
335. Au demeurant, on peut considérer
qu'il serait tout à fait irréaliste de penser, comme l'a,
à juste titre, relevé André HUET, « que le
juge (...) se départisse du souverain pouvoir d'appréciation que
lui attribue la loi (...) au motif que la loi étrangère du lieu
de l'acte ou du fait juridique limite son intime
conviction »245(*).
336. L'aveu et le serment. La solution ainsi
prônée du rattachement à la lex fori vaut
également pour l'aveu et le serment. Ces procédés
« qui ont pour ressort un certain sentiment moral chez le
déclarant »246(*), partagent avec le témoignage et les
présomptions de l'homme, l'itinéraire identique de n'être
fournis au juge qu'après l'introduction du procès. Revêtant
par ceci même un indéniable caractère processuel, leur
soumission à la lex fori ne semble pouvoir être remise en
cause, pas plus que celle des témoignages et présomptions de
fait.
337. S'agissant de l'aveu, on a
déjà indiqué, dans la première partie de cette
étude, qu'il pouvait être extrajudiciaire ou judiciaire. Sans
revenir ici sur les éléments qui les distinguent, nous nous
contenterons de voir si la loi applicable à la force probante est
identique dans les deux hypothèses d'aveu.
338. L'aveu extrajudiciaire. Le Code civil ne
s'est pas prononcé sur la valeur à attacher à l'aveu
extrajudiciaire. La doctrine et la jurisprudence s'en remettre alors au juge
pour apprécier librement la valeur de l'aveu extrajudiciaire. Il a
été ainsi décidé que les juges du fond devaient
apprécier souverainement le degré de confiance à accorder
à une déclaration faite en dehors de leur présence, et
pouvaient s'estimer convaincus par un aveu extrajudiciaire247(*).
339. Cas spécifique de l'aveu extrajudiciaire
consigné dans un écrit. Toutefois, il semble que la
lex fori doive être écartée lorsqu'un aveu
extrajudiciaire se présente sous la forme d'un écrit
répondant aux conditions de validité spécifiques des actes
authentiques ou sous seing privé. En effet, si l'auteur de l'aveu a
consigné son aveu dans un écrit, le procédé de
preuve, établi de cette façon, répond à la
qualification de l'écrit. Dans une telle hypothèse, le pouvoir
d'appréciation du juge ne peut trouver à s'exprimer sur le
contenu de la preuve ainsi constituée. Ceci dit, en cas de conflit de
lois dans l'espace portant sur la force probante d'un aveu écrit,
compétence doit être dévolue à la lex loci
actus, autrement dit à la loi du lieu de rédaction du
document248(*).
340. L'aveu judiciaire. Relativement à
la crédibilité de l'aveu judiciaire, elle est rattachée
à la lex fori. En effet, l'aveu judiciaire s'inscrit dans la
logique d'administration de la preuve. Or, il n'est pas discutable que
l'administration des procédés de preuve revête un
caractère éminemment procédural. Traditionnellement, en
cas de conflit de lois dans l'espace, la matière ressortit à la
loi du juge saisi. Le lien de dépendance entre la
crédibilité de l'aveu judiciaire et son administration
établi, il en découle que la force probante de ce
procédé de preuve doive aussi dépendre de la loi du juge
saisi.
341. La solution ainsi dégagée
pour la crédibilité de l'aveu judiciaire, n'est pas surprenante.
Il ne pouvait en être autrement, alors même que la force probante
de l'aveu judiciaire ne dépend de l'observation d'aucune prescription de
forme. C'est pourquoi la doctrine consacrant le rattachement de la
matière à la loi du juge saisi doit être approuvée.
Cette solution n'est d'ailleurs pas spécifique à l'aveu
judiciaire. Elle a aussi vocation à s'appliquer en matière de
serment décisoire, tout comme celle dégagée quant à
l'aveu extrajudiciaire, qui pourra régir le serment
supplétoire.
342. Le serment décisoire.
L'idée a été émise de rattacher la force probante
du serment décisoire, en cas de conflit de lois dans l'espace, à
la loi du juge. En effet, certains auteurs, soulignant que la force probante du
serment décisoire, dans l'ordre interne, s'impose au juge, proposent
cette solution249(*).
343. Certes, la matière, a
priori, semble toucher véritablement au fond du droit. Cependant,
et comme pour l'aveu judiciaire, des éléments permettent de
rattacher la crédibilité du serment décisoire à la
lex fori.
344. En premier lieu, et comme c'est le cas
en matière de preuve littérale, la force probante du serment
décisoire n'est nullement subordonnée à l'observation de
prescriptions de forme.
345. En second lieu, la
crédibilité du serment décisoire est directement
subordonnée aux conditions dans lesquelles ce procédé se
trouve administré en justice. Produit devant le juge et émanant
de l'un des plaideurs, on ne saurait lui contester sa nature processuelle. Dans
la mesure où l'administration des procédés de preuve, en
cas de conflit de lois dans l'espace, doit ressortir à la loi du juge
saisi, et où il existe un véritable lien de dépendance
entre l'administration du serment décisoire et sa force probante, il
semble incontestable de soumettre cette dernière à la loi du
for.
346. Le serment supplétoire. En ce qui
concerne le serment supplétoire, parce qu'il constitue, en droit
interne, une mesure d'instruction destinée à permettre au juge de
connaître davantage les faits objets du litige opposant les parties au
procès, il voit sa crédibilité abandonnée à
la libre appréciation des juges.
347. Application des solutions à la vente en
ligne. Suivant ces développements sur la
crédibilité des modes non écrits de preuve, la solution
que nous retenons pour la vente en ligne est que de tels modes de preuve
apportés par les parties ne peuvent aspirer à être
régis par une loi étrangère. En l'espèce, en
application des raisons énoncées plus haut, il revient à
la lex fori de régler le sort de la crédibilité
des procédés non écrits de preuve dans l'hypothèse
d'un litige opposant les parties à une vente en ligne. En d'autres
termes, et plus concrètement, il appartient au juge saisi du litige
d'apprécier la force probante de ces modes non écrits de preuve
selon son intime conviction, laquelle est nécessairement et fortement
influencée par la culture juridique de l'Etat dans lequel il
siège.
348. Il vient d'être exposés les
raisons pour lesquelles l'admission des procédés de preuve
devait, par principe, relever de la compétence de la loi du juge
saisi ; il convient, s'agissant toujours de l'application de la lex
fori, d'envisager dans quelle mesure les règles de l'administration
des procédés de preuve vont relever de la compétence de
cette loi.
II : L'application de la lex fori à
l'administration des modes de preuve
349. CARBONNIER énonce que
« pour être porté en justice, chaque moyen de preuve
doit, selon sa nature, se couler dans une procédure
particulière »250(*). Et HUET d'ajouter : « la preuve
n'est réputée faite que si elle est régulièrement
produite ou provoquée, selon une méthode et une procédure
que la loi réglemente minutieusement »251(*).
350. Unanimité de la doctrine. Sur
cette matière de l'administration des modes de preuve, il faut noter que
la détermination de la loi applicable ne semble pas, a priori,
soulever de grandes difficultés en droit international privé. La
doctrine, en cas de conflit de lois dans l'espace, est unanime pour dire que
seule la loi du for, loi de la procédure est apte à
régir la matière.
351. Traditionnellement, on admet que les
règles se rapportant aux conditions dans lesquelles les parties à
une instance établissent la réalité de leurs
allégations au regard des modes admis sont sans influence sur le
résultat de la question de fond252(*).
352. Les dispositions relatives à
l'administration des procédés de preuve ont pour objet
immédiat la célérité253(*) et le bon ordre du
procès254(*).
D'ailleurs, « instituées en vue d'une bonne administration
de la justice255(*),
elles tiennent à l'activité proprement juridictionnelle du
magistrat »256(*), autrement dit « de la façon
dont procède, matériellement, le juge pour mener l'instance
jusqu'à son terme »257(*).
353. L'application de la lex fori
à la matière de l'administration des procédés de
preuve se fera tantôt sous l'angle de l'administration des modes
matériels de preuve (A), tantôt sous celui des modes
immatériels258(*)
de preuve (B).
A- L'administration des procédés
matériels de preuve
354. Nous envisagerons, ici,
l'administration, en cas de conflit de lois dans l'espace, des preuves
littérales et des expertises.
355. Administration des preuves
écrites. S'agissant de l'administration des preuves
écrites, il faut observer que l'administration des incidents relatifs
à la production des preuves écrites est indépendante de
l'autorité ou de la force probante de ces procédés de
preuve. Ce lien ne remet pas en cause la soumission de l'inscription de faux ou
de la vérification d'écriture à la loi du juge saisi.
356. On conçoit que la lex loci
actus, en tant que loi applicable à la crédibilité
des modes écrits de preuve, doive régir l'admissibilité ou
la recevabilité des procédures relatives à la contestation
des écrits. On doit également concevoir qu'il appartient à
la lex fori, en tant que loi applicable à l'administration des
incidents relatifs à la preuve écrite, de déterminer les
pouvoirs du juge saisi, ainsi que les formes de l'inscription de faux et de la
vérification d'écriture.
357. Inscription de faux. Par exemple, dans
le cadre d'une inscription de faux, c'est à la lex fori qu'il
reviendra de procéder à la désignation du juge
compétent pour connaître de la demande, de déterminer si
l'inscription de faux doit être soulevée à titre principal
ou à titre incident et de fixer les différentes phases de la
procédure.
358. Vérification d'écriture.
S'agissant d'une vérification d'écriture, la lex fori
déterminera la juridiction apte à connaître de la
contestation, ainsi que le délai d'introduction de la demande, et,
enfin, indiquera si celle-ci doit être présentée à
titre principal ou incident. HUET conclut alors en ces termes :
« toute cette réglementation se rattache à la
procédure, car elle touche à l'exercice même du pouvoir
judiciaire : elle ne peut jamais dépendre que de la loi de l'Etat
dont le juge tient ses pouvoirs de juridiction »259(*).
359. Expertises. Dans le même esprit,
et ce dans le cadre de l'administration des expertises, on retiendra que la loi
du for régira également l'expertise en écriture
que le juge compétent aura, le cas échéant,
ordonnée. Dans cette hypothèse, et à défaut
d'accord entre les parties à la vente en ligne, le juge
déterminera les pièces de comparaison nécessaires à
la bonne exécution, par l'expert désigné, de sa mission.
Bref, et de manière générale, toute expertise doit
être exécutée conformément aux exigences de la
lex fori, dès lors qu'elle se trouve ordonnée par une
autorité judiciaire.
360. L'administration des
procédés immatériels, à l'instar de
l'administration des modes matériels de preuve, sera assujettie à
la loi du juge saisi.
B- L'administration des procédés
immatériels de preuve
361. Les procédés dits
«immatériels» de preuve sont au nombre de trois : le
témoignage, l'aveu et le serment. En cas de conflit de lois en la
matière, il reviendra à la loi du juge saisi de régir les
questions se rapportant à ces modes de preuve.
362. Administration du témoignage.
D'abord, s'agissant du témoignage, il faut remarquer qu'étant
stricto sensu considérées comme relevant des
règles de procédure, ses formes d'administration doivent
indéniablement ressortir à la compétence de la loi du juge
saisi260(*). C'est la
raison pour laquelle, lorsque ce procédé de preuve est
administré en justice au moyen d'une procédure d'enquête,
le «calendrier» de l'enquête sera nécessairement
fixé par référence à la loi du juge saisi. Cette
dernière régira également les modalités de
convocation des témoins et celle de leur audition.
363. Il appartiendra encore à la loi
du for de déterminer dans quelles conditions doivent se faire
les dépositions, à savoir si les témoins doivent
déposer successivement, s'ils peuvent faire l'objet d'une confrontation
ou s'ils peuvent modifier leurs dépositions.
364. Administration de l'aveu. Ensuite, en ce
qui se rapporte, à l'aveu, une doctrine unanime semble désigner
la lex fori comme seule compétente pour déterminer les
règles à respecter en vue d'obtenir et de provoquer un aveu. A
cet égard, la procédure de la comparution personnelle, la
détermination des personnes qui y sont soumises, les pouvoirs du juge en
la matière, la fixation, le cas échéant, des
conséquences attachées à la non-comparution et au refus de
répondre d'un plaideur, seront gouvernés par la loi du juge
saisi.
365. Nonobstant les réserves de
certains auteurs261(*),
il semble acquis que la lex fori ait également vocation
à régir l'administration de l'aveu extrajudiciaire, tout comme
elle est appelée à gouverner la production en justice du
serment.
366. Administration du serment. Relativement
au serment, enfin, la doctrine semble faire preuve d'une convergence
d'opinions. L'administration du serment judiciaire, parce qu'elle tient
essentiellement à la procédure de l'instance, doit
incontestablement être assujettie à la loi du juge saisi.
367. Dans un ordre d'idée identique,
lorsque le serment est déféré par une partie, le jugement
devra préciser que la partie à laquelle le serment est
déféré succombera dans sa prétention si elle refuse
de le prêter et s'abstient de le référer. Ainsi, dans
l'hypothèse de la vente en ligne, le serment, bien qu'il comporte des
risques énormes pour la partie qui le défère, s'il est
employé appellera l'application de la loi du juge devant lequel le
litige est porté, c'est-à-dire la lex fori.
368. Les règles de preuves
caractérisées par leur nature processuelle, comme cela vient
d'être étudié, relèvent de la loi du juge saisi du
litige. Il en va différemment des règles qui présentent
une nature substantielle. Il convient de les examiner pour découvrir la
loi appelée à les régir.
SECTION 2 : LA LOI APPLICABLE AUX REGLES DE PREUVE DE
NATURE SUBSTANTIELLE
369. Précision terminologique. Avant
tout développement, une précision d'ordre terminologique
s'impose, à l'effet de cerner les contours de la nature substantielle
des règles de preuve. En effet, le terme de
« substance » n'a pas le même sens en droit
civil et en droit international privé. En droit civil, la notion de
« substance » désigne
généralement le fond du droit.
370. En droit international privé, par
contre, la notion renvoie aussi bien au fond du droit stricto sensu
qu'à la forme262(*). De fait, il s'oppose à la
procédure263(*).
Les règles de procédure, par essence, ont vocation à
déterminer les formalités à suivre pour soumettre une
prétention au juge.
371. A la différence des règles
de nature processuelle, les règles de nature substantielle
déterminent les conditions d'existence, le domaine et les causes
d'extinction des droits subjectifs. Aussi, les deux catégories de
règles ne sauraient-elles faire l'objet de confusion.
372. Caractère substantiel des règles de
preuve. Cependant, il peut paraître surprenant, au regard de la
finalité reconnue aux règles de nature substantielle, que les
règles de preuve puissent elles-mêmes revêtir un
caractère substantiel. N'affirme-t-on pas souvent que la preuve d'un
droit se distingue du droit lui-même ?
373. Cette distinction ne doit pas faire
illusion ; car même si elle s'en distingue, la preuve sert
incontestablement à établir le fond du droit264(*). Ainsi, aussi bien pour les
dispositions relatives à l'admission des procédés de
preuve, dans une certaine approche du moins, que pour les principes
régissant la charge de la preuve, les règles de preuve se
trouvent intimement liées au fond du droit. La détermination de
la loi applicable sera fonction de l'étendue du lien qui unit la preuve
au droit265(*). Dans
cette perspective, la charge de la preuve dépendra, par principe, de la
loi du fond (I), et l'admission des modes de preuve, sous réserve de ce
qui a été énoncé précédemment, de la
loi de la forme (II).
I : L'application de la loi du fond à la charge
de la preuve
374. Certaines règles de preuve
apparaissent comme « le complément indispensable de la
règle de fond »266(*). La preuve apparaît, à cet
égard, comme une modalité du droit chaque fois qu'il s'agit de
déterminer le plaideur sur lequel pèse la charge de la preuve. Se
rattachant de très près à la substance du droit, cette
question relève également, en cas de litige se rapportant
à la matière comportant un élément
d'extranéité, à la loi du fond. L'application de la loi du
fond s'appréciera tant au regard de la distribution de la preuve (A)
qu'au regard de sa redistribution (B).
A- Le rattachement de la distribution de la preuve
à la loi du fond
375. C'est l'article 14 de la Convention de
Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles qui
appelle les présomptions légales et règles
répartissant la charge de la preuve à être assujetties
à la loi du contrat267(*). La doctrine dominante semble approuver ce
rattachement du fardeau de la preuve à la loi régissant le fond
de la question litigieuse268(*).
376. Analyse d'Eric FONGARO. Reprenant
à notre compte les développements d'Eric FONGARO, dans son
ouvrage sur la loi applicable à la preuve en droit international
privé, nous pouvons énoncer que, traditionnellement, la doctrine
internationaliste, analysant la charge de la preuve comme un aménagement
du droit, estime que la matière doit être rattachée
à la loi régissant le fond de la question litigieuse. De ce fait,
les auteurs semblent adopter une vision réductrice de la charge de la
preuve, limitée à la seule notion de risque de la preuve.
377. M. FONGARO indique qu'une explication
téléologique des dispositions de l'article 1315 du Code civil
permet de justifier le rattachement de la matière à la loi du
fond. Instrument privilégié de la technique au service de la
politique juridique du législateur, l'infléchissement de la
règle de preuve, accessoire et complément indispensable de la
règle de fond, permet de poursuivre en douceur les fins du droit. Il en
découle qu'il appartient à la loi du fond de désigner le
plaideur devant perdre le procès faute d'éléments
suffisants de conviction pour le juge.
378. M. FONGARO constate, cependant, que
« cette vision de la charge de la preuve est quelque peu
réductrice ». En effet, préalablement à la
détermination du plaideur devant perdre le procès si la
vérité n'est pas établie, il est nécessaire de
savoir qui, du demandeur, du défendeur ou du juge, doit réunir
les divers éléments de preuve ; ce que certains ont pu
désigner sous le vocable de « charge positive de la
preuve ». Or, conclut-il, tant la charge pesant sur le demandeur
à la preuve, que celle pesant sur le défendeur à la
preuve, sous-tendue par l'idée de la recherche de la
vérité, sont de nature procédurale.
379. Application de la solution à la vente en
ligne. En définitive, et adhérant à la
thèse d'Eric FONGARO, la conclusion suivante s'impose s'agissant des
conflits de lois relatifs à la charge de la preuve : s'il revient
à la lex fori de déterminer qui, de l'acheteur ou du
vendeur dans le litige à propos d'une vente en ligne, doit réunir
les divers éléments de preuve, il appartient à la loi du
fond de désigner le plaideur qui perdra le procès faute
d'éléments suffisants de conviction pour le juge.
Intéressons-nous, à présent, à
l'analyse des règles relatives à la redistribution du fardeau de
la preuve.
B- Le rattachement de la redistribution de la preuve
à la loi du fond
380. La redistribution de la charge de la
preuve s'opère par le biais des présomptions légales. En
principe, la charge de la preuve pèse sur le demandeur à
l'instance. Nous ne rappellerons pas la règle universelle actori
incumbit probatio qui consacre cette idée. Cette règle, bien
assise, peut être parfois remise en cause par l'effet de
présomptions instituées par la loi. Ces présomptions vont
opérer une «redistribution des cartes». Ainsi, la charge de la
preuve, au lieu de peser sur le demandeur à l'instance, va se
transporter sur le défendeur.
381. Critères proposés pour la
détermination de la loi applicable. Traditionnellement, la
charge de la preuve est rattachée à la loi du fond. Cependant, en
ce qui concerne les présomptions légales, des critères
sont énoncés pour déterminer la loi applicable. Certains
mettent en avant le critère de la finalité de la
présomption, d'autres celui de la portée de ladite
présomption.
382. Selon le critère choisi afin de
déterminer la nature des présomptions légales, les
résultats obtenus sont diamétralement opposés. Si, compte
tenu de leur finalité, celles-ci s'avèrent de nature
substantielle et devraient, en conséquence, être rattachées
à la lex causae, en raison de leur portée, c'est au
contraire un rattachement de principe à la loi du for qui
devrait s'imposer. Partant, la question se pose de savoir lequel de ces deux
critères doit emporter la préférence.
383. Critère retenu. Nous penchons
pour la détermination de la nature des présomptions
légales en raison de leur finalité, car ce critère a le
mérite de la cohérence. Prenant en compte l'ensemble des
présomptions, il fait l'économie de subtiles distinctions entre
présomptions irréfragables et présomptions simples. Il
faut en conclure, qu'en raison même de sa finalité, toute
présomption légale, « quelle que soit sa
résistance à la contestation »269(*) ne peut relever que de la
loi du fond.
384. La conséquence majeure de ce
rattachement s'exprime au regard de la qualification
des présomptions. Régies toutes par la même loi, c'est
la lex causae qui dira si les présomptions légales
qu'elle institue sont irréfragables, simples, ou succombent devant
certains moyens de preuve déterminés270(*). C'est d'ailleurs sur cette
voie que s'engage la jurisprudence271(*), n'admettant l'empire de la loi du juge saisi que si
la loi du fond normalement compétente heurte l'ordre public
international de ce dernier272(*).
385. Si dans le cadre de la
détermination de loi applicable aux règles de preuve de nature
substantielle, la loi du fond gouverne la charge de la preuve, la loi de la
forme, pour sa part, va régir l'admission des procédés de
preuve.
II : L'application de la loi de la forme à
l'admission des modes de preuve
386. Consacrant le rattachement alternatif de
l'admissibilité des modes de preuve à la lex fori et
à la lex loci actus, la règle de conflit de
l'arrêt Isaac met parfaitement en relief la nature hybride de la
matière de la preuve : elle touche aussi bien au fonctionnement de
la justice qu'au droit substantiel.
387. L'assujettissement de la
crédibilité des écrits à la lex loci
actus et des modes non écrits de preuve à la lex
fori est très révélatrice : « le
droit de la preuve se situe à la croisée des chemins entre fond
et procédure »273(*) suivant les termes de M. FONGARO.
388. Dès lors, il importe de
présenter les arguments justifiant la possible soumission de ces
questions à la lex formae, qu'il s'agisse de
l'admissibilité (A) ou de la force probante (B) des
procédés écrits de preuve.
A- Le rattachement de l'admissibilité des
procédés de preuve à la loi de la forme
389. On l'a déjà
souligné : il revient à la même chose de n'avoir pas
le droit ou de ne pouvoir le prouver. Il en résulte que, dans la mesure
où elle se donne pour vocation de convaincre le magistrat de la
réalité d'une allégation, la preuve est aussi
étroitement liée au fond du droit et touche de très
près à la prétention des parties. De fait, dans l'ordre
des conflits de lois dans l'espace, l'application de la loi du fond à
l'admissibilité des procédés de preuve serait sans aucun
doute concevable.
390. Prévision des parties. Observons,
cependant, que la preuve relève aussi de la prévision des
parties. Celles-ci, la plupart du temps, en donnant naissance à une
situation juridique au moyen d'un acte juridique, songeront à la
manière d'assurer le respect de leurs droits dans l'hypothèse
où un litige surviendrait. Ceci est d'une vérité
évidente en matière de vente en ligne où les parties
prendront soin de définir le cadre probatoire de leurs droits
respectifs. Dans l'hypothèse où le litige était
affecté d'un élément d'extranéité, il serait
inacceptable que cette prévisibilité soit déjouée,
par la mise en oeuvre d'un système probatoire différent de celui
auquel les parties entendaient se soumettre. Dès lors, comme dans toute
branche du droit, l'élaboration de règles de droit international
privé doit respecter les prévisions des parties274(*). Cette
prévisibilité a pour fonction de prévenir les
contestations judiciaires car, évidemment, « la vie juridique
existe en dehors de la vie judiciaire »275(*).
391. Sécurité juridique. Il
faut préciser qu'en matière de relations juridiques
internationales, les attentes légitimes des individus reposent
principalement sur l'assurance qu'ils bénéficieront d'une
stabilité de leur situation sur le territoire de tous les pays dans
lesquels ils pourraient se rendre à l'avenir. De cette manière,
ils peuvent faire valoir leurs droits dans les pays où leur situation
juridique trouverait à s'épanouir, sans risquer de se voir
opposer un rejet précisément parce que leur cas ne relève
pas des règles internes. Cette sécurité juridique
protège les individus contre l'arbitraire de l'autorité
judiciaire. Ainsi un auteur a pu écrire que
l'imprévisibilité et l'insécurité juridique
constituent les ferments de l'arbitraire et de l'injustice276(*).
392. Bien souvent, en matière
d'admissibilité des procédés de preuve, ce système
auquel les parties entendaient soumettre leur relation sera celui du lieu de
conclusion de l'acte. Ceci dit, une difficulté demeure : en
s'inscrivant dans une perspective strictement théorique,
l'admissibilité des procédés de preuve devrait relever de
la lex causae ; en considérant les impératifs du
commerce international, et notamment la prévisibilité juridique,
l'admissibilité des modes de preuve tendrait à être soumise
à la loi locale. En pareille hypothèse, laquelle de ces deux lois
appliquer ?
393. La réponse ne fait l'ombre
d'aucun doute. La loi locale doit être préférée.
PORTALIS l'affirmait : « les lois sont faites pour les
hommes, et non les hommes pour la loi »277(*). Il n'est alors pas
envisageable qu'une règle de droit, une règle de conflit plus
spécifiquement, impose une solution de nature à
décourager, à dissuader les sujets de droits de sceller entre eux
des relations du reste parfaitement louables, voire souhaitables au
développement des échanges commerciaux internationaux.
394. Dans la majorité des cas, les
règles de preuve du lieu de conclusion seront les seules accessibles. Ce
faisant, il semble ainsi préférable de subordonner
l'admissibilité des procédés de preuve des actes
juridiques à la lex loci actus. Mais comme déjà
souligné, la spécificité de la vente en ligne pose des
difficultés quant à la localisation du lieu de conclusion de
l'acte. Autrement dit, où le contrat de vente en ligne est-il
conclu ? Les solutions dégagées, plus haut, sur cette
question pourront servir à cette localisation.
395. A l'instar, de l'admissibilité
des modes de preuve, la force probante des procédés écrits
de preuve doit aussi être rattachée à la lex
formae.
B- Le rattachement de la force probante des modes
écrits de preuve à la loi de la forme
396. Si l'autorité des
procédés imparfaits de preuve revêt un caractère
processuel indéniable, la crédibilité des modes
écrits de preuve doit être rattachée au droit
substantiel.
397. C'est au doyen BATIFFOL que l'on doit
d'avoir suggéré la démarche à suivre pour l'analyse
de la question. Depuis son ouvrage sur les conflits de lois en matière
de contrats278(*), la
majorité des auteurs279(*), de même que la jurisprudence, proposent la
détermination de la loi applicable à la crédibilité
des procédés probatoires par l'établissement d'une
distinction suivant les divers modes de preuve.
398. Les conflits de lois portant sur la
crédibilité des actes publics ou privés, ainsi que ceux
relatifs à la valeur des copies et des écrits secondaires,
devraient ressortir à la compétence de la loi du lieu de
rédaction de ces documents. Quant aux conflits de lois se rapportant
à l'autorité ou à la crédibilité des autres
procédés de preuve, leur résolution devrait relever de la
lex fori. Des arguments aussi pertinents les uns que les autres
soutiennent cette distinction.
399. Restriction de la liberté
d'appréciation du juge. Dans un premier temps, on a fait valoir
qu'en droit interne, le caractère privilégié
accordé à l'autorité des écrits contribue à
restreindre la liberté d'appréciation du juge, ce dernier
étant souvent tenu de déclarer établi le fait ou l'acte
constaté par l'écrit, quand bien même il serait convaincu
du contraire. De fait, un rattachement de la matière à la loi du
juge saisi ne se justifiait aucunement.
400. Observation de prescriptions de forme.
Dans un deuxième temps, et comme l'a fait remarquer BATIFFOL,
l'autorité de l'écrit préconstitué
« est attachée à l'observation de certaines
prescriptions de forme ; il serait artificiel de dissocier ces
prescriptions de l'effet qui leur est attribué par la loi qui les
institue, et ce d'autant plus que l'intérêt des parties ne le
réclame pas »280(*).
401. Ce faisant, l'autorité
singulière de l'écrit dans l'ordre interne tenant au respect de
formes extrinsèques, la loi applicable à sa force probante, en
droit international privé, devrait être la lex formae, et
plus spécifiquement la lex loci actus. Une
décision de la Cour régulatrice en date du 10 janvier 1951 est
intervenue en ce sens, en estimant que « la force probante et la
validité en la forme de l'acte olographe rédigé en France
conformément à la loi locale relève exclusivement de la
loi locale »281(*).
402. En définitive, et au regard des
développements précédents, nous adhérons à
la pertinente observation d'Eric FONGARO, pour énoncer que la preuve,
située à la croisée des chemins entre le fond, la forme,
et la procédure, revêt un caractère hybride282(*).
CONCLUSION
403. Peut-être plus que tout autre
développement technologique l'ayant précédée,
l'explosion des nouvelles technologies de l'information et de la communication
a semblé questionner tant la pertinence que l'efficacité du droit
comme instrument de régulation de l'espace social. Par sa
plasticité et sa libre circulation au travers des réseaux
toujours plus étendus et interconnectés, l'information
numérique semble remettre en question une des institutions juridiques
les plus importantes : le contrat.
404. L'un des problèmes majeurs
soulevés par l'Internet et se rapportant au contrat est celui de la
preuve. Rapporter la preuve d'une relation contractuelle n'est pas toujours
chose aisée pour les parties. L'entreprise se révèle
davantage difficile lorsque la transaction est réalisée par le
biais de l'Internet. La vente en ligne, modalité du commerce
électronique est aujourd'hui en pleine expansion. Les modes classiques
de preuve dans la plupart des Etats africains et notamment en droit positif
ivoirien ne sont, certes, pas démunis pour fournir aux parties des
moyens de rapporter la réalité de leurs échanges, en
particulier par la mise en oeuvre du principe de la liberté de la preuve
en matière commerciale.
405. Toutefois, les solutions du droit
positif apparaissent insatisfaisantes. L'Afrique de tradition orale283(*), participe très
activement déjà au phénomène cyber.
Grâce à l'OHADA, le droit des affaires connaît une
harmonisation en Afrique. Mais comment pratiquer aujourd'hui efficacement le
droit des affaires sans prendre en compte le commerce
électronique ? Ceci renvoie à une exigence : l'Afrique,
appelée à être un partenaire incontournable du commerce
électronique doit se doter d'un droit de la preuve en adéquation
avec celui-ci. Plus spécifiquement, il s'agit de sécuriser les
relations contractuelles dans le cadre de la vente en ligne ; cela passe
nécessairement par l'adoption de normes correspondant à la
réalité virtuelle.
406. Pour ce faire, la
nécessité d'une adaptation est urgente aujourd'hui où le
commerce électronique est en expansion. Tandis que de nombreux Etats, en
Occident, ont aménagé leur droit de la preuve pour l'adapter
à la réalité électronique de la vente en ligne, en
Côte d'Ivoire, aucune réflexion profonde n'a encore
été menée sur la question. Les échanges via les
réseaux électroniques sont un phénomène mondial. Et
la plupart des pays développés sont en train d'adapter leur cadre
législatif aux échanges électroniques.
407. En Europe, la Directive du 13
décembre 1999 sur les signatures électroniques définit le
cadre dans lequel doivent s'inscrire les lois nationales : l'Italie et
l'Allemagne ont déjà modifié leur législation. Aux
Etats-Unis, la situation diffère d'un Etat à l'autre, et
plusieurs projets concurrents de lois fédérales sur le
cyberespace sont en projet.
408. L'apparente capacité de
l'Internet à défier le droit a justifié en 1997, en
France, la commande par le Gouvernement d'une étude au Conseil d'Etat,
dans le but d'identifier les moyens s'offrant à l'Etat pour
réguler efficacement ce média. Publié en 1998, le rapport
a réaffirmé en toute confiance le rôle du droit comme
« instrument privilégié de la construction de ce
nouvel espace », soulignant que non seulement « les
questions juridiques suscitées par le développement d'Internet
et des réseaux numériques ne sont pas de nature à remettre
en cause les fondements mêmes de notre droit », mais qu'au
contraire, « elles confirment la pertinence de la
plupart des concepts généraux, parfaitement transposables
à ce nouvel environnement, même si certaines adaptations sont
nécessaires »284(*).
409. L'adaptation des principes du droit de
la preuve au contexte des transactions électroniques, loin d'un simple
aménagement mécanique, est synonyme de bouleversements profonds
qui n'épargneront ni les principes qui sous-tendent, ni les pratiques
qui entourent le droit de la preuve.
410. La question essentielle, dans
l'hypothèse de l'adaptation, est de savoir comment le droit de la preuve
va s'adapter au phénomène de la numérisation, notamment en
matière de vente en ligne. Parce que la vente en ligne met en oeuvre des
flux transnationaux de données électroniques, le
législateur français, inspiré par la Loi type de la CNUDCI
de 1996 sur le commerce électronique, s'est prononcé pour la
reconnaissance juridique de l'écrit électronique à travers
la loi du 13 mars 2000. Cette loi exprime la force d'adaptation du droit
français, qui avait reconnu l'obsolescence des principes classiques du
droit de la preuve fondés sur la prééminence de
l'écrit papier et de la signature manuscrite, face à
l'informatisation des échanges.
411. Le législateur français a
définitivement institué l'équivalence fonctionnelle entre
signatures manuscrites et signatures électroniques. Le rôle de la
signature électronique est désormais analogue à celui de
la signature manuscrite. Elle doit garantir l'authenticité de
l'identité de celui qui a effectué l'opération et
l'intégrité du document échangé. La signature doit
être exclusivement attachée à la personnalité de son
auteur qui en a la totale maîtrise et rester l'expression de l'autonomie
de sa volonté. Elle doit être l'instrument le plus sûr et le
plus immédiat de l'identification de son auteur. Son caractère
inimitable devrait garantir la sécurité des contrats de vente.
412. La signature électronique peut
désormais conférer à un message électronique une
valeur juridique certaine. L'admission de la signature en tant que mode
légal de preuve par certaines législations occidentales semble
bouleverser le formalisme de la pratique contractuelle. On sort
désormais de la preuve d'un support et de la rigidité
conceptuelle à laquelle elle peut renvoyer.
413. Avec la vente on line, nous
sommes en présence d'une véritable mutation, qui
révolutionne le monde contractuel. L'avenir de la vente en ligne,
partant du commerce électronique, est subordonné à la mise
en place d'un droit de la preuve réaliste, c'est-à-dire un droit
qui tient compte des spécificités, sinon de la nature
électronique de la transaction. C'est la raison pour laquelle il serait
souhaitable que le législateur ivoirien, à l'instar de ses
homologues occidentaux et à l'image de certains Etats africains tels que
la Tunisie, le Cap-Vert et l'Afrique du Sud, procède à une
réforme du droit de la preuve pour tenir compte des exigences des
nouvelles technologies de l'information et de la communication285(*). Car il n'est pas
évident que le juge ivoirien, confronté à la solution d'un
litige posant une question de preuve de documents électroniques dans le
cadre d'une vente en ligne, en l'absence de dispositions légales en la
matière, se prononce pour leur crédibilité en termes de
preuve.
414. Force est donc de constater que le
juriste ivoirien est amputé sur Internet face à la vente en
ligne. Il est alors urgent que le législateur, qui jusqu'à
présent, regarde passivement le développement des transactions en
ligne, partant de la vente en ligne, se saisisse de la question, car son impact
sera important sur le développement économique au niveau
national, mais aussi mondial.
415. En tout état de cause, la
question de la réforme du droit de la preuve ne saurait rester longtemps
ignorée, car avec les transactions en ligne, de plus en plus courantes,
la fin du papier semble annoncée.
416. Parce qu'elle se noue dans un espace
transnational, la vente en ligne, par cette dimension internationale, va
nécessairement et inéluctablement poser des problèmes de
droit international, spécialement de droit international privé.
La relation commerciale, affectée d'un élément
d'extranéité, soulève des préoccupations classiques
de la matière. Il s'agit notamment de la détermination de la
juridiction compétente, et du droit applicable au rapport en cause. En
d'autres termes, les problèmes traditionnels de conflits de juridictions
et de conflits de lois vont survenir, qu'il faudra régler.
417. Mais, on se rendra très vite
à l'évidence que si les problèmes sont traditionnels,
l'espace Internet apporte quelques facteurs de complication relativement
à la détermination, notamment du lieu de la conclusion du contrat
et celui de son exécution. Où situer ces lieux ? Même
si quelques propositions ont été faites, se posant parfois comme
des principes en la matière, il faut reconnaître qu'ils ne sont
pas définitivement fixés, partant le débat reste toujours
ouvert à de nouveaux apports.
418. Il a été également
intéressant d'aborder la vente en ligne sous l'angle de sa preuve en
droit international privé. La question de la preuve en droit
international est délicate. L'examinant sous l'angle du droit
applicable, nous avons pu constater que la matière présente
diverses facettes qui rendent complexe son appréhension par une
règle unique de conflit de lois. Plusieurs auteurs, parmi les plus
célèbres tels le doyen BATIFFOL, André HUET, et
récemment Eric FONGARO, n'ont pas manqué de relever le
caractère hybride des règles de preuve qui, parce qu'ayant une
nature processuelle pour les unes, ressortissent à la lex fori,
et une nature substantielle pour les autres, ressortissent ou à la
lex loci actus ou à la lex causae. Là
également, les efforts de la doctrine pour dégager des
règles claires à l'enrichissement de solutions jurisprudentielles
stables sont importants.
419. Les problèmes liés
à la vente en ligne ne s'arrêtent pas à la preuve de la
vente. Cette première étape en cache d'autres tous aussi
fondamentaux : la sécurité des paiements en ligne et la
responsabilité civile sur Internet notamment. A l'instar de la preuve,
ces questions méritent également que des réflexions leurs
soient consacrées. Dans tous les cas, les questions abondent sur le
réseau.
420. Aux termes de cette étude,
certes, nous avons fait une tentative dans un monde nouveau, interactif, en
perpétuel mouvement. Des questions ont été
examinées et des pistes de solutions ont été
proposées. Nous avons mis en relief les particularités techniques
du nouvel environnement, ce qui nous a permis de déceler les
difficultés qu'il peut imprimer à l'institution contractuelle.
Mais, nous n'avions pas la prétention d'épuiser le
débat ; c'est une entreprise, d'ailleurs, quasiment impossible. Et
nous achevons cette étude -avec le curieux sentiment de la commencer,
car en vérité nous la commençons- en nous rendant à
l'évidence suivante : Internet n'a pas finit d'interroger le
juriste !
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* 1 Faut-il dire
« Internet » ou « l'Internet » ?
Alain BENSOUSSAN rapporte que pour Robert CAILLIAU, l'ingénieur du CERN
dont les travaux sont à l'origine du protocole hypertext,
« l'Internet » est désormais le terme
consacré. Selon lui, « la France est le seul pays
où l'on dit «sur Internet» au lieu de «sur
l'Internet». On n'a donc toujours pas compris que l'Internet est une
idée et non une marque de boisson américaine »
(Alain BENSOUSSAN), dir., Internet, aspects juridiques, Paris,
Hermès, 1996, p. 14).
Au Québec, l'Office de la Langue Française
indique : « Le terme «Internet» a
été formé à partir de l'anglais
«INTERconnected NETworks» (ou de «INTERconnection
of NETworks», selon certains) équivalant à
«réseaux interconnectés» (ou à
«interconnexion de réseaux»). Il n'a pas
été construit, comme on le croit parfois, à partir de
«International Network». L'internationalisation d'Internet
s'est faite peu à peu et elle se poursuit toujours d'ailleurs. (...) En
anglais, on utilise l'article défini «the» lorsqu'on
veut désigner le réseau Internet, ceci afin de le
différencier des autres regroupements réseaux qui n'utilisent pas
TCP-IP (qui sont alors écrits avec un «i» minuscule :
«internet»). En français cependant, l'utilisation de
l'article n'est pas nécessaire devant le mot
«Internet» qui est considéré comme un nom
propre ; sans compter qu'il existe un terme précis
(«interréseau») pour désigner les
regroupements de réseaux n'utilisant pas TCP-IP. Par ailleurs, sous
l'influence de l'anglais, on utilise de plus en plus l'article défini
devant «Internet», en français. On ne peut condamner
cette pratique puisque «Internet» peut être
considéré comme une forme abrégée du terme
«réseau Internet» qui, lui, commande l'article.
Enfin, l'utilisation de l'article peut aussi constituer l'expression
stylistique du fait qu'Internet est considéré comme Le
réseau des réseaux. » (Office de la Langue
Française, « Terminologie d'Internet »,
http://www.olf.gouv.gc.ca/ressources/internet/fiches/2074841.htm).
Le terme « Internet » a
été adopté par la Commission générale de
terminologie et de néologie de France et a paru au Journal
officiel de la République française dans un avis
daté du 16 mars 1999.
Pour notre part, et sans entrer dans ces considérations
de préférence terminologique, nous utiliserons
indifféremment les deux variantes, soit Internet ou
l'Internet.
* 2Personne qui navigue sur
Internet, qui passe d'une page à une autre.
* 3 Le réseau est un
lien entre plusieurs ordinateurs, grâce auquel ceux-ci échangent
des informations.
* 4
Frédéric-Jérôme PANSIER et Emmanuel JEZ,
Initiation à l'Internet Juridique, 2e éd.,
Paris, Litec, 2000, p. 7, n° 10.
* 5Acronyme pour National
Association of Securities dealers-automated quotation, marché
boursier américain créé en 1971 et qui a acquis une
importance à la fin des années 1990 quand s'est
développée « la nouvelle
économie ».
* 6 Il importe
d'opérer une distinction entre Internet et des notions tels qu'Intranet,
Web et extranet.
L'Intranet est une sorte d'Internet
« fermé » puisqu'il relie les ordinateurs d'une
société ou d'une organisation tout en offrant les mêmes
fonctionnalités que l'Internet, soit le partage de fichiers,
l'acheminement de courrier, etc. N'y accède pas qui veut car l'Intranet
est protégé du monde extérieur par un coupe-feu (terme
utilisé par l'Office de la Langue Française pour traduire
firewall).
Le Web ne doit pas non plus être confondu avec
l'Internet. Le Web n'est pas un réseau mais désigne un service
proposé sur l'Internet. Le Web est le service qui permet d'avoir
accès à un gigantesque ensemble de documents stockés sur
des ordinateurs dispersés dans le monde entier. Les documents sont
composés d'images, de textes, de sons.
L'Internet doit être aussi distingué de
l'extranet. Afin d'établir des contacts avec d'autres entreprises s'est
développé l'extranet qui constitue une extension des applications
Intranet aux ressources du réseau Internet : site web, messagerie,
news, applications informatiques. Les clients peuvent ainsi accéder aux
ressources internes de l'entreprise sous certaines conditions. Fournisseurs,
sous-traitants, consultants et autres partenaires de l'entreprise peuvent
être intégrés à son activité sans
considération de l'espace et travailler en temps réel. En fait,
l'extranet relie au moins deux intranet entre eux : il s'agit de la
connexion entre deux intranets au moins. Si l'on considère l'Intranet
comme le réseau interne d'une entreprise qui permet à des
utilisateurs internes de communiquer entre eux et d'échanger des
renseignements, un extranet peut se définir comme le lien entre cet
espace virtuel et l'Intranet d'une autre entreprise, ce qui permet à ces
deux entreprises (ou plus) de communiquer en privé et en toute
sécurité et de partager des ressources sur Internet dans leur
propre espace virtuel. La technologie de l'extranet améliore beaucoup
les communications interentreprises entre associés et avec les
fournisseurs, les distributeurs ou les clients.
* 7Sylvette
GUILLEMARD, « Le droit international privé face au
contrat de vente cyberspatial », thèse, Faculté de
droit Université Laval (Québec)/Université
Panthéon-Assas Paris II (Paris), janvier 2003, p. 25.
* 8 Jean CARBONNIER,
Flexible droit. Pour une sociologie du droit sans rigueur,
8e éd., Paris, LGDJ, 1995, p. 320.
*
9Frédéric-Jérôme PANSIER et Emmanuel JEZ,
Initiation à l'Internet Juridique, op. cit., pp. 2-3.
* 10Advanced Research
Projects Agency Network, expérience menée dans les
années 60 par le Département de la Défense des
États-Unis.
* 11La crainte était
celle de la paralysie due à une catastrophe nucléaire.
* 12On dit qu'existe un
réseau informatique dès lors que deux ordinateurs sont
physiquement reliés et qu'ils échangent des données.
* 13En informatique, on
nomme protocole un ensemble de règles qui permettent à
des machines de dialoguer. Les interlocuteurs de ces dialogues sont en fait des
programmes, et pour chaque type de programme, un protocole décrit la
façon d'établir une connexion et d'échanger des
données.
* 14Tansmission
Protocol/internet Protocol. Les transferts de données sur le
réseau sont gérés grâce à l'utilisation
combinée de ces deux protocoles.
* 15On oppose les
réseaux ouverts où toute personne a vocation à
pénétrer (l'Internet est un réseau ouvert à
caractère international) et les réseaux fermés comme les
intranets, dans lesquels l'accès est limité sur un plan
géographique ou fonctionnel (réseau interne à une
entreprise ou réseau national d'une Administration).
* 16Internet étant
l'abréviation d' « interconneted
networks».
* 17Ugo DRAETTA,
Internet et commerce électronique en droit international des
affaires, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 17-18.
* 18 La
sécurité juridique est « un impératif
supérieur, une métarègle du droit. C'est une règle
d'organisation des règles qui régissent la vie en
société (...). Le respect de cet impératif doit permettre
aux sujets de droit d'évoluer
dans un environnement juridique à la fois certain,
d'un point de vue matériel, et prévisible, d'un point de vue
temporel ». Gwenaëlle DUFOUR, « Sécurité
juridique et règles de droit : illustration en droit des
contrats », thèse, Lille II, 2005, pp. 46-47, n° 35. Sur
l'origine allemande du principe de sécurité juridique, v.
Dominique SOULAS DE RUSSEL et Philippe RAIMBAULT, « Nature et racines
du principe de sécurité juridique : une mise au
point », RIDC 2003, p. 95 s.
* 19« C'est la
même chose que de ne pas être et de ne pas être
prouvé ». Jean CARBONNIER, Droit civil : les
obligations, t. IV, n° 44, p. 152.
* 20Selon Pierre PACTET,
« Un droit ne présente pour son titulaire d'utilité
véritable que pour autant qu'il peut être établi, un droit
qui ne peut être prouvé est un droit pratiquement
inexistant ». (Pierre PACTET, « Essai d'une
théorie de preuve devant la juridiction administrative »,
thèse, Paris 1952, p. 3)
* 21Rudolf von IHERING
(1818-1892), jurisconsulte allemand. Issu d'une famille de juristes, IHERING
enseigne successivement à Berlin, Bâle, Vienne, puis, à
partir de 1872, à Göttingen. Conseiller intime de la cour de
Prusse, il reçoit un titre de noblesse héréditaire pour
« services rendus à la science ». Son
oeuvre considérable et sa renommée de professeur ont sensiblement
influencé les juristes français.
* 22Raymond LEGEAIS,
« Les règles de preuve en droit civil: permanences et
transformations », thèse, Poitiers 1954, LGDJ, 1955, p.3.
* 23PLANIOL :
« On appelle «preuves» les divers
procédés employés pour convaincre le
juge. », Traité élémentaire de droit
civil, t. 2, 3ème éd., Paris, LGDJ, p. 1.
* 24Dans la religion
musulmane également, l'importance de la preuve est soulignée.
Dans la lettre d'Omar EL KHATTAB à Abou Moussa EL ACHAARI, on peut lire:
« la fonction de cadi (juge) est un devoir religieux
précis et une tradition qu'il faut suivre. Écoutes bien les
dépositions qui sont faites devant toi, car il est inutile d'examiner
une requête qui n'est pas valide. Tu dois traiter sur le même pied
ceux qui comparaissent à ton tribunal et devant ta conscience, de sorte
que le puissant ne puisse compter sur ta partialité ni le faible
désespérer de ta justice. Le plaignant doit fournir la preuve et
le défendeur doit prêter serment (...) ».
* 25Encyclopédie
Dalloz, Contentieux administratifs II, « Preuve », p.
2.
* 26Paul FORIERS,
« Introduction au droit de la preuve », in La preuve en
droit, (Etudes publiées par Ch. PERELMAN et P. FORIERS), Bruxelles,
Établissements Emiles Bruylant, 1981, p. 13.
* 27Ainsi l'adage
« pas de preuve, pas de droit ».
* 28Car dans l'univers
juridique, on ne prétend pas atteindre à la vérité.
Jean CARBONNIER, Droit civil, Introduction, 18ème
éd., Paris, P.U.F., 1990, n° 173.
* 29Prévus et
régis par les articles 1315 à 1369 du code civil dans sa
rédaction de 1804.
* 30 La charge de la preuve,
on ne le sait que trop, incombe au demandeur, ou plus précisément
à la partie qui allègue l'existence d'un fait. La jurisprudence
ivoirienne est constante sur le respect de cette règle. Voir en ce sens.
Cour suprême (CS), ch. judic., arrêt n° 13 du 2
décembre 1977, Revue Ivoirienne de Droit (RID) 1978, n°
3-4, p. 70 ; CS, ch. judic., arrêt n° 121 du 2 juillet 1991,
Recueil des arrêts de la Cour suprême (RACS) 1997, n°
3, p. 18 ; CS, ch. judic., arrêt n° 487 du 13 octobre 2005,
Actualités juridiques 2007, n° 54, p. 84.
* 31A l'analyse, même
si les dispositions légales n'établissent aucune distinction
entre les deux types de données, il ressort que dans certaines
hypothèses, les données sont dématérialisées
(numérisées) à partir d'un document papier original
(lequel peut être détruit ou archivé
séparément) ; alors que dans d'autres cas de figure, les
données sont directement créées de façon
numérique, et par définition, il n'existe pas de document
original papier.
* 32L'expression «
commerce électronique » qui est délicate à cerner.
À s'en tenir à un inventaire des techniques employées,
elle désigne « les échanges de données
électroniques basées sur des technologies utilisant des moyens
télématiques comme l'EDI, le courrier
électronique transmis avec ou sans recours à l'Internet, les
bases de données partageables, les transferts
électroniques de fonds, les télécopies
sécurisées, le télex, les formulaires
électroniques et les codes à barres ». Cette
définition, cependant, est trop large dans la mesure où elle
permet d'inclure tant les activités commerciales que les
activités culturelles et sociales. Aussi bien, une définition qui
ne considérerait que l'action de l'entreprise appréhenderait le
commerce électronique comme « l'ensemble des échanges
électroniques liés aux activités commerciales
» ou comme « le fait, pour une entreprise
d'utiliser l'informatique, associée aux réseaux de
télécommunication, pour interagir avec son environnement
». Mais en se référant à la notion
d'activité commerciale ou d'activité de l'entreprise, ces
définitions donnent au mot « commerce » un domaine plus vaste
que le droit commercial. Appréhendé ainsi, « le commerce
électronique englobe les diverses communications de l'entreprise : avec
ses fournisseurs, clients (entreprises et consommateurs), partenaires
commerciaux (sous-traitants et distributeurs), filiales, ainsi qu'avec les
administrations et les banques ». On aura compris qu'en
étendant la notion de commercialité, il s'agit d'englober dans le
commerce électronique les fonctions les plus diverses de
l'entreprise. L'on peut, dès lors, rendre compte sous une même
expression de l'utilisation des nouvelles technologies de l'information
dans la vie des affaires. Certains estiment pourtant qu'il faudrait
délimiter plus strictement ce qu'il faut entendre par «
commerce électronique » stricto sensu (En
ce sens, Jérôme HUET, « Le commerce
électronique », in AFTEL, Le Droit du multimédia,
De la télématique à Internet, Paris, Édition
du Téléphone, 1996, p. 211). Ce point de vue, à nos yeux,
est le plus pertinent dans la mesure où la signification juridique du
terme « commerce » ne nous semble pas être
spécifique en matière électronique. Au surplus, une
définition élargie fondée sur la notion
d'activité commerciale ne permettrait pas d'aborder l'ensemble des
contrats électroniques et notamment ceux qui sont passés
entre les particuliers. Or, ce n'est pas la nature de l'activité qui
est déterminante mais le fait que l'informatique soit
utilisée pour conclure un contrat. Mieux vaut alors parler de contrat
électronique ou d'informatisation des relations contractuelles,
même si la plupart des contrats passés sur les réseaux de
télécommunications réalisent, au moins pour l'une des
parties, une opération commerciale.
* 33 Cette modalité
de la vente s'assimile à un système de commande par
échanges de données informatisées. Jérôme
HUET, « Aspects juridiques de l'EDI. Echanges de données
informatiques », D. 1991, chron., p. 181 ; Recomm.
Comm. CE concernant les aspects juridiques de l'échange de
données informatisées du 19 octobre 1994.
* 34 Ainsi, l'acheteur
payera le prix du bien par le biais de l'Internet ; l'acheteur livrera le
bien sur l'ordinateur de l'acheteur par l'entremise de l'Internet.
* 35 V. les débats
doctrinaux et jurisprudentiels sur les deux théories de
l'émission et de l'acceptation.
* 36 Dans la mesure
où la vente en ligne met en situation des personnes qui ne sont pas face
à face physiquement, contractant ainsi par le biais d'un ordinateur,
elle répond à la définition des contrats par
correspondance ou entre personnes éloignées.
* 37 Le cyberespace est une
association de réseaux et de services. Les réseaux
numériques en tous genres sont les liens ; les services permettent
d'utiliser ces liens. L'ensemble des liens et des services se situent dans le
cyberespace. Pour le philosophe Pierre LEVY « les réseaux
ressembles à des routes et à des rues ; les ordinateurs et
les logiciels de navigation sont les équivalents de la voiture
individuelle ; les sites web sont comme des boutiques, des
bureaux et des maisons » (Pierre LEVY, World Philosophie,
Paris, Editions Odile Jacob, 2000, p. 58).
Affinant la comparaison en la développant, Sylvette
GUILLEMARD permet ainsi de rendre à chaque élément sa
fonction : selon sa vision, les ordinateurs ne sont pas des moyens de
transport, comme le propose Pierre LEVY, mais seraient des places de villages
avec des maisons, des boutiques, des lieux publics, habités,
occupés, utilisés par des êtres humains qui se livrent
à des activités, privées et publiques, intellectuelles et
manuelles, etc.
Les places d'un même village sont reliées par des
petits chemins. Ceux-ci constituent des réseaux locaux.
Différents groupes de places ainsi reliées sont eux-mêmes
liés entre eux par des artères plus importantes. L'ensemble de
ces artères représente l'Internet. Evidemment, sur ces
artères, circulent des véhicules, les uns petits, les autres de
taille plus considérable. Certains sont équipés pour
transporter uniquement du courrier (messagerie électronique), d'autre du
matériel (FTP, par exemple) et plusieurs ont des capacités
multiples (Web). Ils sont conduits par des spécialistes en la
matière, les uns aptes à délivrer des lettres et des
petits colis, les autres étant des techniciens capables de
transférer des données et les derniers nettement plus
polyvalents.
Les habitants des places peuvent rester chez eux ou
décider d'ouvrir celle de leurs portes qui débouche sur le
réseau et qui s'ouvre avec une clé ou un code spécial, ce
qui les empêche de l'ouvrir par hasard ou par erreur. Ils peuvent sortir
pour remettre une lettre au spécialiste du courrier ou s'en faire
transmettre une, aller chercher un logiciel chez un de leurs amis qui habite
une autre place. Le libraire du village qui a numérisé l'ensemble
de son inventaire, donne au conducteur du plus gros véhicule les oeuvres
de tous les auteurs russes du XIXe siècle à remettre à un
client à l'autre bout du monde qui les lui a commandées il y a
quelques minutes. Dès que ces personnes ouvrent leur porte codée,
elles pénètrent dans le cyberespace.
* 38Les rencontres
virtuelles, dématérialisées peuvent donner lieu à
une grande variété d'activités et créent
fréquemment des liens de droit. Ces rapports entre personnes qui
relèvent classiquement de divers ordres juridiques ne peuvent manquer de
susciter la curiosité et de retenir l'attention des juristes
versés dans le droit international privé. (Sylvette
GUILLEMARD, « Le droit international privé face au
contrat de vente cyberspatial », op. cit., p. 22).
* 39 Voir cependant la
thèse de Aboudramane OUATTARA, « La preuve
électronique : étude de droit comparé »,
Thèse, Université d'Abdjan-Cocody, 2002.
* 40Ce titre a
été publié à la « Une » du
magazine L'Expansion n°596 du 29 avril 1999.
* 41Vincent GAUTRAIS, Guy
LEFEBVRE, Karim BENYEKHLEF, « Droit du Commerce Electronique et
normes applicables : la notion de lex electronica », in
Revue de droit des affaires internationales, 1997, p. 40.
* 42 Le réseau
internet étant transfrontière parce que débordant le cadre
des frontières, l'offre de contracter qu'il véhiculera le sera
également. Le contrat ainsi conclu sera très souvent un contrat
international et, de ce fait, soumis au droit commun ou spécial des
contrats internationaux en matière de conflit de lois.
* 43 Il convient cependant
de réserver l'hypothèse où, bien que conclu sur Internet,
le contrat ne recevra pas la qualification de contrat transfrontalier. Il
s'agira, plus concrètement, de l'hypothèse dans laquelle les
parties seront situées dans la même sphère territoriale.
Par exemple, l'acheteur et le vendeur sont situés dans le même
pays.
* 44Sur cette question de
risques, v. par exemple de GOUVILLE, « Actualités et
règlementations internationales : exporter par
Internet », mars 2000, sur www.sarthe-export.asso.fr
/actu.cfm ?=actu20 ; Filiga Michel SAWADOGO, « Aspects
juridiques des NTIC : Quelle législation des NTIC pour
l'Afrique ? », 17 janvier 2003 sur
WWW.unitar.org/isd/dt/ddt2-cpte-rendu.html.
* 45Organisation pour
l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires, Organisation instituée
par traité signé le 17 octobre 1993 par les Etats africains de la
zone franc. Selon Kéba MBAYE, « L'OHADA est un outil
juridique imaginé et réalisé par l'Afrique pour servir
l'intégration économique et la croissance ».
Ainsi, le traité OHADA a pour objectif, au plan économique, de
favoriser le développement et l'intégration régionale, de
même que la sécurité juridique et judiciaire.
* 46UN.Doc./A/51/17 (1996).
A l'origine, Loi type sur l'échange de donné informatisé
(EDI). Le groupe de travail des paiements internationaux, renommé
« groupe de travail sur l'échange des données
informatisées » a été finalement baptisé
« Groupe de travail sur le commerce électronique ».
Cette loi type est disponible sur
http://www.daccess-ods.un.org/TMP/5805642.html.
* 47Voir annexe 1 : le
texte de la Loi type et le guide pour son incorporation
* 48Voir en ce sens Eric
CAPRIOLI, « la Directive européenne n°1999/93/CE :
sur un cadre communautaire pour les signatures électronique »,
Gaz .Pal 29/31 octobre 2000, p.1842.
* 49« Les
États membres veillent à ce que les signatures
électroniques avancées (...) répondent aux exigences
légales d'une signature à l'égard de données
électroniques de la même manière qu'une signature
manuscrite répond à ces exigences à l'égard de
données manuscrites ou imprimées sur papier »,
Directive n°1999/93/CE du parlement et du conseil du 13 décembre
1999 sur un cadre communautaire pour les signatures électroniques (JOCE
19 janvier 200, n°113, p. 12).
* 50Loi n° 2000-230 du
13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de
l'information et relative à la signature électronique.
* 51 Voir annexe 2 : le
texte de cette loi.
* 52Institution dont la
vocation est de définir un cadre juridique commun à l'effet
d'éviter les disparités de solutions au sein de la
fédération. Le Canada est, en effet, une fédération
de dix provinces, à savoir : Nouvelle Ecosse, Nouveau Brunswick,
Québec, Ontario, Manitoba, Colombie-britannique, Ile-du-Prince-Edouard,
Alberta, Saskatchewan, Terre-Neuve, et enfin, les territoires du Nord-Ouest et
du Yukon.
* 53Disponible à
l'adresse :
http://www.law.ualberta.ca/alri/ulc/currentfueca99.htm;
http://www.ulcc.ca/fr/us/index.cfm?sec=1&ub=1u2.
* 54 Dans un tel régime,
tous les modes de preuves sont admissibles, le juge ne pouvant a
priori rejeter aucun avant de l'avoir examiné.
* 55V. Lamy Droit de
l'informatique, (sous la direction de Michel VIVANT), 1997, n° 2117
et s. ; Michel VIVANT, « Cybermonde, droit et droit des
réseaux », JCP 1996, éd. G., I, 3969 ;
Eric CAPRIOLI et Renaud SORIEUL, « Le commerce international
électronique : vers l'émergence de règles juridiques
transnationales », J.D.I. 1997, 2, p. 323 et s. ;
Jérôme HUET, « Aspects juridiques du commerce
électronique : approche internationale », Petites
affiches, 26 septembre 1997, p. 6 et s.
* 56Jadis, on accordait, en
effet, plus de foi aux témoignages qu'aux écrits.
« Témoins passent lettres », disait-on. La
sincérité des témoignages se trouvait garantie par la
crainte du parjure. L'écrit ne s'est imposé en France qu'au XVIe
siècle avec l'ordonnance de Moulin (1566), un peu plus de cent ans
après l'invention de l'imprimerie par GUTENBERG (1450), après que
le notariat se soit perfectionné et que la lecture et l'écriture
commençaient à connaître une réelle diffusion.
* 57Les articles 1341 et
suivants du C. civ., relatifs à l'admissibilité des divers
procédés de preuve, figurent de manière discutable sous
l'intitulé « De la preuve
testimoniale ».
* 58Prouver outre
consiste à ajouter à l'acte une disposition qui n'y figurait pas:
dans le prêt où il n'est pas stipuler d'intérêts,
c'est prétendre qu'il en a été prévu; cette
prétention ne peut être rapportée, établie que par
écrit. Prouver contre, c'est établir qu'une des clauses
ne correspond pas à la réalité: dans un prêt de 50
000 f CFA, c'est soutenir que la somme versée était de 60 000 f
CFA; cette allégation ne peut pas davantage être prouvée
autrement que par écrit.
* 59 C'est pourtant
l'attitude adoptée par le Tribunal de première instance dans une
espèce relativement récente, à propos d'une contestation
qui s'était élevée au sujet du paiement d'une
créance que détiendrait une société à
l'encontre d'une autre. Pour le tribunal, « la créance
alléguée tirerait sa source dans des livraisons de bois ;
que ces opérations sont d'ordinaire matérialisées par des
bons de livraison, lesquels cristallisent les liens d'obligation ainsi
nés entre les parties ; que la production du grand livre ne peut,
en l'espèce, suppléer leur absence (...) ».
Par cet énoncé, le Tribunal semble instituer une
règle générale en vertu de laquelle seuls les bons de
commande et les bons de livraison constituent, dans certaines matières
à tout le moins, les moyens de preuve admis en droit commercial. Cette
opinion est absolument contraire à la règle de la liberté
de la preuve en matière commerciale. En exigeant les bons de commande et
les bons de livraison comme seuls procédés de preuve, le Tribunal
viole l'article 5 de l'acte uniforme portant droit commercial
général, qui dispose : « Les actes de commerce
peuvent se prouver par tous moyens à l'égard des
commerçants. » (Tribunal de première instance,
jugement commercial n° 599 du 17 avril 2002 (inédit).
* 60 Cour d'appel d'Abidjan
(CAA), ch. civ. et. com., arrêt n° 317 du 25 juillet 1975,
RID 1975, n° 3-4, p. 80 (en l'espèce, la Cour d'appel a
rappelé que la preuve par témoin pouvait être admise
puisqu'il s'agissait d'un acte de commerce) ; CS, ch. judic., arrêt
n° 13 du 26 mai 1978, RID 1978, n° 3-4, p. 71.
* 61 Les actes uniformes
désignent les règles communes aux États, pris par le
Conseil des ministres de l'OHADA. Le Conseil des ministres est l'organe
normatif de l'OHADA.
*
62« Qualité conférée aux
personnes qui ont le pouvoir d'authentifier des actes.», Lexique
des termes juridiques, 13ème éd., DALLOZ, 2001,
p. 387.
* 63L'authenticité
résulte du dépôt d'un acte sous seing privé au rang
des minutes d'un notaire effectué par tous les signataires de l'acte
(Req. 25 janvier 1927, S. 1927. 1. 237; Riom, 25 juin 1930, Gaz.
Pal. 1930. 2. 254). De même, un huissier agissant en vertu d'une
délégation de la loi pour l'exécution d'un acte entrant
dans ses attributions, imprime à son acte le caractère
authentique (Civ. 25 juillet 1932, S. 1933. 1. 8). Au contraire, un
procès-verbal de constat d'huissier dans lequel est recueilli une
promesse de vente ne constitue pas un acte authentique (Civ. 1re, 19
février 1991, Bull. civ. I, n° 65;
Défrénois 1991. 815, obs. VERMELLE). Ne peut non plus
donner à un acte sous seing privé, un caractère
authentique, le dépôt de cet acte effectué par un
créancier seul entre les mains d'un officier public (Civ. 2e,
11janvier 1968, Bull. civ. II, n° 15). La même solution
doit être retenue pour un rapport d'expertise judiciaire (Civ.
1re, 19 janvier 1999, Bull. civ. I, n° 22).
* 64Ainsi, pour le notaire,
la compétence s'étend à l'ensemble du territoire national,
tandis que l'officier de l'état civil a une compétence
limitée au territoire de sa commune.
* 65L'art. 1318 du C. civ.
énonce, en ce sens que : « L'acte qui n'est point
authentique (...) par un défaut de forme, vaut comme écriture
privé s'il a été signé des
parties ». En application de ce principe, la jurisprudence
indique qu'un acte authentique entaché de nullité peut
néanmoins valoir comme acte sou seing privé établissant
les conventions intervenues entre les signataires sans avoir pour autant
à satisfaire toutes les règles de forme des actes sous signature
privée. Civ. 1re, 11 juillet 1953, Bull. civ. I,
n° 294; Civ. 1re, 8 août 1967, Bull. civ. I,
n° 106; RTD civ. 1968. 147, obs. CHEVALLIER.
* 66L'article 1319,
alinéa 1 du Code civil dispose : « L'acte authentique
fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes
et leurs héritiers ou ayants-cause. » CS, ch. judic.,
arrêt n° 72 du 4 mars 1999, RACS 2000, n° 4, p. 4.
« Attendu que le droit de propriété de D. est
établi par l'acte de vente passé devant Notaire entre lui et la
SICOGI (...) ».
* 67L'inscription de faux
est une procédure spéciale qui sert à constater
l'existence d'un faux en écritures.
* 68 Par ses propres
sens.
* 69Civ. 3e, 3
février 1993, RTD civ. 1993, 826, obs. MESTRE: l'acte
authentique ne fait foi que des faits que l'officier public y a
énoncés comme les ayant constatés ou accomplis
lui-même et ou comme s'étant passés en sa présence
dans l'exercice de ses fonctions.
* 70Civ. 1re, 13 mai
1986, JCP 1986. IV. 206.
* 71Voir plus largement sur
cette question de signature: PLAS, « La signature »,
thèse, Poitiers, 1936.
* 72Civ. 1re, 27
janvier 1993, Bull. civ. I, n° 39; JCP 1994. II. 22195,
note I. PETEL-TEYSSIÉ; RTD civ. 1993, obs. MESTRE.
* 73En effet, en
matière civile, la signature doit être manuscrite. Ne peuvent, par
exemple, y suppléer : une croix (Civ. 1re, 15 juillet
1957, Bull. civ. I, n° 331) ; des empreintes digitales
(Civ., 15 mai 1934, DP 1934, note E.P. ; S. 1935. 1. 9,
note ROUSSEAU).
* 74Art. 1325, al. 1 C.
civ. : « Les actes sous-seing privés qui contiennent
des conventions synallagmatiques, ne sont valables qu'autant qu'ils ont
été faits en autant d'originaux qu'il y a de parties ayant un
intérêt distinct. » La convention est
synallagmatique lorsqu'elle donne naissance à des obligations
réciproques. Par exemple: la vente, contrat qui fait naître des
obligations à la charge du vendeur (livrer la chose) et de l'acheteur
(payer le prix). Il est normal, en pareille hypothèse, que chaque partie
possède une preuve écrite de l'engagement pris par l'autre.
* 75Art. 1325, al. 3.
* 76V. Civ. 1re,
13 novembre 2002, Bull. civ. I, n° 264 ; D. 2003.
AJ. 271 (un époux ne peut être condamné en tant que caution
alors que l'acte de cautionnement porte la seule signature de son
épouse, sans aucune mention du mandat à elle donné par son
mari).
* 77 Les chambres
regroupées de la Cour suprême ivoirienne ont d'ailleurs
décidé, à propos de la preuve d'une convention
constatée par acte sous seing privé, que la simple contestation,
fut-elle vive, de l'acte sous seing privé par celui auquel on l'oppose,
ne peut constituer une dénégation formelle de sa part, dans la
mesure où il ne désavoue pas formellement son écriture ni
sa signature comme le prescrit l'article 1323 du Code civil (CS, ch. judic.,
arrêt n°9 du 15 janvier 1991, RACS 2000, n° 4, p.
27).
* 78Civ. 1re, 15
mars 1988, D. 1998, IR. 101.
* 79V. Civ.
2ème, 15 juin 1994, Bull. civ. II, n° 156.
* 80Loi n° 72- 833 du
21 décembre 1972, modifiée par les lois n° 78-663 du 5
août 1978, n° 93-670 du 9 août 1993, n° 97-516 et 97-517
du 4 septembre 1997.
* 81Aboudramane OUATTARA,
« La preuve électronique : étude de droit
comparé », op. cit., p. 157.
* 82En effet, la preuve
« littérale » désignait
« une écriture apposée en signes lisibles sur un
support tangible ». Pierre CATALA, « Ecriture
électronique et actes juridiques », Mélanges
Cabrillac, Dalloz Litec, 2000, p. 95.
* 83Les forums de discussion
et d'échanges en offrent la parfaite illustration.
* 84 La rapidité est
l'essence même du commerce. Est-il besoin de rappeler que l'expression
« time is money » a été
forgée par le peuple commerçant par excellence, le peuple
anglais. Le fait de ne pas perdre le temps n'est d'ailleurs pas un
phénomène propre au monde commercial moderne. L'historien Jacques
LE GOFF écrit qu'au moyen âge « les manuels de
confesseurs citent parmi les personnes qui peuvent être dispensées
(...) de l'observation du repos dominical les marchands, car leurs affaires ne
peuvent souffrir de délai ». Jacques LE GOFF,
Marchands et banquiers du Moyen âge, 8e éd.,
Paris, PUF, 1993, p. 76.
* 85 Pour prouver un acte
juridique, l'aveu est aussi efficace que l'écrit.
* 86 L'article 1356 le
précise : « il ne peut être divisé
contre lui ».
* 87 La Cour suprême a
pu ainsi conclure à l'existence d'un contrat de bail en
énonçant en des termes très évocateurs que
« l'existence du contrat de bail est établie par l'aveu du
locataire ». CS, ch. judic., arrêt n° 97 du 9 avril
1998, RACS 2000, n° 2, p. 35.
* 88 Notamment en
matière d'aveu extrajudiciaire où les risques qu'il a pu
être extorqué par violence, dol ou erreur sont grands. Remarquons
d'ailleurs qu'il ne présente pas les mêmes garanties que celui qui
est fait au cours de l'instance en cause.
* 89 Le juge reste libre de
sa décision. Le serment n'est utilisé que pour compléter
une preuve et fortifier la conviction du juge.
* 90 Pour cette raison,
seules les personnes capables de disposer de leurs droits peuvent
déférer le serment.
* 91 Il paraît
curieux, paradoxal même que cette déclaration fasse preuve. En
effet, dans une société de cyniques, on s'étonne que le
moyen ait encore quelque utilité. Le postulat est que, par crainte
religieuse (originellement, qui prête serment prend la divinité
à témoin et s'offre à être châtié un
jour par cette dernière, s'il avait menti), les hommes hésiteront
à se parjurer ; ou, plus laïquement, que par sentiment
d'honneur, peur de perdre la face (le serment est prêter devant les
magistrats, représentants de la société), outre la menace
des peines du faux serment, il hésitera à mentir.
* 92 La jurisprudence en
matière de serment décisoire étant assez rare, on
relèvera avec intérêt cet arrêt de la Cour d'appel
d'Abidjan qui énonce que lorsque le serment décisoire a
été régulièrement déféré par
les appelants à leur adversaire et qu'un arrêt avant dire droit a
fixé une audience pour recevoir le serment, si les parties ne se
présentent pas à cette audience, ni à l'audience de
renvoi, ni à une troisième audience, ayant été
prévenues qu'il serait alors statué en l'état, même
en leur absence, ce comportement doit s'analyser en un refus de prêter le
serment, qui fait succomber le plaideur dans sa demande. CAA, ch. civ. et com.,
arrêt n° 234 du 15 avril 1977, RID 1978, n° 3-4, p.
74 ; v. également CS, ch. judic., arrêt n° 48 du 11
février 1999, RACS 2000, n° 3, p. 61.
* 93On appelle
témoins une personne qui a constaté elle-même, par ses
propres sens, le fait où l'acte au sujet duquel elle porte son
témoignage. C'est celui qui a vu ou qui a entendu ce sur quoi il
témoigne. On ne peut témoigner si le fait à prouver n'a
été connu que par l'intermédiaire d'autrui. Le
témoin ne peut pas dire : « il m'a été dit
que tel fait a eu lieu » ou « tout le monde sait
que ceci s'est passé ». Ce n'est pas là un
témoignage, mais un commérage. V. sur ce sujet. Jean-Michel
BRUGUIÈRE, « La rumeur et le droit », D.
1996, chron. 149.
* 94 Le juge n'est pas
lié par les témoignages ; il apprécie souverainement
ce type de preuve. Le juge est entièrement libre d'attacher aux dires
des témoins le crédit qu'il estime opportun, son
appréciation étant souveraine. Cependant, cela ne le dispense pas
d'indiquer sur quels témoignages ou éléments de
témoignages il s'est fondé, autrement dit ce qui a
déterminé son intime conviction. Ainsi, la Cour suprême a
eu raison d'obliger le juge à analyser et discuter les
témoignages. En effet, le juge doit faire preuve d'esprit critique et,
surtout, il ne faut pas qu'il puisse prendre prétexte de sa souveraine
appréciation de la force probante des témoignages pour se
décider arbitrairement. CS, ch. judic., arrêt n° 20 du 22
février 1974, RID 1976, n° 3-4, p. 68 :
« Mais attendu que si les juges du fond ont un pouvoir souverain
d'appréciation de la force probante des témoignages, et si une
telle appréciation échappe au contrôle de la Cour
suprême, il n'en reste pas moins que les juges doivent analyser et
discuter ces témoignages. »
* 95 L'article 1353 ne
s'oppose pas à ce que les juges forment leur conviction sur un fait
unique si celui-ci leur paraît de nature à établir la
preuve nécessaire. Civ. 3e, 28 novembre 1972, Bull. civ.
III, n° 636 - Civ. 1re, 5 février 1991, D.
1991. 456, note MASSIP.
* 96 V. par exemple, CAA,
ch. civ. et com., arrêt n° 194 du 12 mars 1976, RID 1978,
n° 3-4, p. 72. « Considérant que la facture
litigieuse (n° 325 du 8 mars 1972) de 825 600 francs ne peut
être valablement causée par le bon de commande n° 148 du 16
mars 1972, puisque ce bon de commande lui est postérieur ; qu'au
surplus la Société Plastica se trouve dans l'impossibilité
de prouver la livraison prétendument faite par elle, voire même
d'indiquer, alors que la question lui a été expressément
posée par la Société Mobil Oil, quand cette livraison
aurait été faite et où les éléments de
« canopy » commandés auraient
été installés, alors qu'elle ne conteste pas qu'elle
était chargée du montage et de l'installation des
« canopy » (...)
Considérant qu'il résulte de ce qui
précède que le bon de commande n° 148 et la facture n°
325 du 8 mars 1972, de 825 600 francs, ne correspondent à aucune
commande et aucune livraison effectives, et que c'est bien par erreur que
ladite facture a été réglée par la
Société Mobil Oil. (...) » On
constate que la Cour se fonde sur des présomptions judiciaires pour
établir l'indu et l'erreur du solvens.
* 97 Dans une espèce,
la Cour suprême a eu l'occasion de le rappeler. En effet, la demanderesse
soutenait que la preuve de la propriété d'un fonds de commerce
résulte suffisamment de la copie de registre du commerce, du contrat de
bail, de la facture de téléphone, de la déclaration
d'impôts et du principe selon lequel en matière de meubles
possession vaut titre. La Cour d'appel ne l'ayant pas suivi dans son
raisonnement, elle forma alors un pourvoi contre l'arrêt de ladite Cour.
La chambre judiciaire de la Cour suprême décida en ces
termes : « Mais attendu que ladite Cour (la Cour d'appel), qui
après avoir examiné les éléments de preuve soumis
à son appréciation par demoiselle AHONDJON, a souverainement et
à juste titre relevé que ceux-ci ne constituent pas des preuves
suffisantes du droit de propriété sur les objets saisi
(...) ». CS, ch. judic., arrêt n° 339 du 5 juillet
2007, Actualités juridiques 2000, n° 59, p. 302.
* 98Aboudramane OUATTARA,
« La preuve électronique : étude de droit
comparé », op. cit., p. 160.
* 99Association Maître
Lynda DADIE-SANGARET-Docteur El Hadj CHAIBAINOU, « Projet d'Appui
à la Gestion Economique (P.A.G.E.), volet juridique :
création du cadre juridique de l'activité
informatique », Phase I (diagnostic).
* 100Droit d'exploiter une
oeuvre littéraire, artistique, etc., pendant une durée
déterminée. (Dictionnaire HACHETTE, éd. 2007, p.
376).
* 101V. notamment les
exemples français et canadien.
* 102Règlement
n° 15/2002/CM/UEMOA du 19 septembre 2002 relatif aux systèmes de
paiement dans les Etats membres de l'Union Economique et Monétaire Ouest
Africaine (UEMOA).
* 103Union Economique et
Monétaire Ouest Africaine, organisation sous-régionale ouest
africaine comprenant huit (8) pays : le Bénin, le Burkina Faso, la
Côte d'Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le
Sénégal et le Togo.
* 104D'ailleurs le titre
sous lequel s'insère l'article 18 est très évocateur,
puisqu'il s'intitule « De la preuve
électronique ».
* 105Sous la réserve
de la réunion de certaines conditions, notamment « sous
réserve que puisse être dûment identifiée la personne
dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des
conditions de nature à en garantir
l'intégrité. »
* 106Art. 1316-1 :
« L'écrit sous forme électronique est admis en
preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous
réserve que puisse être dûment identifiée la personne
dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des
conditions de nature à en garantir
l'intégrité. »
* 107Art. 1316-3 :
« L'écrit sur support électronique a la même
force probante que l'écrit sur support papier. »
* 108V. art. 1316-4, al. 2
du Code civil français pour une définition identique.
* 109Art. 22 du
Règlement. Pour que la signature électronique ait une force
probante équivalente à celle de la signature manuscrite, elle
doit être sécurisée et liée à un certificat
électronique qualifié. Pour une signature électronique
sécurisée, voir les exigences de l'alinéa 2 de l'article
23. Sur la notion de certificat électronique qualifié, se
référer à l'article 26 du Règlement.
* 110« Projet
d'Harmonisation du cadre juridique des TIC dans les États de l'Afrique
de l'Ouest (UEMOA-CEDEAO) : Propositions de lignes
directrices », juillet 2007. Ce projet prend en charge les
engagements actuels des États membres de la CEDEAO et de l'UEMOA au plan
sous-régional, régional et international en vue de
l'édification de la société de l'information. Il vise
à la fois à définir les objectifs et les grandes
orientations de la société de l'information en Afrique de l'Ouest
et à compléter les législations actuelles des États
membres et des institutions de la sous-région en matière de
Technologie de l'Information et de la Communication.
* 111Dernier paragraphe du
préambule à la 3ème partie du projet
précité, intitulée : projet de lignes directrices sur
le commerce électronique dans l'espace UEMOA-CEDEAO.
* 112Entre autre :
e-mail, formulaires de commande en ligne ou envois de factures
électroniques.
* 113A titre d'exemples: la
France avec la loi du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la
preuve ; le Canada avec la Loi uniforme de 1997 sur la preuve
électronique.
* 114Lettres,
caractères, chiffres, signes, symboles.
* 115Comme
sus-mentionné, cette définition a été
entièrement reprise par l'article 18 du Règlement n°
15/2002/CM/UEMOA relatif aux systèmes de paiement des Etats membres de
l'UEMOA. Outre les instruments classiques de paiement, le Règlement
aborde notamment la monnaie électronique, le porte-monnaie
électronique, la signature électronique, le virement
électronique et la preuve électronique.
* 116Pourtant le
dictionnaire définit l'écriture comme la «
représentation des mots, des idées, du langage au moyen de
signes », Petit Larousse 2002, p. 258.
* 117Code civil du
Québec (C.c.Q.), art.2837 ; Stéphane CAIDI, « La
preuve et la conservation de l'écrit dans la société de
l'information », (2004), lex électronica, vol. 9,
n° 1, p. 63, édité sur
http://www.lex-elctronica.org/articles/v9-1/caidi.htm.
* 118C.c.Q., art. 2837.
* 119Michel VASSEUR,
« L'informatique et quelques unes de ses applications en
matière bancaire », Rev. Franç.
Comptabilité, 1979, p. 613.
* 120Vincent GAUTRAIS,
« Le contrat électronique au regard de la Loi concernant le
cadre juridique des technologies de l'information », in Vincent
GAUTRAIS (dir.), Droit du Commerce Electronique, Montréal,
éd. Thémis, 2002, p. 3 et p. 7.
* 121Aix-en-Procence, 27
janvier 1846, DP 1846, 2, 230.
* 122Versailles, 12 octobre
1995, RTD civ. 1997, p. 137, obs. Jacques MESTRE.
* 123C.c.Q., art.
2837 ; Stéphane CAIDI, « La preuve et la conservation de
l'écrit dans la société de l'information »,
(2004), Lex electronica, vol. 9, n° 9, p. 63, édité
sur
http://www.lex-electronica.org/articles/v9-1/caidi.htm.
* 124Eric CAPRIOLI,
« Le juge et la preuve électronique »,
Juriscom.net, 10 janvier 2000, édité sur
http://www.juriscom.net/universite/doctrine/article7.htm.
* 125Art. 5 de la Loi
uniforme. V. à ce sujet John GREGORY, « technomogy Neutrality
and the Canadian Uniform Acts », p. 1, disponible à l'adresse
http://www.lexum.umontreal.ca/conf2002/actes/Gregory.html.
*
126« L'introduction de la preuve électronique dans
le code civil », étude par un groupe d'universitaires, JCP
1999, éd. G., I, n° 6, p. 68.
* 127Lexique des termes
juridiques, 13ème éd., Dalloz, 2001, p. 268. La
force probante indique ainsi quelle est la puissance de la preuve
administrée à l'encontre de toute preuve contraire ou le poids de
cette preuve dans l'esprit du juge.
* 128Cass. Com., 2
décembre 1997, JCP 1998, éd. G, II, 10097 ; D.
1998, p. 192, note Didier MARTIN.
* 129V. également
l'art. 19 du règlement n° 15/2002 de l'UEMOA
précité.
* 130Loi n° 2000-83 du
9 août 2000 relative aux échanges et au commerce
électroniques.
* 131Art. 5 de la loi
québécoise concernant le cadre juridique des technologies de
l'information adoptée et sanctionnée le 21 juin 2001.
* 132Les conventions sur la
preuve consistent pour les parties à prévoir, dans un
écrit, les preuves qu'elles s'autorisent à produire
réciproquement devant les tribunaux en cas de litige.
* 133Pour une illustration
de la vraisemblance en jurisprudence appliquée au commencement de preuve
par écrit de l'art. 1347 du C. civ., v. Cass. Civ. 15 mai 1934, DP
1934, 113 ; également DH 1934, 329.
* 134Daniel AMMAR,
« Preuve et vraisemblance, Contribution à l'étude de la
preuve technologique », RTD civ. 1993, p. 499 et s.
* 135Cf., par exemple, Civ.
1re, 21 octobre 1997, Bull. civ. I, n° 284 ;
Colmar, 12 novembre 1948, D. 1949, p. 72.
* 136C.c.Q, art. 2827.
* 137Tribunal d'Instance de
Sète, 9 mai 1984, D. 1985, 359, note BENABENT : Le
tribunal a refusé le remboursement d'un crédit consenti par
l'émetteur à un titulaire d'une carte faute de preuve de
l'ensemble de l'ouverture du crédit, car l'engagement de l'emprunteur ne
pouvait résulter que de sa signature (manuscrite).
* 138Pour la jurisprudence
en faveur de la signature électronique, v. C.A. Paris,
1ère Ch. D, 11 janvier 1996, D. 1996,
somm., p. 36 ; Cass.Com, 15 juin 1993, Gaz. Pal. 1993, II, panor.
, p.267 ; Bull. civ. IV, n° 247.
* 139Cass. Civ.
1ère , 8 novembre 1989, ( 2 arrêts) D. 1990,
note GAVALDA ; Bull. civ. I, n° 342 ; JCP
1990, éd. G note G. VIRASSAMY ; RIDC com. 1990,
p. 78, observations M. CABRILLAC et B. TEYSSIE ; D. 1990, somm. ,
p.327, observations J. HUET.
* 140Alain BENSOUSSAN,
Aspects juridiques de l'Internet, Paris, Hermès, 1996, p.73.
* 141Argentine et Italie,
Jean-Pierre VAN CUTSEM, Armand VIGGRIA et Olivier GUTH, E-commerce in the
World, Aspects of comparative Law, Bruxelles, Bruylant, 2003, pp.
39-41.
* 142Ibidem, pp.
39-41.
* 143La directive
n°99/93/CE du Parlement européen et du Conseil du 13
décembre 1999 pour un cadre communautaire sur les signatures
électroniques.
* 144Conseil d'Etat,
Internet et les réseaux numériques, Paris, La
documentation française, 1998.
*
145« Lorsqu'elle est électronique, elle
consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification
garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache.
La fiabilité de ce procédé est
présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature
électronique est créée, l'identité du signataire
est assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des
conditions fixées par décret en Conseil d'Etat »
(art.1316-4 al.2 du C. civ.).
* 146Le décret du 30
mars 2001 est pris pour l'application de la loi du 13 mars 2000 portant
adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative
à la signature électronique.
* 147L'acceptation de
l'acte par le signataire ne fait aucun doute: lorsque le secrétariat
d'un décideur apporte un contrat dactylographié, c'est la
signature du décideur qui rend « parfait »
l'acte dans et par la volonté de celui qui l'a apposée.
* 148Thierry PIETTE-COUDOL,
La signature électronique, op. cit., p. 28, n° 65.
* 149Il ne s'agit donc pas
ici de fournir des informations de type état civil. L'usage d'un
pseudonyme pouvant être reconnu. Pour l'établissement de
l'identité d'une personne dans un échange électronique,
l'identité de type état civil n'est pas toujours (souvent)
requise. Ce qui compte, c'est de garantir le lien entre le message et son
auteur. Et pour désigner un auteur, le plus simple est de le
désigner sous un nom, même un nom d'emprunt. L'identité
exacte d'une personne n'est pas un élément essentiel du processus
contractuel, en tout cas pour les contrats les plus courants. Les achats dans
les boutiques des commerçants se rattachent au contrat de vente qui sont
régulièrement formés et exécutés sans qu'on
ait nécessairement besoin de décliner son identité.
Ajoutons que la signature, si elle identifie un signataire, surtout en
présence du destinataire, ne donne aucune assurance sur son état
civil.
* 150L'expression est le
titre d'un article de John BROWNING, « I encrypt therefore I
am », Wired Magazine, november 1997, p. 65.
* 151Cette science
définie comme celle de « la communication en présence
d'adversaires » (Ronald RIVEST, « Cryptography »,
in Handbook of Theorical Computer Science, Volume A :
Algrorithms and Complexity, Cambridge, éd. Jan Van Leeuwen, 1990, p. 6),
a historiquement eu pour principale fonction de fournir aux Etats des moyens
d'assurer la confidentialité des communications militaires ou
diplomatiques. La cryptologie est l'art de camoufler un message en codant les
lettres qui le constituent, de sorte que seul le destinataire du message soit
en mesure de le décoder. En effet, quels que soient les moyens
utilisés, c'est l'objectif de secret qui donne à la crytographie
tout son sens, la personne devant resté dans l'ignorance importe peu. Il
existe de multiples moyens pour s'assurer du secret. Les cuchotements, les
gestes, une connaissance des langues étrangères, ou même
les « sanglots longs ... » de la BBC avant le
débarquement Alliés en Normandie, sont autant de moyens qui nous
éloignent de l'image du crypanaliste qui décortique
péniblement une masse de documents illisibles. Et pourtant, nous sommes
bien devant une succession de faits, volontaires ou non, qui rendent
l'information opaque à ceux qui en écoutent la
représentation « cryptée ». Dans la chine
antique à la stéganographie qui vise à dissimuler le
message secret. Les chinois recouvraient de cire des messages que le porteur
dissimulait sur lui ou avalait. Ce procédé se retrouvait
également en Grèce où l'on pouvait tout aussi
ingénieusement cacher l'existence d'un message en tondant un
héraut sur le crâne duquel on tatouait l'information. Une fois la
repousse des cheveux faite, une seconde « tonte »
était nécessaire pour que le destinataire du message soit
informé. C'est sans doute à sparte que l'on doit la
première utilisation de la cryptographie grâce à la
scytale. Ce système consistait en un axe de bois autour duquel on
enroulait, de façon à le recouvrir, un ruban. Le texte
était écrit dans la hauteur de l'axe sur le ruban qui
était ensuite déroulé tel quel par le destinataire. Ce
dernier réenroulait la bande sur un bâton de même
diamètre que le premier et le message se reformait. Que le bâton
soit trop large ou trop étroit et le message devenait illisible. En
d'autres termes, cette scytale est une clé sans laquelle il est
impossible de déchiffrer un message, une clé à la
disposition des généraux et hauts magistrats : nous sommes
au cinquième siècle avant Jésus-Christ et cette
cryptographie rudimentaire est déjà un symbole de pouvoir.
L'encodage d'un message se fait à l'aide d'une fonction : Jules
César, par exemple, utilisait celle qui remplace chaque lettre par celle
qui la suit dans l'alphabet. Depuis, on a fait des progrès.
* 152ICP ou
PKI : Public Key Infrastructure.
* 153Par opposition
à la cryptologie symétrique, qui n'utilise qu'une seule
clé ; la même clé est utilisée pour chiffrer et
déchiffrer l'information. Le problème de cette méthode est
qu'il faut trouver le moyen de transmettre de manière
sécurisée la clé à son correspondant. Ce
procédé n'est pas utilisé pour la signature
électronique car il eût été trop risqué, la
clé unique pouvant être interceptée.
* 154L'utilisateur
possède une clé privée et une clé publique. Il
distribue sa clé publique et garde secrète sa clé
privée. La clé privée ne peut pas être
recomposée à partir de la clé publique. Les
méthodes de cryptage à clés asymétriques reposent
sur des calculs mathématiques sophistiqués utilisant des nombres
premiers générés par des algorithmes. Il est facile de
multiplier deux nombres premiers, par exemple 127 et 997 et de trouver 126619.
Mais il est plus difficile de factoriser, c'est-à-dire de retrouver 127
et 997 à partir de 126619. Le dispositif de création de la
signature va émettre deux clés : une clé
privé, car connue du seul signataire, et une clé publique, car
accessible à tous. Ces deux clés sont une séquence de
chiffres générées en même temps par un algorithme
mathématique, et liées entre elles. En effet, ce qu'une
clé fait, seule l'autre peut le défaire.
* 155A ce sujet, le film
d'anticipation « Minority Report » de Steven
SPIELBERG, sorti en 2002, offre une vision des risques liés à un
recours déraisonné aux procédés de
biométrie.
* 156Le certificat est un
registre informatique revêtu d'une signature électronique qui
identifie l'émetteur du certificat, identifie le souscripteur et donne
sa clé publique. Il s'agit d'une sorte de carte d'identité
électronique qui serait émise par un tiers indépendant et
neutre. La signature électronique correspondant à un certificat
est considérée appartenir à la personne mentionnée
dans le certificat.
* 157Pour ce faire, il est
important de veiller également à la sécurisation lors de
la remise de la clé privée, pour éviter toute
interception, voire envisager une remise en main propre.
* 158A la condition que
l'utilisateur ne le laisse pas sur un post-it collé à
l'écran de l'ordinateur (comme c'est malheureusement souvent le cas) ou
ne le communique à des tiers.
* 159Couple de clés
composé de la clé privée et de la clé publique. Un
bi-clé comme le trousseau de clés de la vie
réelle est personnelle à son porteur. C'est pourquoi le
bi-clé, notamment un de ses composants, la clé
privée, doit rester sous le contrôle étroit du
signataire.
* 160Désigné
aussi sous le sigle de PSC ou PSCE.
* 161La certification
consiste en la délivrance par un tiers, impartial et indépendant
des parties, d'une attestation électronique, garantissant
l'identité des signataires, l'intégrité et la
non-altération des données. Sur le plan technique, ce dispositif
fait appel à la cryptologie.
* 162Ce tiers dit de
confiance, permet de rapporter plus aisément la preuve des transactions,
sans que l'on puisse opposer à l'une des parties, souvent le
commerçant, le principe de la non constitution de preuve à
soi-même.
* 163Par exemple, il sera
possible de vérifier si la personne est bien médecin, avocat,
etc. Un certificat peut permettre de vérifier l'identité d'une
personne, mais également ses pouvoirs et sa capacité, ses
qualifications professionnelles. Le certificat est ainsi un message
électronique par lequel un témoin privilégié, le
certificateur, contrôle la concordance et l'adéquation entre
l'identité du signataire et la clé publique.
* 164Le certificat
possède une structure interne, c'est-à-dire certains champs qui
doivent obligatoirement, pour lui accorder une force, être
renseignés. Cette structure interne est définie par une norme
internationale nommée « recommandation x-509 v.
3 » de l'Union Internationale des
Télécommunication. Cette norme a été reprise et
développée par l'organisation de normalisation du monde Internet,
l'Internet Engineering Task Force (IETF) qui a décliné la norme
de certificat pour l'appliquer à la technologie de signature
électronique.
* 165Sauf le cas
répandu ou le certificateur sera ainsi à l'origine du
bi-clé, cas qui sera à notre avis majoritaire car bien
plus commode pour les utilisateurs.
* 166Toute l'identification
de la personne repose dans la clé privée certifiée. Encore
faut-il que le certificat provienne sans altération possible du
certificateur. Voilà pourquoi le certificat est à son tour
signé par la signature du certificateur. L'ultime question de
sécurité en ce domaine devient: comment suis-je sûr qu'il
s'agit bien d'un certificateur?
* 167Cf. art. 6 du
décret.
* 168Selon E.
JOLY-PASSANT, « Le décret du 30 mars 2001 pris pour
l'application de l'article 1316-4 du Code civil et relatif à la
signature électronique », Rev. Lamy Droit des
affaires, juillet 2001, n° 40, p. 21.
* 169En effet, la
présomption de fiabilité du procédé de signature
électronique n'est accordée qu'à la triple condition
que :
- la signature électronique mise en oeuvre soit une
signature sécurisée ;
- cette signature électronique sécurisée
soit établie grâce à un dispositif de
sécurité de création de signature
électronique ;
- la vérification de cette signature repose sur
l'utilisation d'un certificat électronique qualifié.
* 170En effet, cette
délivrance est effectuée après un contrôle
d'identité. Il doit exister des garanties juridiques pour le cas ou le
PSC manquerait à ses obligations. La question de la
responsabilité du PSC est particulièrement sensible
lorsque le certificat est erroné. La Directive prévoit la
responsabilité des PSC sur l'exactitude des informations
certifiées par eux et sur l'imputabilité de la signature à
la date où le certificat a été délivré.
C'est ainsi que le Règlement n° 15/2002 de l'UEMOA, à
travers son art. 27 in fine, fait obligation à quiconque prétend
devenir prestataire de service de certification de
« posséder des garanties financières suffisantes
pour exercer ses activités et, le cas échéant, indemniser
les utilisateurs de ses services ayant subi des dommages du fait de
l'inexécution ou de la mauvaise exécution de ses
obligations ».
* 171Transmission à
distance de signaux télégraphiques, vidéo.
Dictionnaire Hachette, éd. 2007, p. 1587.
* 172Dans le message
électronique, la signature n'est qu'une donnée parmi d'autres,
contenues dans la même forme électronique, et cette forme est
télétransmise. A cause de leur nature même, les formes
électroniques sont fragiles et
« déformables ». A l'arrivée, le message ne
sera peut-être pas identique à celui qui a été
envoyé, car les risques sont nombreux dans la jungle des autoroutes de
l'information, comme Internet où sévissent les aléas
techniques et où encore sont tapis des cyberbandits de tout acabit.
Devant ces risques potentiels, les parties demandent à la
sécurité de garantir l'intégrité des messages.
Thierry PIETTE-COUDOL, La signature électronique, op. cit., p.
16, n° 34.
*
173L'intégrité est une garantie que le message
reçu est identique à celui envoyé. Thierry PIETTE-COUDOL,
La signature électronique, op. cit., p. 3, n° 5.
* 174V. cependant la notion
d' « intégrité du territoire
national » en droit constitutionnel.
* 175Définition
selon le Petit Larousse, éd. 2002, p. 419.
* 176Dans la signature
électronique, la question de la signature est posée parce qu'il y
a transmission électronique. La transmission présente des risques
de pollution des messages ou des fichiers transmis, ce qui explique le
contrôle de « bon état » à
l'arrivée.
* 177Le hachage, sorte de
« résumé crypté » du message
originel, a notamment pour rôle de permettre au destinataire de s'assurer
que ce qui lui parvient est bien le message originel, sans aucune
altération, que celle-ci soit malveillante ou accidentelle.
* 178Le logiciel emploie
pour cela un algorithme spécialisé qui condense le texte en une
chaîne alphanumérique de longueur fixe quelle que soit la longueur
du texte traité. L'analogie la plus proche est le système de
preuve par neuf (9) qu'on enseignait à l'école primaire pour
vérifier le résultat des opérations. Quelque soit la
longueur des opérandes et des opérateurs, le système de la
preuve par neuf permet de ramener le nombre à un chiffre unique. Il en
est de même pour la signature électronique ou numérique.
* 179M. M. X. LINANT DE
BELLEFONDS et P.-Y. GAUTIER, « De l'écrit électronique
et des signatures qui s'y attachent », JCP 3 août
2000, éd. E., p. 1273, n° 7. Ici, les auteurs proposent de
faire résider le contrat sur les ordinateurs des deux cocontractants.
* 180Aux termes de l'art.
10 de la Loi-type de CNUDCI sur le commerce électronique de 1996,
« Lorsqu'une règle de droit exige que certains documents,
enregistrements ou informations soient conservés, cette exigence est
satisfaite si ce sont des messages de données qui sont conservées
sous réserve des conditions suivantes : l'information que contient
le message de données doit être accessible pour être
consulté ultérieurement, doit être conservé sous la
forme sous laquelle il a été créé, envoyé ou
reçu (...) ».
* 181En effet l'art. 1108
du C. civ. énonce quatre conditions. Outre le consentement, l'art. 1108
exige : la capacité de contracter, un objet certain qui forme la
matière de l'engagement, et une cause licite dans l'obligation.
* 182Sauf l'intervention du
faussaire ou la dénégation de signature.
* 183Parfois aussi, la
terminologie juridique, jugée souvent rébarbative,
décourage plus d'un.
* 184Par exemple, contrat
d'assurance, de fourniture de service, de banque, etc.
* 185 Jean-Christophe
POMMIER, Principe d'autonomie et loi du contrat en droit international
privé conventionnel, Paris, Economica, 1992, p. 141, n°
139.
* 186 Civ., 17 mai 1927,
D. 1928. 1. 25, note, CAPITANT ; Gaz. Pal. 1927. 2. 173
- Civ., 4 mars 1964, Gaz. Pal. 1964. 2. 223.
* 187 Dans ce contexte, la
Cour de cassation a estimé que le contrat de vente est international car
il comprend une double action d'exportation et d'importation. Civ., 27 janvier
1931, S., 1933. 1. 41, note NIBOYET.
* 188 V. en ce sens, Ahmed
Sadek AL-KOCHERI, « La notion de contrat international »,
thèse, 1962, tome III, Université de Rennes, n° 79.
* 189 Cela signifie que la
marchandise est l'élément le plus important et ses mouvements
suffisent à caractériser un contrat international ou un contrat
interne. Philippe KAHN, La vente commerciale internationale, tome IV,
Paris, Sirey, 1963, p. 4.
* 190 Par exemple, un
emprunt destiné à financer une importation.
* 191 Paris, 26 avril 1985,
JDI 1986, 175, note JACQUET.
* 192 Jean-Christophe
POMMIER, Principe d'autonomie et loi du contrat en droit international
privé conventionnel, op. cit., p. 143.
* 193 Dans ce contexte,
BATIFFOL considère que le contrat est international
« quand par les actes concernant sa conclusion ou son
exécution, ou la situation des parties quant à leur domicile, ou
leur nationalité ou la localisation de son objet, il a des liens avec
plus d'un système juridique ». Henri BATIFFOL,
« Contrats et conventions », Encyclop. Dalloz-Droit
international, p. 564, n° 9.
* 194 Jean-Michel JACQUET,
Le contrat international, 2e éd., Paris, Dalloz,
1999, p. 5.
* 195 Philippe KAHN, La
vente commerciale internationale, op. cit., p. 3.
* 196 Pierre MAYER,
Droit international privé, 1re éd., Paris,
Montchrestien, 1977, n° 679.
* 197 Civ., 7 octobre 1980,
Rev. Crit. DIP 1981, n° 1, p. 313, note MESTRE.
* 198 V. en ce sens,
Antoine KASSIS, Le nouveau droit européen des contrats
internationaux, Paris, LGDJ, 1993, p. 69 ; n° 56.
* 199 Séverin
COUTELLIER et Ludovic DURINDEL, « La loi applicable aux contrats
conclus sur Internet », mémoire de DESS droit de l'information
et de la communication, Université d'Orléans, 2001-2002, p.
23 ; Nicolas MACCAREZ et François LESSLE, Le commerce
électronique, Paris, PUF, Coll. QSJ ?, 2001, p. 23 ; Ugo
DRAETTA, Internet et commerce électronique en droit international
des affaires, Bruxelles/Bruylant et Paris/FEC, 2003, p. 219.
* 200Ibidem.
* 201 Art. 15 de la Loi
type de la CNUDCI sur le commerce électronique.
* 202 Séverin
COUTELLIER et Ludovic DURINDEL, « La loi applicable aux contrats
conclus sur Internet », op. cit., p. 8.
* 203 Selon la
théorie de l'émission de l'acceptation, le contrat est
formé au moment et au lieu où l'acceptation a été
expédiée par l'acceptant. Aucune condition supplémentaire
n'est exigée.
* 204 Bien établie
dans les communautés d'affaires, la théorie de la
réception permet, d'une part, de former le contrat au lieu de celui qui
initie l'entente et, d'autre part, de retarder le moment de la conclusion et
ainsi de s'assurer que les contractants souhaitent réellement s'engager.
Vincent GAUTRAIS, François JACQUOT, Pierre
LEMYRE et alii, Le guide juridique du commerçant
électronique, Paris, Litec, 2001, p. 93.
* 205 V. art. 3 et 4 de la
Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles ;
également l'art. 3 de la Convention de la Haye du 15 juin 1955 sur la
loi applicable aux ventes à caractère international d'objets
mobiliers corporels.
* 206 Ugo DRAETTA,
Internet et commerce électronique en droit international des
affaires, op. cit., p. 25.
* 207 Par exemple,
considérons une société de vente en ligne, La
Roxann, spécialisée dans la vente de logiciels de jeu de
société, qui met son catalogue à la disposition du public
sur Internet au moyen d'un serveur situé au Canada ; cette mise
à disposition sera régie par les lois canadiennes, le Canada
étant considéré comme le lieu de conclusion du contrat,
lorsqu'un internaute situé au Ghana se connecte sur ce catalogue. Ce
dernier est alors dans la même situation que le citoyen ghanéen
qui prend l'avion pour consulter et acheter les jeux contenus dans le catalogue
de La Roxann dans une boutique québécoise.
* 208 Sylvette
GUILLEMARD, « Le droit international privé face au
contrat de vente cyberspatial », op. cit., p. 471 et s.
* 209 Comme personne ne
peut être contraint à opter pour cette modalité de
règlement des litiges, il faut donc un accord dans ce sens. En cas
d'arbitrage, l'arbitre reçoit des parties la mission de vider les
différends qui les opposent par une sentence arbitrale qui s'impose
à elles. En revanche, dans la médiation, la mission du
médiateur n'est pas aussi autoritaire car son rôle consiste
seulement à rechercher avec les parties les termes d'un accord amiable
supprimant la difficulté qui les oppose.
* 210 En même temps
qu'il fait naître de nouveaux types de contentieux, le
développement de la pratique du réseau et des activités
commerciales sur Internet suscite une évolution des méthodes de
traitement des litiges. Les sites qui proposent en ligne un règlement
des litiges sont en plein essor. Certains d'entre eux se sont
spécialisés dans un seul mode de règlement, dans un seul
type de litige. Les sites de résolution en ligne des litiges utilisent
la technique de la médiation ou de l'arbitrage selon le cas, ou les
deux. L'un des premiers centres dédiés à la
résolution en ligne des litiges fut le cyber-tribunal, centre de
résolution des conflits cybernétiques qui avait été
présenté en juin 1998 par le Centre de recherche en Droit public
de l'Université de Montréal. L'activité du cyber-tribunal
a pris fin pour faire place à un nouveau projet de résolution en
ligne des différends dénommé
« eResolution ». En France, une association privée
créée en 1997 et dénommée
« IRIS » propose des services en ligne pour la
résolution des petits conflits liés à l'utilisation de
l'Internet. Aux Etats-Unis, l' « on line omtuds
office » propose un service de médiation en ligne.
* 211 L'expression de
« conflit de juridictions », une expression «
profondément installée dans le langage des
internationalistes » (Pierre MAYER et Vincent HEUZÉ,
Droit international privé, 9e éd., Paris,
Montchrestien, 2007, p. 197, n° 275), est bien entendu
dérivée de celle de « conflit de lois ». On s'accorde
pourtant à dire que l'utilisation de l'expression de conflit de
juridictions est impropre parce qu'elle laisse entendre qu'il y a un
conflit à résoudre, alors qu'il s'agit
simplement pour une juridiction donnée de statuer sur sa propre
compétence, à l'exclusion de celles des autres juridictions
étatiques (v. Bernard AUDIT, Droit international privé,
4e éd., Paris, Economica, 2006, p. 274, n° 326). Les
règles concernant la compétence juridictionnelle sont, on le
sait, des règles unilatérales. En raison du principe de
souveraineté des États, elles ne permettent nullement d'octroyer
compétence à des juridictions étrangères. Elles
doivent se limiter à déterminer si le tribunal étatique
est compétent ou pas, de son seul point de vue, pour régler le
litige dont il est saisi. Cela signifie que le juge saisi n'a pas le pouvoir
d'attribuer compétence à un juge étranger, sauf à
enfreindre l'indépendance qui caractérise les États
souverains. En d'autres termes, si le tribunal s'estime incompétent
après avoir été saisi d'un litige international, il ne
peut renvoyer les parties à soumettre leur cause devant le tribunal
étatique qu'il juge mieux placé pour statuer (V. par exemple :
« en effet, le Code de procédure civile n'a pour but que de
régler les modes de procéder devant les tribunaux français
et de fixer la compétence entre les différents tribunaux
français qui peuvent être appelés à connaître
d'une contestation ; (...) les lois françaises de procédure ne
peuvent avoir pour effet d'attribuer juridiction à des tribunaux
étrangers », Trib. Civ. Tours, 10 janvier 1896, LETTS et
autres, confirmé par Orléans, 18 novembre 1896, JDI
1897, pp. 328-329). En matière de compétence
juridictionnelle, le respect de la souveraineté et de
l'indépendance des États est donc strictement observé.
Chaque État est libre de déterminer le contentieux international
susceptible d'être porté devant ses juridictions. À moins
qu'il n'ait conclu un accord international à ce propos, il n'est pas
tenu de coopérer avec les autres États pour qu'ensemble ils se
répartissent le règlement des litiges internationaux. Le chef de
compétence ne sert donc qu'à indiquer si le juge saisi est
compétent, de son seul point de vue étatique.
* 212 Civ., 5
décembre 1910, American Trading Co., S. 1911. 1. 129,
note LYON-CAEN; Rev. crit. DIP 1911, 395. Il semble qu'en Angleterre,
ce soit au milieu du XVIIIe siècle qu'un tribunal ait mentionné
pour la première fois la loi d'autonomie. La Cour du banc du roi avait
à décider si une dette de jeu, contractée en France,
était payable en Angleterre. Lord Mansfield écrit : «
the general rule established ex comitate et jure gentium
is, that the place where the contract is made, and not where the action is
brought, is to be considered in expounding and enforcing the contract. But this
admits of an exception, where the parties (at the time of making the contract)
had a view to a different kingdom. » (Robinson c. Bland 1 Black W.
257, 96 E.R. 141.) « La règle générale
établie ex comitate et jure gentium, veut qu'on tienne
compte, pour interpréter et exécuter le contrat, du lieu
où il a été fait et non de l'endroit où l'action
est intentée. Cependant, cette règle peut comporter une exception
lorsque les parties (au moment de conclure le contrat) avaient à
l'esprit un royaume différent. »
* 213 Bernard AUDIT,
Droit international privé, 3e éd., Paris,
Economica, 2000, p. 152.
* 214 Si, dans l'esprit des
juristes, le principe ne fait pas de doute, il ne faut cependant pas en
déduire que le choix de loi est pratique répandue. Il reste
encore l'exception comme le rappellent ceux qui ont accès aux contrats
commerciaux internationaux. A cet égard, un ouvrage de Marcel FONTAINE
est frappant. Il contient la synthèse des observations d'un
« groupe de travail qui se réuni depuis 1975 et
procède depuis lors à l'analyse systématique des
principales clauses présentes dans les contrats internationaux, sur la
base de très larges échantillons tirés de
l'expérience vécu de ses membres ». Le groupe se
réunit deux à trois fois par an et à chaque fois, sur la
base de la documentation recueillie depuis la dernière rencontre,
discute les clauses. A partir de ces discussions naissent des chroniques qui
« au fil des ans (...) ont progressivement couvert les
principales clauses délicates, au point de donner ensemble une image
assez complète de ce qu'est ou devrait être la pratique de la
rédaction d'un contrat international à la fin du XXe
siècle » (Marcel FONTAINE, Droit des contrats
internationaux, Analyse et rédaction de clauses, Paris, FEC, 1989,
p. 1.) Or, à partir du matériel récolté de 1975
à 1988, il n'est fait aucun commentaire, aucune mention des clauses de
choix de loi. Plus récemment encore, Bernard AUDIT constate que bien que
la liberté octroyée aux contractants soit reconnue et admise
« cela n'emporte pas que les parties en fassent toujours
usage ; aujourd'hui encore, tous les contrats internationaux ne
contiennent pas de clause expresse de loi applicable » (Bernard
AUDIT, Droit international privé, op. cit., p. 155.)
* 215 André HUET,
Les conflits de lois en matière de preuve, (thèse),
Paris, Dalloz, 1965, p. 330, n° 274.
* 216 Peggy CARLIER,
« L'utilisation de la lex fori dans la résolution des
conflits de lois », thèse, Faculté des sciences
juridiques, politiques et sociales - Université de Lille 2, mars 2008,
p. 33, n° 40.
* 217 V. en ce sens,
André HUET, « Procédure civile et commerciale dans les
rapports internationaux (DIP) - Compétence de la « lex
fori » - Domaine de la « lex fori » : action
en justice », J-Cl. Procédure civile, fasc. 57-10
(2001) ; Pierre MAYER et Vincent HEUZE, Droit international
privé, 9ème éd., Paris, Montchrestien,
2007, p. 365-375, n° 492-506.
* 218 Sur la distinction
entre la procédure et la compétence juridictionnelle, v. Antoine
BOLZE, « Recherche sur les règles de procédure dans le
litige privé international », thèse, vol. 2, Paris II,
1996. Cette distinction est aussi utilisée par les auteurs du
Précis Dalloz où le choix de cette présentation
révèle une disproportion entre les deux thèmes, les
développements concernant la compétence étant beaucoup
plus importants (101 pages) que ceux relatifs à la procédure
stricto sensu (7 pages). V. Yvon LOUSSOUARN, Pierre BOUREL et Pascal
DE VAREILLES-SOMMIERES, Précis de droit international
privé, 9ème éd., Paris, Dalloz, 2007, p.
599 et s., n° 438 et s.
* 219 L'article 48 de la
loi de l'ancienne Tchécoslovaquie énonce qu' « au
cours de la procédure, les tribunaux et notariats tchécoslovaques
procèdent conformément aux prescriptions procédurales
tchécoslovaques », Loi n° 97 du 4 décembre
1963 sur le droit international privé et de procédure, Recueil
des lois de la République socialiste tchécoslovaque du 16
décembre 1963, RCDIP 1965, p. 626 ; le paragraphe 63 du
décret loi sur le droit international privé hongrois
précise, quant à lui, que, « sauf disposition contraire
du présent décret-loi, la procédure devant les
tribunaux ou les autorités hongroises est soumise au droit hongrois
», Décret-loi n° 13/1979 du Présidium de la
République populaire hongroise sur le droit international privé,
Magyar Közlöny
31 mai 1979, p. 495, RCDIP 1981, p. 173, note F.
MAJOROS ; de manière beaucoup plus explicite, la loi italienne
prévoit que « le procès civil qui se déroule en
Italie est régi par la loi italienne » (article 12), Loi
n° 218 du 31 mai 1995, réforme du système italien de droit
international privé, Gazzetta Ufficiale della Repubblica
italiana, 3 juin 1995, supplément ordinaire n° 128 -
série générale, RCDIP 1996, p. 176 ; disponible
sur le site Iusreporter (il sito per la ricerca giuridica su internet)
: http://www.iusreporter.it/Testi/legge218-1995.htm. La loi roumaine
précise pareillement que, « dans les procès qui
concernent des rapports de droit international privé, les
instances roumaines appliquent la loi procédurale roumaine, sauf autres
dispositions expresses » (article 159), Loi n° 105 du
22 septembre 1992 sur le règlement des rapports de droit international
privé, Monitorul Oficial de la Roumanie, Partie Ire,
n° 245 du 1er octobre 1992, RCDIP 1994, p. 191 ; les
législations belge et suisse, pourtant très complètes,
puisqu'elles comportent respectivement 140 articles et 200 articles, ne
comprennent pas de dispositions à ce sujet, v. Loi
fédérale sur le droit international privé (L.D.I.P.) du 18
décembre 1987, Feuille fédérale, 12 janvier 1988
[1988.I.5] ; RCDIP 1988, p. 409 ; disponible sur le site internet des
autorités fédérales de la Confédération
suisse : www.admin.ch/ch/f/rs/291/ ; Loi du 16 juillet 2004 portant le Code de
droit international privé, Moniteur belge 27 juillet 2004, p. 57344 ;
RCDIP 2005, p. 154, disponible sur le site internet du Conseil
francophone de la fédération du notariat belge :
www.notaire.be/info/actes/100_code_dip.htm ; Jean-Yves CARLIER, Marc FALLON, et
Bernadette MARTIN BOSLY, Code de droit international privé,
2e éd., Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 579 et s.
* 220 Pour des exemples
jurisprudentiels, v. Civ. 1re, 12 décembre 2006, M. X,
Bull.civ. I, n° 540 (v. le titrage « Distinction de
la loi régissant le fond du divorce et de la loi de la procédure
du divorce (lex fori) ») ; « L'exigence d'un
intérêt né et actuel est commandée, en raison de son
caractère procédural, par la loi du for »,
Civ. 1re, 4 décembre 1990, SOC. COVECO et Autres., Bull.
civ. I, n° 272; JDI 1991, p. 371, note D. BUREAU ; RCDIP
1991, p. 558, note M.-L. NIBOYET-HOEGY ; « si la procédure
d'une instance engagée en France ne peut être régie que par
la loi française, rien ne s'oppose à ce qu'il soit fait
état, au cours de cette instance, de témoignages recueillis dans
un pays étranger, par l'autorité compétente en vertu de la
loi de ce pays, procédant selon les formes définies par cette
loi, et saisie, soit par commission rogatoire du juge français, soit par
requête de l'une des parties », Civ. 1re, 22
février 1978, LAVIE, Bull. civ. I, n° 73; RCDIP
1979, p. 593, note G. COUCHEZ ; « la procédure suivie
à l'étranger relève de la loi du Tribunal saisi, sous
réserve de ne pouvoir porter atteinte aux règles de fond
applicables au divorce », Civ. 1re, 2 mai 1974, BONNEFOI,
Bull. civ. I, n° 123 ; JDI 1974, p. 850, note A.
PONSARD (exequatur). Pour l'ordonnancement du procès,
« l'application de la loi du for est tellement
évidente qu'elle n'est jamais débattue par les plaideurs, bien
qu'elle ne soit pas explicitement consacrée ni par le législateur
ni par les juges. Ces derniers se réfèrent quasi instinctivement
au droit français, sans estimer nécessaire de s'expliquer sur la
vocation de celui-ci », Marie-Laure NIBOYET et Géraud DE
GEOUFFRE DE LA PRADELLE, Droit international privé, Paris,
LGDJ, 2007, p. 402, n° 564.
* 221 « One of the
eternal truths of every system of private international law is that a
distinction must be made
between substance and procedure, between rights and
remedy. The substantive rights of the parties to an action
may be governed by a foreign law, but all matters
appertaining to procedure are governed exclusively by the
law of the forum », Peter NORTH and James
FAWCETT, Cheshire and North's Private International Law, 13th ed.,
London/Edinburgh/Dublin, Butterworths, 1999, p. 67-68 ; Erwin SPIRO, «
Forum Regit Processum (Procedure is Governed by the Lex Fori) », ICLQ
1969, vol. 18, p. 950 ; « RULE 17 - All matters of procedure are
governed by the domestic law of the country to which the court wherein
any legal proceedings are taken belongs (lex fori) », Lawrence
COLLINS (dir.), Dicey and Morris on the Conflict of Laws, 13th ed.,
vol. 1, London, Sweet & Maxwell, 2000, p. 157, n° 7R-001.
* 222 Bernard AUDIT,
Droit international privé, 4e éd., Paris,
Economica, 2006, p. 11, n° 14. Le vocable de la soumission est
également repris par André HUET dans « Procédure
civile et commerciale dans les rapports internationaux (DIP) -
Compétence de la « lex fori » - Domaine de la
« lex fori » : action en justice »,
J-Cl. Procédure civile, fasc. 57-10 (2001), p. 2, n° 1.
Historiquement, la soumission de la procédure à la lex
fori est née d'une distinction, inventée au 13e
siècle par Jacobus BALDUINI, entre la coutume qui se rapporte à
la procédure et celle qui se rapporte à la décision du
procès (Eduard Maurits MEIJERS, « L'histoire des principes
fondamentaux du droit international privé à partir du Moyen
Âge, spécialement dans l'Europe occidentale », RCADI
1934-III t. 49, p. 595 ; Henri BATIFFOL et Paul LAGARDE, Traité de
droit international privé, t. I, 8e éd., 1993,
Paris, LGDJ, p. 372, n° 215 ; Erwin SPIRO, « Forum Regit
Processum (Procedure is Governed by the Lex Fori) », ICLQ,
1969, vol. 18, p. 949 ; André HUET, « Procédure civile
et commerciale dans les rapports internationaux (DIP) - Compétence de la
« lex fori » - Domaine de la « lex fori » : action en
justice », J-Cl. Procédure civile, fasc. 57-10
(2001), p. 3, n° 7). La séparation de la loi applicable à
la procédure par rapport à celle qui est applicable au fond du
droit trouve donc son origine historique dans une distinction
opérée entre la litis ordinatio et la litis
decisio (Henri BATIFFOL, Influence de la loi française sur la
capacité civile des étrangers en France, Paris, Librairie du
Recueil Sirey, 1929, p. 253). Ainsi, selon la théorie de BALDUINI, les
questions de procédure dépendent strictement des règles de
la loi du for (ad ordinandam litem) tandis que le
juge peut admettre d'avoir recours à une loi étrangère
pour décider de la solution au fond du litige (ad decidendam
litem).
* 223 Pierre MAYER et
Vincent HEUZE, Droit international privé,
9ème éd., op. cit., p. 365, n° 492. V.
également Etienne BARTIN, Principes de droit international
privé selon la loi et la jurisprudence françaises,
5ème éd., vol. 1, Domat-Montchrestien, 1930, p. 253,
§ 94.
* 224 André HUET,
« Procédure civile et commerciale dans les rapports
internationaux (DIP) - Compétence de la « lex fori »
- Domaine de la « lex fori » : action en
justice », J-Cl. Procédure civile, fasc. 57-10
(2001), p. 4 et s., n° 14 et s.
* 225 Bernard AUDIT,
Droit international privé, 3e éd., op. cit.,
p. 12, n° 14.
* 226 En droit ivoirien,
des exceptions existent notamment en ce qui se rapporte aux délais de
comparution et d'exercice des voies de recours. Pour la comparution, l'article
34 nouveau du Code de procédure civile, commerciale et administrative
pose le principe qu' « il doit y avoir entre le jour de
l'assignation et celui indiqué pour la comparution, un délai de
huit jour au moins, si le destinataire es domicilié dans le ressort de
la juridiction ». L'alinéa 2 du même article
précise que « ce délai est augmenté d'un
délai de distance de quinze jours si le destinataire est
domicilié dans un autre ressort et de deux mois s'il demeure hors du
territoire de la République ». Les augmentations de
délai ainsi dégagées pour la comparution sont
également applicables aux voies de recours. V. à ce sujet, pour
l'opposition, l'art. 154 nouveau, pour l'appel, l'art. 168 nouveau, pour le
pourvoi en cassation, l'art. 208 nouveau du Code de procédure civile. En
droit français également, une exception figure à l'article
643 du Code de procédure civile : « Lorsque la
demande est portée devant une juridiction qui a son siège en
France métropolitaine ; les délais de comparution, d'appel,
d'opposition, de recours en révision et de pourvoi en cassation sont
augmentés de : 1. Un mois pour les personnes qui demeurent dans un
département d'outre-mer ou dans un territoire d'outre-mer ; 2. Deux
mois pour celles qui demeurent à l'étranger ».
* 227 Cette solution,
conçue par le doyen BATIFFOL (BATIFFOL, Les conflits de lois en
matière de contrats : étude de droit international
privé comparé, Paris, Sirey, 1938, n° 442 et s.) a par
la suite été consacrée par la jurisprudence de la Cour de
cassation (Civ., 24 février 1959, Isaac, Rev. crit. DIP.
1959, p. 368, note Yvon LOUSSOUARN ; D. 1959, p. 485, note
Ph. MALAURIE). Elle semble à l'heure actuelle approuvée par la
doctrine dominante.
* 228 V. son ouvrage
précité, Les conflits de lois en matière de
contrats : étude de droit international privé
comparé, Paris, Sirey, 1938.
* 229 Tradition qui
inscrivait la détermination des procédés de preuve
recevables dans le domaine de la lex loci actus. L'art. 10 des
dispositions préliminaires de l'ancien Code civil italien posait cette
solution.
* 230 Civ., 23
février 1864, Compagnie péninsulaire et orientale de
Londres, DP 1864. 1. p. 166 ; S. 1864 .1. p. 385 -
Civ., 24 août 1880, Brenton, DP 1880 1 p. 447 ;
S. 1880 1 p. 413 - Civ. 23 mai 1892, Princesse Roukia, DP
1892 .1. p. 473, note Em. COHENDY - Civ., 14 juin 1899,
Abby, S. 1900. 1. p. 225, note A. PILLET.
* 231 Cour
fédérale de la République fédérale
allemande, 30 juillet, 1954, Rev. Crit. DIP 1956, p. 58, note Ernst
MEZGER.
* 232 BATIFFOL, Les
conflits de lois en matière de contrats : étude de droit
international privé comparé, op. cit., p. 377, n°
443.
* 233 Illustrant la
nécessité d'une conciliation entre l'application à
l'admissibilité des modes de preuve de la lex loci actus ou de
la lex fori, BATIFFOL citait l'exemple suivant :
« En droit français, la prescription d'un écrit
ad probationem exclut la preuve par témoins et par
présomptions, sous certains tempérament cependant, mais en tout
cas laisse recevables l'aveu et le serment. Si la loi du lieu de l'acte
prescrivait un écrit, est-il raisonnable, au cas où les parties
ne l'ont pas observée, de lui demander si elle admet l'aveu ou le
serment et si elle a prévue des tempéraments à la
prohibition des témoins et des présomptions ? Tout ceci
semble véritablement à résoudre par la loi du
for, et nous croyons corrélativement que l'esprit de la
règle locus regit actum est d'assurer aux parties que, si elles
ont eu la prudence de s'informer des règles de forme du lieu où
elles contractaient et de les respecter, leur acte sera régulier en la
forme. Mais la seule conséquence à tirer de cette idée, en
ce qui concerne la preuve, est que le contrat passé sans écrit en
un lieu où la loi ne l'exige pas doit pouvoir être prouvé
par les autres moyens normaux, témoins et présomptions, quel que
soit le juge devant lequel les contingences de la compétence
juridictionnelle ou l'opportunité d'une exécution facile
amène les parties. Par contre la règle n'oblige nullement
à refuser la preuve par témoins, admise par la loi du
for, à des parties qui ont contracté en un lieu dont la
loi exigeait un écrit ».
* 234 L'art. 14, al. 2
ouvre donc une option entre la loi du for et la loi de la forme. Toutefois,
celle-ci ne pourra être mise en oeuvre devant le tribunal saisi que si la
lex fori n'ignore pas le mode étranger de preuve.
* 235 Cette décision
fonde la nouvelle jurisprudence relative à l'admissibilité des
modes de preuve.
* 236 Pierre MAYER,
« Droit international privé et droit international public sous
l'angle de la notion de compétence », Rev. Crit. DIP
1979, p. 1 et s., p. 349 et s., et p. 537 et s. (v. spéc. N°
63, p. 380).
* 237 V. en ce sens, et
à titre d'exemple, l'arrêt du 23 février 1864,
Compagnie péninsulaire et orientale de Londres,
précité.
* 238 V. par exemple,
Bernard AUDIT, Droit international privé, op. cit., p. 382,
n° 438.
* 239 BATIFFOL, Les
conflits de lois en matière de contrats : étude de droit
international privé comparé, op. cit., p. 379 ;
BATIFFOL et LAGARDE, Droit international privé, LGDJ, t. II,
7e éd., 1983, n° 708.
* 240 Max LE ROY,
« Le contrôle de l'aptitude au témoignage »,
D. 1969, chron., p. 175.
* 241 Jacques GHESTIN,
Gilles GOUBEAUX, Muriel FABRE-MAGNAN, Traité de droit civil.
Introduction générale, LGDJ, n° 713.
* 242 Ibidem.
* 243 Civ. 1re,
19 décembre 1973, JDI 1974, p. 616, note HUET - Civ.
1re, 18 mai 1976, JDI 1977, p. 485, note HUET.
* 244 Article 1353 du Code
civil.
* 245 André HUET,
« Procédure civile et commerciale dans les rapports
internationaux (DIP) », J.-Cl. Droit international, Fasc.
582-2, n° 107.
* 246 Jean CARBONNIER,
Droit civil. Introduction, Paris, PUF, 25e éd., p.
314, n° 177.
* 247 Civ. 1re,
28 octobre 1970, Bull. civ. I. n° 287.
* 248 Pour une telle
solution, voir André HUET, « Procédure civile et
commerciale dans les rapports internationaux (DIP) », op.
cit., n° 110 ; voir cependant la décision de la Cour
d'Appel d'Aix du 28 avril 1931, JDI 1932, p. 937, qui semble retenir
l'application de la loi du fond.
* 249 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n°
264 et s. ; Thomas GROUD, La preuve en droit international
privé, Presses Universitaires d'AIX-Marseille, Faculté de
droit et science politique, 2000, p. 150 ; Yvon LOUSSOUARN, Pierre BOUREL,
Droit international privé, Dalloz, 7e éd., p.
454, n° 373.
* 250Jean CARBONNIER,
Droit civil. Introduction, op. cit., p. 314, n° 177.
* 251 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n°
274.
* 252 Bernard AUDIT,
Droit international privé, op. cit., n° 439.
* 253 La lenteur de la
procédure est de nature à susciter une crise de confiance de la
part des plaideurs. V. en ce sens Emmanuel JEULAND, Droit processuel,
Paris, LGDJ, 2007, p. 108, n° 90.
* 254 Henri BATIFFOL,
Les conflits de lois en matière de contrats : étude de
droit international privé comparé, n° 438 ; Henri
BATIFFOL et Paul LAGARDE, Droit international privé, op. cit.,
n° 709.
* 255 N'ayant pas
reçu de définition technique, il peut paraître
problématique de présenter la notion de « bonne
administration de la justice ». Certes, l'expression est
évocatrice car elle emprunte ses termes au langage courant. Elle semble
donc faire référence à une acception communément
reçue et non à une signification proprement juridique. De sorte
qu'il n'y a, dans cette notion, aucune spécificité à
l'égard du droit international privé puisqu'il s'agit, au
contraire, d'une notion utilisée de façon tout à fait
transversale (Nathalie LAVAL, « La bonne administration de la
justice », Petites Affiches, 12 août 1999, n° 160, p. 12.
V. aussi les développements de Monsieur JEULAND qui qualifie
l'administration judiciaire de « discipline embryonnaire »,
Emmanuel JEULAND, Droit processuel, op. cit., p. 107 et s, n° 89
et s. Pour une analyse de la notion de bonne administration de la justice en
matière de compétence juridictionnelle, v. Anne SINAY-CYTERMANN,
« L'ordre public en matière de compétence judiciaire
internationale », t. 1, thèse, Strasbourg, 1980, p. 244 et s,
n° 122 et s.). Il faut préciser que l'administration de la justice
ne se confond pas avec la procédure. Plus largement que la
procédure, l'administration de la justice correspond à
l'organisation et la gestion du service public de la justice (Thierry RENOUX et
André ROUX, L'administration de la Justice en France, Que
sais-je ?, Paris, PUF, 1994, p. 7). L'adjectif qualificatif de « bon
» désigne, quant à lui, une certaine qualité de
l'administration de la justice, voire une rationalité qui serait
guidée par le sens commun (« Tout comme la bonne foi, les bonnes
moeurs ou la conduite en bon père de famille, la bonne administration de
la justice exprime par la présence de l'adjectif qualificatif "bon", la
raisonnabilité, la normalité d'un comportement humain ou d'une
situation », Nathalie LAVAL, « La bonne administration de la
justice », op. cit., p. 18, n° 160). Par ailleurs, la
notion peut aussi faire
référence au contexte et à la
manière dont sont rendues les décisions judiciaires
(Hélène PAULIAT, « Les différents modes
d'administration de la justice en Europe et au Québec et leur influence
sur la qualité », in L'administration de la justice en
Europe et l'évaluation de sa qualité, sous la dir. de Marco
FABRI, Jean-Paul JEAN, Philip LANGBROEK et Hélène PAULIAT, Paris,
Montchrestien, 2005, p. 23). La notion de bonne administration de la justice
sert alors à établir les conditions raisonnables qui permettent
la viabilité du service public tout en conservant une qualité
satisfaisante de la justice. Prise dans ce sens, la notion de bonne
administration de la justice a donc la valeur d'un objectif à atteindre.
Elle constitue, selon le mot de Nathalie NAVAL, un standard juridique dans le
sens où elle s'adapte aux circonstances et où elle fait appel
à l'expérience pratique qu'a le juge de sa fonction, sans que
cela découle d'une règle juridique imposée (« Le
standard (...) ne se prête pas à une application mécanique.
C'est l'intuition et l'expérience pratique des choses de la vie qui
inspirent et guident le juge dans l'application empirique du "standard".
L'intuition et l'expérience prennent la place du raisonnement et de la
logique », A.-A. AL-SANHOURY, « Le Standard
Juridique », in Recueil d'études sur les sources du
droit en l'honneur de François Gény, t. II : Les sources
générales des systèmes juridiques actuels, Paris,
Librairie du recueil Sirey, 1934, p. 146).
* 256 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n°
274.
* 257 Pierre MAYER et
Vincent HEUZE, Droit international privé, 9e
éd., Paris, Montchrestien, 2007, p. 374, n° 506.
* 258 Il ne s'agit pas des
procédés électroniques de preuve étudiés
dans la première partie de ce travail. Ici, nous visons le
témoignage, l'aveu, et le serment, qui apparaissent comme des
procédés de preuve impalpables, à la différence de
la preuve écrite classique, celle sur support papier.
* 259 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n°
289.
* 260 Thierry VIGNAL,
Répertoire international Dalloz, V° Preuve, n° 52.
* 261 BATIFFOL et LAGARDE,
Droit international privé, op. cit., n° 709. Ces auteurs
estiment que la compétence doit aller à la loi du lieu de
l'aveu.
* 262 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., p. 9,
n° 1.
* 263 Eric FONGARO, La
loi applicable à la preuve en droit international privé,
Paris, LGDJ, 2004, p. 9, n° 13.
* 264 Ibidem. Un
droit qui ne pourrait être prouvé parce qu'un moyen de preuve ne
serait pas admissible ou n'aurait pas force probante, serait privé de
toute effectivité. En outre, certaines règles de preuve, bien que
ne servant pas directement à établir un droit, constituent des
aménagements de ce droit ; il en va de la sorte lorsque la loi
délimite les faits qu'une personne doit prouver afin de se
prévaloir d'un droit subjectif, ou lorsque le législateur
détermine le plaideur qui devra succomber si la preuve d'un tel droit
n'est pas établie.
* 265 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., n°
9.
* 266 Jean DEVEZ,
« Contribution à l'étude de la charge de la preuve en
matière civile », thèse, Toulouse, 1980, p. 596,
n° 456.
* 267 Jacques FOYER,
« Entrée en vigueur, de la Convention de Rome du 19 juin 1980
sur la loi applicable aux obligations contractuelles », JDI
1991, p. 618, n° 51 et s.
* 268 Pierre ARMINJON,
Répertoire de droit international (de LAPRADELLE et NIBOYET),
t. X, p. 310 et s., V° Preuves ; Bernard AUDIT, op. cit., n°
706 ; Yvon LOUSSOUARN et Pierre BOUREL, Droit international
privé, op cit.
* 269 André HUET,
Les conflits de loi en matière de preuve, op. cit., p. 164,
n° 129.
* 270 Ibidem, p.
165, n° 130.
* 271 TGI de Paris, 12
juillet 1982, D. 1983, p. 200, note AUDIT ; Rev. Crit. DIP
1983, p. 461, note SANTA-CROCE ; JDI 1983, p. 374, note HUET
- Civ. 1re, 4 novembre 1958, Rev. Crit. DIP 1959, p. 303,
note FRANCESCAKIS ; JDI 1959, p. 788, note AP.
* 272 André HUET,
« Procédure civile et commerciale dans les rapports
internationaux (DIP) », J-Cl. International, Fasc. 582-20,
n° 45 et les références.
* 273 Eric FONGARO, La
loi applicable à la preuve en droit international privé, op.
cit., p. 73, n° 128.
* 274 « La
sécurité est précisément l'objectif essentiel du
droit international privé », Pierre MAYER et Vincent
HEUZÉ, Droit international privé, op.cit., p. 23,
n° 32. Adde, « s'il y a bien une matière
où on enseigne que la sécurité juridique est essentielle,
c'est bien le droit international privé. Celui-ci serait
l'instrument de réalisation d'une justice spécifique,
fondée sur une hiérarchie d'objectifs où la
prévisibilité et la certitude pèse plus lourd que
l'équité de la solution atteinte au fond », Horatia
MUIR WATT, « La codification en droit international
privé », Droits, n° 27/3, 1998, p. 151 ; « l'une
des fonctions traditionnellement dévolues au droit international
privé consiste à assurer aux individus la
prévisibilité des solutions », Delphine ARCHER,
« Impérativité et ordre public en droit communautaire
et droit international privé des contrats (étude de conflit de
lois) », t. 1, thèse, Cergy-Pontoise, 2006, p. 159, n°
160. Madame NAJM qualifie même la prévisibilité des
solutions de principe du droit international privé, Marie-Claude NAJM,
Principes directeurs du droit international privé et conflit de
civilisations: relations entre systèmes laïques et systèmes
religieux, NBT vol. 49, Paris, Dalloz, 2005, p. 88 et s., n° 88 et
s.
* 275Henri BATIFFOL,
« Le pluralisme des méthodes en droit international
privé », RCADI 1973-II t. 139, p 96.
* 276 Patrick MORVAN,
« Le principe de sécurité juridique : l'antidote au
poison de l'insécurité juridique ? », Droit social
2006, n°7/8 juillet-août, p. 709, n° 5.
* 277 PORTALIS,
Discours préliminaire au premier projet de Code civil,
éditions confluences, collection «voix de la cité».
* 278 BATIFFOL, Les
conflits de lois en matière de contrats : étude de droit
international privé comparé, op. cit.
* 279 Bernard AUDIT,
Droit international privé, op. cit., n° 438 ;
LEREBOURS-PIGEONNIERE, Droit international privé, Paris,
Dalloz, 7e éd., p. 519 et s., n° 435 ;
LEREBOURS-PIGEONNIERE, « Observation sur al force probante de l'acte
écrit, spécialement en matière commerciale en vue du
règlement du conflit des lois », Mélanges CAPITANT, p.
453 et s ; Pierre MAYER, Vincent HEUZE, Droit international
privé, op. cit., n° 505.
* 280 Henri BATIFFOL,
Les conflits de lois en matière de contrats : étude de
droit international privé comparé, op. cit., p. 379, n°
446.
* 281 Civ., 10 janvier
1951, RCDIP 1952, p. 95 et s., note BATIFFOL ; JDI
1951, p. 882, note B. GOLDMAN.
* 282 En effet, parce que
de nombreuses règles dont relève la preuve judiciaire en droit
interne régissent l'office du juge et touchent au déroulement du
procès, il semblerait logique de trancher les conflits de lois dans
l'espace en matière de preuve en se référant à la
loi de la procédure. Parce qu'un droit subjectif ne saurait se
réaliser sans que la preuve de l'acte ou du fait juridique qui en est la
source ne soit rapportée, une soumission à la loi du fond des
litiges relatifs à la preuve, et comportant un élément
d'extranéité, pourrait aussi se concevoir. Parce que le droit
interne exige souvent l'établissement d'une preuve littérale
préconstituée à laquelle il est conféré une
force probante particulière, le système probatoire n'est pas sans
rapport avec la forme des actes, de sorte que la lex loci actus
pourrait également s'appliquer en la matière.
* 283Il est évident
que l'Africain, naturellement communicatif, utilise énormément
les outils de communication. Aujourd'hui, le transfert progressif des
activités culturelles et commerciales vers les NTIC ne trouve qu'une
seule résistance en Afrique : le manque de moyens.
* 284Conseil d'Etat,
Internet et les réseaux numériques, op. cit., p. 12.
* 285 On pourrait, par
exemple, par l'insertion de nouvelles dispositions, dans le Code civil et dans
le Code de procédure civile, commerciale et administrative, admettre et
organiser l'administration des procédés de preuve en
adéquation avec la vente en ligne, et avec les échanges
électroniques en général.