D. CADRE CONCEPTUEL
Ici, nous donnons la définition de certains termes
utilisés dans le cadre de ce travail de recherche académique pour
les fins de notre analyse.
Constitution
« Ensemble des règles suprêmes fondant
l'autorité étatique, organisant ses institutions, lui donnant ses
pouvoirs, et souvent aussi lui imposer des limitations, en particulier en
garantissant des libertés aux sujets ou citoyens16 ».
« Dans le cadre de ce travail de recherche
académique, la fragilisation de l'autorité de la Constitution
traduit un état de mise en péril de la suprématie de cette
dernière dans la hiérarchie des normes juridiques, en raison d'un
phénomène de puissance qui vient compromettre ou minimiser la
garantie de cette suprématie ».
15 Michel BEAUD. L'art de la thèse, La
Découverte, Paris, 5e éd., 2006, pages 129 à
134.
16 CORNU 2007, page 223.
Régime politique
Forme du Gouvernement d'un Etat. Mise en oeuvre, dans un Etat
déterminé, d'une certaine conception concernant la
souveraineté et les principes dont doit s'inspirer le Gouvernement, ou
les distinctions et relations entre gouvernants et gouvernés et entre
les divers Pouvoirs publics17.
Dans le cadre de ce travail, nous nous intéresserons
surtout aux éléments juridiques du concept de régime
politique. Donc, nous nous appuyons prioritairement sur le cadre
constitutionnel, sans toutefois négliger les éléments
extra-juridiques du concept comme le système de partis, la
personnalisation du pouvoir, l'idéologie, etc.18
De plus, les concepts régime politique et
régime constitutionnel sont considérés comme
interchangeables. Par contre, quand le premier est utilisé, l'accent est
mis sur l'analyse politique ; mais quand le second est utilisé, l'accent
est mis sur l'analyse juridique19.
Déséquilibre institutionnel
Dans le cadre de notre travail de recherche, nous entendons
par déséquilibre institutionnel, le déséquilibre
existant entre les institutions politiques (l'Exécutif et le
Législatif) du cadre constitutionnel proprement dit. Ce
déséquilibre se traduit par la prééminence
quasi-illimitée du Parlement et l'encadrement juridique et politique de
l'Exécutif.
Logiques institutionnelles
Parlant de logiques institutionnelles du régime
constitutionnel de 1987, nous faisons référence à
l'agencement institutionnel des rapports entre les Pouvoirs publics
constitutionnels tel que conçu à la fois dans la lettre et
surtout dans l'esprit de la Constitution.
En définitive, ce travail de recherche
académique comporte deux parties divisées en quatre chapitres.
Ces derniers sont divisés en sections qui, à leur tour, sont
subdivisées en paragraphes.
17 Idem, page 785.
18 Voir GUILLIEN, VINCENT 2001, page 473.
19 Ibidem, page 786.
PREMIERE PARTIE
LES POUVOIRS PUBLICS SOUS LE REGIME
CONSTITUTIONNEL DE 1987 : DESEQUILIBRE AU PROFIT DU PARLEMENT
Sous le régime constitutionnel de 1987, l'exercice du
pouvoir politique au plan national est confié à deux des trois
grands Pouvoirs de l'Etat. Il s'agit du Pouvoir Législatif et du Pouvoir
Exécutif. Il va sans dire que ces deux Pouvoirs publics constitutionnels
partagent la mission de la conduite de l'Etat haïtien.
Dans les régimes étrangers, il arrive que les
Constitutions accordent une certaine prépondérance à l'un
ou l'autre de ces deux Pouvoirs. En ce sens, dans le régime
constitutionnel de 1987, le système institutionnel retenu se
caractérise par la prééminence du Parlement. Il en est
ainsi en réaction au présidentialisme traditionnel dans le
système politique haïtien. Les constituants de 1987 ont
estimé qu'il est plus facile à un seul homme, doté d'un
pouvoir politique fort, d'instituer le despotisme, annihilant ainsi les
libertés fondamentales. Donc, la prééminence
accordée au Parlement paraît comme un moyen de contourner les
éventuelles tentatives de dérive dictatoriale. Néanmoins,
cette prééminence accordée au Parlement ne favorise-t-elle
pas le phénomène de la paralysie parlementaire ou même
celui de la dictature parlementaire ?
Par ailleurs, la Constitution de 1987 traite en premier lieu
du Pouvoir Législatif et les deux organes de ce dernier sont issus du
suffrage universel direct. Au niveau du Pouvoir Exécutif, le
Président de la République est issu du suffrage universel direct,
alors que le Gouvernement est une émanation du Pouvoir
Législatif. Pourtant, dans le cadre du bicéphalisme
exécutif institué par la Constitution de 1987, des pouvoirs
importants sont accordés au Premier Ministre, Chef du Gouvernement, pour
minimiser l'influence du Président de la République,
lui-même élu. Ce dernier a le même fondement
démocratique que les parlementaires. Toutefois, il ne peut pas mettre
fin à leur mandat, alors que le Sénat, érigé en
Haute Cour de Justice, peut mettre fin prématurément à ses
fonctions présidentielles, pour crime de haute
trahison, une notion juridiquement imprécise. De plus, les
principaux pouvoirs du Président de la République sont
teintés de l'influence et du contrôle du Parlement dont les
membres bénéficient des immunités pour le libre exercice
de leurs missions souveraines. En outre, ces derniers disposent de pouvoirs
très étendus pour le contrôle de l'action
gouvernementale.
En somme, le régime constitutionnel de 1987 institue un
Parlement puissant et un Exécutif « désarmé »,
plus particulièrement un Président de la République «
édenté ». D'où, le Parlement forme l'épicentre
du régime.
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