INTRODUCTION
Au commencement était la propriété des
biens. Celle-ci était entre les mains du propriétaire qui
l'exploitait en vue d'un plus grand profit. Devant l'importance et les
contraintes liées à l'extension de l'exploitation individuelle,
il a recouru au mécanisme juridique mis à sa disposition par le
législateur en vue de la réunion des capitaux : la
société1(*).
Ainsi, le droit commun des sociétés commerciales
distingue, suivant leur régime, entre les sociétés de
personnes et les sociétés de capitaux2(*). Dans les
sociétés de personnes où l'intuitus personae
est prédominant, les associés sont tenus solidairement et
indéfiniment des dettes résultant de l'exploitation commerciale.
A côté des sociétés de personnes, le
législateur a
« institué » 3(*) les
sociétés de capitaux dont la plus représentative est la
société anonyme (SA). Suivant l'article 385 al.1er
AUDSCGIE la société anonyme est « une
société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des
dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des
actionnaires sont représentés par des actions ».
Dans le droit OHADA, la logique du fonctionnement de la
société anonyme est la suivante : les associés,
« propriétaires » de la société, ne
peuvent pas, tous ensemble, la diriger. Il faut donc mandater une personne
à cet effet. Mais la société anonyme est, par essence, une
société de capitaux, c'est-à-dire une structure
appelée, hormis l'hypothèse de la société anonyme
unipersonnelle prévue par l'article 385 al 2, à réunir un
grand nombre d'associés. La démocratie directe est plus difficile
à appliquer, raison pour laquelle le législateur a choisi une
démocratie indirecte, permettant ainsi la constitution d'organes
intermédiaires chargés de la diriger au quotidien. Dans cette
mesure, l'Assemblée Générale des actionnaires, organe
souverain et hiérarchique, est compétente pour modifier les
statuts, approuver les comptes, élire les autres organes et mettre fin
à leurs fonctions.
Le Conseil d'Administration est chargé de
déterminer les grandes lignes stratégiques. Composé
d'actionnaires promus administrateurs4(*), il confie à un Président- Directeur
Général (PDG) ou à un Président du Conseil
d'Administration (PCA) et à un Directeur Général (DG) le
soin de les mettre en oeuvre5(*). C'est à ce titre que lui incombe la
gestion.
Dans le cadre de son activité, la société
anonyme passe des contrats avec des personnes physiques ou morales. Les
salariés sont de celles - là. Ils fournissent, en vertu d'un
contrat de travail, leurs services plus ou moins spécialisés
à la société et perçoivent en contrepartie un
salaire. Le salarié est donc un travailleur c'est-à-dire
« toute personne qui s'est engagée à mettre son
activité professionnelle, moyennant rémunération, sous la
direction et l'autorité d'une personne, physique ou morale, publique ou
privée »6(*). Il s'agit ainsi des ouvriers, des
employés, des agents de maîtrise, des techniciens et
assimilés, des cadres ou des ingénieurs et
assimilés7(*).
Le droit du travail règle les rapports entre les
salariés et leur employeur : la société anonyme. Le
droit des sociétés est en principe étranger aux
problèmes des salariés8(*). Mais les choses ont évolué.
Sous l'action de la mondialisation, les économies tendent à
devenir un gigantesque « monopole » qui ne tient aucun
compte du fait fondamental que les entreprises sont constituées d'hommes
et de femmes qui y consacrent une grande partie de leur vie et apportent leur
talent et leur dévouement. Or, l'avenir de ces entreprises et de leurs
salariés ne peut dépendre uniquement des préoccupations
strictement financières. Il est donc indispensable d'associer le
personnel non seulement à la détermination des conditions de
travail, mais aussi à l'exercice du pouvoir. Telle est la
préoccupation majeure de ce travail : la participation
des salariés au fonctionnement de la société anonyme en
droit OHADA.
En effet, participer consiste à coopérer,
à prendre part à quelque chose dont on partage la
responsabilité patrimoniale ou professionnelle. La participation des
salariés désigne les voies et moyens qui permettent au
salarié d'exercer une influence plus grande sur des questions
économiques, sociales et professionnelles de son entreprise individuelle
ou sociétaire. Si la participation du salarié se résume
habituellement à son association, par l'intermédiaire de ses
représentants (Délégués du personnel), à la
détermination des conditions générales de travail dans
l'entreprise9(*), elle prend une ampleur nouvelle dans les
sociétés anonymes. Ici, la participation suppose non seulement la
mise à la disposition du salarié d'une plus grande
information10(*), mais aussi sa prétention à
participer au pouvoir de décision de la société jusque
là détenu par les actionnaires.
Selon les modalités, on distingue entre la
participation obligatoire imposée par la loi et la participation
volontaire fondée sur le libre choix laissé aux employeurs et aux
salariés d'instituer la participation au moyen d'accords individuels
ou de conventions collectives. Selon la forme, la participation des
salariés au fonctionnement de la SA recouvre la participation à
la gestion (accès des salariés aux organes sociaux) et la
participation financière (détention d'une fraction du capital
social et vocation aux résultats de la société).
Cette prétention du salarié à participer
au pouvoir patrimonial et moral de la firme s'accommoderait fort bien avec une
mentalité socialiste qui a pendant longtemps rêvé d'une
société sans classe.
Au XIXe siècle, la participation salariale
est apparue comme une réponse aux contradictions de l'économie
capitaliste naissante. On y rencontre plusieurs théories aux relents
politiques et philosophiques. C'est ainsi que le courant
« utopiste », le plus radical, propose de dépasser
l'opposition entre capital et travail par une nouvelle organisation salariale
fondée sur l'association. Le courant « humaniste »,
proche de la doctrine sociale de l'Eglise, estime que la participation permet
d'assurer la dignité de l'homme au travail11(*). Le courant
« productiviste » quant à lui, fait de la
participation du salarié aux résultats et au capital, un facteur
d'amélioration quantitative et qualitative des résultats de
l'entreprise par la motivation des salariés de l'entreprise.
La pertinence de ces débats n'a pas réussi
à ancrer la participation dans la conscience collective. Il a fallu
attendre la fin de la première moitié du XXe
siècle pour voir apparaître la forme la plus
élaborée de la participation », la notion gaulliste de
la participation qui devrait faire du salarié un
« associé ».
Cependant, cette richesse du débat doctrinal n'a pas
été cristallisée dans la loi du 24 juillet 1966 sur les
sociétés commerciales. Cette loi, réformant celle
centenaire du 24 juillet 1867, a brillé par son mutisme quasi
général sur la participation des salariés. Elle ne
consacre que la possibilité pour le salarié de cumuler un mandat
social avec son contrat de travail12(*). Le mérite revient aux lois
spécifiques postérieures et surtout à la loi du 15 mai
2001 sur les Nouvelles Régulations Economiques d'avoir
révolutionné le domaine de la participation en faisant du
salarié un « co-entrepreneur » de la
société.
On observe que la participation des salariés a
été érigée en système dans les droits
européens et anglo-saxons.
En France, la participation au fonctionnement de la
société est organisée par la loi n° 83-675 du 26
juillet 1983 « relative à la démocratisation du
secteur public » qui consacre l'entrée obligatoire des
salariés dans les organes de gestion et de surveillance des
sociétés nationalisées et l'ordonnance n° 86-1134 du
21 octobre 1986 consacrant l'entrée facultative des salariés
dans les sociétés privatisées. Ces textes ont
été modifiés par les lois du 24 juillet 1994 et du 15 mai
2001. La participation financière est quant à elle,
organisée par plusieurs systèmes participatifs tels que la
participation obligatoire dans les entreprises de plus de cinquante
salariés, l'intéressement facultatif, les divers Plans d'Epargne
Entreprise (PEE) et les plans d'option sur actions (stock option).
Au Royaume Uni et aux Etats-Unis d'Amérique, il existe
plusieurs formules de participation des salariés au Board, au
capital et aux bénéfices de la société qui les
emploie : partage du profit avec paiement en actions ou en
numéraire, plans d'actionnariat collectif, plans d'option sur
actions13(*). Toutefois, comme aucun des systèmes
de participation n'est obligatoire, les entreprises demeurent libres de les
instituer ou non.
Cette euphorie législative en matière de
participation des salariés n'a pas contaminé l'Acte Uniforme
relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du Groupement
d'Intérêt Economique (AUDSCGIE) qui s'est contenté de
maintenir la philosophie de la loi de 1966 en prévoyant à
côté du cumul du contrat de travail avec un mandat social
(articles 317 et 426), l'attribution d'actions aux salariés (articles
639 et s.). A la rigueur, on a espéré que l'avant projet d'Acte
Uniforme portant Droit du Travail devait permettre d'ouvrir les discussions
sur la participation des salariés. Mais il n'en est rien.
Dès lors, quelle place le droit OHADA fait-il aux
salariés dans le fonctionnement de la société
anonyme ? Quelles formes de participation prévoit-il en faveur des
apporteurs de travail au regard de la gestion qui revient de droit aux
actionnaires, détenteurs du capital ? Quelle est
l'efficacité de ces formules de participation ? Comment
améliorer cette participation salariale en l'absence d'un cadre
législatif approprié ? Pourquoi ne pas encourager les SA
à recourir volontairement aux opérations d'actionnariat
salarié afin de renforcer la participation des salariés à
la gestion de leur entreprise ? Dans ces conditions, le salarié
peut-il impunément glisser de la protection du droit social vers le
régime sévère du droit des sociétés sans
prendre un certain nombre de risques ?
L'actionnariat salarié14(*) constitue sans nul doute un élément de
la démocratie participative. Son succès ne se mesure pas à
l'aune des actifs générés. Elle a pour vocation
première de rassembler tous les acteurs de l'entreprise autour
d'objectifs communs, cette synergie développant chez chacun une
conscience de la communauté d'intérêts qui préside
au développement de l'entreprise. Les perspectives qui s'ouvrent
à l'actionnariat salarié recoupent une série
d'enjeux :
- améliorer la performance globale des
entreprises,
- élargir les fonds propres des sociétés
anonymes de l'espace OHADA soumises à la pression de l'environnement
économique international,
- réduire, enfin, les inégalités et
contribuer à l'émergence d'un droit actionnarial dans le cadre
d'un nouveau contrat social dont il nous revient d'imaginer les fondements face
aux défis polymorphes du XXIe siècle.
De l'analyse des textes, il ressort que dans les
sociétés anonymes du droit OHADA, la participation des
salariés ne fait pas défaut (première partie). Cependant,
celle-ci est limitée, inefficace et mérite d'être
améliorée par un recours volontaire aux opérations
d'actionnariat salarié (deuxième partie).
PREMIERE PARTIE :
LA FAIBLESSE DE LA PARTICIPATION DES SALARIES A TRAVERS
LE DROIT UNIFORME DES SOCIETES ANONYMES
L'idée de participation est devenue, depuis longtemps,
sur le plan international, une de celles qui influencent avec force la
structure de l'entreprise et de l'économie de la société
industrielle moderne.
Seulement, on rencontre dans les pays de l'espace OHADA un
scepticisme largement répandu et même une attitude de refus
à l'égard de la participation des salariés. En effet, les
rédacteurs de l'AUDSCGIE ont gardé un mutisme en ce qui concerne
le statut, voire la participation effective du salarié dans la gestion
de la Société Anonyme (SA).
On observe, à côté de certaines
initiatives volontaires internes à certaines sociétés, des
formes légales d'intervention du salarié dans le fonctionnement
de l'entreprise (Chapitre I). Cette disparité peut s'expliquer par le
fait que le législateur OHADA n'a pas entendu ériger la
participation du salarié en une politique sociale et économique
à atteindre, en une troisième voie après le communisme et
le capitalisme.
Il s'ensuit que l'AUDSCGIE n'a pas entendu privilégier
le salarié au détriment des détenteurs du capital
même s'il lui consacre une place non moins importante en temps de crise.
C'est à croire qu'il existe des cloisons étanches entre la
gestion normale de l'entreprise et l'apparition des difficultés
entraînant une procédure collective (Chapitre II).
CHAPITRE I
LES FORMES D'INTERVENTION DU SALARIE DANS LA SOCIETE
ANONYME
La théorie de la participation prône
l'association et non l'affrontement de deux facteurs de production : le
capital et le travail. Au nombre des sociétés, la
société anonyme (SA) apparaît comme le lieu de
prédilection de cette association compte tenu de la structure même
de ce type de société.
La SA est par essence une société de capitaux,
donc une structure réunissant un grand nombre d'associés. Le
législateur OHADA a choisi une démocratie indirecte, permettant
la création d'un organe collégial chargé de gérer,
de diriger, bref de déterminer les grandes orientations de la
société. Ainsi, pour avoir un droit de regard sur la gestion et
peser sur le destin de l'entreprise, il est nécessaire que le
salarié, lié à la société par un contrat de
louage de services, participe aux organes sociaux : soit il est
administrateur (en participant au Conseil d'Administration), soit il est
détenteur d'actions (en siégeant à l'Assemblée
Générale).
Or, l'entrée du salarié dans l'un quelconque des
organes sociaux peut constituer une menace pour les associés existants
car elle se traduit corrélativement par une diminution de leurs
prérogatives. C'est pourquoi le législateur, conscient de
l'atteinte faite au droit de propriété, édicte des
conditions destinées à contenir le cumul dans des conditions
raisonnables
(Section I).
Aussi, faut- il rappeler que le droit des
sociétés de l' OHADA envisage une participation du salarié
sous la forme d'une détention des actions de la société
qui l'emploie (Section II)
Section I - L'accès du salarié au Conseil
d'Administration
de la société
L'accès du salarié au Conseil d'Administration
est la faculté qui lui est offerte de cumuler son contrat de travail
avec les attributions d'administration de la société.
Le cumul, c'est l'addition de deux actes dont chacun, pris
isolément, est en principe parfaitement régulier. Cumuler, c'est
donc « exercer plusieurs emplois en même temps, percevoir
plusieurs traitements, avoir en même temps plusieurs
titres »15(*).
Actuellement, les conditions de cumul de la qualité de
salarié et d'administrateur sont définies à l'article 426
AUDSCGIE. En effet, deux situations sont concevables : ou bien le
salarié est nommé administrateur, ou bien l'administrateur en
place veut, pour diverses raisons, se faire consentir un contrat. Cette
deuxième hypothèse, soumise aux conventions
réglementées16(*), n'est pas
concernée par cette étude. Seule l'étude de la
première est envisagée.
Longtemps considéré comme la seule
possibilité offerte au salarié de se faire un nom dans la SA de
la loi française du 24 juillet 196617(*), le cumul demeure
malheureusement l'unique tentative réelle d'intégration du
salarié dans le droit uniforme (AUDSCGIE), malgré les diverses
réformes de la loi précitée dont il s'est inspiré
en 1998. Il constitue une forme de participation volontaire, non obligatoire.
L'analyse des textes montre que le législateur OHADA s'inscrit dans la
ligne de la jurisprudence française18(*) qui a
dégagé les conditions - désormais solidement fixées
- du cumul (Paragraphe I) ainsi que son incidence sur le sort du contrat de
travail originaire du salarié (Paragraphe II).
Paragraphe I - Les conditions du cumul d'un contrat de
travail
avec un mandat social.
La possibilité de cumuler le mandat social
(administrateur) et de salarié (contrat de travail), exceptionnelle dans
l'esprit de la loi, doit permettre aux cadres d'accéder au Conseil
d'Administration et de faire ainsi profiter la société de leur
compétence et de leur expérience, tout en conservant les
avantages, de sécurité notamment, de leur contrat de travail. La
portée de la règle du cumul est limitée.
Néanmoins, pour qu'un salarié puisse
bénéficier de ce privilège sans rompre son cordon
ombilical, la loi exige principalement l'accomplissement d'une condition
explicite : l'activité, objet du contrat de travail, doit
être effective (A). Aussi, ne doit-on pas oublier que
l'effectivité du cumul est subordonnée à d'autres
conditions implicites mais nécessaires (B).
A - L'exigence de l'effectivité du travail
Cette exigence de l'article 426 AUDSCGIE vise à
rappeler au salarié devenu administrateur que son origine est le contrat
de travail et non la détention d'une portion du capital social. Ainsi,
il est intéressant de comprendre cette notion lapidaire de travail
effectif (1) du contrat afin de pouvoir bien l'apprécier (2).
1 - La notion de travail effectif
Le caractère laconique de l'article 426 AUDSCGIE
conduit à affirmer que le législateur subordonne le cumul
à la qualité même de salarié. Car, pour être
en mesure d'exercer une activité professionnelle effective, il faut
être titulaire d'un contrat de travail effectif19(*).
L'effectivité du travail signifie que le salarié
doit accomplir sa prestation (manuelle ou intellectuelle) dans une logique de
subordination réelle, en état de recevoir des ordres, de les
exécuter et de subir les sanctions résultant de la mauvaise
exécution de cette prestation. Dans l'esprit du législateur, le
cumul ne doit pas être à l'origine d'emplois fictifs
destinés à procurer à certains administrateurs ou
actionnaires une rémunération supplémentaire et des
garanties du droit social20(*). De plus, cette condition contribue à
éviter la fraude à la révocabilité ad
nutum des administrateurs prévue à l'article 433 al. 2
AUDSCGIE.
Par ailleurs, il est à préciser que
l'effectivité de l'emploi doit exister et être constatée
antérieurement à la nomination aux fonctions d'administrateur et
se maintenir durant ce mandat, sous réserve d'une suspension expresse ou
tacite du contrat de travail.
Etant donné, toutefois, que le cumul des statuts de
salarié et de mandataire social crée des tentations à la
fraude, l'exigence du caractère effectif de l'emploi doit être
appréciée à l'aune des critères classiques
dégagés par la jurisprudence.
2- Les critères d'appréciation de
l'effectivité de l'emploi
Dans la mesure où l'existence du mandat social est
rarement contestée, la preuve d'un cumul éventuel porte sur la
survie et l'exécution du contrat de travail. Cette preuve sera
administrée, en règle générale, par l'accumulation
de « présomptions graves, précises et
concordantes » : la jurisprudence se fonde depuis longtemps sur
l'exercice de fonctions distinctes (a) et sur l'exercice de fonctions
subordonnées (b).
a- L'exercice de fonctions distinctes
Il se traduit par l'existence de fonctions
déterminées et effectives. De la sorte, l'existence du mandat
social peut être établie par Procès- Verbal relatant les
séances du CA ou de l'AG ainsi que le rapport spécial du
commissaire aux comptes (C.A.C)21(*). Dans la plupart des cas où le
contrat de travail est antérieur au mandat social, le défaut de
mention relatif à la qualité du nouveau mandataire peut se
révéler fort dangereux.22(*)
En outre et concernant le contrat de travail, l'accent est
d'abord mis sur la concordance entre la qualification professionnelle et les
caractéristiques exactes de l'intéressé. Cette
opération ne provoquera pas de difficultés majeures quand le
contrat mentionne une fonction précise telle que «chef de
fabrication» ou «directeur commercial».23(*)
En revanche, l'existence du contrat de travail sera, toutes
choses égales par ailleurs, infiniment plus délicate à
établir à partir d'un titre ou d'une fonction au contenu
imprécis. Ainsi, le seul terme de directeur ou de directeur technique et
administratif qui n'est complété par «aucune attribution
distincte particulière» fait présumer la confusion de
fonctions.24(*) Il importe que le contrat de travail
définisse des attributions assez limitées pour ne pas se
confondre avec le mandat social, mais assez importantes également pour
ne pas apparaître comme un simple prolongement dudit mandat.
Par ailleurs, la distinction de la fonction de direction
générale (mandat social) et d'une fonction technique (contrat de
travail) est caractérisée par le versement d'un salaire distinct
de la rémunération « commerciale » (jetons de
présence, tantièmes, etc.)25(*) correspondant
à l'exécution du mandat social et prévue à
l'article 430 al. 1er AUDSCGIE 26(*).
Le caractère fictif du contrat de travail pourra alors
être déduit, par exemple, de la clause fixant un salaire
« identique aux indemnités accordées aux mandataires
exerçant les fonctions de directeur général
adjoint » comme l'a décidé une cour
d'appel27(*) . La confusion de rémunération
recèle la confusion de fonctions. Bien que la double
rémunération relevée à
l'avant- garde des décisions jurisprudentielles ne
soit pas le critère décisif 28(*), l'existence d'un
salaire et son payement est un indice sérieux dans
l'établissement de fonctions distinctes pour un salarié
administrateur. Il s'ensuit que lorsque la rémunération est
unique, le juge peut être amené à conclure qu'elle ne
concerne que le contrat de travail et que le mandat social est gratuit ou vice
versa.
Aux critères de fonctions distinctes s'ajoute celui non
moins important de fonctions subordonnées.
b- L'exercice de fonctions
subordonnées
La qualité de salarié suppose l'existence d'un
lien de subordination juridique à l'égard de l'employeur.
Dès lors, le cumul n'est licite que si l'exercice du mandat social ne
confère pas à son titulaire des pouvoirs exclusifs de tout lien
de subordination.
On entend par fonctions subordonnées, celles qui sont
exercées sous la responsabilité d'un supérieur
hiérarchique et qui font naître chez le concerné la crainte
d'une révocation29(*).
Pour avoir une idée de ce qu'est une fonction
subordonnée, il faut prendre l'hypothèse du cumul des mandataires
sociaux investis personnellement d'une fonction de direction
générale. C'est le cas lorsque le salarié, exerçant
une fonction technique, accède à un poste de Directeur
Général ou de Président Directeur Général
tel que prévu par l'Acte Uniforme.
Si l'on examine la situation du Président Directeur
Général dans l'optique d'une recherche juridique du lien de
subordination, on sera peu enclin à admettre qu'il puisse exercer une
activité spécialisée en état de subordonné.
Le pouvoir de direction générale dont il est investi par la loi
30(*), en
le plaçant à la tête de l'entreprise sociétaire, lui
confère en effet le pouvoir hiérarchique du chef, c'est-
à- dire, ce pouvoir de donner des ordres aux salariés et de les
sanctionner. Ce pouvoir lui appartient et ne peut appartenir aux autres organes
de la société, y compris celui de mettre fin à leur
mandat31(*). Certes théoriquement,
l'assemblée générale des actionnaires peut révoquer
le Président Directeur Général; mais dans la
pratiqué, tant qu'il est en fonction, il est le seul organe
habilité à donner des ordres aux salariés de la
société et de décider de leurs licenciements y compris le
sien.
On conclut alors qu'en raison de son statut de dirigeant
social, le Président Directeur Général ne peut
prétendre, dans la pratique, exercer une fonction subordonnée.
En revanche, lorsqu'un salarié accède à
la fonction de Directeur Général d'une SA avec Président
du Conseil d'Administration et Directeur Général, et continue
d'exercer l'activité spécialisée pour laquelle son contrat
de travail a été conclu, il est possible cette fois d'admettre
l'existence d'un lien de subordination permettant de sauvegarder le cumul.
Tant par la fonction que lui assigne la loi d'assister le
Président du Conseil d'Administration à titre de Directeur
Général que par la plénitude de pouvoirs dont il dispose
vis- à- vis des tiers32(*), il est certain que le Directeur
Général est investi du pouvoir hiérarchique dans
l'entreprise sociétaire. Il reste cependant un subordonné du
Président du Conseil d'Administration à qui la loi attribue la
responsabilité de la direction générale33(*). Cela peut sembler
paradoxal.
L'imprécision des conditions explicites du cumul par le
législateur a permis de faire une large part à la jurisprudence.
Par ailleurs, il y a lieu de mentionner que la validité du cumul est
aussi subordonnée à la réalisation de certaines conditions
implicites.
B- L'exigence de conditions implicites
Il ne fait pas de doute que l'article 426 AUDSCGIE
réglementant la participation des salariés au destin de la
société par le biais du cumul a été inspiré
par le célèbre article 93 de la loi française du 24
juillet 1966. Ce dernier exige outre les conditions
énumérées, d'autres conditions qu'on estime être en
latence dans l'exigence du législateur OHADA : la limitation du nombre
de salariés participants (1) et la condition désormais abolie
d'une antériorité biennale (2).
1- Le numerus clausus
La disposition de l'article 426 AUDSCGIE semble faire penser
que l'OHADA permet l'entrée d'un nombre illimité de
salariés d'une SA au Conseil d'Administration. Cela suffit-il à
affirmer que l'OHADA consacre une large participation du salarié
à la direction et à la gestion de la SA ?
Une réponse affirmative serait imprudente. Car,
l'article 426 A.U.D.S.C.G.I.E doit être lu en combinaison avec l'article
417 du même Acte34(*) qui s'applique bien aux salariés car
dans la plupart des cas, ils ne sont pas actionnaires.
Le numerus clausus est, en l'espèce, la stipulation
relative à la limitation quantitative des salariés à la
fonction d'administrateur fixée au tiers.
Il en résulte que le législateur O.H.A.D.A a
entendu utiliser la «règle du tiers»35(*) pour
limiter la participation des salariés dans les instances dirigeantes.
Ainsi, il a entendu instaurer une participation minoritaire du salarié
qui, lorsque les statuts le prévoient, ne pourrait pas peser d'une
manière décisive sur les délibérations, faisant
ainsi concurrence aux représentants des détenteurs du capital.
Pour déterminer cette limite, on devrait tenir compte
du Président du Conseil d'Administration, du Directeur
Général s'il est administrateur et des représentants
permanents des personnes morales administrateurs. Peu importe la nature,
subalterne ou de direction, de l'emploi salarié c'est- à- dire,
employé, agent de maîtrise ou cadre. Ainsi, un Conseil
d'Administration de trois membres peut comprendre un Président, un
Directeur Général, et un salarié administrateur.
Curieusement, le législateur semble ne pas
prévoir de sanction en cas de violation de cette règle du
tiers ; il se borne à annuler les délibérations d'un
Conseil d'Administration irrégulièrement constitué
(article 428 A.U.D.S.C.G.I.E) sans se prononcer expressément sur la
nomination qui est à l'origine de la violation. A notre avis, l'analyse
de l'article 242 A.U.D.S.C.G.I.E auquel renvoie l'article 428 du même
Acte permet d'annuler la nomination en ce qu'elle viole une disposition
impérative de l'Acte Uniforme.
La majorité des auteurs estime qu'il est souhaitable
d'admettre, dans le silence des textes, que les administrateurs dont la
situation est irrégulière soient décomptés pour la
détermination du quorum et de la majorité36(*).
La possibilité du cumul, donc de la participation, a
été renforcée par la suppression d'une condition de
durée attachée à la situation de salarié.
2- La survie d'une condition abolie
Elle est relative à l'ancienneté de 2 ans de
contrat du salarié candidat au poste d'administrateur37(*). Elle signifie que le
salarié devait posséder un contrat de travail vieux de deux ans
avant son entrée au Conseil d' Administration. Ce délai
considéré comme un minimum était destiné à
éviter la fraude. Il court à partir de la date de conclusion du
contrat. Cette condition a été jugée excessive par la
doctrine française qui l'a qualifiée «d'un juridisme
confinant l'absurde ». Ce qui a motivé le législateur
français à l'abolir en 1994. C'est aussi cette même
solution qu'a adoptée le législateur OHADA. Mais la suppression
de la durée de deux ans emporte-t-elle suppression de la condition
d'antériorité elle-même ?
L'on ne saurait l'affirmer car cette condition
d'antériorité survit et reste accentuée par l'exigence
d'un travail effectif. Pour le juge, cette antériorité biennale
demeure toujours une référence symbolique non obligatoire dans la
recherche des preuves du caractère effectif du contrat de travail pour
valider le cumul. Autrement dit, le juge OHADA utilisera un faisceau d'indices
pour établir l'effectivité de l'emploi et rien ne s'oppose
à ce qu'il se réfère à la condition légale
désormais abolie car le caractère réel et sérieux
du contrat peut aussi découler de sa consolidation par le temps.
Somme toute, lorsque le salarié arrive à
participer à l'organe de gestion et de direction qu'est le Conseil
d'Administration par l'intermédiaire du cumul, un autre problème
apparaît ; celui de l'incidence des nouvelles fonctions sur la
survie de son contrat de travail.
Paragraphe II - Les conséquences du cumul sur le
sort du contrat
de travail
Le sort du contrat de travail se résume dans la
constatation suivante : lorsque la même personne est en droit
d'être à la fois salarié de l'entreprise et membre du
Conseil d'Administration, « la main droite de ce nouveau Maître
Jacques peut-elle totalement ignorer ce que fait la main gauche »
38(*) ? Le sort du contrat de travail du
salarié administrateur doit être analysé sous l'angle du
cumul régulier (A) et celui du cumul irrégulier (B).
A- L'hypothèse du cumul régulier
Egalement appelé cumul licite, le cumul régulier
est celui opéré dans le respect des exigences légales. Il
se caractérise par l'indépendance de principe entre les deux
ordres de statuts (1) quand bien même la jurisprudence y a apporté
en la matière certains tempéraments (2).
1- L'indépendance de principe des deux
statuts
L'indépendance de principe signifie que le cumul
n'implique aucune interférence dans chacun des deux ordres de statuts
dont il est la résultante. Ce principe n'est que le corollaire
nécessaire découlant de l'article 426 AUDSCGIE.
L'absence d'interférence implique que les modifications
apportées à une fonction ne doivent avoir aucun effet sur le
maintien de l'autre. L'administrateur qui cumule ses fonctions avec celles de
directeur technique ne peut être privé des indemnités
afférentes à la rupture de son contrat de travail pour avoir
déposé une note critiquant la gestion du Président
Directeur Général, « sans esprit de malveillance
envers ce dernier pour la défense de ses droits d'actionnaire
minoritaire et, comme administrateur, dans l'intérêt
social »39(*) .
En outre, la révocation du mandat social ne doit pas
avoir pour effet d'entraîner la résiliation du contrat de travail
conclu avec la société parce que soumise à l'autorisation
préalable du Conseil d'Administration à moins que cette
modification ne constitue l'accomplissement d'une opération courante de
la société40(*).
Il reste cependant que l'existence du cumul va compromettre
l'application de certaines règles essentielles. Il apparaît dans
la pratique que la nécessaire indépendance entre l'organe de
contrôle et l'organe contrôlé est menacée :
l'administrateur salarié, qui participe en tant qu'administrateur au
contrôle de la direction générale, se trouve, en tant que
salarié, subordonné à celle-ci. « Cette
circonstance risque, selon les personnalités en présence,
d'affaiblir la direction générale ou, à l'opposé,
de ruiner tout véritable contrôle »41(*).
Ces diverses considérations vont nécessairement
expliquer les multiples tempéraments apportés par la
jurisprudence au principe d'indépendance.
2- Tempéraments jurisprudentiels au
principe
d'indépendance des deux
statuts
Du point de vue général, on considère que
le cumul permettant au salarié d'accéder aux fonctions de
direction de la société constitue un moyen de promouvoir une
véritable participation en associant les salariés aux
décisions de gestion ainsi qu'aux résultats de
celle-ci42(*).
Plus précisément, le cumul permet aux cadres
salariés d'accéder à la direction sans avoir à
perdre leur statut originel. Dans cette optique, le cumul peut porter atteinte
à l'exercice des droits collectifs puisque le mandataire ne saurait
légitimement participer aux pouvoirs de l'employeur et aux
élections des délégués du personnel, voire
être pris en compte dans l'effectif de l'entreprise pour les
élections professionnelles 43(*).
Dans une espèce rendue le 16 décembre 1981, la
Cour de Cassation a décidé qu'un administrateur salarié ne
peut légitimement contester la modification, fût-elle
substantielle, du contrat de travail, occasionnée par un changement de
son lieu d'exécution alors même que l'intéressé
avait émis, dans une Assemblée Générale
Extraordinaire (AGE) un vote favorable au transfert du siège social.
Cette jurisprudence a été réitérée par la
chambre sociale dans un arrêt où il a été
affirmé qu'une même faute pouvait légitimer une cause
réelle et sérieuse de licenciement puis caractériser un
juste motif de révocation pour des dirigeants
révocables44(*).
Il apparaît que la jurisprudence en matière du
cumul régulier est fluctuante en raison de la diversité des cas.
Quid de la survie du contrat de travail dans l'hypothèse d'un cumul
irrégulier ?
B- L'hypothèse du cumul irrégulier
La permanence du cumul a pour conséquence de le rendre
irrégulier dès lors qu'intervient une confusion des deux
fonctions, fût-elle temporaire. Le cumul irrégulier ou illicite ne
répond à aucune des conditions édictées par la loi.
L'irrégularité peut exister lors de la constitution du cumul ou
lors de son exécution. Dans le premier cas, le cumul ne peut se
constituer faute d'avoir rempli toutes les conditions requises et la violation
entraîne la nullité de la nomination.
En revanche, notre propos concerne l'hypothèse
où, au cours de l'exécution du cumul, la fonction de direction
générale absorbe celle de direction technique résultant du
contrat de travail. Dans ce cas, doit-on se contenter d'annuler les
délibérations portant nomination du salarié comme l'exige
l'article 428 AUDSCGIE ou doit-on annuler le contrat de travail comme ne
résultant plus d'un emploi effectif ?
En l'absence d'une solution explicite du législateur
OHADA et dans une matière ou le royaume du fait prédomine, le
recours à la jurisprudence s'impose.
Ainsi, l'analyse des décisions montre qu'après
plusieurs oscillations non négligeables en faveur de la suspension du
contrat de travail (1), la jurisprudence recourt à certains
mécanismes juridiques comme substitut du cumul irrégulier
(2).
1- La suspension du contrat de travail comme
un remède limité au cumul
irrégulier
La suspension est un simple temps d'arrêt dans
l'écoulement du délai ou dans l'exécution d'un engagement.
Lorsque la cause de la suspension disparaît, l'exécution reprend
son cours en tenant compte du délai écoulé avant la
suspension.
En général, la suspension du contrat consiste
à relâcher temporairement le lien contractuel, sans pour autant
mettre fin au rapport d'obligation45(*). La suspension est donc
l'impossibilité momentanée d'exécution de son obligation
par une partie, quelle que soit la cause de cette impossibilité.
En matière de cumul irrégulier, la suspension
apparaît comme un remède efficace, puisque le vice
résultant du cumul du mandat social et du contrat de travail, la
suspension de ce dernier permettra la disparition de
l'irrégularité.
L'intérêt de la suspension du contrat de travail
est très pratique. Dans tous les cas, l'autorisation du cumul d'un
mandat social et d'un contrat de travail suspendu permet au dirigeant social de
se consacrer exclusivement à ses tâches de direction sans pour
autant renoncer à son statut originel de salarié.
Etant une situation exceptionnelle et embarrassante pour la
société soucieuse d'être en harmonie avec l'article 426
AUDSCGIE, la question de savoir si la suspension du contrat de travail doit
intervenir de plein droit ou en vertu d'une (volonté) clause expresse
des parties a donné lieu à une jurisprudence abondante.
L'analyse de la jurisprudence montre que la Cour de Cassation
française avait admis la validité du procédé dans
une espèce où la suspension était prévue dès
l'origine par une clause expresse du contrat de travail46(*) .
Cette solution a été reprise par le Tribunal de
commerce de Nantes, dans une affaire où la suspension, qui
n'était pas initialement prévue, avait été convenue
au moment de l'accès du salarié au conseil
d'administration47(*).
On voit donc que la chambre sociale est passée d'une
suspension implicite à une suspension explicite sans qu'une solution
soit exclusive de l'autre48(*). De son côté, la chambre
criminelle a penché en faveur d'une suspension de plein
droit49(*). Dans tous les cas, l'on peut valablement
affirmer que le courant jurisprudentiel actuel se retranche
systématiquement derrière une suspension, à défaut
d'une volonté claire et non équivoque des parties. Celles-ci
doivent être libres de décider d'un maintien que la loi n'interdit
pas. Des stipulations écrites et formelles sont certes utiles, mais il
doit s'agir là de précautions probatoires. Telle est aussi
l'opinion d'une partie de la doctrine pour qui la suspension
expressément stipulée du contrat de travail constitue
la « solution de sagesse» au problème de la
confusion des fonctions50(*).
Les difficultés ayant résulté du
régime de la suspension qui apparaît dans certains cas comme un
remède imparfait à l'irrégularité doivent amener
les praticiens à lui substituer d'autres mécanismes juridiques
voisins.
2 -Les succédanés au cumul
irrégulier
La suspension du contrat de travail n'est pas la
panacée ; c'est pourquoi, il est possible de recourir aux
mécanismes de nullité ou de novation.
La disparition du caractère distinct et
subordonné des fonctions peut donner lieu à la nullité du
contrat. Cependant, cette nullité comporte des conséquences
néfastes pour le salarié qui passerait d'une situation stable et
protectrice créée par le contrat de travail à une
situation précaire, donc éjectable à tout moment. Ce
mécanisme n'est pas à conseiller. Qu'en est-il de la
novation ?
La novation est une opération qui, d'un seul coup,
éteint une obligation pour la remplacer par une autre51(*). Elle suppose le
remplacement de l'ancienne obligation par une nouvelle. Si la convention
novatoire est annulée, la première obligation prend toute sa
force. La novation est donc le fait pour un salarié, qui se voit
accorder un mandat social, de substituer le mandat social à la
convention concernée.
On pourrait s'interroger sur l'intérêt d'un tel
mécanisme à côté de la suspension dans la mesure
où le premier aboutit à la disparition du contrat de travail
alors que le deuxième se traduit par la mise à l'écart
temporaire de ce même contrat.
La vérité est qu'il ne faut pas perdre de vue
que le mécanisme novatoire proposé par certains juges du fond
52(*)
n'est qu'un succédané entre les mains du juge. Autrement dit,
celui-ci ne peut recourir à ce procédé que lorsque
l'interprétation du contrat de travail ne fait pas apparaître la
volonté des parties de le suspendre, ou bien lorsqu'il n'existe aucune
clause suspensive extracontractuelle convenue avant la nomination du
salarié au poste de mandataire social.
Bien que la novation puisse constituer un
succédané au principe désormais certain de la suspension,
il ne demeure pas un succédané efficace adapté au
salarié administrateur car il élimine le cumul et enlève
au salarié la possibilité de bénéficier des deux
statuts.
En définitive, le cumul d'un contrat de travail et d'un
mandat social constitue une forme primaire d'association des salariés,
notamment des cadres, aux instances décisionnelles de la SA du droit
ohada. Aussi, celui-ci a-t-il favorisé une autre forme de participation
par l'attribution d'une fraction du capital organique aux salariés.
Section II - L'attribution des actions de la
société aux salariés
Hormis la possibilité offerte au salarié de
participer à la direction, à la gestion de la SA tout en
conservant son contrat de travail, le législateur OHADA lui permet de
posséder des actions de la société qui l'embauche.
Dans cette optique, la société
prélèvera sur les bénéfices non distribuables une
part qui sera distribuée aux salariés sous forme d'actions
créées à l'occasion de l'augmentation du capital par
l'incorporation de réserves au capital ou des actions rachetées
sur le marché par la
société53(*).
L'attribution d'actions de la société aux
salariés constitue l'une des exceptions apportées au principe
d'interdiction faite à la société de racheter ou de
détenir ses propres actions. Pour éviter que ce
procédé ne soit à la source de montages destinés
à rendre le capital de la société flottant et fictif,
l'AUDSCGIE soumet la participation des salariés au capital de leur
société à l'accomplissement de conditions rigoureuses
(Paragraphe I) et à l'obligation de libérer le montant des
actions rachetées ou souscrites (Paragraphe II).
Paragraphe I - Les conditions de l'attribution des
actions de la
société aux
salariés
La participation financière des salariés qui se
traduit par l'acquisition à titre gratuit ou à titre
onéreux, des actions de leur société, constitue donc, dans
l'AUDSCGIE, une exception au principe de l'auto-détention du capital par
une société. Dès lors, le recours à cette
opération obéit à des conditions strictes relativement aux
actions à attribuer (A) et au souci de ne pas entamer le capital social
(B).
A- Les conditions relatives aux actions
Pour éviter que l'entrée des salariés
dans le capital de leur société ne soit à l'origine de
bouleversements affectant l'exercice du pouvoir par les blocs de
majorités existantes, le législateur subordonne
l'opération à l'autorisation préalable de
l'Assemblée Générale Extraordinaire (AGE) des actionnaires
permettant au conseil d'administration de racheter ou de souscrire des actions
destinées aux salariés. En outre, l'opération doit
respecter certaines exigences tenant au nombre déterminé (1) et
à la forme nominative obligatoire (2) des actions attribuables.
1- Le nombre
déterminé d'actions
Dans sa volonté d'instaurer une participation
limitée des salariés à la vie de la SA, le
législateur OHADA a déterminé un nombre précis
d'actions susceptible d'être acquis par la société en vue
de son attribution au personnel salarié.
Ainsi, ce nombre ne peut excéder 10% du total des
actions formant le capital social. On peut dire, en d'autres termes, que
l'AUDSCGIE encourage les actionnaires à rétrocéder une
fraction de 10% de leurs prérogatives aux salariés. Il en
résulte que cette fraction n'a pas vocation à influencer les
décisions collectives car cette exigence est perçue comme un
maximum que ni les actionnaires ni les salariés ne doivent
excéder sous peine de nullité.
En principe, tous les salariés de la
société titulaires d'un contrat de travail en cours de
validité sont concernés : cadres, ingénieurs, agents
de maîtrise, employés, ouvriers, agents
d'exécution54(*). Mais en pratique, une telle
opération n'intéresse le plus souvent que les cadres (pris au
sens général) qui connaissent le véritable enjeu de cette
démarche.
Cette fraction de 10% du capital comprend outre les actions
possédées par les salariés, celles acquises ou
détenues par une personne agissant en son nom propre mais pour le compte
de la société55(*) . C'est le cas par exemple
d'un « portage » d'actions 56(*) effectué par
une banque ou un organisme (Fonds communs de Placement ou d'un Fonds salarial
collectif) appelé à détenir provisoirement les actions
à transmettre au personnel.
Il faut aussi souligner que la fixation du seuil des actions
susceptibles d'être détenues par les salariés traduit le
souci du législateur de permettre aux concernés d'exercer
effectivement leurs droits d'actionnaire. Ce sont essentiellement le droit de
contrôle notamment l'expertise de gestion prévue à
l'article 159 AUDSCGIE, de critique et de vote dans les assemblées
générales dont la participation n'est à priori soumise
à aucune limitation relative au minimum légal d'actions
possédées 57(*).
L'exigence relative à la limitation du nombre d'actions
à attribuer aux salariés est renforcée par la
nominativité obligatoire mais temporaire que doivent revêtir ces
actions.
2- L'exigence relative à la forme nominative des
actions
Lorsqu'une société acquiert ses propres actions
en vue de promouvoir son actionnariat salarié, elle a l'obligation de
maintenir ces actions sous la forme nominative et de les attribuer aux
salariés dans un délai d'un an à compter de leur
acquisition58(*).
Ces actions en question doivent revêtir la forme
nominative c'est- à- dire que le titre doit mentionner le nom de son
titulaire et ne peut se négocier que par l'inscription à un
compte tenu par la société. Ainsi celle-ci connaît
l'identité des salariés détenteurs de ces actions et peut
suivre les modifications intervenant dans la répartition du capital
social59(*). L'obligation de nominativité
affectant les actions est temporaire et conduit à
l'indisponibilité des actions détenues par les salariés. A
notre avis, cette exigence est une précaution louable du
législateur mu par le désir, peut-être bien illusoire, de
créer l'accoutumance des salariés à leur nouvelle
situation d'actionnaire. Elle fait obstacle à la négociation et
au nantissement des actions détenues par les salariés. En
réalité, cette exigence semble, par ailleurs, se justifier
surtout par le souci de combattre la tentation chez les dirigeants sociaux
de se servir de ces actions pour se faire une majorité confortable.
Dans tous les cas, cette initiative du législateur qui
a pour but de substituer au « face à face » le
« côte à côte », d'améliorer le
climat social au sein de l'entreprise, d'y encourager le dialogue, mieux d'y
intégrer les salariés plus profondément dans l'entreprise,
ne doit pas entamer le gage des créanciers sociaux que constitue le
capital social.
B- L'interdiction de porter atteinte au capital social
L'acquisition d'actions de la société en vue de
leur attribution aux salariés ne doit pas avoir comme
conséquence l'abaissement des capitaux propres de la
société à un montant inférieur à celui du
capital social augmenté des réserves non
distribuables60(*). Il est important de cerner la notion de
capitaux propres (1) avant de percevoir l'intérêt d'une telle
exigence (2).
1- La notion de capitaux propres
On entend par capitaux propres 61(*) l'ensemble des sommes
qui reviendraient aux associés en cas de dissolution de la
société. Ils regroupent l'ensemble des sommes investies par les
détenteurs du capital. Les capitaux propres constituent les ressources
stables que la société emploie pour le financement
intégral de l'actif social composé de l'actif immobilisé
(ensemble de toutes les immobilisations corporelles, incorporelles et
financières) et de l'actif circulant.
Quelle est alors la composition des capitaux propres ?
Le droit comptable insiste sur la notion de «capitaux
propres et ressources assimilées''62(*).
D'abord, les capitaux propres sont formés du capital
social (classe 10), des réserves constituées (classe 11) et du
résultat net bénéficiaire ou déficitaire de
l'exercice (classe 13). Ce sont des sommes investies par les actionnaires, par
opposition aux sources extérieures de financement (emprunts). Les
réserves dont s'agit ici ne peuvent être que des réserves
légales et statutaires non disponibles.
Ensuite, aux capitaux propres, on assimile un certain nombre
de ressources que le droit comptable uniforme appelle « autres
capitaux propres »63(*). C'est dans cette optique que les
prêts participatifs sont souvent assimilés aux fonds propres, car
ils sont mis à la disposition de la société d'une
manière stable et ne sont remboursés qu'après les
créanciers chirographaires.
Néanmoins cette assimilation a été
critiquée64(*) car malgré leur stabilité
apparente, ces quasi fonds propres ne sont autre chose que des dettes. Par
conséquent, on risque de tromper les autres créanciers en leur
faisant prendre une dette pour un élément qui accroît la
solvabilité de la société.
Au demeurant, quel est l'intérêt d'une telle
interdiction ?
2- L'intérêt de l'interdiction
La fraction du capital social mise à la disposition des
salariés ne doit pas abaisser les capitaux propres et les autres
capitaux propres en dessous du montant du capital augmenté des
réserves indisponibles. Cette interdiction présente un double
intérêt.
D'un côté, elle permet de sauvegarder le principe
de la réalité du capital social qui est le gage minimum des
créanciers sociaux. En effet, les actions acquises pour être
attribuées aux salariés constituent une exception au principe de
l'auto détention des actions par une société. Celle- ci
pourra soutenir les cours de ses actions en se portant acquéreur ou les
faire baisser en vendant les titres qu'elle détient en portefeuille. Or,
cette auto détention qui est dans une certaine mesure un contrat de la
société avec elle-même contribue à rendre le capital
fictif et flottant, ce qui est catastrophique pour les
épargnants65(*). D'un autre côté,
l'interdiction est destinée à éviter que la satisfaction
d'un intérêt catégoriel, en l'occurrence celui des
salariés, ne mette en péril l'existence même de
l'entreprise. En effet, la baisse des capitaux propres en dessous du capital
augmenté des réserves non distribuables constitue une cause de
dissolution anticipée des sociétés
anonymes66(*). Bien sûr, la société
dispose d'un délai pour régulariser la situation. Dans le cas
contraire, et si la situation est préoccupante, voire
irrémédiable, la société peut demander l'ouverture
d'une procédure collective.
En somme, la philosophie du législateur O.H.A.D.A est
simple. La promotion de l'actionnaire salarié ne doit pas porter
atteinte à l'intérêt des actionnaires et à la
viabilité de l'entreprise, donc à la stabilité de l'emploi
que l'on veut sauvegarder. Mais un autre problème surgit : celui de
la libération des actions de la société dont
l'acquisition a été faite au profit des salariés.
Paragraphe II - L'obligation de libérer le
montant des actions
souscrites
Une chose est d'acheter ou de souscrire aux actions, une autre
est de procéder à leur libération effective. La
souscription est, ici, l'attribution de la fraction du capital acquise aux
salariés qui acceptent. Ainsi la libération est
l'exécution de la souscription par la réalisation, c'est-
à- dire le paiement du prix correspondant à la fraction du
capital souscrite. Tant que les actions ne sont pas intégralement
libérées, elles doivent rester sous la forme nominative et ne
peuvent être attribuées aux salariés que dans le
délai d'un an. A qui incombe alors l'obligation de libérer ces
actions ? A la société ou aux bénéficiaires
(A) ? Et quelle est la sanction attachée à
l'inexécution de cette obligation (B) ?
A- Les débiteurs de l'obligation de
libérer
En principe l'obligation de libérer le montant de la
souscription des actions incombe solidairement aux souscripteurs (1) et aux
cessionnaires (2).
1- Les souscripteurs
Par souscripteurs, il faut entendre tous ceux qui ont
participé ou donné leur consentement à la souscription.
Ainsi donc, il faut inclure dans cette catégorie la
société elle-même et les personnes qui agissent en leur nom
propre mais pour le compte de la société.
En ce qui concerne la société, cette obligation
peut incomber aux fondateurs ou aux administrateurs du conseil d'administration
ou à l'administrateur général selon le cas. Elle
appartient aux fondateurs 67(*) lorsque l'opération de souscription
d'actions réservées aux salariés est intervenue lors de
l'accomplissement des premiers actes effectués en vue de la constitution
de la société.
En revanche, lorsque la société est
régulièrement constituée, c'est- à- dire lorsque
les statuts viennent d'être signés par tous les associés ou
l'associé unique, l'obligation de libération revient aux
dirigeants sociaux, à savoir les membres du conseil d'administration ou
le cas échéant l'administrateur général, qui ont,
bien entendu, exécuté l'ordre donné par l'assemblée
générale des actionnaires de racheter les actions en cause.
Par ailleurs, l'AUDSCGIE met aussi l'obligation de
libération à la charge de la personne qui agit en son propre nom
mais pour le compte de la société. Cette obligation est solidaire
avec les fondateurs ou les membres du conseil d'administration. Ceci signifie
que l'intermédiaire a la qualité de commerçant et peut
être une personne physique ou morale. C'est le cas par exemple d'un
commissionnaire, d'un agent commercial ou d'une société de
gestion et d'intermédiation de portefeuilles. Cette obligation
s'explique valablement puisque dans ce cas, l'intermédiaire est
réputé avoir souscrit pour son propre compte (article 640
AUDSCGIE in fine). Que dire alors des bénéficiaires ?
2- Les bénéficiaires
de la souscription
Il ne fait l'ombre d'aucun doute que les
bénéficiaires de la souscription sont, ici, les salariés
qui ont accepté les actions rachetées de leur
société. A ce titre, ils ne sont pas de facto soumis à
l'obligation de libérer les actions qui leur ont été
attribuées. Cependant, cette obligation n'apparaît seulement qu'au
jour de l'expiration du délai d'un an et après que les actions
aient été virées du compte de la société au
compte personnel des salariés bénéficiaires.
La justification de cette obligation devra être
recherchée dans le mode de cession des actions aux salariés,
selon que cette cession est à titre gratuit ou à titre
onéreux.
Dans le cas d'une attribution gratuite assimilable à un
complément de rémunération versée en nature,
l'obligation mise à la charge des salariés apparaît
excessive.
Par contre, si l'attribution se fait à titre
onéreux, la propriété des actions détenues
temporairement par la société (au maximum 1 an) reste acquise aux
salariés dès l'inscription des titres sur leur compte personnel.
Ainsi, l'obligation de libération de ces actions leur incombe en tant
que cessionnaires successifs68(*) , donc propriétaires. Dans la
pratique, la société peut leur consentir des prêts en vue
de la libération de ces actions ou leur accorder - ce qui revient au
même - des délais raisonnables de règlement.
Malgré ces nombreuses possibilités, il peut
arriver que ces actions ne soient pas libérées. Quelles seront
les conséquences pour les débiteurs de cette obligation ?
B- La sanction attachée à la non
libération des actions souscrites
L'obligation de libérer les apports est une disposition
impérative de l'AUDSCGIE dont la violation est susceptible de donner
lieu à la nullité de la société69(*). Ainsi la sanction de
la non libération des actions acquises ou souscrites en vue de
l'attribution aux salariés trouve son fondement dans les articles 639,
738 et 740 AUDSCGIE auxquels renvoie expressément l'article 640 du
même Acte. La nullité de la société prévue
par ces dispositions engage la responsabilité solidaire des fondateurs,
des membres du conseil d'administration ou de l'administrateur
général selon le cas, et de la personne qui agit en son nom
propre mais pour le compte de la société. A qui appartient
l'action en responsabilité du fait de la nullité de la
société ?
L'action en responsabilité appartient à celui
(ou ceux) qui subit personnellement le préjudice. C'est le cas des
associés de la société dont l'intérêt
légitime, sérieux et véritable n'est pas à
démontrer.
On se demande, en revanche, s'il est possible aux
salariés d'agir en responsabilité dans la mesure où ces
actions de la société n'ont été rachetées
que pour leur être attribuées. Ont-ils un intérêt
légitime, certain et actuel à agir pour le préjudice que
leur causerait la nullité de la société résultant
de la non libération des actions qui leur sont destinées ?
Peut-on affirmer que le droit qu'ils revendiqueraient n'est qu'éventuel
ou hypothétique, voire une simple expectative ?
Il ne saurait en être ainsi. En principe, il est clair
que l'intérêt des salariés existe surtout à compter
de l'expiration du délai d'un an à partir de l'acquisition des
actions70(*) . Ils sont censés être
attributaires des actions souscrites et libérées. Ils ont donc un
intérêt collectif certain, actuel et direct pour poursuivre la
réparation du préjudice subi conformément au droit commun.
Une action collective des salariés contre les débiteurs de
l'obligation de libérer les actions rachetées est susceptible
d'aboutir. Or, l'OHADA n'organise pas une participation collective des
salariés aux instances de la société.
En revanche, l'action individuelle des salariés ne
saurait être fondée dans la mesure où même
après l'expiration du délai prévu pour leur attribution,
l'inscription des actions sur le compte personnel de chaque salarié
n'est pas encore opérée. Il faut comprendre cette solution par
rapport au mutisme et au flou des dispositions législatives qui ne
précisent pas les critères d'attribution de ces actions
rachetées. Ceci serait différent si les statuts
prévoyaient expressément la qualité des attributaires ou
encore si l'assemblée générale extraordinaire qui autorise
l'opération déterminait le nombre et l'identité des
salariés bénéficiaires.
En définitive, on voit que le législateur OHADA
reconnaît une place au salarié dans le fonctionnement de la SA
à travers une participation qui, au regard de ce qui
précède, apparaît comme embryonnaire et surtout
restrictive. Dès lors, il importe de se livrer à une
appréciation d'une telle participation.
CHAPITRE II
APPRECIATION CRITIQUE DE LA PARTICIPATION
INSTAUREE PAR L'OHADA
L'essence de la participation est d'influer, voire de limiter
le pouvoir de l'employeur devenu absolu à un moment donné et qui
lui permettait de procéder à la libre organisation de
l'entreprise.
L'atténuation des pouvoirs du chef d'entreprise
s'opère à travers les prérogatives du personnel reconnu
comme une entité juridique collective. Mais, l'analyse de la
participation instituée par l'AUDSCGIE révèle que l'action
exercée par le salarié sur la gestion de la SA est limitée
et insuffisante parce que individuelle (section I).
Ainsi, on est en droit d'affirmer que cette participation ne
pourra jamais faire du salarié un actionnaire entier puisque
l'actionnariat organisé en sa faveur constitue plutôt un
trompe-l'oeil qu'un véritable instrument de son intégration dans
la société (section II).
Section I - Le caractère limitatif de la
participation
du salarié à la
gestion de la société anonyme
La participation du salarié à la gestion doit se
traduire par la reconnaissance d'un droit étendu à l'information
matérialisé par l'aptitude à apprécier les
documents financiers et comptables de la société et par la
participation effective aux décisions collectives dans la perspective
d'une sauvegarde de la continuité de l'activité sociale.
Dans cette optique on peut affirmer que la participation
instaurée par l'Acte Uniforme souffre d'un reproche principal :
elle est limitée et non décisive. Si ce reproche est fondé
en temps normal (Paragraphe I), il doit être tempéré en
temps de crise où le salarié revient au centre des
préoccupations du législateur (Paragraphe II).
Paragraphe I : L'insuffisance de la participation
du salarié
en temps normal
La participation insuffisante du salarié au
fonctionnement de la SA de l'espace OHADA se caractérise par une
efficacité relative de son intervention (A) d'autant plus qu'il ne
dispose pas d'un droit d'alerte (B) destiné à matérialiser
sa place dans la gestion de la société.
A - La relative efficacité de la participation du
salarié
Il ressort de la combinaison des articles 417 et 426 AUDSCGIE
que les salariés ne peuvent accéder à la gestion ou du
moins à la direction de la société que si les statuts le
prévoient et après avoir rempli un certain nombre de conditions
plus ou moins contraignantes.
La défaveur avec laquelle est vue la participation des
salariés au contrôle de la direction n'est sans doute pas
étrangère à une certaine aversion du législateur
OHADA envers une forme de cogestion. C'est ce qui justifie probablement la
règle limitant la proportion des salariés () de même que
l'autorisation préalable des statuts (1).
1- La subordination de la
participation à la volonté
des actionnaires
Pour permettre l'accès des salariés au conseil
d'administration il faut que les statuts le prévoient71(*). Dans le cas
où les statuts ne l'ont pas prévu, les actionnaires peuvent, par
une clause modificative, ou par un agrément72(*), autoriser la
participation des salariés à la gestion de la
société.
Dès lors, il est difficilement imaginable que les
anciens actionnaires veuillent accepter avec joie l'introduction d'une clause
destinée à favoriser l'entrée d'administrateurs non
actionnaires qui seront à l'origine de perturbations diverses.
Si d'une manière générale, on est
d'accord que le droit ne se donne pas mais s'arrache, la mise en oeuvre de la
participation des salariés dans l'espace OHADA sera toujours difficile
et laissée au bon vouloir des actionnaires.
Par la participation volontaire, le législateur confie
l'organisation de la participation salariale aux actionnaires. Elle est
fondée sur l'idée qu'il ne saurait être concevable que la
participation fasse toujours l'objet d'une loi73(*).
Mais l'admissibilité de la participation volontaire a
été discutée sur le plan juridique dans les pays où
elle a été adoptée. Le caractère volontaire suppose
la faculté de refuser. Le refus de la participation émane le plus
souvent de la témérité des actionnaires fondée sur
l'idée qu'avec l'adversaire de classe on ne peut rien faire en commun.
Dans ces conditions, comment les actionnaires pourront-ils, sans aucune
contrainte, mettre en oeuvre cette participation qui se révèle
être une arme contre eux-mêmes ?
Même au cas où ils acceptent, au prix d'un effort
ultime l'entrée des salariés à la direction de
l'entreprise, quelle sera l'influence de ceux-ci dans la mesure où leur
nombre ne peut excéder la limitation légale ?
2 - L'esquisse d'une cogestion
minoritaire
La cogestion74(*) est l'idéal, voire la perfection même de la
participation du salarié à la gestion de l'entreprise car elle
lui permet de siéger à nombre égal avec les actionnaires
et de prendre les décisions collectives avec voix
délibérative.
L'Acte Uniforme de l'OHADA relatif aux sociétés
commerciales a instauré non seulement une participation facultative et
volontaire75(*), mais aussi une participation minoritaire
car le nombre de salariés susceptible de faire partie du conseil
d'administration ne doit pas excéder le tiers (1/3) des membres du
conseil d'administration.
On peut légitimement se demander quelle est la portion
du pouvoir de décision que peuvent exercer les participants ? Et
comment peut-on comprendre cette attitude du législateur ?
Certes, l'influence des administrateurs salariés se
limitera à tempérer la dérive despotique des actionnaires
majoritaires.
En outre, il est loisible de voir dans cette
«règle du tiers» une prise de position du législateur
dans la lutte opposant les technocrates et les capitalistes76(*).
Fondamentalement, il semble que « la règle du
tiers » répond au souci d'assurer le respect de la
hiérarchie. Il s'agit d'éviter que le Président Directeur
Général (PDG) ne soit contrôlé et
révoqué par un conseil d'administration dominé par les
salariés qu'il dirige77(*).
On peut valablement affirmer, sans risque de se tromper, que
dans l'esprit des rédacteurs de l'AUDSCGIE, l'entreprise,
considérée comme une organisation économique et humaine
dont l'objet est la production, la commercialisation des biens et services, n'a
pas droit de cité dans la société anonyme. Dans le cas
contraire, la participation du salarié doit être
concrétisée par l'existence d'instruments juridiques
appropriés, en l'occurrence un organe de
représentation78(*), véritable chien de garde,
destiné à attirer l'attention des dirigeants sociaux sur la
situation économique et financière de la société.
Ceci participe de la volonté constante d'améliorer
l'information79(*) fournie aux partenaires sociaux sur le
fonctionnement de la société.
B - La non reconnaissance d'un droit d'alerte aux
salariés
Le législateur l'OHADA reconnaît le droit
d'alerte aux actionnaires et au commissaire aux comptes. Or, ce
mécanisme «de signes et de clignotants» constitue l'exercice
de prérogatives relevant de la gestion normale de la
société. Dans cette optique, les salariés qui ont un
intérêt supérieur à la survie de l'emploi devraient
l'exercer au titre de leur participation. Or, il n'en est rien.
Que doit-on entendre par droit d'alerte (1) et pourquoi sa
reconnaissance aux salariés s'avère-t-elle nécessaire
(2) ?
1 - La notion de droit d'alerte
Pour avoir une idée sur la notion même du droit
d'alerte, il convient de se reporter aux articles 150 à 158 AUDSCGIE. En
effet, c'est le droit qu'à le titulaire d'attirer l'attention des
dirigeants de la société sur tout fait ou acte de nature à
compromettre la continuité de l'exploitation sociale. On comprend
dès lors que la procédure d'alerte est une innovation dans le
droit des sociétés des pays membres de l' l'OHADA.
Participant de l'amélioration de l'information due aux
différents partenaires de l'entreprise80(*), le droit d'alerte
prend la forme d'un droit économique de l'information dont le but est
d'assurer l'efficacité et la coordination des divers circuits
d'informations existant dans l'entreprise afin de faciliter la détection
des difficultés rencontrées pour celle-ci.
Le droit d'alerte vise ainsi à provoquer une discussion
interne à l'entreprise, dont l'objet sera à la fois de prendre la
mesure la plus exacte possible des difficultés rencontrées ou sur
le point de survenir, de proposer, à la suite de cette discussion, les
solutions les plus appropriées à résoudre les
difficultés81(*).
L'exercice du droit d'alerte implique donc
nécessairement une immixtion dans la gestion de la
société. On peut, dès lors, affirmer qu'en confiant
l'exercice de ce droit au commissaire aux comptes et aux seuls actionnaires, le
législateur de 1998 a entendu écarter les salariés ou
leurs représentants de la gestion de la société.
Dans ce cas, pourquoi devrait-on envisager la reconnaissance
d'une telle prérogative aux salariés ?
2 - La nécessaire reconnaissance du droit
d'alerte
à la représentation du
personnel
La reconnaissance du droit d'alerte à la
représentation du personnel doit participer de la volonté du
législateur d'associer plus étroitement les salariés
à la gestion, voire à la surveillance du fonctionnement des
entreprises. Les organes représentant la collectivité de travail
doivent être associés à la recherche de solutions
permettant d'éviter l'apparition de difficultés susceptibles de
compromettre la continuité de l'activité, un risque majeur contre
l'emploi. Ici, l'intégrité de l'emploi et la protection sociale
militent en faveur d'une attribution de ce droit d'alerte qui est l'instrument
de la participation effective du salarié dans la société
anonyme.
On se demande pourquoi le législateur OHADA n'a pas cru
bon d'intéresser ainsi le salarié à la gestion
transparente de la société.
Pour certains acteurs, c'est pour éviter de mettre
entre les mains des salariés une arme contre le capital organisé,
c'est-à-dire contre la société. L'exclusion des
travailleurs de la procédure d'alerte est fondée sur la peur que
ceux-ci n'en fassent un usage intempestif pouvant nuire au crédit de la
société82(*).
En outre, d'autres l'expliquent par la difficulté que
les représentants du personnel auraient à rencontrer dans
l'appréciation des documents leur permettant de mettre en
évidence un risque pour la continuité de l'activité qu'ils
veulent sauvegarder. Ces critiques paraissent excessives. Certes, à
terme, cette nouvelle prérogative pourra modifier certaines pratiques
relatives à la représentativité réelle du
salarié dans ces organismes83(*). Il n'en demeure pas moins vrai que le droit d'alerte
permettra la transparence du fonctionnement des entreprises et surtout la
prévention des difficultés dans la société.
Sinon à quoi sert-il de reconnaître une place de
choix au salarié dans la procédure de redressement de la
société alors que l'urgence était justement de l'amener
à participer à la prévention des agissements ouvrant la
porte à la crise ?
Paragraphe II - Une information plus ou moins
renforcée
en période de crise
Le législateur ne reconnaît pas aux
salariés une place de choix dans la mise en oeuvre des signes et
clignotants destinés à prévenir et à
détecter les difficultés de l'entreprise.
Si la participation des salariés n'est pas
déterminante dans le règlement préventif (A), elle reprend
force dans les procédures survenant après la cessation des
paiements (B).
A - La Participation des salariés au
règlement préventif
Cette participation peut s'observer aussi bien dans la phase
de demande (1) que dans la phase de déroulement du règlement
préventif (2).
1 - La demande du règlement
préventif
La décision de recourir au règlement
préventif est un acte de gestion qui relève du monopole du
Président du Conseil d'Administration ou du Président Directeur
Général84(*). Il ne peut le demander que quand
l'entreprise éprouve une difficulté juridique, économique,
financière ou des besoins ne pouvant être couverts par un
financement adapté aux possibilités de l'entreprise
85(*).
Dès lors, la question qu'on se pose est de savoir si le
P.D.G est tenu, pour solliciter le règlement préventif,
d'informer ou de consulter les institutions représentatives du
personnel.
Cette question se pose avec acuité d'autant plus que
l'Acte Uniforme est silencieux. Cependant, ce mutisme ne doit pas être
interprété comme une exclusion de la consultation ou de
l'information des représentants du personnel. Ceux-ci tirent cette
prérogative des articles 179 CTT et 86 al.1 Code de Travail de la
Côte d'Ivoire (CTI) qui leur confèrent le droit d'être
consultés sur toute décision de réorganisation de
l'entreprise ayant pour effet d'affecter un tant soit peu les droits acquis des
salariés.
Bien qu'il ne soit pas clairement établi une
consultation ou une information préalable du personnel dans la demande
du règlement, son déroulement peut mettre en oeuvre une
présence active des salariés.
2 - Le déroulement du règlement
préventif
Il faut rappeler que la demande d'un règlement
préventif débouche sur un dépôt d'une proposition
d'un concordat préventif 86(*) qui peut imposer une restructuration
profonde de la société et par voie de conséquence des
licenciements. Afin d'établir un rapport sur la situation de la
société et prévoir des perspectives de redressement,
l'expert désigné par le juge peut obtenir communication du (ou
des) représentant du personnel des renseignements économiques et
financiers sur la société87(*).
Cependant, la question de la participation directe des
salariés de la SA au règlement préventif se pose.
De jure, rien ne s'oppose à ce que les salariés
acceptent individuellement des réductions de salaires ou des diminutions
d'avantages acquis ou de consentir, dans le cadre du concordat
préventif, des délais qui n'excèdent pas un an
88(*).
Mais dans la pratique, la fébrilité et l'inconsistance des
rémunérations rendent cette hypothèse assez rarissime.
Donc, les salariés ne doivent consentir aucune remise ni se voir imposer
un délai qu'ils n'ont pas consenti eux-mêmes.
Par ailleurs, même si le but des procédures
collectives organisées par l'Acte Uniforme est de sauvegarder les
entreprises redressables au prix d'une entorse aux droits des
créanciers, la décision de suspension des poursuites
individuelles ne s'applique pas aux salariés89(*). Ceci ne
réduit pas leur rôle croissant après la cessation des
paiements.
B - Le rôle des salariés dans les
procédures résultant de la
cessation des paiements
En l'espèce, le maintien de l'activité et de
l'emploi constitue une finalité majeure. L'emploi apparaît dans sa
double dimension individuelle et collective comme un véritable
intérêt juridique doté d'une protection
spécifique90(*). Ce faisant, la présence effective
des salariés dans le déroulement du redressement judiciaire n'est
pas étonnant (1) ainsi que leur place de choix dans le
désintéressement des créanciers (2) en cas de liquidation
des biens.
1 - La mission de contrôle et de surveillance du
représentant des salariés
Le législateur de l'Acte Uniforme a entendu faire du
salarié un véritable organe de la procédure collective.
Certes, il ne s'agit pas d'un organe obligatoire dont l'absence
empêcherait le déroulement régulier de la procédure
car sa nomination parmi les trois contrôleurs relève de la
discrétion du juge commissaire91(*).
Au regard du mutisme des textes, on considère que le
représentant des salariés (représentant le personnel) qui
fait obligatoirement partie des contrôleurs sera désigné
dans la représentation du personnel, en l'occurrence, parmi les
délégués du personnel. Il devra donc
bénéficier du régime de protection contre les
licenciements à l'image de celui des délégués du
personnel92(*).
Le représentant des salariés dans la
procédure collective est un contrôleur. A ce titre, il assiste le
juge commissaire dans sa mission de surveillance et de contrôle du
déroulement de la procédure et veille au respect de
l'intérêt des salariés. En outre, il fournit des documents
et informations utiles à la vérification et à
l'établissement des créances salariales.
Cette participation active des salariés à
travers leur représentant se retrouve aussi dans le cadre du
désintéressement des créanciers où ils
bénéficient d'un rang privilégié.
2 - Le superprivilège des
salariés
En l'absence d'un système de garantie de paiement
à l'instar de l'A.G.S93(*) en France, les salariés de l'espace
OHADA bénéficient d'un traitement préférentiel dans
le paiement de leurs créances dans le cadre de l'apurement du passif de
la société liquidée.
Etant une innovation majeure de l'Acte Uniforme, ce
superprivilège est destiné à garantir la fraction
incessible et insaisissable des salaires et à accorder une place de
choix dans l'ordre de préférence qui varie selon la nature du
bien réalisé. C'est un privilège qui n'a pas besoin
d'être publié au Registre du Commerce et du Crédit
Mobilier94(*).
Ainsi donc, dans la distribution de deniers provenant de la
réalisation des immeubles, les salariés viennent au second rang
après les créanciers de frais de justice95(*).
A la lumière de cette présence
prépondérante, le reproche fait au législateur OHADA de ne
pas favoriser la protection des salariés doit être
tempéré. On peut, dès lors, croire que le rôle des
salariés n'apparaît qu'avec les difficultés
économiques, financières et juridiques de leur
société.
On se demande pourquoi le législateur n'a pas permis au
salarié d'intervenir dans la gestion normale en alertant les dirigeants
sociaux sur les actes susceptibles de compromettre la continuité de
l'exploitation, bref d'exercer les prérogatives reconnues aux
actionnaires.
Seulement, même dans le cas où on
l'espérait pour favoriser une participation effective du salarié,
le législateur a esquivé en instaurant un actionnariat
lessivé de sa substance.
SECTION II - Une forme édulcorée
d'actionnariat
« Rendre le prolétaire propriétaire et
l'ouvrier boursicoteur, voilà une vieille lune qui a la vie
dure »96(*). C'est ce que le législateur OHADA
s'emploie à faire dans l'article 640 AUDSCGIE sans y parvenir. Au prix
d'une défiguration de l'économie générale de
l'actionnariat, il prévoit une attribution d'actions dépourvues
de droits aux salariés (Paragraphe I) alors que leur régime
juridique est imprécis (Paragraphe II).
Paragraphe I - L'absence de prérogatives
attachées
à la détention
d'actions
Le propre de l'actionnariat est de permettre au
détenteur des actions ayant effectué des apports ou non de
participer à la vie et aux résultats de la
société.
Cependant, le salarié actionnaire de la SA du droit
O.H.A.D.A, déjà enchaîné dans une
indisponibilité permanente et obligatoire de ses titres, n'a ni droit
aux dividendes (A) ni droit au vote (B).
A - L'exclusion du droit aux dividendes
On entend par dividende la part des bénéfices
réalisés par une société distribuée à
la fin d'un exercice aux associés en application d'une
délibération de l'assemblée générale
annuelle97(*).
Le droit aux dividendes est un droit d'actionnaire qui doit
être bien compris. Il ne signifie pas que chaque année
l'actionnaire a le droit d'exiger qu'une partie des bénéfices lui
soit attribuée, mais simplement qu'il ne peut pas être
indûment privé de son droit sur les bénéfices et sur
les réserves98(*).
Cependant, l'Acte Uniforme exclut expressément du droit
aux dividendes les actions rachetées par la société en vue
de leur attribution aux salariés99(*). Si à un moment donné on a
cru rapprocher ce texte de l'esprit du texte français100(*) qui organise la
distribution gratuite d'actions aux salariés, il s'en démarque
par la privation du droit pécuniaire attaché à la
détention de ces actions.
Dès lors, n'ayant aucune prétention sur les
bénéfices résultant des actions de la
société qu'il détient, le salarié n'a pas davantage
de droit préférentiel de souscription en cas d'augmentation du
capital (donc aucune chance pour améliorer son actionnariat), ni
même une part dans le boni de liquidation en cas d'une éventuelle
dissolution.
Si la détention d'actions ne lui donne droit à
aucun dividende, le salarié pourra-t-il prétendre voter avec ces
mêmes actions ?
B - L'absence d'un droit au vote
En principe le salarié attributaire des actions de la
société devient un actionnaire disposant d'un droit fondamental,
celui de rester associé, c'est-à-dire de faire partie de la
société et surtout, d'exercer le droit de vote.
Seulement, l'article 542 AUDSCGIE lui ravit clairement cette
faculté101(*). Cette exclusion du droit au vote constitue
une distorsion au principe sacro-saint du droit des
sociétés : « A capital égal, vote
égal ». Ce principe signifie que le droit de vote
attaché à toutes les catégories d'actions doit être
proportionnel à la quotité du capital représentée
et que chaque action détenue doit donner droit à une voix au
moins.
Certes, on peut comprendre l'attitude du législateur en
ce que le salarié actionnaire n'est qu'un simple détenteur des
actions qui demeurent toujours la propriété de la
société. Dans ce cas, on peut affirmer que le salarié
possède pour autrui102(*). Devenant ainsi un détenteur
précaire des actions qui lui sont attribuées, le salarié
ne peut ni en user (en exerçant un droit de vote), ni en jouir (en
bénéficiant d'un droit d'information), ni même en disposer
car elles sont indisponibles et non négociables.
Dans cette optique, on est tenté de voir dans cette
attribution d' "actions inutilisables un cadeau d'un capitalisme aux abois
qui doute de lui-même et qui veut «se donner bonne conscience ou
donner bonne conscience aux pouvoirs publics»103(*).
En voulant contenir l'actionnariat salarié dans une
proportion raisonnable, le législateur a contribué à
créer une catégorie hétéroclite et inédite
d'actions entre les mains des salariés.
Paragraphe II : Le particularisme des actions
détenues par les salariés
Si tel est le sort réservé aux actions
détenues par les salariés, on constate alors que l'actionnariat
du droit uniforme altère les principes fondamentaux du droit des
sociétés au regard du salarié devenu actionnaire. Le
salarié apparaît alors comme un actionnaire
hétérogène, enchaîné et placé dans une
situation à part quant à la nature de ses actions (A) et quant
à l'imprécision des modalités d'attribution (B).
A - La nature juridique des actions
Il faut rappeler qu'une action est un titre qui
représente une fraction du capital social et constate le droit de
l'associé, actionnaire de la société104(*).
Il existe plusieurs catégories d'actions
réparties selon la forme, la nature de l'apport qu'elles
représentent ou l'étendue des droits qu'elles
confèrent105(*). Une action peut appartenir à
plusieurs catégories. C'est le cas des actions détenues par les
salariés quant à leur forme nominative. Mais du point de vue des
droits conférés, elles ne se retrouvent pas dans la
catégorie des actions de jouissance 106(*) qui, bien que ne
donnant pas droit au premier dividende, conservent les autres droits notamment
le droit de vote et de négociabilité.
Quelle est alors la nature exacte de ces actions qui ne
procurent ni droit de vote, ni droit aux dividendes et qui enchaînent
leurs titulaires dans une indisponibilité perpétuelle ?
De jure, la SA est une société de capitaux dans
laquelle les actions sont, en principe librement négociables. Cela
signifie que le détenteur de telles actions peut en disposer librement
en les cédant sauf en cas d'existence d'une clause d'agrément ou
de préemption.
Dès lors, on voit que le principe de la libre
négociabilité est mis en difficulté par le
caractère illimité de la forme nominative des actions
détenues par les salariés, donc leur indisponibilité
permanente. Ce sont donc des actions inaliénables. Or, les stipulations
d'inaliénabilité attachées à un bien ne sont
valables que si elles sont temporaires et justifiées par un
intérêt légitime et sérieux107(*). En
l'espèce, l'inaliénabilité légale des actions
détenues par les salariés est, certes, justifiée par
l'intérêt supérieur de la société. Elle
empêche les salariés de monnayer immédiatement leurs
actions en favorisant l'entrée d'intrus dans la
société108(*). En revanche, on ne comprend pas pourquoi
le législateur a cru bon de ne pas fixer un délai à
l'indisponibilité de ces actions.
Par ailleurs, on peut rapprocher les actions du
législateur OHADA des actions de travail qui existent dans les
sociétés anonymes à participation ouvrière
(S.A.P.O) du droit français109(*). Ce sont des actions appartenant à
la propriété collective du personnel salarié,
constitué en société commerciale coopérative de
main-d'oeuvre. Elles sont caractérisées par
l'inaliénabilité et l'incessibilité pendant toute la
durée de la SA à participation ouvrière.
Enfin, on voit que cette prétendue promotion de
l'actionnariat salarié qui découle des articles 639 et suivants
de l' AUDSCGIE constitue un mirage. L'impossibilité d'user, de jouir ou
de disposer de leurs actions ne fait des salariés ni des emprunteurs, ni
des possesseurs (détenteurs précaires proprement dits) ni
même des propriétaires des actions.
Ainsi, n'ayant ni droit réel principal, ni droit
réel démembré 110(*) sur ses actions, le salarié devient
un actionnaire insolite qui risque d'être obligé sans son
consentement du fait de l'imprécision des modalités d'attribution
de «ces actions vidées de leur substance ».
B - L'imprécision des modalités d'attribution
des actions aux salariés
Qui, parmi les salariés, peut détenir les
actions de la société ? Comment organiser l'attribution des
actions entre les salariés si le rachat a été
décidé par l'assemblée générale des
actionnaires ? Ce sont ces interrogations qui découlent de la
participation organisée par l'Acte Uniforme.
En principe, les actions rachetées sont des
«actions de salariés»111(*) ou actions de
personnel. Dans cette optique, toute personne titulaire d'un contrat de travail
effectif doit en bénéficier.
Dès lors, toutes les catégories de
salariés sont concernées : les administrateurs titulaires
d'un contrat de travail au sens des articles 417 et 426 AUDSCGIE, les cadres,
les ingénieurs, les agents de maîtrise, les employés, les
ouvriers. Cette idée, renforcée par l'indisponibilité
attachée aux actions, ne devrait tomber qu'en cas de refus exprès
d'un salarié de ne pas participer à l'actionnariat.
Au cas où tous les salariés consentent, la
répartition des actions rachetées devrait prendre en compte
certains critères objectifs tels que le sérieux,
l'assiduité, la compétence managériale ou encore le
critère d'ancienneté du salarié. Bien sûr, la prise
en compte de ces critères peut aggraver les difficultés
résultant de l'indétermination du législateur.
Le mutisme de l'article 640 AUDSCGIE est susceptible de
laisser la voie ouverte à toutes les combinaisons fondées sur des
critères subjectifs tels que le degré d'allégeance du
salarié au chef d'entreprise. En l'absence d'interdiction expresse, rien
ne s'oppose à ce que les actions rachetées soient
réservées à un petit nombre de personnes, voire
même, comme cela se pratique aux Etats-Unis, à une seule
personne112(*).
Il en résulte que l'imprécision des
modalités d'attribution des actions aux salariés confirme
l'idée selon laquelle la place du salarié dans la
société relève du bon vouloir des détenteurs du
capital qui apparaissent comme les véritables propriétaires.
Sans nul doute, si on reconnaît au législateur OHADA le
mérite de trancher le conflit immémorial entre le capital et le
travail en faveur du capital, il n'en demeure pas moins vrai que le renouveau
du droit des sociétés exige la reconnaissance
d'intérêts catégoriels au sein de la société
à côté de celui des actionnaires.
En définitive, il faut retenir que la participation du
salarié telle qu'organisée par l'Acte Uniforme n'est pas
consistante. D'un côté, il donne l'occasion aux salariés
d'exercer sans grande efficacité une cogestion minoritaire au sein des
organes de gestion de la SA. D'un autre côté, s'il prévoit
résiduellement la participation du salarié par la
détention d'une fraction du capital social, il ne lui reconnaît
pas de droits correspondants.
Pourquoi ne pas alors promouvoir une véritable
participation financière qui permettra aux salariés non seulement
d'accéder aux instances suprêmes de la société sans
restriction, mais de contrôler la gestion de celle-ci afin de partager
ainsi les responsabilités découlant de cette
qualité ?
DEUXIEME PARTIE
POUR LA PROMOTION D'UNE VERITABLE PARTICIPATION
FINANCIERE DES SALARIES DANS LA SOCIETE ANONYME
La participation des travailleurs à l'entreprise qui
était apparue pendant longtemps comme une idée propre aux
entreprises des pays occidentaux, a maintenant acquis droit de cité dans
la législation communautaire des pays de l'espace OHADA. Dans les
sociétés anonymes du droit uniforme, il existe une participation
minoritaire et facultative des salariés. Du facultatif à
l'obligatoire, du minoritaire au paritaire, il reste une foule d'obstacles
à franchir sur la voie de la cogestion pour qu'elle prenne quelque
consistance1(*). On doit alors trouver dans la
participation financière rénovée un tremplin à la
gestion participative des salariés dans la SA. La promotion de ce type
de participation qui consiste à dépasser les clivages
traditionnels entre capital- travail, est souvent qualifiée
d'actionnariat ouvrier 2(*) ou d'actionnariat salarié.
L'actionnariat salarié qui apparaît, dans ces
conditions, comme l'instrument le plus significatif de la participation
financière permet de privilégier des modèles participatifs
optionnels dont la mise en oeuvre implique une concertation des divers
partenaires sociaux de la société anonyme (Chapitre I).
Il en résulte que le salarié qui détient
directement ou indirectement les titres de sa société subit une
profonde mutation dans son statut juridique et social originel. Dans cette
perspective, l'idéal est que le salarié qui le désire,
doit partager les responsabilités et les risques inhérents
à la gestion de la société en tant que co-entrepreneur
(Chapitre II).
CHAPITRE I
LE DEVELOPPEMENT DE L'ACTIONNARIAT
SALARIE COMME INSTRUMENT DE LA PARTICIPATION
L'actionnariat salarié peut être défini
comme le fait pour un salarié d'acquérir une part du capital de
la société qui l'emploie, c'est-à-dire le fait de
participer au capital et au risque de sa société. Cette notion
de participation financière se double d'une notion plus vaste de
participation dans les instances décisionnelles de la
société, ce qui souligne l'aspect le plus intéressant de
cette question. Mais, l'objectif de ce travail n'est pas de faire une
monographie technique de l'actionnariat salarié. Il s'agit de mettre
cette question en perspective dans celle plus vaste de la participation en
adoptant deux approches temporelles distinctes et complémentaires. Il
semble donc important de situer l'actionnariat salarié dans son contexte
afin de montrer que cette conception est inscrite dans l'épaisseur du
temps historique et enracinée dans une certaine philosophie du contrat
social au sein de l'entreprise. Il en résulte qu'une incitation des
divers partenaires sociaux aux opérations d'actionnariat salarié
devra être renforcée par l'aisance de leur mise en oeuvre dans une
logique volontariste.
Il convient donc d'étudier, en premier lieu, les
fondements de l'actionnariat salarié qui se révèle
être une question d'actualité (Section I) avant d'examiner, en
second lieu, les éléments destinés à attraire aussi
bien les salariés que les dirigeants sociaux de l'espace OHADA vers les
opérations d'actionnariat (Section II).
SECTION I - Les fondements d'une question
d'actualité :
l'actionnariat
salarié
La question de l'actionnariat salarié est
déjà ancienne puisque les premières théories et
expérimentations remontent au XIXe
siècle1(*). Cependant il paraît inexistant,
voire inconnu des sociétés de l'espace OHADA.2(*)
A l'origine du recours à cette opération, on
trouve la prise en compte de l'antagonisme entre le capital et le travail et la
déshumanisation des salariés au travail qui constituent la
philosophie primaire de l'actionnariat salarié, d'une part, (Paragraphe
I), les nouveaux enjeux managériaux de la société anonyme
et du nouveau contexte de la globalisation et de l'innovation technologique
d'autre part, (paragraphe II).
PARAGRAPHE I - La philosophie de l'actionnariat
salarié
L'actionnariat salarié est intégré dans
la question plus vaste de la participation des salariés dans
l'entreprise, et en constitue un des aspects, une modalité. Sa source
remonte au XIXe siècle avec l'émergence de la classe
ouvrière. C'est l'irruption de la « question
sociale » marquée par la montée d'une nouvelle figure,
celle du prolétaire, qui va initier la réflexion sur les moyens
de dépasser l'antagonisme capital- travail (A).
Aussi, la connaissance de la réalité de
l'entreprise implique-t-elle que la sauvegarde de l'intérêt social
passe par la reconnaissance et la protection des intérêts
catégoriels qui le composent (B).
A - Le dépassement de l'antagonisme capital -
travail
Dans la division sociale du travail qui se met en place au
XIXe siècle dans l'usine, il apparaît une
polarité, voire un rapport de subordination entre deux catégories
d'individus : les apporteurs de capitaux et les apporteurs de la
main-d'oeuvre salariée. Cet antagonisme va durablement marquer
l'histoire de la pensée économique, et va servir de
référence théorique aux travaux de l'école
classique puis marxiste1(*).
Il en résulte que cet antagonisme secrété
par l'industrialisation a deux conséquences : d'abord, la
conflictualité et l'opposition se sont installées comme mode de
gestion des relations de travail. Ensuite, le travailleur n'est plus qu'un
rouage dans une mécanique qui le déshumanise et le ravale au rang
d'instrument de production, un pur facteur de production.
Dans ces conditions, quel sera l'apport de la
participation ? La participation est une notion qui cherche à
dépasser l'opposition stérile née de la sujétion
des travailleurs aux propriétaires de capitaux. Son but est de retourner
la perspective et de remplacer cette relation conflictuelle par un rapport de
solidarité dans lequel, de la main d'oeuvre salariée, les
salariés doivent devenir des associés ou des partenaires dans
l'entreprise. Cela exige une véritable « révolution
copernicienne » qui dépasse la perspective traditionnelle.
Or, l'actionnariat salarié, c'est-à-dire la
participation directe du salarié au capital de son entreprise
apparaît comme l'une des modalités de la participation en rupture
avec le modèle de relations sociales existant au début de
l'ère industrielle. L'idée générale et innovante
des diverses théories de la participation qui vont naître autour
de la notion centrale de participation est celle du partage des risques, donc
des responsabilités.
« Cette idée a des résonances
particulièrement profondes aujourd'hui, alors que la théorie
économique est dominée par la théorie du
risque »113(*)
Le postulat fondamental est que si le salarié partage
les risques supportés par l'entreprise, risques qui proviennent de
l'incertitude dans laquelle sont placés les dirigeants et les
gestionnaires de l'entreprise par rapport à son environnement, alors la
contrepartie de cette acceptation se trouve dans l'association du
salarié aux décisions relatives à la gestion de son
entreprise2(*). Ce principe constitue le fondement
même de la participation qui est basée sur la notion du
« donnant-donnant » : le salarié accepte
d'assumer une partie du risque de l'entreprise, et en compensation il acquiert
un statut d'actionnaire.
Ainsi donc, la problématique de la participation se
présente comme une manière alternative de concevoir les
relations de travail au sein de l'entreprise, qui vise à
dépasser les contradictions du régime capitaliste et à
associer le salarié à la bonne marche de l'entreprise, en lui
confiant des responsabilités et en liant profondément son
intérêt à celui de l'entreprise en vue d'une protection
efficace.
B - La reconnaissance du rôle
prépondérant du capital humain
par l'intérêt social
En dehors du fondement historique, l'actionnariat
salarié est une manifestation de l'intérêt social. Mais
cette notion doit être précisée.
La notion d'intérêt social ne fait
l'unanimité que sur un point : « trop fluide pour
être codifiée »3(*), elle est essentiellement relative et donc
très difficile à définir4(*). Pour le reste, les
conceptions sont divergentes.
Les uns considèrent que la société,
contrat de partage, « est constituée dans
l'intérêt des associés, qui ont seuls vocation à
partager entre eux le bénéfice social ».
Cette conception se rattachant à la conception
contractuelle de la société, faire une place à
l'actionnariat salarié, serait une aberration, un crime de
lèse-majesté contre le pouvoir absolu des détenteurs du
capital.
En revanche, les autres estiment que l'intérêt
social dépasse celui des associés pour être celui de
l'entreprise, voire même des tiers qui contractent avec elle. Se basant
sur la théorie institutionnelle de la société, ils
définissent l'intérêt social comme l'intérêt
supérieur de la personne morale elle-même, c'est-à-dire
l'entreprise considérée comme un agent économique
autonome, poursuivant des fins propres, distincts notamment de celles des
actionnaires, de ses salariés et de ses créanciers
1(*).
L'intérêt social doit donc s'entendre aussi
bien de l'intérêt des shareholders2(*),
c'est-à-dire les propriétaires de la firme, que de celui des
stakeholders3(*) composés de salariés, de
managers (dirigeants) et des autres créanciers : telle est
la manifestation de la physionomie du gouvernement d'entreprise qui est au
coeur de la gestion moderne des SA dans la nouvelle donne économique et
juridique. La prise en compte de l'ensemble des partenaires de l'entreprise
déplace le champ de réflexion traditionnel : la performance
ne doit plus s'apprécier au regard des seuls intérêts des
actionnaires mais au regard de l'ensemble des stakeholders, ce qui
impose de bâtir de « nouveaux indicateurs de la performance
globale»4(*). Ainsi, l'objectif de la firme ne serait
plus de maximiser la valeur actionnariale, mais plutôt la valeur totale
ou globale de la firme.
Par ailleurs, l'actionnariat salarié participe de
l'idée d'une démocratie participative destinée à
assurer la pérennité et le fonctionnement normal de la SA par les
« citoyens » que sont ses salariés. En effet, cette
tendance est une réaction contre la conception féodale de
l'entreprise caractérisée par le pouvoir absolu des
détenteurs du capital organique simplement éclairés par
l'avis des institutions représentatives du personnel5(*).
Dans une perspective démocratique, la
réorganisation du capital organique nécessite l'accession des
salariés à l'exercice du pouvoir de décision par la
détention d'une partie du capital matérialisant le droit de
propriété sur les biens de l'entreprise. L'actionnariat
salarié constitue une forme de démocratie participative dans
l'entreprise ainsi qu'un moyen pour les employeurs d'absorber la contestation
sociale.
Ainsi donc, l'actionnariat salarié apparaît dans
la nouvelle donne de l'économie globalisée comme un enjeu pour le
développement des entreprises.
Paragraphe II - L'actionnariat salarié
comme solution
aux réalités
économiques
contemporaines des
sociétés anonymes
Si l'actionnariat salarié est le signe le plus
évident d'un changement profond du mode de régulation de
l'environnement économique, il s'inscrit en même temps dans un
faisceau de motivations pour les entreprises au regard de la
productivité (A) et au regard de la stabilité de leur capital
social par rapport aux «prédateurs» des marchés
financiers (B).
A - L'impact de l'actionnariat salarié sur la
productivité
Un grand nombre d'études tant empiriques que
théoriques montrent qu'il existe un impact réel de l'actionnariat
salarié sur la productivité1(*). En liant une
partie de sa rémunération au résultat de son travail,
l'employeur accroît la motivation du salarié.
D'un point de vue général, il existe un effet
propre des systèmes complémentaires de rémunération
sur la productivité des salariés. Cette pratique est ancienne,
puisque dès les débuts du capitalisme industriel, le salaire aux
pièces s'est imposé comme un des meilleurs moyens de motiver et
d'impliquer le salarié dans son travail. Une des solutions retenues a
consisté à lier tout ou partie du salaire du travailleur au
résultat de son travail, c'est-à-dire aux résultats de
l'entreprise. Cette pratique du salaire incitatif s'est incarnée
historiquement dans différents systèmes de
rémunération recueillis dans la plupart des législations
sociales des pays de l'espace OHADA.
Si l'on se place plus spécifiquement dans le cadre de
l'actionnariat salarié, les mécanismes incitatifs sont plus
complexes. En effet, une partie de la motivation et de la productivité
proviennent là encore du fait qu'une partie de la
rémunération du salarié provient des résultats de
son entreprise. Seulement, cette liaison est désormais indirecte puisque
dans le cas de l'actionnariat salarié, la rémunération
complémentaire dépend des résultats financiers
réels de la société.
Mais ce n'est pas le seul canal de la motivation. L'autre
déterminant essentiel de la productivité peut être
rapporté au changement du statut du salarié. L'objectif de
l'actionnariat salarié est pour une large part d'augmenter la
productivité du salarié à travers un sentiment de
propriété qui renforce la motivation individuelle, d'autant plus
qu'il est associé à une participation effective dans les
instances de gestion ou de direction de la société, notamment au
Conseil d'Administration ou à l'Assemblée Générale.
La motivation provient donc de l'association du salarié à son
entreprise et de son sentiment d'appartenance, voire de son identification aux
objectifs de l'entreprise.
Par ailleurs, il faut préciser que pour les
entreprises, l'actionnariat salarié est un outil de gestion de la paix
sociale. Elles ont beau affirmé que la détention d'actions n'a
aucune incidence sur la politique salariale, celle-ci s'impose de plus en plus
comme un outil de rémunération
différée1(*) et flexible, moins coûteux qu'une
augmentation de salaire.
On conclut que l'actionnariat salarié rapproche les
intérêts des actionnaires et de ceux des salariés. En
contribuant à ce dépassement de l'antagonisme capital-travail, il
augmente la productivité ainsi que la protection de la stabilité
du capital des sociétés contre les velléités et les
aléas du marché financier.
B - L'impact de l'actionnariat salarié sur la
stabilité
du capital des sociétés
De nos jours, le financement des sociétés n'est
plus national et basé sur le système bancaire, mais
mondialisé et basé sur le recours aux marchés financiers
et aux investisseurs institutionnels. L'actionnariat salarié doit
contribuer à limiter les conséquences d'une financiarisation et
d'une internationalisation excessive des sociétés de l'espace
OHADA. Quelle fonction doit-on alors reconnaître à l'actionnariat
salarié ?
L'un des premiers objectifs de la mise en place d'un
actionnariat salarié est la constitution de fonds propres et la mise en
place d'une structure d'actionnariat stable et durable dans l'entreprise :
c'est la constitution de patrimoine en entreprise initiée en droit
allemand par la loi de 1961 relative à la formation du patrimoine des
salariés en entreprise2(*).
Au moment où l'entrée massive d'investisseurs
étrangers rend le capital des sociétés anonymes de
l'espace OHADA plus volatile, l'actionnariat salarié peut permettre de
lui donner une grande stabilité, ce qui a pour conséquence de
redonner une marge d'indépendance aux entreprises face à la
pression des fonds étrangers. Dans ce cadre, des garanties fiscales ou
sociales et financières doivent être mises en place pour
stabiliser 1(*) la part du capital détenue par les
salariés.
De plus, le levier de l'actionnariat salarié peut
être utilisé comme garantie face aux menaces d'Offres Publiques
d'Achat (O.P.A) ou aux Offres Publiques d'Echange (O.P.E)2(*) à
caractère inamical, qui se multiplient dans le cadre du mouvement de
mondialisation des firmes et des stratégies. Si ce
phénomène paraît inexistant, pour ne pas dire inconnu des
sociétés cotées à la Bourse Régionale des
Valeurs Mobilières d'Abidjan, il est par contre courant en droit
comparé.
L'actionnariat salarié peut aussi protéger la
société des appétits extérieurs. En cas d'O.P.A ou
d'O.P.E inamicale, on doit compter sur ses salariés. L'exemple
3(*) de
l'échec de l'O.P.E de la Banque Nationale de Paris (BNP) sur la
Société Générale confirme l'importance que peuvent
revêtir les salariés actionnaires dans un tel contexte :
premiers actionnaires de leur entreprise avec près de 8 % de son capital
social, les salariés de la Société Générale
se sont massivement opposés à l'offre de la BNP et ont eu gain de
cause.
Cela tend à prouver que les salariés
actionnaires peuvent jouer un rôle central dans l'indépendance de
leur entreprise face à des stratégies prédatrices. Cette
fonction de l'actionnariat salarié est beaucoup plus apparente dans
d'autres pays où cette forme de détention du capital est
elle-même plus répandue. Ainsi, aux Etats-Unis ou en Grande
Bretagne, ou dans une moindre mesure en Allemagne, les salariés
pèsent beaucoup plus sur le devenir de leurs entreprises et peuvent
notamment réagir à toute offre de rachat.
Ces expériences heureuses d'actionnariat salarié
prises sous d'autres cieux sont destinées à inciter les
dirigeants des sociétés anonymes du droit OHADA à
recourir à cette opération qui constitue une source importante
d'autofinancement des entreprises.
SECTION II - L'incitation à une plus grande
attractivité
des opérations
d'actionnariat
Si l'actionnariat salarié est plus
développé dans les pays européens et outre - atlantiques,
on remarque que son absence dans les entreprises de l'espace OHADA s'explique
par l'inexistence d'un cadre légal général. Des mesures
législatives ou réglementaires capables d'insuffler une nouvelle
ère dans l'entreprise s'avèrent nécessaires. Seulement,
ces mesures doivent reposer sur une idée centrale, celle de
l'incitation, car ce n'est pas en instaurant de nouvelles obligations par la
loi que l'actionnariat salarié se développera et il est
nécessaire que l'actionnariat reste une démarche purement
volontaire et définie par voie contractuelle (Paragraphe I).
Parmi la multitude de modèles participatifs optionnels
les plus usités en droit comparé, quel dispositif paraît
plus adapté aux SA de l'Acte Uniforme relatif aux Sociétés
Commerciales ? Comment peut-on procéder à leur mise en
oeuvre dans un environnement juridique dont le contexte ne favorise pas leur
promotion (Paragraphe II) ?
Paragraphe I - Les modèles participatifs
optionnels les plus usités
Les systèmes participatifs des salariés
apparaissent assez mal développés dans le droit uniforme car,
dans sa logique de créer un cadre propice et attractif pour les
investisseurs114(*), le législateur OHADA est parvenu
à instaurer des formes dont la mise en oeuvre apparaît
stérile.La participation des salariés recouvre aussi bien la
participation à la gestion de la société que la
participation financière. Or, cette dernière désigne la
participation aux bénéfices et la participation au capital de la
société. Si la première relève du système
d'intéressement facultatif (A), la participation au capital qui permet
à une société d'attribuer aux salariés le droit
d'acquérir ses propres actions à des conditions avantageuses
concerne essentiellement le système des plans d'option imparfaitement
organisé par l'article 640 AUDSCGIE (B).
A - L'intéressement
facultatifA la différence de la participation aux
résultats proprement dite115(*), l'intéressement est un système
optionnel qui permet à toute entreprise qui le souhaite d'associer ses
salariés à ses résultats ou à l'accroissement de sa
productivité. Le but est double. Sur le plan social, cette formule vise
à améliorer la rémunération des travailleurs tout
en développant « une politique de négociation
contractuelle à l'intérieur de l'entreprise ». Sur le
plan économique, il tend à orienter l'épargne vers les
placements à long terme et à accroître la capacité
d'investissement des sociétés.Non seulement
l'intéressement est un moyen efficace de motiver les salariés en
fonction des performances de l'entreprise, il peut offrir, en outre, un moyen
de défiscalisation puisque l'entreprise et le salarié
bénéficient d'une déduction au titre des charges fiscales
et sociales de l'exercice116(*) .
Chaque année, une fraction des bénéfices
est versée aux salariés sous la forme de primes
d'intéressement. Pour le calcul du montant de la prime, l'entreprise
peut retenir la formule de son choix du moment que les éléments
de calcul ont un caractère objectif et que le montant de la prime
conserve un caractère aléatoire. Ceci permet de maintenir le
caractère collectif de l'intéressement et de dissuader les
entreprises de transgresser le principe de non substitution de
l'intéressement au salaire. Aussi, la répartition des primes
d'intéressement entre les salariés peut être uniforme ou
proportionnelle au salaire ou à la durée de présence
dans l'entreprise au cours de l'exercice. Ces différents critères
peuvent aussi être combinés.En principe, le critère
fondamental doit être celui de l'accroissement de la production. Mais il
est courant de voir certaines entreprises en droit comparé, verser
à leurs salariés des primes d'intéressement alors
même que les résultats sont déficitaires117(*).
Dans cette optique, on peut rapprocher la prime
d'intéressement de la prime de rendement ou de productivité
instaurée par certaines sociétés de l'espace
OHADA118(*). Seulement, celle-ci est une prime de
rendement individuel dénoncée par certains auteurs comme tendant
à rompre la solidarité entre les travailleurs tout en les usant
par excès de cupidité119(*). La prime d'intéressement, à
la différence de la prime susmentionnée, sera versée en
fonction de l'appréciation globale de l'effort collectif tendant
à l'amélioration des résultats de la
société.
Par ailleurs, en dehors du versement en espèces, la
société peut décider, au titre de l'intéressement,
de distribuer gratuitement les actions aux salariés. Dans ce cas,
l'intéressement peut se muer en un autre modèle participatif, la
participation au capital.
B - La participation
au capital de la sociétéLa détention d'une
fraction du capital de la société constitue un véritable
procédé optionnel de la participation du salarié car c'est
une démarche de confiance. Cette démarche est individuelle (le
salarié engage son épargne personnelle), volontaire (cette
décision est prise en toute liberté) et responsable (l'achat
d'actions se fait en toute connaissance des risques malgré les avantages
consentis).
La participation au capital peut suivre deux
modalités : les options sur actions et l'augmentation du capital
spécialement réservée aux salariés.
En premier lieu, le système des options de souscription
ou d'achat d'actions s'inspire de la formule américaine à grand
succès des stocks option plans120(*). Ce dispositif
permet à une SA de faire bénéficier à tout ou
partie de ses salariés, généralement les mandataires
sociaux et les cadres principaux, de la possibilité de souscrire ou
d'acheter ses propres actions dans des conditions financièrement
favorables et de les céder au moment où une plus-value
boursière est possible121(*).
Le mécanisme des stock option plans se
résume en trois phases :
Dans un premier temps, l'Assemblée
Générale des actionnaires autorise le Conseil d'Administration
à consentir des options de souscription ou d'achat d'actions à un
prix inférieur à la valeur constatée en Bourse pour les
sociétés cotées et par une évaluation
contrôlée pour les sociétés non cotées.
Dans un second temps, le salarié
bénéficiaire de l'option peut procéder à sa
levée, c'est-à-dire acquérir les actions, qu'il
détient alors en pleine propriété.
Dans un troisième temps, le salarié peut
céder ses actions, sous réserve que le plan d'option ne
prévoit pas un délai minimum entre la levée et la cession,
appelé délai de portage et réaliser une plus-value
importante si la valeur de l'action a progressé. Il ne peut subir de
perte que si le cours de l'action vient à chuter durablement en dessous
de la valeur d'acquisition, le privant ainsi du choix de céder ses
actions à un moment financièrement favorable.
On voit ainsi que le mécanisme des options d'achat
d'actions déroge au principe général d'interdiction pour
la société d'acheter ses propres actions122(*). Dans cette
optique, il est souhaitable que le législateur OHADA améliore ce
mécanisme en réorganisant l'article 640 AUDSCGIE en abolissant ou
mieux, en limitant la durée et la condition d'indisponibilité
perpétuelle des actions.
En dernier lieu, la société peut décider
d'augmenter son capital par émission d'actions nouvelles exclusivement
réservées aux salariés123(*). Elle le fera alors dans les conditions normales
d'une augmentation c'est-à-dire par incorporation des réserves ou
par apport en nature124(*). Dans ce cas, la décision de la
société de recourir à ce procédé emporte
pour les anciens actionnaires renonciation à leur droit
préférentiel de souscription 125(*) que leur
reconnaît l'article 573 AUDSCGIE. Par un tel procédé, les
actionnaires qui acceptent une dilution du capital manifestent un sentiment de
confiance à l'égard des salariés126(*).
En somme, que ce soit l'intéressement aux
résultats ou la participation au capital, la réalisation de l'une
quelconque de ces modalités de participation n'est pas toujours
aisée et il faut un certain nombre de conditions pour leur mise en
oeuvre.
Paragraphe II - La mise en oeuvre des
modèles participatifs
L'idée principale est de rechercher les
éléments permettant d'adapter les modèles
précédemment énumérés dans la SA du droit
OHADA. La réussite d'un quelconque régime de participation, dans
un environnement dépourvu de structures juridiques appropriées,
ne peut être que purement volontaire (A).
Dans ce cas, pour limiter l'influence exercée par la
faiblesse et la précarité des salaires et dans le but
d'étendre la participation financière à tous les
salariés, il est indispensable que la direction de l'entreprise
après concertation avec les Délégués du personnel,
crée un Fonds salarial collectif dont le but est de capter
l'épargne salariale, véritable moteur de l'actionnariat
salarié (B).
A - L'adhésion volontaire à un régime
de participation
La participation met en évidence le rôle
très prépondérant du consensualisme c'est-à-dire la
rencontre des volontés de l'entrepreneur ou des actionnaires d'une part,
et des salariés d'autre part.
D'un côté, la volonté des actionnaires se
manifeste par une décision expresse ou par l'insertion d'une clause
statutaire. Dans le premier cas, l'illustration concrète apparaît
dans les
options sur actions. Ici, c'est l'assemblée
générale, organe suprême de la société qui
autorise le Conseil d'Administration à consentir des options aux
salariés. Dans le deuxième cas, les statuts peuvent
prévoir l'intéressement des salariés aux fruits de
l'exploitation de la société. On voit ainsi que cette
démarche volontaire des actionnaires paraît plus douloureuse car
elle s'ensuit d'un « grignotage progressif » de leurs
droits.
D'un autre côté, la volonté des
salariés n'est pas négligeable car la participation conduit
à partager les risques et les responsabilités, question centrale
du droit social1(*). Ainsi, la réalisation de la
participation peut être obtenue aussi bien au moyen d'accords
individuels que d'accords collectifs.
L'accord individuel est celui conclu par l'entreprise et un
salarié et qui permet à ce dernier de participer aux
bénéfices (par le biais de l'intéressement) ou au capital.
Ce moyen, volontaire et individuel, nécessite une réflexion
approfondie du salarié avant de s'engager. Ainsi, l'accord de
participation peut être une convention proprement dite, donc autonome et
annexée au contrat de travail. Il peut aussi n'être qu'une clause
du contrat de travail. En tout état de cause, cet accord doit être
non équivoque, écrit et librement
accepté127(*) par le salarié dans la mesure
où il peut modifier substantiellement le contrat de travail initial.
En outre, l'adhésion volontaire à un
régime participatif peut s'effectuer par l'adhésion à une
Convention Collective. Celle-ci est un accord conclu entre les
représentants d'un ou plusieurs syndicats de salariés et un ou
plusieurs syndicats de patrons pris individuellement et ayant pour objet de
déterminer ou de préciser les conditions auxquelles seront
conclus les contrats individuels de travail (article 64 alinéa 1 CTT,
article 71-1 CTI).
En effet, l'incitation du salarié par le canal des
conventions collectives doit être privilégiée car elle
contribue à «la libération des forces nationales de
négociation collective» ce qui paraît une
nécessité pour « faire contrepoids au lourd mouvement
de la mondialisation ou de
la régionalisation économique»128(*). Cette libération
passe par l'obligation pour les partenaires sociaux de négocier
librement de nouveaux accords collectifs (notamment d'entreprise ou
d'établissement) ou d'élargir le contenu des Conventions
Collectives Nationales Interprofessionnelles existant dans les pays de l'espace
OHADA.
Dans tous les cas, les accords individuels ou collectifs
doivent régler les modalités et les conditions
d'applicabilité des modèles participatifs
précédemment suggérés. Ainsi, ces accords peuvent
déterminer les modalités de calcul et celles de
répartition des primes d'intéressement. Celles-ci peuvent
être versées immédiatement ou bloquées sur un compte
spécial. Les accords peuvent aussi prévoir que les actions
attribuées aux salariés devront être frappées d'une
indisponibilité temporaire afin d'éviter la tentation trop grande
de la spéculation.
Aux termes de ce tour d'horizon des modèles
participatifs les plus usuels, on constate malheureusement que malgré la
relative facilitée de leur mise en oeuvre, le recours volontaire des
sociétés du droit uniforme est limité. Ceci peut
s'expliquer par des contraintes financières et le cadre réduit
des bénéficiaires qui hésitent à s'aventurer dans
les sables mouvants de la participation.
Dans ce contexte, il s'avère nécessaire
d'étendre les opérations d'actionnariat à tous les
salariés en créant des structures d'accueil de l'épargne
salariale, mises en place à l'initiative des syndicats (d'employeurs
et de salariés) et qui permettent aux salariés de se constituer
un portefeuille de valeurs mobilières.
B - La nécessité de créer un Fonds
salarial collectif au sein de l'entreprise
L'idée directrice, ici, est que pour encourager les
salariés à recourir spontanément et massivement aux
opérations d'actionnariat salarié, il faut mettre sur pied un
dispositif qui va constituer un réceptacle de l'épargne salariale
dans la société.
Ce dispositif, qui peut prendre diverses dénominations
et qu'il convient de nommer Fonds salarial collectif129(*) pour les besoins de
cette étude, est destiné à recueillir des sommes provenant
de différentes origines : un pourcentage des
rémunérations volontairement versées par les
salariés, des sommes perçues au titre de l'un quelconque des
modèles précédemment évoqués (participation
au capital ou intéressement) ou enfin des versements
complémentaires que l'entreprise pourra effectuer130(*).
L'originalité d'un tel organisme dont la mise sur pied
relève du pouvoir de direction et d'administration du chef d'entreprise
réside à deux niveaux.
D'un côté, créé par l'entreprise et
géré collectivement par les salariés et la direction, le
Fonds salarial collectif permettra à la société de bloquer
toutes les sommes versées sur un compte spécial et de les rendre
indisponibles pour une période donnée.
D'un autre côté, lesdites sommes peuvent servir
aux salariés non seulement à acquérir les titres
émis par la société où ils travaillent, mais aussi
les actions d'autres sociétés131(*). Ainsi donc, les sommes investies peuvent être
disponibles à l'expiration de la période d'indisponibilité
convenue ou en cas de survenance d'un événement comme la
retraite, le licenciement ou le décès du salarié.
Il en résulte que l'institution d'un Fonds salarial
collectif a pour finalité d'étendre l'actionnariat à tous
les salariés sans distinction de catégorie mais qui ont une
ancienneté suffisante dans l'entreprise132(*). Il peut aussi constituer un
vecteur complémentaire d'une épargne retraite pour les
salariés. Cette perspective devrait de plus en plus être investie
aux
plans économique et politique pour pallier les
insuffisances des mécanismes actuels de retraite en vigueur dans les
pays de l'espace OHADA et faire ainsi un pas notable vers la
régionalisation du droit de la sécurité sociale
souhaité par certains auteurs133(*).
On constate donc que la participation du salarié
bouleverse à terme le droit du travail, car la diffusion de
l'actionnariat salarié à une fraction plus large des
salariés les rapproche sans les confondre des actionnaires.
CHAPITRE II
LES INCIDENCES DE LA PARTICIPATION SUR LE STATUT DU
SALARIE DANS LA SOCIETE
Les incidences s'entendent des conséquences
engendrées par la participation financière du salarié sur
son statut juridique au sein de la société.
Dans la société anonyme, la détention du
capital organique confère au détenteur le droit de
propriété sur les biens de l'entreprise et se manifeste par sa
participation à l'exercice du pouvoir134(*). Ainsi donc,
l'accession des salariés détenteurs d'une fraction du capital
social au pouvoir de décision se traduit par leur implication
étroite dans la détermination de la politique sociétaire
et sociale (Section I).
Dès lors, revêtu du manteau d'actionnaire, le
salarié peut-il échapper au chapelet de risques inhérents
à ce statut ou ignorer l'inéluctable métamorphose que
subira son statut originel (Section II) ?
SECTION I - Une participation effective du
salarié
à la vie de la
société anonyme
La participation du salarié renferme une vertu
unificatrice du projet social car elle contribue non seulement à mieux
associer les salariés aux décisions collectives (Paragraphe I)
mais aussi à assurer une meilleure cohésion dans la
société (Paragraphe II).
Paragraphe I - Une meilleure association du
salarié aux décisions
collectives
Une chose est certaine : que ce soit au XIXe
siècle pour dépasser l'antagonisme entre le capital et le travail
sur fond de naissance du mouvement syndical, ou comme au XXIe
siècle pour fonder un nouveau régime de croissance dans un
contexte de mondialisation de
l'économie, la participation a toujours sous-entendu un
changement de statut juridique et social (A) et une plus grande implication
des salariés dans la gestion de la société
anonyme (B).
A - Le nouveau statut du salarié dans la
société
L'actionnariat salarié désormais devenu un
moteur de la participation du salarié dans l'espace OHADA sera
inséparable de la définition d'un nouveau statut dans
l'entreprise. L'engagement des salariés pour une participation au
capital de leur société leur permet d'être mieux
associés à la politique de celle-ci. Par le nouveau statut qu'il
acquiert, le salarié passe du rang de subordonné à celui
de partenaire. La logique voudrait, selon R. BOYER, qu'il obtienne une part
croissante du pouvoir135(*). Cette démarche de reconnaissance
est perçue à travers le droit d'expression et surtout le droit
à l'information. L'information est un aspect majeur de la participation.
Elle est plus approfondie, complète et mieux accessible à travers
un service d'information des actionnaires en général et des
salariés actionnaires en particulier136(*). A ces informations
générales, on peut valablement ajouter celles plus
spécifiques pouvant provenir des gestionnaires de portefeuilles de
valeurs mobilières notamment des banques, des sociétés de
portage et intermédiaires de la Bourse.
Ainsi, l'essor de la participation doit se traduire par des
textes innovants tendant à garantir le droit des salariés
actionnaires et à exercer leurs prérogatives au sein des
instances représentatives de la société.
En somme, au-delà de ce droit d'information qui lui
confère un statut identique à celui de l'actionnaire originaire,
le salarié actionnaire bénéficie également de
prérogatives étendues dans la gestion de la
société.
B - L'implication des salariés à la gestion
de la société
Dans la société anonyme, le salarié
actionnaire peut exercer ses prérogatives par le biais de deux
mécanismes importants : le droit de vote aux assemblées
générales et la représentation au conseil
d'administration.
De prime abord, il convient de faire une précision
liminaire. En effet, le fonctionnement des sociétés anonymes est
basé sur le principe que le pouvoir de décision appartient
à l'actionnaire qui a le plus grand nombre d'actions, donc à
l'actionnaire majoritaire. Or, le salarié actionnaire est un actionnaire
nécessairement minoritaire (puisque le nombre d'actions qu'il est
appelé à détenir ne doit pas excéder 10% du capital
social).
La notion d'actionnaire minoritaire n'est pas figée,
elle varie en fonction de l'importance de la participation des salariés,
du nombre d'associés et de la nature des décisions à
prendre. D'un côté, il faut rappeler que la participation dans le
droit OHADA repose sur la seule volonté des anciens
actionnaires137(*). Dès lors, l'influence du
salarié sur le processus et le contenu des décisions est
relativement déterminante. Dans cette optique, comment une telle
participation peut-elle influer sur l'évolution de la
société ?
En effet, celle-ci ne peut être pleinement efficace si
elle est conçue d'un point de vue collectif car
« l'actionnariat salarié ne peut représenter une force
dans l'entreprise que s'il est organisé »138(*).
L'efficacité de l'action des salariés
actionnaires réside dans leur capacité à oeuvrer de
concert139(*) afin de désigner des mandataires
dont le rôle est de les représenter dans les A.G. des actionnaires
et de leur fournir une quantité suffisante d'informations. Cette
fonction est déterminante de la participation effective car elle permet
l'émergence d'un actionnariat susceptible de peser sur les
décisions stratégiques qui engagent l'avenir de l'emploi et de
l'entreprise. D'un autre côté et concernant la participation aux
Assemblées Générales, les salariés actionnaires
peuvent convoquer et participer aux A.G.O des actionnaires s'ils disposent
d'un maximum de dix (10) actions de la société (article 548
AUDSCGIE). Par contre la présence à l'A.G.E ne nécessite
pas un nombre minimum d'actions (article 552 du même Acte Uniforme).
En ce qui concerne les règles relatives à la
prise de décisions, ils peuvent constituer une minorité de
blocage lors des décisions qui nécessitent
l'unanimité140(*). C'est le cas dans les décisions
entraînant le changement de nationalité ou l'augmentation des
engagements des actionnaires (transformation d'une S.A. en une
Société en Nom Collectif (S.N.C.) par exemple).
Dans un second temps, la présence des administrateurs
salariés actionnaires141(*) au Conseil d'Administration peut prendre
deux aspects. Il peut arriver q'une disposition expresse des statuts impose
une représentation obligatoire de cette catégorie d'actionnaires
au CA142(*). Dans ce cas, les administrateurs
salariés, préalablement désignés parmi les
salariés actionnaires, ne feront que l'objet d'une confirmation par
l'Assemblée Générale. En revanche, en l'absence d'une
disposition statutaire expresse, la représentation des salariés
au CA dépendra de l'importance de leur part dans le capital social.
Dans tous les cas, le salarié se retrouve au centre des
décisions intéressant la gestion de sa société.
Ceci contribue à absorber considérablement les germes de la
contestation sociale, renforçant du coup, la cohésion au sein de
la société.
Paragraphe II - Une meilleure cohésion dans
la société
Il n'est pas rare de trouver dans la participation salariale
un pôle de stabilisation des relations dans l'entreprise. L'actionnariat
salarié est un moyen qui doit être utilisé par les
dirigeants pour promouvoir la cohésion et une plus grande
coopération entre les différents groupes de la
firme (A).
Dans cette logique, on peut affirmer que le
développement de la participation est très déterminant
dans la mise en place d'un nouveau dialogue social au sein de l'entreprise dont
le salarié actionnaire représente la figure cardinale (B).
A - La cohésion au sein du groupe des
actionnaires
La mise en place d'un actionnariat salarié a pour
conséquence d'atténuer les conflits d'intérêts et
les oppositions entre les différentes catégories d'acteurs au
sein de la société. On retrouve par là la philosophie de
l'association et de la participation des salariés dans la vie de leur
entreprise.
Par ailleurs, le principe électif commande que dans la
société anonyme la majorité décide que la
minorité s'incline143(*). Dans cette logique, les salariés
actionnaires vont désormais jouer le rôle déterminant
d'arbitre dans le perpétuel conflit d'intérêts qui oppose
les actionnaires majoritaires aux actionnaires minoritaires. Tout comme un
mouvement de balancier, leur positionnement peut aussi bien aggraver les abus
résultant du « diktat » de la majorité que du
blocage de la minorité.
Parfois, ce positionnement peut paraître très
ambigü lorsque leur intérêt est en jeu144(*). C'est le cas
lorsque les actionnaires décident de commun accord une compression du
personnel pour rentabiliser le capital. Dès lors, on assiste à
une unification de l'entité juridique que représentent les
salariés dans leur ensemble. Ceci fait de la participation un instrument
privilégié de régulation et de promotion du dialogue
social interne à l'entreprise.
B - Le nouveau déterminant du dialogue
social
L'actionnariat salarié inscrit dans une dynamique plus
vaste de la participation représente un levier considérable pour
la mise en place d'un nouvel équilibre des pouvoirs au sein de
l'entreprise. Pour ce faire, il ne doit pas être considéré
comme une fin en soi mais comme un prélude à un nouveau dialogue
social qui changerait pleinement le statut de tous les salariés et pas
uniquement celui des salariés actionnaires.
En effet, si l'entreprise constitue un lieu potentiel de
régulation et de démocratie, un nouveau pourvoyeur du sens
social et de la citoyenneté, c'est l'ensemble des salariés qui
doit être impliqué dans ce processus.
Dans cette optique, il s'agit de dépasser la
perspective de l'actionnariat salarié et d'étendre les
prérogatives 145(*) des institutions représentatives du
personnel.
Si l'actionnariat constitue un bon moyen d'impliquer les
salariés dans leur entreprise, la « prise de
parole » des salariés au sein des instances consultatives et
des conseils stratégiques146(*) serait un moyen encore plus puissant de
participation aux risques de l'entreprise.
SECTION II - La participation des salariés
aux risques
de l'entreprise
Le risque, du point de vue juridique, est à la fois
l'aléa (l'incertitude), c'est-à-dire la chance de gagner ou de
perdre, et le dommage causé par un événement, la perte
dont il faut assurer la prise en charge147(*).
Il résulte de l'économie du contrat de travail
que les risques de l'entreprise incombent à l'employeur et le
salarié dispose de la sécurité du revenu qui n'est que la
contrepartie de la subordination148(*). Aujourd'hui, plusieurs évolutions
ayant pour objectif autant la flexibilité du droit du travail que
l'association des salariés, contribuent à transférer une
partie de ces risques aux salariés.
Fondamentalement, le développement de l'actionnariat
salarié favorise une association au risque financier (paragraphe I).
Aussi, on peut se demander si une telle participation ne risque pas de
déstabiliser le dialogue social traditionnel dans l'entreprise
(Paragraphe II).
PARAGRAPHE I - Le risque financier
Le risque financier est perceptible à deux
niveaux : au niveau individuel (A) et au niveau systémique (B)
A - Le risque individuel
La question du risque individuel supporté par le
salarié actionnaire est d'une nature ambiguë que l'on pourrait dire
qu'il se présente sous la forme d'un dilemme. L'actionnariat
salarié est source d'un risque financier pour le salarié, ce qui
peut le décourager. Mais, le risque financier fait partie
intégrante de l'apprentissage lié à l'accès pour
les salariés au capital de leur entreprise, et doit être maintenu
à ce titre. Le salarié qui investit dans son entreprise s'expose
à un double risque.
Le premier est relatif à l'évolution du cours
des actions détenues. Si l'évolution se révèle
défavorable, le salarié risque une perte en capital d'autant plus
importante que la chute du cours perdure. Le deuxième risque est celui
de liquidité. Ce risque survient quand le salarié qui veut
revendre ses actions ne trouve pas d'investisseur à qui les céder
ou lorsque, conformément à une clause de rachat, sa
société ne dispose pas de réserves suffisantes pour le
libérer.
Mais, l'actionnariat salarié est et doit rester par sa
nature même un placement risqué. La dimension du risque est
inhérente à l'accès au capital de l'entreprise et à
l'accès du salarié au rang d'associé. C'est parce qu'il
partage à présent le risque qui auparavant était
porté uniquement par les propriétaires de l'entreprise que le
salarié peut revendiquer une nouvelle place dans l'entreprise. Ce risque
revêt une dimension pédagogique et est fondateur de
l'économie capitaliste puisqu'il caractérise et retranscrit
l'incertitude dans laquelle sont prises les décisions
économiques les plus essentielles.
C'est justement parce qu'il participe de ce risque multiforme
au niveau de l'entreprise que le salarié actionnaire est parfois
rapproché de cette figure paradoxale du «salarié-
entrepreneur».
B - Le risque tenant à l'instabilité du
système financier international
Le développement de l'actionnariat salarié est
indissociable de la montée en puissance du rôle des marchés
financiers dans le financement de l'économie. Les entreprises et les
salariés participent ainsi au risque systémique propre à
un tel mode de régulation internationale porté par les
marchés financiers. Ceci est particulièrement dangereux parce
qu'une crise financière rétroagit presque immédiatement
sur la sphère réelle par différents canaux.
Le principal risque provient de la volatilité des cours
et des mouvements de capitaux fréquents et massifs. Avec le
développement des nouvelles technologies de l'information et de la
communication, la lisibilité des marchés internationaux s'est
considérablement accrue. Face à cet état de choses, aucun
mécanisme ne vient garantir la stabilité et le blocage des fonds
provenant des actions détenues par les salariés sur leurs
entreprises, des mouvements hiératiques peuvent intervenir à
tout moment, et avoir de profondes conséquences sur les marchés
financiers eux-mêmes, mais aussi sur les entreprises.
Dès lors, face à ce dilemme, il s'agit
d'éviter deux écueils : un encadrement trop
élevé du risque qui ferait perdre à l'actionnaire
salarié toute conscience de la nature par essence risquée de son
investissement. Aussi, il s'agit de ne pas décourager les
salariés, et de protéger au minimum leur placement en leur
fournissant une information la plus exhaustive possible. Ceci contribuera
certainement à accroître le fossé qui sépare les
salariés actionnaires des salariés non actionnaires et des autres
partenaires sociaux.
Paragraphe II - Le risque de
déstabilisation du dialogue social au sein
de l'entreprise
Le dialogue social dans les entreprises de l'espace OHADA
repose non seulement sur des textes législatifs149(*) mais aussi sur un
grand nombre de pratiques institutionnalisées et sur trois
catégories d'acteurs : l'Etat et les partenaires sociaux, qui se
scindent en deux catégories : les organisations syndicales
représentant les salariés et les organisations patronales.
Désormais, l'émergence d'une nouvelle
catégorie d'acteurs que sont les actionnaires salariés vient
mettre en cause un certain nombre de principes qui organisaient le dialogue
social. Un des risques les plus sérieusement redoutés est celui
d'une distinction au sein de l'entreprise entre l'ensemble des salariés
et les actionnaires salariés (A). De plus, une problématique
relative à la place et la légitimité des actionnaires
salariés risque de se poser (B).
A - Vers un dualisme du statut de salarié au sein
de l'entreprise ?
Les salariés, lorsqu'ils deviennent actionnaires,
accèdent à un certain nombre d'avantages auxquels n'ont pas
accès les autres salariés de l'entreprise. Les salariés
actionnaires disposent en général d'une information
précise, détaillée et exhaustive sur la situation de leur
entreprise, sur l'évolution de ses résultats, et plus largement
sur des aspects stratégiques qui sont au coeur de la vie de celle-ci.
Or, cette information n'est pas disponible pour le reste des
salariés qui doivent se contenter des circuits traditionnels et beaucoup
moins complets de circulation de l'information.
Ces deux catégories de salariés sont donc
placées dans une situation différentielle et asymétrique
au niveau de l'accès à l'information.
Le deuxième élément de discrimination
entre les salariés et les actionnaires salariés vient du statut
«d'associé» qui est attaché aux seconds. Il n'est pas
inutile de rappeler que le fait de devenir actionnaire change
profondément le statut du salarié. Ainsi, si l'on
considère la participation au niveau de l'entreprise,
l'atténuation vraisemblable des conflits entre les groupes sociaux a
pour rançon la naissance de conflits d'intérêts chez les
représentants des salariés150(*). Le conflit peut
naître par exemple, en cas de vote sur des questions qui touchent
directement les intérêts des salariés, comme la politique
générale de l'entreprise en matière de conventions
collectives, en matière sociale, et surtout lorsqu'il s'agit de
procéder à des fermetures partielles ou totales de
l'entreprise.
Ce risque de voir l'actionnariat salarié dessiner une
claire frontière entre les salariés actionnaires et les autres
salariés est réel et doit susciter d'ores et déjà
de nombreuses réflexions pour élargir la participation à
tous les salariés151(*). Dans cet ordre d'idées, pour
éviter que ne s'institutionnalise la fracture entre les deux
catégories de salariés, il convient de proposer que les
actionnaires salariés se prononcent dans les entreprises pour la
désignation d'au moins un administrateur agissant au nom et pour le
compte de l'ensemble des salariés.
B - Place et légitimité des
représentants des salariés actionnaires
Il faut rappeler que le dialogue social se fonde sur trois
piliers au centre desquels se trouvent les représentants des
salariés réunis dans les organisations syndicales. Leurs
prérogatives sont fixées par la loi152(*), et leur
légitimité repose sur le principe de l'élection.
Dès lors, comment positionner les représentants des actionnaires
salariés d'un point de vue institutionnel dans le cadre du dialogue
social tel qu'il est conduit, et définir l'essence de leurs
prérogatives ?
Cette question de la légitimité se trouve
redoublée par la question de la place de la négociation sur
l'actionnariat salarié dans le dialogue social
« traditionnel ». Les syndicats ont des prérogatives
certaines dans les négociations salariales et dans les discussions sur
les conditions de travail. Or, ce rôle risque d'être remis en
cause à travers la montée en puissance de la
légitimité de l'actionnariat salarié.
Enfin, il n'est pas possible de traiter des risques
inhérents à l'actionnariat salarié sans s'interroger sur
le risque de schizophrénie inhérent au statut d'actionnaire
salarié. L'individu est en même temps tributaire d'une logique
financière, puisqu'il est intéressé à
l'évolution du cours de l'action de sa société ; mais
il est également tributaire d'une logique sociale, puisqu'il est
concerné au premier chef par les questions relatives à
l'emploi.
Or, ces deux logiques peuvent s'avérer
profondément contradictoires, et placer l'actionnaire salarié
dans un dilemme qui peut constituer pour lui le supplice de
Tantale153(*).
CONCLUSION
Traiter de la participation des salariés au
fonctionnement de la société anonyme en droit OHADA revient
à réfléchir sur la place du salarié par rapport aux
enjeux managériaux de ce type de société dans un univers
ambiant de globalisation de l'économie.
Cette idée de participation était, hier,
percutante ; elle reste aujourd'hui, contemporaine.
Quand les pays francophones d'Afrique s'unissaient pour le
Traité de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires le 17 octobre 1993, ils entendaient moderniser et harmoniser le Droit
des Affaires afin de remédier à l'insécurité
juridique et judiciaire existant dans ces Etats. Ils entendaient surtout
restaurer la confiance des investisseurs154(*), apporteurs de
capitaux. La refonte du Droit des Sociétés dans le cadre de ce
Traité répond bien à cet objectif.
Soucieux de ménager les détenteurs du
financement, le législateur OHADA n'a pas entendu reconnaître aux
détenteurs de la main d'oeuvre une place enviable dans le fonctionnement
de la société anonyme. En leur permettant, sous certaines
conditions, de cumuler leur contrat de travail avec un mandat social (articles
417 et 426 AUDSCGIE) et d'être attributaires d'une fraction
dérisoire du capital social (articles 639 et 640 AUDSCGIE), le droit
OHADA instaure une participation individuelle, minoritaire des salariés,
laquelle est soumise à l'autorisation directe ou indirecte des
actionnaires, véritables propriétaires de la firme.
Or, le pouvoir des salariés, au-delà de la
proportion de leur représentation au sein des organes
décisionnels, se mesure non seulement par leur capacité à
influencer les décisions prises en Assemblées
Générales, mais également par leur participation à
l'élection des membres du Conseil d'Administration. Il s'ensuit qu'une
telle participation restrictive et volontariste n'est pas efficace et
déterminante dans l'exercice du pouvoir dans la
société.
Dès lors, dans l'optique de la philosophie volontariste
du législateur OHADA, il est apparu important, tout au long de ce
travail, de renforcer la participation du salarié dans la SA en incitant
les entreprises à recourir à l'actionnariat salarié,
participation financière par excellence.
Dans un souci d'efficacité et de mise en oeuvre de
cette participation, il a paru intéressant de prendre en compte les
nombreuses critiques dont a fait l'objet l'actionnariat salarié dans les
droits étrangers, notamment son caractère discriminatoire et
inégalitaire, en vue de proposer son extension à l'ensemble des
salariés. Ainsi, il constitue en même temps un correctif
déterminant et un amendement fort souhaité au système
participatif consacré par l'Acte Uniforme relatif au Droit des
Sociétés Commerciales et du GIE en ses articles 639 et
suivants.
L'attribution d'actions ou d'options aux salariés non
dirigeants pourrait dans ces conditions contribuer à la constitution
d'un capital humain spécifique, la confiance facilitant
« l'émergence de proposition d'investissement de la part des
salariés »155(*). L'on conviendra d'ailleurs, avec le
professeur DESBRIERES, que la présence au CA d'employés en raison
de leur qualité d'actionnaires revêt plus d'intérêt
qu'une simple participation institutionnelle, dans la mesure où leur
contrôle dépend désormais de la valeur de leur portefeuille
d'actions et n'est pas affecté par des considérations de
négociation collective liée à leur mode de
désignation: elle contribue à réduire le
différentiel de pouvoir entre les dirigeants et les autres parties
prenantes de l'entreprise, favorisant ainsi l'émergence d'une coalition
coopérative.
Rendre salariés et actionnaires solidaires de la
création de la valeur, tel est aujourd'hui le rêve de tout
dirigeant et le fil d'Ariane de la gouvernance d'entreprise. Mais ce rêve
exige du temps, des efforts d'information et de formation des salariés,
une prise de risques : risque financier et risque de
déstabilisation du dialogue dans l'entreprise (actionnaires minoritaires
et actionnaires majoritaires ; salariés actionnaires et autres
salariés).
Seulement, si le salarié, devenu entrepreneur, prend
des risques avec son entreprise, celle-ci doit accepter de partager avec lui
information, savoir et en faire une composante de la négociation
collective traditionnelle. Curieusement les syndicats de l'espace OHADA
hésitent à se risquer sur le terrain inconnu de la participation
des salariés au capital. Ce manque d'intérêt peut
s'expliquer par l'absence de maîtrise des réalités
économiques et financières et surtout par le fait que la
préoccupation majeure immédiate des salariés reste
l'amélioration des conditions de travail et la hausse des salaires. Pour
Jean Christophe Le DUIGOU, responsable des études économiques
à la Confédération Générale des Travailleurs
(CGT), cela ne constitue ni un axe politique pour l'entreprise, ni un axe
revendicatif pour les
salariés156(*). Dommage, estime l'économiste Michel
AGLIETTA : «Les syndicats doivent retrouver un rôle de
médiation auprès des salariés et réinvestir le
champ financier »157(*) .
Ce travail fut passionnant du fait même de
l'étendue des thèmes abordés et des enjeux mis en
évidence. L'actionnariat salarié se situe aujourd'hui à la
croisée des chemins. Si sa place est encore marginale dans les
entreprises de l'espace OHADA et qu'il rencontre des réticences fortes
et durables, il n'en demeure pas moins évident que ce
phénomène est en train de gagner en intensité et s'impose
aux sociétés et aux salariés comme une réponse
efficace et adaptée à un certain nombre de contraintes
économiques et financières des sociétés
anonymes.
Au - delà de son aspect financier, l'actionnariat
salarié constitue un levier pour mettre en oeuvre une réflexion
plus vaste sur les rapports du pouvoir au sein des entreprises, le gouvernement
d'entreprise.
Pour finir, il faut préciser que l'essor de
l'actionnariat salarié ne s'explique pas seulement dans le cadre d'une
participation voulue par les entreprises et les salariés, mais par
l'action déterminante du législateur. Il doit intervenir
directement ou indirectement pour encourager le développement des
opérations d'actionnariat en accordant des avantages fiscaux et
sociaux. Ainsi, la voie est ouverte à une réflexion sur les
incidences fiscales de la participation des salariés au capital de leur
société quand bien même la matière de la
fiscalité relève, pour l'instant, de la souveraineté des
Etats parties au Traité de 1993.
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- Loi française du 15 mai 2001 sur « les
Nouvelles Régulations Economiques »
(JORF du 16 mai 2001).
- Loi n°95-15 du 12 janvier 1995 portant Code du Travail
de Côte d'Ivoire.
- Ordonnance n°16 du 8 mai 1974 portant Code du Travail
du Togo.
- Code civil français, éd. DALLOZ, 2002-2003.
- Code du Travail français, éd. LITEC, 2000.
- Convention Collective Interprofessionnelle du 19juillet 1977
de la Côte d'Ivoire.
- Convention Collective Interprofessionnelle du 1er
mai 1978 du Togo.
V- REVUES- PERIODIQUES
- Revue Management
- Revue Sociétés
- Revue de droit bancaire
- Revue trimestrielle de droit civil
- Revue trimestrielle de droit commercial
- Bulletin civil
- Bulletin criminel
- Bulletin Joly
- Enjeux- Les Echos
- Jurisclasseurs Périodiques
VI- AUTRES DOCUMENTS ET SITES
CONSULTES
- CORNU (Gérard), Vocabulaire Juridique- Association
Henri CAPITANT,
P. U. F, 3e
éd., Paris, 1992.
- GUILLIEN (Raymond) et VINCENT (Jean), Lexique des Termes
Juridiques,
12e éd.
DALLOZ, Paris, 1999.
- LAROUSSE, Petit dictionnaire français, éd.
LAROUSSE, Paris, 1990.
- MAISONNIER (G) et HAUTRON (J. C), Encyclopédie
juridique de l'Afrique,
T. 7, Droit des Entreprises, N. E. A, Paris, 1982.
- http://
www.courdecassation.fr
- http://
www.ohada.com
- http://
www.pratique.fr/viepratique/participation
des salariés
- http://
www.raun-wagner.de/participation
des salariés
- http://
www.senat.fr/Commission des
Affaires sociales
- http://
www.vernimen.dalloz.fr/finance
d'entreprise
TABLE DES MATIERES
DEDICACE.............................................................................................
II
REMERCIEMENTS..................................................................................
III
AVERTISSEMENT.................................................................................
IV
PRINCIPALES
ABREVIATIONS................................................................
V
PLAN
SOMMAIRE................................................................................
VII
INTRODUCTION.............................................................................
..... 1
Première Partie : La faiblesse de la
participation des salariés à travers le
droit uniforme des
sociétés anonymes ..........................................
6
CHAPITRE I : Les formes d'intervention du
salarié dans la société anonyme .................
7
Section I : L'accès du salarié au
Conseil d'Administration de la société........................
7
Paragraphe I : Les conditions du cumul d'un contrat de
travail avec un
mandat social
......................................................................
8
A- L' exigence d'une condition
explicite....................................... 8
1- La notion de travail effectif du
contrat.................................. 9
2- les critères d'appréciation de
l'effectivité de l'emploi ............... 9
a- L'exercice de fonctions distinctes
............................... ... 10
b- L'exercice de fonctions subordonnées
............................. 11
B- L'exigence de conditions implicites
...................................... . 12
1- Le numerus clausus
..................................................... 12
2- La survie d'une condition abolie
....................................... 14
Paragraphe II : Les conséquences du cumul sur le
sort du contrat de travail............... 14
A- L'hypothèse du cumul régulier
............................................. 15
1- L'indépendance de principe des deux statuts
........................ 15
2- Les tempéraments jurisprudentiels au principe
d'indépendance
des deux statuts
.......................................................... 16
B- L'hypothèse du cumul irrégulier
............................................. 17
1- La suspension du contrat de travail comme un remède
limité au cumul
irrégulier ................................................ 17
2- Les succédanés
au cumul irrégulier ...................................... 19
Section II : L'attribution
d'actions de la société aux salariés ................
....... 20
Paragraphe I : Les conditions de l'attribution des
actions de la société
aux salariés
..........................................................................
20
A- Les conditions relatives aux actions
..................................... 20
1- Le nombre déterminé d'actions
.................................... 21
2- L'exigence relative à la forme nominative des
actions ............ 22
B- Les conditions relatives à l'atteinte au capital
........................... 23
1- La notion de capitaux propres
......................................... 23
2- L'intérêt de l'interdiction
.............................................. 24
Paragraphe II : L'obligation de libérer le montant
des actions souscrites .................. 25
A- Les débiteurs de l'obligation de libérer
................................... 25
1- Les souscripteurs
....................................................... 25
2- Les bénéficiaires de la souscription
................................. 26
B- La sanction attachée à la non
libération des actions souscrites ........... 27
CHAPITRE II : Appréciation critique de la
participation des salariés instaurée
par l'OHADA
................................................................... 29
Section I : Le caractère limitatif de la
participation des salariés à la gestion de
la société
anonyme ........................................................... 29
Paragraphe I : insuffisance de la participation du
salarié en temps normal ................. 29
A- La relative efficacité de la participation des
salariés ..................... 30
1- La subordination de la participation à la
volonté
des actionnaires
............................................................ 30
2- L'esquisse d'une cogestion minoritaire
............................... 31
B- La non reconnaissance d'un droit d'alerte aux
salariés ................. 32
1- La notion du droit d'alerte
............................................. 32
2- La nécessaire reconnaissance du droit d'alerte
à la représentation
du personnel
.............................................................. 33
Paragraphe II : Une information plus ou moins
renforcée en temps de crise ............... 34
A- La participation des salariés au règlement
préventif ..................... 34
1- La demande du règlement préventif
................................ 34
2- Le déroulement du règlement préventif
........................... 35
B- Le rôle essentiel des salariés dans les
procédures résultant de la
cessation des paiements
.................................................. 36
1- La mission de contrôle et de surveillance
du représentant des salariés
.......................................... 36
2- Le super privilège des salariés
....................................... 37
Section II : Une forme
édulcorée d'actionnariat .....................................
37
Paragraphe I : Absence de prérogatives
attachées à la détention d'actions ...............
38
A- L'exclusion du droit aux dividendes
..................................... 38
B- L'absence d'un droit au vote
............................................. 39
Paragraphe II : Le particularisme des actions
détenues
par les salariés
..................................................................
39
A- La nature juridique des actions
.......................................... 40
B- L'imprécision des modalités d'attributions
des actions ............... 41
Deuxième Partie : Pour la promotion
d'une véritable participation
financière des
salariés dans la société anonyme .....................
43
CHAPITRE I : Le développement de
l'actionnariat salarié comme instrument
de la participation
.............................................................. 44
Section I : Les fondements d'une question
d'actualité : l'actionnariat salarié .........
44
Paragraphe I : La philosophie de l'actionnariat
salarié ..................................... 45
A- Le dépassement de l'antagonisme capital-
travail ................ 49
B- La reconnaissance du rôle
prépondérant du capital
humain par l'intérêt social
................................................ 46
Paragraphe II : L'actionnariat salarié comme
solution aux réalités
économiques contemporaines des
sociétés anonymes .................... 48
A- L'impact de l'actionnariat salarié sur la
productivité ................. 48
B- L'impact de l'actionnariat salarié sur la
stabilité du
capital des sociétés
........................................................ 49
Section II : L'incitation à une
plus grande attractivité des opérations
d'actionnariat
.................................................................
51
Paragraphe I : Les modèles participatifs
optionnels les plus usités .................. ... ... 51
A- L'intéressement facultatif
................................................. 52
B- La participation au capital de la société
................................. 53
Paragraphe II : La mise en oeuvre des modèles
participatifs ............................... .... 55
A- L'adhésion volontaire à un
régime de participation ........................ 55
B- La nécessité de créer un Fonds
salarial collectif au sein de l'entreprise.... 57
CHAPITRE II : Les incidences de la participation
financière sur le statut du
salarié dans la
société................................................... ......
59
Section I : Une participation effective
du salarié à la vie de la
société anonyme
........................................................... .... 59
Paragraphe I : Une meilleure association du
salarié aux décisions collectives ............. 59
A- Le nouveau statut du salarié dans la
société ........................... ... 60
B- L'implication des salariés à la gestion de
la société ...................... .. 60
Paragraphe II : Une meilleure cohésion dans la
société ...................................... 62
A- Une cohésion au sein du groupe des actionnaires
...................... 62
B- Le nouveau déterminant du dialogue social
............................ 63
Section II : La participation des
salariés aux risques de l'entreprise ................ 64
Paragraphe I : Le risque financier
.............................................................. 64
A- Le risque individuel ..............................
......................... 64
B- Le risque tenant lieu à l'instabilité du
système
financier international
...................................................... 65
Paragraphe II : Le risque de déstabilisation du
dialogue social au
sein de l'entreprise
................................................................ 66
A- Vers un dualisme au sein de l'entreprise ?
................................... 66
B- Place et légitimité des représentants
des salariés actionnaires ............ 67
CONCLUSION
.....................................................................
................ 68
BIBLIOGRAPHIE
.................................................................................
71
TABLE DES MATIERES
.......................................................................
77
* 1 Georges RIPERT et
René ROBLOT, Traité de Droit Commercial, Tome1, 17e
LGDJ, Paris, 2002, n°1015.
* 2 Comp. article 6 al. 2
AUDSCGIE.
* 3 Article 1832 al.
1er code civil français : « La
société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui
conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens
ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter
de l'économie qui pourra en résulter ».
* 4 Pour la composition du
Conseil d'Administration, se référer aux pages
intérieures.
* 5 Article 415 AUDSCGIE
* 6 Article 1er
de l'Avant Projet d'Acte Uniforme portant Droit du Travail ; article 2 du
Code de Travail du Togo (CTT) et du Code de Travail Ivoirien (CTI).
* 7 Article 73 de la
Convention Collective Interprofessionnelle de la Côte d'Ivoire du 19
juillet 1977.
* 8 Pierre BEZARD, La
Société Anonyme, éd. Les Guides Montchrestien, Paris,
1986, n°1597, p. 503.
* 9 Wiyao GNOM , La
Participation des salariés à la vie de l'entreprise au Togo,
Mémoire de Maîtrise en Droit des Affaires, 1990-1991,
Université du Bénin, Togo, p. 11.
* 10 « Information
institutionnalisée », selon l'expression de G. LYON-CAEN, J.
PELISSIER, Droit du Travail, Paris, 1992, n° 763 ss.
* 11 PIE XI, Encyclique
Quadragesimo anno, 15 mai 1931.
* 12 Pierre BEZARD, La
Société Anonyme, éd. Les Guides MONTCHRESTIEN, Paris,
1986, n°1601, p.507.
* 13 Jean CHERIOUX,
L'actionnariat salarié : vers un véritable partenariat dans
l'entreprise ; Rapport d'information 500 (98-99) - Commission des Affaires
Sociales du Sénat français (
www.senat.fr).
* 14 C'est
« l'accès des salariés au capital d'une
société. Ce peut être la société où
ils sont employés (actionnariat dans l'entreprise) ou toute autre
société (capitalisme populaire) », lexique des termes
juridiques, 12e éd. ; Dalloz, Paris, 1999.
* 15 Petit Dictionnaire
français, Larousse nouvelle édition, 1990 ; V. Cumul.
* 16 Article
438A.U.D.S.C.G.I.E
* 17 Philippe MERLE, Droit
Commercial : Sociétés Commerciales, Précis Dalloz,
5e éd; Paris,1996, p.530, n°529.
* 18 Req. 12 décembre
1892, D.P 1893, I, 164 Arrêt Karcher.
* 19 Le contrat de travail est
la « convention par laquelle une personne, le salarié,
met son activité professionnel à la disposition de l'employeur ou
patron, qui lui verse en contrepartie un salaire et a autorité sur elle
» ; Lexique des termes juridiques, 12e éd. 2001.
Voir article 2 al. 1 CTT (ordonnance n°16 du 8 mai 1974 portant Code du
Travail au Togo) et article 2 CTI (Loi n°95 - 15 du 12 janvier 1995
portant Code du Travail en Côte d'Ivoire).
* 20 Philippe MERLE, ouvrage
précité, p.381.
* 21 Cass. Com. 24
février 1976, Bull. civ. 1976, IV, n°60.
* 22 Rennes, 14 janvier 1975
in Philippe MERLE, L'application jurisprudentielle de la loi du 24 juillet
1966, n°246 in GP 1978, p. 146.
* 23 Paris 6 nov. 1973, in
Philippe MERLE, L'application jurisprudentielle de la loi du 24 juillet 1966,
n°243 in
GP 1978, p. 146.
* 24 Rennes, 14 janvier 1975
préc.
* 25 Philippe LAURENT,
« Le salaire des dirigeants sociaux titulaires d'un contrat de
travail », GP du 28 mars 1978, p.148.
* 26 « Hors
les sommes perçues dans le cadre d'un contrat de travail, les
administrateurs ne peuvent recevoir, au titre de leurs fonctions, aucune autre
rémunération, permanente ou non, que celle visées aux
articles 431 et 432 du présent Acte Uniforme ».
* 27 Limoges 19 mars 1971 in
Ph. MERLE précité.
* 28MESTRE (Jacques) et
autres : Lamy Sociétés Commerciales 2001 n°3345 c
p.1466.
* 29 C'est le critère
psychologique suggéré par M. DESLANDES in
« Réflexions sur le cumul d'un mandat social »,
D.1982, chr, p.20.
* 30 Article 465 al 2
AUDSCGIE : « Il assure la direction générale de
la société et représente celle-ci dans ses rapports avec
les tiers »
* 31 M. DESLANDES, op. cit
p. 21.
* 32 V. articles 487 à
490 AUDSCGIE
* 33 (J.)HEMARD, (F.) TERRE et.
(P.) MABILAT, Sociétés Commerciales, tome 1 p.880.
* 34 « Le Conseil
d'administration peut comprendre des membres qui ne sont pas actionnaires de la
société dans la limite du tiers des membres du
Conseil. »
* 35 La règle du tiers
est celle qui exige que le nombre des salariés participant à
l'organe de gestion ne dépasse pas le tiers des autres membres du
conseil d'administration.
* 36 Michelle PETOT- FONTAINE,
La Société Anonyme, Dix études de Cas, Collect. L.G.D.J
1979, p.42 ;
M. DESLANDES, « Réflexions sur le cumul d'un
mandat social et d'un contrat de travail », D.1982, chr, p. 25.
* 37
L'antériorité biennale du contrat de travail existait en tant
qu'une condition nécessaire jusqu'à la Loi Madelin du 11
février 1994.
* 38 Yves CHARIER, La Gestion
et le Contrôle des Sociétés Anonymes dans la jurisprudence,
Collect. Librairies Techniques, Paris, 1978, p. 30.
* 39 Cass. Soc. 16 octobre 1975
Bull. soc. V. n° 465, p. 398 in Yves CHARTIER, op. cit. p. 32.
* 40 V. article 444
A.U.D.S.C.G.I.E
* 41 Bruno PETIT,
« La suspension du contrat de travail des dirigeants de
Société Anonyme », RTD com.1981, p.31
* 42
SAYAG, « Mandat social et contrat de travail : attraits,
limites et fiction », Rev. Sociétés 1981, p.1 ;
Voir aussi Bruno PETIT op. cit p.30.
* 43 Cass. Soc 4 octobre
1972, Bull ; V. n° 526, p. 48 in CHARTIER op. cit. p.
30 « (...) la loi prévoyant le cumul d'un mandat
d'administrateur et d'un contrat de travail, les décisions prises par un
administrateur dans l'intérêt de sa société ne
saurait comporter renonciation à ses droits attachés à son
contrat de travail ou impliquer l'acceptation d'une modification de ce
dernier ».
* 44 Cass. Soc. 16
décembre 1981 JCPE 1983, 14108 note P. Fieschi - Vivet.
* 45 Jean CARBONNIER, Les
obligations, Paris 1990, 9ème éd. p. 306.
* 46 Com. 20 nov 1962, D.
1963, 230.
* 47 Trib. Com. Nantes 31
janvier 1974, GP. 1975, 433 note APS.
* 48 Cass. Soc. 2 mai 1989,
JCPG 1989, p.169; Cass. Soc. 21 juin 1994, RTD Com. 1995, p.147.
* 49 Cass. Crim. 5
décembre 1989 Bull crim n° 462 «(...) Qu'en l'absence de
démission de ses fonctions salariales à l'époque où
celui-ci (le salarié) avait accédé à la
présidence (de la société) et pendant ce mandat, le
contrat de travail liant l'intéressé à la
société avait été suspendu et s'était de
nouveau exécuté ».
* 50 GUILBERTEAU, note sous
Cass. soc. 4 janvier 1979. Rev. Sociétés 1979, 815.
* 51 MAZEAUD, Les
obligations, T.2, éd. Montchrestien, Paris 1990, n°1208 p.
1246.
* 52 Pau, 15 mars 1991 S.A
Pinault Pyrénées c/ Goset : Cah. jurisp. Aquitaine
1991-1992 où les juges affirment nettement que « la
nomination à un poste de gérant d'un cadre salarié a pour
conséquence la disparition de son contrat de travail et, en aucune
façon, la suspension de cette convention »
* 53 René SAVATIER, Jean
Marie LELOUP, Droit des Affaires, 3è éd ; n° 198 bis
120.
* 54 Article 29 de la
Convention Collective Interprofessionnelle de la Côte d'Ivoire du 19
juillet 1977.
* 55 Article 640 al. 5
AUDSCGIE
* 56 « La
convention par laquelle le porteur accepte sur demande du donneur d'ordre, de
se rendre actionnaire par acquisition ou souscription d'actions étant
expressément convenu que, après un certain délai, ces
actions seront transférées à une personne
désignée et à un prix fixé dès
l'origine », définition donnée par D. Schmidt, les
opérations de portage de titres de sociétés, in les
Opérations fiduciaires, colloques de Luxembourg, Feduci Sept 1984,
L.G.D.J. 1985, p.30.
* 57 Sauf dispositions
statutaires en matière de l'Assemblée Générale
Ordinaire où le maximum exigé est de dix (10) actions pour la
participation ( article 548 AUDSCGIE) Comp. Avec l'article 552 du même AU
pour l'Assemblée Générale Extraordinaire.
* 58 Article 640 al. 1 et 3
AUDSCGIE
* 59 Philippe MERLE, Droit
Commercial : Sociétés Commerciales, 1996, n° 283 et
s.
* 60 Article 640 al 6
AUDSCGIE
* 61 Ici, le
législateur nous rappelle l'aspect comptable du capital social qui n'est
le plus souvent envisagé que sous son seul aspect juridique. Ainsi,
d'un point de vue comptable, le capital social se distingue de l'actif social
et des fonds ou capitaux propres.
* 62 Notamment le plan
comptable SYSCOA
* 63 Article 30 de l'Acte
Uniforme relatif au Droit Comptable (AUDC)
* 64 Y. Guyon préc.
n°109, p. 614.
* 65 J. Cl. COVIAUX,
«L'achat par une société de ses propres actions» in Dix
ans de droit de l'entreprise,
Litec, 1978 p.187.
* 66 Comp. avec l'article 664
AUDSCGIE
* 67 Au sens de l'article
102 AUDSCGIE : «Sont qualifiés de fondateurs de la
société, toutes les personnes qui participent activement aux
opérations conduisant à la constitution des
sociétés ».
* 68 Consulter utilement
l'arrêt de la Cour de Paris du 10 janvier 1991, Bull. Joly 1991, p. 301
n° 92 note Trassard.
* 69 V. article 244 AUDSCGIE
* 70 Article 640 alinéa
1 de l'AUDSCGIE in fine.
* 71 Or les statuts
constituent la convergence des volontés des actionnaires.
* 72 C'est la
procédure par laquelle les associés approuvent ou refusent
l'admission de nouveaux actionnaires par le biais de cession d'actions ;
V. article 765-2 AUDSCGIE pour la transmission des actions.
* 73 Klaus HOPT,
«Appréciation des propositions sur l'harmonisation des
législations sur la participation des salariés dans les
Communautés Européennes », RTDCom 1981 p. 407.
* 74 « C'est la
gestion de l'entreprise exercée en commun par le chef d'entreprise et
les représentants des salariés et qui implique pour ces derniers
le pouvoir de participer aux décisions, avec voix
délibérative, sans nécessairement être
actionnaires » in Lexique des termes juridiques, 12e
éd. Dalloz, 1999.
* 75 Car la loi n'offre
qu'une simple possibilité aux sociétés de l'insérer
dans leurs statuts
(article 417 AUDSCGIE).
* 76 V. Commentaire de
l'article 417 AUDSCGIE, éd. Juriscope, 2002.
* 77 Jean PAILLUSSEAU, La
Société Anonyme, technique d'organisation de l'entreprise, Sirey
1967, p. 229.
* 78 Wiyao GNOM, La
participation des salariés à la vie de l'entreprise au Togo,
Mémoire de Maîtrise en Droit des Affaires 1991-1992,
Université du Bénin, Lomé -Togo.
* 79 Article 61.9 CTI :
«Chaque année, l'employeur doit informer les
délégués du personnel sur la situation de
l'entreprise».
* 80A. BURNET et M.
GERMAIN, « L'information des actionnaires et du Comité
d'Entreprise dans les Sociétés Anonymes depuis les lois de 1982,
1984, 1985 », Rev. Sociétés 1985, p.1 et 5 ; voir
aussi l'article 61-9 CTI.
* 81 Michel JEANTIN et Paul
LECANNU, Droit Commercial : Instruments de paiement et de
crédit ; Entreprises en difficulté, Précis Dalloz,
5e éd. Paris, 1999 n444, p. 286.
* 82 Michel Filiga SAWADOGO,
Droit des entreprises en difficultés, éd. Bruylant, Bruxelles,
2002, n°4 p. 39.
* 83 Adolf STURMTHAL, la
participation ouvrière à l'Est et à l'Ouest, éd.
Economie et Humanisme,
Paris, 1967, p. 251.
* 84 Ici, nous
interprétons l'article 5 AUPCAP.
* 85 Michel JEANTIN, Paul
LE CANNU, op. cit. n°477, p. 310
* 86 V. l'article 7 AUPCAP.
* 87 Article 12 al.2 AUPCAP.
* 88 Article 15- 2 al.2 in fine
AUPCAP.
* 89 Article 9 al.3 in fine
AUPCAP.
* 90 Gérard LYON-CAEN,
«Le droit et l'emploi », D. 1982, chr. 133.
* 91 Article 48 A.U.P.C.A.P.
* 92 Articles 178 CTT et 61-7
CTI.
* 93 Association pour la
Gestion du régime d'assurance des créances des Salariés
(A.G.S).
* 94 Article 107-3°AUS
(Acte Uniforme portant organisation des Sûretés).
* 95 Article 166-2 AUPC
AP ; pour les meubles, voir l'article 167-3° AUS où ils
viennent en troisième position après les créanciers de
frais de justice et ceux des frais engagés pour la conservation du
meuble.
* 96 F. ZENATI,
«L'ordonnance du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement
et à la participation des salariés au résultat de
l'entreprise et à l'actionnariat salarié », RTD civ.
1987, n°54, p. 182.
* 97 Lexique des termes
juridiques, 12e éd. Dalloz 1999, p. 199.
* 98 Paris, 8 octobre 1993
RTDCom 1994, p.58, note CHAMPAUD et DANET.
* 99Article 640 al.7
AUDSCGIE.
* 100 Michel VASSEUR,
« La loi du 24 octobre 1980 créant une distribution
d'actions en faveur des salariés des entreprises et les principes du
droit français», D. 1981, chr. p. 64.
* 101 Article 542 AUDSCGIE:
« Les actions rachetées par la société
conformément aux dispositions de l'article 639 et suivant du
présent Acte Uniforme sont dépourvues de tout droit de
vote »
* 102 Article 2231 cciv
«Quand on a commencé à posséder pour autrui, on est
toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a
pas preuve contraire. »
* 103 Michel VASSEUR, chr.
préc. p.64.
* 104 Brigitte HESS
-FALLON, Anne- Marie SIMON, Droit des Affaires 14e
éd. Dalloz, Paris 2001, p. 193.
* 105 Michel JEANTIN,
«Observations sur la notion de catégorie d'actions »,
D.1995, chr. p.88.
* 106 L'action de
jouissance, par opposition à l'action de capital, est celle dont le
montant nominal a été remboursé à l'actionnaire
à la suite «d'un amortissement du capital » (Article 653
AUDSCGIE).
* 107 Article 900-1
cciv ; V. Paris, 4 mai 1982, G.P. 1983, I, 152, APS.
* 108 Il faut
préciser que bien souvent les SA en Afrique sont des
sociétés fermées et caractérisées par un
fort intuitus personae, ce qui contraste avec l'anonymat de la SA
classique.
* 109 Ce type de
société a été créée par la loi
française du 26 avril 1917 qui a ajouté un titre VI à la
loi du 24 juillet 1867 modifiée par celle du 24 juillet 1966.
* 110 Droit d'usage, usufruit,
servitude.
* 111 Car elles n'ont
été rachetées que pour être attribuées aux
salariés (article 640 AUDSCGIE).
* 112 Barthélemy
MERCADAL, Philippe JANIN, Droit des Affaires : Sociétés
Commerciales, FRANCIS LEFEBVRE, Paris 2003, n° 18774, p. 972.
* 1 Yves SAINT-JOURS,
« L'entreprise et la démocratie », D. 1993, chr. p.
14.
* 2 Jean CHERIOUX,
L'actionnariat salarié : vers un véritable partenariat dans
l'entreprise, Rapport d'information 500 (98-99). Commission des Affaires
Sociales du Sénat français, www.senat..fr.
* 1 Jean CHERIOUX, Rapport
précité.
* 2 Sur l'ensemble des
sociétés cotées à la Bourse Régionale des
Valeurs Mobilières d'Abidjan et dont le portefeuille est
géré par la SGI-Togo, seule CIMTOGO semble l'avoir
organisé. Mais les investigations dans cette société n'ont
permis ni de confirmer ni d'infirmer cette information.
* 1 Rochet LUBOMIRA,
l'Actionnariat salarié : enjeux managériaux et nouvelles
régulations, Mémoire de Maîtrise d'Economie ;
1999-2000 Université Paris X Nanterre, p. 4.
* 113 Rochet LUBOMIRA, op.
cit p.6
* 2 Jean CHERIOUX, Rapport
d'information 500 (98-99) précité.
* 3 Selon l'expression de
M. Alain DEKEUWER, « les intérêts protégés
en cas d'abus de biens sociaux », JCP éd. E 1995, n°500,
p. 421.
* 4 Mireille DELMAS-MARTY,
Droit Pénal des Affaires, T.2, Thémis, éd. 1990, p.
289.
* 1 Rapport du groupe de
travail CNPF-AFEP cité par le professeur Dominique SCHMIDT, chr
précité p.31.
* 2 Ce terme apparu dans le
langage du management signifie « détenteurs de
parts », donc les actionnaires.
* 3 Littéralement
les « détenteurs d'enjeux ».
* 4 Gérard CHARREAUX
et Philippe DESBRIERES, « Le point sur le Gouvernement
d'Entreprise » in Gouvernement d'Entreprise : Corporate
Governance, théories et faits, Economica, Paris, 1997.
* 5 Yves SAINT-JOURS,
« L'entreprise et la démocratie », D.1993, chr.
p.12.
* 1 Rochet LUBOMIRA, op. cit.
p. 18.
* 1 Elle n'est
versée qu'à chaque clôture d'exercice
bénéficiaire proportionnellement à la fraction du capital
détenu par le salarié.
* 2 Klaus-R WAGNER,
«Constitution de patrimoine et participation salariale en
entreprise », exposé de l'auteur le 12 avril 2001 à
Berlin, www.raun.wagner.de/.
* 1 Afin de lutter contre
le risque de revente des actions après la période
d'indisponibilité nécessaire des titres détenus par les
salariés, la cession anticipée des titres peut être soumise
à une imposition sévère.
* 2 « L'O.P.E. ou
l'O.P.A est l'opération par laquelle une personne physique ou morale
fait connaître publiquement aux actionnaires d'une S.A qu'elle
désire acquérir leurs titres à un prix
déterminé, généralement supérieur au cours
de la Bourse, réglé soit en espèces (O.P.A) soit par
remise d'actions ou d'obligations (OPE) », Ph MERLE, op. cit
n°649, p. 676.
* 3 Anne TEZENAS du
MONTCEL, « Paix Sociale, cohésion interne, arme
anti-OPA : l'entreprise a tout à y gagner... et les
salariés», in Enjeux - les échos, Décembre
1998.
* 114 François ANOUKAHA
et alii, OHADA, Droit des Sociétés Commerciales et du GIE,
éd. BRUYLANT, Bruxelles, 2002, p. 28 n°45.
* 115 Ce système
légal est obligatoire en droit français et s'applique aux
entreprises ayant 50 salariés et plus et dégageant un
résultat suffisant après constitution d'une réserve
spéciale de participation (articles L 442-11 et s. du code du Travail
français).
* 116Voir l'article 39-1 du
Code Général des Impôts du Togo ; STEINIK (Marc),
« L'intéressement : souple et motivation » in
Management, mars 2001, p. 90
* 117 Cas du groupe Maine
et Champagne qui a versé au cours de l'exercice 2000 des primes
d'intéressement à ses salariés alors que le Groupe avait
enregistré un déficit dans sa comptabilité ; in
Management, mars 2001, p. 90.
* 118 C'est une prime
liée à la personne et prévue par l'article 62 des statuts
de TOGOPHARMA.
* 119 Wiyao GNOM, op. cit.
p. 69.
* 120 Ils ont
été introduits en France par la loi du 31 décembre
1970 ; mais ils ne s'y sont vraiment développés qu'à
la fin des années 80 ; da&ns l'espace OHADA, on retrouve ce
vestige dans les articles 639 et s AUDSCGIE.
* 121 Gilles BELIER et
Aurélie CORMIER, « Stock options et droit du
travail », in Droit Social n° 9/10 Septembre - Octobre 2000, p.
838.
* 122 Voir article 639
alinéa 1 AUDSCGIE ; Philippe MERLE, ouvrage précité
n°536, p. 538.
* 123 La loi belge du 18
juillet 1991 permet aux entreprises, lors d'une augmentation de capital,
d'émettre des actions réservées aux membres du personnel.
Le prix d'émission de ces actions peut être fixé avec une
décote maximale de 20% sans que le montant de cette décote soit
soumis au paiement de la sécurité sociale.
* 124 Article 562 AUDSCGIE
in fine.
* 125 C'est le droit qu'a
l'ancien actionnaire, proportionnellement au nombre d'actions détenues,
d'être préféré aux autres lors de l'acquisition de
nouvelles actions en cas d'augmentation du capital.
* 126 Thierry POULAIN REHN,
« Gouvernance d'entreprise et actionnariat des salariés :
une approche conceptuelle »in Le Gouvernement
d'Entreprise : Corporate Governance, théories et faits,
Economica,
Paris, 1997.
* 1 Marie-Laure MORIN,
« Partage et risque de l'emploi : Contribution au débat
sur la réforme du droit du travail » in Droit Social n°
7/8 Juillet-Août 2000 n° 2, p. 730.
* 127 Conformément
à l'article 25 alinéa 1 CTT, article 13-1 CTI.
* 128 Joseph ISSA -SAYEGH,
« Questions impertinentes ( ?) sur la création d'un droit
social régional dans les Etats africains de la zone franc »,
www.ohada.com/Doctrine
Ohadata D-02-27- n°38.
* 129 C'est un fonds
d'investissement géré par les salariés sous le
contrôle de l'employeur et destiné à l'acquisition
d'actions des entreprises privées.
* 130 C'est ce qu'on appelle
abondement
* 131 « actionnariat
populaire » selon l'expression de MERLE, op. cit.
* 132 Cette durée varie
de deux à cinq ans dans le cadre des Plans 401 (K) de
l'Employee Retirement Income Security Acte (ERISA) de 1974 en vigueur
aux Etats-Unis.
* 133Joseph ISSA -SAYEGH,
« Questions impertinentes ( ?) sur la création d'un droit
social régional dans les Etats africains de la zone franc »,
www.ohada.com/Doctrine
Ohadata D-02-27- n°38.
* 134 Yves SAINT-JOURS,
« L'entreprise et la démocratie », D.S. 1993,
chr ; p.15.
* 135 in Rochet LUBOMIRA op.
cit. p.24
* 136 Notamment par le biais
du Fonds salarial collectif, supra note1 p.61.
* 137 - V. article 640 et S.
AUDSCGIE
* 138 - CHERIOUX (Jean),
Rapport précité
* 139 notamment par une
convention de vote (clause de gestion concernant le droit de vote qui
prévoit la nécessité d'un vote unanime des signataires
pour des décisions importantes), Jacques MESTRE et autres, Lamy
sociétés, n° 3131 p.1369.
* 140 pourvu qu'ils ne
mettent pas en péril l'intérêt social : Com 15 juillet
1992, D.1992.J.279 n. Le Diascrorn (Arrêt six)
* 141 « Les
salariés actionnaires dirigeants » selon l'expression du
professeur DESBRIERES.
* 142 Article 424 AUDSCGIE
* 143 Daniel TRICOT,
« Abus dans les sociétés : abus de majorité
et abus de minorité », RTD com 1994, p. 619.
* 144 Il est claire que
l'intérêt primordial des salariés dans l'entreprise est que
celle-ci se développe et qu'elle puisse préserver leur emploi,
maintenir et accroître leur rémunération.
* 145 Notamment les
prérogatives économiques et de contrôle aux
délégués du personnel.
* 146 Assemblée
Générale, Conseil d'Administration.
* 147Marie-Laure MORIN,
« Partage des risques et responsabilité de l'emploi,
contribution au débat sur la réforme du droit du
travail », in Droit Social n°7/8 juillet-août 2000,
n°8, p.733
* 148 A. SUPIOT,
« Les visages de la subordination » in Droit social 2000,
p.131.
* 149 Notamment des codes
nationaux de travail inspiré du système colonial : la loi du
15 décembre 1952 instaurant un Code du Travail applicable
« aux territoires associés et territoires relevant du
Ministère de la France d'Outre-Mer ». Mais depuis peu, une
tentative d'uniformisation du droit du travail est en cours
d'élaboration avec l'Avant-Projet d'Acte Uniforme portant Droit du
Travail.
* 150 Klaus HOPT, op. cit.
p.421.
* 151 C'est ce que l'on a
ébauché au chapitre précédent avec les nombreuses
incitations à un recours volontaire à l'actionnariat.
* 152 Voir les articles 64 et
s. CTTI.
* 153 C'est la souffrance
qu'éprouve quelqu'un qui ne peut satisfaire un désir dont l'objet
reste cependant à sa portée.
* 154 OHADA :
Présentation Générale du 31 mai 1999, Secrétariat
de l'OHADA, p. 3.
* 155 Gérard
CHARREAUX, « Le rôle de la confiance dans le système de
gouvernance des entreprises », in Economie et Sociétés,
Série S.G., n°8-9, p.47-65,1998.
* 156 Anne TEZENAS DU
MONTCEL, « Paix sociale, cohésion interne, arme
anti-OPA : l'entreprise a tout à y gagner... et les
salariés », in Enjeux- Les Echos, Décembre 1998.
* 157 Anne TEZENAS DU MONTCEL,
ibidem.
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