CHAPITRE 3
EXpLoiTATioN DEs REsuLTATs
Les résultats des différentes méthodes
d'obtention des flux turbulents de chaleur (chaleur sensible et latente) et
dans le sol sont exposés dans ce chapitre. Dans un premier temps, nous
avons comparé les résultats des deux méthodes d'obtention
du flux de chaleur a la surface du sol (G) entre elles. Nous avons ensuite
étudié l'évolution intra-saisonnière et l'influence
du couvert végétal sur ce paramètre. La
qualité des données recueillies par le
système d'eddy covariance sera
évaluée a la fois par le test de classification selon la
procédure proposée par [32] ainsi que par
l'analyse du bilan
énergétique.
A partir de ces réflexions sur la
qualité des données, nous pourrons discuter de la
comparaison des flux d'évapotranspiration mesurés sur les deux
types de couverts végétaux.
3.1 Le flux de chaleur a la surface du sol
Le flux de chaleur a la surface du sol G, est une composante
du bilan d'énergie que l'on ne peut pas
négliger en climat tropical. En zone semi-aride
par exemple sur un sol nu, il représente plus de 40% du
rayonnement net [12]. Il est donc nécessaire de
l'évaluer avec précision pour garantir une bonne
estimation de la différence Rn-G. Le problème principal
réside dans son estimation a la surface. Généralement, les
mesures disponibles ne sont pas faites a la surface, par
conséquent on observe souvent une sous estimation et un
décalage temporel des maxima de G du a la diffusion dans la
terre [13].
Sur nos stations d'étude, nous disposons de
capteurs qui mesurent la température du sol aux profondeurs
10, 20 et 40cm. Une bonne connaissance de ces profondeurs s'avère
nécessaire pour pallier aux problèmes de
décalage temporel et de sous estimation du flux de chaleur
à la surface. Le décalage temporel est très
pénalisant pour la fermeture du bilan d'énergie car
celui-ci amène au lever et au coucher du soleil des
pics irréalistes de G de plusieurs dizaines de
W.m-2. Toutefois, il n'est pas évident de
définir la position de la surface de façon
précise le sol réel n'est pas strictement plat et une
érosion peut se faire au cours du temps. La planéIté de la
surface, le couvert végétal etc... peuvent induire des
erreurs dans le calcul du coefficient de diffusion. D'autre part, le calcul des
grandeurs en surface dépendent des gradients
verticaux de température et donc de la distance entre les capteurs et la
surface. Enfin, il faut noter que l'estimation de la distance entre
deux capteurs est a priori plus précise que l'estimation de
la profondeur absolue de chaque capteur. Pour tenir compte de ces
incertitudes sans dégrader les résultats, nous avons
essayé d'estimer les profondeurs des capteurs a partir des
séries de mesures de températures dans le sol. Deux
critères sont utilisés pour estimer la profondeur des deux
capteurs z1 et z2 :
1) Nous vérifions le calage temporel entre
la température estimée en surface par la méthode des
harmoniques et la 'température infrarouge'
calculée a partir des mesures des rayonnements incident et
réfléchi grandes longueurs d'onde
(Eq 3.4) . Ce critère permet d'estimer z1, la profondeur du
premier capteur et donc de corriger les défauts
d'installation, de tassement du sol, de processus de changement
d'état du sol non pris en compte dans l'équation de
chaleur. La conséquence de ce calage temporel
entre la température de surface et la température
infrarouge est que le rayonnement net et le
flux de chaleur a la surface seront aussi phasés.
2) Une fois G et Rn phasés temporellement, nous
faisons varier la profondeur relative des deux capteurs en conservant le
rapport z1/Liz avec (Liz = z2 - z1) de
sorte que le flux de chaleur a la surface du sol garde le
même phasage et que durant la nuit, il soit
approximativement égal au rayonnement net
nocturne. Cette procédure est appliquée sur la
période sèche pendant laquelle, la nuit les flux
turbulents sont nuls.
3.1.1 Comparaison de la temperature de surface et de la
temperature infrarouge
Les émissions radiatives des corps terrestres et
atmosphériques appartiennent au domaine des
grandes longueurs d'onde. Le flux radiatif total
émis par un corps noir correspond a l'intégrale de la
loi de Planck (Eq 3.1) pour l'ensemble des longueurs
d'onde.
Flux radiatifs emis = óT4
(3.1)
Oi ó est la constante de Stefan - Boltzmann
(5,67.10-8W.m-2K-4)
et T est la température du corps en degré Kelvin.
L'énergie totale émise par tout corps, proportionnelle
a celle d'un corps noir, est fonction de son facteur d'émission (ou
émissivité)c. Pour un corps
quelconque, l'équation (3.1)
s'écrit alors :
Flux radiatifs emis = cóT4
(3.2)
Le rayonnement JR qui arrive au sol est
absorbé, a proportion du facteur d'absorption (î) de la
surface. Selon la loi de Kirchhoff, les corps d'absorption élevée
sont aussi de bons émetteurs, et (î = c) [331.
La plupart des corps terrestres se comportent quasiment comme des
corps noirs. Une part du rayonnement de grandes
longueurs d'onde incident (Lwin) est réfléchie par le
sol. Ainsi, si cs est l'émissivité de la
surface, le rayonnement de grandes longueurs
d'onde partant de la surface (Lwout), mesuré sur le terrain,
est la somme des rayonnements émis et réfléchis
par la surface :
Lwout = ócsT 4 IR + (1 -
cs)Lwin (3.3)
TIR est la température de surface
déterminée a partir des mesures de Lwin et Lwout
et nommée 'Température infrarouge '.
cs = 0, 95 [341. La température
infrarouge TIR est égale a
:
TIR = (Lwout - (1 -
cs)Lwin
ócs
|
)1/4 (3.4)
|
Nous rappelons qu'en raison de l'incertitude sur
les valeurs de cs et de celle des mesures des
pyrgéomètres, cette méthode
d'évaluation de la température infrarouge n'est pas
d'une très grande précision pour la valeur de la
température, mais renseigne bien sur la
dynamique du cycle journalier.
La figure (3.1) montre l'évolution
temporelle des températures de surface calculées en prenant pour
profondeurs z1 9 et 10cm avec z2 contante et égale a 20cm et
la température infrarouge calculée a partir de la
formule définie ci-dessus.
On voit bien que la température de surface
Ts (z1 10cm et z2=20cm) est mieux phasée avec la température
infrarouge que Ts(z1=9cm et z2=20cm). Bien
qu'en fin de journée Ts (z1=10cm et z2=20cm) décroit
plus rapidement que TIR. L'objectif poursuivi
étant d'arriver a caler temporellement Tsurface et TIR, nous ne
nous attardons pas sur les différences entre
les variations des deux températures . z1 = 10
cm est confirmée a travers ce calage sur les données
de Janvier. En Juillet, le cycle de rayonnement
grandes longueurs d'onde est très affecté
par les pluies et les nuages et la comparaison a moins de sens. Pour
le mois de Novembre, il semble que le modèle retenu de sol
homogène ne soit pas correct. En effet a cette
période, les herbes sont brülées sauf a l'endroit de la
station oii elles sont simplement coupées. Malheureusement celles-ci
n'ont pas été ramassées et elles créent une couche
d'herbe sèche qui maintient le sol a l'ombre. Ainsi, les
températures et les flux calculés ont une amplitude faible et
déphasée par rapport aux mesures de TIR et aux flux de
rayonnement.
FIG. 3.1 Evolution temporelle de la temperature
infrarouge et des temperatures de surface calculees a partir des
mesures aux profondeurs z1= 9 et 10cm a Nalohou en Janvier (haut) et en Juillet
(bas).
FIG. 3.2 Evolution temporelle de la température
infrarouge et des températures de surface calculées a
partir des mesures aux profondeurs z1= 9 et 10cm a Nalohou (Novembre).
Quant au calage de Rn et G, nous avons
procédé de la même façon mais cette fois
en conservant z1/Äz. Nous avons finalement
retenu z2 17cm pour l'égalité entre Rn et G la nuit.
La même méthode a été exploitée sur la
station de Bellefoungou. Notons que sur cette station,
nous ne disposons pas de pyrgéomètres (pas
de mesures de Lwin et Lwout). Nous avons pris les mesures de
Lwin de la station de flux (Bira) située aux environs (5km) de
celle de Bellefoungou en faisant l'hypothèse
que le rayonnement solaire incident est
pratiquement le même sur les deux stations.
FIG. 3.3 Evolution du rayonnement net et du flux de
chaleur a la surface du sol a Nalohou pendant trois jours en Janvier.
FIG. 3.4 Evolution du rayonnement net et du flux de
chaleur a la surface du sol a Bellefoungou pendant trois jours en
Janvier.
On a constaté que le
décalage temporel entre Rn et G évolue au cours de
l'année. En Novembre, G met plus de temps a décoller. La surface
du sol commence par se chauffer vers 10h au moment oi le rayonnement
avoisine les 400W.m-2. En Juillet, le même constat
est fait mais cette fois-ci en fin de journée oi le sol se refroidit
très lentement. Par contre en Janvier, le pic du rayonnement
net et le flux de chaleur a la surface du sol s'observent a la même heure
(figure 3.3 et 3.4). z2 17cm.
FIG. 3.5 Evolution du rayonnement net et du flux de
chaleur a la surface du sol a Nalohou pendant trois jours en Novembre (haut) et
en Juillet (bas).
3.1.2 Comparaison des flux de chaleur a la surface du sol
calculés avec la méthode des harmoniques et la
formulation de la FAO
- Station de Nalohou
Nous allons comparer le flux de chaleur a la surface du sol en
Janvier oi la surface de Nalohou est nue, calculé a partir de la
méthode des harmoniques avec la formulation de la FAO
(section 1.3.2).
FIG. 3.6 Evolution temporelle des flux de chaleur a la surface du
20 au 23 Janvier 2008 sur la station de Nalohou
Nous remarquons que les flux de chaleur
harmonique et de la FAO sont très bien phasés avec Rn
de part sa formulation. Le problème majeur réside dans le fait
que le flux de chaleur calculé avec la formulation de la FAO
soit toujours pratiquement la moitié de celui estimé
par la méthode des harmoniques. On note un écart de
100W.m-2 entre les maxima de ces deux grandeurs.
La nuit, le flux de chaleur de la FAO est plus important que
G(harmonique), mais la différence observée entre les
valeurs minimales nocturnes est relativement faible . La nuit, la surface du
sol restitue toute la chaleur qu'elle a accumulée dans la
journée; c'est elle qui joue le rOle de
'pourvoyeur' d'énergie. Nous tirons de la
comparaison entre G(FAO) et G(harmonique) que la
formulation empirique de la FAO sous estime les flux diurnes pour
les sols chauds et secs de moitié. Dans la suite du document, nous
n'utiliserons plus que la méthode harmonique pour
estimer G.
3.1.3 Comparaison des flux de chaleur a la surface a Nalohou et a
Bellefoungou
Dans cette section, nous comparons les cycles diurnes
moyens de G (harmonique) a Nalohou et a
Bellefoungou pour les 3 sous périodes.
- Sous pen ode sèche
La figure (3.7) montre pour la sous période
sèche que le flux de chaleur a la surface a une allure en
cloche avec des valeurs positives le jour et négatives la
nuit. Les valeurs positives désignent un gain pour
la surface et les valeurs négatives une perte pour la
surface. G a Nalohou atteint son maximum 170W.m-2 a 13h
alors que la surface de Bellefoungou se réchauffe
plus rapidement et atteint un maximum très voisin
(172W.m-2) mais, une heure plus tOt 12h (figure
3.7).
Dans l'après midi, la quantité
d'énergie reçue par la surface de
Bellefoungou décroIt plus rapidement que celle de
Nalohou, et ses valeurs nocturnes sont plus basses entre 0h et 7h
(Bellefoungou). On note une très faible différence des
flux de surface sur ces deux stations durant cette sous
période; le coefficient de corrélation est de 93%.On
peut enfin noter un léger infléchissement du
cycle diurne en matinée et en soirée a
Bellefoungou dü a un effet
d'ombrage sur le capteur qui est
situé en-dessous de la cime des arbres avoisinants.
FIG. 3.7 Cycle journalier moyen de G
harmonique a Nalohou et a Bellefoungou (sous
période sèche).
- Sous période humide
Durant cette période, le flux de chaleur à
Nalohou est plus faible qu'à Bellefoungou. La
surface du sol de Bellefoungou se refroidit toujours plus vite
que celle de Nalohou, la nuit la jachère humide (Nalohou)
dégage plus de chaleur que la
forêt claire de Bellefoungou. Le maximum observé en
forêt est de 168W.m-2 et 89W.m-2
sur la jachère. On note une corrélation de 91,7% entre les deux
flux.
FIG. 3.8 Cycle journalier moyen de G
harmonique a Nalohou et a Bellefoungou (sous
période humide).
- Sous peniode iritenmCdiaine
La figure (3.9) montre le cycle journalier
moyen du flux de chaleur a la surface du sol a Nalohou et a
Bellefoungou.
On observe un décalage d'environ 2h entre les 2
maxima.
Le flux de chaleur observé a Nalohou est beaucoup plus
tardif que celui de Bellefoungou, ce qui se
traduit par la faible corrélation obtenue entre les deux stations 60%.
L'écart observé pendant cette sous période est plus de
100W.m-2 269 W.m-2 a
Bellefoungou et 115W.m-2 a Nalohou. Le
décalage temporel et la différence obtenue sont
liés notamment a la couverture végétale de
Nalohou pendant cette période. En Novembre, nous avons de la
jachère herbeuse sèche coupée qui recouvre la
surface du sol. Elle empeche le rayonnement solaire d'atteindre
directement la surface du sol et atténue donc la
quantité de chaleur qui servirait a chauffer la
surface du sol. Le signal obtenu a la surface du sol est
retardé et par conséquent la réponse du sol
(flux de chaleur a la surface du sol) est aussi retardée. Ce
qui explique le faible taux de corrélation obtenu.
La jachère herbeuse sèche joue donc le rOle d'amortisseur entre
la surface du sol et l'atmosphère. Par conséquent, la
valeur de G obtenue a Nalohou pendant cette sous période est donc sous
estimée par rapport a un sol oi les pailles auraient été
brülées.
FIG. 3.9 Cycle journalier moyen de G
harmonique a Nalohou et a Bellefoungou (sous
période intermédiaire).
Conclusion : On retient de cette comparaison que la
formulation de la FAO est bien phasée mais sous estime nettement G pour
les sols chauds et secs. La couverture végétale
influence le flux de chaleur a la surface du sol, elle joue le rOle
d'amortisseur entre l'atmosphère et la surface du sol. On a
remarqué que le flux de chaleur a la surface du
sol (G) varie beaucoup. La surface de Bellefoungou
dégage plus la chaleur la nuit que
celle de Nalohou. Ceci est lié a la forte réflexion du sol
observée sur cette dernière.
3.2 Les flux turbulents de chaleur H et LE
Dans cette partie, nous présentons les résultats
des tests statistiques effectués sur les flux eux
mêmes. Les résultats des sous périodes définies
précédemment sont d'abord présentés pour
chaque station. Ensuite, nous procédons a une
analyse de la qualité des données.
3.2.1 Contrôle de qualité
La qualité des données de flux est
vérifiée afin de s'assurer de la validité de la
théorie utilisée pour le dépouillement des données
d'eddy corrélation dans la zone soudanienne. Pour ce faire,
des seuils sont établis pour chacun des tests utilisés (voir
chapitre 1). Foken et al. (2004) ont décrit les principaux tests pouvant
être utilisés pour le contrOle de qualité [301.
Les tableaux suivants illustrent les résultats obtenus (pour
chaque sous période) pour les tests de
vérification.
Nous rappelons que :
Classe 0 : données de très bonne
qualité haute, utilisables pour une recherche fondamentale.
Classe 1 : données a qualité modérée
utilisables pour une étude du bilan.
Classe 2 : données de mauvaise
qualité.
A Nalohou, plus des deux tiers des données
qualifiables (289 pour H et 313 pour LE) appartiennent a la classe
0; seulement 11% de H et 7% de LE sont de mauvaise
qualité.
A Bellefoungou, au contraire, sur un total de 268
données qualifiables c'est-a-dire les données pour
lesquelles H >10W.m-2, 70% sont de mauvaise
qualité (tableau 3.1).
TAB. 3.1 - Classification des données de flux: sous
période sèche
|
Nalohou H % LE %
|
Bellefoungou H %
|
Classe 0
|
66 74
|
10
|
Classe 1
|
22 18
|
19
|
Classe 2
|
11 7
|
70
|
Total données qualifiables
|
289 313
|
268
|
En saison humide (tableau 3.2), la qualité des
données de Bellefoungou est meilleure par rapport a celle
observée en saison sèche (tableau 3.1). On note :
- 45% (H) et 50% (LE) appartiennent a la classe 0.
- 27 % (H) et 18% (LE) appartiennent a la classe 1.
Plus de 80% (H) et environ 68% (LE) des données
qualifiables sont de bonne qualité.
Par contre a Nalohou, on note une baisse du taux des
données de la classe 0.
- 50% (H) et 53% (LE) pour la classe 0. - 24% (H) et 13%
(LE) pour la classe 1.
TAB. 3.2 - Classification des données de flux: sous
période humide
|
Nalohou H % LE %
|
Bellefoungou H % LE %
|
Classe 0
|
50
|
53
|
45
|
50
|
Classe 1
|
34
|
13
|
27
|
18
|
Classe 2
|
15
|
32
|
26
|
31
|
Total données qualifiables
|
294
|
390
|
233
|
276
|
En Novembre, la qualité est plus ou moins bonne
pour LE. Environ 86% de H et 63% de LE sont de qualité haute
et modérée.
TAB. 3.3 - Classification des données de flux: sous
période intermédiaire
|
Nalohou H % LE %
|
Classe 0
|
63
|
32
|
Classe 1
|
22
|
31
|
Classe 2
|
13
|
36
|
Total données qualifiables
|
305
|
432
|
Récapitulatif
Sur les trois sous périodes, on a constaté
que sur la jachère herbeuse les 2/3 des données sont
de bonne qualité (classes 0 et 1). En saison sèche
c'est-à-dire en Janvier la qualité est très
bonne, environ 90% pour H et 93% pour LE. En Novembre la
qualité des données de LE est très
partagée, 1/3 pour chaque classe. Pendant cette
période, on a obtenu le taux le plus élevé (36%) des
données de mauvaise qualité pour LE.
A Bellefoungou, en saison humide, la
qualité est meilleure par rapport à la saison
sèche. La mauvaise qualité obtenue en Janvier est
liée principalement à la hauteur du mat sur lequel
sont installés les capteurs de mesures d'eddy
corrélation. En effet, au cours la période de Septembre 2007
jusqu'en Juin 2008, l'anémomètre sonique
était placé au sein de la canopée (17m du sol), toutes les
mesures étaient donc relatives à la canopée . La
végétation empêche la turbulence de l'air de
bien se développer. Mais depuis l'installation du Licor en Juin 2008, le
mat reliant l'anémomètre sonique + Licor a
été placé à 18m du sol.
3.2.2 Analyse de la qualité des
données
Les figures 3.10 et 3.11 illustrent le
cycle journalier et la qualité des flux de chaleur
sensible et latente au cours des trois sous périodes à Nalohou et
à Bellefoungou.
La nuit, les flux de chaleur sensible sont très faibles
(inférieurs à 10 W.m-2), les flags
de qualités ne peuvent être attribués.
Lorsqu'ils le sont, ils sont de mauvaise qualité
car l'atmosphère est très proche de la neutralité.
On distingue trois périodes dans la
journée le matin (7h-8h30) oi la qualité est
moyenne ou mauvaise (30% des données de bonne
qualité), le restant de la journée (8h30-17h) oi
les
flux sont de bonne qualité (80%), puis un
déclin en fin de journée (17h-18h) mais avec une
qualité légèrement meilleure
que celle du matin (50% de haute qualité). Le
matin et le soir sont des périodes de transition entre une
atmosphère turbulente la journée et stable la nuit, les
performances des capteurs en sont affectées. On constate
également une qualité globale
meilleure pour H que pour LE. Comme on l'aperçoit
sur les figures ci-dessous , les données de LE sont de bonne
qualité en milieu de journée quand les flux
de H sont les plus importants et la couche limite est bien
développée. Remarquons qu'à
Bellefoungou, en saison sèche entre 11h et 17h on a
que 20% de flux de bonne qualité.
c)
e)
a)
c)
FIG. 3.10 Cycle journalier et
qualité de LE et de H durant les sous périodes
sèche (a et b), humide (c et d)et intermédiaire (e et 1) a
Nalohou.
FIG. 3.11 Cycle journalier et
qualité de LE et de H durant les sous périodes
sèche (c) et humide (a et b) a Bellefoungou.
3.3 Calcul du bilan d'énergie
La qualité des données de flux peut
être aussi vérifiée par l'analyse du bilan
énergétique [35; 361. Le test de
la fermeture du bilan énergétique
implique la comparaison des flux d'énergie
mesurés par le système de covariance de turbulences a
des flux mesurés indépendamment (rayonnement net et le
flux de chaleur ala surface du sol). Pour vérifier le
degré de fermeture, il suffit de vérifier
l'égalité entre les deux membres de
l'équation du bilan
énergétique soit :
Rn -- G = H + LE
oi H est le flux de chaleur sensible et LE celui de chaleur
latente, tous deux mesurés par le système de
covariance de turbulences, Rn le rayonnement net et G le flux de
chaleur a la surface du sol.
- Elimination des données douteuses
Les données utilisées présentent
quelques aberrations dues au mauvais fonctionnement des
appareils (par exemple faible tension de batterie) en Novembre et en Juillet.
Ces défauts de fonctionnement affectent considérablement les
mesures d'eddy corrélation notamment en début de
journée - entre 8h et 10h, en fin de journée - entre 17h et 18h
et quelques fois la nuit entre 1h et 3h. En Janvier, on
relève a Nalohou une période (14 au 17 janvier 2008)
oi la vitesse du vent a dépassé
30m.s-1. Toutes ces valeurs ont été
supprimées. Remarquons aussi que nous n'avons
pas tenu compte des données obtenues les moments oi il y a eu
pluie.
3.3.1 Variabilité temporelle du bilan
d'énergie a Nalohou
Les figures 3.12 a, b et c illustrent le
comportement moyen horaire des termes du bilan
d'énergie sur les 3 sous périodes d'étude. Le
rayonnement net impose son allure a H, G et LE. Elle est
caractéristique d'un ciel sans nuage. Toutefois,
le rayonnement net moyen maximal est assez faible
(450W.m-2 en saison sèche) qui est
caractéristique d'une surface chaude qui perd
beaucoup d'énergie par rayonnement
infrarouge.
- En saison sèche, le flux de chaleur latente
(évapotranspiration) est extrêmement faible . Le maximum
observé est de 5W.m-2. Quant au flux de chaleur
sensible, il est pratiquement égal au double du
flux de chaleur dans le sol. Le maximum observé est de
450W.m-2, 315W.m-2 et
170W.m-2 respectivement pour Rn, H et G.
- En saison des pluies (figure 3.12.c), le
rayonnement net fluctue beaucoup avec l'ennuagement.
Toutefois, le maximum observé est supérieur a celui
observé en saison sèche. Le ciel plus clair, le sol plus froid et
l'albédo plus faible produisent un Rn plus important. Enfin, le 'retard'
observé au niveau du maxima du rayonnement net montre
que les nuages sont présents plutOt en
matinée. Le maximum (560W.m-2) est atteint entre 13h
et 14h. La chaleur latente est importante durant cette période
(233W.m-2); H et G sont presque du
même ordre de grandeur. Leur maxima est de
111W.m-2 et 89W.m-2.
- En Novembre (figure 3.12.b), un mois après
la dernière pluie, le rayonnement net est du même ordre
de grandeur qu'en saison des pluies
(569W.m-2). Par contre, le flux de chaleur latente a
beaucoup diminué (63W.m-2) au profit du flux de
chaleur sensible (271W.m-2). Le flux de chaleur a la
surface du sol augmente bien plus lentement (115
W.m-2).
FIG. 3.12 Cycle journalier horaire moyen de
Rn, H, LE et G en Janvier (a), en Novembre (b) et en Juillet (c) a Nalohou.
Pour comparer les différents flux sur les
différentes sous périodes, nous avons exprimé
chaque terme du bilan en % du rayonnement net
(Figure 3.13). On constate donc a Nalohou :
- En Janvier (figure 3.13.a), G représente
pratiquement 80% du bilan la nuit, LE est toujours faible
inférieur a 5%. Pendant la journée, le pourcentage de
H augmente de 40 a 80% tandis que celui de G diminue de
40 a 10%.
- En Juillet (figure 3.13.b), H varie peu durant le
cycle nycthéméral, environ 20 a 25% de Rn.
LE dans la journée passe de 60 a 80% et la nuit il reste
inférieur a 10%. G est de 25% dans la journée.
- En Novembre (figure 3.13.c), dans la
journée le pourcentage de H augmente de 30 a 70%
tandis que celui de LE diminue de 30 a 10%. G est sous estimé
pour cause de mauvaise estimation pendant cette période (herbes
couchées ).
FIG. 3.13 Pourcentage de H, LE et G par rapport a
Rn en Janvier (a), Juillet (b) et en Novembre (c) a Nalohou.
Les périodes sèche et intermédiaire sont
marquées par un dégagement
nocturne important de la chaleur par le sol. Au cours des mêmes
périodes, le flux de chaleur sensible est le terme
prépondérant du bilan, quant à la chaleur
latente elle passe de sa haute valeur en saison pluvieuse à une
moyenne en Novembre et devient extrêmement faible en saison
sèche.
Il est à noter enfin le bon phasage temporel
entre Rn et G obtenu en Janvier et en Juillet. Ce n'est pas le cas en Novembre
pour cause de mauvaise estimation de G (voir figure 3.9). A
contrario, les flux turbulents (H et LE) perdurent plus longtemps en
soirée et causent des rapports H/Rn et LE/Rn divergents
lorsque le rayonnement net s'annule le soir. C'est
également le cas pour LE/Rn le matin ce qui
signifie que la végétation
commence à fonctionner dès que le soleil se
lève. A ce moment de la journée, le rayonnement
courtes longueurs d'onde est disponible alors que le
rayonnement net passe des valeurs négatives
à des valeurs positives.
3.3.2 Fermeture du bilan d'energie a Nalohou
Nous avons comparé la répartition de la fraction
d'énergie disponible à la surface du sol
c'est-à-dire Rn-G et celle ayant servi à la convection
et à l'évaporation (H+LE). Pour cela, nous avons tracé le
nuage de corrélation et calculé le coefficient de
détermination entre Rn-G et H+LE à partir des moyennes
de chaque heure sur les quinze (15) jours de
chaque sous
période (Figure 3.14).
Dans les trois cas, la comparaison a mis en évidence
une relation très peu dispersée et linéaire entre Rn-G et
LE + H.
En Janvier et Juillet, plus de 98% de la variance de (H+LE)
est expliquée par (Rn-G). En Novembre, on note une dispersion
plus accentuée autour de la première bissectrice, le coefficient
de détermination (R2) de 94%. La pente obtenue en
Novembre était prévisible. Ce pourcentage est
lié a la qualité des données de flux turbulents
de chaleur observée pendant cette période et
également a la répartition des flux de chaleur a la
surface du sol. En effet, nous avons montré dans la section (3.1),
que le flux de chaleur a la surface du sol réel est sous
estimé dans la zone de mesure de G oi l'herbe n'est pas
brülée mais coupée. Aussi on constate qu'en
Janvier, on obtient une bonne fermeture du bilan d'énergie
avec une pente de 1,07 et une légère surestimation des
flux turbulents. En Juillet, la pente de la droite de
régression est 0,77. La différence entre les deux
saisons étant essentiellement le flux de chaleur latente, il est
probable que l'estimation de ce terme soit sous estimé en
Juillet. En Novembre, la pente de la droite de régression est
0,68. Cette mauvaise fermeture est causée d'une part par un flux dans le
sol sous estimé et déphasé et d'autre part au flux de
chaleur latente qui est également sous
estimé. La sous estimation du flux de chaleur latente provient du fait
que les mesures de w' et de
q' sont réalisées par 2 capteurs
qui ne sont pas parfaitement colocalisés.
Dans la littérature, plusieurs auteurs ont fait cas de
cette situation. Foken et al. (2006) ont montré que la non
fermeture du bilan d'énergie est liée aux erreurs de
mesure, particulièrement celle de la technique
d'eddy corrélation qui cause une sous estimation
des flux turbulents [371. Egalement, Kukharets et al. (2000) ont
montré que cette non fermeture est liée au
stockage d'énergie qui s'effectue entre
la surface du sol et les différents capteurs de mesure qui ne
se trouvent pas a la même hauteur du sol [381. Panin et al. (1998)
pensent que cette non fermeture est liée a
l'hétérogénéIté de la surface du
sol [391. D'autres auteurs ont supposé que les
hétérogénéItés du sol produisent
des turbulences a de plus grandes échelles de temps
que les turbulences mesurées par le système
d'eddy corrélation. Les causes de non fermeture du bilan pour
nos données sont certainement une combinaison de ces trois raisons.
a)
c)
e)
FIG. 3.14 HH-LE en fonction de Rn-G en Janvier (a), Juillet (b)
et en Novembre (c) a Nalohou.
3.4 Variabilité spatiale des flux turbulents de chaleur
3.4.1 Gas du flux de chaleur sensible
La comparaison des flux de chaleur sensible en saison
sèche montre un écart de 44W.m-2 entre les
flux de chaleur sensible à Nalohou et à Bellefoungou.
Cet écart est certainement du au gradient
thermique en surface c'est-à-dire la différence entre
la température de surface et la température de l'air ambiant
qui serait plus importante sur la jachère qu'en
forêt. En particulier, la température de la canopée de
Bellefoungou est certainement plus faible que la
température du sol à Nalohou à cause des processus de
transpiration. La différence relevée entre ces flux
s'explique aussi par le fait que l'air est plus humide et
plus dense en forêt ce qui influe sur le développement
de la turbulence. Cela est confirmé par la figure (3.15) oi
les flux de chaleur sensible la nuit sont nettement négatifs
à Bellefoungou, ce qui est
caractéristique d'une couche de surface stable. Le couvert
arboré réduit la convection au-dessus de la surface du sol, elle
se fait au-dessus de la canopée sur une épaisseur bien plus
importante qu'au dessus des herbacées de la
jachère.
FIG. 3.15 Cycle journalier de H a Nalohou et a
Bellefoungou (sous période sèche).
En saison humide (figure 3.16), le flux de chaleur
sensible diurne est plus important en forêt. Cela est causé par un
effet de rugosité plus fort à Bellefoungou
alors que les températures de couvert sont sensiblement
identiques en cette saison. Le sol reste frais (pas de
gradient de température entre la surface du
sol et l'air ) sur les deux sites, on n'a donc pas de flux nocturne. La forme
du flux obtenue a Nalohou entre 12h et 14h traduit l'effet de
passage des nuages qui est très
marqué sur la jachère. Une comparaison sur une
durée plus longue nous permettra de mieux apprécier la
variabilité de ce paramètre. En Novembre 2007, la station de flux
de Bellefoungou avait un problème de batterie, ce
qui fait qu'on ne dispose pas de données sur cette
période pour comparaison avec Nalohou.
FIG. 3.16 Cycle journalier de H a Nalohou et a
Bellefoungou (sous période humide).
3.4.2 Gas du flux de chaleur latente
La figure 3.17 traduit le cycle
journalier horaire moyen du flux de chaleur latente a Nalohou et a
Bellefoungou en Juillet. On constate que
l'évapotranspiration est plus importante en forêt que
sur la jachère pendant la journée. Dans la nuit,
l'évaporation est pratiquement nulle sur les deux
stations.
FIG. 3.17 Cycle journalier de H a Nalohou et a
Bellefoungou (sous période humide).
La jachère commence plus tot son évaporation le
matin. Les herbacés semblent être plus réactifs a
l'éclairement que la végétation
haute. Pour la forêt la mise en route est plus lente mais la
dynamique est plus importante. En Janvier 2008, le Licor
(qui mesure le flux de chaleur latente) n'était pas encore
installé, nous n'avons donc pas de mesure de LE sur cette période
ni en Novembre.
3.5 Conclusion
Nous avons étudié précisément
chaque terme de l'équation du bilan
d'énergie de surface. Le calcul des flux turbulents est celui
qui demande le plus d'attention. Le flux de chaleur a la surface du
sol a été réalisé par la méthode des
harmoniques a partir des mesures de températures du sol en
prenant un soin particulier aux profondeurs de mesures. Nous avons
montré a travers la comparaison du flux de chaleur harmonique
et celui de la FAO que la formulation de [141 n'est pas
adaptée aux sols chauds et secs. L'influence du couvert
végétal sur ce paramètre est aussi a noter. La
couverture du sol joue un rOle d'amortisseur entre la surface du sol et
l'atmosphère.
Les flux turbulents de chaleur sont calculés par la
méthode d'eddy corrélation. La
qualité
de ces données a été
vérifiée selon deux approches le schéma de [321 et la
fermeture du bilan d'énergie. La qualité
des données est relativement bonne pendant les trois sous
périodes. Le test de fermeture du bilan d'énergie est
aussi correct pour la sous période sèche. Pour la sous
période humide, les flux de chaleurs latentes sont probablement sous
estimés, et pour la sous période intermédiaire le flux a
la surface du sol est faussé par le fait qu'une
litière a été laissée sur le sol a l'endroit des
capteurs. Les différents coefficients de détermination obtenus
entre la quantité d'énergie disponible et
celle ayant servi a la convection et a l'évaporation a
Nalohou sont satisfaisants lorsque les données aberrantes
sont filtrées.
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