THEME :
MOBILISATION DE L'EPARGNE AU SENEGAL : CAS DES SFD
ET DES AREC
INTRODUCTION
1. LES FACTEURS DETERMINANTS DE L'EPARGNE AU
SENEGAL
1.1 Définition
1.1.1 Une finalité
1.1.2 Une attitude volontariste
1.2 Approche théorique
1.3 Description de l'évolution des
variables
1.3.1 L'inflation
1.3.2 Le taux d'intérêt
réel
1.3.3 Le revenu
1.3.4 La variable démographique
1.3.5 L'épargne extérieure
1.3.6 Le taux de change effectif réel
2. La situation de l'épargne
intérieure
3. Les systèmes d'épargne au
Sénégal
3.1 L'épargne formelle
3.1.1 La mobilisation de l'épargne par les
SFD
3.1.1.1 Définition conceptuelle
3.1.1.2 Vocabulaire utilisé
3.1.1.3 Evolution des FSD et cadre
réglementaire
3.1.1.3.1 Evolution des SFD
3.1.1.3.2 Cadre réglementaire
3.1.1.4 Présentation des SFD
3.1.1.4.1 Typologie des SFD au
Sénégal
3.1.1.4.1.1 Les Mutuelles d'Epargne et de
Crédit (MEC)
3.1.1.4.1.2 Les Groupement d'Epargne et de
Crédit
3.1.1.4.1.3 Les Structures ou Organisations sous
convention Cadre
3.1.1.4.2 Activités, produits et services de
l'épargne
3.1.1.4.2.1 Les activités
3.1.1.4.2.2 Les produits et services de
l'épargne
a) L'épargne volontaire
b) L'épargne obligatoire
c) L'épargne liée à un service
donné
3.2 Le système informel de
l'épargne
3.2.1 L'épargne informelle : une
épargne associative
3.2.2 Les limites de l'épargne
informelle
4. Recommandations
4.1 Diversifier les produits de collecte de
l'épargne domestique
4.2 Raffermir la crédibilité et la
sécurité des moyens de paiement
4.3 Dynamiser le marché régional des
capitaux
4.4 Adoption d'une politique d'augmentation des
revenus
4.5 Maîtrise de l'inflation
4.6 Politique de réduction du taux de
dépendance économique
4.7 Politique d'incitation à l'épargne
extérieure
4.8 Réorganisation ou articulation entre le
secteur financier formel et le secteur financier informel
CONCLUSION
INTRODUCTION
La question sur la mobilisation de l'épargne au
Sénégal se pose avec beaucoup d'acuité comme d'ailleurs
dans tous les pays en voie de développement.
Le développement économique suppose un
investissement dans le système productif. L'investissement implique au
préalable l'existence d'une épargne clef de la croissance.
L'épargne continue de financer une bonne partie de l'investissement dans
la plupart des pays en voie de développement. En effet, une
épargne abondante et régulière permet à un pays de
réaliser une croissance équilibrée. L'épargne au
Sénégal est caractérisée par un niveau de
mobilisation très bas donc insuffisante pour alimenter les
investissements.
Cette situation est pour une grande partie due à
plusieurs facteurs liés à un ensemble de variables explicatifs
que nous aborderons dans notre étude.
L'évolution du revenu des populations
sénégalaises est très faible. Le taux de croissance
démographique soutenu a un impact négatif sur le revenu des
ménages.
Dans un environnement macroéconomique très
instable, l'inflation n'est pas maîtrisée. Le taux d'inflation
élevé freine le développement d'une épargne
abondante.
Le taux d'intérêt réel, qui joue un
rôle de contrainte de liquidité lorsqu'il est élevé,
influence largement l'épargne domestique.
L'impact de l'épargne extérieure sur
l'épargne nationale produit un effet de revenu positif. Or, depuis une
longue période, cette épargne extérieure a
été négative au Sénégal. Le taux de change
effectif réel a aussi un impact non moins significatif sur
l'épargne nationale.
Nous avons ensuite introduit dans notre étude la
situation de l'épargne intérieure au Sénégal.
L'insuffisance de l'épargne domestique se traduit par un
déséquilibre significatif de toutes les balances de paiements
courants.
Au Sénégal, malgré la cohabitation du
secteur bancaire classique avec les institutions financières non
bancaires tels les Systèmes Financiers Décentralisés et le
secteur financier informel, le taux d'épargne est
particulièrement faible.
Il sera aussi question de traiter l'évolution de
l'épargne intérieure de 1970 à 2000.
Il est nécessaire de scripter les différentes
formes d'épargne au Sénégal. L'épargne au
Sénégal forme deux sphères structurées selon deux
logiques différentes :
ü Une sphère officielle, légale
régie par une réglementation : l'épargne formelle.
ü Une sphère informelle échappant à
toute contrainte fiscale et réglementaire et touchant une partie
importante des populations, surtout les plus défavorisées :
l'épargne informelle.
Cette situation est caractérisée par un dualisme
financier au sens large comme la juxtaposition des secteurs formel et informel
en matière de financement.
L'épargne formelle concerne les banques, les
institutions financières, les instituions de micro finance et les
sociétés d'assurance.
Nous allons davantage l'accent sur le rôle joué
par les Systèmes Financiers Décentralisés dans la collecte
de l'épargne au Sénégal.
Ces institutions de micro crédit connaissent un essor
fulgurant. Elles sont caractérisées par leur facilité
d'accès au crédit qui, jusque là, était très
difficile avec les banques.
Le système informel regroupe les associations
tontinières, les personnes physiques, les commerçants, les
employeurs et groupements, en développant des réseaux de
solidarité. Le système est régi par des règles
simples et adaptées au pouvoir d'achat de la clientèle.
L'inefficacité du secteur financier formel, due en
grande partie à la sa rigidité de ce secteur et à
l'omniprésence des pouvoirs publics, principalement en matière de
fixation des taux d'intérêt, ont pour conséquence la
présence du secteur informel à côté du secteur
formel.
La naissance des associations rotatives d'épargne et de
crédit est marquée par la manifestation de l'expression de la
volonté d'un groupe pour satisfaire les besoins d'épargne de ses
membres.
Leurs motivations ne sont pas seulement d'ordre
économique mais peuvent être aussi des motivations sociales.
Toutefois, l'épargne informelle présente des
limites liées essentiellement à la nature très
particulière de ces organisations.
Les nombreuses insuffisances du secteur financier
sénégalais empêchant ainsi une grande mobilisation de
l'épargne, nous a poussé à terminer notre étude par
la formulation de recommandations.
Ces recommandations peuvent s'articuler autour des points
suivants :
· La diversification des produits de collecte de
l'épargne domestique ;
· Le raffermissement de la crédibilité et
la sécurité des moyens de paiement ;
· Le dynamisme du marché financier
sous-régional ;
· L'adoption d'une politique d'augmentation des
revenus ;
· La maîtrise de l'inflation ;
· Une politique de réduction du taux de
dépendance économique ;
· Une politique d'incitation à l'épargne
extérieure ;
· Une meilleure articulation entre le secteur formel et
le secteur informel.
1. Déterminants de l'épargne au
Sénégal
1.1. Définition
Le dictionnaire Larousse définit l'épargne comme
« une fraction du revenu individuel ou national qui n'est pas
affectée à la consommation », tandis que pour
le dictionnaire Robert, il s'agit « des dépenses
affectées à un niveau inférieur aux recettes, en vue de
constituer une réserve ».
S'accordant communément à reconnaître que
l'épargne est constituée d'une valeur non affectée
à la consommation, les deux définitions présentées
diffèrent toutefois profondément dans l'objectif qu'elles
attribuent à l'épargne.
La première définition induit une notion de
résidu : l'épargne. C'est ce qui reste quand on a finit de
satisfaire ses besoins ; elles réduit l'épargne
privée à l'équation suivante :
Epargne monétaire = Revenu disponible -
Dépenses
Toutefois, la seconde ne perçoit pas de manière
purement négative l'épargne comme le résultant d'une
soustraction, mais comme une réserve issue d'une action et voulue.
Cette définition conduit donc à une attitude
volontariste dans l'épargne, qui s'inscrit dans un renoncement de
l'acteur économique (qu'il s'agisse d'un ménage, d'une entreprise
ou d'une administration publique) à la consommation immédiate, en
vue d'une finalité.
1.1.1 Une finalité
L'épargne ne se réduit pas à une somme de
monnaie non affectée : elle est ajustée à un but, en
vue duquel l'acteur économique préfère différer sa
consommation immédiate.
On peut même aller plus loin en affirmant qu'une somme
d'argent résultant après consommation ne constitue une
épargne que dans la mesure où elle est clairement et
volontairement affectée à un but à réaliser dans le
futur. Un montant d'argent non orienté n'est pas de l'épargne,
c'est un simple résidu de la consommation.
Les objectifs alloués à la constitution d'une
épargne peuvent bien-sûr différer, selon qu'elle est
accumulée par un ménage, qui cherche principalement à
consommer (biens durables, biens de consommation), une entreprise, dont l'objet
de l'épargne s'effectue surtout en vue d'investissement, ou encore une
administration publique, dont l'épargne est affectée à des
dépenses publiques. A ce titre, l'épargne peut prendre diverses
formes et se baser sur différents supports correspondant aux
finalités spécifiques poursuivies par les acteurs
économiques.
1.1.2 Une attitude volontariste
Différer la consommation, c'est renoncer à
satisfaire un besoin de consommation immédiat, en vue de le satisfaire
plus pleinement ou d'en combler un autre dans un avenir plus ou moins
proche.
L'épargne est en cela un renoncement, un effort
individuel ou collectif et peut ainsi constituer une attitude culturelle
répondant à un rapport particulier au temps. Les
économistes ont d'ailleurs pu identifier pour les ménages une
courbe de l'épargne selon l'age de l'individu où le montant de la
réserve fluctue selon les périodes de la vie.
L'épargne des entreprises connaît
également une certaine régularité, alternant des phases
d'accumulation et de désépargne selon les cycles d'investissement
des entreprises.
Enfin, la gestion de la dette publique incite les
administrations publiques à respecter un cycle régulier
d'épargne.
Globalement, l'épargne brute représente la
différence entre le PIB et les dépenses
de consommation finale (l'ensemble des consommations d'un pays pendant une
période donnée).
D'une manière plus précise, il s'agit du revenu
national disponible qui n'est pas affecté à la consommation
finale, celle des ménages, des entreprises ou des gouvernements.
L'épargne brute correspond aussi à la somme des épargnes
brutes des différents secteurs institutionnels. Cet indicateur a son
utilité du fait qu'il nous renseigne sur la capacité d'un pays
à débloquer ses propres capitaux pour les investissements ;
autrement dit, la non dépendance vis-à-vis des capitaux
étrangers.
Ainsi au Sénégal, le lien entre épargne
et temporalité nous permet d'avancer l'idée d'une
évolution nette de l'épargne. On note une croissance de
l'épargne domestique brut de l'ordre de 39 % en 45 ans (de 1960 à
2005).
1.2. Approche
théorique
« L'épargne domestique peut être
subdivisée en deux parties : l'épargne publique et
l'épargne domestique privée » (Gillis et al., 2001,
p.389). L'épargne domestique privée se présente
principalement sous trois formes : l'épargne forcée,
l'épargne involontaire et l'épargne volontaire (Thirlwall,
2000).
L'épargne forcée provient de la hausse des prix
et de la réduction de la consommation réelle que l'inflation
entraîne lorsque les consommateurs ne sont pas en mesure de se
défendre. La hausse des prix peut réduire la consommation
réelle pour plusieurs raisons :
- l'apparition de l'illusion monétaire ;
- le fait que les individus veuillent conserver intacte la
valeur réelle de la part de revenu qu'ils gardent. Ainsi, ils accumulent
plus d'argent et dépensent moins lorsque les prix augmentent ;
- Le fait que l'inflation pourrait redistribuer le revenu
à ceux qui ont une plus grande propension à épargner.
L'inflation entraînée par l'expansion monétaire devrait
certainement redistribuer le revenu au gouvernement en tant qu'émetteur
de la monnaie. C'est la notion d'impôt, d'inflation dont Keynes disait
que c'est une forme d'impôt à laquelle le public trouve beaucoup
de mal à se soustraire et le plus faible des gouvernements peut imposer
s'il ne peut imposer rien d'autre (Keynes, 1923).
L'épargne involontaire est engendrée par une
réduction involontaire de la consommation des agents
économiques.
L'épargne volontaire concerne le renoncement des
individus à la consommation sur leur revenu et des entreprises sur leurs
bénéfices. Elle dépend de la capacité et de la
volonté d'épargner. Selon Thirlwall (2000), la capacité
d'épargner dépend de trois déterminants principaux :
le niveau du revenu par tête, la croissance du revenu et la distribution
du revenu. La volonté d'épargner dépend du taux
d'intérêt, de l'existence d'institutions financières, de la
variété et de la disponibilité des actifs financiers et du
taux d'inflation.
Pour les économistes de l'école classique, Adam
Smith, David Ricardo, mais aussi Léon Walras, l'épargne, dans le
cas d'une économie fermée, est nécessairement investie
sous forme de consommation ou d'investissement. L'agent ne conserve jamais
d'encaisses oisives. Il n'y a pas trace de préférence pour la
liquidité. Toute épargne étant nécessairement
transformée en investissement, le taux d'intérêt est la
variable qui permet l'égalisation de ces deux grandeurs. L'offre
d'épargne est une fonction croissante du taux d'intérêt et
la demande de fonds, c'est-à-dire l'investissement, en est une fonction
décroissante.
Dans les années 1930, Keynes critiquait avec ironie les
classiques selon lesquels le consommateur réduit sa dépense pour
augmenter son épargne lorsque le taux d'intérêt
augmente.
Keynes se distingue principalement des classiques en ce qu'il
considère que, la plupart du temps, l'épargne et l'investissement
sont le fait d'agents économiques différents, dont le
comportement s'explique par des variables différentes (le revenu pour
l'épargne, l'efficacité marginale du capital et le taux
d'intérêt pour l'investissement). Les projets d'investissement
sont ainsi largement indépendants de l'épargne existante et leur
égalisation à l'épargne existante n'est pas
réalisée automatiquement par l'intermédiaire du taux
d'intérêt, comme le pensaient les classiques, mais par la
variation du revenu. Par ailleurs, c'est l'investissement qui exerce un
rôle moteur sur l'activité économique.
Keynes en 1963 a fait une importante innovation en liant pour
la première fois la consommation - par conséquent
l'épargne - au revenu à travers la fonction de consommation (ou
fonction d'épargne). De façon plus explicite, il stipulait que la
fonction de consommation ou d'épargne est non proportionnelle,
c'est-à-dire que les riches consomment proportionnellement moins et
épargnent proportionnellement plus de leur revenu que les pauvres
(propension marginale à consommer décroissante, loi psychologique
fondamentale).
Pour Keynes, l'épargne dépendait directement du
revenu courant disponible, c'est-à-dire du revenu après paiement
des impôts directs, et la propension à épargner une partie
du revenu courant disponible augmentait avec le revenu. Cette thèse,
dénommée hypothèse keynésienne sur le revenu
absolu, établit la relation suivante entre l'épargne et le
revenu :
S = a + sYd (1)
Avec :
S = épargne ;
Yd = revenu courant
disponible ;
a = constante (a<0) ;
s = propension marginale à épargner (0
< s < 1)
Le signe négatif affecté à la constante
« a », entraîne une épargne négative
lorsque le revenu est faible. Selon cette équation, lorsque dans un pays
donné le revenu est croissant, les taux d'épargne devraient
également croître sur une longue période.
Cependant, les études temporelles de long terme de
Kuznets (1948) menées sur les Etats-Unis entre 1869 et 1939 font
apparaître une propension marginale à consommer constante dans le
temps, qui ne décroît pas quand le revenu augmente, contrairement
à la théorie de Keynes. Ainsi, la théorie de Keynes serait
valable sur courte période mais pas sur longue période. Il va en
résulter une abondante littérature.
Duesenberry (1949) tente de réconcilier la loi
psychologique fondamentale avec les résultats empiriques. Pour cela, il
lève l'hypothèse d'indépendance de la consommation d'un
agent par rapport à celle des autres. Il met alors en évidence
l'effet de démonstration.
L'effet de démonstration y est défini comme un
effet de contagion, de contact ou de relations sociales. Plus
précisément, au-dessus d'un revenu minimum, la fréquence
et la force des incitations à augmenter ses dépenses
dépendent entièrement, pour un individu, du rapport de ses
dépenses avec celles des individus avec lesquels il est en relation. Son
modèle repose sur une théorie du revenu relatif, avec laquelle il
montre que la propension à consommer des groupes inférieurs est
plus forte car ils cherchent à imiter la consommation des groupes
supérieurs. Il est représenté par la relation
suivante :
C1 = a + (1-s) Yd 1 + b
Ch (2)
Avec :
C1 = consommation pendant la
période 1 ;
Yd 1 = revenu pendant la période
1 ;
Ch = haut niveau de consommation
antérieur ;
a = constante (a<0) ;
s = propension marginale à épargner (0
< s < 1) et 0 < b < 1.
La tendance à la baisse de la propension marginale
à consommer observée à court terme ne serait plus
contradictoire avec sa stabilité à long terme. Quand le revenu
augmente, chaque groupe augmente sa consommation dans les mêmes
proportions pour aligner ses dépenses sur celles de ses voisins plus
fortunés de sorte que la propension marginale à consommer
à long terme soit constante.
L'hypothèse de Duesenberry (1949) a été
formulée pour expliquer le comportement en matière de
consommation et d'épargne aux Etats-Unis. Par la suite, son application
aux pays en développement a montré que, dans ces pays, les
groupes disposant de revenus élevés, mobiles sur le plan
international, se conforment aux schémas de forte consommation de leurs
homologues les plus prospères des pays avancés ; à
leur tour, les groupes titulaires de revenus inférieurs tendent à
imiter le comportement des groupes aux revenus plus élevés. Cette
forte consommation inhibe à long terme la hausse de l'épargne qui
aurait dû être consécutive à l'augmentation des
revenus.
Les travaux de Kuznets (1948) et Duesenberry (1949) permettent
de nuancer la théorie de Keynes qui stipule que le taux d'épargne
augment sur une longue période lorsque le revenu est croissant. Cette
assertion peut se vérifier sur le court terme mais n'est pas
forcément valable à long terme.
Un autre déterminant majeur de l'épargne
domestique est la croissance du revenu comme indiqué par
l'hypothèse du cycle de vie (Ando et Modigliani, 1963). Selon Ando et
Modigliani (1963), les comportements réels de consommation seraient
différents selon les phases de la vie des individus puisque le profil
temporel des revenus varie en fonction des trois grands âges de la vie
(enfance, activité, retraite). Par le recours à l'emprunt et par
la pratique de l'épargne, la consommation peut être mieux
répartie dans le temps que le revenu.
En adoptant l'hypothèse que l'agent essaie de maintenir
un niveau de consommation constant ou relativement croissant au cours de sa
vie, il est possible de mettre en lumière un cycle comportant trois
phases :
- La première phase correspond à la
période de jeunesse au cours de laquelle l'agent est
emprunteur ;
- Dans la seconde phase, à l'âge mûr,
l'agent devient épargnant net ;
- Avec le départ à la retraite, dans la
troisième, il devient désépargnant pour se retrouver au
« point mort » à son décès en
supposant qu'il n'y a pas de legs.
1.3. Description des variables de
l'épargne
Le choix des différentes variables est basé sur
l'ensemble des études qui traitent de l'épargne nationale.
1.3.1 L'inflation
Pour essayer de cerner l'effet de l'épargne
créée à cause de l'incertitude macro-économique,
certains auteurs dont Hadjimichael et Ghura (1995) ont inclus dans leur
modèle le taux d'inflation comme variable explicative. Dans leur
étude, le taux d'inflation affecte négativement le taux
d'épargne.
D'autres auteurs comme Houziot, C. et al. (2000) affirment
plutôt que l'ajout de cette variable dans leur modèle permet de
tenir compte de la dévalorisation de l'encours de richesse
financière. Dans un environnement macro-économique très
instable, l'incertitude accrue résultant des variations des prix peut
réduire l'épargne nationale par son effet des taux de rendement.
La réaction du taux d'épargne suite à une variation du
taux d'inflation est donc ambiguë. Au Sénégal, durant
l'année de la dévaluation en janvier 1994, le taux d'inflation
était de 32,1 %. Un an après la dévaluation, le taux
d'inflation est ramené à 8 % (1995), 1,8 % en 1997 et 2 % en
1998.
La phase qui correspond à la période 1970-1974
est marquée par une évolution du taux d'inflation. Après
avoir atteint 31,7 % en 1975, suite à la crise pétrolière
et à la sécheresse, l'inflation est confinée à 1,1
%. Ceci peut-être expliqué par l'essor de l'agriculture.
De 1976 à 1985, on peut identifier sur ce graphique une
augmentation de l'inflation, sauf en 1978 et 1981 où elle diminue. A
partir de 1982, l'inflation décroît jusqu'en 1987 et est
maîtrisée jusqu'en 1993. Mais, pour la période 1994-1995,
on observe une augmentation importante de l'inflation marquée par la
dévaluation. A partir de cette période, l'inflation est
maîtrisée de nouveau. En effet, cette influence négative du
taux d'inflation sur l'épargne nationale peut être perçue
à travers le graphique ci-dessous.
Graphique n° 1 : Evolution du taux
d'inflation au Sénégal de 1970 à 1998
Source : Direction de la Prévision et de la
Statistique
1.3.2 Le taux
d'intérêt réel
Le taux d'intérêt réel a été
utilisé dans l'étude car il peut avoir une influence importante
sur les décisions d'épargne. Lorsqu'il est à la hausse, il
peut jouer le rôle de contrainte de liquidité. L'arbitrage entre
les diverses opportunités de placement offertes aux épargnants
dépend des rendements réels escomptés (fonctions du taux
d'intérêt réel et des anticipations inflationnistes) et des
attitudes à l'égard du risque. L'effet du taux
d'intérêt réel est cependant aussi ambigu.
De 1970 à 1974, le taux d'intérêt
réel décroît faiblement et est globalement négatif
pour cette période. Mais entre 1974 et 1975, ce taux est marqué
par une décroissance forte. Ceci peut être expliqué par la
crise pétrolière en 1973, la sécheresse et une forte
augmentation de l'inflation en 1975. En 1976 ce taux est positif et est aussi
lié à un faible taux d'inflation (1.1 pour cent) pour la
période considérée.
De 1977 à 1985 le taux d'intérêt
réel est globalement négatif sauf en 1978 et 1981 où il
est positif. De 1986 à 1993, on observe une augmentation du taux
d'intérêt réel. Ce dernier est positif et est lié
à l'inflation négative - voire nulle - pendant cette
période. Toutefois, en 1994-1995, le taux d'intérêt est
négatif. Cette diminution est importante et est due au taux
élevé de l'inflation après l'année de la
dévaluation. A partir de 1995, le Sénégal renoue avec sa
stabilité macro-économique et le taux d'intérêt
réel commence à croître jusqu'en 1998. Le graphique
ci-dessous montre l'évolution du taux d'intérêt
réel.
Graphique n° 2 : Evolution du taux
d'intérêt réel au Sénégal de 1970 à
1998
Source : Direction de la Prévision et de la
Statistique
1.3.3 Le revenu
Deaton and Paxson (2000) ont montré que l'effet du taux
de croissance du revenu sur le taux d'épargne dépend du taux de
croissance de la population. Lorsque ce dernier est élevé, la
portion d'enfants dans la population est relativement élevée.
Cependant, lorsque le taux de la population est bas, l'augmentation du revenu
est distribuée vers les gens qui sont dans une phase où ils
épargnent, ce qui entraîne une augmentation du taux
d'épargne nationale. Il est pertinent de lier l'évolution du taux
d'épargne au niveau macro-économique avec l'accroissement de
l'inégalité des revenus. Le graphique suivant montre
l'évolution du revenu.
Graphique n° 3 : Evolution du PIB au
Sénégal de 1970 à 1998
Source : Direction de la Prévision et de la
Statistique
Nous remarquons une évolution faible du revenu sur la
période comprise entre 1970 et 1973. L'année 1973 est
marquée au Sénégal par une sécheresse et les chocs
pétroliers. De 1974 à 1977, on observe une croissance au niveau
de l'agriculture ; ce qui explique l'augmentation de revenu de 1978
à 1982. Ceci peut être expliqué par l'application des
programmes d'ajustement structurel (PAS).
De même, l'année 1982 est marquée par la
crise mexicaine. Toutefois, de 1982 à 1992, le revenu croît mais
cette croissance sera stoppée en 1993. Cette période est
marquée par l'application du plan d'urgence. A partir de 1994,
l'inflation vite maîtrisée, le Sénégal renoue ave sa
stabilité macro-économique. C'est pourquoi à partir de
cette période il y a évolution positive du revenu. Le
Sénégal a enregistré un taux de croissance remarquable de
5,3 % dû à une hausse de la production agricole, suite à
des précipitations favorables, à de bons résultats dans
les secteurs du tourisme et des échanges et un accroissement des
investissements publics. Cependant la reprise de la croissance
enregistrée après la dévaluation du franc CFA a eu des
effets limités sur le niveau de vie de la population.
1.3.4 La variable
démographique
C'est l'une des variables importantes qui influencent
l'évolution du comportement de l'épargne comme souligné
avec les travaux de Hadjimichael et Ghura (1995) et Loayza, Schmidt-Hebbel and
Serven (2000). L'accroissement de la population ainsi que la modification de la
structure ont des effets sur le niveau d'épargne nationale.
En reprenant l'hypothèse des marchés des
capitaux parfaits sur lesquels les agents peuvent librement emprunter ou
prêter, la théorie du cycle de vie améliorée loayza,
Schmidt-Hebbel and Serven (2000) a permis de construire le profil de
l'épargne au cours de la vie d'un agent représentatif :
désépargne en début de carrière puis épargne
durant la période active en vue de la retraite et enfin,
désépargne durant la retraite. Un accroissement de la population
d'après le modèle de Hammer (1986) a un effet négatif sur
la constitution d'épargne.
On remarque graphiquement que le taux de dépendance
évolue en s'améliorant surtout après 1975. L'accroissement
du taux tend à évoluer jusqu'en 1985. A partir de cette
période on observe une diminution du taux de dépendance jusqu'en
1993. En 1994 on peut identifier sur ce graphique une légère
augmentation de la population. A partir de cette période, le taux de
dépendance ne cesse de décroître jusqu'en 1998. Le
graphique n° 5 ci-dessous nous montre comment évolue le taux de
dépendance pour la période considérée.
Graphique n° 4 : Evolution du taux de
dépendance au Sénégal de 1970 à
1998
Source : Banque mondiale
1.3.5 L'épargne
extérieure
L'impact de l'épargne extérieure sur
l'épargne nationale produit un effet de revenu positif. La suppression
de la contrainte extérieure stimule l'activité économique
et un effet négatif est essentiellement dû au sentiment de
richesse provoqué par l'appréciation des actifs physiques et
financiers, la baisse des prix et des biens échangeables
consécutive à l'appréciation du taux de change, et
l'augmentation des liquidités et du crédit intérieur
disponibles.
L'inclusion de l'épargne extérieure dans notre
étude est justifiée selon la théorie de Molho (1986) de
l'éviction de l'épargne domestique, permettant aux
résidents de consommer plus ou la théorie de Griffin and Enos
(1970) de la substituabilité de l'épargne extérieure
à l'épargne nationale.
L'épargne extérieure est globalement
négative pour la période considérée. De 1970
à 1971 l'épargne extérieure diminue faiblement. Entre 1978
à 1985 on observe une diminution plus forte de l'épargne
extérieure. A partir de 1985 elle commence à augmenter et
jusqu'en 1990. De 1990 à 1998 on peut remarquer sur ce graphique une
diminution et une augmentation alternative de l'épargne
extérieure. Si on considère que l'épargne est une fonction
du revenu et si l'aide pousse à la croissance, en dynamique elle
contribue à la croissance de l'épargne. Ce qui veut dire que les
apports extérieurs conduisent à une amélioration
qualitative du revenu. Ceci confirme la théorie de la
substituabilité ou complémentarité entre l'épargne
extérieure et l'épargne nationale.
La Banque Mondiale considère que l'aide doit favoriser
le développement des économies en comblant les déficits de
l'épargne, et des devises. De ce fait l'aide doit participer à
l'accumulation de capital. L'aide est une source nécessaire pour
contribuer à la croissance économique et au recul de la
pauvreté dans les pays les moins avancés (Banque Mondiale,
1999).
Toutefois, J. Pollak (1989) a critiqué la
possibilité même d'une approche économétrique de la
question en soulignant à quel point le sens de causalité
était douteux, et le fait qu'en accroissant le PIB les flux
extérieurs ont tendance à réduire le taux
d'épargne, du moins à court terme sans que ce
phénomène ait une signification économique. Le graphique
ci-dessous montre l'évolution de l'épargne extérieure.
Graphique n° 5 : Evolution de
l'épargne extérieure au Sénégal de 1970 à
1998
Source : Banque mondiale
1.3.6 Le taux de change
effectif réel
Les termes de l'échange et le taux de change ont un
impact sur l'épargne nationale. Le taux de change effectif réel
est le taux de change effectif nominal déflaté par un indice
pondéré de disparité de pouvoir d'achat. Il prend en
compte la seule variation du cours du change non expliquée par les
différentiels de prix ou d'expansion monétaires,
c'est-à-dire la variation des prix extérieurs relatifs, la
modification susceptible d'infléchir la situation extérieure du
pays.
Dans ce graphique, on peut remarquer que de 1970 à
1977, le taux de change diminue sauf pour l'année 1974 où il y a
une légère augmentation. Cette diminution est liée au choc
pétrolier de 1973, à une dépréciation du taux de
change effectif nominal et à un différentiel de prix
vis-à-vis des pays de la CEE (Communauté Economique
Européenne) qui représentent environ plus de la moitié de
nos échanges.
On observe une augmentation du taux de change effectif
réel de 1977 à 1979. Ce résultat est obtenu grâce
à des gains de compétitivité que l'économie
sénégalaise a acquis durant cette période. En effet, le
taux de change effectif réel a légèrement fléchi
entre 1979 et 1991 tandis qu'il augmente légèrement à
partir de 1993. Le graphique ci-dessous nous montre l'évolution du taux
de change effectif réel.
Graphique n° 6 : Evolution du taux de
change effectif réel au Sénégal
Source : Banque mondiale
2 La Situation de l'Epargne Intérieure
Dans la plupart des pays en voie de développement,
l'épargne domestique est aujourd'hui insuffisante pour financer
l'ensemble des investissements ; ce qui se traduit par un
déséquilibre significatif de toutes les balances de paiements
courants.
Au Sénégal, malgré un système
financier où cohabitent le système bancaire classique, les
institutions financières non bancaires, les systèmes financiers
décentralisés et les circuits financiers informels très
dynamiques, le taux d'épargne intérieure est
particulièrement faible. Il est égal à 9,6 % en 1970,
devient négatif dans les années 80 avant de s'établir
à 11,8 % en 2000.
La situation n'est guère meilleure dans la plupart des
pays de la sous région et même globalement en Afrique
Sub-Saharienne et dans les autres pays en développement d'Asie et
d'Amérique Latine. (Figure 4)
Graphique n° 8 : Taux
d'épargne 1997 comparés (%)
Source : Données de la Banque Mondiale
En pratique, l'épargne est mesurée comme un
résidu et est confrontée aux problèmes de classification,
d'évaluation et de mesure. Ainsi, de nombreuses études
économétriques, cherchant à identifier les
déterminants de l'épargne reposent sur les données de la
comptabilité nationale. L'utilisation des données issues
d'enquêtes sur les ménages est difficile car ces dernières
sont souvent incohérentes ou même inexistantes.
L'épargne privée constitue l'essentiel de
l'épargne intérieure dans les pays en développement. Or,
la désagrégation de l'épargne intérieure entre
épargne privée et épargne publique est absente des
statistiques des comptes nationaux. L'épargne intérieure
intègre l'épargne des entreprises, l'épargne des
ménages et l'épargne publique.
En ce qui concerne les entreprises, l'augmentation de leur
épargne brute sous la forme de dividendes non distribués, fait
accroître parallèlement la richesse financière des
ménages détenant le capital de ces entreprises. Mais cet effet de
richesse peut également se traduire par la diminution de leur
épargne autonome, notamment dans l'hypothèse où il serait
pleinement anticipé. A l'inverse, si l'épargne des entreprises
diminue, les ménages détenant le capital de ces entreprises
peuvent être forcés d'augmenter les autres sources
d'épargne afin de maintenir constante leur richesse
financière.
En ce qui concerne l'Etat, les ménages épargnant
en vue de la retraite peuvent utiliser le système public de financement
des retraites comme substitut à leur effort d'épargne retraite.
Dans ces conditions, l'augmentation de l'épargne publique correspond au
financement des retraites des administrés s'accompagne de la baisse de
l'épargne des ménages concernés.
L'évolution de l'épargne intérieure au
Sénégal, au vu de la période d'étude choisie, se
décompose en quatre phases :
· La première phase se situant de 1970 à
1974 est marquée par une évolution en dent de scie mais
globalement positive de l'épargne jusqu'en 1973-74, date à partir
de laquelle elle décroît.
· La seconde phase est comprise entre la période
de 1974 et 1979. On observe une baisse continue de l'épargne durant
cette période. Ces deux phases sont marquées par la
sécheresse et la crise pétrolière.
· La troisième phase correspond à la
période qui va de 1980 à 1985. Durant cette période
correspondant à l'application des réformes économiques et
l'adoption des nouvelles politiques agricole et industrielle, l'épargne
est négative, sauf en 1984 ou elle est positive. Ces réformes et
les nouvelles politiques agricole et industrielle n'ont pas abouti aux
résultats escomptés quant à l'amorce d'un processus de
croissance soutenue et durable en vue d'un développement
réel ;
· Lors de la quatrième phase, de 1985 et 2000,
l'épargne est globalement croissante. Nous notons même un pic en
1994. La forte évolution de cette année pourrait s'expliquer par
l'augmentation des exportations et l'augmentation de la valeur de
l'épargne des Sénégalais vivant à l'étranger
engendrées par la dévaluation du Francs CFA. La figure
numéro 5 montre cette évolution.
Graphique n° 9 : Evolution de
l'épargne intérieure du Sénégal de 1970 à
2000
Source : Direction de la Prévision et de la
Statistique, comptes nationaux du Sénégal 1960-2000
3. Les systèmes d'épargne au
Sénégal
Les différentes formes de crédit et
d'épargne existant au Sénégal sont classées selon
le système formel ou informel. Nous caractérisons le dualisme
financier au sens large, comme la juxtaposition des secteurs formel et informel
en matière de financement. Nous montrons cependant
l'interdépendance entre les deux secteurs en matière de
comportements, de détention d'actifs.
L'analyse des secteurs financiers débouche sur la
question de la politique à adopter, notamment au Sénégal
où ils tiennent une large place dans les comportements d'épargne
et de crédit. « L'épargne dans les pays en voie de
développement est caractérisée par la dualité
financière. Une partie passe par des institutions : c'est
l'épargne institutionnelle. L'autre partie passe par les individus qui
s'organisent eux-mêmes pour faire face en même temps et ensemble,
à l'avenir : c'est l'épargne informelle qui repose sur des
relations personnelles et qui se développe au grès de pratiques
jamais codifiées » (Lelart, 1990).
3.1 L'épargne formelle
Le système formel concerne les banques et les autres
institutions financières, les coopératives et les
sociétés d'assurances. A ce niveau, l'accès au
crédit est très difficile car le système
d'intermédiation financière est basé sur un cadre
législatif et réglementaire qui protège l'épargnant
et doit respecter certaines contraintes dues à la politique
monétaire et du crédit édicté par les pouvoirs
publics.
Sur le plan micro-économique, l'arbitrage entre les
diverses opportunités de placements offerts aux épargnants
dépend des rendements réels escomptés (fonction du taux
d'intérêt et des anticipations inflationnistes) et des attitudes
à l'égard du risque. Les politiques de plafonnement du taux
d'intérêt, qui ont longtemps prévalu et qui visaient
à limiter les revenus de la propriété (et donc à
modifier la répartition des revenus) et surtout à encourager
l'investissement, avaient donc pour conséquence de décourager la
formation de l'épargne financière mise à la disposition
des opérateurs.
L'épargne des individus et des ménages est
indispensable à la croissance économique d'un pays. Elle
détermine, en grande partie, le taux de croissance de la capacité
productive et des revenus. Dans les zones rurales, les gens ont toujours
été peu enclins à déposer leur argent à la
banque. Certains préfèrent l'investir dans le bétail,
d'autres cachent leurs espèces dans des endroits à risque, comme
des jarres ou sous des matelas ou pire encore, les portent sur eux. Les banques
souvent situées dans des villes éloignées et peu
accessibles, n'inspirent guère confiance aux investisseurs ruraux qui
les jugent froides, peu accueillantes et destinées principalement aux
« citadins ». Pourtant, le potentiel inexploité de
l'épargne rurale pourrait donner un élan vigoureux aux
économies locales des pays en développement.
Une grande partie de la population sénégalaise
(plus de 70 %) vit en milieu rural (NEPAD, 2001). L'épargne
mobilisée par des établissements financiers locaux efficaces
pourrait financer des niveaux accrus d'investissement dans le
développement en milieu rural. Les femmes rurales qui produisent
l'essentiel de la nourriture du monde en développement, sont des
clientes particulièrement importantes des banques. Sauvegarder les
épargnants expose les principes généraux de la
sécurité des dépôts, décrit les
problèmes spécifiques aux banques rurales et présente
d'édifiantes études de cas de réussite de petites banques
au sein des communautés rurales.
Dans une région de la Tanzanie, les villageois ont
décidé d'ouvrir leur propre banque locale au lieu de garder leur
argent à la maison. Les épargnants de la Marangu West Savings and
Credit Co-operative (FAO, 2000) sont non seulement les clients de la banque
mais aussi ses propriétaires et ses administrateurs. Les membres qui
étaient au départ de 600, sont désormais près de
2000.
Selon la même source, à Madagascar, une banque
ambitieuse de la ville côtière animée de Toamasina a
ciblé le marché local en offrant un service unique à sa
clientèle : elle emploie un des vendeurs du marché pour
recueillir les dépôts des autres vendeurs, ce qui leur
évite un voyage à la banque. Le service inspire confiance
grâce à une comptabilisation rigoureuse des dépôts.
Par ailleurs, il faut souligner aussi l'importance des mutuelles
d'épargne et de crédit et les mutuelles de santé.
Au Sénégal, plus particulièrement dans la
région de Thiès, des mutuelles de crédit sont
créées en vue de participer au développement des zones
rurales. C'est le cas des mutuelles d'épargne et de crédit des
artisans ruraux de Thiès (MECARTH). Dans la région de
Thiès, l'ONG Plan International a créé des mutuelles
d'épargne et de crédit dans les villages de Notto, Tassette et
Ngoudiane. Le village de Fandène est l'exemple réussi des
mutuelles d'épargne et de crédit. L'épargne formelle est
essentiellement collectée par les banques et les caisses
d'épargne. Au Sénégal, l'épargne monétaire
du secteur privé était, en 1997, de 209,4 milliards de FCFA. Ceci
constituait une hausse de 2 % par rapport à l'année
précédente. Cette évolution était liée
à l'accroissement de 8,8 % des dépôts dans les comptes
à régime spécial, les dépôts à terme
ayant régressé de 4,7 milliards. La part de cette épargne
dans la liquidité globale a représenté 36 % contre 36,7 %
en 1996 et 33 % en 1994 au lendemain de la dévaluation du franc CFA. En
2001, l'épargne monétaire du secteur privé s'est
fixée à 368,2 milliards, soit une hausse de 38,6 milliards par
rapport à l'année 2000. Cette situation est essentiellement
liée à l'accroissement des dépôts en banque. La part
de l'épargne privée dans la masse monétaire s'est
contractée, passant de 41,7 % en 2000 à 41,0 %.
Graphique n° 10 : Dépôts
à terme des particuliers et entreprises privées au
Sénégal
Source : BCEAO, Rapport annuel (différents
numéros)
Les dépôts à terme des
Sociétés d'Etat et des Etablissements publics à
caractère industriel et commercial (EPIC) au niveau du système
bancaire étaient de 6,7 milliards de FCFA en 1994. Ils passent à
une valeur de 28,2 milliards en 1997 avant de retomber à 7,2 milliards
en 2001.
Graphique n° 11 : Dépôts
à terme des Société d'Etat et EPIC au
Sénégal
Source : BCEAO, Rapport annuel (différents
numéros)
Les dépôts de l'Etat quant à eux, de 139,2
milliards de FCFA en 1994, passent à 161,7 milliards en 1996. Ils
atteignent leur plus bas niveau de la période en 1999 avec un montant de
97,5 milliards pour remonter à 143,7 milliards en 2001.
Graphique n° 12 : Dépôts
à terme d'Etat au Sénégal
Source : BCEAO, Rapport annuel (différents
numéros)
L'épargne formelle est aussi mobilisée par les
systèmes financiers décentralisés (SFD) qui regroupent les
institutions de micro finance. Les SFD, à présent plus
structurés et plus professionnels, semblent proposer des solutions
efficaces de mobilisation de l'épargne intérieure, si bien qu'ils
sont devenus aujourd'hui des acteurs incontournables du développement.
Cependant, les SFD n'apportent pas des réponses efficaces au
problème du financement des investissements productifs des micro et
petits entrepreneurs car force est de constater la rareté des programmes
adressés à cette population. La faible part qu'ils consacrent au
financement des investissements productifs des micro entrepreneurs limite leurs
perspectives de développement.
3.1.1 La mobilisation de l'épargne par les
FSD
3.1.1.1 Définition conceptuelle
La micro finance regroupe une diversité d'acteurs
financiers également appelés Systèmes Financiers
Décentralisés (SFD) qui mettent à la disposition des
populations généralement exclues du système bancaire, des
services d'épargne et/ou de crédit.
Elle consiste à créer et diffuser des services
financiers de proximité en faveur des personnes qui n'ont pas
accès aux services bancaires traditionnels et ceux, principalement avec
un objectif de renforcement du micro entreprenariat.
La micro finance englobe un large éventail de services
financiers tels que les dépôts, les emprunts/crédits, les
services de paiements et depuis peu, les transferts d'argent, l'offre
d'assurance aux ménages pauvres et à bas revenus ainsi
qu'à leurs micro-entreprises.
La micro finance est un outil de développement parmi
d'autres, de lutte contre la pauvreté et l'exclusion de population
défavorisée. Elle vise à favoriser la création et
le développement de petites activités économiques
rentables par l'accès au financement extérieur et à la
mobilisation de l'épargne. Ces entités économiques
appartenant au secteur informel sont appelées micro entreprise.
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