COMMUNAUTE FRANÇAISE DE BELGIQUE
Faculté universitaire des Sciences agronomiques
de Gembloux
Unité de Zootechnie
TYPOLOGIE DES SYSTÈMES D'ÉLEVAGE BOVIN
LAITIER AU MAROC EN VUE D'UNE ANALYSE DE LEURS PERFORMANCES
Mohamed Taher SRAÏRI
Dissertation Originale présentée en vue de
l'obtention du grade de Docteur en sciences agronomiques et ingénierie
biologique
PROMOTEUR :
Professeur André
THÉWIS
- 2004 -
COMMUNAUTE FRANÇAISE DE BELGIQUE
Faculté universitaire des Sciences agronomiques
de Gembloux
Unité de Zootechnie
TYPOLOGIE DES SYSTÈMES D'ÉLEVAGE BOVIN
LAITIER AU MAROC EN VUE D'UNE ANALYSE DE LEURS PERFORMANCES
Mohamed Taher SRAÏRI
Dissertation Originale présentée en vue de
l'obtention du grade de Docteur en sciences agronomiques et ingénierie
biologique
PROMOTEUR :
Professeur André THÉWIS
- 2004 -
Copyright. Aux termes de la loi belge du 22 mars 1886 sur le
droit d'auteur, seul l'auteur a le droit de reproduire cet ouvrage ou d'en
autoriser la reproduction de quelque manière et sous quelque forme que
ce soit. Toute photocopie ou reproduction sous autre forme est donc faite en
violation avec la loi.
SRAÏRI Mohamed Taher (2004).
Typologie des systèmes d'élevage bovin laitier au Maroc
en vue d'une analyse de leurs performances (thèse de Doctorat).
Gembloux, Faculté universitaire des Sciences agronomiques. 200 pages, 45
tableaux, 29 figures.
Résumé :
Une grande diversité des types d'élevage bovin
laitier existe au Maroc. Afin d'en clarifier les performances zootechniques et
d'en saisir les performances économiques, une série de suivis
d'élevage a été mise en oeuvre, dans le cadre de
l'application d'une démarche de type systémique dans
différentes zones agro -écologiques du pays : la zone
suburbaine de Rabat - Salé et le périmètre irrigué
du Gharb. L'élaboration d'une typologie de fonctionnement des
étables a ainsi montré la grande similarité des classes
d'élevage par région : la présence de fermes de type
allaitant, suivie de nombreuses fermes déficitaires en raison de
gaspillages des ressources alimentaires, des concentrés notamment, de
fermes produisant du lait avec peu de concentrés se regroupant sous
l'appellation « élevage extensif » et de très
rares étables qui peuvent être considérées comme
spécialisées en lait. Paradoxalement, il a même
été démontré que l'élevage laitier semblait
plus intensif en zone suburbaine qu'en irrigué, dû aux
facilités financières des éleveurs citadins pour l'achat
d'aliments concentrés. Le détail des pratiques d'élevage
et de leurs incidences a révélé le caractère
singulier de la production laitière dans des étables
étatiques où le pic d'intensification atteint est
entièrement tributaire d'un milieu d'élevage entièrement
artificiel : concentrés et traitements vétérinaires. Dans
la région d'agriculture totalement pluviale de Ben Slimane, cette
logique d'intensification bute sur l'aléa climatique et rend les
résultats économiques très vulnérables, car pour
maintenir un niveau de rendement laitier élevé, il ne peut y
avoir d'autre voie que le recours aux concentrés. Enfin, en
région suburbaine, les données structurelles des étables
font qu'elles pratiquent dans leur majorité un élevage
« hors - sol », lui aussi très dépendant des
apports en concentrés. Les conséquences sur la qualité du
lait sont néfastes, puisque le taux butyreux est inférieur
à la norme minimale acceptable par les usines laitières au Maroc,
de 35 g/kg dans 2 des 5 fermes étudiées. La qualité
hygiénique du lait est mauvaise pour tous les échantillons
considérés, sans aucune exception. L'ensemble de ces
considérations imposent de penser à des stratégies d'appui
technique prenant en compte cette diversité d'étables et de
logiques d'élevage, même en proposant des rations riches en
concentrés, pour améliorer la productivité laitière
et la rentabilité du cheptel bovin.
SRAÏRI Mohamed Taher (2004). Typology of dairy
cattle systems in Morocco for the analysis of their performances (Ph. D.
thesis). Gembloux, Faculté universitaire des Sciences agronomiques. 200
pages, 45 tables, 29 figures.
Abstract :
A great diversity of cattle rearing practices prevails in
Morocco. In order to clarify their consequences on dairy farms technical
performances (milk yield and reproduction traits) and economic profitability, a
series of follow-up were achieved. This consisted in an application of a
systemic approach to dairy farms located in two different regions of the
country: Rabat - Salé as a suburban area and the Gharb plain as an
irrigated perimeter. The design of a typology of farms has revealed important
similarities between regions. There were farms with a beef orientation, and
numerous farms which could be qualified as concentrates wasters and who had
consequently negative profitability, and also farms who adopted extensive milk
production, mainly based on roughages. The last category gathered very few
farms which could be considered as dairy specialised units. Paradoxically, it
was shown that milk yield per cow was better in suburban zone than in the
irrigated plain because of farmers' abilities to purchase additional
concentrates. Whenever detailing rearing practices and their consequences, it
appears that state farms illustrate a singular way of dairying in Morocco, as
the peak of intensification they represent was totally linked to artificial
conditions: huge amounts of concentrates per cow and heavy veterinary
treatments. In the Ben Slimane rainfed agricultural plateau, this logics of
intensive dairy farming had a severe constraint: drought which affects
profitability per cow and induces purchases of concentrates as the only way to
maintain high milk yields (> 5 000 kg) per cow. Finally, in the
suburban area, it has been shown that milk production relies mainly on
concentrates purchases, as farms are generally suffering from limited forage
area. Consequences on milk quality are dramatic, as fat content does not
respect normal value of 35 g/kg in two out of five farms. On another hand, milk
hygienic quality can be described as very poor in all the studied farms. All
together, these conclusions dictate adapted development measures for each of
the identified groups, with a particular accent on equilibrated rations even
with high levels of concentrates. This would be compulsory to improve the
average milk yield per cow and to maintain profitable farms.
Le passé nourrit partout notre science. Dans la
grande vallée méditerranéenne, le rythme des
sécheresses est aussi ancien que l'araire et la chèvre et, les
années où l'herbe meurt jusqu'aux racines, le berger sait qu'il
doit sacrifier une partie de son troupeau - donc de son capital, de son outil
de survie ; les femmes salent alors la viande (très peu de viande
et beaucoup d'os) en prévision des mauvais jours qui viennent, car le
beurre manquera dans la soupe, car les enfants n'auront plus de lait, et les
maladies bénignes deviendront mortelles... Mais l'année suivante,
les chevrettes épargnées par le désastre se rassasient, se
gavent, se goinfrent dans les pâquis verts quasi vides, et elles donnent
tant de lait qu'il en reste même une écuelle pour le petit chien
qui vient de naître.
Germaine Tillion (2000)
Il était une fois l'ethnographie
Editions du Seuil
Paris, p. 118.
Table des matières
Introduction générale
|
p. 1
|
|
|
Partie I. Problématique et cadre
théorique des analyses systémiques
|
p. 9
|
|
|
I. 1 Problématique générale
|
p. 10
|
|
|
I. 2 Recherches systémiques et élevage bovin
laitier
|
p. 13
|
I. 2. 1 Introduction
|
p. 13
|
I. 2. 2 Terminologie et concepts des recherches sur les
systèmes agricoles
|
p. 15
|
I. 2. 3 Déterminisme et évolution des recherches
sur les systèmes agricoles
|
p. 19
|
I. 2. 4 Applications des recherches sur les systèmes
agricoles aux activités d'élevage
|
p. 20
|
I. 2. 5 Outils et méthodes des recherches sur les
systèmes d'élevage : cas des bovins laitiers
|
p. 24
|
I. 2. 6 Atouts et limites des recherches sur les
systèmes d'élevage laitier
|
p. 29
|
I. 2. 7 Conclusion
|
p. 32
|
|
|
Partie II. Evolutions des filières
laitières au Maghreb
|
p. 35
|
|
|
II. 1 Étude des filières laitières
maghrébines : introduction
|
p. 36
|
|
|
II. 2 Cadre naturel de l'agriculture et de l'élevage au
Maghreb
|
p. 38
|
|
|
II. 3 Politiques laitières dans les pays du Maghreb
|
p. 42
|
|
|
II. 4 Performances des filières laitières au
Maghreb
|
p. 46
|
|
|
II. 5 Développement des filières
laitières au Maghreb
|
p. 55
|
|
|
II. 6 Conclusions : perspectives des filières au
Maghreb
|
p. 57
|
|
|
Partie III. Etablissement de typologies
d'élevages de bovins au Maroc
|
p. 59
|
|
|
III. 1 Etablissement de typologies d'étables au
Maroc : hypothèses et modalités de travail
|
p. 60
|
|
|
III. 2 Typologies d'élevages bovins dans la zone
suburbaine de Rabat - Salé
|
p. 63
|
III.2.1 Introduction
|
p. 63
|
III.2.2 Présentation de la zone d'étude et
méthodologie
|
p. 63
|
III.2.2.a Zone d'étude
|
p. 63
|
III.2.2.b Méthodologie
|
p. 65
|
III.2.3 Résultats et discussion
|
p. 67
|
III.2.3.a Caractéristiques générales des
exploitations suburbaines
|
p. 67
|
III.2.3.b Analyses statistiques multidimensionnelles
|
p. 68
|
III.2.3.c Discussion
|
p. 73
|
III.2.4 Conclusion
|
p. 76
|
|
|
III. 3 Typologie d'élevages bovins dans le
périmètre irrigué du Gharb
|
p. 78
|
III.3.1 Introduction
|
p. 78
|
III.3.2 Présentation de la zone du Gharb et
méthodologie
|
p. 78
|
III.3.2.a La zone du Gharb
|
p. 78
|
III.3.2.b Méthodologie
|
p. 80
|
III.3.3 Résultats et discussion
|
p. 82
|
III.3.3.a Caractéristiques générales des
exploitations pratiquant l'élevage bovin dans le périmètre
du Gharb
|
p. 82
|
III.3.3.b Analyse de la diversité des exploitations
d'élevage bovin : la typologie
|
p. 83
|
III.3.3.c Les stratégies des éleveurs :
l'analyse des cas types
|
p. 88
|
III.3.3.d Lait et/ou viande ? Les perspectives
d'avenir
|
p. 92
|
|
|
III.4 Analyse comparative des systèmes d'élevage
bovin en zones irriguée et suburbaine
|
p. 95
|
III.4.1 Introduction
|
p. 95
|
III.4.2 Méthodes de travail
|
p. 95
|
III.4.2.a Echantillon d'étude
|
p. 95
|
III.4.2.b Comparaison intra et inter région
|
p. 96
|
III.4.3 Résultats et discussion
|
p. 97
|
III.4.3.a Aperçu général sur les
caractéristiques des exploitations et des performances
laitières
|
p. 97
|
III.4.3.b Evaluation des différences entre
régions de l'activité laitière des exploitations
agricoles
|
p. 99
|
III.4.3.c Résultats des analyses statistiques
multidimensionnelles
|
p. 100
|
IV.4.3.d Discussion des résultats de la typologie
comparative des étables laitières à Rabat - Salé et
dans le Gharb
|
p. 106
|
III.4.4 Conclusion
|
p. 108
|
|
|
III. 5 Synthèse générale des typologies
d'élevage bovin et implications pour des études de cas
|
p. 110
|
|
|
Partie IV. Etudes de cas d'élevages de bovins
laitiers au Maroc
|
p. 113
|
|
|
IV.1 Performances et modalités de l'élevage
laitier en étables étatiques : cas de six fermes de la
SODEA
|
p. 114
|
IV.1.1 Introduction
|
p. 114
|
IV.1.2 Méthodologie de l'étude
|
p. 114
|
IV.1.2.a Bilan de diagnostic de gestion
|
p. 114
|
IV.1.2.b Analyse des performances par les paramètres de
conduite
|
p. 116
|
IV.1.2.c Analyses statistiques
|
p. 117
|
IV.1.3 Résultats des étables laitières
étatiques
|
p. 117
|
IV.1.3.a Pratiques d'élevage et performances des vaches
sur les Unités de Production étudiées
|
p. 117
|
IV.1.3.b Performances de production et alimentation des vaches
laitières
|
p. 119
|
IV.1.3.c Performances de reproduction
|
p. 120
|
IV.1.3.d Performances économiques du cheptel bovin
|
p. 121
|
IV.1.3.e Facteurs explicatifs des performances des vaches par
unité de production
|
p. 122
|
IV.1.3.f Classement des unités de production
|
p. 125
|
IV.1.4 Conclusion
|
p. 127
|
|
|
IV.2 Résultats économiques et techniques d'une
unité de production laitière dans la région d'agriculture
pluviale de Ben Slimane
|
p. 128
|
IV.2.1 Introduction
|
p. 128
|
IV.2.2 Présentation générale de la
région de Ben Slimane et de l'exploitation étudiée
|
p. 128
|
IV.2.3 Analyse des paramètres de production et de
rentabilité de l'étable de la zone pluviale
|
p. 130
|
IV.2.4 Le troupeau bovin et les variations de ses performances
de production et de rentabilité
|
p. 131
|
IV.2.5 Conclusion
|
p. 136
|
|
|
IV.3 Suivi continu d'élevages laitiers suburbains :
résultats de sept étables
|
p. 137
|
IV.3.1 Introduction
|
p. 137
|
IV.3.2 Méthodologie de l'étude
|
p. 137
|
IV.3.3 Situation générale des exploitations et
de leurs moyens de production
|
p. 138
|
IV.3.4 Alimentation, production laitière et
reproduction du cheptel bovin des fermes suburbaines
|
p. 139
|
IV.3.5 Evaluation des résultats économiques des
fermes laitières suburbaines
|
p. 142
|
IV.3.6 Modélisation du rendement laitier moyen par
vache
|
p. 142
|
IV.3.7 Conclusion
|
p. 144
|
|
|
IV.4 Incidences des pratiques d'élevage sur la
qualité du lait dans cinq étables suburbaines de Rabat -
Salé
|
p. 145
|
IV.4.1 Introduction
|
p. 145
|
IV.4.2 Méthodologie de l'étude
|
p. 145
|
IV.4.3 Résultats et discussion
|
p. 147
|
IV.4.3.a Performances de production des fermes
étudiées et évaluation de la qualité du lait
|
p. 147
|
IV.4.3.b Pratiques d'élevage et qualité du
lait : établissement d'une typologie de laits au Maroc
|
p. 155
|
IV.4.4 Conclusion
|
p. 159
|
|
|
Partie V. Conclusion générale et
recommandations
|
p. 161
|
|
|
V.1 Conclusion générale
|
p. 162
|
|
|
V.2 Recommandations
|
p. 167
|
|
|
Publications en relation avec la thèse et
références bibliographiques
|
p. 177
|
|
|
VI.1 Publications en relation avec la thèse
|
p. 178
|
|
|
VI.2 Références bibliographiques
consultées
|
p. 181
|
Liste des tableaux
Tableau 1.
|
Quelques exemples de liens linguistiques entre les mots
« cheptel » et « richesse »
|
p. 15
|
|
|
Tableau 2.
|
Classification des interactions au sein d'un système de
production agricole
|
p. 16
|
Tableau 3.
|
Matrice pour la représentation des systèmes
d'élevage
|
p. 22
|
|
|
Tableau 4.
|
Caractéristiques schématiques de deux
démarches différentes pour la recherche et l'action
|
p. 27
|
|
|
|
Tableau 5.
|
Les composantes, éléments et paramètres
des systèmes d'élevage
|
p. 30
|
|
|
Tableau 6.
|
Implications des caractéristiques des élevages
sur les essais en milieu paysan
|
p. 32
|
|
|
Tableau 7.
|
Variations des précipitations au Maroc : cas des
stations de Rabat - Salé et de Béni Mellal
|
p. 40
|
|
|
Tableau 8.
|
Niveau d'importation des produits laitiers dans les pays du
Maghreb
|
p. 43
|
|
|
Tableau 9.
|
Evolution de l'importation de génisses laitières
au Maroc
|
p. 47
|
|
|
Tableau 10.
|
Evolution des importations de poudre de lait industriel au
Maroc
|
p. 48
|
|
|
Tableau 11.
|
Evolution de la consommation des produits laitiers au Maroc
|
p. 49
|
|
|
Tableau 12.
|
Ecarts entre les prix à la production et à la
consommation au Maroc
|
p. 50
|
|
|
Tableau 13.
|
Prix à la production et coûts de production de
denrées agricoles de base en Tunisie en dinars par tonne (année
1975)
|
p. 53
|
|
|
Tableau 14.
|
Variables décrivant les fermes laitières
suburbaines et leurs symboles
|
p. 66
|
|
|
Tableau 15.
|
Caractéristiques générales des
étables de la région de Rabat - Salé
|
p. 67
|
|
|
Tableau 16.
|
Résultats de l'ACP - Définition des axes :
Région de Rabat - Salé
|
p. 69
|
|
|
Tableau 17.
|
Eléments d'élaboration de la typologie des
étables laitières de la région de Rabat - Salé
|
p. 73
|
|
|
Tableau 18.
|
Contribution des variables aux axes de l'ACP :
région du Gharb
|
p. 83
|
|
|
Tableau 19.
|
Les différents types d'éleveurs de bovins dans
l'arrondissement de Sidi Allal Tazi (périmètre du Gharb)
|
p. 85
|
|
|
Tableau 20.
|
Caractéristiques des cas - types d'élevages
bovins du périmètre irrigué du Gharb
|
p. 92
|
|
|
Tableau 21.
|
Variables décrivant les fermes laitières des
zones suburbaine de Rabat - Salé et irriguée du Gharb et leurs
symboles
|
p. 97
|
|
|
Tableau 22.
|
Paramètres moyens de structure et de fonctionnement
décrivant les 118 fermes laitières étudiées dans
les zones suburbaine et irriguée
|
p. 98
|
|
|
Tableau 23.
|
Comparaison générale des fermes laitières
au périmètre irrigué du Gharb et dans la ceinture
suburbaine de Rabat - Salé
|
p. 99
|
|
|
Tableau 24.
|
Résultats de l'ACP intra région :
définition des axes
|
p. 103
|
|
|
Tableau 25.
|
Caractéristiques moyennes des types d'élevage
bovin identifiés par la classification ascendante
hiérarchique
|
p. 105
|
|
|
Tableau 26.
|
Valeurs énergétiques des aliments
utilisés et quantités moyennes ingérées par les
vaches
|
p. 116
|
|
|
Tableau 27.
|
Superficie et occupation du sol dans les six étables
étatiques étudiées
|
p. 118
|
|
|
Tableau 28.
|
Races et effectifs des vaches dans les six étables
étatiques étudiées
|
p. 118
|
|
|
Tableau 29.
|
Caractérisation de l'alimentation des vaches
laitières dans chaque unité de production (moyennes et
écarts types)
|
p. 119
|
|
|
Tableau 30.
|
Performances moyennes de reproduction du cheptel bovin dans
les six étables étatiques (écarts types)
|
p. 121
|
|
|
Tableau 31.
|
Performances économiques moyennes de la production
laitière dans les six étables étatiques (écart
type)
|
p. 122
|
|
|
Tableau 32.
|
Comparaison des étables étatiques par rapport
à leur productivité laitière et aux résultats de
reproduction des vaches
|
p. 126
|
|
|
Tableau 33.
|
Variations de l'assolement et de l'alimentation des vaches de
1994/95 à 1996/97 dans une exploitation laitière de Ben
Slimane
|
p. 132
|
|
|
Tableau 34.
|
Test d'indépendance statistique (÷²) de la
monte naturelle par rapport à l'insémination artificielle
|
p. 133
|
|
|
Tableau 35.
|
Rentabilité de la production laitière au cours
des trois années d'étude de l'élevage de Ben Slimane
|
p. 135
|
|
|
Tableau 36.
|
Paramètres structurels des fermes suburbaines
étudiées
|
p. 139
|
|
|
Tableau 37.
|
Paramètres d'alimentation des vaches dans les fermes
suburbaines étudiées
|
p. 139
|
|
|
Tableau 38.
|
Caractéristiques de la reproduction et rendement
laitier par vache des fermes suburbaines
|
p. 141
|
|
|
Tableau 39.
|
Performances économiques des vaches laitières
dans les fermes suburbaines
|
p. 142
|
|
|
Tableau 40.
|
Caractéristiques structurelles des élevages
suburbains étudiés pour leurs paramètres de qualité
du lait
|
p. 148
|
|
|
Tableau 41.
|
Caractérisation de l'alimentation et des performances
laitières des vaches en étables suburbaines
|
p. 151
|
|
|
Tableau 42.
|
Paramètres économiques de la production
laitière dans les étables suburbaines
|
p. 152
|
|
|
Tableau 43.
|
Caractéristiques des différentes classes de
qualité du lait en élevages suburbains
|
p. 154
|
|
|
Tableau 44.
|
Répartition des échantillons de lait
collectés par classe selon leur qualité physico-chimique
|
p. 157
|
|
|
Tableau 45.
|
Caractéristiques des différentes classes de
qualité du lait en étables suburbaines
|
p. 159
|
|
|
|
Liste des figures
Figure 1.
|
Représentation simplifiée des différences
entre les systèmes agricoles des pays développés et les
systèmes agricoles plus extensifs et multifonctionnels des pays en
développement
|
p. 24
|
|
|
Figure 2.
|
Evolution de la production laitière bovine dans les
pays du Maghreb
|
p. 46
|
|
|
Figure 3.
|
Evolution de la taille du cheptel bovin dans les pays du
Maghreb
|
p. 47
|
|
|
Figure 4.
|
Evolution des indices des prix unitaires du lait à la
production et de la poudre de lait importée en Algérie
|
p. 51
|
|
|
Figure 5.
|
Evolution des indices des prix de l'aliment pour vache
laitière et du lait à la production en Algérie
|
p. 51
|
|
|
Figure 6.
|
Evolution des indices de la production du lait de vache et du
prix du lait perçu par les éleveurs en Algérie
|
p. 52
|
|
|
Figure 7.
|
Localisation des zones d'établissement de typologies
d'élevages bovins au Maroc
|
p. 61
|
|
|
Figure 8.
|
Carte administrative de la région de Rabat -
Salé
|
p. 64
|
|
|
Figure 9.
|
Projection des variables techniques et économiques des
fermes laitières suburbaines sur les axes factoriels 1 et 2
définis par l'ACP
|
p. 69
|
|
|
Figure 10.
|
Projection des groupes de fermes laitières sur le plan
principal défini par l'ACP
|
p. 71
|
|
|
Figure 11.
|
Représentation synthétique de la typologie des
élevages laitiers suburbains
|
p. 72
|
|
|
Figure 12.
|
Carte administrative du périmètre irrigué
du Gharb
|
p. 80
|
|
|
Figure 13.
|
Cercle des corrélations des variables de l'ACP :
étables dans la zone irriguée du Gharb
|
p. 84
|
|
|
Figure 14.
|
Représentation schématique de la typologie des
élevages bovins dans le Gharb
|
p. 85
|
|
|
Figure 15.
|
Gradients de production de lait et de viande dans les
différents systèmes d'élevage bovin au Gharb
|
p. 88
|
|
|
Figure 16.
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Projection des variables sur l'axe factoriel issu de l'ACP
inter régions
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p. 101
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Figure 17.
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Projection des exploitations des régions suburbaine de
Rabat - Salé (R) et irriguée du Gharb (G) sur l'axe factoriel
issu de l'ACP intra régions
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p. 102
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Figure 18.
|
Projection des variables techniques et économiques
caractérisant les fermes laitières sur le plan principal
défini par l'ACP intra régions
|
p. 104
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Figure 19.
|
Localisation des UP laitières de la SODEA
étudiées
|
p. 115
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Figure 20.
|
Effets des quantités de concentrés par kg de
lait sur la moyenne économique dans les étables
étatiques
|
p. 122
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Figure 21.
|
Relation entre la moyenne économique et la consommation
moyenne annuelle de concentrés par vache dans les étables
étatiques
|
p. 123
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Figure 22.
|
Incidence de la consommation de concentrés par kg de
lait sur le bénéfice moyen par vache dans les étables
étatiques
|
p. 124
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Figure 23.
|
Effet de la durée du travail (en jours) par
Unité Gros Bétail bovine sur le bénéfice par vache
dans les étables étatiques
|
p. 125
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Figure 24.
|
Situation de l'exploitation laitière
étudiée en zone d'agriculture pluviale
|
p. 129
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Figure 25.
|
Structure du produit brut (A) et des charges d'élevage
bovin (B) dans une exploitation laitière de la zone pluviale de Ben
Slimane
|
p. 134
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Figure 26.
|
Corrélation entre le rendement laitier et la
consommation de concentrés par vache en étables suburbaines
|
p. 143
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Figure 27.
|
Calendrier fourrager des fermes laitières suburbaines
étudiées pour leurs paramètres de qualité du
lait
|
p. 149
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Figure 28.
|
Variations des taux butyreux et protéiques annuels
moyens en fonction des exploitations étudiées
|
p. 153
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Figure 29.
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Projection des variables de qualité du lait sur le plan
principal de l'ACP
|
p. 156
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Liste des abréviations
ACP : Analyse en Composantes Principales
APV : Age au Premier Vêlage
BV : Bénéfice par Vache
CAH : Classification Ascendante Hiérarchique
CAT : Charges Alimentaires par rapport aux charges
Totales (%)
CIHEAM : Centre International des Hautes Etudes
Agronomiques Méditerranéennes
CV : Coefficient de Variation
DH : Dirham marocain (au 1er novembre 2004,
1Euro = 11,22 Dirhams)
DPA : Direction Provinciale de l'Agriculture
FCC : Ratio Fourrages/Concentrés dans le bilan
énergétique global des vaches
FEZ : Fédération Européenne de
Zootechnie
FMAT : Flore Mésophile Aérobie Totale
IA : Insémination Artificielle
IVV : Intervalle vêlage - vêlage
j : jour
MADR : Ministère de l'Agriculture et du
Développement Rural
MADREF : Ministère de l'Agriculture, du
Développement Rural, des Eaux et Forêts
MAMVA : Ministère de l'Agriculture et de la Mise
en Valeur Agricole
MARA : Ministère de l'Agriculture et de la
Réforme Agraire
ME : Moyenne Economique
ORMVA : Offices Régionaux de Mise en Valeur
Agricole
PCC : Pourcentage des apports énergétiques
dus aux concentrés dans les rations de vaches laitières
PRK : Prix de Revient du kg de lait
PSB : Pulpe Sèche de Betterave
RSA : Recherches sur les Systèmes Agraires
RSE : Recherches sur les Systèmes d'Elevage
SAU : Superficie Agricole Utile
SFP : Surface Fourragère Principale
SODEA : Société du Développement
Agricole
UFC : Unités Formant Colonie
UFL cc/kg lait : Nombre d'UFL des concentrés par
kg de lait produit
UFL cc/v/an : Nombre d'UFL des concentrés par
vache et par an
UFL : Unités Fourragères Lait
UGB : Unité Gros Bétail
UP : Unité de Production
UTH : Unités de Travail Humain
VAL : Valeur des ventes d'Animaux (Bovins) par rapport
aux ventes de Lait (%)
VIR : Variation d'Inventaire Relative
VP : Vaches Présentes
VT : Vaches Traites
Dédicaces
A mes très chers parents, pour tous les efforts que
vous avez consentis pour mon éducation et ma formation.
A mon frère Ikbal et à ma soeur Selwa et aux
membres de leur petite famille respective. En témoignage de votre
constante attention à mon égard, moi l'aîné,
éternel égaré.
A ma grand-mère Aïcha, qui m'a inculqué
à un âge très sensible la recherche de la perfection et
dont la sagesse n'a d'égale que la gentillesse. Puisse Allah exaucer
toutes tes prières et t'accorder santé et longue vie.
A tous les membres de ma grande famille, pour vos
encouragements et votre présence aux moments les plus durs.
A tous mes amis et à ceux qui m'ont permis de
parachever ce travail sans jamais me décourager. Les citer
exhaustivement serait trop long. Ils se reconnaîtront.
Remerciements
Placée sous le sceau de ma responsabilité
personnelle, cette thèse doctorale n'en est pas moins le fruit
d'intenses collaborations. En premier lieu, je me dois d'exprimer ma profonde
gratitude à Monsieur le Professeur André Théwis,
responsable de l'Unité de Zootechnie de la Faculté universitaire
des Sciences agronomiques de Gembloux (FuSaGx), promoteur de cette
thèse, pour m'avoir accepté dans son laboratoire et pour la
confiance qu'il m'a accordée. Son soutien, tant moral que
matériel, continuel, même aux moments de doutes, ses lectures
critiques des travaux réalisés et ses qualités humaines
ont largement contribué à l'aboutissement de ce type de projet de
thèse.
Par ses conseils éclairés et le temps qu'il leur
a consacrées, Monsieur Rudy Palm a largement facilité les
interprétations statistiques des matrices de résultats
d'enquêtes. Je tiens à lui témoigner toute ma
reconnaissance pour l'initiation approfondie aux méthodes d'analyses
multidimensionnelles, et à leur exploitation dans mes travaux.
Ce travail est entièrement tributaire de la patience et
de la qualité de l'accueil que m'ont réservées les
éleveurs de bovins laitiers dans différentes régions du
Maroc (Ben Slimane, Gharb, Rabat - Salé). J'ai beaucoup appris en leur
compagnie, car ils ont su m'inculquer leurs considérations pour les
vaches et leurs productions. En outre, je suis particulièrement
redevable à Messieurs Mohammed Abidi et Mohammed Boukraj de la
Société du Développement Agricole, à Monsieur
Khalid Mékouar, éleveur privé à Ben Slimane,
à Messieurs Mohammed El Qsibate et Anass Elayachi et Madame Btissam
Kessab de la Société Centrale Laitière et aux
gestionnaires de différentes associations d'élevage (Rabat -
Salé, Gharb), pour l'aide qu'ils m'ont prodiguée.
Les enquêtes et les contrôles de performances
rapportés dans cette thèse et qui en constituent le fondement,
ont été accomplis en compagnie d'étudiants que j'ai
encadrés lors de leurs travaux de fin d'étude à l'Institut
Agronomique et Vétérinaire (IAV) Hassan II. Les remercier est
pour moi un immense plaisir, car j'ai le plus souvent éprouvé une
réelle satisfaction à leur faire partager les joies du dialogue
avec les éleveurs. Que Messieurs Issam Hasni Alaoui, Mounir El Khattabi,
Aziz Lahyani et Rachid Lyoubi, et Mesdames Najat Kiade et Jeanne Marie Leblond
trouvent ici une vraie reconnaissance pour leur labeur.
A cette occasion, je voudrais rendre hommage aux personnes
à l'IAV Hassan II, qui m'ont permis de mener à bien les nombreux
et nécessaires déplacements sur le terrain ainsi que les analyses
d'échantillons de lait et d'aliments de bovins. Que les chauffeurs qui
m'ont accompagné avec les étudiants, le staff administratif du
Département des Productions Animales et Madame Malika Bennani, et
Messieurs Mohammed Chichi et Ahmed Mourtaki, pour leur aide précieuse au
laboratoire, soient assurés de ma considération
sincère.
Je voudrais aussi exprimer mes sentiments les plus chaleureux
à tous les membres (enseignants, assistants de recherche,
étudiants et employés) de l'Unité de Zootechnie de la
FuSaGx pour l'accueil et pour les moments qu'ils ont bien voulu partager en ma
compagnie. Une pensée particulière à Mademoiselle
Geneviève Jean, pour les multiples coups de main (le masque sur
Powerpoint ! le Bricolage !), ô combien salutaires, relatifs
à mon installation, à mes petits ennuis, notamment informatiques,
et au suivi de l'acheminement du courrier.
Un grand merci à Mesdames Michelle Moreau Van
Marsenille et Françoise Strouven qui m'ont toujours gentiment accueilli
à Gembloux. De même, je ne pourrais oublier Madame Anne Willocq
qui m'a maintes fois, avec un sérieux et une gentillesse
inégalés, rendu service, des premiers pas menant à
l'inscription à Gembloux jusqu'aux démarches finales pour la
défense de ce travail.
L'aide octroyée par le Gouvernement belge
(Coopération Technique Belge, C.T.B.) sous forme d'une bourse
d'étude a été déterminante pour la
réalisation de ce travail. A cet égard, je voudrais remercier
plus particulièrement Madame Christine Leroy, Mademoiselle Amal Hadaj et
Monsieur Célestin Misigaro qui se sont occupés de mon
installation et des détails relatifs à mes séjours en
Belgique. Je voudrais aussi mentionner l'aide matérielle que m'a
prodiguée la Coopération Universitaire au Développement
(C.U.D.), sous forme d'un programme
« micro-réalisation » et qui a permis d'effectuer
les analyses relatives à la qualité du lait in situ.
Je dois aussi mentionner que ce travail n'aurait pu être
effectué sans les fréquentes autorisations de longs
séjours en Belgique que m'a délivrées le Directeur de
l'IAV Hassan II, le Professeur Fouad Guessous. Je lui suis aussi reconnaissant
pour ses encouragements.
Que Messieurs Yves Beckers, André Buldgen, Nicolas
Gengler, Jean Pierre Lambotte, Philippe Lebailly, Rudy Palm, Mohamed Raki et
André Théwis, membres de la Commission du suivi de cette
thèse, trouvent ici l'expression de mon profond respect pour leurs
remarques constructives et leurs critiques judicieuses de mes travaux. Je vous
suis redevable de l'amendement et de la bonification de cette thèse. Un
grand merci aussi à Messieurs Bernard Faye et Lebailly Philippe d'avoir
accepté d'être les rapporteurs de cette thèse.
Une pensée amicale pour mes collègues du
Département des Productions Animales, qui m'ont adopté dans leur
structure. De même, je voudrais ici témoigner de mon estime pour
mon collègue Abed Hamama, professeur à l'IAV Hassan II, pour
m'avoir aimablement permis d'utiliser l'infrastructure de son laboratoire de
recherche pour la caractérisation de la qualité hygiénique
du lait.
Finalement, je ne pourrais clore cette page sans remercier mes
collègues chercheurs Alain Bourbouze et Bernard Faye, en France, pour le
suivi et l'intérêt qu'ils ont accordé à mes travaux
et pour les collaborations fructueuses que nous avons
développées, afin de mieux comprendre les logiques et les
incidences des pratiques adoptées par les éleveurs de bovins
laitiers au Maroc.
Introduction générale
Il ne s'agit pas d'aller enseigner les paysans mais de se
rendre compte qu'on a tellement à apprendre auprès d'eux.
René Dumont (1974)
Agronome de la faim.
Coll. Un homme et son métier. Editions Robert Laffont
Paris, p. 394.
Le développement de l'espace rural et agricole au Maroc
a toujours été un défi pressant pour les pouvoirs publics,
constituant un pivot des politiques suivies par le pays, car il est le
principal garant de la cohésion et de la stabilité [LEVEAU,
1972]. A cet égard, dès l'Indépendance du pays en
1956, différents plans régionaux et sectoriels de promotion des
productions agricoles ont été conçus : projet DERRO
(Développement Economique et Rural du Rif Occidental), projet Sebou,
opération labour, plan sucrier, plan laitier... Outre la création
de richesses et de travail dans le monde rural, ces opérations
intensivement encadrées et subventionnées par l'Etat marocain
visaient aussi l'approvisionnement en denrées de première
nécessité d'une population jeune et en croissance
démographique accélérée, aspirant à
davantage de produits alimentaires de qualité et de haute valeur
nutritionnelle (protéines animales notamment).
L'agriculture marocaine a souvent été
décrite comme étant caractérisée par une
dualité flagrante opposant d'une part, une grande majorité de
petites exploitations de type vivrier avec des moyens de production sommaires
(plus de 80 % des agriculteurs, selon le dernier recensement
général de l'agriculture, RGA), à d'autre part, des
exploitations à caractères structurels (superficie, capitaux,
savoir-faire) nettement plus évolués [MADRPM, 1999]. C'est dans
ce genre de réalité que plusieurs auteurs [AKESBI, 1996 ; EL
KHYARI, 1985] trouvent une explication à son manque de
compétitivité, avec des bilans bien plus que mitigés
depuis l'Indépendance. S'il est clair que pour la majorité des
produits vitaux pour l'alimentation de la population et la balance des
paiements (céréales, viandes et lait, produits d'exportation tels
qu'agrumes et primeurs), des progrès en matière de couverture des
besoins ont été réalisés, il n'en demeure pas moins
que le pays reste très tributaire des importations de
céréales et de produits animaux, notamment après des
années de sécheresse. Pour les produits d'élevage, les
niveaux de consommation actuellement enregistrés sont de l'ordre de 12
kg de viande blanche per capita par an, 15 kg de viandes rouges (8 kg
de viandes ovines et caprines, 7 kg de viandes bovines) et 44
équivalents litres de lait. Ces chiffres ont connu des évolutions
divergentes, avec une augmentation marquée de la contribution des
viandes blanches, suite à un essor considérable du secteur de
l'aviculture industrielle (de 15 % de la production totale des viandes
blanches en 1968 à près de 82 % de cette production en 2003). En
parallèle à cette croissance soutenue du secteur de la production
avicole intensive, surtout liée à une volonté individuelle
d'investisseurs privés, l'Etat marocain a concentré ses efforts
sur la satisfaction des besoins de la population en protéines animales
d'origine laitière. En effet, juste après la décennie
1960, les autorités agricoles se sont penchées sur
l'élaboration d'un plan laitier, outil de base pour la promotion de la
production bovine au Maroc. A la clef, se profilait un projet d'envergure
puisque concernant la quasi totalité des exploitations agricoles du
pays, étant donné qu'elles possèdent dans leur immense
majorité quelques vaches. L'objectif principal visé était
d'assurer pour chaque Marocain un apport quotidien de 1/3 de litre de lait
à l'horizon 2000, à partir d'une situation initiale de 100 ml,
soit une augmentation de la production totale annuelle de 400 à plus de
2 000 millions de litres de lait [MADRPM, 1998b]. Il s'agissait, en fait,
de réaliser des objectifs directs d'accroissement de la production
laitière à un rythme de 6 % par an, et indirectement de
contribuer à l'amélioration des performances viandeuses du
cheptel, en favorisant les croisements avec les races à lait plus
efficaces en terme de croissance que les races locales. Pour la
concrétisation de ces objectifs, le plan laitier, dont le lancement
officiel a eu lieu en 1975, était intensément soutenu par
plusieurs mesures d'accompagnement, toutes fortement financées par les
bailleurs de fonds internationaux, à l'instar de nombreux autres projets
laitiers à travers le monde (opération Flood en Inde,
opération Milk Collecting Centres, MCC, en Malaisie...) [NESTEL, 1984].
Ainsi, en aval de la filière, l'Etat marocain, dans un souci de fournir
un débouché fiable au lait produit, a encouragé la
constitution d'un réseau de collecte très dense, et a
accompagné la construction d'usines laitières, tout comme il a
fortement taxé les importations de poudre de lait [BOURBOUZE, 2002]. Il
a aussi instauré le contrôle du prix du lait à la
production et à la consommation, en s'assurant d'éviter toute
distorsion des termes de l'échange qui serait fatale aux
éleveurs. Par ailleurs, en amont, tout un ensemble de décrets
pour l'aide aux producteurs a été adopté. L'importation de
génisses laitières gravides, la vulgarisation de
l'Insémination Artificielle (IA), la mise en place d'unités
d'élevage pépinières et l'ébauche du contrôle
laitier ont été autant d'opérations destinées
à créer rapidement un matériel génétique
bovin amélioré pour ses caractères laitiers (du moins, en
comparaison avec les populations bovines de type local), adapté aux
conditions d'élevage prévalant dans le pays. De plus, de
nombreuses interventions des services agricoles de l'Etat ont été
planifiées au niveau des étables, pour garantir la diffusion dans
le monde rural des techniques d'élevage laitier intensif. Ainsi,
l'ensilage de maïs, la vulgarisation de nouvelles cultures
fourragères (le sorgho, le ray-grass, la betterave...) et des techniques
culturales nécessaires à leur réussite, l'initiation
à la traite mécanique, la propagation de sous-produits agro -
industriels non conventionnels (pulpes d'agrumes, pulpes de caroube, tourteaux
de tournesol, urée...) ont été testés.
Il est vrai que l'ensemble de ces aides et interventions
étatiques a rapidement créé un engouement pour
l'élevage laitier. Celui-ci s'est fait ressentir non seulement dans les
zones irriguées où les autorités agricoles, au travers de
coûteux investissements en équipements hydrauliques (barrages,
adductions d'eau, stations de pompage), ont largement milité pour
l'implantation d'étables performantes, mais aussi dans les zones
d'agriculture pluviale favorables (plus de 400 mm de pluviosité par an,
ce qui est suffisant pour une production fourragère) et dans les abords
des grandes agglomérations urbaines. Ceci a engendré un
accroissement notable de la production laitière marocaine, dans des
proportions nettement supérieures aux résultats obtenus dans des
pays limitrophes [BOURBOUZE et al., 1988]. Toutefois, cet élan
vers la spéculation bovine a commencé à régresser
de manière notable à partir des années 1990, pour diverses
raisons, dont le désengagement de l'Etat et la diminution de la
protection de la filière laitière ne sont pas des moindres
[AKESBI, 1997]. En effet, plusieurs subventions à la production
(notamment pour l'importation de génisses, l'acquisition de
matériel de traite) ont été progressivement
supprimées. Par ailleurs, les termes mêmes de la commercialisation
du lait se sont détériorés, avec une augmentation de la
plus-value dégagée par les usines de transformation, au
détriment des éleveurs. De plus, l'avènement de nombreux
épisodes de sécheresse à partir des années 1980
[BARAKAT et HANDOUFE, 1998], a fortement pesé sur les capacités
de production fourragère. Un décalage perceptible des
performances du cheptel bovin par rapport aux prévisions du plan laitier
a lors commencé à se faire sentir. En effet, en l'an 1998, les
réalisations ne représentaient même pas 50 % du volume
projeté par les initiateurs de ce projet [MADRPM, 1998b].
Néanmoins, en raison des nombreux rôles, autres
que productifs (restitution de fertilité aux sols, emplois de
main-d'oeuvre, affirmation de statut social...), assumés par le cheptel
bovin, l'activité de production laitière avec des vaches de type
pie-noir, autrefois cantonnées aux seuls domaines de la colonisation et
chez les notables locaux, s'est définitivement ancrée dans le
paysage rural du Maroc. Ce constat de diffusion de bovins de races Frisonne et
Holstein directement issues de l'importation, auxquelles se mêlent les
populations locales et leurs nombreux croisements, contribue à
créer une réelle diversité génétique, dans
les nombreux agro - écosystèmes du pays. C'est ce qui nous a
interpellé, dans un contexte général de la filière
laitière mouvementé et en pleine évolution.
Aussi, pour étudier l'insertion des troupeaux de vaches
dans différents types de situations d'élevage au Maroc (zones
irriguées, zones d'agriculture pluviale, ceintures périurbaines),
et en vue d'analyser les performances tant techniques (valorisation des
aliments concentrés, intervalles entre vêlages,
productivité en lait par vache par an...) qu'économiques
(rentabilité par vache et coût de revient du litre de lait) du
cheptel bovin, avons-nous songé à appliquer des diagnostics
zootechniques. Ceci serait une première évaluation de la
durabilité de ce genre de systèmes de production, encore plus
menacés par l'option d'ouverture totale du marché marocain
prévue par les accords de libre-échange ratifiés par le
pays.
Une autre perspective dégagée par ce travail
serait de construire des références sur les modes de
fonctionnement et les performances techniques et économiques auxquelles
aboutissent les étables laitières, en conditions réelles,
dans un contexte dominé par le désengagement de l'Etat, et la
rareté pour ne pas dire l'inexistence de données fiables sur les
résultats des élevages. Il nous faut mentionner ici que moins de
5 % des vaches laitières de race Frisonne pie-noire et Holstein
sont soumis au contrôle laitier, et que de nombreux vices de forme
entachent cette opération. Par ailleurs, ce relevé des
performances reste cantonné aux seules « grandes »
étables, qui pour une affaire de prestige social et d'influence locale,
continuent de bénéficier des apports des services techniques de
l'Etat. Il va sans dire que l'écrasante majorité des
éleveurs n'en ont pas vent du tout, et dans pareilles circonstances,
cette opération ne saurait avoir un impact, même infime, sur
l'organisation de l'amélioration génétique bovine au Maroc
[SRAÏRI, 2002].
De plus, comme l'agriculture marocaine est officiellement
exonérée d'impôts sur la plus-value qu'elle dégage
depuis 1984, par une décision royale visant à se rapprocher des
masses paysannes, les agriculteurs, en grande partie illettrés, ne sont
pas contraints de tenir à jour des documents comptables dûment
certifiés. Aussi, les évaluations de rentabilité de leurs
activités demeurent-elles fort sommaires, souvent basées sur des
approximations.
Toutes ces carences structurelles de l'organisation de la
production laitière au sein des exploitations agricoles au Maroc, dans
les plus nanties comme dans les plus humbles, ô combien plus nombreuses,
plaident pour la constitution de références qui puissent
éclairer la recherche zootechnique et même les décideurs
sur la situation du secteur de l'élevage laitier au Maroc, sur les
niveaux de performances réalisées et sur la rentabilité
des étables. Un autre objectif majeur est de comprendre la
diversité des étables pour entreprendre sur le long terme des
actions de développement ciblées.
Comme de nombreux chercheurs [FAYE et ALARY, 2001 ;
ØRSKOV, 1999 ; BRADFORD, 1989] ont récemment mis en exergue
les limites de la zootechnie dans ses approches classiques (i.e. essais
monofactoriels de comparaison de rations alimentaires ou de races animales)
pour relever les défis du développement des élevages des
petites exploitations dans les pays du Tiers-Monde, nous avons opté pour
les méthodes de recherche systémique en tant qu'outil directeur
de ce travail. A cet égard, il faut mentionner que ces approches qui
consistent à travailler en concertation avec les éleveurs pour
identifier les contraintes de production inhérentes à leurs
exploitations agricoles et même influer sur les pratiques qu'ils
adoptent, sont devenues fort courantes [STüR et al., 2001 ;
ARRIAGA-JORDÁN et al., 2002]. Elles sont toutes du ressort de
la participation des chercheurs à l'amélioration des
résultats des élevages, dans une inédite tentative de la
recherche agronomique à s'impliquer concrètement dans le vif du
sujet qu'elle prétend dominer : les exploitations agricoles. Ceci est en
relation avec sa nature même de recherche de type systémique,
qu'ALRØE et KRISTENSEN [2002] définissent comme une recherche
dont la finalité est d'aboutir à l'amélioration de
l'état du sujet qu'elle étudie.
Par conséquent, ce travail de Doctorat se propose de
construire des typologies d'élevages de bovins laitiers au Maroc, selon
une conception qui voudrait trouver des solutions à chaque situation de
production ou même carrément à chaque exploitation
agricole, en application des préceptes de l'approche systémique
[KÖBRICH et al., 2003]. Ces outils synthétiques pourraient
servir de base pour la conception d'interventions ultérieures à
des fins de développement. En second lieu, il s'agit de décrire
et d'analyser plus en détail les pratiques adoptées par les
éleveurs de vaches laitières en matière d'affouragement et
d'exploitation de leurs troupeaux, d'évaluer les résultats
économiques que dégage le cheptel bovin et de procéder
à une analyse préliminaire des déterminants de la
qualité du lait et de ses variations mensuelles.
La présente étude se compose de cinq parties
distinctes. La première présente la problématique globale
dans laquelle s'insère la conception de ce projet de recherche et son
originalité par rapport aux études antérieures qui se sont
focalisées sur l'élevage bovin au Maroc. Elle est
complétée par un tableau exhaustif du cadre théorique
supportant ce travail, à savoir l'utilisation des méthodes dites
systémiques comme outil d'analyse des étables laitières.
Ainsi, dans un premier chapitre nous présentons les objectifs, les
intérêts et l'originalité de ce travail. Nous traitons
ensuite en détail dans le deuxième chapitre les aspects
sous-jacents à la problématique de la recherche et à ses
fondements théoriques et pratiques, à savoir l'application des
méthodes systémiques aux activités d'élevage,
principalement à la production bovine laitière.
La deuxième partie est consacrée au contexte
global de la filière laitière au Maroc, et à ses
évolutions comparées par rapport à celle des autres pays
maghrébins (Algérie et Tunisie). Dans cette partie, sont ainsi
détaillées toutes les péripéties qu'a connues la
filière lait, de l'amont (l'environnement des ateliers laitiers)
à l'aval (transformation et commercialisation des produits laitiers) au
Maroc, avec pour objet principal le plan laitier de 1975, ses
conséquences et ses remaniements.
Dans la troisième partie, nous entamons la
présentation des protocoles de recherche et des résultats obtenus
lors de l'élaboration de typologies d'élevages en tant qu'outil
synthétique décrivant la diversité des exploitations
agricoles à cheptel bovin laitier.
Un premier chapitre est consacré aux hypothèses
générales qui ont été prises en
considération pour l'élaboration de ces typologies
d'élevages, notamment en rapport avec la localisation
géographique des zones retenues et à leur analyse comparative. Le
deuxième chapitre présente les résultats relatifs à
la typologie d'élevages suburbains de la région de Rabat -
Salé, capitale du Royaume du Maroc. Les performances techniques de 48
étables et leur rentabilité durant la campagne agricole 2000/2001
sont analysées en fonction des autres variables sur lesquelles reposent
ces exploitations agricoles.
Le troisième chapitre traite des modalités
d'élevage bovin dans le périmètre irrigué du Gharb
(Nord Ouest du Maroc), en se focalisant sur 111 élevages de bovins
situés dans l'aire géographique de l'arrondissement de Sidi Allal
Tazi. La méthodologie d'enquête utilisée est beaucoup plus
ciblée sur les rôles assumés par les troupeaux de vaches,
et permet de définir différents « cas types »
révélateurs de la réalité de l'élevage de
bovins dans ce périmètre irrigué.
Le quatrième chapitre consiste en une analyse
comparative des modes d'élevage laitier dans les deux zones
citées précédemment (Rabat - Salé et Gharb). Les
exploitations retenues sont les 48 élevages suburbains
étudiés au chapitre 2 de cette troisième partie et 70
fermes d'élevage bovin dans la zone du Gharb, réparties à
travers l'ensemble de ce périmètre. Moyennant des analyses
statistiques multidimensionnelles poussées, nos investigations visent
à mettre en relief un éventuel effet de la localisation
régionale sur la dynamique de production laitière.
Dans le cinquième chapitre, une synthèse des
enseignements à tirer des typologies réalisées est
élaborée. Les implications de ces typologies pour la
délimitation de genres de fermes à étudier plus en
détail sont ensuite présentées.
La quatrième partie est donc dédiée
à des analyses plus poussées d'études de cas des
situations d'élevage identifiées lors de l'élaboration des
typologies. Tout en revenant sur les justificatifs des choix des situations
étudiées, nous présentons aussi la méthodologie
adoptée lors de chacun des cas analysés. Il s'agit ainsi de
détailler davantage les pratiques d'élevage en vigueur dans une
application directe des méthodes systémiques à
l'étude des étables laitières.
Sont ainsi analysées les pratiques d'élevage en
vigueur dans les étables laitières gérées par une
société étatique, la Société de
Développement Agricole (SODEA). Pour ce faire, les performances de six
étables de la SODEA spécialisées dans la production de
lait et réparties à travers différentes régions du
Maroc, ont été étudiées au cours de cinq campagnes
agricoles (de septembre 1991 à août 1996).
Par la suite, nous traitons des effets des aléas
climatiques sur la rentabilité et la productivité d'une
étable laitière privée, située dans la
région de Ben Slimane (zone d'agriculture pluviale), à laquelle a
été décerné le titre d'étable
pépinière par le Ministère de l'Agriculture
(c'est-à-dire qu'elle devrait être un pôle de fourniture de
matériel génétique laitier de qualité
supérieure aux éleveurs qui lui sont limitrophes). Dans le cadre
de l'approche de type systémique qui oriente ce travail, nous avons
analysé les pratiques en vigueur sur cette exploitation et les
performances du cheptel laitier de 1994 à 1997.
Nous exploitons les données d'un suivi rapproché
de sept étables suburbaines pendant deux campagnes agricoles (de
septembre 2000 à août 2002) afin d'élaborer des
monographies d'exploitations laitières. Ce suivi a donné lieu
à un essai de modélisation des performances de ces
étables, présenté au troisième chapitre de cette
quatrième partie.
Les facteurs affectant la qualité du lait ont ensuite
été précisés dans cinq étables suburbaines.
La qualité du lait a été appréhendée
à travers des critères physiques et chimiques (pH,
densité, taux butyreux, taux protéique) et hygiéniques
(Flore Mésophile Aérobie Totale, FMAT) durant l'année
agricole 2002/2003.
Nous clôturons ce travail par une conclusion
générale (cinquième partie) où nous faisons
ressortir, dans leur globalité, les principaux résultats
liés au fonctionnement des étables dans différents
environnements physiques et sociaux au Maroc, et les synthèses à
en déduire. Suite à quoi, une série de recommandations est
formulée pour que puisse se perpétuer au Maroc, une
filière laitière bovine durable, rentable et
bénéfique aux milliers d'éleveurs, petits et grands qui se
sont totalement investis dans cette activité.
I - Problématique et cadre théorique des
analyses systemiques
I.1 Problématique générale
I.2 Recherches systémiques et élevage bovin
laitier
A system is a big black box
Of which you can't unlock the locks
And all we can find out
Is what goes in and what comes out
Perceiving input-output pairs
Related by parameters
Permits us sometimes to relate
An input, output and a state
If this relation's good and stable
Then to predict we may be able
But if this fails us - heaven forbid!
We'll be compelled to force to lid!
Kenneth E. Boulding (1978)
Ecodynamics. A new theory of societal evolution
Sage. London. 193 p.
I - 1 Problématique générale
Les crises récentes de l'agriculture
(encéphalopathie spongiforme bovine, dioxine, organismes
génétiquement modifiés...) ont été à
l'origine d'un regain d'intérêt sociétal accru pour les
pratiques des agriculteurs. Par conséquent, les opinions publiques en
arrivent aujourd'hui à exiger d'avoir un droit de regard sur les
processus de production adoptés par les agriculteurs,
générant les concepts récents de traçabilité
des produits ou encore d'agriculture biologique.
L'élevage a certainement été
l'activité agricole la plus concernée par ces crises, à
tel point que l'évocation même du nom de ce secteur a acquis
aujourd'hui aux yeux du grand public une connotation négative,
étant donné la récurrence des scandales liés aux
productions animales : pollution des nappes phréatiques par les
effluents, encéphalopathie spongiforme bovine ou « vache
folle », fromages contaminés par la Listeria, boeuf aux
hormones, ou encore fièvre aphteuse ou grippe du poulet [VISSAC,
2002 ; KOHN et al., 1997 ; TAMMINGA, 1992]. Toutes ces
considérations constituent un défi certain pour l'avenir des
sciences animales et influencent même leurs perspectives de recherche.
ALRØE et KRISTENSEN [2002], dans un écrit consacré aux
rôles des recherches agricoles face à l'émergence de ces
crises, énoncent qu'il y a urgence à repenser la
méthodologie de ces investigations. Ces deux auteurs partent du constat
que ces sciences ont pour fondement d'influencer les objets qu'elles
étudient, en l'occurrence les modes d'exploitation des animaux par les
humains, et elles s'inscrivent donc dans la famille globale des disciplines
dites systémiques. En ce sens, ces sciences dépendent d'un
ensemble de valeurs sociales. Il s'agit donc d'étudier en premier lieu
à quel niveau et comment ces valeurs doivent être
intégrées dans la construction des objets d'étude
ultérieurs (valeurs dites de contexte). En deuxième lieu, il
faudrait s'intéresser aux types de relations entre cette nature
systémique des recherches agricoles et les critères
conventionnels scientifiques de qualité (valeurs dites constitutives).
Tout ceci leur ferait perdre leur caractère d'objectivité, selon
la définition traditionnelle de ce critère. En contrepartie,
ALRØE et KRISTENSEN [2002], s'inspirant des travaux de LUHMANN [1995],
proposent que les sciences agricoles adoptent une objectivité
réflexive comme principe pour accomplir des recherches
adaptées. Ceci suppose que les recherches agricoles, de par leur nature
systémique, adoptent comme méthodologie de base un cycle auto
réflexif qui incorpore simultanément une posture de chercheur
acteur et une position de chercheur « observateur
détaché ».
Par essence, la philosophie des recherches systémiques
a pour vocation d'influer sur l'objet qu'elles étudient. Aussi, les
recherches systémiques zootechniques auraient-elles pour objectif de
contribuer au développement des exploitations agricoles investies dans
la production animale. Cette attitude de recherche fait
irrémédiablement évoluer la zootechnie de son cadre de
discipline basée sur des sciences « exactes », avec
pour fondement des expérimentations en milieu contrôlé,
vers une discipline en évolution perpétuelle, apte à
être influée par le milieu social et l'évolution
historique. Ceci a amené certains chercheurs comme LANDAIS et BONNEMAIRE
[1996] à écrire « quoi qu'en pensent certains
chercheurs, la science n'est ni hors du temps, ni hors de la
société. L'histoire de la zootechnie montre qu'elle
n'échappe pas à cette règle. C'est pourquoi il a
été jugé nécessaire, pour développer cette
analyse, de ne pas s'en tenir à un point de vue
épistémologique uniquement centré sur les
caractéristiques des connaissances produites, mais de considérer
aussi les acteurs concernés, leur insertion institutionnelle et leurs
stratégies d'utilisation de la connaissance ». Ce genre de
réflexion a donné lieu, par analogie au Maroc, à la
confrontation des motivations de ces corpus distincts que sont les acteurs des
recherches en sciences animales et les éleveurs, qui se rejoignent dans
ce qu'il convient d'appeler « l'interface zootechnique »
[SRAÏRI, 2002]. Le constat qui en a découlé est bien celui
d'un décalage évident entre les recherches actuellement
entreprises sur les productions animales et les attentes des éleveurs,
qui continuent pour la plupart à ignorer même les attributions des
zootechniciens et leurs statuts et fonctions, à la différence du
corps des vétérinaires. Dans le même ordre d'idées,
mais en Europe, HODGES et BOYAZOGLU [2002] énoncent que l'enjeu
réel pour les zootechniciens d'aujourd'hui est de se pencher sur le sens
de leurs travaux, de s'interroger sur leurs objectifs professionnels, sur leur
éthique et sur leur rôle dans la société. Ils
écrivent ainsi que « cette démarche est sans nul doute
difficile ; il est bien plus aisé de ne pas regarder en face les
problèmes posés par la société et de
s'établir dans un réductionnisme douillet ». Et
d'ajouter que « nous (les zootechniciens) partons du principe que la
zootechnie telle que nous la pratiquons et l'enseignons est automatiquement
bénéfique à la société ; est-ce
vrai ? » Finalement, ils concluent que ces considérations
sur le rôle du zootechnicien, de la portée de ses travaux par
rapport aux exigences de la société, à un moment de crises
répétées, « place la crédibilité
de la profession au sein du débat » et met « ce
monde de spécialistes au pied du mur ».
C'est par rapport à ces considérations
épistémologiques, liées à la
« philosophie des sciences », ou en d'autres termes
à la méthodologie à aborder pour formuler et entamer un
projet de recherches zootechniques, que s'insère la problématique
générale de l'approche systémique en élevage. Comme
le faisait remarquer BOURDIEU [1997], il s'agit de « faire savoir ce
que l'univers du savoir ne veut pas savoir, notamment sur
lui-même ». Ce genre de recherche vise à dépasser
le réductionnisme imposé par des disciplines plus fondamentales
en relation avec les productions animales (nutrition, génétique,
éthologie...) pour proposer ultérieurement l'amélioration
et le développement des objets étudiés. Il a dès
lors comme fondement scientifique la multicompétence, en guise d'autre
forme de pluridisciplinarité [FAYE et BARNOUIN, 1996]. A cet
égard, PLUVINAGE [2002], dans un hommage à l'agronome
français René Dumont et à ses approches
méthodologiques pour le développement rural, énonce que la
richesse des disciplines scientifiques mobilisées (appliquer la science
économique à l'agriculture tout en utilisant d'autres
enseignements telles les sciences agronomiques, la géographie et
l'histoire), « un peu tout le contraire que l'on conseillerait
à un jeune scientifique aujourd'hui, est extrêmement
efficace ; elle ne prétend pas poser de développements
théoriques nouveaux, mais servir à résoudre des
problèmes de développement agricole, sur la base d'un examen de
pratiques observées et d'enquêtes auprès des
agriculteurs ». Pareillement, en analysant les fondements
scientifiques des doctrines des vétérinaires français en
Afrique subsaharienne et leurs évolutions historiques, LANDAIS [1990]
énonce que leurs travaux n'ont pu réaliser les ambitieux desseins
qu'ils projetaient. En effet, ils n'ont pas suffisamment intégré
d'approches pluridisciplinaires et ont dédaigné les sciences
humaines pour traiter la complexité des affaires liées au monde
de l'élevage. Ce même auteur rajoute que l'irruption des sciences
humaines (sociologie et économie) dans les domaines du technique est
plus que nécessaire pour l'étude des élevages et qu'elle
demeure, même aujourd'hui, fort timide.
Sur un registre similaire, COLEOU [1994], dans une tentative
de définir les champs de compétence de l'ingénieur en
productions animales au 21ème siècle, s'arrête
sur la notion d'ingénieur zootechnicien « grand
généraliste », comme « acteur d'interfaces,
capable de dépasser la compréhension de la conduite des
productions et des mécanismes biologiques » pour
« appréhender la complexité de tout système et
être préparé à une vision stratégique dans
l'espace et dans le temps ». Selon ce même auteur, les
zootechniciens devraient pouvoir « organiser, de
préférence de manière pluridisciplinaire, les
activités centrées sur l'observation, la compréhension du
fonctionnement de systèmes complexes que sont les exploitations
d'élevage, les systèmes d'élevage ».
Aussi, en réaction à ces constats
généraux qui visent à donner à la science
zootechnique et à ses dépositaires et autres détenteurs,
dans l'acceptation la plus large qui peut lui être imaginée, un
rôle actif au sein des sociétés humaines où elle
évolue, ce travail de doctorat se propose-t-il d'élaborer des
références sur la diversité des élevages laitiers
au Maroc. Par la mobilisation d'outils relevant de disciplines diverses
(zootechnie classique, économie rurale et statistique), il vise la
description et l'analyse de la multitude des pratiques mises en jeu, dans un
contexte d'absence de données fiables. Il s'apparente de fait à
la démarche de « recherche citoyenne » qu'a
développée VISSAC [2002], dans ses objectifs de créer de
la connaissance zootechnique qui puisse être directement accessible aux
éleveurs à partir de leurs pratiques quotidiennes et de leurs
incidences : contribuer à connaître la diversité des
élevages, dans leur larges déclinaisons, pour proposer, sur des
bases réalistes, des voies de leur amélioration.
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