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Impact de la gestion participative sur les densités et effectifs des populations animales dans l'unité technique opérationnelle de la Benoue au Nord-Cameroun: Cas des ZIC N?°1 et 4 et du Parc National.

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par Maurice MENDJEMO
Université de Liège - Master Complémentaire en Gestion des Ressources Animales et Végétales en Milieux Tropicaux 2009
  

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CHAPITRE IV : MATERIEL ET METHODES

4.1. Dénombrement de la faune

Les données d'inventaires de la faune exploitées dans le cadre de la présente étude sont celles collectées par le WWF en Février 2008 dans le parc national de la Bénoué et les ZIC 1 et 4 adjacentes. Les plans de tir dans les différentes zones de chasse ont été également exploités.

4.1.1. Matériel

Le matériel utilisé pour le dénombrement était constitué :

· de la carte de la zone au 1/200.000e utilisée pour la matérialisation des transects ;

· de la boussole pour la navigation ;

· d'un GPS pour les prises de position (AZIMUT) ;

· d'un véhicule Hilux 4x4 utilisé pour les déplacements de longue distance sur les pistes praticables ;

· des fiches de collecte des données ;

· d'un podomètre ou topofil par équipe pour la mesure de la distance parcourue ;

· d'un télémètre pour mesurer les distances entre l'animal et l'observateur ;

· d'une paire de jumelles ;

· d'un poste radio émetteur-récepteur (Talking-Walking) ;

· de scotches de materialisation.

4.1.2. Approche méthodologique utilisée

La « méthode de transects linéaires » encore dite de « visibilité moyenne » (Lamprey, 1964) a été celle utilisée pour le dénombrement dans notre zone d'étude. En effet, c'est celle régulièrement utilisée pour les inventaires de la faune à la Bénoué et dans les environs. Elle a été longuement testée avec succès dans les écosystèmes de savane (WWF & FAC, 1998; Gomsé et Mahop, 2000 et 2002, Tsakem et Donfack, 2004, Tsakem, 2006).

Théoriquement, cette méthode consiste à établir des transects de longueurs variables (li) et quidoivent être régulièrement parcourus. Des lignes établies dans une parcelle sont alors parcourues et,

lorsqu'un animal est détecté, la distance entre la ligne et l'objet est mesurée ou estimée. En général, plusieurs lignes de longueurs l1, l2, ..., lk sont parcourues pour une longueur totale L connue (Burnham et al., 1980 ; Buckland et al., 1993).

En principe, les points de départ des transects dans des quadrats de 5X5 Km sont identifiés sur le terrain à l'aide du GPS. A chaque fois qu'un objet ou un groupe d'objet est identifié, l'équipe s'arrête et fait des observations, et la distance perpendiculaire entre l'objet et la ligne de marche est mesurée. En pratique, il est plus facile d'estimer la distance de l'observateur à l'objet (Ri) et l'angle de vue (ai), que la distance perpendiculaire (Xi) pour chacun des (n) objets détectés (figure 3). La distance perpendiculaire Xi est égale à Ri*sin (ai). La probabilité de détection est fonction de cette distance et décroît avec son augmentation (Eberhardt, 1968). Le mérite de cette méthode est qu'un animal non compté n'introduit pas systématiquement de sous estimation de la densité s'il se trouve en dehors de l'axe de marche de l'observateur (Burnham et al., 1985). Ceci confère à la méthode du transect linéaire une meilleure efficacité et moins de biais. Lors de notre déplacement, lorsqu'un animal ou un troupeau était aperçu, l'équipe s'arrêtait, et faisait des observations directes qui étaient portées sur une fiche de collecte des données (Cf. annexe 1). Les distances parcourues ont été lues sur un podomètre.

a1

R1

X1

a2

R2

X2

a3

R3

X3

Ligne de marche (li)

Positions successives d'observation

Animaux dénombrés

Ri = Distance observateur objet

Xi = Distance perpendiculaire à l'objet ai = Angle observateur objet

Figure 3 : Exemple simplifié de la méthode de dénombrement par transect linéaire.

4.1.3. Matérialisation des transects

A partir des feuilles NC-33-II de la carte topographique du Cameroun au 1/200.000e, la zone a été systématiquement subdivisée en 96 quadrats géographiques de 5x5 km chacun. A l'intérieur de chaque quadrat a été disposé un transect de 5 km de long pour un effort de collecte de données de 463,46 km. Ces transects étaient parcourus selon le circuit présenté sur la figure 4. Les points de départ de chaque transect et leurs coordonnées ont été déterminés sur la carte de manière aléatoire et repérés avec précision sur le terrain à l'aide d'un GPS. L'orientation des transects était perpendiculaire au cours d'eau, de façon à échantillonner chaque type d'habitat.

Figure 4 : Disposition du réseau de transects dans les quadrats de 5x5km

4.1.3. Données collectées

La collecte des données a été assurée par quatre équipes d'au moins 4 membres chacune (dont 1 boussolier/pisteur, 1 releveur, 1 porteur et 1 garde chasse pour la sécurité). Ces membres recrutés en général dans les villages riverains du parc et des ZIC 1&4, ont été formés au préalable par le WWF sur les techniques de dénombrement pédestre des grands et moyens mammifères. Ces équipes ont été appuyées sur le terrain par quatre encadreurs du WWF. Les recensements des animaux proprement dits commençaient entre 6h30 et 8h00 et se terminaient au plus tard à 17 heures, avec une vitesse

moyenne de progression de 2 km/h. Dès le repérage sur le terrain du point de départ à l'aide d'un GPS, le boussolier orientait l'équipe dans la bonne direction. Les membres de l'équipe se déplaçaient dans la direction indiquée l'un derrière l'autre en perturbant le moins possible l'habitat. Le boussolier surveillait la constance de l'azimut afin que l'équipe conserve la direction de marche jusqu'à la fin du transect. L'équipe parcourait le transect le plus silencieusement possible, en scrutant de part et d'autre l'axe de marche pour détecter d'éventuels animaux afin de s'assurer qu'une bonne largeur de la bande soit effectivement couverte. Quand un animal ou un groupe d'animaux était vu, les informations suivantes étaient notées sur des fiches de données préétablies (annexe 1) :

· l'heure d'observation ;

· l'espèce ;

· le nombre d'individus ;

· la répartition par sexe et par classe d'âge ;

· la distance entre l'observateur et l'animal (ou le lieu où l'animal a été vu avant tout mouvement) ;

· l'angle d'observation ;

· les positions GPS des différents points d'observations.

Photo 1 : Parcours du transect.

4.2. Analyse des données

Les logiciels Excel et Distance ont été respectivement utilisés pour enregistrer et analyser les données collectées. Un filtre de données à Excel a permis par la suite d'obtenir la richesse spécifique animale de la zone.

4.2.1. Estimation de densité

Les estimations des densités et des effectifs d'animaux ont été faites à l'aide du programme Distance 4.1 (Laake et al., 1994). Ce programme exige une grande précision dans les mesures de distance et analyse les données pour les espèces suffisamment observées. Les valeurs des différentes distances perpendiculaires de toutes les observations situées à une distance inférieure à celle du point où les données ont été tronquées (Buckland et al., 1993) étaient utilisées par le programme Distance pour estimer la fonction de détection g(x). Cette fonction est la probabilité de détecter un animal situé à une distance x de la ligne du transect. La fonction g(x) permet ainsi d'estimer la probabilité de densité (pdf, probability of detection function) f(x) des données de transect. Tous ces modèles de fonctions sont intégrés dans l'outil Distance. C'est à partir de la pdf que le programme Distance calcule f(0), qui est une estimation de la fréquence avec laquelle les animaux sont détectés sur la ligne de transect (Barnes & Jensen, 1987), ainsi que l'intervalle de confiance à 95 %. La fonction de détection g(x) n'est pas connue d'avance, elle varie avec les facteurs tels que l'environnement et l'expérience de l'observateur à détecter les animaux. Plusieurs modèles de g(x) sont intégrés dans le programme Distance. Le modèle de la fonction de détection est défini par une fonction «clé» («key function») et par un développement en séries («Series expansion»). Les 4 modèles les plus utilisés intégrés dans la fonction distance sont :

· Fonction uniforme à expansion polynôme simple ;

· Fonction uniforme à expansion cosinus ;

· Fonction semi-normale à expansion polynôme de Hermite ;

· Fonction semi-normale à expansion cosinus.

Trois différents tests statistiques existent pour la sélection du meilleur modèle pour l'analyse spécifique. Cependant, seul le « akaike's information Criterion (AIC)» test ou critère d'information d'Akaike qui permet de tester tous les modèles intégrés dans le programme Distance au même moment à été utilisé pour l'analyse des données. Le meilleur modèle est celui qui possède la plus petite AIC.

Buckland et al. (1993) conseillent l'utilisation du test AIC parce que, contrairement aux autres, il donne les bonnes informations. Seules ont été considérées pour cette analyse les espèces suffisamment observées. Il s'agit du Cobe de Buffon (Kobus kob kob), du Phacochère (Phacochoerus africanus), de l'Hippotrague (Hippotragus equinus), du Céphalophe de Grimm (Sylvicapra grimmia), du Bubale (Alcelaphus buselaphus major) et du Babouin (Papio anubis).

La figure ci-contre présente la fonction de détection qui a permis d'estimer la densité des espèces avec le programme « Distance ». La probabilité de détection des espèces est une fonction décroissante de la distance perpendiculaire. Cette probabilité est au pic dans l'intervalle de 20 m et commence à décroître quand la distance perpendiculaire augmente ; elle tend à s'annuler au-delà de 90 à 100 m.

Figure 5 : Courbe de détectabilité des espèces dans le PNBé et les ZIC 1 & 4

4.2.2 Calcul des indices kilométriques d'abondance (IKA)

Pour certaines espèces animales dont le nombre d'observations a été insuffisante (moins de 40 observations), le calcul des indices kilométrique d'abondance (IKA) a été fait. C'est le rapport du nombre d'individus observés sur le nombre de kilomètre de distance parcourus. Il se calcule pour une espèce ou pour l'ensemble des espèces dans une zone. Effectué chaque année dans les mêmes conditions, cet indicateur permet de savoir si la population augmente, diminue ou stagne. C'est aussi la densité relative et sa formule est la suivante :

Nombre de contact avec une espèce IKA =
Distance totale parcourue

 

4.2.3. Distribution des animaux et activités humaines.

Afin de déterminer la distribution spatiale des animaux ou des activités humaines, l'ensemble des données collectées sur la faune (directe et indirecte) a été réorganisé dans chaque quadrat et le taux de rencontre ou IKA de chaque espèce (Bousquet, 1996) a été calculé. Le logiciel Arcview 3.2 a généré les cartes de distribution géo-spatiale à partir de ces informations géo-référencées, travail qui a été déjà réalisé par le WWF (2004) et que nous exploitons dans le cadre de notre étude. Trois classes ont été considérées pour la détermination des zones de concentration de la faune et d'activités humaines à savoir : faible (IKA< 0.2), moyenne (0.2<IKA<0.5) et forte concentration (IKA>0.5). Cette méthode d'IKA est un moyen rapide et pratique pour connaître la distribution spatio-temporelle de la faune quand le nombre d'observations est bas.

4.2.4. Structure d'âge et de sexe des animaux

Les rapports d'âge constituent des paramètres écologiques importants pour analyser la dynamique des populations animales. La détermination de ces paramètres sur le terrain n'est pas toujours aisée, elle nécessite une longue expérience. On procède le plus souvent par une classification qui tient compte de l'intervalle de naissance chez l'espèce considérée. Dans le cadre de ce travail, cette classification a été simplifiée en adulte, sub-adulte et juvénile en se basant sur le dimorphisme sexuel. Lorsqu'un individu n'avait pas pu être classé dans l'une des trois catégories, il était mis systématiquement dans la classe "Indéterminée". Le rapport de sexe est celui du nombre de mâles sur celui des femelles. C'est un paramètre écologique mesurable et d'importance pour la compréhension de la dynamique d'une population animale donnée.

4.3. Analyse des systèmes de cogestion développés dans les ZIC 1 et 4

Cette analyse s'est faite au moyen des résultats des entretiens menés auprès des diverses parties prenantes impliquées dans la gestion. Il s'agit des autorités administratives (préfets, sous-préfet ou leurs représentants), des autorités traditionnelles (lamido, lawans, djaoro), des responsables des services techniques (MINFOF, MINEP, MINDAF), des organismes intervenant dans la zone (WWF, SNV, etc.), des populations locales.

Les entretiens ont été faits à travers un guide d'entretien spécifique à chaque groupe d'acteurs. Les informations recherchées portaient globalement sur :

· l'utilisation des ressources naturelles ;

· le foncier (mode d'acquisition des terres) ;

· le système d'élevage; les facteurs limitant de la production du bétail ;

· les attitudes et perceptions des populations locales envers les aires protégées et la législation sur la faune ;

· les conflits faunes et populations locales.

4.4. Proposition des mesures complémentaires d'atténuation et/ou de bonification du système de

cogestion mis en place.

Sur la base des leçons tirées des expériences de cogestion réalisées en Namibie, en Zambie, au Mozambique et au Burkina Faso d'une part, et partant des propositions faites par les parties prenantes consultées, la cogestion des ZIC nécessite, pour être efficace, que certains leviers d'intervention soient pris en compte : les préoccupations des populations environnantes doivent être au centre de la gestion et l'éradication de la pauvreté doit être la clé de voûte de toute action de conservation.

CHAPITRE V : RESULTATS ET DISCUSSIONS 5.1. Situation actuelle de la faune dans les ZIC 1 et 4

5.1.1. Effectifs et densités des populations animales

Le tableau ci-dessous nous donne une idée de la richesse spécifique du PNBé et des ZIC 1 et 4. Tableau I : Diversité des espèces animales observées dans la zone.

Ordre

Famille

Nom Scientifique

Nom commun

Statut au Cameroun

Primates

Cercopithecidae

Papio anubis

Babouin doguera

C

Cercopithecus aethiops

Singe vert

C

Colobidae

Colobus guereza

Colobe guéréza

A

Artiodactyles

Bovidae

Alcelaphus buselaphus major

Bubale

B

Hippotragus equinus

Hippotrague

B

Kobus defassa

Cobe defassa

B

Kobus kob kob

Cobe de Buffon

B

Ourebia ourebi

Ourébi

C

Sylvicapra grimmia

Céphalophe de Grimm

C

Cephalophus rufilatus

Céphalophe à flanc roux

C

Syncerus caffer caffer

Buffle

B

Redunca redunca

Redunca

B

Hippopotamus amphibus

Hippopotame

B

Tragelaphus scriptus

Guib harnaché

B

 

Taurotragus derbianus gigas

Elan de Derby

B

Giraffidae

Giraffa camelopardalis

Girafe

B

Suidae

Phacochoerus africanus

Phacochère

B

Lagomorphes

Leporidae

Lepus crawshayi

Lièvre d'Afrique

C

Proboscidiens

Eléphantidae

Loxodonta africana africana

Eléphant

A&B

Tubulidente

Orycterpidae

Orycteropus afer

Oryctérope

A

Carnivores

Felidae

Panthera leo

Lion

A

Panthera pardus

Panthère

A

Hyaenidae

Crocuta crocuta

Hyène tachetée

B

Canidae

Canis aureus

Chacal commun

 

+ catégorie A : espèces intégralement protégées

+ catégorie B : espèce partiellement protégées

+ catégorie C : espèces particulièrement protégées. Leur capture et leur abattage sont réglementés suivant des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de la Faune.

D'une manière générale, la richesse spécifique du PNBé et des ZIC 1 et 4, est évaluée à vingt six (26) espèces de grands et moyens mammifères répartis en six (6) ordres qui sont : les primates, les

artiodactyles, les lagomorphes, les proboscidiens, les tubulidentés et les carnivores. Donfack et al, (2004) signalent la présence de 39 espèces de mammifères dans la zone, y compris les mammifères de petite taille comme le rat de Gambie (Cricetomys gambianus) et le lièvre d'Afrique (Lepus crawshayi). Certaines espèces à moeurs particulières (hippopotame, oryctérope et la plupart des carnivores) sont difficilement rencontrées lors des dénombrements car ils sont journaliers et certaines espèces nécessitent des méthodes d'inventaire spécifiques.

Parmi les espèces dénombrées, sept (Colobe guéréza, Lion, Panthère, Oryctérope, Girafe, Eléphant et Hippopotame) sont classées au Cameroun dans la classe A (Loi N° 94/01 Du 20 Janvier 1994, portant régime des forêts, de la faune et de la pêche), c'est-à-dire parmi les espèces rares ou en voie d'extinction. Elles bénéficient par conséquent d'une protection intégrale, tandis que onze autres espèces sont de la classe B et sont à cet effet partiellement protégées et peuvent par conséquent être chassées. Parmi cette dernière classe se recrutent l'élan de derby et le buffle qui sont des espèces phares pour la chasse sportive.

L'estimation de la densité et de l'effectif a été possible pour huit espèces suffisamment observées. Le tableau II ci-dessous présente les densités et les effectifs estimés à un seuil de confiance de 95% au moyen du Programme Distance.

Tableau II : Densité et effectif des animaux suffisamment représentés dans le PNBé et les ZIC 1&4

Espèce

Valeur estimée

Coefficient de
variation (%)

Degré
de
liberté
(df)

Intervalle de
confiance (95%)

Cobe de Buffon

Densité (D)

4,8235

20,13

229,74

3,2570 - 7,1434

Effectif (N)

12548

20,13

229,74

8473 - 18584

Guib harnaché

Densité (D)

0,60535

28,47

132

0,34847 - 1,0516

Effectif (N)

1575

28,47

132

907 - 2736

Céphalophe de grimm

Densité (D)

1,3221

25,47

146,15

0,80559 - 2,1698

Effectif (N)

3440

25,47

146,15

2096 - 5645

Céphalophe à flanc roux

Densité (D)

0,87454

24,46

124,56

0,54273 - 1,4092

Effectif (N)

2275

24,46

124,56

1412 - 3666

Phacochère

Densité (D)

1,0628

35,81

107,06

0,53384 - 2,1157

Effectif (N)

2765

35,81

107,06

1389 - 5504

Hippotrague

Densité (D)

1,3551

34,02

83,67

0,70170 - 2,6169

Effectif (N)

3525

34,02

83,67

1825 - 6808

Bubale

Densité (D)

0,97388

38,93

66,81

0,46011 - 2,0613

Effectif (N)

2534

38,93

66,81

1197 - 5363

Babouin

Densité (D)

2,3178

31,38

72,08

1,2584 - 4,2694

Effectif (N)

6030

31,38

72,08

3274 - 11107

Il ressort clairement de la figure 6 que le Cobe de Buffon est l'espèce la plus représentée dans le parc et les ZIC 1 et 4 avec 36% des effectifs observés. Il est suivi du Babouin qui est de moindre importance pour la chasse sportive et le tourisme de vision. Cette prolifération du Babouin serait favorisée par la culture musulmane qui interdit la consommation de la viande des primates.

Phacochère
8%

Hippotrague
10%

Bubale
7%

Céphalophe à flanc
roux
7%

Babouin
17%

Céphalophe de grimm
10%

Cobe de Buffon
36%

Guib harnaché
5%

Figure 6 : Proportion des animaux suffisamment représentés dans le PNBé et les ZIC 1&4

Les espèces telles que le Guib harnaché, le Céphalophe à flanc roux, et le bubale ont une faible densité : ceci serait dû au fait qu'elles subissent une forte pression humaine (chasse sportive, chasse villageoise, braconnage, destruction de la végétation) ou que leur dynamique de population (reproduction) est différente. Leur format plus petit les rend vulnérables à la chasse villageoise car ils sont facilement transportables et dissimulables par les petits chasseurs.

5.1.2. Indice kilométrique d'abondance des espèces observées

Le programme Distance ne peut fournir des estimations que pour des espèces fortement représentées. Pour celles insuffisamment dénombrées, nous avons utilisé les indices kilométriques d'abondance. Le tableau III donne à cet effet les indices kilométriques d'abondance pour les espèces dont les observations n'ont pas permis une analyse sur Distance.

Tableau III : Valeur d'IKA pour les espèces de faibles densités observées dans la zone en comparaison avec celles obtenues en 2006 dans la même zone

Espèces

IKA2 (2006)

 

IKA3(2008)

Buffle

 

0,0083

 

0,066

Chacal

 

0,0041

*

 

Civette

 
 
 

0,002

Cobe defassa

 

0,0334

 

0,053

Colobe guereza

 

0,0251

 

0,025

Elan de Derby

*

 
 

0,017

Eléphant

 

0,0041

 

0,069

Girafe

 

0,0083

 

0,004

Guib harnaché

 

0,0669

 

0,058

Hyène tachetée

 

0,0083

*

 

Lièvre d'Afrique

 

0,0083

 

0,002

Redunca

 

0,0836

 

0,034

Singe vert

*

 
 

0,012

* Aucune donnée

Les valeurs d'IKA varient selon les espèces mais ces IKA sont assez importantes (1 à 7 individus pour 100 km de transects parcourus) pour certaines espèces telles que le Redunca, l'élan de derby, le buffle et même l'éléphant. D'autres espèces par contre, ont un IKA très faible, environ 0,2 contacts pour 100 km de distance parcourue. Cependant, lorsqu'on considère les ZIC et le parc pris individuellement, et vu la surveillance du parc, ce dernier semble avoir des valeurs d'IKA plus élevées car, les ZIC sont les aires protégées habitées et les activités humaines évoluent au détriment de l'habitat de la faune. D'autre part, la chasse sportive occasionne le déplacement des animaux vers les zones les plus sécurisées, ce qui emmène les animaux à se réfugier davantage dans le parc où ils trouvent plus de sécurité.

2 Valeurs obtenues par Tsakem en 2006

3 Inventaire PNBé et ZIC 1&4, 2008

5.1.3. Evolution des densités, effectifs et de l'abondance relative des principales espèces depuis 1975

Le tableau IV présente l'évolution des densités et des effectifs entre 1975 et 2008.

Tableau IV : Comparaison des densités animales et des effectifs de quelques grands mammifères dans la zone entre 1975 et 2008

Espèce

Densité (individus/km2)

Effectifs

1975

1998

2000

2004

2008

19754

19985

20006

20047

20088

Bubale

1,66

1,88

15,23

*

0,97

3000

3384

27418

*

2534

Hippotrague

0,18

0,66

*

*

1,35

325

1188

*

*

3525

Cobe defassa

0,75

0,55

*

*

*

1350

990

*

*

*

Cobe de Buffon

1,58

3,89

6,79

1,9

4,8

2850

7002

12229

5113

12548

Ourébi

0,4

0,91

1,64

2,1

*

73

1638

2077

5687

*

Céphalophe de Grimm

0,91

0,46

1,14

0,89

1,3

1650

828

2055

2322

3440

Céphalophe à flanc roux

0,55

*

*

0,62

0,8

1000

*

*

1616

2275

Buffle

1,14

0,1

*

*

*

2060

180

*

*

*

Babouin

2,06

*

*

*

2,31

*

3708

*

*

6030

Redunca

0,008

0,54

0,79

1,4

*

15

972

1435

3877

*

Hippopotame

0,13

*

*

*

*

325

*

*

*

*

Guib harnaché

0,36

0,39

0,55

1,2

0,6

650

702

281

3241

1575

Eland de Derby

0,2

0,07

*

*

*

375

126

*

*

*

Girafe

0,009

*

*

*

*

17

*

*

*

*

Phacochère

0,66

0,48

1,9

 

1,06

1200

864

 

4959

2765

Potamochère

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

Lapin d'Afrique

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

Rhinocéros noir

0,004

*

*

*

*

8

*

*

*

*

* Observations insuffisantes.

La connaissance des différentes techniques de recensement utilisées est nécessaire pour une meilleure analyse de ce tableau. En effet, tous ces dénombrements ont utilisé la technique des transects linéaires, mais cette technique a évolué suite à une maîtrise de son application sur le terrain et le strict respect de ses règles. Il est aussi impérieux de savoir que ces différents dénombrements ont eu des taux d'échantillonnage différents. Les trois derniers dénombrements ont été faits aussi bien dans le parc que dans les ZIC 1 et 4 (soit 2601,92 km2 de superficie totale) alors que les deux premiers n'ont couvert que le parc uniquement (1800 km2 de superficie). Le biais réside ici dans le fait que le parc et les ZIC ayant des statuts et vocations différents, ne devraient pas constituer une même entité dans les analyses et interprétation des résultats. Le second obstacle est la difficulté d'utilisation du programme Distance.

4 Stark, 1977

5 WWF & FAC, 1998

6 Gomsé & Mahop, 2000

7 Tsakem S., 2006

8 Résultats présent inventaire

Le tableau IV montre que les populations des bubales et des Cobes de Buffon sont les plus importantes. Il apparaît très clairement sur ce tableau que les effectifs des populations animales ont considérablement baissé entre 1975 et 2008. Toutefois, le Cobe de Buffon fait exception car sa population s'est accrue entre 1975 et 2000 passant de 2850 à 12229 individus, puis a connu une baisse drastique (5113 individus) entre cette période et 2004 avant de connaître de nouveau une augmentation de plus de 200% en 2008. Ceci s'expliquerait soit par les apports des mesures de cogestion soit par les biais des observations faites dans les années antérieures. La population des bubales a également connu une croissance spectaculaire de 1975 à 2000, passant de 3000 à 27418 individus en 2000 avant de connaître une chute entre 2004 et 2008. Le danger d'extinction des espèces phares de la chasse sportive semble réel. Leurs observations toujours faibles ne permettent pas au logiciel Distance d'estimer leur densité. L'hypothèse d'accroissement des espèces en voix d'extinction dans la zone de la Bénoué comme fruit de la gestion participative semble donc infirmée pour le moment. Les pressions de braconnage et les extensions des surfaces cultivables demeurent toujours problématiques. Les effectifs du Phacochère, malgré son caractère grégaire, et du Guib harnaché sont en baisse sensible. Dépendante, la population des Babouins a presque doublé en 10 ans (1998 à 2008). Cette croissance serait non pas le fruit de la gestion participative, mais plutôt celui des habitudes culturelles des populations de la zone d'étude pour qui la consommation de la viande des primates est prohibée. Ce qui veut dire que l'exploitation des caractères culturels peut être un atout pour la conservation de certaines espèces de faune sauvage.

En référence aux travaux antérieurs dans la zone d'étude, la tendance des IKA est en général à la décroissance pour la plupart des espèces, à l'exception des primates et de quelques petites antilopes de moindre importance pour la chasse sportive. Il est toujours démontré que la pression de chasse sportive (dans les ZIC) et du braconnage (Hassan, 1998 ; Kirda, 2000 ; Roulet, 2004) constituent toujours un danger pour la conservation du PNBé et des ZIC adjacentes. Les effectifs de l'Elan de Derby, espèce phare pour la chasse sportive dans la zone, ne cessent de décroître au fil des ans. La régression arithmétique est la même pour le buffle, laissant craindre une disparition rapide, à l'instar du rhinocéros, dans la zone de la Bénoué.

5.1.4. Structure d'âge et sexe des animaux

Le tableau V présente les structures des groupes - rapport jeune/adulte et rapports de sexe - de quelques mammifères du PNBé et des environs.

Tableau V : Structures des groupes, rapport jeune/adulte et rapports de sexe de quelques mammifères du PNBé

Espèce

Effectifs
observés

Taille
moyenne du
groupe

Intervalle
de
groupe

Adulte

Jeune

Indéterminé

Sex-ratio et
rapport
jeune/adulte

?

?

?/?

J/A

Cobe de Buffon

348

4

[1-25]

66

161

55

66

0,41

0,34

Bubale

104

6

[1-21]

12

7

29

56

1,71

4,14

Ourébi

86

2

[1-4]

40

40

5

1

1,00

0,13

Phacochère

50

4

[1-6]

11

14

20

5

0,79

1,42

Hippotrague

81

4

[1-15]

25

7

12

37

3,57

1,71

Guib harnaché

27

1

[1-3]

13

10

2

2

1,30

0,20

Céphalophe à Flanc Roux

26

1

[1-2]

17

3

 

6

5,66

 

Céphalophe de Grimm

46

1

[1-4]

26

11

1

8

2,36

0,09

Il ressort de ce tableau que les animaux grégaires (Cobe de Buffon, Bubale, phacochère, etc.) ont une population relativement jeune contrairement aux espèces solitaires (Céphalophe, Guib harnaché). Le grégarisme est important pour la multiplication de l'espèce car elle favorise le contact mâle et femelle lors des chaleurs.

Les femelles constituent le socle de renouvellement d'une population pérenne. Les effectifs du Cobe de Buffon reflètent le dynamisme de sa population : 41 mâles pour 100 femelles, ce qui est encourageant sur l'évolution positive future de la population. Le cas de l'Ourébi est plus incertain dans la mesure où le sexe ratio est de 1. Cependant, le fait que la structure de la population soit relativement jeune, témoigne probablement de l'insuffisance des observations et confirme le biais des résultats. Si les observations sont proches de la réalité, il s'en suit que l'Ourébi est également sur la voie de l'extinction. L'analyse est la même pour le Guib Harnaché, l'hippotrague, le céphalophe à flanc roux et le céphalophe de Grimm qui présentent une structure à dominance mâle.

Ces ratios corroborent une fois de plus les menaces d'extinction qui pèsent sur la faune du PNBé et de ses environs.

5.2. Nouvelle géométrie de la gestion participative et de préservation de la faune

5.2.1. De la gestion coercitive à la cogestion

Par le passé, les ZIC 1 et 4 étaient gérées en régie par le ministère en charge des forêts et de la faune, représenté sur le terrain par le conservateur du parc. Cette forme de gestion était coercitive et la relation entre conservateur et populations riveraines était conflictuelle. Les populations locales étaient exclues du processus et n'avaient que des obligations : conserver la faune et la biodiversité. Elles étaient les gardiens des ressources naturelles mais privées d'exploitation du moins sur le plan de la

législation forestière. Cette forme de gestion n'a fait que contribuer à la dégradation des ressources naturelles. L'Etat, pour pallier à cette situation, a pensé à une forme nouvelle de gestion des ressources qui associe les populations riveraines : l'Arrêté N°0580/A/MINEF/DFAP/SDF/SRC du 27 août 1998, a fait des ZIC 1 et 4 des zones d'essais de gestion participative ou cogestion9 de la faune entre les populations locales et l'administration forestière.

Ce processus de cogestion a démarré timidement en 1998 par la collecte des données bioécologiques et socio-économiques. Il prendra une ampleur particulière entre 2000 et 2002 avec la multiplication des contacts et des réunions explicatives sur le terrain, les négociations et l'apprentissage par l'action. Cependant cette cogestion est effective sur le terrain depuis 2004. Une structure ultra villageoise par ZIC a été créée, avec l'accord de tous les partenaires (Etat, population locale, SNV, WWF, ...) : le comité villageois de la faune (CVF) constitué de cinq représentants de chaque village des ZIC 1 et 4. L'ensemble des comités villageois de la faune de chaque ZIC (4 villages pour la ZIC 1 et 5 villages pour la ZIC 4) se regroupe au sein d'une union des comités villageois de la faune (UCVF). Les deux membres de l'UCVF siègent dans le comité de gestion (COZIC) avec les responsables du MINFOF. Ces structures locales de gestion ont élaboré un statut et un règlement intérieur et se sont légalisées comme association au niveau de l'administration. Une Assemblée Générale, tenue annuellement, est l'organe décisif de ces structures. Chacune des deux comprend un bureau exécutif de cinq membres nommés pour deux ans et qui gèrent quotidiennement l'association. L'UCVF est le premier responsable de la gestion des retombées financières de la chasse sportive pour les activités de développement dans la zone (50% des taxes de location et 50% des taxes d'abattage proposées). Elle devrait s'occuper également de la répartition de la rétrocession de la viande de chasse sportive, de l'accueil des chasseurs sportifs dans les ZIC, de la désignation des pisteurs et porteurs aux chasseurs sportifs de la zone. Dans le cadre de cette cogestion, en a résulté la subdivision de la ZIC 1 et 4 en trois zones distinctes : des zones de conservation de la biodiversité, des zones à usage multiple (ZUM) pour les activités agro-sylvo-pastorales des populations et des couloirs de transhumance pour réguler l'élevage dans la zone.

5.2.2. Faiblesses du système de cogestion mis en place

Malgré la bonne volonté des parties prenantes (MINFOF, populations locales, communautés et collectivités locales, SNV, WWF), le processus de négociation à été très perturbé par l'instabilité de certains membres de l'équipe chargée de son élaboration, ce qui a créé un climat de méfiance entre ces parties prenantes. Il y a eu baisse de motivation des populations rurales. Cette lenteur a installé le doute et les opposants en ont profité pour mettre en cause le travail en cours ou celui déjà abattu, de même que les résultats déjà obtenus. A cette lenteur, s'est ajoutée l'indisponibilité des agents du

9 Forme de gestion participative, où la population riveraine d'une zone de chasse protégée collabore avec le conservateur de cette zone afin de trouver une gestion durable des ressources naturelles de la zone qui est avantageuse pour tous les deux partenaires. (Stellingwerf, 2002)

Ministère des forêts et de la faune (MINFOF) à certains moments et même leur affectation. Hors, chaque fois qu'un maillon important (délégué provincial ou conservateur) est affecté le processus est ralenti. Du côté des paysans, il est à noter qu'ils mènent une vie sociale non planifiée (deuils, visites au chef...). Entre mai et janvier, consacrés aux travaux champêtres, la participation aux réunions est faible, ce qui engendre les mêmes effets que les affectations des agents du MINFOF à savoir une répétition des discussions et une réinstauration difficile de la confiance.

Les migrations continues dans la zone constituent également de véritables obstacles au processus de gestion mis en place. Chaque année, la zone connaît des migrations importantes favorisées le plus souvent par les chefs du village et la SODECOTON. De plus, chaque processus qui touche les intérêts de certains acteurs crée des oppositions. Les braconniers ne trouvent pas de sources de revenus complémentaires, les chefferies voient leurs taxes traditionnelles diminuer.

Après que les négociations soient achevées, l'application des mesures de cogestion convenues n'a pas été respectée. Les safaris ont été organisés sans impliquer les UCVF. La viande issue de cette chasse n'arrivait pas au niveau des UCVF comme prévu. En effet, cette proposition était utopique car le chasseur est libre de la gestion de son produit de chasse. Il s'agit là d'une limite de cette approche qui consiste à faire des propositions pour attirer la sympathie des populations, sans toutefois s'assurer de l'efficacité de ces propositions. La construction concrète du campement de Bel Elan n'avançait pas au rythme souhaité par la population. Après l'achèvement de sa construction et son équipement par la SNV, le campement a été pillé par la population. La coupe de bois augmentait sans que les UCVF ou le personnel du MINEF interviennent. Il y avait des permis illégaux de collecte de viande de chasse et de bois signés qui circulaient dans les ZIC 1 et 4. L'immigration dans la zone s'intensifiait encore et la plupart des corridors ont été violés. La case de santé prévue à Sakdjé n'a jamais été équipée, ce qui a contribué à nourrir davantage la résistance.

L'autre faiblesse de cette cogestion relève du cadre institutionnel et juridique en matière des forêts et de la faune au Cameroun. Certes les lois et les textes concernant la gestion participative des ressources naturelles sont très avancés. Toutefois, il est clair que la loi et les textes actuels n'ont pas prévu ou tenu compte de plusieurs aspects du terrain. D'un autre côté, ils sont basés sur la situation de la forêt humide au Sud du Cameroun. Les mesures de cogestion qui ont été convenues pendant le processus dans les ZIC 1 et 4 ont le plus souvent été négociées en tenant compte de ces aspects. Vu le statut expérimental du projet et du processus de cogestion dans les deux zones, certaines mesures ont introduit des règles non décrites dans les lois en vigueur (Partage des redevances des ZIC en régie). D'autres dépassent les limites légales en vigueur. Deux choses introduites sont la redevance des taxes de location et les taxes d'abattage aux UCVF. Or, la chasse communautaire proposée n'existe pas dans les textes et est strictement interdite dans les ZIC.

5.2.3. Echelle limite d'implication des communautés locales à la gestion des ZIC

Vu la persistance du braconnage malgré l'implication des communautés riveraines à la gestion des aires protégées, il est urgent que de nouvelles manières de penser se mettent en place. Des mesures

doivent être envisagées pour sortir les populations riveraines des aires protégées de la pauvreté. La satisfaction des besoins du futur est en effet secondaire pour une population non auto-suffisante sur le plan alimentaire.

Des alternatives au développement du braconnage doivent être envisagées pour améliorer l'autosuffisance alimentaire des populations locales. Il ne peut en effet y avoir de gestion saine de l'environnement tropical sans prise en compte des êtres humains qui en vivent et sans leur assurer un avenir décent (Bahuchet et al., 2000).

5.3. Développement d'alternatives au braconnage : promotion de l'élevage du gibier

Quel schéma durable proposer face au constat que même la participation des populations locales ne freine pas le braconnage ? La participation répond-t-elle à une demande ? Pour lutter contre le braconnage, il est impérieux de proposer aux populations locales des sources de revenus viables et durables qui peuvent compenser les revenus tirés de cette activité.

Au Cameroun, le ministère en charge des forêts et de la faune, celui en charge de l'élevage et les organisations non gouvernementales concernées admettent que la sauvegarde de la faune sauvage passe par le développement des alternatives au braconnage. L'aulacodiculture est notamment encouragée dans ce contexte. Elle est pratiquée aujourd'hui dans 9 régions sur dix (Engamba, 2007) et suscite un réel enthousiasme au sein des populations camerounaises, au vu de l'évolution des effectifs depuis 2002.

Tableau VI : Développement de l'aulacodiculture au Cameroun de 2002 à 2007

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Régions couvertes

2

5

8

9

9

9

Stations de multiplications de

géniteurs

2

2

3

4

5

5

Eleveurs formés

48

79

300

500

600

900

Eleveurs/formateurs formés

0

12

0

0

43

0

Cheptel total estimé

720

1200

4500

6000

7000

10800

Source : Engamba, 2007

L'aulacodiculture, si elle est bien gérée, peut en effet être économiquement plus rentable que l'élevage de beaucoup d'espèces conventionnelles. Le schéma ci-dessous indique la production possible d'une aulacodine par an.

Mois 1

Mois 6

Mois 12

4 kg 0,65 kg x 4 3 kg x 4 = 14 kg de viande environs par aulacodine par an, soit

un indice de productivité pondérale (kg de jeune par kg de femelle) d'environ 3,65 par an.

Le tableau ci-dessous donne des résultats déjà enregistrés au niveau de la ferme de démonstration de Wédbila au Burkina-Faso

Tableau VII : Bilan de flux d'une aulacodiculture au Burkina-Faso (Ferme de démonstration de Wédbila)

Paramètres de l'élevage

 

Aulacode

 

Nombre de géniteur départ

 

2 groupes, 1m:5f

Nombre de géniteur plafonné

 

30 groupes, 1m:5f

Taux de mortalité annuel adultes

 
 

5%

Taux de reproduction annuel

 
 

90%

Nombre de mise bas par femelle

 
 

1,8

Nombre moyen petits/portée

 
 

4

Taux de mortalité annuel des jeunes

 
 

10%

Prix achat/vente (Fcfa)

 

Prix géniteur

 

15

000

Prix viande

 

2

500

Salaire manoeuvre/soigneur

 

30000F/mois

Coût moyen/animal/jour (Fcfa)

 
 

8,9

Aspects financiers

 

Investissements an 1

 
 

Géniteurs

 

180

000

Bâtiments

 

1 300

000

Cages/enclos

 

2 135

000

Total

 

3 615

000

Bilan fonctionnement

 

An 1

 

-1 464

850

An 2

 

346

830

An 3

 

1 152

520

An 4

 

8 234

850

An 5

 

8 243

850

Bilan fonctionnement 5 ans

 

16 513

200

 

Solde Annuel

 

An 1

 

-5 079

850

An 2

 

346

830

An 3

 

1 152

520

An 4

 

8 234

850

An 5

 

8 243

850

Solde cumulé sur 5 ans

 

12 898

200

TRI sur 5 premières années

 

47,7%

Source : ( http://www.bf.refer.org/faune/chapitre6.html#aulacodiculture)

La motivation des populations pour un tel élevage ne peut découler que d'un exemple réussi initié par les ONG de conservation comme le WWF et la SNV dans la région car le succès constitue une source de motivation pour les populations. En créant une ferme de démonstration, ils réduiront le désoeuvrement des jeunes et par conséquent, réduiront la pression sur les ressources car cette pression ne naît que du besoin de survie. Les projets de développement devraient par ailleurs financer en guise d'encouragement les jeunes qui aimeraient se lancer dans une telle activité en leur apportant une assistance technique et en leur octroyant des géniteurs au début.

5.4. Transformation d'une des ZIC en game ranching pour une rentabilité plus accrue

En plus de l'élevage d'aulacodes, des espèces menacées d'extinction peuvent être élevées dans la Bénoué comme c'est fait dans beaucoup de régions au monde. Le rhinocéros aujourd'hui disparu pourrait être réintroduit dans une ZIC de l'unité technique opérationnelle (UTO) de la Bénoué, et mieux contrôlé afin de favoriser sa reproduction. Pour ce faire, une population de rhinocéros doit impérativement être importée là où il y en a (Botswana, Afrique du Sud, Namibie, Kenya et Tanzanie). Cette population sera multipliée et suivie en captivité d'abord puis progressivement relâchée dans le parc et les ZIC. Cette réintroduction est d'autant plus réaliste que la zone de l'UTO de la Bénoué constitue l'aire de répartition naturelle du rhinocéros et que ses conditions de reproduction sont aujourd'hui maîtrisées. Les enjeux multiples de réintroduction d'une telle espèce justifient son élevage. Le rhinocéros fait partie des « Big 5 »10 africains et ses trophées sont recherchés. Le développement du game ranching pourrait ainsi contribuer de façon significative au développement du tourisme de vision.

5.5. Obstacles possibles à l'élevage non conventionnel et au game ranching dans la zone

Dans les ZIC 1 et 4, les populations ont pendant longtemps été habituées à la consommation de la viande de gibier. Elles sont convaincues que la faune sauvage sera toujours là et que les vastes aires protégées qui les entourent disposent des potentialités illimitées. La principale interrogation est celle de savoir si ces populations auront un intérêt à réduire le temps alloué aux activités agricoles pour se consacrer à l'élevage du gibier qui nécessite des moyens financiers assez important, alors que la nature leur offre déjà cette ressource. L'élevage des petits ruminants pourrait ne pas intéresser le braconnier, car il préfère le gros gibier qui lui donne beaucoup de viande. Cependant, pour une population qui vit au seuil de la pauvreté comme celle riveraines de la Bénoué, la rentabilité financière de l'activité, si elle est substantielle, pourrait être une motivation. Les ONG et les autres partenaires ne doivent pas

10 Expression utilisée dans le passé par les chasseurs pour indiquer les animaux les plus dangereux d'Afrique (Lion, Léopard, Eléphant, Rhinocéros et Buffle). Aujourd'hui le terme indique la faune sauvage et passionnante qu'on puisse voir pendant un safari en Afrique

seulement les aider à élever, mais aussi à écouler les produits issus de cet élevage dans les grands centres urbains.

Enfin, la réintroduction du rhinocéros n'offre pas de garantie pour sa conservation. Vu les enjeux multiples pour cet animal et la demande énorme de ses cornes, le rhinocéros élevé tout d'abord en enclos pourrait être braconné après sa libération dans le parc si la surveillance est inadéquate.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams