III.9. L'INNOVATION ET L'ENTREPRENEURIAT EN TERRITOIRE DE
LUBERO
L'innovation constitue le fondement de l'entrepreneuriat,
puisque celle-ci suppose des idées nouvelles pour offrir ou produire de
nouveaux biens ou services, ou encore pour réorganiser l'entreprise.
Rappelons que Joseph A. Schumpeter (1939) a défini
l'innovation comme l'établissement d'une nouvelle fonction de
production. Cette définition a incluse cinq cas spécifiques qui
mènent à une nouvelle fonction de production qui inclut : la
présentation d'un nouveau produit, la présentation d'une nouvelle
méthode de production, l'ouverture d'un nouveau marché, la
conquête d'une nouvelle source d'approvisionnement de nouvelles
matières , la mise en oeuvre d'une nouvelle organisation de toute une
industrie.
Donc pour lui l'innovation correspond à une
nouveauté et est plus adaptée à l'industrie.
L'entrepreneur en territoire de Lubero n'est certainement pas
un innovateur au sens schumpétérien du terme. Nous avons
signalé que l'agriculture et le petit commerce sont les deux
activités les plus entreprises en territoire de Lubero. Or, on constate
que l'innovateur ou l'entrepreneur schumpétérien est surtout un
entrepreneur industriel. De même, les activités comme le commerce
ne nécessitent pas une transformation, on achète pour revendre.
Il n'y a pas moyen avec le commerce d'achat-revente de présenter une
nouvelle méthode de production par exemple, car on ne produit rien. Les
activités, en Lubero sont plus de l'imitation que de l'innovation. On
fait comme son voisin, comme son frère, ses amis, etc.
Cependant, malgré cette absence d'innovation
schumpétérienne, on assiste dans ce milieu à une
construction de « l'innovation sociale » et
à une « innovation entrepreneuriale ».
L'innovation sociale consiste à la création de
méthodes de solidarité, d'entraide, d'association. Le recours
à la famille ou aux amis est un domaine dominant en Lubero. Ces derniers
interviennent et apportent du soutien à l'entrepreneur, des capitaux
nécessaires, des aides financières, matérielles et
morales ; un soutien psychologique. Ces différentes pratiques bien
sûres informelles, sont considérées ici comme une
innovation sociale. Ce sont des pratiques qui n'existent pas dans les
entreprises capitalistes.
L'innovation entrepreneuriale quant à elle est
représentée par la création de nouvelles micros et petites
entreprises qui ne présentent pas les caractéristiques des
entreprises capitalistes qui elles sont formelles. Des entreprises qui
prolifèrent partout, qui n'oeuvrent parfois pas dans des locaux, des
unités à petite échelle où le salariat est
limité, le capital faible, une technologie obsolète (forge), une
gestion quasi-inexistante, une irrégularité du travail... telles
sont quelques innovations adaptées au milieu. Elles n'exigent pas
parfois une capacité intellectuelle ou mieux une formation quelconque
des chimistes, des mécaniciens, d'électriciens, des
gestionnaires, etc). Or il s'agit là des innovations différentes
de celles présentées par Joseph A. Schumpeter. Ce sont des
innovations de contingence. C'est-à-dire adaptées aux
problèmes de Lubero surtout celui de la pauvreté.
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